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JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND LEGAL AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES QUESTIONS JURIDIQUES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 24 novembre 1997

[Traduction]

• 1533

Le vice-président (M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. J'espère que d'autres membres du comité se joindront à nous, mais le temps nous est compté et je préférerais commencer tout de suite.

Nous accueillons aujourd'hui des représentants de l'Association canadienne des chefs de police, nommément le chef Brian Ford, qui est président de l'association, et M. Bryan McConnell, qui en est le directeur général.

Messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Si je comprends bien, vous avez un mémoire écrit, mais seulement dans l'une de nos langues officielles.

M. Bryan McConnell (directeur général, Association canadienne des chefs de police): C'est vrai, monsieur le président. Nous n'avons pas de services de traduction. Il nous faut un certain temps pour faire traduire nos textes.

Le vice-président (M. John Maloney): C'est un problème qui s'est déjà posé aujourd'hui. À moins que quelqu'un ait des objections, je propose que nous déposions le mémoire en anglais. Il sera traduit ultérieurement.

Oui, monsieur Ramsay.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Si tous les membres du comité ici présents y consentent, nous pouvons recevoir le mémoire dans une seule langue officielle. Je demande que l'on procède ainsi, pour que nous puissions suivre, avec l'accord des membres du comité.

Le vice-président (M. John Maloney): Êtes-vous d'accord, monsieur Lee?

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le président, je me rappelle très clairement qu'il y a deux ou trois semaines, le comité a adopté une résolution, qui me semblait raisonnablement claire, selon laquelle lorsqu'un mémoire nous est présenté dans une seule langue, lorsque la présentation n'est pas faite dans les deux langues, le texte doit être mis à la disposition des membres du comité, mais le comité lui-même—le greffier—ne participe pas à sa distribution. Cela, par respect pour les membres du comité dont la langue n'est pas celle dans laquelle le mémoire est rédigé. Si nous ne l'avons pas dans les deux langues, le comité ne peut pas le distribuer.

• 1535

Le texte en une seule langue peut être utile aux députés qui comprennent cette langue, et par conséquent nous ne refusons pas de le recevoir, mais je ne voudrais pas que le comité commence à revenir sur l'arrangement que nous avons conclu et sur la résolution que nous avons adoptée il y a trois semaines en autorisant le greffier à commencer... Je ne veux pas qu'on commence à demander le consentement unanime tout le temps, parce que cela nous ramène au point où nous en étions il y a trois semaines. Cela oblige le député qui ne comprend qu'une seule des deux langues à protester ou à acquiescer à chaque fois. C'est inacceptable.

Je ne vais pas donner mon consentement pour que le greffier distribue un mémoire rédigé dans une seule langue. Si les témoins ont des exemplaires de leur mémoire, nous pouvons le mettre à la disposition des députés qui souhaitent en prendre connaissance. Cela pourra être utile aux députés qui...

Le greffier du comité: Est-ce le cas? Avez-vous des exemplaires de votre mémoire?

M. Bryan McConnell: Oui, nous avons apporté le mémoire.

[Français]

Je l'ai donné à Luc avant qu'on commence.

[Traduction]

Nous sommes tout à fait disposés à procéder de cette façon.

[Français]

Je serai tout à fait disposé à répondre en français à toutes les questions dans cette langue.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Maloney): Je comprends votre intervention, monsieur Lee, mais ce matin, nous avons obtenu le consentement de tous les partis, y compris celui du Bloc, pour aller de l'avant, en dépit du fait que ces mémoires, qui ont été rédigés très rapidement et après un court préavis, ne sont présentés que dans une seule langue officielle.

M. Derek Lee: Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Maloney): Votre position est la même.

M. Jack Ramsay: Avez-vous des exemplaires de votre mémoire à nous remettre?

M. Bryan McConnell: Oui, j'ai remis environ 18 exemplaires au greffier du comité.

M. Jack Ramsay: Eh bien, que faisons-nous maintenant, monsieur Lee?

M. Derek Lee: Je vais aller m'en chercher un exemplaire. Le greffier ne devrait pas les avoir en main. Le greffier ne distribue pas des mémoires rédigés dans une seule langue. Je vais m'en occuper.

M. Jack Ramsay: Très bien, bravo.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Lee.

Bon, monsieur McConnell, monsieur Ford, lequel de vous prendra la parole?

M. Bryan McConnell: C'est moi qui vais me charger de la présentation. Je suis accompagné aujourd'hui du chef Brian Ford, du Service de police régional d'Ottawa-Carleton, qui préside également le Comité de modifications aux lois de l'Association canadienne des chefs de police. M. Ford est grippé et ne peut pas se charger de la présentation, mais il pourra répondre à vos questions.

Avec votre permission, monsieur le président, je voudrais commencer par faire quelques observations générales, avant d'aborder les règlements sur les armes à feu dont vous êtes saisis.

Notre présentation d'aujourd'hui fait partie d'une série de comparutions de l'Association canadienne des chefs de police devant les comités parlementaires qui étudient le projet de loi C-68 et le programme des armes à feu. Le chef Ford, des collègues de partout au Canada et moi-même avons comparu devant le comité et son homologue du Sénat probablement une douzaine de fois au cours des dernières années au sujet des diverses questions liées au projet de loi C-68 et aux règlements qui en découlent. À chacune de nos comparutions, nous avons fait des suggestions, alimenté le débat, présenté des arguments et tenté de nous rendre utiles.

L'ACCP, comme toutes les organisations policières, appuie le programme des armes à feu. Elle l'a appuyé dès le début et continue de le faire. En fait, l'ACCP et le service dirigé par le chef Ford ont consacré des ressources considérables à la mise en oeuvre du programme.

Sous réserve des observations que nous allons faire, nous appuyons les projets de réglementation, mais nous exhortons le gouvernement à les mettre en oeuvre sans plus tarder. Nous croyons que nous avons assez discuté de ce projet de loi et que le moment est venu de mettre sur pied le programme pour qu'il fonctionne enfin.

L'ACCP reconnaît la nécessité de veiller à ce que tous les processus soient en place et que le système soit prêt à démarrer correctement, mais en même temps, nous encourageons le gouvernement à réduire au minimum tout délai dans la mise en oeuvre. L'ACCP croit que les retards et la confusion entourant le programme des armes à feu nuiront à son impact potentiel.

En bref, la position de l'ACCP est qu'il faut bien faire les choses, mais qu'il faut faire vite.

Ma deuxième observation générale est que nous voudrions rappeler au gouvernement la promesse qu'il a faite à la communauté policière que la police ne serait pas obligée d'investir des ressources supplémentaires dans ce programme. Je dois dire que d'après ce que nous avons vu du système et de son mode de fonctionnement, nous pensons que cette promesse peut être tenue et qu'elle le sera.

• 1540

L'Association canadienne des chefs de police continue d'appuyer le programme canadien des armes à feu et reconnaît l'importance de cette initiative pour la sécurité des Canadiens dans toutes les régions du pays. Le volet enregistrement, particulièrement l'enregistrement des carabines et des fusils de chasse, est crucial pour l'efficacité de l'ensemble du programme. L'Association canadienne des chefs de police l'a déjà signalé à plusieurs reprises.

Cette affirmation a été corroborée par l'étude du groupe de travail sur la contrebande, le trafic illégal d'armes à feu au Canada, publiée par le ministère de la Justice en mai 1995. Les auteurs de cette étude ont examiné des données sur les armes à feu saisies par neuf services de police et la GRC. On constate qu'en ce qui concerne les armes utilisées pour perpétrer un crime, près de la moitié, soit 47 p. 100, étaient des carabines et fusils; 21 p. 100 étaient des armes de poing et sur ce nombre, 40 p. 100 avaient auparavant été enregistrées au nom d'un propriétaire légitime; 4 p. 100 étaient des armes prohibées et beaucoup étaient des carabines et des fusils de chasse dont on avait scié le canon.

Une étude plus récente portant sur les armes à feu récupérées dans cinq localités—Thunder Bay, Windsor, Saint John, Hull et Regina—a de nouveau confirmé ces constatations. Ces études ont été publiées en juillet 1997. Des études semblables effectuées à Winnipeg et à Edmonton ont abouti à des résultats analogues.

Par conséquent, en étudiant ces projets de réglementation, vous ne devez pas oublier le contexte et son importance pour l'ensemble du programme. L'enregistrement des armes à feu, surtout des carabines et des fusils, est et doit demeurer un élément fondamental de ce programme.

L'ACCP a participé aux consultations qui ont précédé l'élaboration de ces règlements et est disposée à poursuivre dans la même veine dans le cadre du processus législatif. Nous connaissons peu d'exemples, de mémoire d'homme, de consultations qui ont été aussi étendues et complètes.

Cela dit, j'ajoute que le processus de consultation est difficile et qu'il n'est pas sans soulever des controverses et, au sujet de ces règlements en particulier, je tiens à faire savoir au comité que sur certaines questions, l'ACCP et d'autres services de police ont préconisé une position beaucoup plus ferme; par exemple, la vérification immédiate et l'obligation de graver le numéro au lieu de se contenter d'une étiquette d'enregistrement.

Dans le contexte du processus de consultation, l'ACCP a accepté de faire des compromis. Nous sommes d'avis que ces règlements permettront de mettre sur pied un programme efficace, mais l'ACCP serait catégoriquement contre tout nouveau compromis sur les divers aspects de ces règlements. Ce serait affaiblir les dispositions qui sont les piliers du programme.

Nous exhortons donc le comité à accélérer son étude des règlements et à donner le feu vert pour que le programme soit rapidement mis sur pied.

Nos préoccupations portent spécifiquement sur certains points qui sont énumérés dans le sommaire distribué la semaine dernière, mais je vais les passer rapidement en revue.

Règlement sur la cession: Le concept de la vérification est crucial. L'une des critiques fondamentales de l'actuel programme d'enregistrement des armes à feu à autorisation restreinte est que les renseignements qui y sont consignés sont erronés ou périmés. Établir un système qui n'est ni efficace ni efficient, c'est simplement gaspiller les efforts de chacun et ce serait perdre une magnifique occasion.

Nous croyons aussi que la vérification peut être un aspect positif du programme, surtout si elle est bien faite au niveau communautaire. Plus précisément, l'ACCP comprend les raisons pour lesquelles on a fixé l'an 2003 comme date de l'entrée en vigueur de la vérification de la cession des armes d'épaule, mais nous croyons fermement que la vérification de la cession des armes à autorisation restreinte et des armes prohibées devrait commencer immédiatement. Nous comprenons bien qu'il faut une période de démarrage avant de procéder à la vérification des armes d'épaule, mais très peu d'arguments justifient qu'on en fasse autant pour les armes de poing.

Nous sommes également en faveur de la vérification au point d'enregistrement des armes à feu. La vérification est d'une importance cruciale pour ce programme. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la mise en oeuvre du projet de loi a pris plus de temps que bien des gens s'y attendaient. Nous comprenons fort bien qu'il faut établir un juste équilibre entre prendre suffisamment de temps pour s'assurer que le système est vraiment prêt avant de le faire démarrer, et procéder à la hâte et avoir une période de démarrage caractérisée par des problèmes et des anicroches.

La position de l'ACCP, je le répète, est qu'il faut bien faire, mais qu'il faut faire vite. Nous vous demandons de bien vouloir faire en sorte qu'il n'y ait plus d'autres retards. Si la date du 1er octobre 1998 est respectée, nous sommes confiants que le système pourra être couronné de succès et qu'il le sera effectivement.

• 1545

Quant aux certificats d'enregistrement, l'ACCP appuie les dispositions prévues dans le règlement à ce sujet. Il aurait été préférable de graver le numéro plutôt que de l'inscrire sur une étiquette, mais le compromis est toutefois acceptable.

L'importance des formulaires utilisés pour l'enregistrement ne saurait être sous-estimée et nous comptons avoir l'occasion de participer à leur élaboration.

Madame la présidente, nous avons joint d'autres observations portant sur certains autres points, à l'intention des membres du comité.

En terminant, l'Association canadienne des chefs de police est d'avis que l'examen de ces règlements devrait être achevé dans les meilleurs délais et que le programme doit commencer en octobre 1998, à la date qui est actuellement prévue. Nous continuons d'être d'avis que cette mesure législative et le programme qui y est associé contribueront de façon positive à la sécurité des Canadiens. Cette mesure va empêcher des blessures et des décès parmi les citoyens et les agents de police. Le programme des armes à feu va faciliter les enquêtes et aidera à prendre des mesures énergiques pour lutter contre la criminalité et enrayer le trafic d'armes illégales.

Comme toujours, nous remercions le comité de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui et de bien vouloir se pencher sur les points qui nous semblent importants. Le chef Ford et moi-même sommes disposés à répondre à vos questions.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur McConnell.

Monsieur Ramsay, vous avez cinq minutes. Il nous reste une demi-heure.

M. Jack Ramsay: Bon, cinq minutes. Vous avez interprété «faites-le bien, mais faites-le vite» littéralement, n'est-ce pas?

Le vice-président (M. John Maloney): Nous essayons de contenter tout le monde, monsieur Ramsay.

M. Jack Ramsay: Vous connaissez bien sûr ma position sur ce projet de loi, mais si nous devons dépenser des millions de dollars pour mettre sur pied un système d'enregistrement qui aura les effets que vous escomptez, nous sommes mieux de le faire comme il faut, peu importe le temps que cela prendra. D'après les renseignements que nous avons obtenus jusqu'à maintenant, nous ne ferons pas les choses comme il faut, parce que nous allons demander à des millions de propriétaires d'armes à feu de ramasser un formulaire comme celui-ci quelque part dans leur collectivité, de le remplir en précisant les dix caractéristiques d'identification et d'envoyer le tout pour faire enregistrer leurs armes. Sauf erreur, le processus qui suivra est qu'un certificat d'enregistrement sera envoyé au propriétaire d'après les renseignements donnés dans le formulaire. Bien sûr, il n'y a aucune vérification.

Comme le disaient les témoins de ce matin, c'est-à-dire les contrôleurs des armes à feu de deux provinces, particulièrement au sujet des armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte, l'information contenue dans le registre des armes à feu sur ce type d'armes ne sera pas vérifiée et par conséquent, ne sera pas fiable. Cela aura une incidence sur la sécurité des policiers, la sécurité publique et sur l'application de la loi.

La semaine dernière, nous avons reçu, je crois, le sous-commissaire adjoint. Il a exprimé une préoccupation semblable au sujet de l'intégrité du système, compte tenu du manque de vérification dans le cadre de ce système d'enregistrement par la poste auquel nous nous opposons, de ce côté de la Chambre, depuis qu'il a été présenté il y a près de trois ans.

Le sous-commissaire de la GRC a dit ceci:

    Il y a un risque extrêmement élevé que des erreurs soient commises sur les formules de demande par des civils qui ne connaissent pas très bien la classification des armes à feu.

Il a poursuivi:

    Si les services de police du pays ne peuvent compter sur l'exactitude des données du Système canadien d'enregistrement des armes à feu, ils ne pourront en exploiter tout le potentiel.

    Si cela se produit, le système ne pourra répondre aux objectifs de maintien et d'augmentation de la sécurité publique.

Une dernière citation de cet exposé:

    Le processus de vérification sera certainement lent. Beaucoup de propriétaires d'armes à feu attendront des décennies avant de céder leurs armes à feu.

Autrement dit, si j'ai une arme à feu que je n'ai pas l'intention de céder ni de vendre, qu'arrivera-t-il? L'arme à feu sera enregistrée et si par inadvertance j'inscris mal son numéro de série, j'aurai un certificat d'enregistrement qui ne porte pas le même numéro de série que l'arme à feu. Les fonctionnaires du ministère de la Justice nous ont dit ici que malgré cela, le certificat d'enregistrement sera valable.

Comme je l'ai déjà exprimé fermement à plus d'une reprise, c'est vraiment aller loin. Je crois aussi que ça pose un problème. Si mon arme à feu est volée et se retrouve sur les lieux d'un crime à Vancouver, si vous faites une recherche à partir de son numéro de série, vous n'obtiendrez rien. En effet, je n'ai pas donné le bon numéro de série, par suite d'une erreur involontaire. Comment pourrez-vous me rapporter mon arme?

• 1550

Les fonctionnaires du ministère de la Justice nous ont dit qu'ils devraient alors se tourner vers des méthodes d'enquête traditionnelles. Cela signifie que le système d'enregistrement ne fournira pas les services qu'on avait promis initialement aux corps policiers. Nous dépensons donc des millions et des millions de dollars pour ce système d'enregistrement et faute de vérifications à la saisie des données, nous ne savons pas si l'information qui s'y trouvera sera fiable ou non.

Si les données du système ne sont pas fiables, comme le laissait entendre le contrôleur des armes à feu ce matin, comment le certificat d'enregistrement délivré à partir de ces données non fiables peut-il, lui, être valable?

M. Bryan McConnell: Je ne sais pas s'il reste suffisamment de temps pour vous répondre. Pour commencer là où vous l'avez fait, monsieur Ramsay, nous avons un pays dont l'administration repose sur la confiance qu'on a envers les citoyens, qui doivent remettre une déclaration de revenu. Nous faisons des vérifications ultérieurement. Nous pourrions probablement présumer que la plupart des Canadiens vont faire de leur mieux pour se conformer à ces règlements.

Si une personne fait une erreur et que son arme se retrouve dans une autre province, en effet, il pourrait être difficile de retrouver les données dans le système, à cause de l'erreur dans le numéro de série. Mais je ne suis pas convaincu que ce genre d'erreur touchera de très nombreuses armes à feu. Et on n'adopterait pas ce système à cause du risque d'erreurs de transcription? Ce genre d'erreurs peut bien sûr se produire en toute bonne foi, mais d'autres systèmes de ce genre fonctionnent de la même façon et je ne crois pas que le nombre d'erreurs soit si important. Lorsqu'il y en aura, il est clair qu'il faudra revenir aux méthodes d'enquête traditionnelles.

Une enquête ne se fonde pas uniquement sur un renseignement ou une source de renseignements. Les enquêtes peuvent être complexes et être axées sur diverses sources. Ce système peut réduire de beaucoup les démarches faites par les corps policiers du pays lorsqu'une première vérification montre que la transcription a été bien faite et que l'arme à feu est dûment enregistrée. On peut alors retrouver le propriétaire de l'arme à feu.

Je fais confiance aux Canadiens et à leur capacité de remplir des documents.

M. Jack Ramsay: Il ne me reste plus de temps, n'est-ce pas?

Le vice-président (M. John Maloney): En effet, monsieur Ramsay.

M. Jack Ramsay: Votre réponse n'est guère convaincante, mais je l'accepte. Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Lefebvre.

[Français]

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Je sais qu'on est en période de grève postale, mais pensez-vous qu'il y aurait moyen d'expédier des armes à feu par la poste? Sinon, quels moyens pourrait-on prendre pour expédier des armes à feu prohibées ou à utilisation restreinte?

M. Bryan McConnell: Je n'ai pas bien compris la question. Parlez-vous de la grève des postes?

M. Réjean Lefebvre: Non. Pensez-vous qu'il pourrait être possible d'expédier par la poste des armes à feu à autorisation restreinte et des armes à feu prohibées? Y a-t-il d'autres préoccupations de sécurité dans le cas de ces armes à feu?

M. Bryan McConnell: Il y a beaucoup de questions de sécurité et de sources d'inquiétude. Cependant, un système d'enregistrement devrait fournir une certaine protection aux Canadiens et Canadiennes qui méritent notre appui.

[Traduction]

M. Derek Lee: Puis-je poser une question au sujet de la vérification? Actuellement, on n'a prévu aucune distinction entre la vérification des armes d'épaule et celle des armes à autorisation restreinte ou prohibées. Elles seront simplement vérifiées, si j'ai bien compris, lorsqu'il y a un gros problème, c'est-à-dire lorsqu'il y a une cession, lorsqu'elles sont volées, lorsqu'elles sont retrouvées, par exemple.

• 1555

Vous dites que nous faisons un effort particulier pour les armes à autorisation restreinte et prohibées et qu'elles sont vérifiées rapidement. Ce qui m'agace, c'est qu'il me semble que toutes les armes à feu à autorisation restreinte et prohibées devraient d'ores et déjà figurer dans la base de données, sauf celles dont la propriété est illicite. Est-ce que je me trompe?

Le chef Brian Ford (président, Comité de modifications aux lois, Association canadienne des chefs de police): Certaines armes à feu à autorisation restreinte peuvent ne pas y être, et ne pas être non plus tout à fait illégales.

J'aimerais revenir à la première question de M. Ramsay. J'ai enregistré des armes à feu pendant quelque temps lorsque j'étais constable et sergent au sein d'un service de police. Beaucoup d'armes à feu sont rapportées de la guerre. Nous en voyons même de nos jours, entre les mains de personnes qui, pour une raison ou pour une autre, ont négligé... dans la plupart des cas, il s'agissait de l'arme de leur père ou de leur grand-père décédé et qu'on a trouvée parmi leurs effets personnels. Cela se produit encore régulièrement.

La plupart des armes à autorisation restreinte font partie de la base de données du CIPC au centre des armes à feu de la GRC. Elles sont pour la plupart enregistrées. Il peut y en avoir quelques-unes, comme celles qui sont venues au pays illégalement mais sans que leur propriétaire ait d'intention coupable. Les gens rapportent toutes sortes de choses. Ils sont peut-être allés en Bosnie, au Vietnam, ou ailleurs et ont décidé de rapporter un souvenir, sans y réfléchir davantage.

Les forces armées ont participé à un certain nombre de conflits. Les armes arrivent parfois au Canada de cette façon, sans qu'on le sache; on s'en rend compte plus tard. Leur propriétaire peut les avoir oubliées dans le fond d'un sac ou ailleurs. En grande partie, toutefois, les armes à feu sont enregistrées.

M. Derek Lee: Alors, à l'exception de l'arme à feu oubliée au fond d'un sac, la grande majorité des armes de poing figurent déjà dans la base de données. Lorsqu'elles seront enregistrées en vertu de la nouvelle loi, quelqu'un fera-t-il un rapprochement entre le nouvel enregistrement et l'ancien?

M. Bryan McConnell: Ce qui se produit c'est qu'avec la consultation, en essayant de répondre à des besoins divergents, une anomalie s'est glissée dans le règlement. En ce moment, les armes de poing sont vérifiées. Après le règlement, elles ne le seront peut-être pas. Il y aura peut-être une période de cinq ans où elles ne seront pas vérifiées, ce qui pourrait permettre l'entrée au pays d'armes de poche prohibées.

Voilà essentiellement ce que nous voulons dire. Nous voulons que soit maintenu le statu quo en ce qui touche les armes prohibées et à autorisation restreinte. Nous ne voulons pas de cette anomalie qui compromettrait la sécurité des Canadiens. Nous ne voulons pas que des armes de poing ne soient pas vérifiées.

M. Derek Lee: Je pense que je vous comprends mieux maintenant. Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Ramsay, vous avez trois minutes.

M. Jack Ramsay: En toute justice, je dois vous dire pourquoi votre réponse ne m'a pas convaincu. C'est à cause de ce qu'on a déjà dans le système d'enregistrement des armes de poing; à mes yeux, le pourcentage de données erronées dans ce système rend ces données inutiles. Avec le temps, des erreurs s'y sont glissées et il faut garder à l'esprit que les policiers sont les vérificateurs des données entrées dans le système. Je comprends que beaucoup d'erreurs se sont glissées dans le système par suite de déménagements de propriétaires d'armes à feu qui ont oublié d'en aviser le système.

Si l'on garde à l'esprit que ces nouvelles mesures législatives comportent trois infractions ou peines pour le non-enregistrement d'une arme à feu, allant de l'infraction punissable par voie sommaire à l'acte criminel encourant une peine maximale de 10 ans, il me semble grave de posséder un certificat d'enregistrement qui, sans que je le sache, ne correspond pas à mon arme à feu.

• 1600

Des fonctionnaires du ministère de la Justice nous ont dit la semaine dernière qu'un certificat d'enregistrement qui ne concorde pas avec les caractéristiques d'une arme à feu, particulièrement avec son numéro de série, reste un certificat d'enregistrement, ce qui me paraît difficile à comprendre.

À votre avis, qu'est-ce qui fait qu'une arme à feu est enregistrée, si ce n'est la correspondance établie entre le certificat et les principales caractéristiques de l'arme? Est-ce qu'on ne met pas les propriétaires d'armes à feu dans une situation délicate si, parce qu'ils n'ont pas bien inscrit les 10 caractéristiques sur la formule, ils se retrouvent avec un certificat qui ne concorde pas avec les caractéristiques de l'arme à feu? Cette personne ne contrevient-elle pas à la loi? Autrement dit, est-ce que le processus et l'administration ont satisfait aux exigences de la loi dans ce cas-là?

M. Bryan McConnell: Monsieur Ramsay, il faut voir les choses d'un oeil pratique. Lorsqu'un agent se trouve devant une arme à feu et constate que son propriétaire a honnêtement fait l'effort de l'enregistrer, en indiquant qu'il s'agit d'une Winchester, que la plupart des chiffres sont exacts... mais que c'est une carabine et non un fusil de chasse... il faut se servir de son jugement. Pour obtenir une condamnation, il faut prouver l'intention coupable. Si le citoyen dont on parle a pu décrire correctement la marque de l'arme à feu, le fait que c'était une carabine et non un fusil de chasse, mais qu'il fait une erreur portant sur un ou deux chiffres du numéro de série...

Il faut se rappeler que la plupart des gens peuvent transcrire correctement des chiffres. Il revient alors à l'agent d'examiner la situation et de se demander si lui ou le propriétaire de l'arme à feu a un problème. Les policiers ont une certaine latitude pour toutes sortes d'infractions et d'incidents pour lesquels ils décident qu'on n'a pas vraiment enfreint la loi.

M. Jack Ramsay: Sauf votre respect, je ne parle pas de jugement. Je veux que vous me disiez si oui ou non on a satisfait aux exigences de la loi dans la situation que j'ai décrite. Nous pourrons reparler de la question de la latitude. Si on me délivre un certificat d'enregistrement qui ne correspond pas au numéro de série de mon arme à feu, ai-je enregistré mon arme à feu selon les exigences de la loi? Oui ou non?

M. Brian McConnell: Étant donné votre reformulation de la question et l'orientation que vous donnez à ma réponse, je crois que vous devriez poser cette question seulement au contrôleur des armes à feu et non au directeur exécutif de l'Association canadienne des chefs de police.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Ramsay. Nous devons continuer.

Madame Bakopanos.

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Merci.

J'aimerais revenir à la question de la vérification des armes prohibées et à autorisation restreinte. Vous avez dit très clairement que rien ne justifiait un retard. En répondant à la question de mon collègue, vous avez également donné des explications. Puisque cela ne représente que moins de 1 p. 100 de la population, puisque toutes ces armes à feu sont enregistrées, c'est une question de vérification et non d'enregistrement et d'ici l'an 2003, elles seront toutes intégrées au système. Qu'elles soient cédées, elles seront vérifiées. Quelle est la principale raison pour laquelle vous voulez qu'on fasse cela maintenant plutôt que d'attendre?

M. Bryan McConnell: Honnêtement, c'est que nous craignons que les armes de poing fassent facilement l'objet d'un trafic. La disponibilité des armes de poing a été bien contrôlée. Le système fonctionne pour ce qui est de ces armes de poing. L'étude sur diverses villes canadiennes l'a prouvé. Un très faible pourcentage d'armes à feu retrouvées sur les lieux d'incidents malheureux sont des armes de poing. C'est quelque chose que nous contrôlons bien actuellement. Il serait dommage qu'on ouvre la porte à des tragédies inutiles... Personnellement, je trouverais dommage qu'une lacune du règlement en soit la cause.

• 1605

Mme Eleni Bakopanos: Soyons précis: actuellement, si c'est une arme de poing que j'ai enregistrée et que je tire sur quelqu'un, vous pouvez me retracer, n'est-ce pas?

Il n'y a donc pas actuellement d'armes dont nous ne pouvons retracer le propriétaire, à l'exception des armes illégales. Nous parlons des armes enregistrées. C'est pour cela que je vous ai demandé de quel pourcentage de la population nous parlions. Soyons précis: avec le système actuel, on peut retracer le propriétaire d'une arme de poing. !

M. Bryan McConnell: Oui.

Mme Eleni Bakopanos: Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Ramsay, une toute petite minute. C'est une minute en prime, et non une minute à la Ramsay.

M. Jack Ramsay: Reprenons là où nous nous sommes arrêtés. J'ai toujours cru que c'était l'agent enquêteur, sur les lieux d'un crime, qui décidait si l'on s'était conformé ou non à une loi ou à un règlement. Si des accusations sont portées, c'est ensuite au tribunal de décider. Je dois donc vous redemander: ne pensez-vous pas qu'il incombe au policier sur les lieux de décider si on s'est conformé ou non à la loi?

M. Bryan McConnell: Tout à fait, mais il s'agit là de la réponse que je vous ai donnée en premier, monsieur Ramsay; l'agent sur les lieux doit au vu des faits déterminer si, à son avis, on s'est conformé à la loi. C'est là qu'intervient l'exercice du jugement.

Si l'agent décide qu'il y a un problème, et qu'aux yeux de certains, il ne fait pas bon usage de son jugement, le procureur peut à son tour examiner les faits et décider s'il y a vraiment eu infraction, s'il y avait vraiment une intention coupable.

M. Jack Ramsay: Oui. Mais nous parlons de jugement et nous nous écartons des exigences de la loi. Peut-être que je ne devrais pas vous poser cette question. Peut-être qu'il faudrait l'adresser aux responsables des aspects techniques du système, mais il y a certainement quelqu'un qui doit s'assurer qu'on s'est conformé aux exigences de la loi.

Si j'ai un certificat d'enregistrement qui ne correspond pas à mon arme à feu, c'est un cas évident de non-enregistrement d'une arme à feu. Bien entendu, je peux expliquer ce qui est arrivé et la police en tiendra compte. Mais il reste que je chasse avec une arme à feu qui n'est pas enregistrée dans le système, à première vue.

À part le jugement exercé par les policiers dans ce genre de cas, est-ce qu'on ne se retrouve pas dans une situation où de l'information non vérifiée sera inscrite dans le système, et un certificat sera délivré à partir de ces renseignements erronés.

M. Bryan McConnell: Honnêtement, je ne peux pas être d'accord avec vous. Si, comme vous le dites, vous chassez avec une arme à feu qui n'est pas bien enregistrée, comme vous le dites, et qu'il y a une erreur dans l'enregistrement de l'arme, vous êtes déjà dans une situation où une vérification aura lieu. Vous décrivez une situation où quelqu'un vous dit que votre arme à feu n'est pas celle pour laquelle le certificat vous a été délivré. Autrement dit, vous faites l'objet d'une vérification, monsieur Ramsay.

Vous pourriez conduire une voiture dont le numéro d'identification de véhicule n'est pas celui qui figure sur votre certificat d'immatriculation. Ce genre de choses peut se produire.

M. Jack Ramsay: Mais vous ne serez pas accusé d'avoir commis une infraction au Code criminel pour cela.

Le vice-président (M. John Maloney): Nous n'avons plus de temps, monsieur Ramsay.

M. Jack Ramsay: Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Lefebvre—pas de question?

Monsieur MacKay, vous arrivez à froid. Allez-vous laisser la parole à d'autres ou avez-vous une petite question pour les témoins?

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Non, je vais rapidement poser une question.

Le vice-président (M. John Maloney): En passant, nous sommes à la ronde de questions de une minute.

M. Peter MacKay: Une courte question qui reprendra là où s'est arrêté M. Ramsay.

Vous dites qu'en assumant son rôle discrétionnaire, le procureur consulterait la police. Comme dans la plupart des cas, il se demanderait s'il y a eu une intention coupable, s'il y a eu mens rea? Pour le fait qu'une personne fournisse de faux renseignements, il y a déjà un article dans le Code criminel.

Dites-vous que ce pouvoir discrétionnaire serait exercé par le procureur, en collaboration avec la police? Ou est-ce que la police elle-même va décider s'il faut ou non porter des accusations?

• 1610

M. Bryan McConnell: Monsieur MacKay, cela revient à une partie de réponse que j'ai déjà donnée. Je sais que vous étiez autrefois procureur, probablement dans une province où il faut l'approbation de la Couronne pour porter des accusations; je voulais simplement dire que l'agent avait un certain pouvoir discrétionnaire. Lorsqu'il se retrouve devant certains faits... Un agent peut trouver quelqu'un avec de la fausse monnaie en sa possession—comme le disait M. Ramsay, il peut y avoir prima facie. Il pourrait dire que cette pauvre personne a reçu de la fausse monnaie sans s'en rendre compte. Il s'agit du même type de pouvoir discrétionnaire.

Si une personne décrit son arme à feu sur l'enregistrement posté, qui est assez convivial, comme étant une carabine Winchester d'un certain calibre, avec tel numéro de série, et qu'il a en fait un fusil de chasse qui n'a rien à voir avec l'autre arme à feu, la balance va pencher vers les accusations, vers le renvoi au procureur. Mais si c'est à peu de choses près ce que dit le certificat, cette personne a peut-être fait une erreur involontaire. Voilà ce que je disais au sujet de ce pouvoir discrétionnaire.

M. Peter MacKay: Bien.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur MacKay.

Monsieur Lee, vous aviez une question. Vous avez une minute.

M. Derek Lee: Merci.

Revenons à ce processus de vérification. Si quelqu'un a une arme à feu à autorisation restreinte actuellement enregistrée, en suivant le nouveau processus d'enregistrement, s'il constate que les détails de la nouvelle demande correspondent à l'arme à feu actuellement enregistrée, vous opposeriez-vous à ce qu'il n'y ait pas de vérification, et s'il s'agissait simplement de renvoyer les documents disant que la vérification a été faite et qu'il n'y a plus rien d'autre à faire? S'il n'y a pas concordance, les propriétaires de ces armes à feu seront sans doute les premiers à vouloir corriger l'erreur. Pensez-vous que ce processus pourrait marcher?

M. Bryan McConnell: La vérification ne doit se produire qu'une fois. Vous dites donc que s'il y a déjà eu vérification, une deuxième vérification serait inutile? D'emblée, je dirais que s'il y a déjà eu une vérification, il n'est pas vraiment nécessaire de la refaire, mais j'ai quelques réserves.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur McConnell.

Merci beaucoup d'être venus, messieurs, particulièrement le chef Ford. Comme vous ne vous sentez pas bien, j'apprécie que vous soyez venu tout de même.

Nous faisons une pause de trois minutes, avant de reprendre rapidement.

• 1612




• 1617

Le vice-président (M. John Maloney): Je veux souhaiter la bienvenue à la Coalition pour le contrôle des armes à feu. Nous recevons aujourd'hui Wendy Cukier, Arn Snyder et Heidi Rathjen. Bienvenue.

[Français]

Mme Heidi Rathjen (vice-présidente, Coalition pour le contrôle des armes à feu): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour. Je me nomme Heidi Rathjen et je suis vice-présidente de la Coalition pour le contrôle des armes à feu. Je suis accompagnée de Wendy Cukier, la présidente, et de Arn Snyder de l'Association canadienne de justice pénale.

La Coalition représente près de 400 organisations locales, provinciales et nationales sur la question du contrôle des armes à feu, dont l'Association canadienne des chefs de police, l'Association du Barreau canadien, l'Association canadienne de santé publique et la Fédération canadienne des municipalités.

Nous travaillons maintenant depuis près de huit ans pour obtenir un contrôle efficace des armes à feu au Canada et nous prévoyons continuer jusqu'à ce que la loi soit suffisamment sévère, complètement en vigueur et à l'abri des pressions de nos adversaires. On en est maintenant à l'étape de l'élaboration des règlements qui, selon nous, déterminent en grande partie la force et l'efficacité de la loi.

J'aimerais passer la parole à Mme Wendy Cukier, qui va vous présenter notre position sur cette dernière série de règlements.

[Traduction]

Mme Wendy Cukier (présidente, Coalition pour le contrôle des armes à feu): Merci, monsieur le président et merci aux membres du comité. Nous sommes ravis d'être ici aujourd'hui. Nous nous efforcerons d'être aussi brefs que possible afin qu'il y ait suffisamment de temps pour les questions. Notre mémoire est particulièrement court, comme le constateront ceux qui ont vu nos mémoires précédents. Nous nous sommes concentrés sur les règlements et notre position à leur sujet. Une petite introduction serait tout de même de mise, particulièrement pour les membres du comité qui n'ont jamais étudié la question de manière approfondie et particulièrement étant donné les commentaires qui ont été faits par d'autres témoins qui ont comparu avant nous.

Vous avez de nouveau entendu l'Association canadienne des chefs de police vous parler du caractère essentiel de l'enregistrement pour le nouveau régime de contrôle des armes à feu, particulièrement de l'enregistrement des armes d'épaule, étant donné que celles-ci sont les armes qu'on retrouve le plus souvent sur les lieux d'un crime dans ce pays, et que ce sont celles qu'on utilise le plus souvent pour tuer. Les policiers vous ont également parlé de l'importance du lien à faire entre l'enregistrement, la délivrance de permis et le fait que cela facilitera les enquêtes policières.

Il y a toutefois une chose sur laquelle on n'a pas suffisamment insisté: le fait que les nouvelles mesures législatives de contrôle des armes à feu au Canada, particulièrement l'enregistrement et les permis qui découlent des règlements, ne font qu'amener le Canada sur le même pied que la plupart des pays industrialisés du monde. Je pense qu'il convient d'insister là-dessus, étant donné que ce que nous faisons n'est pas révolutionnaire ni particulièrement nouveau.

• 1620

La plupart des pays industrialisés du monde enregistrent les armes d'épaule et délivrent des permis aux propriétaires d'armes à feu. Comme vous le savez, la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale des Nations Unies a adopté une série de résolutions recommandant que les pays qui ne l'ont pas déjà fait émettent des permis pour les propriétaires d'armes à feu, enregistrent les armes à feu et s'assurent de mettre en oeuvre des dispositions relatives à l'entreposage sécuritaire. Vous avez également entendu parler de la convention de l'OÉA, où l'on a parlé de l'importance de pouvoir retracer les propriétaires d'armes à feu afin de prévenir la contrebande.

Je voulais porter ces faits à votre attention mais également parler de certaines idées fausses qu'on nous serine, par exemple, que ces mesures législatives sont surtout l'oeuvre d'intérêts urbains, particulièrement de la clique Toronto-Montréal. Si vous regardez les données—passez à la première annexe de notre mémoire, où il y a un petit tableau.

Je tiens à répéter qu'il y a un lien direct entre l'accès aux armes à feu et les morts et blessures par armes balle, pas seulement au Canada mais aussi dans d'autres pays industrialisés. Vous constaterez que tout en haut du tableau, on trouve les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon, suivis des États-Unis. On voit ensuite l'Alberta, la Saskatchewan, les Maritimes, le Québec et l'Ontario, avec un taux assez faible.

Il est ironique dans ce débat de constater que là où il y a le plus d'armes à feu, il y a aussi le plus de morts par balle. C'est aussi là où il y a le plus de propriétaires d'armes à feu qu'on relève la plus forte opposition au contrôle des armes à feu. C'est une tragique ironie du sort qu'on constate parfois.

Après ces commentaires préliminaires sur l'importance de ces mesures législatives, particulièrement des permis et de l'enregistrement, je vais passer aux éléments clés de notre mémoire.

Les certificats d'enregistrement d'armes à feu qui sont décrits dans les nouveaux règlements sont essentiels à l'application de la loi et divers compromis et concessions ont dû être faits dans le cadre de leur élaboration pour que ce système soit aussi convivial et facile à vivre que possible. Comme la plupart d'entre vous le savent, ces mesures législatives ont fait l'objet d'une opposition marquée de personnes qui disaient qu'elles seraient trop coûteuses, trop fastidieuses, trop compliquées et trop dérangeantes.

Notre position, c'est que la procédure prévue pour la délivrance des certificats d'enregistrement semble un bon compromis et nous appuyons les dispositions prévues. Ce n'est peut-être pas parfait, il est possible que des erreurs commises délibérément ou par inadvertance se retrouvent dans le système et il est vrai qu'on peut décoller des étiquettes apposées sur les armes à feu. Mais à nos yeux, c'est un compromis raisonnable qui prend en compte l'intérêt de la sécurité publique et les préoccupations des propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi. Nous sommes en faveur des règlements actuels.

Pour ce qui est des modifications relatives à la cession d'armes à feu, il est intéressant de constater que l'on demande à grands cris une plus grande exactitude et davantage de vérification des enregistrements. Bien entendu, dans une situation idéale, nous voudrions que ne figurent dans le système d'enregistrement que des données absolument exactes mais nous estimons qu'il fallait faire quelques concessions, quelques compromis et qu'au bout du compte, les méthodes préconisées par ces règlements ne sont pas déraisonnables.

Nous pensons que sans être souhaitable, le report de la vérification des armes d'épaule est cependant acceptable. Néanmoins, ce n'est pas le cas de la vérification des armes prohibées et à autorisation restreinte, et nous en déduisons que cela s'est peut-être produit par inadvertance. Comme des protestations ont été élevées par les propriétaires d'armes d'épaule, en particulier dans les régions rurales et peut-être dans l'Ouest, et comme il est souhaitable d'éviter toute surcharge administrative en ce qui concerne cette partie du système, le report de la vérification de ces armes apparaît comme un compromis raisonnable. Cependant, je voudrais faire remarquer que les armes prohibées et à autorisation restreinte ont été vérifiées au cours des dernières années. Nous ne demandons rien de plus que ce qui est déjà en place, mais nous affirmons également sans détour que nous n'accepterons rien de moins.

• 1625

On aurait tort de ne pas prendre en compte les préoccupations exprimées autour de cette table. Nous ne nous opposons pas au report jusqu'en 2003 de la vérification des armes d'épaule, mais nous vous invitons à donner dans les règlements des indications très précises quant à la vérification des armes de poing et des armes prohibées.

Par ailleurs, je signale que le gouvernement de l'Alberta, qui s'est farouchement opposé à l'émission de permis et à l'enregistrement des armes d'épaule, a indiqué très clairement que les armes de poing sont dangereuses de par leur nature même, et qu'il faut les contrôler strictement. Je vous invite tous à vous reporter au mémoire du gouvernement de l'Alberta où il est question des armes de poing et de la nécessité d'un contrôle très étroit des armes à autorisation restreinte dans notre pays.

Je cède maintenant la parole à mon collègue Arn Snyder, de l'Association canadienne de justice pénale, qui va parler des clubs et des champs de tir.

M. Arn Snyder (Association canadienne de justice pénale): Merci, Wendy.

L'un des éléments de la réglementation concerne les clubs et les champs de tir, et nous sommes heureux de voir qu'il existe désormais un règlement dans ce domaine. Nous en sommes heureux pour trois raisons.

Premièrement surtout, les clubs et les champs de tir permettent à des non-titulaires de permis d'accéder à des armes à autorisation restreinte ou non en tant qu'invité d'un membre du club. Le respect des règles de sécurité est essentiel, comme l'est le contrôle de la consommation d'alcool, etc.

La deuxième raison, c'est que l'adhésion à un club de tir est l'un des critères qui permet d'acquérir une arme à autorisation restreinte comme une arme de poing, et le processus de sélection et d'inscription dans les clubs de tir est essentiel pour assurer l'efficacité des contrôles concernant les armes à autorisation restreinte.

Troisièmement, le règlement sur les clubs de tir est essentiel parce que des armes sont entreposées en quantité dans ces clubs. Il y a déjà eu des vols d'armes à feu dans des clubs de tir, et on n'insistera jamais assez sur la nécessité de les réglementer.

Voilà les trois raisons pour lesquelles nous sommes heureux que le gouvernement ait imposé des règlements aux clubs de tir.

Curieusement, l'article 13 de la loi précise que l'exploitant d'un club de tir agréé doit tenir des registres comportant pour chaque membre du club les indications du nom, de l'adresse, du numéro de téléphone, etc. Par contre, et c'est à notre avis un oubli, on ne retrouve aucune exigence concernant l'enregistrement des invités, alors qu'en vertu du paragraphe 14(2), l'exploitant d'un club de tir agréé doit consigner l'information pertinente concernant les invités. À notre avis, il faudrait modifier le règlement et exiger que les clubs et les champs de tir tiennent un registre des invités, pour les trois raisons que j'ai exposées tout à l'heure.

Mme Wendy Cukier: Voilà les deux éléments de la réglementation qui nous préoccupent au premier chef, et vous verrez qu'en ce qui concerne les expositions d'armes, le règlement sur les armes à feu des agents publics, la possession autorisée dans des cas particuliers et le rapport de la mise en oeuvre, nous n'avons proposé aucun changement.

En ce qui concerne l'importation et l'exportation d'armes à feu, nous pensions qu'il fallait faire une déclaration écrite à la frontière pour indiquer le type et le nombre d'armes à feu qu'on voulait faire entrer au Canada. L'information exigée à la frontière correspond à celle qui doit être fournie à l'enregistrement, et en cas de non-observation de la déclaration, les armes à feu en question peuvent être vendues ou réservées à l'utilisation des agents des douanes ou de la police.

Nous avons appris aujourd'hui que nous n'avons peut-être pas interprété correctement le Règlement sur l'importation et l'exportation d'armes à feu. Si tel est le cas, nous l'avons interprété dans le sens qu'il devrait avoir. Nous pensons qu'il est essentiel que les armes à feu soient enregistrées lorsqu'elles entrent au Canada. Et si cet objectif a été modifié par des amendements mineurs, je préfère céder la place à mes éminents collègues, qui ont déjà fait des exposés et je me contenterai de dire que le comité devrait étudier la question.

• 1630

Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, madame Cukier.

Monsieur Ramsay, vous avez cinq minutes.

M. Jack Ramsay: Merci, monsieur le président. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos témoins et, évidemment, les remercier de leur exposé.

J'ai toujours pensé que l'enregistrement par la poste, qui pose un problème de vérification, avait été proposé par souci d'économie. Si l'on mobilise de 3 à 6 millions de Canadiens pour leur faire enregistrer de 7 à 20 millions d'armes d'épaule, il va falloir déployer des efforts considérables. Les propriétaires devront amener leur arme à un vérificateur, le plus souvent quelqu'un qui aura reçu une formation en identification d'armes à feu. Voilà donc mon premier commentaire.

Le système prévoit maintenant que la vérification d'une arme d'épaule ne se produira qu'au moment du premier transfert de propriété, c'est-à-dire si le propriétaire veut vendre son arme ou s'il décède et que son arme fait partie des biens successoraux. La vérification se produira alors au moment du changement de propriété.

Je pense donc qu'il y aura un fort pourcentage—disons un pourcentage important, pour être plus prudent—d'armes à feu qui iront... Et les représentants de la GRC ont reconnu, dans leur témoignage, qu'il faudra des années, voire des décennies, avant que la vérification s'opère. S'il faut consacrer autant d'argent au système d'enregistrement, il faut que ce système soit bon dès le départ. Je crains fort qu'il ne le soit pas, et qu'il ait tous les inconvénients des systèmes d'enregistrement par la poste.

Je voudrais poser une question à M. Snyder, puisque c'est lui qui a parlé des clubs et des champs de tir. Il y a eu récemment un suicide très malheureux dans un club de tir de Colombie-Britannique. En quoi le règlement aurait-il pu prévenir un tel incident? Aurait-il pu effectivement le prévenir?

M. Arn Snyder: Monsieur Ramsay, je ne connais pas cet incident à proprement parler et je ne pense pas pouvoir vous répondre avec précision, mais je pense que ce règlement améliore la sécurité et les procédures dans les clubs et les champs de tir.

M. Jack Ramsay: Est-ce qu'il y avait vraiment un problème? Peut-être pourriez-vous nous dire combien de clubs de tir vous avez visités. Les procédures et la sécurité posaient-elles des problèmes dans les clubs de tir?

Le tarif d'assurance est très bas. Jusqu'à maintenant, il ne semble pas que les clubs de tir aient menacé la sécurité publique. Y a-t-il dans l'ensemble du pays un problème de sécurité imputable aux clubs de tir et qui nécessite une réglementation?

M. Arn Snyder: Actuellement, mon expérience se limite à un certain nombre de clubs de tir de la région. Je peux parler de façon générale de l'amélioration de la sécurité. Toute amélioration des procédures de sécurité justifie mon appui. Mais je ne peux pas me prononcer sur le cas que vous citez.

Je ne sais pas si Wendy peut ou veut le faire.

Mme Wendy Cukier: Il est juste de dire que certains clubs de tir ont un dossier de sécurité irréprochable, mais ce n'est pas le cas de beaucoup d'autres. Sauf erreur de ma part, le professeur Gary Mauser est membre du Barnett Rifle Club, qui a délivré un permis d'arme à feu à Mark Chahal. C'est dans ce club que la femme s'est suicidée et je crois que c'est là qu'un membre du club s'est blessé mortellement par accident.

• 1635

Par conséquent, cette idée voulant que les clubs de tir soient des havres de sécurité est contredite par un certain nombre de meurtres très célèbres impliquant des membres de clubs de tir. Évidemment, comme vous l'avez dit, on ne peut pas faire voter une loi contre la folie. Mais on peut limiter les possibilités qu'une personne qui présente un risque puisse accéder à des armes à feu, adhère à un club de tir et obtienne un permis pour une arme à autorisation restreinte.

M. Jack Ramsay: En quoi ce règlement peut-il réduire le risque que se produisent les incidents en question au club de tir dont vous avez parlé?

Mme Wendy Cukier: Eh bien si l'on impose une plus grande imputabilité... Je veux dire que le principe essentiel en ce qui concerne le contrôle des armes à feu...

M. Jack Ramsay: Pouvez-vous donner des indications précises?

Mme Wendy Cukier: Monsieur Ramsay, nous savons qu'en général, un contrôle plus strict fait diminuer la criminalité et le nombre des morts par balle. Il est difficile de donner des exemples précis.

Mais dans le cas de Mark Chahal, par exemple, on s'est inquiété du fait qu'il allait régulièrement faire des tirs à la cible. On a cité son cas pour exiger que les clubs ne décernent un permis qu'à des membres en bonne et due forme.

Pour qu'ils soient membres en bonne et due forme, il faut que leurs clubs assurent la tenue d'un registre. Je pense donc que le règlement proposé est raisonnable, en particulier compte tenu du danger que présentent les armes à autorisation restreinte.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Ramsay. Monsieur de Savoye.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Madame Cukier, madame Rathjen, monsieur Snyder, vous comprenez le français?

Mme Wendy Cukier: Un peu.

M. Pierre de Savoye: L'interprétation vous est offerte avec les impôts que vous payez.

Mme Wendy Cukier: Merci.

[Traduction]

Les vôtres aussi, j'espère.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Madame Cukier, lorsque les représentants du ministère de la Justice nous ont présenté le nouveau jeu de règlements, ils nous ont aussi informés de certains autres documents qu'ils déposaient en même temps, dont l'autorisation à Postes Canada de livrer des armes à feu au même titre que n'importe quelle autre marchandise à toutes fins pratiques, c'est-à-dire sans qu'il y ait d'exigences particulières quant au transport ou à l'entreposage. Comment réagissez-vous à cela? Est-ce que vous y voyez un danger ou est-ce une chose normale pour vous?

Une des préoccupations que j'ai exprimées aux autorités du ministère de la Justice, mais je ne sais pas si j'ai raison ou non, c'est que s'il devient facile d'envoyer des armes à feu par voie postale, on risque peut-être d'abuser de la chose et cela pourrait présenter un certain nombre de risques. Quelle est votre opinion, madame Cukier?

Mme Wendy Cukier: Excusez-moi, mais je ne parle pas bien le français.

[Traduction]

M. Pierre de Savoye: Allez-y en anglais.

Mme Wendy Cukier: Je reconnais avec vous que l'envoi d'armes à feu par la poste présente effectivement certains risques. En revanche, nous savons qu'il existe au Canada de nombreuses régions où les gens ont absolument besoin de se procurer des armes à feu et où cela leur est plus difficile que dans d'autres parties du pays.

Par conséquent, il s'agit encore une fois de soupeser le risque par rapport au besoin. Pour être tout à fait honnête, monsieur de Savoye, je n'ai pas étudié cette question en détail, mais nous allons la prendre en délibéré et nous vous ferons parvenir une réponse plus détaillée. Merci.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Je vous remercie de votre intérêt pour la question.

Dans un autre ordre d'idées, je reviens à la question abordée par mon collègue, à savoir les clubs et les champs de tir. Vous recommandez qu'on modifie les règlements afin que les clubs de tir gardent certains renseignements sur leurs invités. J'ai un problème à cet égard, et vous avez peut-être la bonne réponse.

Si on maintient des renseignements sur des invités, ce n'est pas pour le plaisir de remplir des bibliothèques ou des classeurs. J'imagine que ces renseignements pourront et devront être communiqués. Dans quelle mesure portons-nous ainsi atteinte à la vie privée des individus? Si je suis invité dans un club de tir, qui est-ce que cela concerne? Si je suis invité dans un club de tir, que fera-t-on des renseignements à mon sujet: j'étais là tel jour, à telle heure, avec telle personne qui m'y a invité et j'ai fait ceci ou cela?

• 1640

Je me dis que dès qu'on recueillera des renseignements, ces renseignements seront fichés et utilisés. Parfois cela m'inquiète. Êtes-vous capable de me rassurer, madame?

[Traduction]

Mme Wendy Cukier: Je ne peux pas vous rassurer entièrement, mais je dois dire que je partage vos préoccupations quant au droit à la protection de la vie privée.

Notre projet d'amendement concerne le paragraphe 14(2), qui est formulé ainsi:

    L'exploitant d'un club de tir agréé doit, à la demande du contrôleur des armes à feu ou d'un invité d'un membre ou dirigeant—ancien ou actuel—du club... fournir par écrit un relevé des activités de tir à la cible ou des compétitions de tir auxquelles l'invité a pris part au cours des cinq dernières années, le cas échéant.

Comment peut-on demander à l'exploitant d'un club de tir agréé de fournir ces renseignements s'il n'est pas obligé de tenir un registre? Lorsque j'accompagne un ami à son club sportif, je signe un registre.

Nous ne parlons pas de l'information à fournir au contrôleur des armes à feu, mais le règlement prévoit que cette information peut être demandée. Le problème, c'est qu'à défaut d'une obligation de consigner cette information, comment assurer l'application de cette partie du règlement?

[Français]

M. Pierre de Savoye: Ce que je comprends, madame Cukier, c'est que vous craignez que les gens ayant la responsabilité de fournir certains renseignements ne prennent pas la précaution de tenir des registres à cet effet. Je vois qu'il ne s'agit que de cela. Je pensais que vous alliez au-delà de la loi et que vous vouliez qu'on garde des renseignements additionnels. Il ne s'agit que de se conformer aux exigences de la loi, tout comme une personne d'affaires doit tenir sa comptabilité pour s'assurer que le fisc a son injuste part.

[Traduction]

Mme Wendy Cukier: Oui. Le règlement précise que l'exploitant d'un club de tir doit tenir des registres concernant chacun des membres du club, mais il ne donne aucune indication concernant un éventuel registre des invités.

Je reviens à ce que mon collègue a dit sur les risques que présentent les clubs où n'importe qui peut avoir accès à des armes à autorisation restreinte. Il y a eu un certain nombre de vols et de crimes graves commis sur les lieux d'un club de tir par des invités. Nous pensons qu'il est important de tenir un registre officiel des invités.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay.

M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président. Je voudrais souhaiter moi aussi la bienvenue à tous les invités.

Je voudrais vous demander tout d'abord quels entretiens vous avez eus avec les fonctionnaires du ministère de la Justice? Nous avons entendu aujourd'hui un certain nombre de doléances de la part des témoins, notamment du chef des Premières nations, qui ne sont pas satisfaits des consultations menées par le ministère. Pourriez-vous nous dire comment ces consultations se sont déroulées dans votre cas?

Mme Wendy Cukier: Nous avons été invités à une réunion pour parler des règlements, et il y a eu également plusieurs appels-conférences. Mais je crois qu'il y a eu une réunion officielle à laquelle des membres de notre coalition ont été invités à présenter les critiques que nous inspiraient ces règlements.

M. Peter MacKay: Parfait.

Mme Wendy Cukier: De notre point de vue, la consultation a été satisfaisante.

M. Peter MacKay: Vous êtes satisfaite de la consultation. Merci.

À la page 3 de votre mémoire au comité, vous dites ceci:

    La plupart des propriétaires d'armes ont beau être honnêtes et respecter les exigences d'enregistrement, il reste que certaines factions du lobby des armes prônent depuis un certain temps de désobéir à la loi et d'omettre délibérément diverses informations.

Dans ce passage, vous reconnaissez qu'il y a des propriétaires d'armes à feu honnêtes, qu'il y a des gens qui se servent de leurs armes sans mettre en danger la vie de leurs concitoyens et que l'enregistrement vise moins un souci de sécurité que l'obtention de renseignements qui pourraient être utilisés à d'autres fins...

• 1645

Mme Wendy Cukier: Si vous voulez dire que nous... De mon point de vue, l'information vise directement à améliorer la sécurité publique. La preuve en a été apportée à maintes reprises par la police. Si l'on n'a pas de renseignements concernant les propriétaires des armes, il n'y a plus de contrôles ni de mesures préventives possibles.

Nous avons tous des permis de conduire et nous faisons enregistrer nos voitures parce que nous sommes respectueux de la loi, et nous nous soumettons aux alcootests dans le temps des Fêtes; de la même façon, je pense que la plupart des propriétaires d'armes à feu—comme celui qui est assis à cette table—vont se conformer à la réglementation. Mais nous savons aussi que certains éléments essaient délibérément de la faire échouer.

La meilleure preuve de notre confiance en l'honnêteté de la plupart des propriétaires canadiens d'armes à feu, c'est que nous sommes favorables à ce que dans la plupart des cas, le propriétaire procède lui-même à l'enregistrement, la vérification n'intervenant qu'en cas de vente ou de transfert de propriété. Il s'agit de rendre le système aussi simple que possible pour les propriétaires d'armes à feu qui respectent la loi, de la même façon qu'aux fins de l'impôt sur le revenu, la plupart des Canadiens sont réputés respecter la loi, mais celle-ci comporte néanmoins des dispositions permettant d'appréhender ceux qui ne la respectent pas.

M. Peter MacKay: Si tel est votre point de vue, pourquoi criminaliser une activité ou un loisir jusqu'alors légitime? Pourquoi en faire une infraction criminelle?

Mme Wendy Cukier: Est-ce que vous parlez de la possession d'une arme à feu non enregistrée?

M. Peter MacKay: Oui, d'une arme d'épaule.

Mme Wendy Cukier: Le non-paiement de la TPS est devenu une infraction, pour laquelle on a prévu diverses sanctions; de la même façon, la non-déclaration d'une arme à feu comporte diverses sanctions, dont certaines sont de nature criminelle. Les sanctions mises en place me semblent appropriées, compte tenu du risque très élevé que présentent les armes à feu pour les Canadiens.

M. Peter MacKay: Mais vous venez de dire qu'il y a une majorité—et je m'en tiens à vos propres paroles—que la plupart ou, à mon avis, la majorité des propriétaires d'armes à feu ne présentent pas de risque.

Mme Wendy Cukier: C'est exact, la plupart d'entre eux ne sont pas susceptibles de tomber dans la criminalité parce que ce sont des citoyens honnêtes qui respectent la loi.

D'après moi, vous avez raison de dire que la plupart des Canadiens respectent la loi. Cela veut dire qu'ils ne deviendront pas des criminels parce qu'ils obéiront à la loi.

M. Peter MacKay: Mais ceux qui ne le font pas risquent des sanctions pénales.

Mme Wendy Cukier: Comme vous le savez, une des choses qui pourraient arriver... et je pense que M. McConnell a dit que c'était tout à fait possible. Dans le cas de l'impôt sur le revenu, si nous nous trompons et si le ministère s'en aperçoit, il nous dira de changer notre déclaration d'impôt et de payer plus cher. Pour les erreurs moins graves, si le ministère pense que le contribuable s'est simplement trompé, il lui dira de changer sa déclaration. Ensuite, pour une première violation, le contrevenant risque une amende de 2 000 $ et une peine de six mois, après quoi les sanctions sont plus sévères.

Le plus intéressant, c'est qu'un avocat de la défense bien connu, Clayton Ruby, a dit que, d'après lui, les mesures dissuasives sont efficaces seulement pour ceux qui respectent la loi. Il appuyait fortement les sanctions proposées pour garantir que le public respecterait la Loi sur l'enregistrement des armes à feu.

M. Peter MacKay: Je suis bien d'accord parce que je ne pense pas que les lignes directrices sur l'enregistrement fassent quoi que ce soit pour inquiéter les criminels.

Mme Wendy Cukier: Oui, j'ai été étonnée d'apprendre dans votre lettre que la majorité des armes à feu récupérées après un crime sont des carabines et des fusils de chasse... Il y a quelque chose qui m'échappe.

M. Peter MacKay: Ces armes ne sont pas enregistrées.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Elles n'ont jamais été enregistrées.

Mme Wendy Cukier: Si nous jetons un coup d'oeil à la situation à Halifax et à Dartmouth, par exemple, où la police est particulièrement en faveur de la mesure, nous apprenons que 86 p. 100 des armes à feu utilisées pour commettre un crime en 1993 étaient des carabines et des fusils de chasse.

Ce ne sont pas des armes de contrebande. D'habitude, ce sont des fusils qui ont été achetés légalement et qui sont ensuite utilisés de façon criminelle.

Ce que nous pensons essentiellement, c'est que si les membres du public sont tenus comptables de leurs armes à feu, cela réduira la possibilité que ces armes soient utilisées à des fins criminelles ou qu'elles tombent entre les mains de criminels. C'est pourquoi, surtout dans les endroits autres que les grands centres, où il y a des problèmes de contrebande, cela m'étonne que vous ne voyiez pas le rapport.

M. Peter MacKay: Eh bien...

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay, votre temps de parole est écoulé. Monsieur Telegdi.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je vous félicite de votre mémoire et du travail de sensibilisation que vous avez fait à ce sujet et aussi de ce que vous essayez de faire pour changer les attitudes des Canadiens. Il suffit de voir ce qui se passe aux États-Unis où les divers groupes de milice adorent se réunir la fin de semaine pour se servir de n'importe quelle arme à feu sur laquelle ils peuvent mettre la main. J'imagine que, à un moment donné, ils prétendront aussi qu'ils devraient pouvoir utiliser des munitions brisantes, comme ils le font déjà, en prétendant que c'est par patriotisme.

• 1650

Le fait est que nous discutons d'armes qui peuvent faire énormément de tort si elles tombent entre de mauvaises mains. S'il faut limiter leur utilisation, qu'on le fasse.

Je suis très heureux que les conseils municipaux de Kitchener et de Waterloo aient tous deux appuyé la mesure. Je me rappelle ce qui est arrivé il n'y a pas tellement d'années quand un employé d'Ontario Glove a perdu la boule. Il s'est rendu au travail avec une arme à feu et a commencé à tirer sur les gens.

Je ne veux pas d'une culture où nous aurions tous le droit suprême de porter une arme à feu, surtout que les médias de l'Ontario nous disent maintenant que l'on voit de plus en plus de cas de rage routière, c'est-à-dire de gens qui veulent s'en prendre physiquement aux autres conducteurs. Heureusement, il y a très peu de gens au Canada qui ont un fusil de chasse, une arme de poing ou une carabine sur le pare-brise qu'un conducteur pourrait utiliser pour tirer sur un autre conducteur qui a fait quelque chose qui lui a déplu sur la route.

Je vous félicite donc de votre travail et je suis tout à fait d'accord avec vous sur les aspects politiques de la question parce que c'est vraiment la bonne chose à faire. Je peux aussi vous dire que pendant la dernière campagne électorale, nous avions comme adversaires tous ceux qui pensaient que les membres du public avaient le droit suprême de porter une arme, mais qu'ils n'ont pas pu faire accepter leur point de vue.

Je pense que vous avez fait beaucoup pour créer cette culture. Je vous en félicite parce qu'il y a trop de gens qui risquent de se faire blesser par une chose que quelqu'un d'autre considère comme du sport.

J'ajoute qu'on aurait pu faire beaucoup de descentes dans le passé. Il peut arriver n'importe où dans le pays que la police fasse une descente dans les locaux d'un club de motards. Vu que les armes d'épaule ne sont pas enregistrées, la police ne sait pas si les armes sont volées ou non.

Si nous voulons maîtriser la situation, et je pense que c'est nécessaire vu que nous ne sommes pas tellement loin des États-Unis où, d'après moi, les gens ont une culture tout à fait pervertie en ce qui concerne les armes à feu, le travail que vous faites est très important. Vous avez bon nombre de partisans qui appuient vos efforts au Parlement. Je vous remercie.

Le vice-président (M. John Maloney): Nous devrions peut-être faire un rapide tour de table pour des questions et réponses d'une minute. Soyez très brefs.

M. Jack Ramsay: La plupart des propriétaires d'armes à feu à qui j'ai parlé sont très conscients des aspects de sécurité. Ils s'opposent à cette réglementation parce qu'ils ne pensent pas qu'elle puisse améliorer la sécurité de nos maisons et de nos rues.

Je voudrais poser une brève question à M. Snyder. Si nous jetons un coup d'oeil aux mesures proposées pour améliorer la sécurité, nous constatons qu'il y a diverses choses montrant qu'elles n'atteindront pas le but fixé. Je voudrais donc vous demander rapidement une chose. Si vous êtes propriétaire d'armes à feu, et apparemment vous l'êtes, et que vous deviez apposer une étiquette autocollante sur une de ces armes à feu parce qu'elle n'a pas de numéro de série ou qu'elle a un numéro de série semblable... Si quelqu'un vole cette arme et la passe à la toile d'émeri pendant 35 secondes ou le temps qu'il faut et si ensuite la police arrête le criminel, comment pourra-t-on retrouver le propriétaire légitime? Peut-être qu'elle trouvera simplement l'arme sur le lieu du crime. Comment pourra-t-on retrouver le propriétaire légitime? Peut-être qu'elle trouvera simplement l'arme sur le lieu du crime. Comment pourra-t-on retrouver le propriétaire?

Ce que j'essaie de dire, c'est que si l'on veut dépenser des millions de dollars pour ce système, il doit être efficace et améliorer la sécurité. Mais ce seul exemple montre que, à tout le moins...

Je voudrais savoir ce que vous en pensez et si...

Le vice-président (M. John Maloney): Pouvez-vous répondre, s'il vous plaît?

M. Arn Snyder: Merci, monsieur le président. J'ai quelques observations à faire.

Tout d'abord, je pense que la plupart des armes à feu, soit 90 p. 100, ont un numéro de série identifiable. Il ne reste donc que 10 p. 100.

• 1655

Comme d'autres témoins l'ont dit, ce que nous voudrions, c'est une espèce de compromis par rapport aux règlements proposés. Oui, on pourrait enlever l'autocollant et j'ignore comment on pourrait identifier l'arme à feu à ce moment-là. Comme l'ont dit d'autres témoins, il faudrait peut-être revenir aux anciennes techniques d'enquête.

Voilà donc comment j'envisage le projet de réglementation. On n'aura pas une exactitude complète, mais, selon moi, ce sera beaucoup mieux que ce qu'il y a maintenant.

Je suis propriétaire d'armes à feu. J'ai aussi été policier pendant 25 ans et je vois donc les choses de deux points de vue différents. À mon avis, le projet de réglementation et le règlement dont nous discutons maintenant représentent un progrès phénoménal par rapport à ce que nous avons maintenant. Je suis bien d'accord qu'il existe certaines échappatoires, mais nous devons l'accepter.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Snyder.

Monsieur de Savoye.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Monsieur Snyder, j'ai remarqué que vous aviez de la documentation sur l'usage d'armes à feu à des fins criminelles dans certaines régions du pays, par exemple dans la région des Maritimes. Avez-vous par hasard des statistiques pour la région de Québec? Dans l'affirmative, comment se comparent-elles à celles du reste du pays?

M. Arn Snyder: Je m'excuse, mais je ne parle pas français.

[Traduction]

Nous avons des chiffres à propos de Montréal et de la région...

M. Pierre de Savoye: J'aurais voulu des chiffres sur Québec.

M. Arn Snyder: Malheureusement, nous n'avons rien sur Québec.

M. Pierre de Savoye: Je vous écrirai la prochaine fois.

M. Arn Snyder: Merci. Si vous voulez, nous avons des chiffres sur Hull.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Tout particulièrement, monsieur Snyder, comment cela se compare-t-il avec d'autres régions du pays? Les différences peuvent-elles être expliquées d'une manière ou d'une autre?

[Traduction]

M. Arn Snyder: Je ne sais pas vraiment si l'on peut expliquer les différences en raison de facteurs géographiques. Peut-être que les autres membres du comité pourront expliquer les différences.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Je crois que madame voulait me répondre.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Maloney): Très rapidement, s'il vous plaît.

Mme Wendy Cukier: À mon avis, les chiffres sur l'utilisation inégale d'armes à feu au Québec ne sont pas tellement différents de ceux pour les autres provinces. Vous avez entendu le Dr Chapdelaine dire qu'il y avait un problème.

Une chose pour laquelle le Québec se distingue nettement des autres provinces du Canada, c'est l'attitude des Québécois envers les armes à feu. Même dans les régions où on trouve un pourcentage élevé de propriétaires d'armes à feu, il n'y a pas la même opposition à la réglementation que dans d'autres régions du pays où l'on subit davantage l'influence des valeurs américaines. Comme vous le savez, il y a plus d'appuis pour la loi au Québec que n'importe où ailleurs dans le pays.

Le vice-président (M. John Maloney): Une question et une réponse d'une minute, s'il vous plaît.

M. Peter MacKay: Si le but ultime de cette réglementation est vraiment d'éliminer les suicides, les homicides et les cas de violence familiale et si cela doit coûter environ 48 millions de dollars, comme on le prévoit maintenant, même si c'est ridiculement bas comme prévision, et on le constatera très vite, je pense, est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux dépenser cet argent pour renseigner le public ou s'attaquer directement aux problèmes au lieu d'essayer d'enregistrer les armes à feu?

Mme Wendy Cukier: Je pense qu'il faut envisager la mesure dans son ensemble. Nous avons dit déjà que l'enregistrement fait partie intégrante de la loi et que c'était un élément absolument essentiel. Je reviens à ce que disait mon collègue, le Dr Chapdelaine, en parlant, je pense, de l'étude de Ted Miller, selon laquelle les morts et les blessures causées chaque année par les armes à feu coûtent 6 milliards de dollars aux Canadiens. Par rapport à un coût de 6 milliards de dollars par année, cette mesure représente un très petit investissement.

Si vous prenez le temps de voir quels genres de groupes appuient la Coalition pour le contrôle des armes à feu et la loi et la réglementation, vous constaterez qu'ils représentent des points de vue qui vont d'un bout à l'autre de l'éventail politique et d'un bout à l'autre du pays. Il est clair que la plupart des organismes qui veulent surtout améliorer la sécurité du public et réduire le nombre de morts et de blessures par balle considèrent cet investissement comme utile.

• 1700

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Madame Bakopanos, vous avez une minute.

Mme Eleni Bakopanos: Je voudrais remercier très rapidement les témoins. Je tiens aussi à féliciter la Coalition du travail qu'elle a fait dans ce domaine. Je voudrais poser une question à propos de ce que les témoins ont dit au sujet de la deuxième modification, celle qui porte sur les cessions d'armes à feu.

Vous recommandez que nous modifiions l'amendement pour garantir que les armes à feu à autorisation restreinte continueront d'être vérifiées pendant la période de 1998 à 2003. J'imagine que ce serait d'abord au moment de la cession.

Mme Wendy Cukier: Oui.

Mme Eleni Bakopanos: Deuxièmement, vous avez dit que le gouvernement de l'Alberta était d'accord... voulez-vous que j'élabore?

Mme Wendy Cukier: Je m'excuse; ce n'était pas gentil de notre part. Vous savez peut-être que, quand le gouvernement de l'Alberta a contesté la constitutionnalité de la loi, il a essayé de faire la distinction entre les armes de poing, qu'il juge être dangereuses en soi, et les armes à feu ordinaires, comme les carabines et les fusils de chasse, qu'il juge être de simples outils. Bien sûr, nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec cette distinction. Je voulais simplement parler du fait que, même en Alberta, on s'entend pour dire que les armes à feu à autorisation restreinte représentent un danger particulier parce qu'elles peuvent être dissimulées facilement et je pense que ce serait commettre une grave erreur que d'assouplir le moindrement le régime actuel pour le contrôle des armes à feu à autorisation restreinte et des armes prohibées.

Mme Eleni Bakopanos: Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci. Je remercie les témoins d'être venus cet après-midi et d'avoir exprimé leurs points de vue.

Nous ferons maintenant une pause de trois minutes avant d'entendre les prochains témoins.

Mme Wendy Cukier: Merci beaucoup.

• 1701




• 1706

Le vice-président (M. John Maloney): Si tout le monde veut bien prendre sa place, nous pourrons commencer.

Nous accueillons, de la YWCA of Canada, Sandra Essex et Gael MacLeod.

Mesdames, vous avez la parole.

Mme Sandra Essex (membre, YWCA of Canada): Merci beaucoup. Je représente la YWCA of Canada. Ma collègue, Gael MacLeod, est aussi de la YWCA.

La YWCA of Canada est un organisme féminin de charité bénévole qui a été créé en 1893 pour jouer un rôle de coordination entre les 43 associations membres YWCA et YM-YWCA du Canada. Nous offrons des programmes et des services communautaires de grande qualité, nous jouons un rôle de sensibilisation du public aux questions touchant les femmes et nous militons en faveur de changements sociaux, politiques et économiques responsables. Notre mission primordiale est la recherche de l'équité et de l'égalité pour toutes les femmes. La YWCA est un mouvement mondial, qui exerce son activité dans quatre-vingt-onze pays. Nous parlons au nom de cinq millions de femmes, ce qui fait de notre organisme le plus grand et le plus ancien organisme féminin privé du monde.

Au Canada, la YWCA travaille auprès des femmes et de leurs familles depuis plus de 100 ans. L'an dernier, plus de 850 000 personnes ont participé à nos programmes et services. La YWCA offre notamment des programmes visant à mettre fin à la violence contre les femmes, à assurer aux femmes des services de logement à long terme où elles peuvent trouver l'appui dont elles ont besoin, des centres d'accueil et des maisons d'hébergement, de même que des services de logement sans but lucratif.

Nous sommes ici aujourd'hui pour montrer l'importance du volet enregistrement de la réglementation dans le contexte de la violence conjugale et de la sécurité des femmes.

La cour d'appel de l'Alberta a entendu le témoignage de personnes qui prétendaient être des experts dans le domaine de la violence conjugale et familiale. Selon ces experts, il n'existe aucun lien entre les armes à feu, d'une part, et la violence conjugale et l'homicide conjugal, d'autre part, et que le contrôle des armes à feu n'a rien à voir avec la sécurité des femmes. Il s'agit là de déclarations aberrantes qui ne sauraient être appuyées par la YWCA, qui s'occupe de questions touchant les femmes depuis plus d'un siècle.

L'intimidation conjugale et l'homicide conjugal liés à l'utilisation d'armes à feu sont une réalité funeste pour bien des femmes au Canada, et on en connaissait l'existence bien avant que les données statistiques ne portent ces circonstances à la connaissance du public.

Il est important que les organismes et les particuliers qui prétendent à une certaine expertise et qui témoignent en qualité d'experts expliquent comment ils ont acquis cette expertise et comment ils en sont arrivés à leur opinion d'experts. Quant à la YWCA, elle a acquis son expertise en matière de violence conjugale grâce au travail qu'elle fait dans le cadre de programmes visant à mettre un terme à la violence contre les femmes et grâce aux contacts directs que nous avons avec les femmes et les enfants dans nos centres d'accueil.

La YWCA aide quotidiennement des femmes qui fuient des situations de violence, leur offrant un logement sûr et abordable, des services d'aide juridique, de l'aide sociale et d'autres services communautaires. Nous militons en faveur du renforcement des lois contre les hommes qui maltraitent leurs conjointes et de modifications aux lois relatives à des questions comme la garde des enfants et l'accès aux enfants, l'aide juridique et les pensions alimentaires.

Notre expertise, nous la tenons de notre intérêt de longue date pour les questions touchant les femmes. Depuis la fin du siècle dernier, nous offrons l'hébergement aux femmes ayant besoin d'un refuge sûr. L'an dernier, plus de 12 000 femmes et enfants ont été accueillis dans nos centres d'accueil des différentes régions du Canada. Ce chiffre ne comprend pas les 170 000 autres femmes qui sont venues trouver refuge dans nos résidences et dont beaucoup fuyaient des situations de violence conjugale.

• 1710

Douze de nos associations membres ont des centres d'accueil, notamment à Winnipeg, à Calgary, à Peterborough, à Sudbury, à Brandon, à Regina, à Lethbridge, à Kamloops et à Yellowknife. Nous aidons quotidiennement les femmes à refaire leur vie, détruite par des hommes qui abusent de leur pouvoir et se servent de leur force et qui exercent leur pouvoir et leur domination de manière à les maltraiter. C'est grâce au travail que nous faisons quotidiennement que nous en sommes venus à formuler notre opinion d'experts sur la violence conjugale.

Au fil des ans, la YWCA a apporté sa contribution en tant qu'expert à une multitude de consultations officielles et officieuses sur la violence faite aux femmes. Ainsi, depuis trois ans, nous participons activement aux consultations du ministère de la Justice sur la violence faite aux femmes.

Il s'agit là d'une tribune qui réunit 60 organismes féminins réputés experts en matière de questions relatives à la violence. La YWCA intervient en qualité d'expert afin d'obtenir des mesures législatives qui ont une importance pour les femmes, notamment en ce qui a trait à l'accès aux dossiers relatifs aux agressions sexuelles, aux lignes directrices en matière de pensions alimentaires et aux droits de la personne.

Pour aider les intervenants à enrayer la violence et à y réagir, la YWCA of Canada publie une collection de documents intitulée «Community Action on Violence Against Women» qu'elle a fait distribuer à des dizaines de milliers d'organismes communautaires ainsi que d'organisations et de professionnels de la santé et des services sociaux.

La YWCA of Canada a organisé cette année, pour la deuxième année consécutive, sa semaine sans violence—événement national, voire international—afin de sensibiliser les jeunes et les adultes à la nécessité de mettre un terme à la violence dans leur vie quotidienne.

L'opinion d'expert de la YWCA tient aussi au travail qu'elle fait en collaboration avec bien d'autres organismes féminins et groupes communautaires. Dans le témoignage que nous avons présenté aux audiences du comité de la Chambre et au comité du Sénat sur le projet de loi C-68, nous nous sommes concentrés sur le lien qui existe entre le contrôle des armes à feu et la violence conjugale. Notre mémoire avait été rédigé en consultation avec bien d'autres organismes féminins et avait été entériné par plus de 130 groupes féminins considérés comme experts en la matière.

Nous sommes d'avis que l'enregistrement obligatoire, élément clé du projet de loi C-68, aura un effet considérable sur l'homicide conjugal et la sécurité des femmes et des enfants.

En ayant une loi ferme sur le contrôle des armes à feu et en soumettant toutes les armes à feu à l'enregistrement obligatoire, le Canada prend publiquement position. Il façonne ainsi nos valeurs en rejetant la culture des armes à feu si présente aux États-Unis. La culture des armes à feu fait de la violence quelque chose de glorieux et de légitime. Les jeunes garçons sont exposés à un âge très précoce à l'utilisation d'armes au moyen de jeux, de films, de vidéos, et de jeux électroniques. Ils apprennent sans tarder que résoudre des conflits par la violence, c'est non seulement efficace, mais aussi acceptable pour leur sexe.

Dans bien des localités, posséder une arme à feu et s'en servir, ce n'est pas simplement une question de se protéger contre le milieu environnant. Il y va de son pouvoir de mâle dans l'exercice de son rôle traditionnel de domination par rapport à sa famille et de son droit culturel d'agir de la sorte.

Le contrôle des armes à feu ne résoudra pas le problème de la violence conjugale, qui se trouve enraciné dans les valeurs de domination, d'agressivité et de compétitivité. La violence faite aux femmes, c'est une question de pouvoir et de domination de l'homme par rapport à la femme. Le problème persistera tant que les hommes et les femmes n'auront pas le même pouvoir économique, politique et social.

Les experts en matière de violence conjugale qui s'opposent au contrôle plus rigoureux des armes à feu ont tort quand ils prétendent qu'il n'y a pas de lien entre les armes à feu et la violence conjugale. Il y a manifestement un lien entre la culture des armes à feu et la disponibilité des armes à feu. La culture des armes à feu, qui normalise et légitime la violence, trouve aussi son origine dans les valeurs d'agressivité et de pouvoir. Il s'agit d'un prolongement de la culture qui perpétue la violence contre les femmes.

Opter pour le contrôle plus rigoureux des armes à feu, notamment pour l'enregistrement obligatoire de toutes les armes à feu, c'est prendre position contre cette culture, et la violence conjugale s'en trouvera réduite. Dans les foyers où des actes de violence se produisent, dans les foyers où il existe une relation de violence et où l'on trouve des armes à feu, ces armes sont invariablement utilisées de façon abusive pour exercer son pouvoir, pour dominer et pour intimider, que ce soit implicitement ou explicitement.

L'étude historique sur la violence faite aux femmes que Statistique Canada a publiée en 1993 a montré que 51 p. 100 des femmes de plus de 16 ans avaient été victimes d'agressions physiques ou sexuelles, telles qu'elles sont définies par le Code criminel. Ainsi, plus de cinq millions de femmes sont victimes de violence. Vingt-cinq pour cent des femmes, ou une femme sur quatre, sont victimes de violence dans leur mariage actuel ou ont déjà été victimes de violence dans un mariage antérieur.

D'après les estimations, il y aurait de cinq à sept millions d'armes à feu au Canada. Quand on confronte ces statistiques, il ressort clairement qu'il y a bien plus de femmes qui sont intimidées par l'utilisation d'armes à feu qu'il y en a qui font intervenir la police. Les personnes qui travaillent dans nos centres d'accueil souscrivent à cette théorie.

Plus des trois quarts de toutes les femmes qui sont tuées le sont par un conjoint. C'est le phénomène dit de l'homicide conjugal. Dans près de la moitié des cas d'homicide conjugal, les armes à feu sont les armes de prédilection des hommes qui tuent leur conjointe. Plus de 70 p. 100 des armes à feu utilisées pour commettre un homicide conjugal sont des carabines ou des fusils de chasse dont la possession n'est aucunement illégale.

Les recherches effectuées depuis 20 ans viennent systématiquement étayer ces faits. Les statistiques peuvent varier légèrement, mais la tendance ne varie pas. Les enquêtes réalisées dans les cas d'homicide conjugal montrent que, en règle générale, la victime connaît son agresseur. Le plus souvent, l'homicide a lieu dans son foyer. Dans la majorité des cas, il ne s'agit pas d'actes de violence gratuits. Les femmes sont bien plus susceptibles d'être tuées par quelqu'un qu'elles connaissent et qui possède une carabine ou un fusil de chasse en toute légalité.

• 1715

S'il existait un registre des armes à feu, les policiers qui arriveraient sur les lieux d'une querelle de ménage sauraient s'il s'y trouve des armes à feu et sauraient quels en seraient le nombre et le type. Grâce à cette information, les policiers pourraient saisir l'arme à feu enregistrée en cas de situation volatile, de façon à prévenir probablement qu'une nouvelle agression puisse dégénérer en homicide conjugal. Il est important de retirer l'arme à feu le plus tôt possible, puisque la violence a tendance à s'aggraver avec le temps.

D'après nos recherches, la femme se remettra en ménage avec son conjoint violent 30 fois avant de le quitter pour de bon. Chaque fois qu'elle revient au foyer, elle risque d'être abattue à l'aide de l'arme à feu en question. La présence d'une arme à feu dans un foyer violent multiplie les risques qu'un homicide conjugal se produise.

Les armes à feu ne sont pas les seules armes utilisées dans les cas d'homicide conjugal, mais elles sont les plus mortelles. Il y a plus de risques qu'une situation volatile comme une querelle de ménage se termine par un décès quand on a accès à une arme à feu.

Les recherches effectuées sur les cas d'homicide montrent qu'il faut une intention moins bien formée, moins de détermination et moins d'efforts pour tuer à l'aide d'une arme à feu que par tout autre moyen. Des études montrent que les cas d'agression où il y a une arme à feu sont 12 fois plus susceptibles de se terminer par un décès que ceux où il n'y en a pas. D'après une étude en particulier, les deux tiers des agents chargés d'enquêter sur des cas d'homicide conjugal estimaient qu'il n'y aurait pas eu d'homicide si l'agresseur n'avait pas eu accès à une arme à feu.

Ces observations permettent peut-être d'expliquer aussi pourquoi les homicides multiples, comme le massacre de Vernon, sont bien plus susceptibles d'être commis à l'aide d'une arme à feu. Près de la moitié des cas d'homicide conjugal sont suivis du suicide ou de la tentative de suicide du conjoint. Selon d'autres recherches, la proportion de tentatives de suicide s'élèverait à 70 p. 100.

D'après une analyse des cas de 551 femmes tuées par leur conjoint entre 1974 et 1990, 767 décès en auraient résulté. La plupart de ces décès supplémentaires étaient attribuables au suicide de l'agresseur, mais 62 enfants avaient aussi été tués. L'homme qui vient de tuer sa femme trouve plus facile d'en tuer d'autres s'il a une arme à feu plutôt qu'une autre arme.

L'homicide conjugal est généralement un acte impulsif qui résulte d'une agression ou de ce que l'agresseur perçoit comme une perte de pouvoir, comme lorsque la femme menace de partir. En établissant un lien entre chaque arme à feu et son propriétaire, l'enregistrement permettra de faire en sorte que les propriétaires d'armes à feu soient responsables de leurs armes. L'enregistrement encouragera l'entreposage sécuritaire et éliminera beaucoup des cas d'homicide conjugal impulsif. Les trois ou quatre minutes de plus qu'il faut pour déverrouiller l'arme et la charger seront une question de vie ou de mort pour les femmes dans bien des situations.

Avec un registre des armes à feu, on pourra faire respecter les ordonnances d'interdiction. Chaque année, plus de 17 000 ordonnances sont émises contre des personnes qui constituent un risque pour la sécurité publique et à qui il est défendu d'être en possession d'une arme à feu. Bien souvent, ces ordonnances d'interdiction sont émises contre des hommes qui ont été reconnus coupables d'avoir agressé leur femme ou une autre personne.

D'après les travailleurs de première ligne, les femmes que nous hébergeons dans nos centres d'accueil font régulièrement l'objet de menaces proférées à l'aide d'une arme à feu. S'il devient plus facile d'émettre et de faire respecter des ordonnances d'interdiction, ces femmes seront mieux protégées.

D'après les données statistiques sur l'homicide conjugal, 50 p. 100 des inculpés avaient un casier judiciaire. Ces hommes n'auraient pas dû être en possession d'une arme à feu. L'enregistrement aurait permis de leur refuser l'accès à une arme à feu ou de saisir les armes qu'ils auraient eues en leur possession. En l'absence d'information exacte sur l'emplacement des armes à feu, les policiers ne peuvent pas faire respecter les ordonnances d'interdiction.

Bien souvent, le conjoint commence à agresser sa femme après qu'ils sont déjà ensemble depuis un certain temps, peut-être après la naissance d'un enfant ou après la rupture du mariage ou la perte de son emploi. Pareils événements ne sont pas la cause de la violence, mais ils servent simplement de catalyseur. Quand la violence commence à se manifester, il se peut que l'agresseur ait déjà une arme à feu qu'il a obtenue en conformité avec la loi. Il se peut bien que le cycle de la violence soit déjà bien amorcé avant que la police intervienne.

L'enregistrement permettrait aux policiers de savoir s'il y a des armes à feu dans le foyer et de les saisir dès leur première visite. Retirer les armes à feu du foyer n'éliminera pas la violence, mais cela contribuera à réduire les risques que les agressions se terminent par un homicide. L'enregistrement n'éliminera pas la violence, mais s'il est moins facile pour les hommes violents d'avoir accès à des armes à feu, il y aura peut-être moins de femmes qui seront blessées et moins de cas d'agression qui se termineront par un homicide.

Mme Gael MacLeod (YWCA of Canada): La YWCA est reconnaissante au comité de lui donner l'occasion de présenter ses vues au nom de beaucoup de femmes. Comme les femmes sont généralement sous-représentées dans les institutions politiques et la fonction publique canadiennes, les lois et les politiques ne reflètent pas toujours leurs priorités et ne répondent pas toujours à leurs besoins ou à leurs préoccupations.

Les lois relatives au contrôle des armes à feu n'ont pas été assez rigoureuses jusqu'à maintenant, car elles ne prévoyaient pas l'enregistrement obligatoire des armes à feu. Les femmes qui font partie de nos associations membres et d'autres importants groupes féminins nous disent qu'elles appuient l'enregistrement comme moyen de renforcer le contrôle des armes à feu.

Les résultats de sondages réalisés par Environics montrent que 90 p. 100 des Canadiens appuient l'enregistrement obligatoire de toutes les armes à feu. Chez les femmes, le pourcentage d'appui est encore plus élevé. Un sondage Angus Reid de septembre 1993 donne des résultats semblables: 81 p. 100 des hommes appuient l'enregistrement de toutes les armes à feu; et encore là, la proportion d'appui est plus élevée chez les femmes, s'établissant à 92 p. 100. Un autre sondage Angus Reid réalisé en août 1994 a permis d'arriver à des constatations semblables. Quatre-vingt-six p. 100 des Canadiens sont pour l'enregistrement de toutes les armes à feu.

• 1720

Les femmes vous ont dit à maintes reprises, par l'entremise de leurs députés, dans des sondages et par la bouche d'organismes comme la YWCA, qu'elles veulent l'enregistrement obligatoire des armes à feu.

L'enregistrement des armes à feu est, non pas l'exception, mais la règle dans la plupart des pays industrialisés. Une récente résolution de la Commission de la prévention du crime et de la justice criminelle des Nations Unies reconnaissait explicitement l'importance de la réglementation des armes à feu dans les efforts pour lutter contre la violence faite aux femmes.

Récemment, trois rapports de coroner distincts ont recommandé l'enregistrement de toutes les armes à feu. Le coroner chargé d'enquêter sur le massacre de Vernon a expressément recommandé l'enregistrement de toutes les armes à feu comme moyen de prévenir l'homicide conjugal.

L'enregistrement est un moyen rentable de prévenir les décès et les blessures causés par les armes à feu, surtout quand on tient compte du coût des services policiers et sociaux, ainsi que du coût pour la société et pour ses membres d'une autre tragédie comme celle de Vernon. Plus nous retardons le moment d'agir et plus nous attendons d'avoir des preuves de la valeur de l'enregistrement, plus il y aura de vies qui seront perdues dans des cas de violence conjugale.

Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci. Monsieur Breitkreuz, vous avez cinq minutes.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Merci beaucoup. J'écoute très attentivement vos propos pour voir dans quelle mesure ils sont liés à la réglementation dont nous sommes saisis. C'est de cela qu'il s'agit ici.

J'essaie de savoir des témoins dans quelle mesure cette réglementation sera efficace. Vous pouvez peut-être me dire comment l'enregistrement sera efficace selon vous.

Vous avez notamment dit que l'enregistrement changerait notre culture. De quelle façon?

Mme Gael MacLeod: Dans le contexte où nous en avons parlé, il s'agissait de la culture des armes à feu; nous voulions parler de la culture de la violence.

M. Garry Breitkreuz: Pouvez-vous établir le lien entre cette culture et l'enregistrement des armes à feu?

Mme Sandra Essex: Nous pouvons établir le lien pour ce qui est de la violence conjugale.

M. Garry Breitkreuz: Comment la réglementation proposée permettra-t-elle de régler ce problème? Pourriez-vous nous donner un exemple? La réglementation n'a pas donné de résultats ailleurs, alors pourquoi en donnerait-elle au Canada?

Mme Sandra Essex: Il ne faut pas oublier que nous parlons expressément ici de la violence conjugale et de l'effet de l'enregistrement sur la violence conjugale. Il ne faut pas oublier que dans la majorité des cas de violence conjugale, ce sont des hommes qui sont les agresseurs. Ces hommes sont perçus comme étant des citoyens responsables et respectueux de la loi. Il pourrait s'agir de n'importe lequel des hommes présents dans cette salle. Ces hommes ne sont pas perçus comme des éléments criminels. Ils deviennent des criminels une fois qu'ils ont agressé leur conjointe, mais ils ne sont pas perçus comme tels.

Ces hommes qui acquièrent des armes à feu en conformité avec la loi... et les femmes sont généralement tuées avec des carabines ou des fusils de chasse acquis en toute légalité. Bien souvent, le cycle de la violence commence seulement une fois que les conjoints sont mariés depuis un bon moment. Il peut même débuter dix ans après la célébration du mariage. S'il y avait un processus d'enregistrement, dès que le cycle de la violence débuterait, si la personne avait déjà des armes à feu en sa possession... Bien souvent, la femme est agressée 10 ou 15 fois avant la première visite des policiers.

Je pourrais vous parler pendant deux heures encore de la culture de la violence. C'est là un des phénomènes auxquels les groupes de femmes tentent sans cesse de sensibiliser la population.

Il faut dire qu'au moment où la police intervient, les cycles de violence sont déjà bien engagés. Il devient absolument crucial qu'à ce moment-là tous les fusils de chasse ou carabines soient retirés du foyer même s'ils sont en règle. Croyez-moi, ces armes interviennent déjà dans le cercle vicieux. Elles servent déjà à intimider la femme, à la terroriser. Les femmes qui fréquentent nos refuges fournissent toutes sortes d'exemples à l'appui: elles vous diront que le chien de la famille est abattu, que l'homme dort avec un fusil sous son lit, qu'il nettoie son arme sous les yeux de sa femme, qu'elle est réveillée au milieu de la nuit, un fusil pointé sur sa tempe.

Parce que le cycle de la violence s'aggrave, tôt ou tard, il y a un homicide. Il faut donc que l'arme soit retirée du foyer. L'enregistrement des armes à feu est l'outil qui permettra d'y parvenir.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le président, puis-je poser une question complémentaire?

Le vice-président (M. John Maloney): Oui.

Mme Sandra Essex: Excusez-moi. J'espère avoir répondu à votre question.

M. Garry Breitkreuz: Pas vraiment. J'ai consulté des femmes dans la ville d'où je viens. À l'égard de ce problème, considérant la somme qui va devoir être dépensée et toutes les mesures qui devront être prises, nombre d'entre elles m'ont dit qu'il vaudrait beaucoup mieux que l'argent soit dépensé dans des centres de détresse-secours pour les femmes. Voilà pourquoi je m'étonne que vous préconisiez l'enregistrement, car, comme vous le savez, ce n'est que dans un faible pourcentage de foyers à problèmes que les carabines et les fusils de chasse...

• 1725

Mme Sandra Essex: Excusez-moi, ce n'est pas le cas quand il s'agit de violence familiale.

Mme Gael MacLeod: Pas du tout.

Mme Sandra Essex: Je le répète, nous sommes ici pour vous parler de la violence familiale.

M. Garry Breitkreuz: Je sais, mais ce que disent ces femmes, c'est que si elles disposaient de ces ressources, elles n'en seraient que plus efficaces dans leurs activités de counselling et dans les centres de détresse-secours, etc. Ne convenez-vous pas que...

Mme Sandra Essex: Les centres de détresse-secours et les centres d'accueil des victimes d'agression sexuelle constituent une autre composante des activités nécessaires. Mais ce n'est pas en se contentant de donner tout l'argent aux centres d'accueil des victimes d'agression sexuelle, ou à la YWCA—ce qui serait formidable—qu'on va régler le problème. Il faut toute une gamme d'interventions. Le contrôle des armes à feu constitue un élément. Il faut d'autre part faire oeuvre éducative, et il faut intervenir au niveau de l'école. Les centres d'accueil des victimes d'agression sexuelle sont nécessaires, de même que des consultations à l'échelle de la collectivité. Le contrôle des armes à feu est un élément mais il faut bien dire que c'est un élément, très important.

Permettez-moi de rétablir les choses d'après ce que vous avez dit tout à l'heure. Les carabines et les fusils de chasse, et non pas les armes de poing, sont les armes utilisées essentiellement pour tuer des femmes, et les assassins sont les propriétaires légitimes de ces armes.

M. Garry Breitkreuz: Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit. J'ai dit que ces armes intervenaient dans un petit pourcentage des cas de violence familiale. Ils ne sont pas un facteur dans la majorité des cas.

Je pense que vous ne comprenez toujours pas pourquoi nous sommes réunis ici aujourd'hui. Nous sommes ici pour voir comment ces règlements vont contribuer à régler le problème que vous nous avez exposé. Voilà. Nous examinons ces règlements, et des gens qui se sont longuement penchés sur la question ont déclaré que ces règlements ont peu d'incidence.

En fait, une femme m'a dit que ces règlements auraient un résultat tout à fait à l'opposé. Elle m'a dit qu'ils allaient monopoliser le temps de la police et une grande quantité de ressources que l'on pourrait utiliser de façon beaucoup plus efficace. Elle m'a dit que dans un foyer ces règlements risquaient d'envenimer la situation. Si quelqu'un déclare qu'on devrait confisquer les armes d'un tel, il se peut que cette personne en soit furieuse et que cela accentue sa rancoeur, aggravant ainsi la situation. Voilà donc un exemple typique où ces règlements pourraient entraîner un résultat contraire à ce que vous recherchez.

Mme Sandra Essex: Excusez-moi, je ne suis pas du même avis que vous.

Mme Gael MacLeod: J'ai du mal à concevoir qu'une femme pourrait se sentir plus à l'aise dans un foyer où il y a des armes à feu et où règne une situation de violence familiale, et c'est ce que vous êtes en train de dire. Ce n'est tout simplement pas logique.

Deuxièmement, dans leur témoignage, les représentantes du Alberta Council of Women's Shelters, ont fourni des statistiques. Malheureusement, je ne les ai pas ici. Elles ont donné le nombre de cas de violence, avec armes à feu, qui ne sont pas signalés dans les rapports de police. J'ai ici un article du Calgary Herald qui décrit la situation dans la réserve Stony. Selon l'article, s'il n'y a pas blessures ou décès, la police ne mentionne pas dans son rapport l'intervention d'armes à feu. Le procès-verbal est donc silencieux là-dessus.

Quand on dit donc que dans la majorité des cas il y a ou il n'y a pas d'armes à feu... les seules personnes qui puissent vous renseigner sur la fréquence de ce genre d'incidents, ce sont les gens qui s'occupent des refuges, et ils n'ont pas les ressources nécessaires pour faire une étude de tous leurs dossiers. Dans certains refuges, on a fait ce genre d'étude, mais nous n'avons pas de chiffres exacts à vous fournir sur-le-champ. Nous n'avons rien pu obtenir avant aujourd'hui.

Mme Sandra Essex: Je voudrais ajouter quelque chose en réponse à cela.

Nous avons signalé que nous ne savions pas dans combien de cas de violence familiale il y avait utilisation d'une arme à feu. Mais quand il y a un homicide... nous savons d'après les statistiques que près de la moitié des personnes assassinées le sont par une arme à feu. Quand il y a homicide, c'est l'arme que l'on retrouve le plus souvent. Vous avez tout à fait raison: nous n'avons pas de statistiques précises relatant le nombre de cas où la police est intervenue et où une arme à feu avait été utilisée.

Vous avez tout à fait raison quand vous dites qu'une femme ne dira pas s'il y a ou non une arme à feu dans la maison. Parfois elle ne sait même pas s'il y en a, et on peut parier que si le policier lui pose la question, elle ne lui dira pas s'il y en a, de crainte que la violence ne reprenne de plus belle une fois que le policier aura quitté la maison. Je suis donc assez d'accord avec vous là-dessus. Mais c'est précisément pour cela qu'il est très important que la police sache où se trouvent les armes à feu et qu'elle ait accès à un système d'enregistrement. En effet, le policier qui se rend sur les lieux pourra dire: il y a ici des armes enregistrées, et nous intervenons dans une dispute familiale. Alors, la police pourra réclamer ces armes. Ainsi, il n'incombera plus à la femme de révéler qu'il y a des armes à feu dans la maison.

En outre, avec le processus d'enregistrement, nous aurons encore plus de statistiques. Les renseignements que nous fournissaient les refuges signalent l'utilisation d'armes à feu, mais celles-ci ne sont pas enregistrées, quoiqu'elles soient la propriété légitime de ceux qui les possèdent. Ces armes sont utilisées énormément.

• 1730

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Monsieur de Savoye, cinq minutes.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Madame Essex, madame MacLeod, le comité se penche cette semaine sur cette deuxième vague de règlements que le ministère de la Justice s'apprête à mettre en vigueur. C'est pourquoi je m'attendais à ce que vous ayez dans votre exposé des réflexions plus particulièrement ciblées sur l'à-propos de la réglementation sur laquelle le comité se penche actuellement. Vous nous avez plutôt parlé du bien-fondé de la loi. D'une certaine manière, vos propos viennent renforcer ceux qu'on a entendus il y a au-delà d'un an. Je dois cependant admettre que ce n'est pas toujours inutile, puisque d'aucuns en tirent peut-être un certain profit. Je suis certain que Mme Bakopanos sera d'accord avec moi.

Cela dit, vous avez parlé à plusieurs reprises des mérites de l'enregistrement des armes à feu, parce que dans une situation de violence conjugale, cela permettrait à un officier de police de retirer l'arme à feu du domicile.

Je me rappelle avoir posé une question à l'époque de l'étude de la loi. Je demandais si les officiers de police recevraient la directive d'agir de cette façon-là, c'est-à-dire de retirer l'arme à feu. Si les officiers de police continuent d'intervenir en demandant simplement aux gens d'essayer de s'entendre et de faire les choses gentiment, le registre ne servira à rien. Or, je ne vois pas de réglementation ou d'autres indications invitant les officiers de police à agir de façon proactive, parce que c'est cela que vous mentionnez, agir de façon proactive.

Donc, j'aimerais, madame Essex, madame MacLeod, que vous nous indiquiez comment on pourrait s'y prendre pour que les forces de l'ordre soient proactives.

[Traduction]

Mme Sandra Essex: Je vais répondre à votre première remarque. Je pensais avoir dit au début que nous étions venues ici pour parler uniquement de l'enregistrement. Outre les dispositions législatives originales et l'obligation d'obtenir un permis, nous croyons que c'est cet aspect-là qui aura une incidence vraiment marquée du point de vue de la violence dans la famille et des homicides qui en découlent. Quant à d'autres renseignements, excusez-nous de ne pas pouvoir vous les fournir. On nous a demandé de venir parler d'un aspect en particulier, et nous estimons être en mesure de pouvoir le faire. On nous a demandé de parler de la composante enregistrement et de son importance du point de vue de la violence dans la famille et des homicides qui en découlent.

Quelle était votre autre question?

M. Pierre de Savoye: À vrai dire, il s'agit de ceci. Nous sommes saisis de règlements bien précis.

Mme Sandra Essex: Ah, je me souviens, l'oeuvre éducative et la formation. D'accord.

M. Pierre de Savoye: Vous avez parlé des règlements dans leur ensemble, mais la question est réglée en fait par les dispositions législatives en vigueur actuellement et par les règlements qui ont été pris il y a un an. Ma question porte plus précisément sur le fait que les forces de l'ordre peuvent intervenir, mais que si elles ne prennent pas des mesures proactives quant à l'utilisation des dossiers d'enregistrement, leur intervention ne servira à rien.

Mme Sandra Essex: J'en conviens.

M. Pierre de Savoye: Que proposez-vous dans ces conditions? Faudrait-il des règlements plus précis, en plus de ceux dont nous sommes saisis, pour répondre à cette préoccupation? Que proposez-vous?

Mme Sandra Essex: Il y a une autre chose dont on entend constamment parler dans nos refuges. Tous les groupes de femmes s'accordent pour dire la même chose à propos de ce segment de notre société, de cette sous-culture qui rejette sur les femmes la responsabilité de la violence dans la famille. On dit que la femme aurait dû faire ceci ou cela, qu'elle s'habillait de façon provocante, de sorte qu'on la blâme quand il y a agression sexuelle ou viol. Il y a donc beaucoup à faire pour ce qui est de faire évoluer la société et le regard qu'elle pose sur la violence dans la famille.

Il y a, dans la police, certains éléments qui contribuent à perpétuer cette attitude. Nous savons que certains policiers se rendent sur les lieux et blâment les femmes en leur disant qu'elles auraient pu s'y prendre autrement.

• 1735

Vous avez tout à fait raison de dire que la formation nécessaire constitue un autre élément, mais l'enregistrement en tant qu'outil doit exister, et on doit en faire le fondement d'autres mesures. Il y a des experts ici qui peuvent vous parler beaucoup mieux que moi de la formation, et je pense qu'une oeuvre éducative auprès de tous ceux qui forment l'appareil judiciaire—les avocats, les policiers, tout le monde—est absolument capitale.

M. Pierre de Savoye: Iriez-vous jusqu'à dire qu'il faudrait qu'il soit obligatoire que les policiers saisissent automatiquement toute arme présente dans un foyer où il y a de la violence? Il n'y aurait pas de discussion, les armes devraient être rendues.

Mme Sandra Essex: S'il y a de la violence familiale...

M. Pierre de Savoye: Disons qu'un policier doit se rendre dans un foyer où il y a une situation de violence familiale. Disons qu'il y a une arme dans la maison. Il dirait: «Donnez-moi l'arme, sans discuter. Donnez-moi d'abord l'arme, et nous discuterons ensuite.»

Mme Sandra Essex: Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question. À mon avis, s'il y a de la violence dans un foyer, on peut supposer que, le cycle de la violence étant ce qu'il est, les choses vont s'aggraver d'un incident à l'autre. Je crains que si l'arme n'est pas retirée du foyer, la femme ne risque sa vie à un moment donné. Il faudrait donc que les pouvoirs nécessaires soient prévus afin que cela puisse être fait. Je ne peux pas répondre à votre question, excusez-moi.

M. Pierre de Savoye: Merci, madame, et merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay, cinq minutes.

M. Peter MacKay: Madame Essex, madame MacLeod, je tiens à vous féliciter toutes les deux pour le travail remarquable que vous faites au sein de votre organisation. Je pense que vous avez bien expliqué l'incidence marquée que vous avez dans la vie des femmes au Canada.

Comme vous le savez, nous discutons ici d'éventuelles mesures de prévention. Les questions que je vais vous poser sont dans la même veine que celles de mon collègue. Ces règlements sur l'enregistrement ne vont pas donner à un policier la possibilité de se rendre sur les lieux d'un incident et d'exiger immédiatement que les armes à feu qui s'y trouvent soient confisquées, peu importe que cela soit souhaitable ou non. Une fois que la personne violente a quitté son foyer, si elle est amenée à se présenter devant un juge de paix ou un juge de la cour provinciale, le policier a alors la possibilité de demander qu'une ordonnance de saisie de l'arme à feu soit rendue. Cela est prévu dans le Code criminel. Mais pour ce qui est de toute intervention immédiate, je pense qu'on a bien dit qu'on n'allait pas par le truchement de ce règlement sur l'enregistrement des armes donner au policier le pouvoir discrétionnaire dont il aurait besoin à cette fin.

Vous avez parlé de l'aspect sécuritaire et du fait que les situations violentes tendaient à s'envenimer, mais vous reconnaîtrez que ce n'est pas l'enregistrement des armes à feu qui va mettre fin aux actes commis sous l'impulsion du moment. Vous avez parlé des dispositions législatives déjà adoptées. Dans cette disposition-ci, il n'est pas question d'entraves tangibles et spécifiques pour empêcher l'utilisation d'une arme. Dans le projet de loi C-17, on prévoyait des verrous d'armes, l'obligation de garder les armes dans un endroit distinct de l'entrepôt de munitions, et on exigeait que les carabines soient rangées dans un endroit sécuritaire et fermé à clé. Voilà donc toute une gamme de mesures qui pourraient, dans le feu du moment, permettre à une personne de retrouver son sang-froid, car il lui faudrait progressivement charger son arme et la préparer. Encore une fois, ce n'est pas grâce au règlement sur l'enregistrement que l'on obtient cela.

J'ai encore du mal à concevoir comment vous pensez que l'enregistrement lui-même pourrait constituer une mesure proactive ou préventive. Les armes à feu, et j'en conviens avec vous, constituent un problème dans les situations de violence familiale, et ce n'est pas cela que je conteste. Je voudrais que vous m'expliquiez comment vous pensez que l'enregistrement peut constituer une mesure préventive en soi.

Mme Sandra Essex: L'enregistrement des armes à feu n'empêche pas la violence dans la famille, je le répète, et c'est ce que j'ai dit dans notre mémoire. La violence dans la famille provient du déséquilibre du pouvoir entre les hommes et les femmes. Elle est ancrée dans l'agressivité et la domination. Le contrôle des armes à feu ne va pas supprimer la violence dans la famille. Ce n'est qu'un élément qui va venir en aide.

L'enregistrement va permettre aux policiers de savoir s'il y a une arme sur les lieux. À cause de la nature progressive de la violence, il est particulièrement important que cette arme soit retirée des lieux. Comme je l'explique dans notre mémoire, les femmes retournent jusqu'à 30 fois au foyer. Elles retournent sans cesse vers des situations de violence. La présence même de l'arme à feu augmente les risques des blessures qu'elles peuvent subir. Elles risquent même leur vie. Il est très important que l'arme soit retirée, surtout dans le cas des femmes qui ne quittent pas le foyer, ou dans le cas de celles qui continuent d'y retourner. L'enregistrement est un outil à la disposition de la police permettant de confisquer cette arme. Voilà comment je conçois l'enregistrement du point de vue de l'intervention de la police dans les disputes familiales.

• 1740

Par ailleurs, nous sommes aussi convaincues que la plupart des gens sont des citoyens respectueux de la loi. La plupart des gens vont enregistrer leurs armes. J'ai chez moi cinq armes à feu, et je vais les enregistrer. Le fait de le faire et d'inscrire mon nom va me responsabiliser un petit peu plus, et je vais m'assurer que ces armes sont sous clé, et non pas sous mon lit, de sorte que je respecte la loi. Je pense que la plupart des gens vont agir ainsi, car la plupart des gens sont des citoyens respectueux de la loi. La plupart des hommes qui font subir des sévices à leur épouse sont respectueux de la loi—excusez-moi, ils sont perçus comme tels. Ils sont loin d'être d'honnêtes citoyens, car ils enfreignent la loi chaque fois qu'ils font subir des sévices à leur femme.

Je pense que cette responsabilisation va sécuriser les femmes. Ainsi on évitera les situations où l'acte est commis sous l'impulsion du moment. S'il existe une arme à feu dans la maison et que l'homme doive la sortir de l'étui et la charger, cela permettra à la femme de disposer de quelques minutes supplémentaires pour s'enfuir. Ce sont des situations très explosives, très volatiles, qui donnent lieu à la violence familiale. Dans la plupart des cas, les actes violents ne sont pas prémédités. Ils sont commis impulsivement. Si une arme à feu est mise sous clé, étant donné que la loi exige qu'il en soit ainsi et que le nom de l'homme a été enregistré, la femme disposera d'un peu de temps pour s'enfuir.

M. Peter MacKay: Permettez-moi de mieux comprendre. Vous dites que l'enregistrement va intensifier le respect des dispositions législatives qui existent déjà, n'est-ce pas?

Mme Sandra Essex: Je pense que oui, tout à fait.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur MacKay.

Mme Gael MacLeod: Permettez-moi d'ajouter quelque chose.

Le vice-président (M. John Maloney): D'accord, allez-y.

Mme Gael MacLeod: Je peux vous citer une autre étude ici: sur 551 victimes féminines d'un partenaire intime qui les a tuées, 190, soit 33 p. 100, ont été tuées au moyen d'une arme à feu. Sur les 551 assassins de l'étude, 59 p. 100 avaient un casier judiciaire, 13 p. 100 avaient des antécédents de maladies psychiatriques soignées en milieu hospitalier, et 55 p. 100 étaient réputés avoir été violents auparavant à l'égard de leurs victimes. Grâce à l'enregistrement, on aura la possibilité de refuser à ces hommes le droit de posséder une arme à feu. Sans enregistrement, nous ne pouvons pas le faire.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci. Y a-t-il des questions du côté du parti ministériel? Non?

Monsieur Thompson, vous pouvez disposer d'une minute.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Juste une brève question, monsieur le président.

Je suis bien placé pour parler de la violence familiale, car j'en ai connu dans ma propre famille. C'est un fléau terrible. Je pense que nous ne faisons pas grand-chose au Canada pour sévir contre ceux qui sont responsables de la violence familiale. Les mesures qui devraient être prises ne le sont tout simplement pas.

Un soir, je me suis assis sur la banquette arrière d'une voiture de police. Nous nous sommes rendus dans neuf foyers où il y avait une dispute. Dans un cas, nous avons vu en entrant une arme à feu dans un coin. Elle a été immédiatement confisquée. Dans les autres cas, il n'y avait pas d'armes à feu, mais on a confisqué des couteaux. Une femme avait utilisé un couteau pour se défendre.

Dans chacun des cas les hommes ont été emmenés, et on leur a demandé s'ils avaient un endroit, chez un parent ou une connaissance par exemple, où ils pouvaient passer la nuit. On leur a dit de ne pas retourner chez eux. Ce genre de mesure ne sert à rien selon moi. Ces hommes avaient agressé leur femme. La preuve existait. Les femmes toutefois ne voulaient pas porter plainte, car elles craignaient des représailles éventuelles de la part de leur mari. Elles en étaient très conscientes.

Dans ce genre de situations, il faut réagir de toutes les manières possibles pour bien faire comprendre aux intéressés que nous ne tolérerons aucun comportement de ce genre et que nous ne tolérerons pas que nos femmes et nos enfants aient à souffrir des conséquences de ces gestes criminels. Il faut faire comprendre aux intéressés qu'ils devront assumer les conséquences très graves de leurs gestes, autrement dit qu'ils seront incarcérés. Cela signifie aussi qu'avant même que le détenu soit libéré et puisse éventuellement retrouver le même comportement auprès de ce conjoint, il doit être soumis à un programme de réadaptation qui coûtera évidemment très cher.

• 1745

Mais laissez-moi vous dire ce que je pense de ces neuf cas où le mari a été retiré du domicile. Il me semble qu'il serait beaucoup plus rentable de dépenser tout cet argent pour des programmes d'aide aux hommes, pour traiter la violence de ces derniers et pour qu'on s'occupe directement des situations de crise chez les intéressés, dans tous leurs aspects; cela serait beaucoup plus rentable si nous disions clairement et franchement que le mari ne retournera jamais au foyer tant que nous ne serons pas convaincus dans la mesure du possible qu'il ne commettra pas à nouveau son méfait. Il me semble que cela serait tout aussi efficace, sinon plus, que de dépenser tout cet argent à enregistrer les armes. Et croyez-moi: je suis veux aussi autant que vous que toute cette violence cesse.

M. Garry Breitkreuz: Exactement. Vous avez raison.

Mme Gael MacLeod: Merci de vos commentaires. J'ai aussi connu personnellement la violence familiale. Si je suis aujourd'hui bénévole auprès de la YWCA, et que je le suis depuis déjà un certain temps, c'est justement à cause de mon expérience personnelle. Toutefois, je n'ai pas l'impression que les deux choses que l'on propose s'excluent mutuellement.

La YWCA de Calgary a mis sur pied plusieurs programmes de prévention, y compris des programmes destinés aux auteurs de mauvais traitements. Nous essayons d'élargir notre point de vue sur la violence familiale, puisqu'il s'agit d'un problème à l'échelle de la famille et qu'il faut faire face à tous les éléments qui en font partie et traiter tous les membres de la famille. En fait, nous avons même accepté de réduire le nombre de lits au refuge afin de pouvoir offrir certains de ces programmes, tout en nous étant assurées au préalable que le Calgary Women's Emergency Shelter avait augmenté pour sa part le nombre de ses lits. Par conséquent, il n'y a pas eu de perte nette de lits à Calgary.

Du côté des mesures préventives, dont on a tellement besoin pour faire en sorte que le problème ne se transforme pas en problème systémique dans la famille, on ne peut opter pour des programmes d'aide aux dépens des refuges pour les femmes ou aux dépens du nombre de lits, car, ce faisant, on risque de se retrouver avec plus de morts sur les bras, ce qui ne vaut pas mieux non plus.

M. Myron Thompson: Puis-je préciser que je n'ai jamais dit que les deux devaient s'exclure mutuellement? Ça, c'est essentiel.

Le vice-président (M. John Maloney): Je crains que nous ne devions arrêter ici, monsieur Thompson.

Mme Gael MacLeod: Je serai brève.

M. Myron Thompson: Mais la loi vous permet maintenant de saisir les armes.

Mme Gael MacLeod: Mon expérience remonte à un certain temps, tout comme la vôtre sans doute aussi. Dans mon cas, la personne violente se trouvait être mon beau-père. Comme il y avait présence d'une arme à feu, la police a réagi. En effet, dès que j'ai eu appelé pour informer la police de la présence d'une arme à feu, la police est intervenue rapidement, mais sans pour autant confisquer l'arme.

M. Myron Thompson: Elle aurait dû le faire.

Mme Gael MacLeod: D'accord, mais l'attitude de la police n'était pas la même à l'époque.

M. Myron Thompson: Mais l'enregistrement ne vous aurait en rien aidée. Il faut saisir l'arme.

Mme Gael MacLeod: Aujourd'hui, on fait le lien avec...

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Thompson...

M. Myron Thompson: D'accord, je vais me taire, puisqu'on me l'ordonne.

Mme Sandra Essex: J'ai une question à poser.

Le vice-président (M. John Maloney): Un dernier commentaire, madame Essex, puisque nous devons passer à d'autres. Notre minute supplémentaire a quadruplé.

Mme Sandra Essex: Puis-je poser ma question?

Le vice-président (M. John Maloney): Faites-le brièvement.

Mme Sandra Essex: Monsieur Thompson, dans les neuf cas que vous avez signalés, vous dites qu'aucun ne mettait en cause une arme à feu. Comment le savez-vous?

M. Myron Thompson: Non, je n'ai pas dit...

Mme Sandra Essex: Comment savez-vous que...

M. Myron Thompson: Voulez-vous que la conversation se poursuive?

Mme Sandra Essex: Puisqu'on n'exigeait pas l'enregistrement, comment pouvez-vous affirmer qu'il n'y avait pas d'arme à feu?

M. Myron Thompson: Il y en avait une, qui a été immédiatement confisquée...

Mme Sandra Essex: D'accord, puis vous avez dit...

M. Myron Thompson: ... et la police a immédiatement fouillé les lieux pour voir s'il ne s'y trouvait pas d'autres armes. Elle était disposée à les saisir, mais la difficulté vient de ce qu'elle a emmené les hommes, mais n'a porté aucune accusation.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Thompson.

Monsieur de Savoye, vous avez une minute pour poser votre question et entendre la réponse.

M. Pierre de Savoye: Je crois que M. Thompson m'a volé ma minute.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay.

M. Peter MacKay: J'aimerais revenir là où nous en sommes restés et ajouter quelque chose. Je ne vois pas en quoi cette disposition pourrait aider la police qui doit saisir une arme au domicile. La police peut bien désormais savoir qu'il s'y trouve une arme à feu, mais—pour reprendre l'exemple de M. Thompson—si elle ne fait rien pour confisquer l'arme ou si elle choisit plutôt de retirer la personne violente du domicile et de la remettre entre les mains d'un frère ou de quelqu'un d'autre, cela ne fait strictement rien.

Quant à ceux qui ont des dossiers psychiatriques ou d'autres types de dossiers—j'imagine que vous parlez de casiers judiciaires pour utilisation d'armes—un juge peut aujourd'hui interdire à l'intéressé d'avoir en sa possession une arme à feu ou une autre arme pour plusieurs années.

Ce que j'essaie de faire comprendre, c'est que ceux qui souffrent de troubles psychiatriques ou qui ont un casier judiciaire et savent pertinemment qu'ils ne sont pas censés être en possession d'une arme à feu ne changeront sans doute rien à leur comportement du simple fait que cette loi aura été adoptée.

Mme Sandra Essex: Mais ce ne sont pas uniquement ceux qui possèdent des armes à feu qui agressent les femmes.

M. Peter MacKay: Non, vous l'avez dit.

Mme Sandra Essex: En effet.

M. Peter MacKay: Mais aux yeux de la société et de l'appareil de justice pénale, ils ne sont pas considérés dans bien des cas comme des criminels. Autrement dit, ils pourront toujours mettre la main sur une arme, malgré le système d'enregistrement. L'enregistrement ne les empêchera nullement d'obtenir une arme enregistrée et un permis en toute légalité.

• 1750

Ces gens ne seront nullement embêtés par la réglementation. S'ils possèdent à domicile une arme et qu'ils leur arrivent à nouveau une situation de crise, le simple fait de savoir que leur arme est enregistrée ne les empêchera aucunement d'agir.

Mme Sandra Essex: Les empêcher de l'utiliser? Non, vous avez sans doute raison; toutefois, lorsque la police répondra à l'appel à l'aide, elle saura qu'il se trouve là-bas une arme, ce qui lui permettra de la confisquer. C'est cela que je veux vous faire comprendre.

Il y a beaucoup plus de risques qu'une femme meure d'un coup de feu chez elle que d'avoir été battue ou d'avoir été poignardée. L'arme à feu n'est certainement pas la seule arme utilisée pour tuer des femmes, mais c'est sans doute la plus meurtrière.

Il est donc essentiel que l'on retire cette arme du domicile le plus rapidement possible. Or, pour ce faire, la police doit être au courant de l'existence de cette arme, et elle sera au courant dès que l'arme aura été enregistrée. La police ne peut évidemment pas s'attendre à ce que le mari l'informe de la présence d'une arme à feu, et ne peut s'attendre non plus à ce que la femme violentée l'informe de cette présence, car elle n'en sait peut-être rien; ou même si elle en connaît l'existence, elle ne voudra peut-être pas l'admettre. Voilà pourquoi l'enregistrement est pour nous à ce point important.

M. Peter MacKay: Mais le seul moyen de leur enlever...

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay, je crois que je devrai vous interrompre.

M. Peter MacKay: ... ces armes à feu, c'est de s'adresser à un tribunal.

Le vice-président (M. John Maloney): Y a-t-il quelqu'un ici du gouvernement?

Mme Sandra Essex: Je pense que non.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci beaucoup. Nous avons pris un peu de retard. C'est donc pour cela que j'interromps les gens.

Merci beaucoup. Merci d'être venues témoigner aujourd'hui.

Nous allons faire une pause de deux minutes.

• 1752




• 1755

Le vice-président (M. John Maloney): Nous reprenons nos délibérations. Notre témoin suivant est Richard Feltoe, de la British North America Living History Association.

C'est un plaisir de vous revoir, monsieur Feltoe.

M. Richard Feltoe (coordonnateur, British North America Living History Association): Bonjour, mesdames et messieurs.

Me voilà de retour. Certains d'entre vous me connaissent déjà, et ont entendu nos arguments. À la dernière séance, j'espérais que les recommandations qui ont découlé des travaux du comité allaient suffire. J'avais l'impression que tout avait très bien fonctionné. Mais malheureusement certaines choses ont changé, et je dois comparaître encore une fois devant le comité.

Certains d'entre eux vous sont nouveaux et ne nous ont jamais rencontrés. Je fais partie d'une association de bénévoles qui travaillent sur des sites historiques pour présenter des éléments de l'histoire vivante de notre nation. Au lieu de contempler un bâtiment historique ou de voir une exposition, etc., vous voyez des gens qui vivent et expliquent la vie et l'histoire de notre patrimoine canadien.

Notre groupe fait revivre la Guerre de 1812. Je représente une unité de la milice canadienne.

Mon collègue est ici pour m'aider à parler du problème d'armement qui nous confronte. Il participe à l'histoire de la Guerre civile américaine. Il y avait un élément canadien assez important des deux côtés du conflit.

Pour ce qui est de la situation, en février 1997 le Comité des questions juridiques a fortement recommandé au ministre de la Justice que les reproductions d'armes à feu historiques soient exemptées des règlements proposés en vertu du projet de loi C-68. Je cite l'annexe de notre mémoire:

    Le sous-comité recommande que les reproductions d'armes à feu historiques, par exemple les armes à silex, les armes à mèche et les armes à rouet, soient considérées comme des armes à feu historiques au sens de l'alinéa 84(1)b) du Code criminel.

En d'autres mots, les reproductions seraient classées dans la même catégorie que les armes originales. C'est ce qu'on voulait, et nous étions très heureux de recevoir cette recommandation.

Plus tard, en avril 1997, le ministre de la Justice, Allan Rock, a accepté cette recommandation sans modification et sans restriction. En mai, j'ai reçu une lettre du ministre de la Justice; je cite:

    Je reconnais que votre groupe joue un rôle vital en aidant les Canadiens à comprendre leur histoire et leur culture. Une des recommandations les plus importantes du rapport porte sur les reproductions d'armes à feu utilisées dans les reconstitutions historiques. J'accepte cette recommandation avec plaisir.

Il n'a pas dit qu'il acceptait certaines parties de la recommandation, ou qu'il l'acceptait sous certaines réserves. Il a dit qu'il acceptait la recommandation avec plaisir.

Je me suis inquiété un peu quand j'ai vu la recommandation. Je n'y ai pas vu les mots «capsule fulminante». La capsule fulminante entre aussi dans la catégorie des armes antérieures à 1898, et n'est pas une arme à percussion centrale ou à percussion annulaire, comme l'indiquait le Code criminel original. J'ai parlé à des membres de l'ancien comité, qui m'ont assuré que les termes «arme à silex», «arme à mèche», et «arme à rouet» n'étaient que des exemples. Donc, les capsules fulminantes et toutes les armes à feu antérieures à 1898 visées par les désignations pourraient être incluses. Ils nous ont dit qu'il ne fallait pas s'inquiéter. Je n'ai donc pas insisté.

Puis j'ai vu le document préparé par les fonctionnaires du gouvernement. La recommandation 36 disait:

    Le sous-comité recommande que les reproductions d'armes à feu historiques, par exemple les armes à silex, les armes à mèche et les armes à rouet, soient considérées comme des armes à feu historiques.

mais dans le document des fonctionnaires nous lisons:

    Le gouvernement accepte cette recommandation. Les reproductions d'armes à silex, d'armes à mèche et d'armes à rouet seront considérées comme des armes à feu historiques.

J'ai appelé le ministère de la Justice pour attirer son attention sur cette différence de terminologie. Ils ont dit: oui, c'est ça. J'ai demandé si la capsule fulminante était incluse, et ils ont dit non. Quand j'ai demandé pourquoi, ils ont répondu qu'ils avaient simplement décidé que ce n'était pas inclus.

• 1800

Voilà donc la situation. Ce qui nous inquiète, c'est que les bureaucrates du ministère de la Justice ont décidé—sans nous consulter en tant que parties intéressées, et sans consulter le Comité de la justice—de réexaminer quelles reproductions historiques seraient comprises dans l'exemption. Notamment, ils ont enlevé les armes à capsule fulminante de l'exemption.

Cela menace la viabilité continue des reconstitutions historiques du XIXe siècle. Cela affectera des milliers de Canadiens et d'Américains quand ils pratiqueront leur passe-temps légitime. De plus, cela va forcer des groupes à annuler des reconstitutions historiques au Canada. Les sites historiques et les musées qui présentent ces reconstitutions pourront voir leur revenu baisser, et recevront sans doute moins de visiteurs.

Permettez-moi de vous présenter un petit scénario. Ici vous voyez une arme à silex originale, qui est couverte, et une reproduction, qui sera couverte une fois que l'exemption aura été adoptée. Nous avons aussi un modèle légèrement plus avancé de la capsule fulminante, qui a été utilisé pendant la Guerre civile américaine et à d'autres périodes de l'histoire canadienne de la même époque.

On ne peut pas tirer plus rapidement avec celle-ci qu'avec les autres. La vitesse de tir est à peu près la même pour toutes ces armes. Mais la capsule fulminante ne sera plus comprise dans la liste. Chacune a un canon dont le calibre a plus d'un demi-pouce. La balle, c'est une boule en plomb d'à peu près la grosseur du bout de votre pouce. Mais ces munitions ne sont pas disponibles au Canada. Malheureusement, en vertu d'un règlement, toute arme dépassant le calibre de 0,50, un demi-pouce, est considérée comme une arme antichar.

Imaginez-vous ce qui va se produire aux douanes si ces armes, ces capsules fulminantes, sont éliminées de l'exemption. L'agent des douanes contrôle la voiture. Le conducteur explique qu'il a une arme à feu qui sera utilisée dans une reconstitution historique. L'agent des douanes entre les données dans l'ordinateur, puis l'alarme sonne. Pourquoi? Parce que le conducteur essaye d'apporter une arme antichar au Canada.

Et cela n'arrivera pas seulement à une personne, mais à des centaines. Ce sera ridicule. Mais c'est ainsi qu'on a rédigé les règlements, et c'est ainsi qu'ils seront compris. Ceci, croyez-le ou non, est une arme antichar. Voilà comment elle est perçue.

Quelqu'un m'a demandé pourquoi le ministère de la Justice a apporté ce changement. On m'a répondu que c'est parce que les gens utilisent ces armes pour la chasse.

Mais il y a une chose importante qu'ils n'ont pas comprise: il y a différentes sortes de capsules fulminantes, et celles qui sont utilisées pour la chasse ne sont pas celles de la bonne période, et elles ne seraient pas utilisées dans les reconstitutions historiques. Dans une reconstitution historique, personne ne pourrait se promener avec une arme à capsule fulminante qui est utilisée pour la chasse. On retirerait immédiatement la personne de la scène. Les armes que nous utilisons sont des armes militaires. Elles ne sont pas conçues pour la chasse.

Donc, pourquoi ne pas diviser cette catégorie? D'après le ministère de la Justice, une capsule fulminante, c'est une capsule fulminante. Elles sont toutes les mêmes. Cela nous inquiète un peu.

Alors, que demandons-nous? Est-ce que nous demandons une nouvelle catégorisation d'action et une nouvelle version de plus? Non. Est-ce que nous voulons une prolongation? Non. Nous demandons simplement au comité de soumettre une recommandation au ministre de la Justice pour confirmer une recommandation faite par le comité précédent. Il faudrait revenir à l'exemption, à la dispense, qui avait été prévue au départ. Insistez auprès du ministre de la Justice pour qu'il applique cette dispense par décret du conseil, et cela le plus tôt possible.

Mesdames et messieurs, il y a des dizaines de projets dans tout le pays qui dépendent de la décision de ce comité. Pour que ces projets se réalisent, pour que ces musées puissent les mener à bien, il faut absolument que cette dispense soit accordée dès maintenant par décret du conseil. Tous ces programmes sont déjà en cours de préparation. Nous en avons besoin. Je vous le demande instamment.

• 1805

Cela étant dit, cela ne règle pas la question assez épineuse de ces capsules fulminantes. Idéalement, si la dispense s'appliquait exactement comme l'énoncé d'origine le prévoyait, ce serait très bien, mais nous ne voulons pas mettre des bâtons dans les roues pour le plaisir. Nous sommes tout à fait disposés à essayer d'aider le ministère de la Justice à obtenir ce qui lui semble nécessaire.

Comment pouvons-nous le faire? En disant que l'arme à silex et l'arme à mèche peuvent être regroupées sous une même désignation, mais que nous acceptons volontiers de voir la capsule fulminante séparée en deux catégories différentes, et les armes du groupe à capsule fulminante dont on a besoin pour les reconstitutions historiques militaires, désignées individuellement, exactement comme cela se fait avec le décret du conseil moderne.

La question demeure: de combien de pièces avons-nous besoin? La réponse est deux. Deux fusils à canon rayé, à capsule fulminante et à chargement par la bouche; c'est tout ce dont nous avons besoin pour couvrir 99 p. 100 des reconstitutions historiques. Il s'agit des armes Enfield et Springfield. Le ministère de la Justice n'a qu'à le demander, et on pourra lui fournir immédiatement une désignation exacte de ces armes.

Nous n'avons pas besoin qu'on désigne chaque capsule fulminante, jusqu'à la dernière, si c'est là le problème. Donnez-nous-en deux, et nous serons des campeurs satisfaits.

M. Andrew Phillips (Ottawa Valley American Civil War Society): Satisfaits de leur reconstitution historique.

M. Richard Feltoe: Nous faisons aussi du camping.

Je vous remercie de nous avoir écoutés. Je sais que c'est un sujet dont vous n'avez pas beaucoup entendu parler, mais cela nous touche directement, malheureusement, et cela touche aussi tous les musées et tous les sites patrimoniaux qui font des expositions et qui préservent notre patrimoine.

Mesdames et messieurs, je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Breitkreuz, vous avez cinq minutes.

M. Garry Breitkreuz: Merci beaucoup.

J'ai beaucoup apprécié votre exposé. Vous avez très bien expliqué votre position. Je me permets de vous contredire quand vous dites que le comité a le pouvoir d'adopter cela. Ce n'est pas le cas. Je vais devoir me contenter de recommander à ceux qui ont ce pouvoir de tenir compte de ce que vous avez dit.

Je n'ai pas de questions.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Breitkreuz. Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Monsieur le président, si c'est une arme historique, antique, je dois dire que je ne savais pas que notre matériel militaire était à ce point antique.

Des voix: Oh, oh!

[Français]

M. Pierre de Savoye: Monsieur Feltoe, c'est toujours un plaisir de vous voir ici, parce que vous mettez beaucoup de vie dans vos présentations et que vous les illustrez tellement bien qu'on les comprend mieux.

Je reviens à la recommandation 36 que le Comité permanent de la justice avait faite pendant la précédente législature. Vous avez tout à fait raison: nous donnions des exemples et la liste n'était pas exhaustive. Je suis surpris que le ministère de la Justice n'ait pas donné les suites appropriées.

Monsieur le président, avons-nous ici quelqu'un du ministère de la Justice qui pourrait nous éclairer?

[Traduction]

Le vice-président (M. John Maloney): Bill, est-ce que vous pouvez répondre, si le comité le veut bien?

Allez-y.

M. William C. Bartlett (conseiller juridique, Centre canadien des armes à feu, ministère de la Justice): Je ne sais pas si je pourrai vous donner une réponse complète. Nous tenons nos informations du principal spécialiste des armes à feu de la GRC. Il nous a dit qu'en matière de technologie des capsules fulminantes il était tout simplement trop difficile de les différencier. En effet, les gens qui les fabriquent pour la chasse n'auraient aucun mal, apparemment, à leur donner exactement l'apparence des modèles dont M. Feltoe a parlé, les Enfield et l'autre. Le problème, c'est probablement que les agents des douanes, ou n'importe qui d'autre, auraient beaucoup de mal à voir la différence.

• 1810

On nous dit qu'il n'y a pas de démarcation claire entre les diverses technologies de capsules fulminantes, et qu'il n'est pas possible de les séparer en catégories bien distinctes. Cela peut être évident et clair pour M. Feltoe, mais cela risque d'être très difficile pour tous ceux qui sont chargés d'appliquer ces dispositions et de les faire respecter.

J'ajoute qu'aux termes de la Loi sur les armes à feu les armes supérieures au calibre 0.50 ne sont pas définies comme des armes antichar. M. Feltoe pense peut-être à la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. Il est fort possible que dans cette loi les armes d'un calibre supérieur à 0.50 qui figurent dans la liste des armes contrôlées soient considérées comme des armes antichar, mais ce n'est pas le cas dans la Loi sur les armes à feu.

M. Pierre de Savoye: Mais vous comprenez mon argument. Voici une situation dont une industrie bien précise risque de souffrir. En effet, il s'agit d'une industrie, et d'une industrie qui ne pose vraiment pas un danger pour la société.

Je vous demande donc en quoi consiste la solution. Nous devons trouver une solution. L'opinion de la GRC est très intéressante. Ce que je cherche, c'est une solution. Est-ce que nous allons en trouver une d'ici peu, ou faudra-t-il légiférer encore? Quel est le moyen le plus simple d'y parvenir?

M. William Bartlett: En ce qui concerne une solution pratique, je peux seulement contacter à nouveau nos experts de la GRC. D'ailleurs, ce n'est pas seulement une préoccupation pour la GRC. Leurs spécialistes nous donnent des indications, et c'est sur cette base que nous avons départagé. Depuis le début, on essaie de trouver une ligne de démarcation praticable, quelque chose qui permette d'identifier...

M. Pierre de Savoye: J'ai le plus grand respect pour la GRC, mais nous avons ici des témoins experts qui doivent s'y connaître beaucoup plus que la GRC, et peut-être que le ministère de la Justice pourrait leur faire confiance un peu plus qu'à la GRC, lorsque cela se justifie. Il vaut mieux choisir la meilleure source d'information possible.

M. Feltoe a peut-être quelque chose à ajouter.

M. Richard Feltoe: Monsieur, je vous ferai observer que n'importe quelle arme moderne prohibée par décret du conseil est très clairement identifiée et désignée par des photographies, des spécifications, des dimensions, etc., si bien qu'un agent qui cherche à déterminer si une arme est prohibée ou pas peut le faire facilement sans faire appel à un expert en la matière.

Si vous prenez cet argument à l'inverse, il doit être possible d'utiliser toutes ces descriptions pour identifier un article sous dispense, et toute arme qui n'est pas conforme à ces critères, à ces dessins, etc., n'a pas de dispense. Il est facile de conclure que ce n'est pas le même type d'arme, qu'il n'est pas composé des mêmes éléments, et par conséquent il n'y a pas de dispense.

Toute reproduction historique d'une arme qui utilise cette technologie comporte automatiquement toutes les restrictions de l'original en matière de chargement, de déchargement et de munitions. Si l'arme n'est pas conforme aux spécifications de l'original, il ne s'agit pas d'une reproduction aux termes de la définition d'une reproduction. Voilà donc ma réponse.

Nous nous ferons un plaisir de vous fournir des détails techniques, des dessins et des spécifications de fabricants d'armes, toute la documentation dont les responsables gouvernementaux pourraient avoir besoin pour accomplir leur travail en toute connaissance de cause, et pour s'assurer qu'une dispense est accordée uniquement aux pièces qui jouissent d'une dispense.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur Feltoe.

Monsieur MacKay.

M. Peter MacKay: Je reviens sur cet aspect, et sur l'excellente observation de mon collègue du Bloc. Je suis certain que les gens de la GRC ne sont pas les seuls experts en la matière.

En ce qui concerne les armes à capsule fulminante, j'ai entendu deux versions contradictoires de la distinction qui pouvait être faite. M. Feltoe pourrait peut-être nous expliquer la différence de désignation entre le type d'armes qu'ils utilisent pour les reconstitutions historiques et les armes qu'un chasseur pourrait utiliser. De toute façon, je crois comprendre qu'on utilise très rarement une arme à capsule fulminante pour la chasse.

• 1815

M. Richard Feltoe: Pas tout à fait. Quand vous parlez de: «capsule fulminante» il s'agit d'un chien qui vient frapper une cheminée, ce qui a pour effet de faire exploser une petite cartouche placée sur celle-ci. Dans l'ensemble, dans les armes utilisées par les chasseurs, l'impact se fait en ligne droite à l'intérieur du canon. Les pièces dont nous parlons sont toutes à l'extérieur. Ainsi, la capsule est à l'extérieur et le chien sur le côté.

Ce qui s'est produit au début, c'est qu'on a pris l'ancienne platine à silex, on a scié ce morceau-là, on l'a soudé sur une buse, et on a décidé que c'était une nouvelle version. Tout le reste est resté identique.

M. Peter MacKay: Si bien que le chien n'est pas aligné sur le canon?

M. Richard Feltoe: Exactement. Ce sont des mécanismes aussi primitifs que ceux des anciennes armes à silex.

Comme je l'ai dit, nous pouvons spécifier qu'il s'agit de deux armes différentes, mais cela suffit à couvrir 99 p. 100 des armes utilisées pour les reconstitutions historiques.

Que n'importe qui d'autre essaie d'utiliser ce genre de capsule fulminante, il devra l'enregistrer, simplement parce que les spécifications seront différentes de celles de ces deux armes.

M. Peter MacKay: Vous nous avez expliqué cela avec beaucoup d'éloquence en 30 secondes; vous nous avez dit également qu'il était possible de fournir des photographies ou des dessins d'armes prohibées ou à autorisation restreinte.

Je pose la même question que vous: où se trouve le problème? De plus, pourquoi le ministère de la Justice a-t-il refusé de vous accorder ce que vous demandiez? Vous avez parlé du précédent ministre; quel contact avez-vous eu avec le ministère depuis le changement de gouvernement?

M. Richard Feltoe: Lorsque nous avons pris connaissance de cette préoccupation, nous avons commencé à nous consulter mutuellement sur ce qu'il fallait faire. Et puis, jeudi dernier, un ange a dû s'intéresser à notre cas, car j'ai reçu un coup de téléphone pour m'inviter à comparaître devant le comité. J'ai répondu: très bien. Je n'aurais certainement pas raté cette occasion de porter la discussion à un niveau plus éminent.

Mme Shaughnessy Cohen: Vous trouvez que nous sommes à un niveau éminent?

M. Richard Feltoe: Si je considère votre réaction, certainement, vous êtes une confrérie très éminente. Je peux vous assurer que j'apprécierai beaucoup l'aide que vous pourrez nous donner.

M. Derek Lee: Pouvez-vous nous donner un exemple de reconstitution historique qui pourrait ne pas avoir lieu à cause de ces règlements sur les capsules fulminantes des Enfield et des Springfield?

M. Richard Feltoe: Certainement. Je vais demander à mon collègue, M. Phillips, de vous donner un exemple local.

M. Andrew Phillips: Il y a deux ans, nous avons commencé à organiser une petite manifestation historique, ici même. Une année, nous l'avons fait au musée Swords and Ploughshares, un musée privé. Nous reprenons cette activité chaque année lorsqu'ils organisent des journées portes ouvertes. Nous le faisons pour les aider à recueillir des fonds.

L'année passée, nous l'avons fait à la Vieille Ferme, et CJOH et CHRO ont couvert cela de façon exhaustive.

Nous venons d'avoir notre souper de fin d'année au Old Fort Henry. Au Canada, on peut louer un fort, ce qui est vraiment très bien. Ce fort existe; il faut absolument l'utiliser.

Nous avons des gens qui sont venus de l'Ohio, et d'autres de Boston, au Massachusetts, qui ont l'intention de venir à notre prochaine manifestation, car nous allons assister aux leurs. Ils ne sont encore jamais venus.

Il y a une famille, les Nathan, qui vivent à Boston même. Ils ont confirmé qu'ils venaient l'année prochaine. Lorsqu'ils viennent, ils prennent deux semaines de vacances, et ils passent tout ce temps dans l'est de l'Ontario. Ils mangent au restaurant, vivent à l'hôtel, voyagent, visitent les endroits touristiques, bref, ils dépensent de l'argent. S'ils viennent ici, c'est que cela leur plaît beaucoup.

Tout l'argent recueilli au guichet est réinvesti dans la Vieille Ferme. Nous ne sommes absolument pas payés pour ce que nous faisons, mais nous continuons tout de même.

L'emplacement est excellent. Ce sont tous des immeubles d'époque. Ceux qui font la reconstitution l'adorent. Ils ont hâte de revenir. La Vielle Ferme en rondins reçoit tous les fonds. Qui plus est, nous essayons d'obtenir des dons pour les banques d'alimentation. Nous sommes donc gagnants sur tous les plans.

M. Richard Feltoe: Mais si le projet va de l'avant, que vont dire ces Américains?

M. Andrew Phillips: Ils diront qu'ils aimeraient beaucoup venir, mais pas s'ils doivent payer 60 $ un permis de deux jours. Thomas vient accompagné de ses trois fils. Il y a quatre mousquets. Cela fait 240 $ pour venir passer trois jours de l'autre côté de la frontière. Ils utilisent tous le Enfield 1853 ou de Springfield 1861, qui sont très faciles à reconnaître et très différents des autres armes.

• 1820

M. Derek Lee: Excusez-moi, mais je ne suis vraiment pas un expert en reconstitution historique militaire. Peut-on supposer qu'il existe un grand nombre d'armes à capsule fulminante au Canada, mais qu'il y en a encore plus dans les États américains du Nord qui sont utilisées à cette fin? Est-ce exact?

M. Richard Feltoe: Oui, c'est exact.

M. Derek Lee: Pourriez-vous me préciser une chose? Ma question va sans doute vous paraître stupide, mais pourquoi n'utilise-t-on pas simplement des fusils à silex ou à mèche pour les reconstitutions militaires?

M. Richard Feltoe: C'est parce que nous essayons dans la mesure du possible de reproduire ce qui se passait à cette époque précise. Si, par exemple, je voulais représenter les premiers colons en Acadie, j'utiliserais un pistolet à rouet ou un fusil à mèche. Je n'utiliserais jamais un fusil à silex, pour la simple raison qu'il n'existait pas à l'époque.

De même, bien qu'on ait utilisé certains fusils à silex au tout début de la guerre civile, par exemple, ces derniers avaient complètement disparu à la fin de cette période.

Personne qui participe à un événement de 1812 n'a le droit d'utiliser un fusil à capsule fulminante, pour la simple raison que cela ne correspond pas à l'époque.

Si on veut faire une reconstitution historique vivante, il faut utiliser le matériel qui existait à l'époque. Cela se passait à l'époque de la guerre civile, dans les années 1860. Au Canada, des unités de la milice canadienne étaient constituées, comme les Chedabucto Grays et autres. C'est ce qui leur était fourni, et c'est ce qu'ils devraient porter et utiliser lors des spectacles.

M. Derek Lee: Enfin, pourriez-vous nous proposer une définition technique?

M. Richard Feltoe: Je pourrais le faire si vous me donniez 24 à 48 heures.

M. Derek Lee: Il serait utile à la greffière de l'avoir sous la main, au cas où les membres du comité souhaiteraient en faire mention plus tard. Cela n'a pas besoin d'être entièrement précis.

M. Richard Feltoe: Ce que j'utilise, c'est le manuel de Parcs Canada sur les différences entre les armes à silex et à capsule fulminante. Je ne l'ai malheureusement pas sous la main, mais je pourrais le leur télécopier.

Mme Shaughnessy Cohen: Nous pouvons l'obtenir directement.

M. Derek Lee: Si cela vient du gouvernement, nous devrions pouvoir l'obtenir.

M. Richard Feltoe: Parcs Canada a publié tout un manuel sur l'entretien des pièces.

M. Derek Lee: Je vous remercie.

Mme Shaughnessy Cohen: J'ai une question à poser, sinon ma voisine, Susan Whelan, ne me pardonnera jamais.

Fort Malden se trouve dans le comté d'Essex, juste à côté de Windsor. Il y a continuellement à Amherstburg des reconstitutions historiques. Pouvez-vous me dire si ces gens-là seront touchés par cette mesure? Utilisent-ils le même genre d'armes?

M. Richard Feltoe: À Fort Malden, on utilise des armes à percussion. Nous parlons aussi de la plupart des sites du centre du Canada.

Il ne faut pas oublier que même si je participe aux reconstitutions historiques de l'Ontario de 1812, cette région du pays n'était pas bien colonisée, en fait. Il a fallu attendre plus tard, à l'époque où ces armes étaient à la mode, pour que cette région du pays soit colonisée.

Tous les musées situés à l'ouest de l'Ontario vont automatiquement faire les frais de cette omission. On peut s'en tirer pour certains endroits en Ontario, au Québec et dans les Maritimes, mais pour les provinces de l'Ouest, ils sont fichus.

Mme Shaughnessy Cohen: Est-ce que ce sont de nouvelles armes qui sont fabriquées pour ressembler aux anciennes?

M. Richard Feltoe: Oui. Ce sont des reproductions.

Mme Shaughnessy Cohen: Merci.

Le vice-président (John Maloney): Merci à vous, monsieur Feltoe ainsi qu'à votre collègue. Nous vous savons gré de vos observations qui ont été très intéressantes. Merci.

Nous allons faire une pause de deux minutes et nous entendrons ensuite le dernier groupe de témoins.

• 1824




• 1827

Le vice-président (M. John Maloney): Nos derniers témoins de ce soir représentent Savage Arms (Canada) Inc. Nous avons parmi nous Ernie Barriage et Barrie King.

Bonsoir messieurs. Nous vous remercions d'être venus et nous nous excusons de vous avoir fait attendre. Allez-y, nous vous écoutons.

M. Barrie King (vice-président et directeur général, Savage Arms (Canada) Inc.): Nous vous remercions, membres du comité, de nous avoir invités à comparaître devant vous. Notre entreprise est située à Lakefield, en Ontario. Je suis accompagné aujourd'hui de Ernie Barriage, notre directeur national des ventes.

Je ne sais pas si notre intervention servira à quelque chose car nous avons eu trop peu de temps pour préparer un mémoire détaillé et approfondi à présenter à votre comité. Toutefois, nous sommes ici et nous ferons tout notre possible pour vous aider.

J'ajoute que, avant le 3 mars 1997, je ne m'occupais pas d'armes à feu. Je n'étais même pas titulaire d'un CAAF à l'époque. Mon prédécesseur, Al Taylor, respectait la loi en vigueur et celle qui la précédait. Je suppose que je devrais appeler la mesure à l'étude un projet de loi. Al a pris sa retraite à la fin du mois de mars 1997.

Nous sommes le seul fabricant au Canada de carabines longues de calibre 22. Nous fabriquons les armes de ce calibre et uniquement de ce calibre pour les amateurs d'armes sportives dans le monde entier.

Notre société-mère est la Savage Sports Corporation, située au 100 Springdale Road à Westfield, au Massachusetts, aux États-Unis. Comme nous, elle fabrique des carabines longues. La société-mère américaine fabrique également des carabines à percussion centrale, des armes de calibre plus élevé, alors que nous ne fabriquons que des carabines à percussion annulaire sportive.

Voici ce qui nous préoccupe. Nous sommes un fabricant d'armes et de ce fait, nous avons une activité interne qui nous permet d'être concurrentiels, de faire concurrence en vendant nos produits à des sociétés beaucoup plus grosses que la nôtre et d'être rentables. Toutefois, ce projet de loi risque de supprimer les avantages en matière de fabrication, fait que sont susceptibles d'utiliser nos concurrents. Nous ne savons pas—par exemple, les permis, l'enregistrement et les rapports de production quotidienne, les envois et/ou le travail en cours. À quelle réglementation en matière de permis nos employés devront-ils être assujettis? À l'heure actuelle, ils doivent détenir un certificat d'acquisition d'armes à feu; aux termes de la nouvelle loi, il existe cinq niveaux en matière de délivrance des permis. À notre avis, les fabricants devraient être au niveau deux, ce qui prévoit un contrôle des antécédents aux fins de sécurité.

• 1830

Notre deuxième préoccupation est liée à l'octroi des permis et licences d'exportation. Nous ne savons pas comment les choses se passeront. À l'heure actuelle, nous exportons 97 p. 100 de notre production. Tous les frais prévus dans la loi relativement aux exportations constituent des dépenses supplémentaires qui s'ajoutent à nos frais de fabrication et de distribution, ce qui gruge notre marge bénéficiaire et notre compétitivité sur les marchés d'exportation. Une fois ce projet de loi entré en vigueur, nous pensons que nos exportations compteront pour 99 p. 100 de nos activités commerciales. Que devrons-nous faire tous les jours, toutes les semaines, tous les mois, etc., pour nous conformer à la nouvelle loi? Nous n'en savons rien.

Les frais de permis de transport constituent notre troisième source d'inquiétude. Nous ne savons pas quels transporteurs, s'il y en a, seront intéressés par ce produit une fois que le projet de loi sera en vigueur. En fait, la nouvelle loi fixe des limites de sorte que certaines entreprises n'obtiendront pas l'approbation même si elles présentent une demande.

En résumé, nous employons 65 personnes dans une ville où il n'y a que deux entreprises, dont la nôtre. À l'heure où je vous parle, nous sommes en pleine expansion. C'est parce que, depuis un an, nous avons réussi à être concurrentiels sur les marchés d'exportation. Savage Canada veut être un fabricant responsable et faire preuve d'un esprit de collaboration, mais notre société veut aussi continuer de fabriquer ces produits au Canada.

Nous ne savons pas quelles répercussions cette loi aura dans les trois secteurs qui nous préoccupent et dont nous vous avons parlé aujourd'hui, même si nous sommes fermement convaincus que son incidence sera négative pour un fabricant. Je vous remercie.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur King.

Monsieur Breitkreuz, vous avez cinq minutes.

M. Garry Breitkreuz: Quels contacts avez-vous eu avec le ministère de la Justice et comment ce dernier a-t-il répondu à vos préoccupations? Quelle réponse avez-vous obtenu?

M. Barrie King: Depuis mars 1997, je n'ai communiqué avec personne au ministère de la Justice. Ernie était avec Al Taylor, qui a présenté des instances. Ernie, pouvez-vous ajouter quelque chose?

M. Ernie Barriage (directeur national des ventes, Savage Arms (Canada) Inc.): Nous n'avons pas communiqué dernièrement avec le ministère. Lorsque Al était encore là, lui et moi avons communiqué à quelques reprises avec des fonctionnaires en leur demandant à combien se monteraient les droits. À ce moment-là, ils nous ont dit qu'ils n'en savaient rien. Nous n'en savons pas plus aujourd'hui.

M. Garry Breitkreuz: La société Savage Arms a déjà soulevé ce problème lors d'audiences du comité. C'est pourquoi j'ai posé la question. Je pense que quelqu'un ici devrait pouvoir y répondre. Nous pourrons peut-être demander à nouveau à des fonctionnaires de venir nous en parler.

Vous avez dit que 97 p. 100 de votre production est destinée à l'exportation. Puis vous avez dit que vous alliez exporter 99 p. 100 de la production. Comment faites-vous vos calculs?

M. Barrie King: C'est à cause de la nécessité d'obtenir un CAAF. Sur le marché canadien—Ernie va pouvoir vérifier mes chiffres—en 1993-1994, par exemple, Canadian Tire aurait acheté entre 12 000 et 15 000 unités. Notre société à l'époque en aurait peut-être fabriqué 25 000. L'an dernier—notre exercice se termine le 31 octobre—Canadian Tire a acheté environ 1 300 unités.

M. Garry Breitkreuz: C'est moins de 10 p. 100.

M. Barrie King: Oui. Quelles que soient les répercussions qu'aura la nouvelle loi, je crois pouvoir dire que Canadian Tire cessera d'acheter notre produit. La société Home Hardware, qui n'était pas un aussi gros client que Canadian Tire, a également réduit ses commandes. Si elle nous achetait entre 4 000 et 5 000 unités auparavant, c'est tombé aujourd'hui à 300 ou 400 seulement.

M. Ernie Barriage: C'est ce qui nous permet de dire que nos exportations ont augmenté, car nos ventes au Canada vont diminuer progressivement.

M. Barrie King: Il ne restera guère de marchés intérieurs, voire aucun. En tout cas pas assez pour permettre à un fabricant d'être rentable, ça c'est certain.

M. Garry Breitkreuz: Nous avons posé les mêmes questions à maintes reprises et n'avons jamais obtenu de réponse quant à l'incidence que la nouvelle loi aura sur l'économie canadienne. Nous n'avons jamais obtenu de réponse. Cela ne concerne pas uniquement les ventes d'armes, bien entendu. Un responsable du ministère de la Justice pourra peut-être éclairer notre lanterne.

• 1835

Le vice-président (M. John Maloney): Très bien, Bill, si vous voulez répondre, soyez bref. Nous ne sommes pas ici pour faire votre procès mais pour obtenir de vous certains renseignements.

M. William Bartlett: Je dois dire que je suis un peu surpris d'entendre des personnes s'inquiéter des droits qui seront perçus à l'avenir car tous les droits étaient indiqués dans le règlement qui a été déposé en novembre dernier. Les droits s'appliquant aux transporteurs, aux autorisations d'importer et d'exporter, n'ont pas changé par rapport au barème déposé en novembre dernier.

M. Ernie Barriage: Quels sont ces droits?

M. William Bartlett: C'est 200 $ pour un transporteur interprovincial, et 250 $ la deuxième année; pour un transporteur international, c'est 300 $ et ensuite 375 $. Sauf erreur, certains transporteurs ont fait savoir qu'ils souhaitent devenir des transporteurs autorisés. Je n'ai pas le chiffre exact en main, mais il y a des transporteurs qui sont intéressés. Les droits pour obtenir l'autorisation d'importer et d'exporter s'élèvent à 20 $.

M. Barrie King: Par entrée?

M. William Bartlett: C'est 20 $ par autorisation et il y a un tarif global de 5 000 $ pour ceux qui ont besoin d'un grand nombre d'autorisations au cours d'une année donnée. Autrement dit, une fois que vous avez payé 250 autorisations, vous n'avez plus de droits à payer ensuite.

M. Barrie King: Puis-je demander pourquoi on perçoit des droits?

Mme Shaughnessy Cohen: J'invoque le Règlement. Je ne voudrais pas faire la mouche du coche, et je remercie Bill de ces renseignements, mais cela sort de la portée de notre étude, qui porte sur le règlement actuel et proposé. Étant donné que Bill suit nos délibérations depuis un certain temps et qu'il compte le faire pendant encore un certain temps, je suppose, je pense qu'il pourrait peut-être prendre ces messieurs à part pour leur expliquer ce que prévoyait l'ancien règlement, mais s'il y a des observations précises au sujet du nouveau règlement, j'avoue que la journée a été longue et que nous devrions peut-être en venir au fait.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, madame Cohen.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: J'ai eu le plaisir de siéger au sous-comité qui s'est occupé de la réglementation il y a environ un an et je me rappelle que la compagnie Savage, avec d'autres entreprises, était venue témoigner et avait parlé d'un certain nombre de difficultés que la loi et la réglementation lui ferait subir.

Je me souviens aussi que nous avions recommandé que des discussions soient tenues avec des porte-parole de l'industrie, pas nécessairement avec Savage ou une autre compagnie, mais avec des porte-parole de l'industrie. Je suis un peu désolé de voir aujourd'hui qu'il y a encore des irritants qui pourraient faire en sorte qu'une entreprise légitime, qui applique des normes de sécurité tout à fait appropriées, se retrouve dans une position d'affaires qui l'empêche d'envisager l'avenir avec un peu d'espoir. Ce n'était pas l'objectif de la loi et de la réglementation. Il y a encore quelque chose ici qui déraille. Je dis aux gens de Savage, comme je l'ai dit la dernière fois aux gens de l'industrie en général, que le comité va sans aucun doute faire les recommandations appropriées.

Ce qui m'inquiète, après avoir entendu nos amis des reconstitutions historiques, c'est de savoir si les recommandations que l'on fait, même si on nous dit qu'on les suit, ont véritablement les bonnes répercussions. J'ai envie de faire ce que j'ai fait avec M. Feltoe plus tôt, soit lui laisser ma carte d'affaires pour qu'il me tienne au courant de ce qui se passe. Pour ma part, je vous tiendrai aussi au courant. On fait du bon travail ici, et on le fait honnêtement et avec ferveur, mais s'il y a des oublis au niveau du ministère, il n'y a pas de feedback loop—vous excuserez l'anglicisme—qui nous permette de ramener les choses sur les rails.

Je remercie les gens de Savage de nous informer. On va garder le contact cette fois-ci. Dites-nous si vous avez satisfaction.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Maloney): Souhaitez-vous répondre? Je pense qu'il s'agissait plutôt d'une observation.

M. Barrie King: Nous ne souhaitons pas répondre.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay.

• 1840

M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président. Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'être venus car nous apprécions beaucoup entendre des témoignages comme le vôtre.

À mon avis, votre préoccupation essentielle dans les trois cas que vous nous avez cités est sans doute liée au fait que la mise en vigueur du règlement aura une incidence néfaste sur le marché intérieur, qu'il s'agisse des filiales auxquelles vous vendez votre produit ou du grand public qui vous l'achète. Je me demande si vous avez communiqué avec vos concurrents pour savoir ce qu'ils en pensent ou comment ils envisagent l'avenir.

M. Ernie Barriage: Est-ce que vous parlez du marché canadien proprement dit?

M. Ernie Barriage: Oui. Je parle uniquement du marché intérieur.

M. Ernie Barriage: Non, nous sommes convaincus que ce marché va diminuer également à cause de l'enregistrement et d'autres exigences.

M. Peter MacKay: Combien de fabricants de petites armes existent-ils au Canada?

M. Ernie Barriage: Il n'y a que nous.

M. Peter MacKay: Très bien, il n'y a donc pas d'autres entreprises.

M. Barrie King: Et les carabines sportives.

J'aimerais faire une remarque. Nous sommes le seul fabricant de ce genre d'arme. À écouter M. Taylor, je n'ai pas eu l'impression et je n'ai toujours pas l'impression que... nous sommes visés par ce projet de loi. Les mesures en vigueur jusqu'ici ont été efficaces. Vous savez combien de carabines de calibre 22 sont vendues au Canada. Pratiquement rien. Cela ne ferait pas vivre nos employés, qui étaient au nombre de 50 et sont aujourd'hui au nombre de 65, et nous comptons encore prendre de l'expansion. Toutes ces activités... je l'ai dit, nous nous attendons à exporter 99 p. 100 de notre production; nous en exportons 97 p. 100, et nous comptons passer à 99 p. 100. Ce n'est pas le Canada qui va en profiter, mais ce sont les États-Unis.

M. Peter MacKay: Vos armes sont destinées ou au marché américain ou au marché européen, je suppose.

M. Ernie Barriage: Oui, nous exportons dans le monde entier. En moins de deux ans, les ventes au Canada sont passées de 12 000 à 15 000 à seulement 1 200 à 1 500. Cela vous donne une idée de l'incidence de cette loi et c'est très bien, mais nous sommes installés à Lakefield pour fabriquer un produit destiné au marché international et nous aimerions pouvoir demeurer concurrentiels.

Si nos concurrents ne sont pas confrontés aux mêmes obstacles que nous parce que nous fabriquons... ce qui semble être une activité unique parmi toutes les personnes au Canada qui s'intéressent à la Loi sur les armes à feu. Nous voulons qu'on nous oublie car exploiter une usine qui n'est pas à la hauteur, qui ne peut pas être concurrentielle...

Lorsque quelqu'un est blessé ou tué à cause d'une carabine, les répercussions sont nombreuses. C'est une question très personnelle, mais c'est aussi très personnel de devoir dire à 65 personnes qu'elles n'ont plus d'emploi, qu'elles n'auront plus de revenu. Il s'agit d'emplois non spécialisés. Il est difficile de trouver un emploi lorsqu'on a des compétences. Je parle d'expérience. Les gens sont encore plus durement touchés lorsqu'ils n'ont pas de compétences. On ne se rendra peut-être pas compte, mais ces employés seront touchés, et il n'y a pas que 65 personnes en cause car la plupart d'entre eux ont également un conjoint et des enfants.

Alors, je me bats tout simplement pour continuer à aider l'économie en fabriquant des produits, et la majorité de ma production n'est même pas vendue au Canada.

M. Peter MacKay: Vous avez un très bon argument. À mon avis, il s'aligne très bien avec l'observation faite par mon collègue du Parti réformiste sur l'impact économique du règlement dans la loi elle-même. Merci.

M. Barrie King: D'accord. Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur MacKay. Monsieur Lee.

M. Derek Lee: Merci.

Je ne suis pas certain que vous ayez parlé de la question qui nous préoccupe aujourd'hui. Un des règlements que nous étudions porte sur le transport des armes à feu par les commerces. Ni un ni l'autre d'entre vous n'avez parlé des aspects économiques du fardeau réglementaire actuel et de son impact sur vos commerces. Cette question m'intéresse, et je suis certain que les autres députés autour de la table s'y intéressent également. En écoutant vos témoignages antérieurs, j'ai eu l'impression que vous n'aviez ni noté ni mesuré l'impact du fardeau réglementaire actuel, que ce soit les autorisations d'acquisition d'armes à feu ou le transport ou les permis d'exportation, ou les coûts additionnels pour les transporteurs qui transportent vos produits à la frontière et à l'extérieur du pays. Pourriez-vous nous éclairer sur l'impact économique de ces règlements?

• 1845

M. Ernie Barriage: À l'heure actuelle, nous n'avons pas d'idée pour ce qui est du fret. Nous connaissons nos coûts actuels pour le fret si nous devons passer par le système de permis. Les tarifs de fret vont augmenter, mais nous ne savons pas de combien. Comme c'est nous qui payons le fret...

M. Derek Lee: Mais ces règlements sont déjà en vigueur, sauf erreur. N'est-ce pas, monsieur le président?

Le vice-président (M. John Maloney): Pas ces règlements.

M. Derek Lee: Non, les règlements du projet de loi C-60, en vertu de la Loi sur les armes à feu. Les premiers règlements, qui ont fixé des frais pour le premier système réglementaire, ne sont pas en vigueur actuellement. Quand est-ce que...?

Alors, voilà pourquoi vous ne savez pas; vous n'avez rien eu à payer pour le moment.

M. Ernie Barriage: C'est exact.

M. Derek Lee: D'accord. Nous ne pouvons que garder l'oeil ouvert. Je suis également étonné que vous n'ayez pas préparé des chiffres approximatifs pour nous sur...

M. Ernie Barriage: C'est parce que les transporteurs ne peuvent pas nous donner un tarif pour le fret. Nous sommes à leur merci sur ce point.

M. Derek Lee: Ils devront verser 250 $ pour s'inscrire, et composer avec tous les ennuis de faire la demande pour le permis approprié. Mais pour ce qui est du coût d'exportation, chaque fois que vous faites un envoi à la frontière vous allez devoir enregistrer l'arme à feu et demander un permis d'exportation.

M. Ernie Barriage: Nous serions obligés de faire tout cela?

M. Derek Lee: Oui. Deux embêtements, l'un après l'autre. Je crois comprendre que cela se fait de façon électronique, mais vous serez obligé d'acheter ces équipements électroniques et vous occuper des communications et les chiffres...

M. Ernie Barriage: Nous n'avons pas ces équipements à l'heure actuelle.

M. Derek Lee: Oui. Malheureusement, nous ne pouvons pas consacrer plus de temps à cette question aujourd'hui.

Mes collègues, il y a un autre fabricant d'armes à feu dans ma circonscription. Cette autre compagnie a environ 75 employés dans ma circonscription, ainsi qu'une succursale à Montréal, qui a également un certain nombre d'employés.

Alors, oui je m'intéresse à cette question, mais je suppose que nous ne pouvons pas consacrer davantage d'attention à la question à ce moment-ci.

Merci.

M. Ernie Barriage: Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Y a-t-il d'autres questions?

M. Barry Breitkreuz: Je voudrais demander une précision sur cette dernière question.

J'avais l'impression que vous étiez le seul fabricant d'armes à feu; êtes-vous les seuls à fabriquer des long rifles 22 à percussion annulaire?

M. Barrie King: Oui, pour autant que je le sache.

M. Barry Breitkreuz: Pour autant que vous le sachiez. Mais il y a d'autres fabricants d'armes à feu au Canada.

M. Barrie King: Oui.

M. Ernie Barriage: Il y a une compagnie à Kitchener, du nom de Diemaco, je crois, qui fabrique des armes à feu militaires.

M. Gary Breitkreuz: Y a-t-il une association de fabricants d'armes à feu? Combien de fabricants seront touchés par cette loi comme vous? En avez-vous une idée?

M. Ernie Barriage: Je suppose que tous les fabricants canadiens seraient touchés.

M. Gary Breitkreuz: Alors, combien de fabricants y a-t-il?

M. Barrie King: Je ne crois pas qu'il existe une association de fabricants d'armes à feu.

M. Ernie Barriage: On parle d'armes à feu tout court.

M. Gary Breitkreuz: Existe-t-il un réseau informel quelconque? Vous êtes sans doute au courant de vos concurrents, les autres fabricants des 30-30 ou d'autres armes?

M. Ernie Barriage: Pour ce qui est du marché canadien, la plupart des nos concurrents sont des fabricants américains.

M. Gary Breitkreuz: Mais vous ignorez combien de fabricants il y a au Canada.

M. Barrie King: Pour notre produit, il n'y en a aucun.

M. Garry Breitkreuz: Moi, je parle de tous les fabricants d'armes à feu qui seraient touchés. Vous ne savez pas.

M. Barrie King: Non.

M. Garry Breitkreuz: D'accord. Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Eleni.

Mme Eleni Bakopanos: Je me rends compte que ce n'est pas très approprié, monsieur le président, mais je voudrais poser ma question aux fonctionnaires du centre canadien pour les armes à feu... autrement dit, à Bill.

Combien de fabricants le ministère de la Justice a-t-il consultés? Ce dossier est nouveau pour moi, donc je vous demande d'être indulgent. Je n'étais pas ici au moment des dernières consultations.

M. Garry Breitkreuz: C'est une question qui ressemble à un rappel au Règlement.

Mme Eleni Bakopanos: Oui, c'est comme un rappel au Règlement.

M. Gary Breitkreuz: Ce n'est pas juste.

M. William Bartlett: Il est sûr que nous avons consulté Savage Arms à plusieurs reprises, ainsi que Para-Ordnance et SNC-Lavalin, qui fait du travail très spécialisé pour les forces armées. Nous avons également consulté Diemaco.

Donc, nous avons consulté les trois grands fabricants canadiens d'armes à feu militaires, c'est-à-dire Savage, Para-Ordnance et Diemaco, ainsi SNC Lavalin.

Mme Eleni Bakopanos: Donc, vous avez consulté ces gens sur les règlements.

M. William Bartlett: Oui.

Mme Eleni Bakopanos: Merci.

• 1850

Le vice-président (M. John Maloney): Merci de vos observations et des questions que vous avez posées à Bill. Nous pourrions noter vos questions et demander au ministère de fournir des réponses, pour ne pas briser la continuité de nos discussions et pour ne pas ouvrir de parenthèse. Je pense que c'est la meilleure façon de régler le problème, comme nous avons fait cet après-midi. Est-ce que c'est acceptable aux autres députés?

[Français]

Pierre.

M. Pierre de Savoye: Monsieur le président, j'ai remarqué que M. MacKay avait un document qui lui avait été remis par nos témoins de Savage. Cela semble être le contenu de leur exposé et j'aimerais, pour le bénéfice de tous les membres du comité, que ce document soit rendu disponible dès que possible dans les deux langues officielles.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, monsieur de Savoye. Je ne savais pas qu'on avait distribué un document.

M. Garry Breitkreuz: Je ne l'ai pas reçu.

M. Pierre de Savoye: Il avait un discours. J'ai demandé à Peter où il l'avait obtenu et il me l'a dit. J'ai pensé que ce serait une bonne chose que tout le monde en ait un exemplaire.

Le vice-président (M. John Maloney): Peter, si vous acceptez de nous donner vos informations, nous les ferons traduire.

M. Peter MacKay: C'est la même chose que son exposé; il s'agit d'une lettre destinée au comité. J'ai supposé que ce document était disponible.

Le vice-président (M. John Maloney): D'accord. Nous allons le faire traduire, et nous ferons distribuer les deux versions. Merci.

Merci beaucoup d'être venus ce soir.

Nous reprendrons nos travaux demain à 9 h 30.