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JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 14 mai 1998

• 1536

[Traduction]

La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Très bien, nous sommes de retour. Nous poursuivons l'examen du Budget des dépenses et nous recevons aujourd'hui le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité.

La nouvelle présidente—félicitations, madame la présidente—est l'honorable Paule Gauthier. Le comité compte un nouveau membre qui a été nommé récemment, l'honorable James Andrews Grant. Il y a également un autre nouveau membre, l'honorable Bob Rae. Je pense qu'il faut vous féliciter. Je ne sais pas si vous souhaitiez que nous vous félicitions, mais nous nous réjouissons de votre présence ici.

Je crois, madame Gauthier, que vous avez une déclaration liminaire à nous faire.

[Français]

L'honorable Paule Gauthier (C.P., O.C., c.r., présidente, Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): Madame la présidente et chers membres du comité, il y a déjà un bon moment que nous nous sommes présentés devant vous. C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme que nous le faisons aujourd'hui. Comme vous venez de le mentionner, je suis accompagnée de deux nouveaux membres qui se sont joints au comité tout récemment.

Madame la présidente, si vous le voulez bien, j'aimerais repasser brièvement avec vous les faits saillants de notre rapport sur les plans et les priorités et sur le budget des dépenses pour l'année 1998-1999.

[Traduction]

Comme vous les savez, en vertu de la Loi sur le SCRS, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a comme mandat de surveiller les activités du SCRS, afin de s'assurer que ce dernier exerce ses pouvoirs extraordinaires dans la légalité et d'une manière qui protège les droits civils des Canadiens.

Le comité s'acquitte de cette tâche sur trois plans: en scrutant toutes les activités et les pouvoirs d'enquête du SCRS; en enquêtant sur les plaintes du public à l'égard des activités du SCRS concernant les refus d'habilitations de sécurité, de dossiers d'immigration ou de citoyenneté ou d'autres questions liées aux droits de la personne; et en informant le public et le Parlement sur la façon dont le SCRS exerce les pouvoirs qui lui sont dévolus.

Les dépenses nettes totales prévues pour l'année 1998-1999 pour le programme du Comité de surveillance sont de 1 389 million de dollars. Ceci représente une baisse par rapport à l'année 1997-1998, où le coût total s'élevait à 1 406 millions de dollars. Ceci étant dit, certains facteurs qui sont externes et indépendants de la volonté du Comité de surveillance viennent influencer son fonctionnement et, par conséquent, son budget. J'aimerais en soulever quelques-uns.

Outre les secteurs qui doivent faire l'objet d'examen et qui sont prescrit par la Loi, le comité se voit parfois confier ou entreprend de sa propre initiative de nombreux projets importants touchant des questions d'intérêt public, par exemple lorsque certaines des activités du SCRS sont soulevées par les médias d'information.

L'évolution constante du contexte de la sécurité internationale influence la façon dont le comité affecte ses ressources. Par exemple, d'ici 1999-2000, le comité entrevoit orienter ses ressources afin de déterminer si certains types d'espionnage économique et de crime transnational constituent des menaces à la sécurité du Canada, tel que défini dans la Loi.

• 1540

Comme les plaintes et les rapports ministériels que le comité reçoit exigent beaucoup de temps et entraînent d'importants frais judiciaires, une augmentation, même faible, de leur nombre peut grever lourdement le budget et le fonctionnement du comité. À ce titre, le comité prévoit une hausse du nombre de rapports qui seront présentés par suite de la modification apportée en 1993 à la Loi sur l'immigration, laquelle modification a élargi la catégorie d'individus à qui le statut d'immigrant peut être refusé du fait qu'ils ont déjà été mêlés à des actes terroristes. Les réductions budgétaires apportées à l'ensemble de l'appareil gouvernemental fédéral ont aussi leurs incidences sur le CSARS.

Outre ses activités d'enquête sur les plaintes et les rapports ministériels, le comité entrevoit faire une vérification des secteurs d'activité suivants du Service pour l'année 1998-1999. Cela comprend l'examen d'une enquête prolongée du Service sur un secteur particulier de l'anti-terrorisme; l'examen d'une enquête du SCRS portant sur la menace venant d'un pays étranger; l'analyse de la coopération entre le Service et certains organismes canadiens. Cette analyse portera sur les ententes en place, sur la résolution des problèmes en matière de divulgation et de preuve et sur l'efficacité des procédures de règlement des différends qui sont en place.

Finalement, le comité fera un examen approfondi de toutes les enquêtes menées par le SCRS dans une région donnée du pays. Cette étude comprend l'évaluation des décisions de ciblage, la validité des faits exposés dans les affidavits présentés à la Cour fédérale dans l'obtention de mandats, les programmes de sécurité interne et la conduite d'opérations délicates.

[Français]

Avant de terminer, j'aimerais profiter de l'occasion pour vous souligner que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne constitue sans aucun doute le client principal du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. C'est pourquoi notre présence devant vous, pour faire rapport et répondre à vos questions dans les limites permises par la loi, est essentielle.

À titre d'organisme externe et indépendant du SCRS, le Comité de surveillance est intéressé à recevoir tout commentaire émanant de représentants du public sur la façon dont il pourrait améliorer son efficacité dans l'exécution de son mandat.

Aussi, toute suggestion ou toute critique constructive sur la façon dont le Comité de surveillance pourrait mieux effectuer son travail sera très bien reçue. De plus, le comité est toujours intéressé à savoir ce qu'il peut faire pour aider les membres de votre comité à s'acquitter de leurs responsabilités.

C'est donc avec plaisir et intérêt que j'ai eu l'occasion d'échanger avec certains d'entre vous à ce sujet. J'espère qu'il me sera possible, ainsi qu'aux autres membres de mon comité, de rencontrer d'autres membres de votre comité dans un avenir prochain. Cette étroite collaboration est bénéfique pour tout le public canadien que nous représentons.

Madame la présidente, les autres membres de mon comité et moi sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

[Traduction]

La présidente: Merci. Aujourd'hui, je m'écarterai de notre façon habituelle de procéder pour donner d'abord la parole à M. Lee. Il m'a dit tout à l'heure qu'il devait se rendre quelque part. Allez-y. Vous avez 10 minutes.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci, madame la présidente.

J'aimerais revenir sur un petit élément de votre déclaration liminaire.

Mais d'abord, c'est un plaisir que de vous accueillir de nouveau au comité et j'estime personnellement que les deux nouveaux membres représentent d'excellentes additions au CSARS. Votre expérience et vos antécédents seront très utiles.

Pour en revenir à notre sujet, vous savez que le CSARS a discuté avec notre comité, son prédécesseur et le Sous-comité de la sécurité nationale de son obligation de répondre totalement aux questions qui lui sont posées au Parlement. Nous avons eu certaines divergences de vues à ce sujet.

• 1545

En 1995, le président précédent du CSARS a fourni au comité un avis juridique non signé, mais qui émanait, je crois, d'un avocat du secteur privé. J'ai presque vu là un outrage au Parlement, car cet avis ne tenait pas compte du droit parlementaire et des obligations qui sont celles des témoins comparaissant devant les comités.

Si je recevais une opinion comme celle-là, en sachant ce que je sais maintenant, je poursuivrais sans doute l'avocat. Par conséquent, nous avons un problème. Je vais donc vous poser des questions à ce sujet.

Premièrement, je vais vous demander si vous êtes au courant de l'avis juridique dont je viens de parler.

L'hon. Paule Gauthier: Oui, je suis au courant.

M. Derek Lee: Vous connaissez l'avocat qui a préparé cette opinion?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, je le connais.

M. Derek Lee: Très bien. Pouvez-vous me dire qui c'est?

L'hon. Paule Gauthier: Simon Noël.

M. Derek Lee: Simon...?

L'hon. Paule Gauthier: Noël.

M. Derek Lee: Simon Noël. Merci. Cet avocat est-il rattaché à un cabinet juridique?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, je crois que c'est ici à Ottawa, ou à Hull.

M. Derek Lee: Connaissez-vous le nom du cabinet juridique?

L'hon. Paule Gauthier: Valiquette, Noël.

J'ai cet avis ici.

M. Derek Lee: Oui. Malheureusement, l'avis n'était pas signé et n'était pas non plus rédigé sur papier à en-tête. Il nous a été transmis par le président du CSARS, mais c'était une version expurgée dont on avait enlevé ces renseignements, ou du moins ils n'y figuraient pas. Quoi qu'il en soit, nous connaissons maintenant le nom du cabinet juridique.

Estimez-vous que l'avis que M. Courtois, votre prédécesseur, nous a fourni représente l'opinion du CSARS?

L'hon. Paule Gauthier: Je n'étais pas là quand M. Courtois vous a répondu et je ne sais donc pas exactement ce qu'il vous a dit à ce sujet. Je comprends parfaitement pourquoi cette question vous intéresse. Étant moi-même avocate, je comprends très bien ce que cela implique et ce sont là des questions très intéressantes.

Mais depuis ma nomination, et comme nous savions d'avance que nous allions comparaître devant vous, comme vous avez eu la gentillesse de nous avertir que vous alliez soulever la question, nous avons examiné cet avis juridique et nous savons que d'autres avocats auront sans doute des avis différents et que vous pourriez vous-même obtenir toutes sortes d'opinions d'avocats différents.

Néanmoins, en ce qui concerne le comité, nous continuons d'affirmer que la loi nous oblige à respecter le serment professionnel que nous prêtons lors de notre nomination au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité...

Tant que le système en place au Canada ne sera pas modifié—et vous êtes mieux en mesure que nous de le faire si vous le désirez—nous ferons de notre mieux et, comme je l'ai dit au début de mon exposé, nous tenons à coopérer et, dans toute la mesure du possible, vous fournir tous les renseignements que nous possédons afin que vous soyez à l'aise avec le système en place.

Par conséquent, au lieu de discuter d'un avis juridique, nous préférerions de beaucoup procéder cas par cas et, lorsqu'un problème se pose, essayer de trouver une solution ensemble.

J'ai beaucoup voyagé. Peut-être pas tant que cela, mais j'ai rencontré les présidents d'organismes équivalents au nôtre. Il ne porte pas le même nom aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Australie. Mais je peux vous assurer que le système qui existe actuellement au Canada...

J'étais très fière d'expliquer notre processus. J'estime qu'il nous permet d'en savoir beaucoup plus sur ce que font nos services de renseignement que tout autre système au monde.

Par conséquent, monsieur Lee, nous nous en tenons malheureusement à notre avis juridique pour le moment, mais nous voudrions travailler en collaboration très étroite avec vous et essayer de vous satisfaire lorsque le moment viendra.

M. Derek Lee: D'accord, je l'accepte, et c'est un objectif acceptable.

Pourrais-je vous demander quel serment vous avez prêté? Quels sont les serments que vous avez prêtés comme membre du CSARS?

• 1550

Une voix: Avez-vous prêté le serment du Conseil privé?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, nous avons prêté deux serments, celui du Conseil privé et celui que prévoit la Loi.

M. Derek Lee: Quand avez-vous prêté le serment décrit dans la Loi?

L'hon. Paule Gauthier: J'ai été assermenté lorsque j'ai été nommée au Conseil privé.

M. Derek Lee: Est-ce la même chose pour vous, monsieur Grant? Avez-vous prêté deux serments en même temps? Monsieur Rae?

L'hon. James Andrews Grant (c.p. c.r., membre du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): Oui, avant que vous ne commenciez à siéger.

L'hon. Bob Rae (c.p., c.r., membre du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): J'ai prêté le serment du Conseil privé lorsque j'ai été assermenté comme membre du Conseil privé il y a deux semaines environ. J'ai prêté serment en tant que membre du comité ce matin, vers 8 h 45.

M. Derek Lee: On a donc doublé l'équipe. Mais je crois que tel n'était pas le cas il y a quelques années.

La présidente: Les gens veulent savoir combien de travail vous avez accompli depuis. Nous ne voudrions pas que vous restiez assis les bras croisés.

L'hon. Bob Rae: J'ai commencé à travailler avant de prêter serment.

M. Derek Lee: Je reconnais que votre serment vous impose des obligations juridiques et vous avez raison d'en tenir compte.

Ce dont vous n'avez sans doute pas tenu compte c'est du droit parlementaire et des privilèges parlementaires. Je ne vais pas vous en faire la description car tout cela vous sera consigné noir sur blanc à un moment donné.

Je considère, et le Parlement aussi, que votre position n'est pas défendable. Même si je pouvais vous convaincre maintenant que vous avez tort—ce qui arrivera en temps voulu, j'en suis certain—le fait est que vous devez nous divulguer les renseignements dont nous pouvons avoir besoin. C'est une question sur laquelle le Parlement et les parlementaires devront revenir si nous examinons certains sujets.

L'hon. Bob Rae: Puis-je vous poser une question? Estimez-vous que vous pouvez nous poser une question qui nous obligerait à enfreindre la loi?

M. Derek Lee: Oui, mais en y répondant, vous n'enfreindrez pas la loi. La loi à laquelle je souscris est la loi sur le Parlement qui fait partie de la Constitution du Canada...

L'hon. Bob Rae: Mais cela comprend-il les autres lois?

M. Derek Lee: Oui.

L'hon. Bob Rae: Par exemple, si vous nous posez une question au sujet d'une personne quant à savoir si elle a fait ou non l'objet d'une enquête du SCRS et si nous refusons de répondre à cette question parce que ce serait enfreindre la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, selon moi, ce serait également une atteinte au droit à la vie privée de cette personne, tant aux termes de la common law que de la loi.

Vous pensez donc que vous pouvez nous poser une question et que nous pouvons enfreindre la loi, ne pas respecter nos obligations envers cette personne simplement parce que vous avez posé la question.

M. Derek Lee: Pour commencer, ce n'est pas mon opinion personnelle, mais celle du Parlement.

L'hon. Bob Rae: Bien, nous verrons. J'ignore si c'est l'opinion du Parlement ou non, mais c'est ce que vous affirmez?

M. Derek Lee: Oui. Deuxièmement, vous ne trahiriez pas votre serment professionnel. Si vous êtes prêts à l'examiner attentivement, je suis disposé à vous montrer quels sont les mots importants. Les 10 minutes dont je dispose maintenant ne nous suffiront pas.

Deuxièmement, vous jouissez d'une immunité totale pour tout renseignement que vous nous fourniriez émanant de n'importe quelle source, qu'elle soit administrative, judiciaire ou criminelle.

Vous n'êtes pas encore prêts à l'accepter parce que personne ne vous a expliqué les choses de cette façon. Je déplore que l'avocat à qui vous vous êtes fiés soit tellement ignorant du droit parlementaire ou constitutionnel qu'il n'a pas pu tirer cette conclusion.

L'hon. Bob Rae: Vous ne tenez pas compte d'une réalité à savoir qu'il y a parfois plus d'une façon d'interpréter la loi. En fait, la loi est déterminée par le Parlement et par les juges.

Je ne suis au courant d'aucune décision. Si vous pouvez porter une décision à mon attention et me dire qu'il y a des précédents très clairs établissant que quelqu'un occupant le poste pour lequel je viens d'être assermenté doit enfreindre la loi et violer son serment professionnel, aller à l'encontre des lois adoptées par le Parlement, simplement parce qu'un député décide un jour de poser une certaine question, je serais fort curieux de les voir. Je crois que cela nous intéresserait tous.

M. Derek Lee: Tout d'abord, ce n'est pas aux tribunaux de rendre ce genre de décision, mais au Parlement. Les tribunaux n'ont pas le droit de rendre des décisions sur des questions parlementaires et cela depuis plus de 300 ans. Mais je me fais un plaisir de consacrer du temps à cette question. J'y ai déjà consacré plusieurs années. J'espère publier un livre sur le sujet d'ici deux ou trois mois.

Quoi qu'il en soit, vous vouliez dire quelque chose, madame Gauthier.

• 1555

L'hon. Paule Gauthier: Non, mais comme nous vous avons fourni notre avis juridique, si vous en avez d'autres à nous communiquer, nous ferons un échange d'avis juridiques.

M. Derek Lee: Je peux vous fournir immédiatement l'opinion du conseiller parlementaire. Étant donné que vous êtes au service du Parlement du Canada, je m'attendrais à ce que vous acceptiez l'opinion du conseiller juridique du Parlement. Si vous décidez de ne pas le faire, ce sera peut-être à vos risques, mais en attendant cela ne devrait pas poser un sérieux problème.

Comme j'ai certainement épuisé mes 10 minutes, je vais rendre la parole à la présidente afin que nous poursuivions les questions.

La présidente: Merci, monsieur Lee.

Monsieur Forseth, vous avez 10 minutes.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): J'ai une question supplémentaire.

Monsieur Rae, vous avez inversé les rôles lorsque vous avez dit qu'un député pourrait simplement décider de poser une question. Ce n'est pas le cas. Lorsqu'un comité siège, c'est comme un tribunal qui siège. Vous devez répondre à nos questions et il se peut que le comité se réunisse à huis clos et prenne d'autres précautions de façon à ne pas nuire à d'autres intérêts.

Le principe fondamental, à ma connaissance, est que le Parlement a le pouvoir suprême. C'est lui qui impose les règles et les limites, même si cela outrepasse les lois.

Je voudrais aborder une question concernant Mme la juge McGillis, de la Cour fédérale, et qui remonte à 1997. La juge McGillis a fait certaines déclarations et peut-être voudrez-vous faire venir certains de vos adjoints à la table pour murmurer dans vos oreilles.

À l'automne de 1997, dans un jugement publié, Mme la juge McGillis, de la Cour fédérale, a critiqué la clause de «visiteur» de la demande de mandat présentée à la Cour par le SCRS en vertu de l'article 21 de la Loi sur le SCRS. Elle a délivré le mandat, mais elle en a supprimé ladite clause parce qu'elle aurait eu pour effet de déléguer un pouvoir de ciblage à un employé du SCRS.

Votre rapport annuel décrit la façon dont le CSARS examine la teneur et l'exactitude des affidavits et des documents justificatifs présentés à la Cour fédérale à l'appui des demandes de mandat. Je crois que la page 30 du rapport décrit en termes généraux les ajouts et les révisions apportées aux conditions rattachées aux mandats. On y décrit aussi la façon dont la Cour fédérale a apporté une modification et ajouté deux restrictions à ce type de mandat.

J'ai plusieurs questions à poser à ce sujet. Pourriez-vos décrire la procédure que vous suivez pour examiner les mandats que le SCRS demande et ceux qu'il obtient? Examinez-vous les affidavits et les documents justificatifs? Examinez-vous la teneur de la demande de mandat? Examinez-vous aussi la teneur des mandats que délivre la Cour fédérale et pouvez-vous décrire en quoi consiste la clause de «visiteur»?

Lorsque vous examinez les demandes de mandat, déterminez-vous si leur teneur est acceptable aux termes de la Charte des droits et de la Loi sur le SCRS? Combien de fois est-il arrivé par le passé que des clauses du type de celle que Mme la juge McGillis a dénoncée figurent dans des demandes et soient approuvées? Si vous n'avez jamais examiné la question de la clause de «visiteur», le ferez-vous à l'avenir?

Comme vous pouvez le constater, toutes ces questions subsidiaires portent sur le même sujet. Peut-être pourriez-vous y répondre.

L'hon. Paule Gauthier: Merci de ces questions. La procédure suivie pour l'émission des mandats occupe une place très importante dans les activités du CSARS.

Chaque année, nous essayons d'examiner non pas tous les mandats, mais certains d'entre eux. Nous commençons d'abord par les affidavits pour vérifier que les faits qui y sont énoncés sont confirmés par les faits ou les renseignements contenus dans les dossiers du SCRS. D'autre part, lorsque le SCRS affirme qu'une chose est vraie, nous nous assurons qu'il possède dans ses dossiers des preuves à l'appui de ses affirmations. Nous essayons de le faire. Nous examinons les affidavits. Nous examinons les mandats. Chaque année, nous étudions un certain nombre de mandats.

Pour ce qui est de la clause de «visiteur», nous étions au courant de son existence. Cela nous a préoccupés. Nous savions que la Cour fédérale avait approuvé cette clause et nous avons toujours veillé à ce qu'elle soit appliquée dans l'esprit de la loi, qui est de ne pas empiéter sur les droits individuels des Canadiens.

• 1600

La Cour fédérale a accepté cette clause dans le cas de la procédure de mandats. Je crois qu'elle a peut-être été acceptée à 20 reprises. La dernière fois, Mme la juge McGillis a estimé que cette clause ne lui plaisait pas et était inacceptable. Depuis, le SCRS a totalement renoncé à s'en servir. Je ne sais pas si c'est suffisamment clair.

Il existe d'autres clauses pour lesquelles le Service, c'est-à-dire les employés du Service, disposent d'une certaine attitude. Je pourrais mentionner la clause résiduelle. Elle permet de recueillir des renseignements auprès de personnes qui ne sont pas désignées dans un mandat. C'est ce que l'on appelle la clause résiduelle. Il y a aussi la clause des endroits fréquentés et je mentionne ces deux clauses parce que la procédure pénale les prévoit pour l'obtention des mandats.

Ces deux clauses ont été acceptées par la Cour suprême du Canada. Elles sont reconnues. Même si la Cour suprême les a reconnues, nous les examinons chaque fois qu'elles sont utilisées pour nous assurer que cela a été fait conformément à l'esprit de la loi.

M. Paul Forseth: Je m'interroge au sujet de la clause de visiteur. Vous êtes au courant des remous politiques qu'ont suscités les mandats de main-forte que nous avions avant et qui ont soulevé un problème de portée nationale.

L'hon. Paule Gauthier: Oui, et nous avons rencontré, le mois dernier, les représentants de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique. Ils étaient tout à fait au courant de ce dont vous parlez. C'était dans les médias. Le problème s'est posé à cause de la façon dont cela avait été expliqué aux médias. Ces derniers pensaient que la clause de visiteur s'appliquait à tout le monde et pas seulement aux visiteurs étrangers. C'est ce qui a causé le problème.

M. Paul Forseth: D'accord. Dans le document que nous avons ici, nous pouvons lire qu'en 1998-1999, sur un budget total de 1,3 million de dollars, vous comptez dépenser 359 000 $ pour des services professionnels et spéciaux. Il semble qu'une assez forte proportion de votre budget soit destinée à des services contractuels. Est-ce pour les services de conseillers juridiques de l'extérieur? Peut-être pourriez-vous nous expliquer ce dont il s'agit?

L'hon. Paule Gauthier: Il s'agit de conseillers juridiques de l'extérieur. C'est pour des consultants qui font de la recherche. Nous devons parfois nous adresser à des consultants de l'extérieur pour aider notre personnel à réaliser le programme de recherche que nous voulons accomplir au cours d'une année. Nous devons faire appel à une aide extérieure. Cela représente également le coût de la traduction du rapport annuel et de tous les autres rapports que nous préparons.

M. Paul Forseth: Pourriez-vous nous dire comment se répartissent approximativement les honoraires juridiques et les frais de traduction et autres?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, je pourrais vous fournir ces renseignements par écrit. Je ne les ai pas sous la main pour le moment, mais cela peut vous être fourni par écrit.

M. Paul Forseth: Une ventilation du tableau 4.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

M. Paul Forseth: Merci. Je cède la parole au suivant.

La présidente: Monsieur Bellehumeur, aviez-vous des questions?

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Madame Gauthier, j'ai connu vos deux prédécesseurs, M. Courtois et M. Robert, lequel, si je me souviens bien, occupait le poste par intérim. Vous avez au moins un avantage sur vos deux prédécesseurs: vous avez l'air beaucoup plus sympathique. Mais je pense que la différence va s'arrêter là, malheureusement, compte tenu des commentaires que vient de faire votre tout nouveau membre, M. Rae, lui qui a été assermenté aujourd'hui même. Il semble avoir une interprétation extrêmement restrictive des pouvoirs que lui confère la loi face aux parlementaires.

• 1605

Moi, j'ai vécu des expériences assez pénibles avec le CSARS. Depuis 1993, on a étudié des dossiers assez importants, on a rencontré ses membres et on les a questionnés pendant des heures. Il faudrait ressortir les bleus, même si ce sont des documents secrets. On avait établi un comité formé de députés, un comité sur la sécurité nationale dont les séances se tenaient à huis clos. À l'époque, il y avait trois partis officiels et un représentant de chaque parti siégeait à ce comité. C'était au cours de la 35e Législature. En réponse à neuf questions sur dix, M. Courtois se limitait à dire: «En vertu de la loi, je ne peux pas vous répondre.» Nous étudions des cas assez importants, dont un que le Parti réformiste n'a pas mentionné, soit l'affaire Bristow. Il s'agissait de l'infiltration d'un parti politique dans un système démocratique comme le nôtre et c'était extrêmement important. Toute la preuve et tous les éléments qu'on avait apportés nous portaient à croire qu'effectivement, un parti politique avait été infiltré par le Service canadien du renseignement de sécurité. Je pense que les parlementaires étaient en droit d'obtenir un minimum d'information, mais on ne l'a pas eu.

Madame Gauthier, nous du Bloc québécois, nous ne nous battrons pas avec vous. Il y a longtemps qu'on a fait une croix sur une collaboration possible avec le Service canadien du renseignement de sécurité et la GRC. On sera honnêtes avec vous. Je voudrais savoir si vous, madame Gauthier, allez avoir le même mépris envers les parlementaires que vos prédécesseurs. Ma question est-elle assez claire?

L'hon. Paule Gauthier: Elle est très claire. Malheureusement ou heureusement, je ne peux pas justifier la situation puisque je n'étais pas là. J'ai cependant déjà eu l'occasion de dire, lors d'une première présence ici, que je regrettais cette période-là qui, comme vous le dites, a été très difficile.

Mon intention, tout comme celle des membres de mon comité, est de collaborer au maximum avec vous. Nous voulons échanger et vous aider et nous voulons que vous nous aidiez. On poursuit tous le même but. Alors, mon intention la plus sincère est de collaborer davantage avec vous.

M. Michel Bellehumeur: Comme je vous le disais, vous avez l'air très sympathique. C'est rafraîchissant de voir de nouvelles figures au CSARS. J'ose espérer que les deux nouveaux membres qui viennent d'arriver partagent votre point de vue et feront preuve de collaboration, etc., mais compte tenu des réponses que M. Rae a données plus tôt, j'en doute énormément. Ça ne fait même pas une journée qu'il est assermenté que déjà il prend le CSARS très à coeur, peut-être pour le CSARS, mais pas pour les parlementaires.

L'hon. Bob Rae: Non, non, je suis là et on est là pour tout le monde. Je vais vous répondre parce que vous avez déjà mentionné mon nom deux fois.

M. Michel Bellehumeur: Vous êtes le seul, à part Mme Gauthier, à avoir parlé.

L'hon. Bob Rae: Tout ce que je veux dire, c'est que je suis tout à fait d'accord avec Mme Gauthier. Nous allons faire tout notre possible pour collaborer avec les membres de votre comité et répondre aussi franchement que nous le pouvons à toutes vos questions. C'est ce que nous allons faire. Je crois que Mme Gauthier sera d'accord avec moi pour dire que le Parlement a adopté une loi qui a créé tout un système de réglementation régissant le Service canadien du renseignement de sécurité et que nous devons tous respecter cette loi. C'est tout ce que nous disons.

On peut avoir une divergence d'opinions, et si j'ai tort, j'ai tort. Mais je pense que nous avons l'obligation de respecter la loi. C'est tout ce que j'ai dit. Je suis le serviteur du Parlement et le serviteur de la loi, c'est tout.

• 1610

M. Michel Bellehumeur: Je m'adresse à qui voudra répondre. Autrement dit, vous faites une interprétation restrictive de la loi, comme vos prédécesseurs. C'est ce que vous semblez vouloir faire, monsieur Rae, et également vous, madame la présidente, qui disiez dans votre conclusion que vous alliez répondre à nos questions dans les limites permises par la loi.

Je suis avocat, moi aussi. J'ai pratiqué le droit avant d'être député. J'ai travaillé à la loi et j'ai étudié la loi. Finalement, de la façon dont elle est rédigée et de la façon dont vous l'interprétez, vous n'avez pas besoin de venir nous voir parce qu'il n'y a pas grand-chose que vous êtes capables de nous dire.

Je vous donnerai un exemple très concret. Depuis au moins deux ans, un homme d'affaires communique avec moi. Je l'ai rencontré avec ses avocats et tout cela. Il est sûr et certain, pour des raisons que j'ignore, que le Service canadien du renseignement de sécurité a complètement ruiné sa vie. Il avait des comptes de banque en Suisse et ses affaires se portaient très, très bien. Il semble que le bureau de son avocat ait fait l'objet d'écoute électronique. On y a retrouvé l'équipement et tout le kit.

Si je vous présente ce cas-là et que je vous dis que monsieur X a des problèmes avec le Service canadien du renseignement de sécurité, je suis persuadé que, même si vous faites une vérification qui s'avère positive, vous ne pourrez pas me confirmer qu'il fait l'objet d'écoute électronique parce que la loi ne vous le permet pas.

L'hon. Paule Gauthier: Pas du tout, pas du tout. Si vous êtes avocat, prenez l'article 41 et dites tout de suite à votre monsieur de s'adresser à nous, de porter plainte et de suivre le processus. C'est lui-même qui va vivre le processus, et on n'aura pas à vous le raconter.

M. Michel Bellehumeur: Et si je vous disais que la plainte a déjà été formulée et qu'on lui a répondu qu'on ne pouvait rien faire, qu'on ne pouvait pas lui dire si, oui ou non, il était dans le filet du Service canadien du renseignement de sécurité, que me répondriez-vous, madame Gauthier?

L'hon. Paule Gauthier: Je ne suis pas au courant de la plainte. Pouvez-vous me donner plus de détails?

M. Michel Bellehumeur: Pour des motifs de sécurité nationale.

L'hon. Paule Gauthier: Oui, mais il faudrait que j'en sache plus et que vous me disiez...

M. Michel Bellehumeur: Mais vous me disiez...

L'hon. Paule Gauthier: On pourra s'en reparler après.

M. Michel Bellehumeur: Et vous dites immédiatement que ce qu'ils ont fait là serait illégal.

L'hon. Paule Gauthier: Non, je ne dis rien du genre parce que je ne sais pas de quoi je parle. Je ne connais pas exactement la plainte.

M. Michel Bellehumeur: Vous m'avez cité un article, madame Gauthier, qui semble très clair.

L'hon. Paule Gauthier: L'article 41 qui prévoit la procédure à suivre.

M. Michel Bellehumeur: D'accord. Donc, si je vous présente ce cas, vous allez faire la vérification et me dire à moi si, oui ou non, cet individu-là est dans le filet du Service canadien du renseignement de sécurité.

L'hon. Paule Gauthier: Je ne vous dirai pas s'il est dans le filet. S'il est dans le filet et que le Service canadien du renseignement de sécurité a mal agi envers lui, c'est sûr qu'il va finir par le savoir.

M. Michel Bellehumeur: Qui va finir par le savoir?

L'hon. Paule Gauthier: Votre propre client.

M. Michel Bellehumeur: Il est persuadé que c'est le cas, mais le Service canadien du renseignement de sécurité refuse de lui dire si c'est le cas ou non. Est-ce que c'est légal?

L'hon. Paule Gauthier: Comme vous le savez, habituellement, on ne dit pas à quelqu'un qu'il est ou n'est pas l'objet de surveillance. On ne dit pas cela.

M. Michel Bellehumeur: Si moi je vous le demande, est-ce que vous allez me le dire?

L'hon. Paule Gauthier: Vous comprendrez que certains peuvent poser cette question juste pour voir. C'est pour eux en quelque sorte une expédition de pêche. Alors, il faut être très prudent. Vous comprenez cela aussi, j'en suis sûre.

M. Michel Bellehumeur: Je pourrais vous apporter un dossier épais comme cela que j'ai décortiqué. Si ce sont juste des coïncidences, le gars est bien malchanceux, bien, bien malchanceux. Toutes sortes de choses lui sont arrivées, toutes sortes d'événements se sont produits: chez l'avocat et ainsi de suite. Il a changé deux fois d'avocat; à deux reprises, les avocats avaient des micros, etc.

L'hon. Paule Gauthier: Ils étaient incompétents alors.

M. Michel Bellehumeur: Je ne parle pas d'incompétence ou de compétence. J'ai même des rapports qui démontrent que des micros avaient été installés et ainsi de suite.

Madame Gauthier, si je vous arrive avec cela, que je vous demande de faire enquête afin de savoir si ce gars-là fait l'objet d'une enquête par le Service canadien du renseignement de sécurité et que je veux savoir pourquoi il l'ignore et si sa vie est ruinée à cause de cela, est-ce que vous allez me répondre?

L'hon. Paule Gauthier: Il faudrait que j'en sache davantage au sujet du cas avant que je puisse vous répondre. Ceci me paraît être un cas extrême. Dans un tel cas, vous devez suivre la procédure, laquelle existe justement pour régler de tels cas. Je ne vois pas pourquoi elle ne s'appliquerait pas.

M. Michel Bellehumeur: Donc, madame Gauthier, sauf le fait que vous avez l'air très sympathique, rien ne va changer au Service canadien du renseignement de sécurité.

L'hon. Paule Gauthier: C'est votre conclusion.

M. Michel Bellehumeur: Malheureusement.

L'hon. Paule Gauthier: Mais suivez les règles du jeu.

M. Michel Bellehumeur: Malheureusement.

L'hon. Bob Rae: Monsieur le député, puis-je lire....

M. Michel Bellehumeur: Elle n'était pas censée me donner une réponse intelligente?

L'hon. Bob Rae: Puis-je lire l'article 41? On y prévoit le droit pour tout citoyen qui a une plainte de la porter devant nous. Dans le cadre de la procédure prévue, nous entendons ces plaintes. Je ne sais pas si la personne à qui vous faites allusion est un de vos commettants ou une de vos connaissances, mais qui qu'elle soit, c'est le droit des citoyens qui est important pour nous, tout comme pour vous. Permettez-moi de vous lire cet article.

• 1615

    41. (1) Toute personne peut porter plainte contre les activités du Service...

On parle du Service canadien du renseignement de sécurité

    ...auprès du comité de surveillance;

Il s'agit de nous trois.

    celui-ci, sous réserve du paragraphe (2), fait enquête à la condition de s'assurer au préalable de ce qui suit:

      a) d'une part, la plainte a été présentée au directeur sans que ce dernier ait répondu dans un délai jugé normal par le comité ou ait fourni une réponse qui satisfasse le plaignant;

      b) d'autre part, la plainte n'est pas frivole, vexatoire, sans objet ou entachée de mauvaise foi.

Le deuxième point important, c'est que nos décisions sont aussi assujetties à la loi. Il arrive que des plaignants aillent devant la Cour fédérale pour confirmer si nos décisions ont été prises d'une façon juste et claire, conformément à la loi. Alors, je crois qu'il est important qu'un plaignant puisse venir à nous. Nous avons l'obligation d'entendre sa plainte et de rendre une décision, et si notre décision est mauvaise vis-à-vis de la justice naturelle, etc., elle peut être renversée par les tribunaux du Canada. C'est la loi. Les citoyens ont des droits importants. Les droits civils sont aussi notre responsabilité.

M. Michel Bellehumeur: Je n'ai pas d'autres questions sur ce charmant CSARS.

[Traduction]

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur Andrews Grant, madame Gauthier, monsieur Rae, je tiens à vous remercier également d'être venus aujourd'hui. Je vais essayer d'être un peu plus magnanime que mon collègue séparatiste en posant mes questions.

David Harris, un ancien directeur des renseignements stratégiques du SCRS, l'automne dernier, a laissé entendre que le SCRS n'était pas prêt à faire face aux menaces que représentait le terrorisme. Il parlait plus précisément du terrorisme chiite au Canada. Il a souligné qu'il y avait eu d'importantes compressions de personnel, jusqu'à 20 p. 100, qui ont réduit le nombre d'employés de 2 700 à 2 200. En même temps, il demandait au gouvernement de revenir sur sa décision et de rétablir son financement au moins au niveau antérieur pour remédier au problème et permettre au SCRS de répondre aux besoins opérationnels de la lutte anti-terrorisme.

Madame Gauthier, pour ce qui est de la préparation du SCRS, êtes-vous d'accord pour dire que le personnel n'est pas aussi prêt qu'il devrait l'être?

L'hon. Paule Gauthier: Cela nous préoccupe, car nous voulons faire en sorte que le SCRS puisse fonctionner de façon très efficace. Nous visitons les régions et chaque fois, nous posons la question au SCRS. On nous a dit que même si la situation était difficile, il était possible de la gérer.

Une autre façon dont nous pouvons procéder, si c'est efficace, consiste à examiner les activités du SCRS et jusqu'à présent, le Service ne semble pas avoir de difficultés malgré les compressions de personnel.

M. Peter MacKay: Cela me paraît problématique. Nous avons constaté qu'il y avait des problèmes dans pratiquement tous les éléments du Service. A-t-on demandé officiellement ou officieusement que le financement soit rétabli de façon à ce que le personnel puisse être accru?

L'hon. Paule Gauthier: Non, pas à notre connaissance. Nous tenons également beaucoup à ce que le SCRS obtienne les ordinateurs et la nouvelle technologie dont il a besoin et à ce qu'il dispose d'un budget suffisant pour cela. C'est nécessaire en raison des nombreux changements technologiques très coûteux, mais il a été possible de faire face à la situation jusqu'ici.

M. Peter MacKay: Ma question suivante concerne un ancien ambassadeur du Canada en Israël, Norman Spector, qui a fait des allégations selon lesquelles des employés ou des agents du SCRS collaboraient avec les services secrets israéliens. Quand le directeur du SCRS a comparu devant le comité, en avril, il a nié toute participation d'agents du Service à des opérations conjointes en Israël.

• 1620

On a déclaré que toute opération du SCRS à l'extérieur des frontières du pays devait être approuvée au préalable par le solliciteur général. Vous-même ou votre comité avez-vous examiné cette situation? Êtes-vous au courant et pouvez-vous nous dire ce qu'il en est?

L'hon. Paule Gauthier: Nous avons examiné les commentaires de M. Spector. Notre examen n'est pas terminé. Notre personnel de recherche est revenu de Tel Aviv hier ou avant-hier. Nous avons également rencontré M. Spector. Nous avons eu des entretiens avec d'autres représentants du SCRS et je ne peux pas vous faire part de nos conclusions aujourd'hui. Je peux seulement vous dire que, bien entendu, nous avons des ententes avec le Mossad. Le SCRS a conclu des ententes pour des échanges de renseignements, certains types d'aide, le filtrage de sécurité et des choses de ce genre.

Pour ce qui est des opérations conjointes, tout dépend à qui vous parlez étant donné qu'il y en a de nombreuses définitions. Dans le rapport annuel que nous avons préparé pour cette année, nous parlons à la page 9 de définir les types de liaison. Nous faisons également observer que les définitions du Service en ce qui concerne la portée des ententes n'apparaissent ni dans les directives ministérielles ni dans les documents de politique du SCRS.

Le comité souhaiterait que le Service donne une définition claire et précise de ses diverses ententes d'échange. Nous émettons également l'espoir qu'une nouvelle directive ministérielle supprimera toute ambiguïté en ce qui concerne la définition des ententes avec l'étranger.

Compte tenu de ce que nous avons pu lire dans les journaux, cela veut dire qu'il faut des définitions plus claires. Notre examen n'est pas terminé et peut-être que d'ici la fin juin nous pourrons vous informer de nos conclusions. Nous le ferons avec plaisir.

M. Peter MacKay: Suite à cela, lorsque vous parlez d'une coopération entre le SCRS et le Mossad, cela va-t-il au-delà du simple échange de renseignements?

L'hon. Paule Gauthier: Je ne pourrais pas vous le dire pour le moment. Les deux services n'entretiennent pas de relations étroites. Ce n'est pas comme avec les États-Unis ou les autres pays qui sont plus proches de nous. Je suis certaine qu'il y a eu un échange de renseignements étant donné que nous avons là-bas un agent de liaison en matière de sécurité, mais il nous serait difficile pour le moment de vous dire exactement ce que le SCRS a fait avec le Mossad. Il s'agissait d'opérations conjointes en ce sens que les deux services ont fait certaines choses ensemble et qu'ils visaient le même objectif... si je puis dire.

M. Peter MacKay: Sur un sujet connexe, vous vous souviendrez sans doute de la tentative d'assassinat contre un dirigeant du Hamas, Khaled Meshal, en Jordanie, en septembre, et de l'implication ou du moins des allégations selon lesquelles les autorités du SCRS auraient fourni des passeports canadiens au Mossad. A-t-on terminé l'enquête sur cette affaire et quelles en ont été les conclusions?

• 1625

L'hon. Paule Gauthier: Il est très clair que le SCRS n'était absolument pas impliqué dans cette affaire de faux passeports.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, madame la présidente. Je remercie les témoins. J'apprécie votre présence ici, cet après-midi. Mes félicitations à MM. Rae et Grant. Je ne sais pas je dois vous adresser mes félicitations ou vous faire part de ma commisération.

J'ai la chance de siéger au Comité de l'immigration. Le mois dernier, deux Kurdes turcs, Sami Durgun et Sulymen Govern ont comparu devant le comité. Ils nous ont remis une lettre, qu'ils avaient également communiquée à la presse, et qui était signée par 14 Kurdes turcs accusant le SCRS d'exiger régulièrement des renseignements en échange de la résidence permanente. Ces personnes en étaient scandalisées, car elles estimaient que ces procédés n'étaient pas dignes du Canada.

La semaine suivante, M. Alcock a comparu devant le comité. J'ai porté la lettre à son attention. Apparemment, il ne l'avait pas lue même si elle avait été communiquée aux journaux. D'autres questions ont été soulevées. Je lui ai demandé si ses fonctionnaires avaient l'habitude de se comporter de cette façon. Il m'a répondu par la négative. Il m'a dit que c'était contraire à tout manuel que devaient suivre les agents qui menaient ces enquêtes.

J'ai posé les mêmes questions au solliciteur général. Je dois dire que cette question le préoccupe beaucoup et qu'il en a fait le suivi. Apparemment, il n'existe pas de manuel pour ce genre d'entrevues.

De prime abord, ce n'est pas vraiment inquiétant. Nous pourrions croire que ces plaintes émanent seulement de quelques mécontents. Pourquoi s'en soucier? Puis il y a eu les articles publiés dans le Globe and Mail. Celui-ci est daté du 15 avril. Un chauffeur de limousine sikh, Ranjit Singh, raconte pourquoi il ne peut pas obtenir sa résidence permanente au Canada. Il a refusé de fournir au service secret civil du Canada des renseignements sur ses compatriotes sikhs.

Voici un article du Star de Toronto concernant un demandeur du statut de réfugié. Il s'agit également d'un sikh. Il a dit que le SCRS l'aiderait à obtenir la résidence permanente tant convoitée qu'il voulait pour lui-même, sa femme et ses deux fils.

Nous ne pouvons pas obtenir ces renseignements au moyen de la Loi sur l'accès à l'information. Les plaintes que ces personnes adressent au SCRS semblent rester sans réponse. Des témoins indépendants ont confirmé ces témoignages. Surprise, nous avons également obtenu la transcription des délibérations de la Commission de l'immigration qui énonce les raisons pour lesquelles elle a refusé la résidence permanente à M. Sami Durgun. J'ai lu cette transcription. Je ne vois pas comment on pourrait en tirer des conclusions. La réponse à la lettre est datée du 1er mai 1998. Elle se rapporte à une demande de renseignements datant du 27 octobre 1993, cinq ans plus tôt.

Je ne sais pas exactement ce qu'il faut conclure de tout cela. Apparemment, il y a suffisamment de fumée pour pouvoir sérieusement croire qu'il y a un feu. Je me demande si en tant qu'agents chargés de surveiller le SCRS vous avez enquêté sur ce genre d'allégations.

• 1630

L'hon. Paule Gauthier: Oui, nous sommes en train de terminer une étude du processus d'examen sécuritaire. Quand vous dites qu'il n'y a pas de transcriptions des entrevues permettant de comprendre exactement ce qui a été dit, je crois que vous avez raison. Notre étude n'est pas terminée.

Nous sommes au courant de tous ces cas et, comme vous le savez, il y aura des plaintes. Nous en avons déjà reçu deux et nous savons qu'il y en aura probablement une douzaine d'autres. Il me serait difficile de vous dire que le SCRS a tout à fait tort, que ce n'est pas un simple feu, mais une véritable conflagration. Je donnerais l'impression d'avoir tiré mes conclusions avant même que notre enquête ait commencé.

Pour cette raison, nous sommes prêts à étudier chacun de ces cas. C'est une bonne chose, car cela s'ajoutera à l'examen que nous sommes en train de terminer. Ces deux enquêtes nous permettrons d'avoir une idée très précise de ce qui se passe.

Il faut également comprendre que lorsque les agents du SCRS interrogent ces personnes, elles se sentent très vulnérables étant donné qu'elles ne sont pas dans leur propre pays. Le Service doit disposer d'agents très expérimentés pour mener ces entrevues.

Ils pourraient dire: «Vous devez coopérer et nous vous aiderons». Disons que ce soit vous. Vous êtes dans un pays étranger et vous refusez de révéler quoi que ce soit à votre sujet. C'est une situation très difficile pour la personne chargée d'évaluer votre dossier. Elle peut prononcer certaines paroles dont le sens dépendra du contexte. C'est difficile à évaluer.

M. John McKay: Je sais qu'il s'agit d'une question délicate. Je sais que les méthodes d'entrevue varient d'un agent à l'autre et que, lorsqu'on a affaire à des personnes de culture différente, vos paroles risquent d'être mal interprétées. Mais quand il y a quatre plaintes, une lettre signée par 14 personnes et des articles publiés dans divers journaux, vous commencez à penser qu'il y a anguille sous roche.

Je me demande si vous ne pourriez pas vous engager à nous faire rapport de cette question afin que nous sachions que ces personnes ne sont pas lésées dans leurs droits et qu'on ne leur demande pas de répondre à des questions tout à fait inacceptables pour un Canadien.

L'hon. Paule Gauthier: Nous ferons de notre mieux pour vous rassurer et vous en dire le plus possible. Nous allons certainement vous éclairer sur la situation, sur ce qui se passe.

M. John McKay: Pour être un peu plus précis, dans quel délai pourriez-vous le faire? Vous êtes en train de mener une enquête. Vous avez reçu des plaintes et vous savez que vous en recevrez d'autres prochainement. Quel serait un délai raisonnable?

L'hon. Paule Gauthier: Normalement, nous devrions revenir ici cet automne, probablement en octobre ou en novembre. Je suis certaine que, d'ici là, nous pourrons vous dire ce qu'il en est.

M. John McKay: Je l'apprécie. Merci.

L'hon. Bob Rae: À titre d'éclaircissement, ce que vous m'avez dit me préoccupe, car je n'avais pas entendu dire que des gens s'étaient adressés au CSARS sans obtenir satisfaction.

Étant donné que je suis l'un des membres du comité, je crois que nous allons tenir des audiences. Ce sera pour répondre aux plaintes formulées en vertu des articles 41 et 42.

• 1635

M. John McKay: Oui.

L'hon. Bob Rae: Nous ferons deux choses. Premièrement, nous allons entendre les plaintes de ces personnes et cela le plus rapidement possible. Deuxièmement, nous allons nous livrer à un examen général des rapports entre la Loi sur l'immigration, la Loi sur la citoyenneté et les divers examens de sécurité dont font l'objet les personnes qui demandent à venir au Canada ou qui sont déjà là. Nous sommes en train de terminer cette étude de la politique. Voilà les deux choses que nous faisons.

M. John McKay: Pour ce qui est des relations entre les plaignants et le CSARS, ce sont des renseignements provenant de Soeur Mary Jo Leddy. Bien entendu, je suis seulement au courant de la plainte comme telle. Je ne voudrais pas être...

L'hon. Bob Rae: Maintenant que nous avons le quorum, nous allons tenir des audiences. Soeur Leddy entendra parler de nous.

M. John McKay: Merci.

La présidente: J'aimerais à mon tour poser une ou deux questions suite aux questions de Peter MacKay concernant Israël afin de comprendre certaines choses.

Vous avez dit que le SCRS avait parlé à M. Spector. Est-ce exact?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, nous l'avons rencontré.

La présidente: L'avez-vous rencontré vous-même?

L'hon. Paule Gauthier: Pas nous-mêmes, mais notre personnel.

La présidente: M. Spector s'est-il jamais plaint au CSARS au sujet de cette question?

L'hon. Paule Gauthier: Non.

La présidente: Non, mais en tant qu'ancien chef du cabinet d'un ancien premier ministre, il devait certainement connaître le rôle du CSARS. Il se peut même qu'il soit intervenu dans la nomination de membres du CSARS.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

La présidente: Il devrait savoir que si les agissements du SCRS suscitaient des inquiétudes, il pouvait téléphoner au CSARS pour qu'on y remédie?

L'hon. Paule Gauthier: Je suppose qu'il le savait, en effet.

La présidente: Ce n'est pas lui qui a demandé à rencontrer les membres du CSARS, mais l'inverse.

L'hon. Paule Gauthier: Non, c'est nous.

La présidente: Sans doute peut-on dire qu'il a trouvé dans les médias un sujet sur lequel votre organisme devait se pencher?

L'hon. Paule Gauthier: En effet. Au cours de l'entrevue, je crois qu'il a dit, dès le début, que toutes les paroles qui seraient prononcées seraient publiées, qu'il y veillerait...

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Lui-même.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

La présidente: Monsieur Hilstrom.

L'hon. Sheila Finestone: Madame la présidente, peut-être pourrions-nous leur demander les résultats de leur enquête. Ils ont reçu le rapport aujourd'hui.

La présidente: Avez-vous un délai pour ce rapport également?

L'hon. Paule Gauthier: Le rapport sur le Mossad et les Israéliens?

La présidente: Oui.

L'hon. Paule Gauthier: J'ai dit que ce serait sans doute d'ici la fin de juin.

La présidente: Cette question et celle de l'immigration seront intégrées de toute façon dans votre rapport annuel, n'est-ce pas?

L'hon. Paule Gauthier: En effet.

La présidente: Monsieur Hilstrom.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Merci beaucoup, madame la présidente. Le comité doit publier un rapport annuel ou autre. Les réponses aux questions que je vais poser y seront peut-être.

Vous avez dit que chaque année vous choisissez une région dans laquelle vous procédiez à des enquêtes et à des examens. Est-ce vrai?

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

M. Howard Hilstrom: Pouvez-vous nous dire quelles régions vous avez examinées l'année dernière, en 1997?

L'hon. Paule Gauthier: Normalement, nous n'indiquons pas le nom de la région, mais nous les examinons l'une après l'autre. Il n'est pas très difficile de savoir lesquelles.

M. Howard Hilstrom: S'agit-il d'environ cinq régions?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, à peu près.

M. Howard Hilstrom: Je vais poser une question un peu plus générale. Dans la région que vous avez examinée l'année dernière, avez-vous trouvé des exemples de contraventions de la part d'employés du SCRS, du directeur au concierge, qu'il s'agisse d'actes illégaux ou d'entorses à la politique du Service? Avez-vous trouvé quoi que ce soit de répréhensible dans la façon dont le SCRS fonctionne?

L'hon. Paule Gauthier: Je ne me souviens pas qu'il y ait eu des actes illégaux. Pour ce qui est des entorses à la politique, peut-être que l'approbation du ministre n'a pas été obtenue avant de se livrer à certaines activités. Peut-être y a-t-il eu un cas de ce genre. Nous avons fait un suivi et le SCRS nous a dit que l'employé fautif avait été réprimandé.

M. Howard Hilstrom: Si je vous pose la question ce n'est pas tellement pour avoir un exemple précis. J'essaie d'établir si vous faites votre travail.

• 1640

C'est une question amicale que je vous pose.

Pourriez-vous, à un moment donné, m'assurer ou assurer à la présidence du comité que vous n'avez constaté aucun acte illégal? Si c'est le cas, je suppose que cela vous serait signalé.

L'hon. Paule Gauthier: Certainement.

M. Howard Hilstrom: Pour qui est des plaintes, combien de personnes se sont plaintes au CSARS l'année dernière? Avez-vous des chiffres?

L'hon. Paule Gauthier: Peut-être 40. Environ une quarantaine, je crois.

M. Howard Hilstrom: Une quarantaine?

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

M. Howard Hilstrom: Combien de ces plaintes avez-vous pu régler en un an?

L'hon. Paule Gauthier: Pratiquement toutes. Nous les examinons le plus rapidement possible.

M. Howard Hilstrom: J'ai constaté que, dans le cas de la GRC, on met souvent trois ou quatre ans à examiner une plainte.

L'hon. Paule Gauthier: Il n'y a aucune comparaison avec la GRC.

M. Howard Hilstrom: C'est mieux. Nous le dirons à la GRC.

L'hon. Paule Gauthier: Cela pourrait changer.

M. Howard Hilstrom: Sur les plaintes que vous avez réglées—disons qu'il y en a eu 30 ou 40 ou le chiffre que vous choisirez—y a-t-il eu des plaintes légitimes?

L'hon. Paule Gauthier: Oui, je dirais que, dans bien des cas, nous avons recommandé au SCRS de changer certaines choses dans la façon dont les entrevues étaient menées. Oui, ces plaintes étaient fondées.

M. Howard Hilstrom: Vous les avez signalées au solliciteur général, n'est-ce pas?

L'hon. Paule Gauthier: Certainement.

M. Howard Hilstrom: Lui faites-vous directement rapport?

L'hon. Paule Gauthier: Certainement.

M. Howard Hilstrom: Il examine ces questions et le reste.

L'hon. Paule Gauthier: C'est envoyé au solliciteur général et au plaignant, oui.

M. Howard Hilstrom: Cela me paraît satisfaisant.

La présidente: Merci, monsieur Hilstrom. Monsieur MacKay.

M. Peter MacKay: Je serai bref. Suite aux dernières questions, lorsque vous constatez qu'il y a eu faute, que quelqu'un a commis une erreur au sein du SCRS et que vous signalez le cas au solliciteur général, indiquez-vous également comment le cas devrait être réglé ou les mesures qu'il y aurait lieu de prendre?

L'hon. Paule Gauthier: Des suggestions quant à ce qu'il faudrait modifier ou des recommandations...

M. Peter MacKay: Je parle plutôt de la responsabilité personnelle.

L'hon. Paule Gauthier: Je ne suis pas certaine d'avoir compris la question, mais quand nous constatons que quelque chose ne va pas dans le Service, s'il s'agit des activités régulières du Service et non pas de quelque chose d'urgent ou ayant de graves conséquences, nous attendons de présenter notre rapport annuel pour en parler. Le Service est informé de nos opinions par notre rapport annuel.

Lorsqu'une question nous paraît très urgente, nous déposons un rapport en vertu de l'article 54. Nous l'envoyons au solliciteur général afin qu'il sache exactement ce qui se passe. Nous n'attendons pas.

Ensuite vous m'avez demandé si nous formulons des recommandations dans ce genre de rapports.

M. Peter MacKay: Quant aux sanctions qui doivent être prises contre l'intéressé ou la façon de régler la situation.

L'hon. Paule Gauthier: Bien entendu, nous faisons des recommandations, mais nous n'avons pas pour rôle de dicter au Service ce qu'il doit faire. Oui, nous formulons des recommandations.

M. Peter MacKay: Vous cherchez davantage à résoudre les problèmes qu'à porter un jugement.

M. Paule Gauthier: Nous essayons de trouver des solutions. Nous proposons des solutions si nous pensons les connaître.

M. Peter MacKay: Ces solutions iraient-elles jusqu'au renvoi d'un agent?

L'hon. Paule Gauthier: D'un membre du personnel?

M. Peter MacKay: Oui.

L'hon. Paule Gauthier: Non. À ma connaissance, nous n'avons jamais conclu qu'il faudrait renvoyer un agent, mais pour ce qui est de lui adresser une réprimande ou de proposer des sanctions disciplinaires, oui.

• 1645

M. Peter MacKay: Pour en revenir très brièvement à la question des passeports, compte tenu de votre réponse antérieure, a-t-on examiné l'affirmation du gouvernement selon laquelle les passeports canadiens n'ont pas été utilisés? Le SCRS a-t-il fait une enquête approfondie à ce sujet?

L'hon. Bob Rae: Je n'ai pas entendu la question.

L'hon. Paule Gauthier: Vous savez que nous examinons les activités du SCRS.

M. Peter MacKay: C'est exact.

L'hon. Paule Gauthier: Nous nous sommes assurés que le SCRS n'a pas participé à cette opération ou n'a pas aidé le Mossad à obtenir ces passeports ou à les falsifier. Nous ignorons ce que le gouvernement fait ou ne fait pas. Je ne veux absolument pas dire que le gouvernement était impliqué dans cette affaire, mais je ne comprends pas exactement ce que vous entendez quand vous parlez du gouvernement.

M. Peter MacKay: Je voudrais savoir si le CSARS et non pas le SCRS a examiné ce qui s'est passé en ce qui concerne ces passeports ou si c'est seulement le SCRS qui l'a fait? Vous n'avez jamais examiné ses conclusions.

L'hon. Paule Gauthier: Non. Nous les avons examinées. Nous avons tiré nos propres conclusions à partir de notre propre examen des faits. Nous ne nous sommes pas fiés uniquement aux conclusions du SCRS. Nous avons examiné les dossiers et fait notre propre examen.

M. Peter MacKay: Et vous êtes convaincus que ces conclusions étaient satisfaisantes.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

M. Peter MacKay: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, Peter.

Mme Finestone.

L'hon. Sheila Finestone: Merci beaucoup, madame la présidente.

Pour revenir sur une ou deux questions, pour ce qui est des questions de mon collègue M. John McKay, il parlait surtout des sources humaines. Je les appelle des informateurs, mais je crois que la bonne terminologie est «source humaine».

Dans votre rapport sur les allégations concernant le SCRS et l'examen des immigrants, vous avez vivement critiqué le SCRS et vous le mentionnez dans votre rapport qui a été rendu public en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Une demande a été faite en vertu de la Loi. Vous avez publié ces renseignements. Pouvons-nous obtenir une copie de ce rapport.

L'hon. Paule Gauthier: Certainement.

L'hon. Sheila Finestone: Merci. Pourriez-vous le faire parvenir à notre greffier.

L'hon. Paule Gauthier: Certainement.

L'hon. Sheila Finestone: Très bien. Merci beaucoup.

En février 1998, le CSARS a tenu une réunion à Québec et il semble que cette réunion se soit déroulée entièrement en anglais. Avez-vous reçu une plainte émanant du Commissaire aux langues officielles et d'un employé du SCRS qui assistait à cette réunion? Comme je suis la présidente du Comité des langues officielles, je voudrais d'abord que vous nous expliquiez pourquoi la réunion a eu lieu à Québec. Tenez-vous normalement vos réunions dans les diverses régions du pays?

L'hon. Paule Gauthier: Savez-vous pourquoi?

L'hon. Sheila Finestone: Non, je ne sais pas pourquoi.

L'hon. Paule Gauthier: Excellente question. Nous n'allons pas souvent à Québec, mais il se trouve que c'est ma ville d'origine. Nous sommes allés à Québec parce que c'est une...

L'hon. Sheila Finestone: Vous êtes rentrée au bercail.

L'hon. Paule Gauthier: Mais il y a aussi des employés du SCRS à Québec. Leur secteur couvre la Gaspésie et tout l'est du Québec. Nous nous sommes dit qu'il serait agréable de voir ce qui se passe à Québec et pas seulement à Montréal.

Oui, vous avez raison. Il est très regrettable que ce soit arrivé surtout dans ma propre ville. Mais je dois avouer que le Service nous a pris par surprise. Nous pensions qu'il y aurait seulement trois ou quatre membres du personnel de Québec alors que tout le monde est venu de Montréal. Au lieu d'avoir trois ou quatre personnes du Service de Québec, tout le personnel est venu de Montréal si bien que le groupe était beaucoup plus important. Le groupe étant plus nombreux, cela a changé la dynamique de la réunion.

Nous pensions ne pas avoir besoin d'interprète, car le groupe devait être très petit. Il y avait une personne unilingue, Rosemary Brown, à qui nous aurions pu expliquer très facilement ce qui se disait si nous n'avions été qu'un petit groupe. Mais comme le SCRS a décidé de faire venir tout le monde pour nous rencontrer, cela a changé la situation et il y avait beaucoup de monde à la réunion.

L'hon. Sheila Finestone: Était-ce une réunion publique?

L'hon. Paule Gauthier: Non. Ce n'était pas une réunion publique, mais nous étions nombreux autour de la table et les choses ne se passent pas de la même façon lorsque vous discutez en petit groupe ou lorsque vous avez une importante assemblée. Nous n'avions donc pas d'interprète.

L'hon. Sheila Finestone: Mais normalement vous en auriez eu un.

• 1650

L'hon. Paule Gauthier: Oui, nous avons été pris par surprise. Au début de la réunion, j'ai expliqué la situation au SCRS en disant: nous pourrions tenir la réunion en français, mais voyez-vous des objections à ce que nous le fassions en anglais? On nous a répondu que non, que cela ne posait pas de problème. Voilà pourquoi nous l'avons fait et je le regrette, étant donné qu'on s'est plaint par la suite. À l'avenir, nous ne nous passerons jamais plus d'interprète. Voilà ce qui s'est passé.

L'hon. Sheila Finestone: Merci. Je suis sûre que la vue des Plaines d'Abraham est très belle. J'aimerais qu'il y ait là-bas une statue à trois faces plutôt que deux. Je ne pouvais pas m'empêcher de glisser cela. Vous avez apprécié?

En fait, madame la présidente, les questions que je voulais poser l'ont déjà été. Je vous remercie. Je me réjouis de vous rencontrer et d'en apprendre plus sur ce que vous faites et j'attends les réponses que nous vous avons demandées.

L'hon. Paule Gauthier: Tout le plaisir est pour nous.

L'hon. Sheila Finestone: Merci.

La présidente: Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: J'ai seulement une dernière question pour confirmer que vous avez bien pris un engagement en ce qui concerne le tableau 4, page 14. Vous devez nous envoyer une lettre expliquant plus en détail la ventilation de ces dépenses. C'est ce que vous avez promis et nous comptons sur vous.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

M. Paul Forseth: D'accord, merci.

La présidente: Avez-vous d'autres questions?

M. Derek Lee: J'ai changé d'avis. Je vais revenir rapidement sur la question que j'ai soulevée tout à l'heure afin de vous donner le contexte. J'espère que vous allez réexaminer cette question.

Vous m'avez dit que vous aviez chacun prêté le serment du Conseil privé et le serment de secret qui figure à l'annexe de la loi. Nous savons tous que le serment du Conseil privé est très court et sans mots inutiles. Le serment professionnel prévu à l'annexe de la loi est formulé en ces termes:

    Je, .........., jure que, sans autorisation régulièrement donnée, je ne révélerai rien de ce qui sera parvenu à ma connaissance dans l'exercice de mes fonctions pour le compte ou sous la direction du [...]

—SCRS, etc.

La Constitution du Canada confère au Parlement ce que l'on appelle des «privilèges». Ils existent bel et bien. Ils font partie de la Constitution et cela a toujours été le cas. Leur existence est non seulement affirmée dans la Constitution, mais elle est confirmée par la jurisprudence moderne et elle est sans équivoque. Ces privilèges font partie de la Constitution du Canada qui s'applique à ce Parlement et à toutes les assemblées législatives du pays.

L'un de ces privilèges qui est immuable et n'a jamais changé, qui n'a jamais été nié et qui existe depuis plus de 300 ans est le pouvoir de faire comparaître des personnes et d'exiger la production de documents et de dossiers. Cela peut sembler un peu archaïque. Monsieur Rae, vous vous souviendrez sans doute, pour avoir siégé ici, de ce pouvoir de faire comparaître des personnes ou d'exiger la production de documents et de dossiers. C'est l'équivalent du pouvoir de citer à comparaître à des tribunaux civils et criminels. C'en est l'équivalent parlementaire et cela existe depuis des siècles.

La Chambre des communes possède ce privilège, ce droit, ce droit constitutionnel. Ce droit, ce pouvoir, cette autorité que possède la Chambre des communes a été délégué explicitement à chacun de ses comités permanents. Le Sénat en a fait autant. C'est consigné au paragraphe 108(1) du Règlement. Il s'agit d'une délégation explicite. Ce plein pouvoir, ce pouvoir de citer à comparaître que je ne décrirai pas en détail et que j'appellerai simplement le pouvoir de faire comparaître des personnes ou d'exiger la production de documents et de dossiers est donc délégué aux comités.

Nous avons ici, au Parlement et dans toutes les assemblées législatives, un régime qui se fonde sur la Constitution et qui permet de citer des personnes à comparaître et à témoigner.

• 1655

Peu importe le serment qu'ait prêté une personne ou ses obligations à l'extérieur du Parlement, ce pouvoir nous permet de la forcer à témoigner, à se présenter et à produire des documents, quel que soit le serment qu'elle ait prêté.

Si vous le permettez, j'aborderai maintenant, à des fins pratiques, le serment que vous avez prêté.

L'hon. Paule Gauthier: Je vais vous arrêter là. Ou voyez-vous que peu importe le serment qui a été prêté? Où voyez-vous cela?

M. Derek Lee: Ce pouvoir n'est tout simplement pas limité dans la Constitution ou le droit parlementaire.

L'hon. Bob Rae: Cela s'applique également aux ministres?

M. Derek Lee: Oui.

L'hon. Bob Rae: Par conséquent, vous pourriez demander impunément au procureur général du Canada, si le comité décidait de le faire—et j'accepte la correction de M. Forseth—de vous dire si Untel fait l'objet d'une enquête criminelle?

M. Derek Lee: Oui.

Le Parlement n'a pas pour habitude de poser des questions stupides. Souvent, il s'abstient de poser certaines questions ou il se réunit d'abord à huis clos ou prend d'autres précautions. Le Parlement n'agit pas de façon stupide. Il y a des choses qu'on ne doit pas faire publiquement. Il est arrivé aussi que la politique influence le processus. Quoi qu'il en soit, ce pouvoir existe.

Passons maintenant à votre serment où il est dit:

    sauf autorisation régulièrement donnée, je ne révélerai rien [...]

Je ne suis pas d'accord pour dire que votre serment prime sur tout le reste, mais reconnaissant que votre serment est important à vos yeux, je vous dirais que le pouvoir qu'a le Parlement de vous obliger à témoigner et à répondre à nos questions, qui est protégé par la Constitution, est une autorisation régulièrement donnée. Ce petit paradigme devrait suffire à nous sortir de cette impasse.

Encore une fois, j'estime que votre serment a son importance du point de vue politique et du point de vue juridique, mais pas du point de vue du droit parlementaire. Je vous laisse réfléchir à tout cela dans l'espoir que nous pourrons régler cette question. Cela intéresse également les autres comités parlementaires. M. Rae voulait répondre.

L'hon. Bob Rae: Non, ce n'est pas que je veuille répondre. Je tiens à être parfaitement clair vis-à-vis de vous et de tous les membres du comité.

Il y a diverses façons dont ces questions peuvent être réglées. En tant que membre du CSARS, je ne verrais pas d'objection si le Parlement voulait établir des règles nous obligeant à divulguer certains renseignements. Je n'y verrais aucune objection.

Je ne considère pas que je sois plus compétent que vous ou qui que ce soit d'autre pour recevoir des renseignements ultra secrets. C'est seulement qu'en vertu du régime actuellement en vigueur, nous avons accès à certains renseignements. Nous les obtenons en raison du poste que nous occupons, tout comme le solliciteur général ou le premier ministre ou les autres personnes qui ont une autorisation sécuritaire à divers titres.

Je ne me fie pas tellement au serment professionnel. Vous essayez de me conduire dans une certaine voie. Je me fie davantage à ce que disent les autres lois qui sont là pour une bonne raison. Elles sont là pour protéger les droits civils de l'individu. Elles sont là pour protéger leur droit à la vie privée. Lorsque j'ai posé ma question au sujet du procureur général, je pense qu'il lui serait très difficile de révéler si quelqu'un fait l'objet d'une enquête policière. Quelqu'un peut recevoir une plainte.

Monsieur Lee, comme vous savez, si vous recevez une plainte en tant que député, il se peut qu'on vous communique certains renseignements. Vous vous demanderez: «Que dois-je faire de ces renseignements? Dois-je les divulguer publiquement? Dois-je tenir une conférence de presse?» Parfois vous vous direz: «Non, je ne vais pas divulguer des renseignements. Je vais les garder pour moi car, si je les divulguais, cela pourrait faire du tort aux personnes concernées et je dois donc m'en abstenir.»

Nous devons tenir compte non pas d'une seule loi, mais de toute une série de lois qui nous obligent à respecter les droits civils de l'individu.

• 1700

Par conséquent, si vous me demandez de répondre à une question à laquelle j'estime ne pas avoir le droit de répondre, je vais devoir vous le dire. Et si vous me rétorquez que le Parlement est suprême, je vous dirai qu'effectivement je suis d'accord pour dire que le Parlement est suprême, mais qu'il l'est conformément aux lois du pays. Le Parlement doit respecter la loi. Tel est le sens de la Constitution. Le Parlement n'est pas au-dessus des lois. Il doit se conformer aux lois.

M. Derek Lee: Mais vous n'avez pas accepté mon argument à savoir que le Parlement n'est pas soumis aux contraintes de la Loi sur la protection de la vie privée ou de la Loi sur l'accès à l'information. Cet argument a déjà été accepté ici. Par conséquent, si vous restez sur vos positions antérieures, j'espère que vous ne...

Je veux faire valoir que le Parlement n'est pas lié par ces lois d'application générale. Et c'est un principe que vous pouvez tenir pour acquis. Cela étant, le Parlement ne poserait pas à la légère une question de ce genre en public et cela nous amène à l'art d'être parlementaire.

Les parlementaires n'ont pas besoin de connaître tous les détails. Non seulement ce n'est pas nécessaire, mais nous ne voulons pas les connaître.

Un ancien directeur d'un service de renseignement des États-Unis a dit un jour: «Un an plus tard vous ne vous souvenez plus si vous l'avez entendu dire à l'occasion d'une séance d'information confidentielle ou si vous l'avez lu en première page du New York Times». Il y a donc des choses que vous ne voulez pas savoir à moins que ce soit nécessaire. Mais il y a aussi des occasions où le Parlement doit être informé en tant que grand inquisiteur de la nation.

Ce comité, les comités qui l'ont précédé, le sous-comité et le comité spécial ont trouvé au moins deux ou trois façons d'obtenir des renseignements que certaines lois interdiraient de divulguer publiquement. Des renseignements personnels ont été divulgués à huis clos, sans copies et sans notes. Des informations concernant des opérations de renseignement ont été également obtenues à huis clos, dans des locaux spéciaux, sans notes et sans copies. Il fallait être en manches de chemise. Ce genre d'entente a été conclu. Et nos collègues ont donné leur accord, par simple bon sens, pour que ce processus puisse avoir lieu et cela a généralement bien marché.

Comme ces renseignements nous sont communiqués sur cette base, ils apparaissent rarement dans les comptes rendus parlementaires. Aucune note n'est prise. Le travail est fait, mais lorsqu'il s'agit d'examiner la question, il n'existe aucun précédent. Vous ne pouvez en trouver trace nulle part. Certains d'entre nous espèrent donc surmonter bientôt ce problème.

La présidente: Monsieur Grant.

L'hon. James Andrews Grant: Madame la présidente, j'aimerais répondre à cela. Personnellement, en tant que membre du comité, j'aimerais être aussi coopératif que possible, car je crois que vous avez un travail à faire. Nous avons consacré beaucoup de temps à cette question et je m'y suis intéressé personnellement. Votre point de vue me paraît légitime. C'est votre opinion et ce n'est pas la seule. Vous avez peut-être raison, mais il se peut également que vous ayez tort.

Néanmoins, le genre de renseignements que nous possédons, tout le reste mis à part, est tellement secret et peu causer tellement de tort à des gens que je ne suis pas prêt, personnellement, à les divulguer simplement parce que vous m'aurez fait la leçon. Ne voyez là rien de péjoratif et il se peut que vous ayez raison. Je vous dis seulement que, personnellement, je ne suis pas prêt à le faire à moins que quelqu'un ne me dise que je dois le faire. Vous pourrez donc continuer à m'énoncer toutes sortes de bonnes raisons, mais je tiens à ce que vous sachiez quelle est ma position. J'ai sur le sujet des idées bien arrêtées.

M. Derek Lee: Si je peux pousser les choses un peu plus loin, la solution que le comité pourrait adopter devant un refus serait de vous conduire à la Chambre où vous seriez admonesté, suivant l'expression consacrée et il se peut que vous ne puissiez quitter la Chambre. Ce n'est pas arrivé depuis 70 ans environ.

La présidente: Monsieur Lee, il faut quand même préciser que ce serait seulement si le comité était d'accord pour dire que la question était suffisamment importante pour que ce soit justifié.

M. Derek Lee: Il revient entièrement au comité d'en décider. En fait, ce n'est même pas à lui d'en décider vraiment, car la question devra être soumise à la Chambre des communes. Comme c'est une question de privilège, elle serait réglée immédiatement.

L'hon. James Andrews Grant: Oui, mais nous ne sommes pas en France, pour commencer.

• 1705

Je ne pense pas qu'aucun de nous trois ne cherche à faire de l'obstruction à propos de cette question. Si nous vous en avons donné l'impression, ce n'est pas du tout le cas. Nous disons simplement que vos arguments ne nous ont pas convaincus. Vous avez votre opinion et nous avons la nôtre.

C'est un sujet très délicat et il faut que quelqu'un nous dise ce que nous devons faire... si l'ensemble de votre comité désire faire toute une histoire à ce sujet, nous n'y voyons pas d'objection. Comme Bob l'a dit, nous ferons ce qu'on nous dira de faire, mais dans les circonstances actuelles, je peux vous dire que vous allez faire face à la même réaction. Si les choses en restent à ce niveau, la réaction sera la même que celle que nous avons maintenant.

M. Derek Lee: Si je puis vous poser la question, monsieur le président, qui devrait dire cela au CSRS?

Le président: Le Parlement.

L'hon. James Andrews Grant: Selon moi, cela devrait nous être dicté par une loi du Parlement.

M. Derek Lee: Cette loi n'a pas encore été adoptée et donc...

L'hon. James Andrews Grant: N'oubliez pas que vous pouvez nous demander de venir ici répondre à toutes vos questions et que c'est un point de vue parfaitement légitime, mais que le Parlement qui vous a donné le pouvoir de siéger nous a dit que nous ne pouvions pas vous divulguer ces renseignements.

Une voix:

[Note de la rédaction: Inaudible]

L'hon. James Andrews Grant: Certainement. C'est dans le serment. C'est ainsi que je l'interprète.

M. Derek Lee: Sauf autorisation régulièrement donnée.

Une voix: Sauf autorisation régulièrement donnée.

L'hon. Bob Rae: En général, les débats théoriques m'ont toujours paru intéressants, mais venons-en aux questions. Si vous nous demandez de vous révéler certaines choses et que nous vous répondons que ce n'est pas possible, que nous pouvons seulement vous parler de nos activités en général, cela pose un problème.

Je crois, monsieur Lee, que le Parlement a pris une décision en ce qui concerne l'établissement du CSARS et si vous examinez la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, la loi qui régit nos activités, le Parlement a pris certaines décisions quant à la façon dont cet organisme doit fonctionner.

Ce que le Parlement a dit c'est qu'il voulait que les activités du SCRS soient examinées et nous savons tous pour quelles raisons. Il voulait être certain non seulement que les tribunaux pourraient se livrer à l'examen requis pour l'obtention d'un mandat, mais que si le SCRS voulait obtenir un mandat, il fallait pour cela qu'il s'adresse au tribunal de façon à ce que le SCRS fasse l'objet d'un examen judiciaire.

En plus de l'examen judiciaire, le Parlement voulait également un examen civil. Les personnes qui en sont chargées sont des conseillers privés qui sont assermentés. Le gouvernement doit consulter l'opposition au sujet de la nomination de ces personnes en qui il a confiance afin que le Parlement s'assure que ce sont des personnes raisonnables sur qui il peut compter pour faire leur travail. Nous devons lui faire rapport de nos activités et lui fournir le maximum de renseignements et ce sont des relations qui reposent sur la confiance.

En même temps, nous sommes assermentés de façon à avoir accès aux renseignements top secret dont nous avons besoin afin que nous les gardions pour nous parce que nous avons l'obligation de le faire et parce que ce sont des questions de... ne l'oublions pas, ce sont des questions de sécurité nationale. Ce sont des questions concernant le terrorisme. Ce sont des questions importantes qui se rapportent aux Canadiens et il faut traiter ces renseignements avec prudence, quoi qu'il arrive.

Et voilà le but de la loi. Il existe un tas d'autres lois semblables. En Ontario, nous avons notre commissaire aux conflits qui est un juge nommé par l'Assemblée législative à qui il présente son rapport chaque année. Il dit: «voici certains exemples de choses que les députés jugeaient appropriées et que je crois inappropriées» ou encore: «ils m'ont demandé s'ils pouvaient faire ceci ou cela et j'ai dit que non, car c'était une question sur laquelle les députés devaient se prononcer». Aucun nom n'est jamais divulgué. Nous ne voulons pas les connaître. Nous ne demandons pas au commissaire de nous dire qui a demandé une adhésion à un club de golf ou quoi que ce soit. Aucun nom n'est mentionné.

Il s'agit là d'un processus semblable. J'ai l'impression que votre comité n'aime pas ce processus. Il veut davantage de renseignements. Il veut qu'on lui en dise plus et si c'est le cas, nous nous ferons un plaisir de vous donner satisfaction dans la mesure où nous le pourrons, mais il s'agit d'une décision politique que le Parlement doit prendre. Il s'agit de voir comment les forces de sécurité de la nation doivent être examinées.

Cela pose un problème dans tous les pays démocratiques, comme Mme Gauthier l'a dit. Le problème se pose en Australie, au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Chaque pays procède différemment. Rien ne dit que notre modèle est le seul, mais j'ai l'impression que vous êtes de cet avis.

Nous voulons nous conformer aux désirs du Parlement. Nous voulons faire ce que nous sommes tenus de faire en vertu de la loi. Voilà pourquoi nous sommes ici et j'ai l'impression que le Parlement va devoir s'attaquer à cette question. Le gouvernement va peut-être devoir s'y attaquer aussi. Nous ne contestons pas la politique à cet égard.

• 1710

La présidente: Merci, monsieur Lee.

Je tiens à tous vous remercier d'être venus. Je suppose que nous vous verrons à l'automne, après la publication de votre rapport annuel. Vous avez pris des engagements et je suis sûr que vous les tiendrez et c'est ce que nous verrons.

L'hon. Paule Gauthier: Oui.

Le président: Merci beaucoup.

Chers collègues, comme nous n'avons pas de quorum, nous ne pouvons pas voter sur le budget des dépenses, mais nous ajouterons cela à l'ordre du jour d'une réunion de la semaine prochaine.

La séance est levée.