JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 14 mai 1998
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.)): Nous reprenons nos travaux. Nous entendons maintenant Mme Catherine Kane, avocate, Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice. Nous discutons de la question des victimes. Soyez la bienvenue.
Mme Catherine Kane (avocate, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): D'après ce que j'ai compris, vous en êtes à la période des questions. Est-ce que je pourrais prendre deux minutes pour faire quelques commentaires à la suite des questions qui ont été adressées à Susanne Dahlin?
Le vice-président (M. Paul Forseth): Je vous en prie.
Mme Catherine Kane: M. Bellehumeur a soulevé la question de l'indemnisation des victimes d'actes criminels. J'ai pensé qu'il serait peut-être bon de vous donner quelques renseignements généraux sur le programme fédéral de partage des coûts pour l'indemnisation des victimes.
Il s'agit du programme que le gouvernement fédéral a commencé à financer en 1973, à l'origine pour encourager toutes les provinces à mettre en oeuvre des programmes semblables. L'accord de partage des coûts établit les normes minimales que tous les programmes doivent respecter. Au fil des ans, toutes les provinces ont adopté des lois sur l'indemnisation des victimes, bien que les éléments d'admissibilité et de dommages indemnisables varient de l'une à l'autre.
Comme vous l'avez entendu dire ici, à l'instar du Québec et du Manitoba, la Colombie-Britannique offrait un programme très généreux. Le dernier accord de partage des coûts a été adopté en 1987, mais il ne s'étendait que sur trois ans et il était bien entendu à l'époque qu'au bout des trois ans, on y mettrait fin.
À cette époque, le gouvernement avait entrepris une révision de divers programmes et examinait le rôle que le gouvernement fédéral devait jouer dans la prestation de certains services. Comme on nous l'a dit, les questions de compétence fédérale et de compétence provinciale ont suscité bien des discussions.
L'indemnisation des victimes d'actes criminels était certainement une compétence provinciale. Il était très difficile pour le ministère de la Justice d'obtenir des crédits pour financer le programme d'indemnisation sur une base permanente parce qu'on a demandé quels motifs justifiaient la participation financière du gouvernement fédéral dans ce domaine.
L'accord de partage des coûts de 1987 prévoyait 25 cents par habitant de la province ou 50 000 personnes, selon le chiffre le plus élevé, mais ne devait pas dépasser 50 p. 100 du total des indemnisations versées. Durant les trois années de l'accord, le gouvernement fédéral y a consacré environ 9,6 millions de dollars. Même avec cette somme, le gouvernement fédéral n'a contribué qu'environ 15 p. 100 du total des indemnités versées au Canada. En Colombie-Britannique, par exemple,—on remonte ici à 1992—la part du gouvernement fédéral n'était que de 7 p. 100. Les provinces ont réussi à offrir ces programmes d'indemnisation essentiellement sans une très grande participation financière du gouvernement fédéral.
L'accord de partage des coûts a pris fin en 1992. Il a été prolongé d'un an. À l'époque, nous espérions qu'une partie des amendes fédérales supplémentaires pour les victimes pourrait servir à suppléer aux ressources qui n'étaient pas accordées aux provinces en matière d'indemnisation.
En outre, un fonds d'aide aux victimes d'actes criminels a été créé, au taux de 10 cents par habitant, pour une période limitée également, pour aider les provinces à élaborer des programmes et des services à l'intention des victimes, programmes et services autres que les programmes d'indemnisation et jusqu'à ce que l'amende supplémentaire accordée aux victimes leur profite effectivement.
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Tous ces programmes ont pris fin en 1992 et depuis, le
gouvernement fédéral ne consacre plus aucun crédit au partage des
coûts des programmes.
M. Bellehumeur a demandé si l'on ne devrait pas revoir ces programmes avant d'envisager de dépenser d'autre argent. Pour l'instant, il n'y a pas d'argent, il n'y en a plus depuis 1992. Il a également parlé d'un programme fédéral à l'intention des victimes.
Je ne crois pas qu'il soit question pour l'instant d'un programme offrant des sommes considérables. Il s'agit d'un programme très modeste qui constituerait un programme complémentaire du gouvernement fédéral. Voilà les options que nous explorons actuellement.
Il ne serait pas question d'offrir des services ou des programmes comme, par exemple, ceux qu'a décrits Susanne en Colombie-Britannique parce que ces programmes existent dans toutes les provinces. Si nous réussissions à trouver de l'argent pour de nouveaux programmes d'aide aux victimes, on voudrait le consacrer à des services de première ligne destinés aux victimes et non pas à créer une grosse bureaucratie ou faire double emploi avec des services existants.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Vous avez la parole, madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): J'ai pris connaissance des différents modèles qui existent dans tout le pays, modèles que vous nous avez fournis, ou alors le greffier.
Je viens du Québec où, à mon avis, on offre un très bon programme d'indemnisation; on s'y assure également que la victime fait partie de tout le processus; la question qui me préoccupe, après l'exposé de la Colombie-Britannique, c'est l'intégration de la victime à l'étape de la libération conditionnelle. C'est à cette étape-là, selon moi, qu'on ne fait pas beaucoup d'efforts pour s'assurer que les droits des victimes sont pris en compte à un niveau supérieur, sauf peut-être pour dire que le délinquant a subi un traitement, qu'il a fait sa réadaptation.
Je ne sais pas comment on pourrait faire davantage. Demander à la victime d'assister aux audiences de la Commission nationale des libérations conditionnelles peut être une façon de faire, bien que certaines décident de ne pas le faire parce qu'elles sont toujours traumatisées par toute l'expérience qu'elles ont vécue.
Par ailleurs, si la Commission nationale des libérations conditionnelles décide d'accorder une semi-liberté ou même une liberté surveillée au délinquant et si moi j'étais la victime, dans quelle mesure est-ce que je me sentirais en sécurité? Dans quelle mesure pouvons-nous, en tant que gouvernement, faire davantage que ce que nous faisons actuellement—là encore j'utilise le Québec en exemple—pour nous assurer que la victime se sente beaucoup plus en sécurité?
J'ai un exemple à vous donner. Nous avons tous reçu copie de la lettre d'une mère dont la fille a été violée et brûlée. Andrew avait un double de la lettre, mais il est parti. La Commission nationale des libérations conditionnelles songe à accorder à ce délinquant, qui est un récidiviste, une libération non surveillée apparemment. La décision n'a pas encore été prise, mais on en discute.
La mère nous a signifié, en tant que membres du comité de la justice, de tenir compte de situations comme celle-là parce qu'elle ne se sent pas en sécurité même si ce n'est pas elle la victime. Elle avait vécu avec le délinquant et il a assassiné sa fille.
Peut-être avez-vous des suggestions à nous faire. Je trouve qu'il existe une zone floue dans la loi. Comment peut-on s'assurer que la victime ou la famille ou les parents de la victime sont tous au courant que le délinquant a été mis en liberté, plus particulièrement s'il est incarcéré dans un pénitencier qui n'est pas nécessairement dans la même province?
Parfois, le délinquant en profite pour traverser les frontières. Avant que n'intervienne tout le système policier ou le système de libération conditionnelle, le délinquant a disparu dans le brouillard. Et il risque de se présenter à la porte de la victime.
Je n'ai pas de réponse, madame Kane, mais c'est le genre de lettres que nous, parlementaires, recevons aussi. Comment garantir la sécurité du public ou celle de la famille de la victime ou même des enfants de la victime?
Mme Catherine Kane: Vous soulevez là un sujet de grande inquiétude et je ne me sens pas qualifiée pour y répondre non plus parce que la libération conditionnelle est du ressort du ministère du Solliciteur général.
• 1035
Mais je sais que ce ministère a consulté des groupes de
victimes pour tenter de les faire davantage participer au processus
de libération conditionnelle. Actuellement, elles peuvent présenter
des documents écrits, qui sont divulgués au délinquant, cependant.
Elles ont également la possibilité, en général sur demande,
d'assister à titre d'observateur aux audiences de libération
conditionnelle.
Bien sûr, la sécurité du public est de toute première importance dans les décisions de mise en liberté, mais le fait d'informer les victimes qu'un individu qu'elle ne devrait pas s'attendre à rencontrer dans la rue parce qu'elle croit qu'il est encore en prison quelque part est libéré est un gros problème à régler. C'est là une question que nous pouvons explorer je l'espère, avec nos collègues à la Commission nationale des libérations conditionnelles pour voir si l'on pourrait élaborer un système perfectionné d'information des victimes.
Aux États-Unis, par exemple, il existe un système fédéral d'avis aux victimes. Ce n'est pas nécessairement le type de victimes auquel on s'attend. Il s'agit de victimes de vols de banque, de crimes inter-États ou autres qui, là-bas, sont des victimes relevant du gouvernement fédéral.
Les États-Unis ont adopté ce qu'ils appellent un système à toute épreuve d'avis aux victimes. Ils utilisent un CD-ROM. Lors du premier contact avec la police, on rassemble toute une série de renseignements sur la victime. Au fur et à mesure que le délinquant progresse dans le système, le CD-ROM le suit. Chaque organisme y ajoute des renseignements. On a alors les renseignements de base sur la victime afin de pouvoir l'aviser de l'état de l'enquête, du procès, de la condamnation, de la date de mise en liberté, etc.
C'est un système que l'on pourrait examiner pour voir si on pourrait recueillir des renseignements du début à la fin afin que les victimes sachent où en est l'affaire, quand elles peuvent s'attendre à rencontrer la personne dans la rue, et de quelles options elles disposent pour assurer leur propre protection. Si elles craignent toujours l'agresseur, elles sauraient par exemple qui contacter immédiatement et si elles appelaient le 911, ce serait pris très au sérieux; on saurait que quelqu'un traque peut- être la victime, ou qu'elle craint que cela se produise.
M. Chuck Cadman (Surrey—Nord, Réf.): Je vais prendre mon autre rôle. Je veux parler de l'importance pour les victimes d'être autorisées à comparaître en personne devant la Commission nationale des libérations conditionnelles pour y faire une déclaration orale.
C'est bien beau de recevoir ces lettres. On le comprend. C'est bien beau aussi que la Commission nationale des libérations conditionnelles les reçoive, ces lettres. Cependant, la situation est tout à fait différente lorsqu'une victime est là en personne devant la Commission et qu'on peut ressentir la peur qu'elle vit. Cela permettrait à la Commission de prendre ce genre de décisions.
On peut faire toutes les lois qu'on veut, mais d'après moi, l'élément clé est que la Commission nationale des libérations conditionnelles doit être sensibilisée aux inquiétudes de la victime. C'est là une des bonnes raisons qui justifient une déclaration de vive voix de la victime: elle fait une forte impression.
Permettez-moi de vous donner un exemple que je connais personnellement. Ça concerne deux femmes qui ont été assassinées en Colombie-Britannique. Leurs familles sont maintenant devenues de bons amis à nous. Elles ont été avisées que le délinquant devait être mis en liberté dans le cadre d'un programme de placement à l'extérieur, programme offert par le centre correctionnel communautaire Sumas à Abbotsford.
Dès qu'elles ont été prévenues, elles se sont tout de suite rendu compte que ça posait un problème. Elles ont immédiatement téléphoné à la Commission nationale des libérations conditionnelles et ont dit: «Vous ne pouvez pas faire cela, parce que les enfants de Lorrie vivaient à Abbotsford et que l'un d'entre eux a été témoin du meurtre.» À son crédit, la Commission a arrêté les choses sur-le-champ. Le délinquant n'était pas très heureux de la décision, mais je dis simplement que le système peut parfois être efficace.
Je reviens à la déclaration de vive voix de la victime. Je crois que c'est un endroit où la question peut être examinée.
Mme Eleni Bakopanos: À la condition que la victime veuille faire une telle déclaration.
M. Chuck Cadman: Tout à fait.
Mme Eleni Bakopanos: Beaucoup de victimes sont totalement traumatisées et ne peuvent faire de déclaration. En un sens, la loi ne peut pas les y obliger.
M. Chuck Cadman: Non, et je suis d'accord que la victime doit demander l'information. On ne peut pas l'y forcer.
Mme Eleni Bakopanos: Je voulais aussi poser une question, parce qu'elle a également été soulevée par le représentant de la Colombie-Britannique, au sujet de la surveillance de la violence familiale et des cas de harcèlement.
Il s'agit d'un nouveau programme qui est aussi utilisé au Québec. Il a pas mal réussi à informer dans la plupart des cas la femme si son ex-mari ou la personne avec qui elle vivait est en liberté sous caution ou s'il a respecté ses obligations et payé sa dette à la société.
Là encore, c'est un problème de coûts, comme l'a souligné M. Bellehumeur.
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Croyez-vous que nous devrions financer ce genre de programmes,
peut-être pas comme programme d'aide aux victimes, mais comme
programme de prévention de la criminalité? On pourrait utiliser une
partie de l'argent alloué à la prévention du crime pour faciliter
la création d'un plus grand nombre de programmes de ce genre. Parce
qu'ils semblent très efficaces. Le représentant de la Colombie-
Britannique a dit la même chose. Je sais qu'au Québec, la police le
considère vraiment comme un très bon outil de travail.
Mme Catherine Kane: Je pense que ça vaut la peine d'examiner les choses. Comme vous le savez, la stratégie de prévention du crime renferme un critère de financement. Mais ça inclut assurément la prévention du crime et la revictimisation. J'ai discuté avec mes collègues de la prévention du crime de la nécessité de maintenir une liaison constante pour s'assurer que leurs programmes de prévention du crime sont en harmonie avec un accroissement de la protection des victimes, plus particulièrement pour éviter la revictimisation. Personne ne veut être victimisé, ne serait-ce qu'une fois. Malheureusement, il semble y avoir de plus en plus de cas de revictimisation dans certains crimes. Ce serait une très bonne idée.
Pour revenir à votre question de tout à l'heure sur la libération conditionnelle, selon moi, il faut aussi garder à l'esprit que de nombreuses victimes ne saisissent pas, lorsqu'un délinquant est condamné, ce que signifie réellement la peine qu'on lui impose. Elles sont fort surprises d'apprendre que le délinquant est maintenant admissible à un type quelconque de mise en liberté, ou qu'il va être libéré d'office.
Des collègues du ministère du Solliciteur général ont conçu une brochure sur le calcul de la peine. Au départ, ils l'ont fait pour les juges. La version pour les juges est très compliquée. Ils travaillent maintenant à une version pour les autres, qui est encore bien compliquée.
Je pense que ce serait une très bonne source d'information que devraient distribuer les groupes de services aux victimes d'actes criminels afin que les gens sachent à quoi s'en tenir. Alors, on pourrait consulter la brochure, et se rendre compte que même si le délinquant s'est vu imposer une peine de six ans, il peut être admissible à une libération à la fin de deux ans ou de trois ans, peu importe et pourquoi. Les victimes sauraient au moins ce à quoi elles doivent s'attendre. De même, dans les crimes passibles de peines d'emprisonnement à vie, on saurait ce que signifie vraiment une peine d'emprisonnement à vie.
Tout cela nous ramène à la nécessité de donner aux victimes des renseignements plus complets sur le système de justice pénale en général et sur leur affaire en particulier.
Mme Eleni Bakopanos: Je pense que c'est une excellente idée.
Le vice-président (M. Paul Forseth): D'autres questions?
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): J'ai posé une série de questions à Mme Dahlin concernant les efforts encore à faire pour déterminer dans quelle mesure les victimes pourraient ou devraient être impliquées dans les étapes décisionnelles lors d'un procès au pénal.
Vous étiez là lorsque j'ai posé les questions.
Votre réponse est-elle semblable à celle qu'on m'a donnée? Ou estimez-vous que le rôle des victimes pourrait être accru à certaines étapes du processus décisionnel lors d'un procès au pénal?
Mme Catherine Kane: Votre question était la suivante: La participation des victimes devrait-elle être obligatoire? J'entrevois des difficultés avec ce genre de système.
Certaines victimes, bien sûr, veulent être impliquées étroitement dans toutes les décisions; d'autres non. Cela dépend souvent de la nature du crime. Cela implique également le rôle de la Couronne. Elle a des devoirs dans une cour de justice. Elle doit évaluer la preuve qui sera admissible, voir s'il y a une possibilité raisonnable de condamnation, par exemple, pour une mise en accusation précise. Toute une gamme de facteurs doivent être pris en compte.
Souvent, la victime est très mécontente de l'accusation que porte la Couronne, mais souvent, ce mécontentement pourrait être atténué si on lui expliquait mieux les choses. Il faut expliquer, et non pas nécessairement consulter, parce que quand on consulte, on laisse entendre à la victime qu'on va tenir compte de son opinion.
Mais si on pouvait dire: «Voici les facteurs qui entrent en compte dans la décision de mise en accusation», décider s'il s'agit d'une accusation sur déclaration sommaire de culpabilité ou d'une accusation criminelle, cela aiderait considérablement la victime à se sentir beaucoup plus impliquée dans le processus.
Je pense que beaucoup de procureurs de la Couronne aimeraient procéder ainsi, mais ils ont une charge de travail énorme, si bien que souvent, c'est à un intermédiaire, c'est au service offert aux victimes par la Couronne de leur donner cette explication. Le service pourrait être l'agent de liaison entre la Couronne et la victime lorsque la Couronne ne peut le faire personnellement.
Certes, dans les infractions graves, me semble-t-il, la Couronne fait maintenant beaucoup d'efforts pour expliquer le plus possible à la victime tous les aspects, pas seulement le chef d'accusation, mais certaines procédures qui interviennent dans le cadre du procès. Ainsi, quel est le but de l'enquête préliminaire? Pourquoi a-t-elle donné tel résultat? Diverses motions sont soumises. La Couronne tient à donner cette information parce que, certainement, si la victime doit témoigner, on a besoin de son témoignage et il faut que la victime se sente à l'aise pour le donner.
C'est là que les services aux victimes qui témoignent entrent vraiment en ligne de compte. Plus on pourra améliorer ces services, mieux ce sera pour la victime et pour le système de justice pénale.
M. John McKay: Croyez-vous que notre comité pourrait faire quelque chose de mieux que, par exemple, une déclaration neutre souhaitant que la Couronne implique davantage les victimes à certaines étapes décisionnelles du procès?
Mme Catherine Kane: Il est difficile d'établir une loi sur la façon dont la Couronne devrait se comporter.
M. John McKay: C'est exact.
Mme Catherine Kane: Ce que je veux dire, c'est que certains points pourraient être améliorés, comme la déclaration de la victime. On pourrait avoir une loi plus rigoureuse sur la déclaration des victimes, parce qu'actuellement, c'est à peu près le seul véhicule qui permette officiellement de faire intervenir la victime au moment de l'établissement de la peine. Certains ont dit que ce n'est pas tellement utile d'intégrer ça au Code si les gens ne sont pas informés que la disposition existe dans le Code. Alors peut-être pourrions-nous voir si on ne devrait pas obliger le tribunal ou la Couronne à informer la victime de la possibilité de faire une déclaration personnelle.
M. John McKay: Vous estimez donc que la déclaration de la victime est une question que le comité pourrait explorer à bon escient pour en faire un document de plus de poids, disant non pas simplement «ce qui m'est arrivé» mais quelque chose comme «j'ai été ou n'ai pas été impliquée au moment du processus décisionnel sur la façon dont le procès a été mené».
Mme Catherine Kane: Non, je n'irais pas jusque-là.
M. John McKay: Ah non?
Mme Catherine Kane: Non, je crois que la déclaration de la victime ne peut, légitimement, consister qu'à voir quel impact le crime a sur elle. Mais c'est en soi une possibilité pour le tribunal de bien comprendre les effets de tout le processus sur la victime; la déclaration pourrait aussi inclure l'impact du procès sur la victime...
M. John McKay: Oui.
Mme Catherine Kane: ... mais elle ne consiste pas, pour la victime, à dire qu'elle n'a pas été consultée sur les chefs d'accusations qui ont été portées au début. C'est une question qu'il faut soulever auprès du procureur de la Couronne de l'endroit, si l'on estime ne pas avoir été traité conformément à...
Par exemple, si l'on pouvait améliorer l'Énoncé des principes de justice fondamentaux pour les victimes d'actes criminels et en faire davantage qu'un texte parmi d'autres.
M. John McKay: Incluriez-vous toutes les possibilités offertes aux victimes de discuter par écrit de la façon dont elles ont été traitées par le système de justice pénale?
Mme Catherine Kane: À votre avis, à qui ces renseignements devraient-ils être donnés?
M. John McKay: Ce que je suis en train de faire, c'est de cerner le contenu de votre déclaration de la victime. Pour l'instant, cette déclaration est limitée à l'impact du crime sur la personne au moment de l'établissement de la peine.
Mme Catherine Kane: C'est exact.
M. John McKay: En réalité, la déclaration ne sert à rien d'autre, et M. Cadman voudrait qu'elle serve aussi au moment de la mise en liberté.
Mais, à certains égards, on n'y parle pas du tout de la façon dont la victime estime avoir été traitée par la police, par la Couronne, par le processus administratif, de sa possibilité de demander où en sont les choses. En entendant les témoins, je perçois un certain mécontentement à propos de la façon dont la victime est traitée dans tout cela. Est-ce que c'est là une question que notre comité devrait examiner plus attentivement?
Mme Catherine Kane: Certains éléments de cette situation sont réglés par les lois provinciales comme c'est le cas en Colombie- Britannique, on l'a vu. En outre, un projet de loi vient d'être déposé au Manitoba. L'Alberta a prévu un processus pour ce que j'appellerai l'établissement d'un «mécanisme de plaintes» auquel peuvent recourir ceux qui estiment ne pas avoir été traités conformément aux principes de leur loi provinciale. En général, cela comprend la façon dont la Couronne devrait traiter la victime, les renseignements qui auraient dû lui être communiqués par la police ou la Couronne, les renseignements sur la date de mise en liberté, etc. La loi provinciale décrit un processus où l'on indique à qui adresser ces questions et quelle réponse on devrait obtenir.
Par exemple, en Alberta, le directeur peut faire enquête sur ce qui s'est passé. Si cela concerne le comportement ou les pratiques de la Couronne, la question est d'abord renvoyée au procureur de la Couronne de la province et, si l'on doit s'adresser à un niveau supérieur, au sous-procureur général.
M. John McKay: Est-ce qu'il serait utile que notre comité tente de normaliser le processus pour qu'on ait des déclarations uniformes dans tout le pays?
Mme Catherine Kane: Je pense que vous pourriez recommander que cela soit un système à examiner par les provinces, mais je ne sais pas comment vous pourriez y arriver au niveau fédéral parce qu'il y a tellement de choses là-dedans qui concernent l'administration de la justice et qui sont de compétence provinciale.
M. John McKay: Mais ça nous donne tout de même un repère, une petite balise, pour que les collectivités et les systèmes provinciaux de justice puissent respecter certaines normes.
Mme Catherine Kane: Oui. Nous avons, comme vous le savez, l'Énoncé de principes de justice fondamentaux pour les victimes d'actes criminels qui dit que les victimes doivent être traitées avec respect, etc.
M. John McKay: Je sais, mais avec tout le respect que je vous dois, je dois dire que ce sont là des notions en l'air.
Mme Catherine Kane: C'est très vague, oui. Mais on pourrait reprendre le texte pour en faire un énoncé de politique ou un guide de politique à l'intention des assemblées législatives et je crois que certaines d'entre elles se sont déjà attelées à la tâche d'assigner des responsabilités aux membres du personnel du système de justice pénale dans la façon dont ils traitent la victime et...
M. John McKay: La Colombie-Britannique me semble assez avancée dans ce domaine.
Mme Catherine Kane: Oui, c'est un fait.
M. John McKay: Je trouve cette question un peu floue, dirions- nous, et j'essaie de trouver des domaines où notre comité pourrait faire des recommandations utiles, explorer sérieusement la question et ne pas s'en tenir à des documents qui se laissent bien lire mais qui ne servent pas à grand-chose aux gens.
Mme Catherine Kane: Je comprends votre préoccupation, et c'est une chose que nous cherchons à régler, c'est-à-dire quel est le rôle du gouvernement fédéral compte tenu du partage des compétences. Nous ne voulons certainement pas faire adopter une loi qui soit tout à fait inutile.
M. John McKay: Le point suivant porte sur votre témoignage initial de ce matin concernant l'indemnisation. En général, il existe des programmes d'indemnisation provinciaux auxquels le gouvernement fédéral contribue fort peu. C'est ainsi que je comprends le résumé de votre témoignage.
Y a-t-il une bonne raison d'établir un programme d'indemnisation fédéral, soit en parallèle, soit en remplacement des programmes provinciaux?
Mme Catherine Kane: Actuellement, les programmes provinciaux indemnisent les personnes qui sont victimisées par des infractions au Code criminel.
M. John McKay: Oui.
Mme Catherine Kane: Si l'on devait envisager la création d'un programme d'indemnisation fédéral, j'imagine que les provinces diraient qu'elles ne veulent plus s'en occuper parce qu'elles économiseraient alors des sommes considérables.
M. John McKay: Très bien. Mais, en principe, y a-t-il une meilleure raison qui justifie l'implantation d'un programme fédéral plutôt que provincial?
Mme Catherine Kane: Je ne le crois pas. D'abord, je ne pense pas que nous puissions trouver les fonds suffisants. On nous a dit que le programme de la Colombie-Britannique coûte 20 millions de dollars, celui du Québec un peu plus, je crois. L'Ontario a dépensé environ 10 millions de dollars récemment, et le Manitoba la même chose. Ce sont des sommes énormes.
À moins d'avoir un programme très ciblé en faveur des victimes, pour les cas où rien n'aurait servi, où elles n'auraient droit à rien d'autre, ou bien dont les versements seraient basés sur les besoins ou quelque chose de ce genre, il faudrait alors des sommes énormes qui seraient mieux utilisées par les services offerts aux victimes d'actes criminels plutôt que de leur mettre de l'argent dans les poches.
C'était certainement là une des considérations lorsque l'entente sur le partage des coûts a été révisée: que l'on pourrait utiliser l'argent de façon plus efficace. De nombreuses provinces ont déjà établi la nécessité d'améliorer les services plutôt que de verser une indemnisation nominale à un grand nombre de victimes.
L'autre élément serait de savoir si l'on peut justifier cet investissement et le considérer comme une utilisation appropriée du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, compte tenu que la question relève de l'administration de la justice.
M. John McKay: En Ontario, je crois qu'on verse des indemnités de 5 000 et de 9 000 dollars. Ce n'est pas beaucoup. Je pense que ce sont les chiffres. Et je suppose que les autres provinces n'ont, elles non plus, pas beaucoup d'argent à dépenser...
Mme Catherine Kane: Non, pas beaucoup. Mais il existe pas mal de différences entre les programmes; certaines accordent des sommes pour la peine et la souffrance, d'autres pas. Certaines font des paiements périodiques répartis sur plusieurs années alors que d'autres versent une somme forfaitaire que la victime utilise à sa guise, et ça s'arrête là.
M. John McKay: Y a-t-il des points que l'on pourrait étudier concernant le versement d'une indemnité significative aux victimes dont l'agresseur a des actifs accessibles? Y a-t-il à cela des obstacles dans la loi qui pourraient être examinés?
M. Forseth a exploré la question de la réhabilitation des faillis. Je songeais à l'idée de discuter avec la Couronne des priorités concernant les créanciers garantis ou non garantis, des choses de ce genre. Est-ce que le comité pourrait réfléchir à une question qui pourrait être utile dans ce domaine?
Mme Catherine Kane: Essentiellement, on se tourne vers les programmes d'indemnisation lorsque la victime d'un crime ne veut pas utiliser ses recours au civil.
• 1055
Si un délinquant a des actifs, le meilleur conseil que l'on
puisse donner à la victime est d'intenter contre lui des poursuites
au civil et d'obtenir un jugement. Quand vous parlez d'une
indemnité significative, nous aurions une sorte de référence dans
les montants qu'un tribunal assignerait pour les dommages-intérêts,
la perte de revenu, la peine et la souffrance actuelles et futures.
On pourrait obtenir un jugement de grande portée.
Quant à savoir si cela est exécutoire, quant à connaître la frustration d'une victime qui essaie de faire appliquer cela, c'est une autre question. La victime aurait à sa disposition tout l'arsenal des recours civils.
M. John McKay: Serait-il bon de voir si on pourrait fournir à la victime un conseiller juridique pour intenter cette poursuite?
Mme Catherine Kane: Ce serait certainement utile à de nombreuses victimes qui, autrement, ne pourraient se permettre un avocat pour utiliser leur recours au civil. J'imagine que d'aucuns soutiendraient avoir droit à un conseiller juridique même s'ils ne sont pas victimisés par le crime, mais estiment l'être.
M. John McKay: Vous ouvrez peut-être ici la porte à toute une autre série de questions. Si je suis victime, si l'affaire est réglée au pénal et que je m'adresse au bureau de l'indemnisation, j'ai alors le choix suivant: ou bien j'accepte les 5 000 dollars, ou bien j'intente une poursuite. Je demande à ma conjointe comment nous allons nous y prendre puisque l'avance sur les honoraires d'un avocat est de 10 000 dollars. Ce n'est pas un vrai choix. À certains égards, tout ce que nous faisons, c'est d'insulter la victime une fois de plus.
Donc, abstraction faite de la question de savoir ce à quoi nous nous engagerions en discutant de cela, est-ce que ça vaut la peine d'examiner les questions?
Mme Catherine Kane: Compte tenu du fait que la fourniture de l'aide juridique, si c'est analogue, est elle aussi essentiellement de compétence provinciale, nous suggérons que les provinces paient le conseiller juridique à moins que nous puissions trouver de l'argent au niveau fédéral pour un programme de partage de coûts ou de contribution à ce genre de fonds.
Je pense que les victimes conviendraient qu'il vaut la peine d'explorer la question. Elles voudraient probablement aussi un conseiller juridique pour diverses autres raisons, et pas seulement pour leur recours au civil, car nombre d'entre elles estiment que dans le processus pénal, personne n'est de leur côté.
M. John McKay: En Colombie-Britannique, on offre une représentation par avocat indépendante...
Mme Catherine Kane: En ce qui concerne les demandes de dossiers, et les procédures d'infraction sexuelle criminelle, il se pourrait qu'en cours de poursuite pour une infraction sexuelle où l'accusé veut avoir les dossiers médicaux, thérapeutiques ou de counselling, on doive présenter une motion précise à cet effet.
M. John McKay: C'est un champ très restreint.
Mme Catherine Kane: Pas tant que ça. C'est un gros problème parce que les demandeurs ont vraiment besoin d'une représentation par avocat indépendante et la Colombie-Britannique a pris les devants en établissant cette mesure dans la loi. Le Manitoba a aussi inclus cette disposition dans son nouveau projet de loi.
Mais il y a d'autres problèmes qui se posent lorsque les victimes disent avoir besoin de représentation par avocat qui ne leur est pas offerte en vertu de l'aide juridique parce qu'elles ne sont accusées d'aucune infraction. Lorsqu'on demande une interdiction de publication, souvent la perspective de la victime est différente de celle de la Couronne, et certainement différente de celle de la défense, et la victime estime avoir besoin d'être représentée par quelqu'un d'indépendant. Dans d'autres poursuites relatives aux infractions sexuelles, celle qui vient à l'esprit est celle où l'accusé veut poser des questions sur les activités sexuelles antérieures de la victime et qu'il formule la demande de cette preuve. La victime peut ressentir le besoin d'être représentée à ce moment-là par quelqu'un d'indépendant.
Cela nous amènera aux besoins plus généraux d'avocat pour la victime, mais le comité ne devrait certainement pas se détourner de la question.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais poser des questions concernant les lois fédérales et provinciales sur la protection de la vie privée du point de vue de la victime.
À votre connaissance, est-ce que quelqu'un ou quelque gouvernement a examiné les paramètres et la portée de l'impact des lois sur la protection de la vie privée sur les programmes destinés aux victimes, que ce soit à l'étape du procès, de l'établissement de la peine, de l'emprisonnement, de la mise en liberté ou de la libération conditionnelle du délinquant? Je pense pour ma part qu'il y a des paramètres mis en place dans les lois sur la protection de la vie privée, aux niveaux fédéral et provincial, qui pourraient bloquer et gêner certaines initiatives de la part de la victime ou des victimes à divers moments dans cette longue liste de procédures.
Mme Catherine Kane: À ce jour, je n'ai pas examiné les lois sur la protection de la vie privée pour voir quelles pourraient être les limites qu'elles imposent, mais chaque fois que nous envisagerons un projet quelconque, nous devrons voir si nous sommes restreints d'une façon ou d'une autre par ces lois.
Nous n'avons pas l'intention de rechercher quoi que ce soit qui porte atteinte aux droits du délinquant. Je crois que la ministre a dit clairement que nous cherchons à établir un meilleur équilibre entre les droits du délinquant et ceux de la victime. Les groupes de défense des victimes eux-mêmes n'hésitent pas à dire qu'ils ne veulent pas priver le délinquant de ses droits, mais qu'ils veulent simplement s'assurer que leur participation est accrue dans le processus et qu'ils sont considérés et traités de façon appropriée.
Nous n'allons certainement pas nous aventurer dans des questions qui pourraient se heurter à la Loi sur la protection de la vie privée.
M. Derek Lee: Je conviens que la victime n'a aucune raison de vouloir réduire les droits à la protection de la vie privée qu'un délinquant reconnu coupable pourrait avoir en général si l'information n'est pas pertinente aux besoins de la victime.
En vertu de la loi, je crois que l'âge de quelqu'un est un renseignement personnel. En théorie, l'âge du délinquant reconnu coupable est un renseignement personnel et qui ne doit pas être divulgué. Je vois cela comme une mauvaise application de la protection de la vie privée dans le contexte. Bien sûr, je suppose que l'âge du délinquant est pertinent à certains égards à la réintégration ou aux circonstances de la victime.
Les lois sur la protection des renseignements ne sont pas un obstacle à la défense des victimes et aux besoins des victimes en cours de route.
Mme Catherine Kane: Je vais restreindre ma réponse au contexte de votre question portant sur ce que nous pourrions faire en vertu du Code criminel du Canada. Les collègues du Service correctionnel et de la Commission des libérations conditionnelles qui examinent la question de l'implication de la victime pourraient très bien avoir rencontré des obstacles dressés par la loi sur la protection de la vie privée.
Les renseignements qu'ils donnent à une victime sont prévus dans la législation qui les gouverne, la LSCML? Je crois que cela inclut le nom du délinquant, l'endroit où il est incarcéré, etc. Je ne sais pas ce qu'il en est pour l'âge.
Certaines restrictions s'imposent. Il faut un équilibre entre les droits à la protection de la vie privée du délinquant et la sécurité du public, etc. Mais jusqu'à maintenant, dans la révision que nous avons faite du Code criminel et de ce qu'il pourrait accomplir, il n'en est rien.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Vous avez entendu le témoignage de la Colombie-Britannique; les représentants ont parlé de l'argent disponible provenant de l'amende supplémentaire imposée par la province. Lorsqu'on parle de services, on semble toujours en revenir à une question d'argent.
Avez-vous d'autres commentaires à faire sur le manque de crédits venant du gouvernement fédéral lorsqu'il faut établir une ordonnance?
Mme Catherine Kane: Voici quelques clarifications sur l'amende supplémentaire pour les victimes. Le Code criminel contient une disposition exécutoire stipulant que le juge qui détermine la peine d'un délinquant doit ajouter cette pénalité financière que l'on appelle l'amende supplémentaire pour les victimes. Cet argent doit être utilisé pour venir en aide aux victimes d'actes criminels selon les directives de la province.
Donc, l'argent reste dans la province, tout comme ce serait le cas pour une amende imposée en vertu du Code criminel, et cet argent est censé être déposé dans un compte spécial pour offrir des services aux victimes d'actes criminels.
Actuellement, le Code permet d'établir des règlements fixant le montant de l'amende supplémentaire. Lorsque les dispositions du Code sont appariées à celles de la loi, il en résulte qu'un délinquant est condamné à une amende, la surcharge s'élève à un maximum de 15 p. 100 de l'amende et lorsque la sanction est autre qu'une amende, le montant maximal est fixé à 35 dollars.
• 1105
Il n'est pas question ici de sommes importantes. On en est
venu à cette entente après plusieurs années de consultation avec
les provinces où on a examiné les avantages et les inconvénients
qu'il y avait à accorder un grand pouvoir discrétionnaire au juge
qui détermine la peine pour imposer une amende supplémentaire au
lieu d'une somme nominale qu'il pourrait imposer d'office et qui
pourrait être perçue plus facilement.
On s'est très tôt rendu compte que l'amende supplémentaire ne générait pas les recettes qu'on avait prévues pour la province et que cela était dû à quelques facteurs. Souvent, même s'il s'agit d'une amende supplémentaire obligatoire, les juges ne l'imposaient pas en raison des difficultés indues qu'elle pouvait causer au délinquant.
Le juge évaluait la situation financière du délinquant et estimait qu'elle n'était pas suffisante pour lui imposer l'amende supplémentaire, que cela lui causerait des difficultés supplémentaires et alors l'amende supplémentaire n'était pas imposée, ou encore on en imposait une moindre parce que les 15 p. 100 étaient considérés trop élevés eu égard à sa situation financière, ou encore que les 35 dollars étaient eux aussi considérés comme trop élevés.
Donc, les sommes perçues étaient inférieures aux sommes prévues et de plus, dans certaines provinces, on ne faisait pas tellement d'efforts pour percevoir l'amende supplémentaire.
Ces deux facteurs expliquent pourquoi les revenus provenant de cette amende supplémentaire sont peu élevés. La Colombie- Britannique a parlé de 100 000 dollars; je crois que nous avions estimé qu'elle devrait percevoir de 6 à 7 millions de dollars par an en amendes supplémentaires, en supposant un taux moyen d'impayés et un taux moyen d'imposition.
On a constaté la même chose dans tout le pays. Certaines provinces font plus d'efforts que d'autres pour percevoir l'amende supplémentaire fédérale mais en général, on ne perçoit pas les sommes prévues. Nous avons assuré les provinces depuis environ 1992 que nous étions disposés à revoir les montants, mais nous n'avons jamais atteint de consensus sur ce qu'ils devaient être. La ministre a déclaré récemment qu'elle était toujours disposée à examiner des modifications aux dispositions sur l'amende supplémentaire.
Beaucoup de nos collègues des provinces ont proposé que l'amende soit imposée d'office pour éviter la possibilité que les juges ne l'imposent pas. Elle devrait être imposée automatiquement sans que le juge ait à s'en préoccuper. Cette solution soulève certains problèmes du côté de la Charte parce que l'accusé peut ne pas savoir qu'une amende supplémentaire est imposée ou pourrait présenter des doléances à propos des difficultés que cela lui causerait.
Nous avons plusieurs autres possibilités que nous voudrions étudier pour permettre d'améliorer les recettes tirées de l'amende supplémentaire. Une autre considération est que si les juges étaient davantage informés des bons services offerts grâce aux revenus tirés de l'amende supplémentaire, ils l'imposeraient peut- être plus facilement.
Dans les provinces qui ont fait des efforts pour informer le judiciaire des services offerts chez elles grâce aux amendes supplémentaires, en général, les juges acceptent plus volontiers la nécessité d'imposer l'amende supplémentaire.
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): La victime devrait-elle être informée, être consultée, et j'établis ici une distinction, ou donner son accord à une négociation de plaidoyer?
Mme Catherine Kane: L'avocat de la Couronne responsable de l'affaire doit évaluer la probabilité d'une condamnation pour une accusation précise, et voir si la preuve corrobore bien le chef d'accusation. Je ne suis pas procureur de la Couronne et vous devriez peut-être poser cette question à certains des fonctionnaires des procureurs généraux des provinces s'ils comparaissent devant votre comité.
Je dois dire que les victimes ont certainement besoin qu'on leur explique la nécessité d'accepter une négociation de plaidoyer, les motifs pour lesquels la Couronne songe à accepter un chef d'accusation pour un délit moins grave ou d'inclure une infraction, et qu'on devrait avoir la possibilité d'en discuter avec la victime.
Je ne crois pas qu'il soit possible de permettre à la victime de donner son accord à une négociation de plaidoyer parce qu'il y a tellement de facteurs que la Couronne doit prendre en compte dans l'accusation.
• 1110
Cependant, donner plus d'explications aux victimes sur les
raisons pour lesquelles il peut être dans leur intérêt d'éviter un
procès ou autre chose permettrait dans une grande mesure de tenir
compte des préoccupations de la victime au sujet de la négociation
de plaidoyer.
M. John Maloney: Est-ce que les victimes qui sont présentes au tribunal, non pas pour un simple vol à l'étalage, mais pour une accusation grave comme meurtre ou agression sexuelle, etc., devraient recevoir une indemnité pour assister au procès comme le font les témoins? Certains procès durent des semaines, voire des mois.
S'il y a renvoi à un autre tribunal, ces victimes devraient- elles être indemnisées pour leurs frais de logement ou de déplacement? Jusqu'où devons-nous aller?
Mme Catherine Kane: Vous posez là une question très intéressante mais que nous n'avons pas examinée très attentivement.
Certes, en cas de renvoi à un autre tribunal, nous savons que les victimes subissent des pertes de revenu par suite de leur absence du travail, qu'elles doivent dépenser de l'argent pour l'hôtel et d'autres frais accessoires afin d'assister au procès. Je ne connais pas la politique des procureurs généraux des provinces concernant ces dépenses, je ne sais pas non plus si on les assume ou non.
Actuellement, les indemnités de témoin se montent à très peu. Elles ne couvrent pas les coûts véritables. C'est une question que nous pourrions examiner avec nos collègues par l'entremise du réseau de directeurs des services d'indemnisation aux victimes d'actes criminels et les fonctionnaires provinciaux.
Si le ministère disposait de ressources fédérales, peut-être que nous pourrions faciliter le recouvrement des coûts pour certaines des dépenses, particulièrement dans les cas de renvoi à un autre tribunal, ce qui n'arrive pas si souvent. Actuellement, je ne sais pas comment on aborde le problème.
M. John Maloney: Est-ce qu'on pourrait appliquer ça ou suggérer qu'on applique ça à une certaine catégorie d'infractions ou à toutes les catégories d'infractions?
Mme Catherine Kane: Cela dépend beaucoup de l'estimation des coûts de ce genre de programme. Lorsque le remboursement de ces dépenses est réclamé dans les provinces, on invoque souvent des dispositions spéciales qui tiennent compte des circonstances précises de l'affaire.
Lorsqu'un renvoi à un autre tribunal est ordonné pour tenir compte peut-être de l'impossibilité de choisir un jury dans une collectivité en particulier, et qu'il y a va de l'intérêt de l'administration de la justice de déplacer le procès, il s'agirait certainement alors d'une situation qui imposerait une certaine indemnisation. Cependant, il faudrait peut-être imposer des critères précisant quand ces dépenses sont remboursables.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Madame Finestone.
Mme Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Lorsque des gens sont convoqués comme témoins—et je ne peux que vous faire part des plaintes que j'ai reçues de mes propres électeurs qui ont été appelés à témoigner—ces gens-là peuvent perdre des jours et des jours de travail. Est-ce que la décision d'indemniser un témoin ou non, selon la nature du crime, est une responsabilité fédérale ou est-ce toujours la responsabilité des provinces?
Mme Catherine Kane: Dans une affaire entendue au provincial, une poursuite en vertu du Code criminel dans l'une ou l'autre des provinces, par exemple, c'est la responsabilité de la province.
Mme Sheila Finestone: La rémunération ou le montant de la compensation pour les jours consacrés à témoigner serait donc une responsabilité provinciale.
Mme Catherine Kane: C'est exact.
Mme Sheila Finestone: Comment avez-vous appelé cette chose, une superamende ou quelque chose du genre?
Mme Catherine Kane: Une amende supplémentaire...
Mme Sheila Finestone: Ça devrait s'appeler une amende extraordinaire. Est-ce que l'amende supplémentaire sert à payer les frais de ces témoins?
Mme Catherine Kane: Non, l'amende supplémentaire
Mme Sheila Finestone: Pourriez-vous nous expliquer à quoi sert cet argent spécifiquement, ou nous en donner une définition? Vous avez dit que lorsque les juges sont au courant des services pour lesquels cet argent est perçu, ils sont plus enclins à imposer l'amende supplémentaire.
Mme Catherine Kane: Actuellement, le régime prévoit que l'amende supplémentaire est versée à un fonds spécial de la province. La plupart des provinces l'appellent un fonds d'aide aux victimes d'actes criminels. Elles incluent dans ce fonds leur propre amende supplémentaire pour les infractions provinciales et l'amende supplémentaire perçue pour des infractions au Code criminel.
La disposition du Code criminel précise de façon générale que les recettes doivent être utilisées pour venir en aide aux victimes d'actes criminels. On ne précise pas le type d'aide. La province n'est nullement tenue de détailler plus tard pour le gouvernement fédéral les usages qu'elle a faits de cet argent, mais toutes les provinces peuvent certainement faire état de nombreux services qu'elles offrent grâce à l'argent tiré du fonds d'aide aux victimes d'actes criminels, qui est un mélange des deux amendes supplémentaires.
Mme Sheila Finestone: Comme quoi par exemple?
Mme Catherine Kane: Les maisons de transition pour les femmes violentées, dans les postes de police les services d'accueil pour victimes et témoins, les services offerts aux victimes dans les bureaux de la Couronne, les services spéciaux offerts aux victimes d'agressions sexuelles, aux enfants victimes de violence, etc.
En ce qui concerne l'indemnisation des victimes d'actes criminels, les provinces pourraient faire état de versements cent fois supérieurs à ce qu'elles ont perçu. Je suis tout à fait convaincue que l'argent tiré de l'amende supplémentaire est bel et bien consacré aux services offerts aux victimes d'actes criminels.
Lorsque j'ai dit qu'il fallait mieux informer les juges de l'usage que l'on fait de cette amende supplémentaire, cette suggestion a été faite lors de certaines recherches qu'a effectuées le ministère de la Justice en 1993-1994 pour sensibiliser les juges à l'amende supplémentaire.
Certains des juges avec qui on a parlé étaient réticents à imposer l'amende supplémentaire parce qu'ils ne savaient pas exactement à quoi elle servirait, mais une fois qu'on les a informés des services offerts dans leur propre collectivité et financés en partie ou en totalité par l'argent tiré de l'amende supplémentaire, ils sont devenus plus enclins à accepter l'amende supplémentaire pour financer ces services.
Mme Sheila Finestone: Premièrement, sur recommandation du comité, est-ce qu'une liste obligatoire serait fournie?
Deuxièmement, lorsqu'un procès est déplacé, devrait-il être précisé que le remboursement des frais de déplacement soit considéré comme faisant partie des services offerts aux victimes d'actes criminels?
Troisièmement, est-ce que le remboursement des frais des témoins serait couvert par l'amende supplémentaire?
Mme Catherine Kane: Je ne crois pas que les services offerts aux témoins puissent être considérés comme une dépense remboursable par le fonds d'indemnisation des victimes d'actes criminels parce que de nombreux témoins ne sont pas des victimes.
Mme Sheila Finestone: Comment la victime peut-elle obtenir une audition en bonne et due forme au tribunal si on n'entend pas les témoins?
Mme Catherine Kane: On entendra les témoins. S'ils sont convoqués, ils seront présents et obtiendront l'indemnité de témoin prévue dans la loi provinciale pertinente. De nombreux témoins ne sont pas victimes d'actes criminels.
Mme Sheila Finestone: Je le comprends.
Mme Catherine Kane: Eu égard aux ressources très limitées dont nous disposons pour aider les victimes d'actes criminels, il existe plusieurs priorités contradictoires. C'est une chose dont il faut tenir compte. La façon dont les revenus tirés de l'amende supplémentaire sont utilisés est laissée à l'entière discrétion de la province.
Mme Sheila Finestone: Est-ce que vous avez dit dans votre première réponse que cette amende était d'environ 35 dollars et qu'elle s'élevait à quelque chose comme 3 millions de dollars en Colombie-Britannique?
Mme Catherine Kane: Non
Mme Sheila Finestone: À mon avis, ça semble représenter un grand nombre de causes entendues.
Mme Catherine Kane: Non. J'ai dit que selon Susanne Dahlin, ce matin, la Colombie-Britannique n'avait perçu qu'environ 100 000 dollars en un an au titre de l'amende supplémentaire imposée par le gouvernement fédéral.
Le Code criminel précise que le montant maximal de l'amende supplémentaire est de 15 p. 100 de l'amende imposée ou un maximum de 35 dollars lorsque la peine imposée n'est pas une amende.
Par exemple, un délinquant peut être condamné à la prison et l'amende supplémentaire pourrait être de 35 dollars, ou le juge pourrait dire qu'à son avis, le délinquant n'a pas les moyens de payer 35 dollars, donc que l'amende supplémentaire sera de 10 dollars ou ne sera pas imposée parce que le délinquant n'est pas en mesure de payer.
Mme Sheila Finestone: Ou, ça pourrait être des milliers de dollars si le délinquant est riche.
Mme Catherine Kane: Non, ça ne peut pas être comme ça parce que la loi dit que le maximum est de 15 p. 100 de l'amende ou encore une somme maximale de 35 dollars.
Mme Sheila Finestone: Une dernière question, si vous permettez. En ce qui concerne les montants accordés pour une infraction commise et reconnue comme telle, est-ce que l'indemnisation qu'on impose au délinquant tiendra compte du degré d'incapacité qu'a subie la victime ou est-ce au Régime de pensions du Canada d'établir une indemnité d'invalidité?
Est-ce qu'il existe une règle générale quelconque? Je ne suis ni avocate, ni procureur, et je n'ai jamais assisté à un procès. Est-ce que l'on tient compte du degré d'incapacité, du degré de souffrance psychologique, sociale ou physique qu'a subie la victime?
Mme Catherine Kane: Est-ce que vous voulez parler de ce que le tribunal pénal peut ordonner dans le cadre de la peine imposée au délinquant?
Mme Sheila Finestone: Le tribunal pénal.
Mme Catherine Kane: Le tribunal pénal...
Mme Sheila Finestone: Excusez-moi, mais le tribunal pénal relève de la compétence du gouvernement fédéral, donc nous ne pouvons pas...
Mme Catherine Kane: C'est exact. Les dispositions du Code criminel qui régissent ce dont vous parlez sont les dispositions sur l'indemnisation. Elles sont très restreintes parce que, en vertu des lois fédérales, nous devons nous limiter à aborder les questions d'établissement de la peine en vertu du droit pénal.
La disposition du Code précise clairement que le tribunal ne peut attribuer à titre d'indemnisation que des indemnisations aisément vérifiables pour la perte de revenu résultant d'un acte criminel ou des frais réellement subis pour la perte ou des dommages causés à la propriété. On ne peut accorder d'indemnisations en vertu des dispositions à cet effet pour la peine ou les souffrances ou une incapacité à long terme. Les dispositions sur l'indemnisation sont assez étroites.
• 1120
Les questions dont vous avez parlé, comme l'invalidité à long
terme, feraient l'objet d'une poursuite au civil de la victime
contre le délinquant, et si le délinquant avait la capacité de
payer, ce serait la meilleure ressource à utiliser.
Mme Sheila Finestone: Est-ce que les poursuites civiles doivent être entendues après l'affaire pénale et la condamnation?
Mme Catherine Kane: Non, l'affaire peut être entendue simultanément ou même avant, selon des normes de preuve complètement différentes.
On peut avoir un délinquant qui n'est pas reconnu coupable d'agression, par exemple, mais dans le procès au civil, c'est affaire de prépondérance des responsabilités et de norme de preuve, et le tribunal peut décider que le défendeur est effectivement responsable des blessures. L'accusé pourrait être déclaré responsable même s'il n'a pas été condamné pour l'infraction criminelle.
Mme Sheila Finestone: Lorsqu'il s'agit de dommages à la propriété plutôt que de blessures personnelles, dans le recouvrement de biens pour la vente, comment les sommes sont-elles réparties?
L'argent va-t-il aux services d'aide aux victimes d'actes criminels? Au Trésor du Canada? Aux services provinciaux? Où va l'argent?
Mme Catherine Kane: Est-ce que vous parlez des produits de la criminalité?
Mme Sheila Finestone: Oui, je sais qu'on brûle le hasch et tout le reste. C'est parfois stupide, mais est-ce que la marchandise volée ayant une valeur considérable est vendue? Est- elle rendue au propriétaire? Qu'arrive-t-il aux biens récupérés?
Mme Catherine Kane: Si les biens sont récupérés, ils sont rendus à la victime.
Mme Sheila Finestone: À la victime.
Mme Catherine Kane: Si les biens récupérés sont utilisables. Si on les a retrouvés détruits, le tribunal peut ordonner une indemnisation pour la valeur du bien en question.
Mme Sheila Finestone: J'avais une autre idée, mais elle m'a échappé. Merci beaucoup.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Permettez-moi d'ajouter que, par exemple, l'encan le plus populaire de Vancouver est celui de la Police de la ville où l'on trouve toutes sortes de biens recouvrés que l'on ne peut attribuer à une victime précise.
Mme Sheila Finestone: Il y a des bicyclettes, des motos, des voitures.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Est-ce que quelqu'un d'autre veut poser une question?
M. Chuck Cadman: Je voulais simplement mentionner une chose.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Allez-y, monsieur Cadman.
M. Chuck Cadman: Je veux revenir aux questions qu'a posées M. McKay sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Je voudrais plutôt faire un commentaire que poser une question.
Toute cette idée de s'en remettre au tribunal civil pour une victime d'un acte criminel, particulièrement d'un crime violent et encore plus particulièrement pour les survivants d'un crime violent comme un meurtre, moi j'aimerais que le programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels prévoie le remboursement des frais plutôt qu'une indemnisation pour les souffrances et la douleur.
Je connais des gens qui n'ont pas pu travailler pendant six mois ou des années après avoir été victimes d'un crime. Ils subissent une perte financière parce que leur régime d'assurance ne couvre pas cela. Ces gens-là n'ont aucun revenu et doivent payer les frais funéraires. Engager des poursuites civiles pourrait prendre des années avant d'aboutir à une décision.
Essentiellement, cela équivaut à une revictimisation. Je suis d'accord pour qu'on s'adresse aux tribunaux civils pour les questions de douleur et de souffrances. Pour moi c'est une tout autre question. Je tenais simplement à le signaler officiellement.
M. McKay a aussi parlé de la responsabilité de la Couronne et de la police concernant les renseignements à donner. Si cela peut intéresser quelqu'un, j'ai un projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-294, qui porte là-dessus. Je ne sais pas si le ministère l'a examiné. J'ai probablement perdu toutes les chances de le voir soumis à un vote. Il a été présenté par un de vos collègues, M. Mitchell, lors de la dernière législature. Je l'ai retravaillé et j'y ai ajouté quelques petites choses.
Mme Sheila Finestone: Avez-vous obtenu le droit d'auteur?
M. Chuck Cadman: Peut-être voudriez-vous y jeter un coup d'oeil parce qu'il porte sur toutes ces questions. Merci, monsieur le président.
Mme Sheila Finestone: C'est vous, Derek, qui avez posé la question sur la protection de la vie privée.
M. Derek Lee: Oui.
Mme Sheila Finestone: Avez-vous été satisfait de la réponse?
M. Derek Lee: Oui, je crois. Je voulais savoir s'il y avait des parties à polir ou des problèmes concernant cette question et Mme Kane a précisé qu'il n'y avait pas de questions manifestement incompatibles. Je crois que c'est la réponse qu'elle a donnée.
Mme Sheila Finestone: Vous avez vérifié auprès du Commissaire à la protection de la vie privée?
Mme Catherine Kane: Ce que j'ai dit, c'est que dans les options que nous avons explorées à ce jour, nous n'avons pas rencontré ce genre de problèmes.
• 1125
Si vous pouviez me donner un exemple d'un problème qui
pourrait soulever des préoccupations à propos de la protection de
la vie privée, je serais peut-être en mesure de mieux vous
répondre. Mais certainement, à ce jour, en ce qui concerne les
options criminelles, les modifications au Code criminel, nous
n'avons pas l'intention d'empiéter sur quelque aspect que ce soit
de la Loi sur la protection de la vie privée.
Mme Sheila Finestone: C'est la raison pour laquelle je pose cette question. À la lumière de cela, je ne crois pas qu'on puisse nous demander d'examiner cette question. Compte tenu du fait que nous avons un Commissaire à la protection de la vie privée extrêmement compétent qui applique depuis de nombreuses années la Loi sur la protection de la vie privée, je crois que la consultation d'office du commissaire devrait s'imposer.
A-t-on demandé au Commissaire à la protection de la vie privée d'examiner le Code criminel? A-t-il demandé spécifiquement s'il existe des préoccupations concernant les droits à la protection de la vie privée, que ce soit les droits du délinquant, de la victime ou de tout autre témoin?
Mme Catherine Kane: Nous n'avons pas demandé au Commissaire à la protection de la vie privée d'examiner le Code criminel.
Je suppose que si le commissaire avait pris connaissance des questions abordées par le comité concernant des modifications apportées ces dernières années ou des dispositions actuelles du Code criminel qui faisaient problème, il les aurait portées à l'attention de la ministre.
Si nous voulons faire adopter des modifications au Code criminel, nous veillerons certainement à voir si ces modifications ont des répercussions sur la Loi sur la protection de la vie privée. Mais nous n'en sommes pas là pour l'instant.
Mme Sheila Finestone: Monsieur le président, j'aimerais vraiment que l'on envoie une lettre au Commissaire à la protection de la vie privée pour voir s'il estime de sa compétence ou nécessaire d'examiner cette question, si l'on doit se pencher sur les droits des victimes, si nous devrions avoir quelque préoccupation que ce soit dans le domaine de la protection de la vie privée.
Mme Catherine Kane: Vous avez entendu avant-hier un représentant du Commissaire à la protection à la vie privée, donc le commissaire est au courant de l'examen que nous faisons ici de cette question.
Mme Sheila Finestone: Le commissaire sera donc très réceptif à notre lettre, j'en suis certaine.
Le vice-président (M. Paul Forseth): À plusieurs reprises, vous avez parlé de modifications possibles au Code criminel. Je me demande si de façon générale vous pourriez dresser une liste des questions sujettes à modifications que le comité pourrait examiner pour établir une norme nationale. Vous avez parlé d'améliorations à la section sur la déclaration de la victime. Que dire des principes concernant l'établissement de la peine?
Je sais qu'il y a une réunion fédérale-provinciale de fonctionnaires en juin. Peut-être pourriez-vous de façon générale nous parler de certaines questions qui pourront y être examinées.
Mme Catherine Kane: En ce qui concerne les modifications au Code criminel, le groupe de travail fédéral-provincial sur les victimes d'actes criminels en avait relevé plusieurs, dont la nécessité de modifier la disposition sur l'amende supplémentaire, l'amélioration à apporter à la déclaration de la victime et la suggestion que l'on examine la possibilité d'élargir les dispositions sur l'interdiction de publication.
Dans la lettre qu'a envoyée la ministre au comité, elle a également fait allusion à d'autres questions sur lesquelles nous aimerions avoir l'opinion du comité et dit que nous aimerions explorer les dispositions visant à faciliter les témoignages des témoins, les renseignements à fournir de façon générale aux victimes d'actes criminels. Quant à savoir si cela doit être inclus dans le Code criminel, ça reste à discuter.
Il y a aussi d'autres dispositions, et ce n'est qu'une idée pour l'instant, comme élargir la portée des dispositions sur la déclaration des victimes à d'autres procédures, par exemple lorsqu'un verdict de non-responsabilité est rendu par suite de troubles psychiques. Actuellement, aucune peine n'est imposée dans un tel cas, donc il n'y a pas de déclaration de la victime.
On pourrait également examiner s'il est possible d'imposer une obligation dans le Code d'informer la victime qu'elle peut préparer une déclaration.
En ce qui concerne l'ordre du jour de la réunion de juin, notre groupe de travail, et cela est avantageux, est composé de deux sous-groupes. Il y a les directeurs des services d'aide aux victimes d'actes criminels de toutes les provinces et d'autres responsables des politiques des provinces, moi et certains de mes collègues du Solliciteur général.
• 1130
L'ordre du jour est très long. Habituellement, on commence par
une table ronde sur les problèmes nouveaux dans toutes les
provinces, sur les nouveaux services ou programmes élaborés et
c'est l'occasion d'échanger des renseignements sur la façon dont
certaines préoccupations sont abordées.
Il y a une séance sur les initiatives concernant les victimes d'infractions sexuelles et l'impact des demandes de documents. Il y a une séance sur les initiatives reliées à la violence familiale; plusieurs provinces ont maintenant des lois sur cette question. Cela nous donne la possibilité de nous mettre à jour sur ces lois et sur les services d'aide aux victimes en général, de voir quels sont les problèmes qu'éprouvent ces services, les problèmes de financement, ainsi que certaines questions en suspens découlant du rapport de notre groupe de travail présenté en décembre. Ce rapport sera remis à tous les membres du comité, pour information.
Les priorités de recherche ont été établies. Toutes les provinces estiment qu'elles pourraient bénéficier de la recherche sur les mesures prises dans chaque province et territoire concernant les déclarations des victimes.
Je ne veux pas dire ce que la loi précise, mais ce qui se passe dans les tribunaux; on veut savoir si les victimes en sont satisfaites, on veut obtenir ce genre de renseignements, et voir s'il existe un meilleur moyen de percevoir l'amende supplémentaire, etc. C'est un ordre du jour vraiment très chargé.
Il y a aussi quelques questions que je n'ai pas le droit de divulguer. Peut-être qu'après, j'aurai le plaisir de vous donner un compte rendu.
Mme Sheila Finestone: Vous connaissez très bien la question. C'est un plaisir de vous entendre.
En ce qui concerne les gens souffrant d'invalidités, pour ce qui est de la rédaction de la déclaration de victime, ou de sa présentation si telle est leur préférence, et j'espère qu'on demande aux victimes de quelle façon elles veulent témoigner, peuvent-elles rédiger la déclaration en braille, la dicter si elles ne peuvent pas l'écrire, peuvent-elles faire une déclaration orale? Qu'est-ce qu'on a prévu pour les gens qui ont des troubles de vision, d'audition ou d'élocution? Y a-t-il des interprètes dans le tribunal? Quelle disposition a-t-on prise pour ce qui concerne la langue?
Mme Catherine Kane: Votre question est très intéressante. Le juge dispose de toute la latitude voulue pour permettre des accommodements afin de bien recevoir la déclaration de la victime. Actuellement, rien n'est prévu dans le Code criminel. Le Code criminel ne dit pas qu'un juge doit permettre à la victime de présenter sa déclaration de la façon qu'elle peut.
C'est assez restreint. On dit que la déclaration de la victime doit être présentée sous une forme approuvée par le lieutenant- gouverneur en conseil de la province. On peut avoir un formulaire particulier ou une pratique en Ontario qui diffère de celle du Québec ou du Manitoba, par exemple.
Dans certains cas, le programme désigné pourrait dire qu'il y a un formulaire, rien d'autre, qu'il faut remplir les espaces. Même dans les provinces où c'est le cas, on a vu bien des causes où le juge a fait preuve de la plus grande souplesse et accepté d'autres formes de déclarations de victime.
Je ne pourrais pas dire qu'il est garanti qu'une victime souffrant d'un handicap peut utiliser le braille ou la vidéo; c'est laissé à la discrétion du juge.
Mme Sheila Finestone: Monsieur le président, je me demande si lorsque le comité étudiera la victimisation et la déclaration de la victime, à un moment donné, nous ne pourrions pas nous joindre à nos collègues provinciaux. Je me dis souvent que les trois niveaux de responsabilité dans une démocratie sont le judiciaire, l'exécutif et les parlementaires.
Les parlementaires des deux paliers de gouvernement pourraient se rencontrer pour discuter de ces questions qui ne peuvent avoir un impact qu'au niveau provincial. Il faudrait entendre des parlementaires provinciaux.
C'est bien d'avoir le fédéral, les provinces et les territoires, les réunions de fonctionnaires qui déterminent et évaluent certaines choses. C'est bien pour les ministres. Mais en fin de compte, si les parlementaires ne sont pas d'accord, le comité exécutif peut avoir beaucoup de mal. On a déjà vu cela à plusieurs reprises.
Il serait très intéressant d'envisager la possibilité, lorsque nous visiterons chaque province, d'examiner avec nos collègues provinciaux les lois qui les régissent.
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): L'autre soir, je me trouvais dans la circonscription de Toronto- Centre—Rosedale et j'ai rencontré un groupe communautaire dans un quartier du centre-ville. Avec l'aide de leur ancien député provincial Tim Murphy, ces gens-là ont étudié le problème très grave que leur causent la prostitution et le trafic de stupéfiants.
Ils se sont réunis et ont décidé d'essayer de présenter une déclaration sur les effets de ces problèmes sur la collectivité à la cour provinciale ou à tout autre tribunal lorsque de telles affaires étaient entendues. Le programme a eu beaucoup de succès.
J'ai été très impressionnée par ce groupe communautaire, mais je me suis dit que lorsqu'on parle à des groupes comme celui-ci, ce qu'on constate, c'est que la collectivité est victime de crimes que nous ne voyons peut-être pas, dont nous ne nous préoccupons peut- être pas tellement parce qu'ils ne se rencontrent pas partout. Vous n'avez pas nécessairement de jeunes qui sont accrochés à la cocaïne, qui se livrent à la prostitution dans les rues des régions rurales ou dans ce que l'on appelle les quartiers plus huppés. Mais il y a des régions de notre pays où ce problème existe. On a souvent tendance à penser que ce sont des crimes qui ne font pas de victimes, mais en fait, c'est la collectivité qui en est la victime.
Mme Sheila Finestone: Vancouver en est un exemple parfait.
Mme Shaughnessy Cohen: Oui, je prêche ici à des convertis. Le ministère a-t-il examiné cette notion de collectivité qui est la victime et est-ce à votre avis une chose que nous devrions étudier, pas nécessairement dans nos présents travaux, mais plus tard?
Mme Catherine Kane: Nous n'avons pas examiné cette question attentivement, bien que je sache que des groupes qui étudient les effets de la criminalité sur les collectivités ont un impact positif et réussissent à sensibiliser les gens au fait qu'ils font partie de tout le processus, plus particulièrement en ce qui concerne les crimes qui ne font pas de victimes, où on ne saurait dire qui pourrait faire une déclaration de victime au tribunal.
C'est une idée qui vaut certainement la peine d'être étudiée parce que c'est un excellent moyen de sensibiliser les gens au fait qu'ils font partie du système de justice pénale et qu'ils peuvent trouver des solutions aux problèmes qui touchent leur collectivité. Il s'agit aussi de prévention du crime dans une certaine mesure.
Les gens peuvent voir un problème dans leur propre collectivité, en discuter dans le but évident d'infliger une peine à un délinquant, mais aussi de mettre fin au problème.
Mme Shaughnessy Cohen: J'ai été tellement impressionnée par ces gens-là. Le député provincial, qui n'a pas été réélu mais qui a entrepris le projet, est un de mes amis. Il m'en avait parlé, mais on ne se rend pas compte de la situation tant qu'on ne parle pas aux gens qui appliquent le programme.
Sarmite Bulte, députée de Parkdale, à Toronto, m'a remis récemment un programme que la collectivité de Parkdale applique. Peut-être est-ce là une chose que nous devrions examiner à un moment donné.
Mme Sheila Finestone: Margaret Mitchell avait un projet très intéressant parce qu'on a déplacé la sollicitation et la prostitution du centre-ville de Vancouver à un quartier essentiellement composé d'entrepôts. Bien sûr, ça a présenté toutes sortes d'autres problèmes, mais le programme était très intéressant.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Madame Kane, je vous remercie d'être venue témoigner. Vous semblez très bien connaître la question et le comité va compter sur vos conseils et votre aide dans ses délibérations futures.
Le comité suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi.