JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 24 mars 1998
[Traduction]
La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Nous reprenons. Nous allons entendre cet après-midi l'Association des banquiers canadiens. Nous recevons Harriet Stairs, vice-présidente à la direction et responsable des ressources humaines à la Banque de Montréal; Judy Jaeger, vice-présidente, Diversité et programmes de l'entreprise, Banque Canadienne Impériale de Commerce, ma banque—je déclare qu'il y a conflit d'intérêts—et Andrew Finlay, conseiller juridique principal, Groupe de la législation sur l'emploi, Banque de Nouvelle-Écosse.
Je fais affaire avec la CIBC, je ne paie pas de frais, et c'est parce que ma banque offre d'excellents programmes. Si vous voulez m'en parler, venez me voir après la séance.
Des voix: Ah, ah!
Une voix:
[Note de la rédaction: Inaudible]
La présidente: Vous pouvez toujours rêver.
• 1540
Avant de commencer, je tiens à mentionner que ce matin la Cour
fédérale du Canada, division de première instance, par la voix du
juge Donna McGillis, diplômée de l'Université de Windsor, a statué
que le tribunal tel qu'il est constitué, du moins selon les termes
de l'affaire Bell Canada, n'est pas constitutionnel. Je conseille
à tous de réfléchir à cela au cours de la journée. J'ai une copie
du jugement ici, que Nancy Holmes nous a obtenue.
Êtes-vous prêts à commencer maintenant?
Mme Harriet Stairs (Association des banquiers canadiens): Madame la présidente, membres du comité, je vous remercie de nous avoir présentés. Nous représentons l'Association des banquiers canadiens, dont les membres sont les 53 banques à charte du Canada.
Le secteur bancaire est l'une des trois principales industries régies en vertu des lois fédérales sur les droits de la personne. Les banques à elles seules comptent plus de 200 000 employés et, littéralement, des millions de clients à l'échelle du pays. Les banques appuient les principes et les objectifs de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous appuyons également la plupart des modifications contenues dans le projet de loi S-5, y compris l'ajout de l'obligation d'accommodement des personnes ayant des besoins spéciaux, besoins qui touchent tout l'éventail de la population diversifiée du Canada.
Plus précisément, les banques reconnaissent aussi qu'il reste encore beaucoup à faire avant que les personnes handicapées puissent participer pleinement au courant social et économique dominant du Canada. Le secteur bancaire désire faire partie du mouvement vers le changement en faveur des personnes handicapées que fait valoir le présent projet de loi. Afin de continuer à jouer un rôle constructif dans la progression de nos employés, en particulier des personnes handicapées, nous avons besoin d'un cadre législatif favorable et habilitant qui puisse nous aider à obtenir les résultats positifs et pratiques que nous souhaitons tous.
C'est dans cette optique que nous vous prions instamment aujourd'hui d'envisager la modification de deux des dispositions du projet de loi S-5. Nos recommandations sont les suivantes. D'abord, en ce qui a trait à l'obligation d'accommodement sans s'imposer de contrainte excessive, nous recommandons fortement de modifier légèrement le libellé de l'article 15(2). Les modifications que nous proposons sont les suivantes: premièrement, insérer le mot «raisonnable» après «accommodement», et deuxièmement, ajouter la phrase «afin de permettre l'élargissement des critères d'évaluation et de la contrainte excessive», au lieu de restreindre les critères aux trois éléments énoncés dans le projet de loi, soit la santé, la sécurité et le coût. Nous croyons que ce libellé de la loi maintiendra l'obligation d'accommodement stricte et fondamentale sans s'imposer de contrainte excessive, d'une façon qui soit conforme aux nombreux jugements rendus à cet égard par la Cour suprême depuis le début des années 80.
Le caractère raisonnable a toujours fait partie intrinsèque des décisions de la Cour à ce chapitre. Le ministère de la Justice nous a affirmé que le caractère «raisonnable» est implicite dans le cas du projet de loi S-5 et est inhérent à son intention. Si tel est le cas, pourquoi ne devrait-il pas être énoncé explicitement, de façon claire et transparente pour tous?
La Cour suprême a également examiné de nombreux facteurs lorsqu'elle a tenté d'évaluer les critères applicables à la contrainte excessive et, à plusieurs reprises, elle a émis des mises en garde afin que la liste des facteurs ne soit pas restreinte. Dans chaque cas, les tribunaux ont inclus d'autres critères que la santé, la sécurité et le coût. Ils ont tenu compte de facteurs tels que le moral des autres employés, l'efficacité de l'exploitation de l'entreprise, l'atteinte à la convention collective et l'interchangeabilité de l'effectif.
Soulignons que presque toutes ces décisions ont été prises en faveur du plaignant, et non de l'employeur ou de l'entreprise. Nous acceptons cet état de fait, car nous savons que les tribunaux ont pris ces décisions après avoir examiné tous les facteurs pertinents et avoir recherché une solution appropriée, équilibrée et raisonnable. Si nous reconnaissons que la santé, la sécurité et le coût sont probablement les trois critères les plus importants pour évaluer la contrainte excessive, il ne s'agit toutefois pas d'une liste exhaustive. La Cour suprême a établi un modèle pour l'examen de tous les facteurs propres aux circonstances entourant chaque cas.
Le ministère de la Justice a indiqué que le Code des droits de la personne de l'Ontario a servi de modèle à l'établissement des critères relatifs à l'obligation d'accommodement sans s'imposer de contrainte excessive du projet de loi S-5. Nous savons également qu'un certain nombre d'organismes représentant des personnes handicapées appuient le modèle ontarien.
• 1545
Toutefois, cette approche constitue une déviation majeure par
rapport aux décisions de la Cour suprême. En omettant d'énoncer le
concept de caractère raisonnable et en limitant les critères
d'évaluation de la contrainte excessive, le projet de loi S-5, tout
comme la loi ontarienne, peut faire l'objet d'une interprétation
étroite et rigide.
Le projet de loi S-5 n'est pas qu'une simple codification de la jurisprudence existante. Il ne reflète ni le libellé ni l'esprit des décisions de la Cour suprême.
Nous pressons le comité de tenir compte du libellé que nous proposons à l'égard de l'article 15(2). Cette modification ne diminuerait en rien l'obligation d'accommodement des besoins spéciaux. Elle permettrait d'établir en droit fédéral une approche plus conviviale à l'égard de l'obligation d'accommodement. Au lieu d'être positionnée comme un élément à craindre ou susceptible de conduire l'entreprise à la faillite, l'obligation d'accommodement devrait plutôt permettre à ceux d'entre nous qui tentent de respecter la loi au quotidien de reprendre confiance en la possibilité de trouver une solution raisonnable.
Depuis des années, les banques en tant qu'employeurs ont pris des dispositions pour accommoder tout un éventail de besoins spéciaux, y compris des dispositions aussi variées que le réaménagement des horaires de travail afin de faciliter les déplacements entre le lieu de travail et le lieu de résidence des employés handicapés ou de ceux qui ont des exigences religieuses ou familiales particulières, l'installation d'une technologie informatique de pointe, adaptée aux employés malvoyants qui travaillent à l'aide d'informations électroniques ou de bases de données, et l'aménagement d'une salle de prière permettant aux employés de continuer d'observer leurs rites religieux.
La plupart des banques ont établi des fonds spéciaux pour couvrir le coût des aménagements qui pourrait excéder la capacité budgétaire d'une succursale ou d'un centre d'entreprise.
En ce qui a trait aux services bancaires, de notre propre initiative nous travaillons également avec l'Association canadienne de normalisation et d'autres parties intéressées à l'élaboration d'une norme sur l'accessibilité des guichets automatiques bancaires, ou GAB. Cette norme permettra aux fabricants et aux institutions financières de disposer de renseignements normalisés et appropriés sur la manière d'améliorer les GAB de telle sorte qu'ils soient accessibles aux personnes handicapées, en particulier aux personnes aveugles ou malvoyantes qui ne peuvent pas se servir de ces machines.
Les banques utilisent aussi la norme d'aménagement pour accès facile de l'Association canadienne de normalisation lorsqu'elles rénovent une succursale ou en construisent une nouvelle. Cette norme prévoit des dimensions et d'autres critères qui rendent les immeubles accessibles aux personnes handicapées. Les entreprises ne sont pas tenues de respecter cette norme.
Notre seconde recommandation a trait à la nouvelle disposition du projet de loi S-5 qui permettrait le dépôt de plaintes dans le domaine de la prestation de biens et de services lorsque aucune personne n'est identifiée en tant que victime. Notre expérience nous convainc qu'une telle approche est inefficace lorsqu'il s'agit de plaintes systémiques et qu'elle viole les principes de justice naturelle.
Nous croyons comprendre que l'ajout du paragraphe 5 à l'article 40(5)b) de la loi actuelle vise à harmoniser l'approche relative à la fourniture de biens et de services avec l'approche existante dans le cas des plaintes sans victime en ce qui a trait à l'emploi. Voilà qui ne saurait justifier la modification de la loi, surtout si l'on tient compte du fait que les plaintes sans victime ne sont jamais efficaces, quel que soit le contexte.
L'ajout du paragraphe (5) à l'article 40(5)b) n'améliorera pas le processus de règlement des plaintes en vertu de la loi. Il aura plutôt pour effet d'immobiliser les ressources de la Commission canadienne des droits de la personne dans de longues négociations qui seront en bout de ligne impossibles à résoudre.
Les banques ont acquis de l'expérience avec les plaintes sans victime en ce qui a trait à l'emploi en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, et celles-ci se sont avérées presque impossibles à résoudre. En 1988, cinq plaintes sans victime ont été déposées contre cinq banques. Près de dix ans plus tard, trois d'entre elles ne sont toujours pas réglées, et les deux autres cas, malgré la négociation de règlements initiaux, continuent de causer d'énormes difficultés pour ce qui est de leur mise en oeuvre.
• 1550
Ces plaintes contreviennent à notre système de justice
naturelle—par exemple, le droit de l'accusé de savoir qui l'accuse
et l'exigence fondamentale, dans le cas où une plainte est déposée
contre une personne, que tous les détails soient définis afin que
l'intimé ait la possibilité de préparer sa défense. Dans les cas
sans victime, le manque de spécificité ne permet pas aux parties de
dégager des solutions viables.
Nous désirons en outre signaler que lorsque la Loi sur l'équité en matière d'emploi a été revue et modifiée en 1995, le Comité de la Chambre des communes sur les droits de la personne et la condition des personnes handicapées a reconnu l'inefficacité des plaintes sans victime et a veillé à ce que la nouvelle loi contienne une disposition qui empêche le dépôt de plaintes sans victime en matière d'emploi fondées uniquement sur des statistiques. Nous exhortons le comité à modifier le projet de loi S-5 en supprimant l'article 5 de la liste des secteurs dans le cadre desquels une plainte peut être déposée lorsqu'il n'y a pas de victime identifiable.
Nous reconnaissons que le processus d'élimination de toute forme de discrimination dans le domaine de la prestation de l'emploi et des biens et services est trop lent au gré de certains partisans. Cependant, nous affirmons également que, grâce à la Loi sur l'équité en matière d'emploi et à la norme d'aménagement pour accès facile de l'Association canadienne de normalisation, les banques ont été en mesure de modifier considérablement leurs politiques et leurs pratiques en ce qui a trait à leur main-d'oeuvre ainsi qu'à leurs locaux et à leurs services au cours de la dernière décennie.
Ces changements témoignent de l'efficacité des approches avec lesquelles nous avons travaillé jusqu'à présent. Nous savons par expérience qu'en règle générale la législation qui établit des approches rigides, étroites et punitives n'est pas propice à un changement positif. Elle tend plutôt à susciter frustration, acrimonie, plaintes et litiges.
Nous vous pressons de tenir compte des modifications que nous proposons. Nous espérons que la loi révisée nous aidera à poursuivre le travail entrepris.
Nous vous remercions de votre temps. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
La présidente: Merci.
Seul M. DeVillers a indiqué son intention de poser des questions.
Monsieur DeVillers, allez-y. Si d'autres collègues veulent poser des questions, faites-le moi savoir.
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Merci.
S'agissant de l'amendement au nouveau paragraphe 15(2), vous proposez simplement que nous ajoutions le terme «raisonnable». Vous ajouteriez par ailleurs «toutes les considérations pertinentes et justifiables, notamment la santé, la sécurité et le coût». Ma question porte sur l'ajout du mot «raisonnable».
Vous dites que d'après l'avis du ministère de la Justice, le qualificatif «raisonnable» est implicite dans les décisions des tribunaux. Pourquoi pensez-vous que le simple ajout du terme «raisonnable», sans autre explication ou définition, améliore le projet de loi?
M. Andrew Finlay (Association des banquiers canadiens): Les arrêts de la Cour suprême et des autres tribunaux depuis 20 ans ont tous porté sur le caractère raisonnable de l'accommodement. C'est l'un des domaines du droit qui ont effectivement bénéficié de l'interprétation judiciaire, de sorte que la loi est significative et utile. L'ajout du terme «raisonnable» dissipe tout doute et rend très clair le fait qu'il faut que l'accommodement soit raisonnable, équilibré et adapté.
M. Paul DeVillers: Le but est donc d'apporter un éclaircissement, et non pas de changer la loi. Vous jugez qu'il y a éclaircissement même si le terme n'est pas défini et que cela renvoie donc à la jurisprudence de départ.
M. Andrew Finlay: Oui, c'est exact. C'est plus clair.
M. Paul DeVillers: D'accord.
Ma deuxième question porte sur la page 4 de votre mémoire, où vous dites que vous travaillez avec l'Association canadienne de normalisation pour améliorer l'accès aux guichets automatiques bancaires. Pouvez-vous nous dire quand vous prévoyez que les guichets automatiques bancaires seront accessibles aux personnes souffrant d'une déficience visuelle?
Mme Judy Jaeger (Association des banquiers canadiens): Nous n'avons pas d'échéancier précis. Vous parlez de la mise en oeuvre?
M. Paul DeVillers: Oui.
Mme Judy Jaeger: À l'heure actuelle nous travaillons avec un comité de l'Association canadienne de normalisation afin d'élaborer les normes. Diverses banques ont tenté de modifier leurs guichets automatiques, et certaines mettent à l'essai divers mécanismes pour améliorer l'accès. L'essentiel, c'est d'élaborer d'abord une norme à l'intention des fabricants qui sont nos partenaires dans cette initiative.
Quant à la date à laquelle les guichets seront... Nous ne sommes pas encore en mesure de le dire.
M. Paul DeVillers: Avez-vous une idée approximative, une date cible?
Mme Judy Jaeger: Étant donné qu'il y a à peu près 10 000 guichets dans le système, nous n'avons pas encore choisi de date cible.
M. Paul DeVillers: Pour l'instant vous n'avez pas encore décidé quelle sera la norme et encore moins quand elle pourra être mise en oeuvre?
Mme Judy Jaeger: C'est exact. Nous devons d'abord déterminer quelle sera la norme, et nous examinons diverses options. Certains guichets seront plus faciles à mettre en conformité avec la nouvelle norme. Tant que nous n'aurons pas la norme, qui servira de point de référence, nous ne pourrons pas calculer le délai de mise en oeuvre pour l'ensemble des guichets.
M. Paul DeVillers: Vous ne pouvez pas nous donner une idée, même approximative?
Mme Judy Jaeger: Non. Nous pourrons certainement communiquer avec vous quand nous le saurons. Je ne suis pas membre de ce comité.
M. Paul DeVillers: D'accord. Merci.
La présidente: Monsieur Lee.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.
J'aimerais parler de l'accommodement raisonnable par opposition au simple accommodement. Étant donnée mes compétences limitées, j'aimerais que vous m'aidiez à saisir la distinction. Auriez-vous des exemples qui m'aideraient—et peut-être mes collègues aussi—à saisir la différence entre l'accommodement et l'accommodement raisonnable.
Mme Harriet Stairs: Voulez-vous comparer le simple accommodement et l'accommodement raisonnable ou l'accommodement où il y aurait contrainte excessive?
Ce que nous cherchons à dire, c'est que le libellé actuel imposerait une contrainte excessive. Nous disons que l'accommodement doit être raisonnable. Les mots «raisonnable» et «simple» sont sans doute similaires. Ce ne sont pas deux notions radicalement opposées. Ce qui ne poserait pas un problème pour les banques pourrait en poser un pour les petites entreprises, etc.
M. Derek Lee: Oublions le terme «simple». C'était mon propre choix. Utilisons plutôt les termes «accommodement raisonnable» par opposition à «accommodement».
M. Andrew Finlay: Raisonnable par opposition à déraisonnable?
M. Derek Lee: Non. Accommodement raisonnable par opposition à accommodement. Vous proposez d'ajouter le terme «raisonnable» après le mot «accommodement». Vous devez avoir des raisons de le faire, et j'imagine que c'est lié à des circonstances réelles, à un exemple qui pourrait m'aider à saisir la distinction.
M. Andrew Finlay: Je pourrais vous citer en exemple un cas en vertu du Code ontarien des droits de la personne. Il s'agit d'un chiropraticien de London, en Ontario. On lui a reproché de ne pas avoir prévu d'accommodement pour un client en lui assurant un accès en fauteuil roulant à son bureau, qui était situé dans une vieille maison qu'il habitait. Il y avait trois salles pour accueillir les patients dans cette vieille maison.
L'affaire a été portée devant le tribunal, et ce dernier a conclu que le chiropraticien devait remplacer l'une des salles d'accueil des patients par une rampe d'accès à cette maison même s'il avait offert de soigner le patient dans d'autres locaux ou de le faire soigner par d'autres chiropraticiens. L'ordonnance lui imposait de remplacer l'une des salles d'accueil des patients par une rampe et d'assumer lui-même les coûts des travaux. Il a été obligé de déménager son bureau parce qu'il ne pouvait pas assumer les coûts de cet accommodement.
Cela se trouve dans le libellé du code ontarien, où il est dit qu'il y a obligation d'accommodement. Or, en l'occurrence, l'accommodement raisonnable aurait pu entraîner des effets affectant tous les intéressés si l'on avait voulu répondre aux besoins du client de façon équitable et raisonnable tout en respectant la dignité de la personne humaine.
Je me reporte aux considérations liées aux coûts, à la santé et à la sécurité, que nous essayons de faire inscrire dans la loi, ainsi qu'à d'autres aspects, comme la dignité et les répercussions sur une entreprise. À mon avis, cela illustre assez bien les raisons pour lesquelles il importe d'être raisonnable.
M. Derek Lee: C'est un bon exemple. En conséquence, une norme prescrivant un «accommodement raisonnable» serait probablement perçue comme plus souple que l'accommodement total qui semble figurer dans le second exemple. Est-ce bien cela?
Mme Harriet Stairs: Cela me paraît juste.
Ce que nous tenons à souligner, c'est que plus les normes sont rigides, plus il est difficile de leur donner suite et plus cela suscitera de plaintes, d'actions en justice et d'affrontements. Nous avons aussi observé dans le cas d'autres lois adoptées par cette Chambre que plus elles sont raisonnables, plus il est possible pour toutes les parties de s'entendre. On évite ainsi l'affrontement, ce qui permet d'habitude d'en arriver à une position qui satisfera tout le monde.
M. Derek Lee: Si je me peux me permettre de parler de façon quelque peu abstraite, si nous ajoutons au mécanisme de redressement du projet de loi l'idée d'une plainte sans victime, est-ce que cela risque de susciter davantage de demandes de redressement? Estimez-vous que le travail effectué par la Commission canadienne des droits de la personne s'en trouvera de beaucoup alourdi?
Mme Harriet Stairs: Non.
M. Andrew Finlay: La Commission est probablement la mieux placée pour répondre à ces questions. Toutefois, j'ai tiré certaines conclusions de mon expérience auprès de l'organisme, et j'y suis partie à une plainte depuis 1988. Je puis vous dire en toute connaissance de cause que j'ai vu la Commission gaspiller littéralement ses efforts et ses ressources dans l'étude de plaintes qui n'avaient fait aucune victime identifiable, où on ne parlait d'aucune atteinte à une politique précise, et où aucune enquête n'avait été menée à terme. C'est ce qui s'est passé dans neuf causes où l'on poursuivait neuf des principaux employeurs fédéraux. La plainte portait uniquement sur les conditions d'emploi.
Or, on veut maintenant faire intervenir des motifs liés aux services, de sorte que même dans le cas où il n'y aurait qu'une plainte, cela va malheureusement drainer des ressources qu'on pourrait utiliser de façon plus judicieuse en essayant de corriger la situation. J'entends par là qu'on pourrait négocier et proposer des accommodements précis et utiles.
À mon avis, cette inscription aura des répercussions négatives parce qu'elle détournera les ressources de leurs objectifs tout à fait louables.
M. Derek Lee: Dans les grandes villes du Canada, on trouve un grand nombre de citoyens dont la langue maternelle n'est ni l'anglais ni le français. Vous représentez des institutions financières offrant surtout des services financiers, et des biens seulement de temps en temps. Estimez-vous que le libellé actuel du projet de loi risque d'inciter ces citoyens à se plaindre d'être lésés dans leurs rapports avec vous et à demander un redressement en vertu des nouvelles dispositions?
M. Andrew Finlay: Voulez-vous dire qu'il existera alors un groupe de victimes identifiables et de services précis au sujet desquels ils pourront porter plainte?
M. Derek Lee: Eh bien, supposons qu'ils se sentent défavorisés du fait qu'ils ne peuvent transiger avec l'institution financière dans leur langue d'origine. Rappelons que nos lois relatives aux droits de la personne interdisent la discrimination contre ces langues. Croyez-vous que ce genre de circonstance peut susciter une plainte?
M. Andrew Finlay: Il est peu probable qu'il y ait des plaintes, pour la raison que les banques ont fait des efforts considérables pour tenir compte de la langue parlée par leurs clients et de leurs autres besoins précis. Ces efforts vont d'ailleurs se poursuivre. À part cela, même dans les cas où il y aurait des plaintes, et elles ne viseraient certainement aucune des banques ici représentées, je ne vois pas comment un nouveau mécanisme de plainte sans victime pourrait vraiment créer de nouveaux recours pour le plaignant. Il existe déjà certains mécanismes dans les diverses banques, y compris un poste d'ombudsman. Il existe aussi un mécanisme de plainte dans les cas où une victime est identifiable. Il existe donc déjà certaines procédures.
Mme Harriet Stairs: Franchement, il est tout à fait à notre avantage d'accommoder nos clients, et c'est ce que nous faisons. Ainsi par exemple, dans nos rapports avec les Autochtones, où les problèmes ne sont pas de nature linguistique, nous faisons preuve de souplesse en étant représentés dans les diverses réserves; il y a donc déjà beaucoup de mesures d'accommodement aujourd'hui. Si c'est bon pour notre entreprise, cela va continuer.
Si on me permet de revenir aux propos d'Andrew, ces plaintes sans victime nécessitent beaucoup de temps de la part de tout le monde et semblent insolubles. Je pense effectivement qu'elles drainent les ressources de tout le monde. Plus une plainte est précise, plus elle est facile à résoudre parce qu'on peut agir pour corriger la situation. Dans une succursale donnée, par exemple, on peut embaucher une personne ayant les connaissances linguistiques appropriées si c'est à cet égard qu'il faut intervenir dans l'intérêt de cette clientèle-là. Cependant, si la plainte est générale et qu'elle ne fait aucune victime identifiable, la mesure de redressement est très, très difficile à trouver. La Commission canadienne des droits de la personne pourrait probablement mieux parler que nous de la ponction en ressources que cela représente.
M. Derek Lee: À votre avis, est-ce que les amendements que nous proposons au projet de loi risquent d'augmenter les poursuites intentées en vertu de la législation canadienne sur les droits de la personne?
Mme Harriet Stairs: Si l'on n'y ajoute pas l'idée d'un accommodement raisonnable, oui, probablement.
M. Derek Lee: Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas lieu d'augmenter les interventions dans certaines circonstances. J'essaie seulement de tenir compte du nombre des plaintes et de la capacité qu'auraient la Commission et d'autres intervenants de leur donner une suite.
M. Andrew Finlay: Cela affecterait les mesures d'accommodement, la contrainte excessive, les tentatives d'améliorer la situation. À l'heure actuelle, le personnel de la Commission est très efficace et collabore très bien avec les plaignants et les intimés pour arriver à résoudre les problèmes. Si on commence à limiter sa marge de manoeuvre, et celle de tout le monde d'ailleurs, cela mènera inévitablement à des différends plus difficiles à dénouer, ce qui entraînera encore d'autres affrontements.
Vous demandez si la création d'une catégorie de plaintes sans victime risque d'entraîner davantage de travail. Eh bien, oui, je pense que ce sera effectivement le cas.
M. Derek Lee: Merci.
Monsieur le président, je vais m'arrêter ici. Il se peut toutefois que j'aie d'autres questions à poser, et j'espère donc que vous me donnerez encore la parole plus tard.
Le vice-président (M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)): Monsieur McKay, désirez-vous intervenir?
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.
À la page 3 de votre exposé, vous exprimez le souhait de voir inscrites dans le projet de loi l'expression «accommodement raisonnable» ainsi que «d'autres considérations jugées raisonnables aux yeux du tribunal». Vous opposez cela à la normalisation de la notion de contrainte excessive qui figure dans le Code ontarien des droits de la personne.
Ne croyez-vous pas que l'industrie préférerait se reporter à un code clair et net plutôt qu'au langage plus nébuleux de votre proposition?
Mme Harriet Stairs: Je vais répondre de façon peut-être un peu indirecte. Je suis directrice des Ressources humaines pour le Canada et notre succursale située dans le Harris BankCorp Inc. de Chicago; je connais donc très bien les lois américaines en matière d'emploi et d'employabilité. Les États-Unis ont adopté des programmes de discrimination positive très marqués, et, à mon avis, si nous avons réussi à faire autant de progrès au Canada, cela tient au fait que nos lois sont plus souples, ce qui a incité nos gens à faire ce petit effort supplémentaire et à faire preuve d'imagination aussi pour résoudre les problèmes. J'administre les deux systèmes. Or, aux États-Unis, j'ai des liasses de formulaires à remplir, et, malgré cela, toutes ces procédures ne sont animées d'aucun esprit susceptible de nous inspirer.
• 1610
Si je me reporte toujours à cet exemple, cela me fait penser
que les grandes sociétés n'ont pas besoin de règlements figés
jusque dans les plus petits détails, car cela empêche d'évoluer
avec son temps et crée des contraintes lourdes, comme de devoir
amender les lois. Pourvu que les intéressés soient au courant de
l'esprit qui a présidé à l'adoption des principes et que l'on
connaisse aussi l'objectif du projet de loi et qu'on fasse preuve
de la bonne volonté indispensable pour aller de l'avant, et qu'en
plus la loi comporte suffisamment d'éclaircissements et de
sauvegardes... Cela me semble suffire. Or l'objet de la loi est
très clair, et il ne fait aucun doute que les compagnies seront
tenues de s'y conformer; je ne pense donc pas qu'il faille les
encombrer de tous ces petits détails.
M. John McKay: Votre argument est que la codification va en réalité à l'encontre du but recherché, c'est-à-dire l'élimination des obstacles.
Mme Harriet Stairs: Telle est mon expérience personnelle dans la gestion des ressources humaines de deux banques différentes.
M. Andrew Finlay: Au niveau personnel et individuel, si vous croyez que la notion d'accommodement consiste à répondre aux besoins de chacun, et si toutes les personnes présentes dans cette salle ont des besoins spécifiques, il faut de la souplesse pour pouvoir répondre à chacun de ces besoins différents. Dès que l'on commence à codifier, on réduit la souplesse. Il importe que la mesure soit équilibrée.
M. John McKay: Que répondez-vous à l'argument des représentants des personnes handicapées qui ont comparu devant nous et qui ont dit qu'en insérant dans les normes d'accommodement les mots «santé, sécurité ou coût», surtout ce dernier mot, on se trouve en fait à dire ouvertement que nous sommes hypocrites, que nous sommes contre la discrimination, mais que nous ne mettons pas en pratique nos convictions, que c'est véritablement une insulte envers les 17 p. 100 de Canadiens qui, d'après ce qu'on nous dit, sont handicapés d'une façon ou d'une autre?
Mme Harriet Stairs: Ce que nous disons, c'est qu'il faut utiliser ces trois mots-là, mais ne pas se limiter à ces trois-là.
M. John McKay: Mais eux disent le contraire. Ils disent qu'il faut supprimer complètement ces trois mots, surtout le mot «coût», dans le projet de loi.
M. Andrew Finlay: Ils disent donc que l'accommodement est une obligation absolue.
M. John McKay: Oui.
M. Andrew Finlay: L'accommodement exige d'équilibrer les besoins. Cela ne peut pas être absolu s'il doit y avoir équilibre. Je ne trouve pas cela hypocrite, pas du tout, mais je constate bien sûr les avantages d'une telle souplesse dans mon travail.
M. John McKay: Ma dernière question porte sur vos observations concernant les plaignants qui ne sont pas identifiés. Je crois qu'on cherche à s'attaquer aux problèmes de discrimination systémique, ou de progresser dans ce dossier. Vous dites que ce genre de choses traîne en longueur, accapare des ressources, que cela n'aboutit jamais et que 10 ans plus tard, l'affaire est classée. Je comprends cet argument.
Avez-vous une meilleure suggestion à faire pour s'attaquer aux problèmes plus généraux de discrimination systémique? Y a-t-il un autre libellé ou un autre moyen de s'attaquer à ce problème dans la loi?
Mme Harriet Stairs: Nous travaillons en étroite collaboration avec la Commission des droits de la personne. Ils nous connaissent bien, ainsi que nos principes. Ils les connaissent probablement aussi bien que nous les connaissons nous-mêmes. Je pense qu'au niveau des principes, les gens de la Commission des droits de la personne peuvent être fort utiles aux entreprises qui ne possèdent pas leurs propres plans d'action ou dont les positions ne sont pas suffisamment progressistes, en donnant le ton, c'est-à-dire en prenant les meilleures pratiques qui existent quelque part et qui donnent de bons résultats et en favorisant leur application.
M. John McKay: À vos yeux, la solution est d'ordre informatif plutôt que législatif.
Mme Harriet Stairs: À mes yeux, les gens des droits de la personne ne font pas seulement de l'éducation. Ils ont aussi des pouvoirs et ils peuvent dire «si vous ne vous conformez pas, nous reviendrons à la charge», ce qui est équitable. Je trouve cela bien, mais il faut procéder en appliquant les meilleures pratiques et en donnant du temps aux gens, comme on l'a fait dans le dossier des femmes... Il fallait prendre des mesures et si on ne le faisait pas, ils revenaient à la charge.
M. John McKay: Si nous acceptons votre suggestion, cela ne revient-il pas à abandonner toute l'affaire, tout le concept de la lutte contre la discrimination systémique?
Mme Judy Jaeger: Aux termes de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, les employés assujettis à la législation fédérale sont tenus de faire une analyse des obstacles, une étude des effets défavorables permettant d'identifier les problèmes systémiques à un niveau plus élevé.
M. John McKay: Seulement pour les questions d'emploi.
Mme Judy Jaeger: En effet.
M. John McKay: En l'occurrence, il n'est pas seulement question d'emploi, mais de toute la gamme des questions concernant les relations de travail.
M. Andrew Finlay: La Loi canadienne des droits de la personne, dans sa version actuelle, permet de porter plainte pour dénoncer un cas de discrimination systémique en matière de service, mais il faut une victime et un obstacle précis ou un acte discriminatoire auquel on peut s'attaquer.
Peu importe que la plainte soit logée par une personne ou par un groupe de victimes, il se peut fort bien que la solution soit une solution systémique. Habituellement, il est dans notre intérêt de trouver une solution systémique, parce que cela permet d'éviter d'autres plaintes, même s'il s'agit d'un cas particulier.
Actuellement, il existe un recours grâce à la procédure de griefs; il faut seulement respecter certains critères fondamentaux de justice naturelle.
Il y a aussi un aspect de sensibilisation dans tout cela, absolument. Celle-ci porte sur l'emploi, les biens et les services. Ce ne sont même pas des questions de compétence.
M. John McKay: Votre argument est donc que l'article proposé est inutile.
M. Andrew Finlay: Je trouve que c'est inutile et nuisible.
M. John McKay: Et nuisible.
M. Andrew Finlay: C'est nuisible sur le plan de la justice naturelle et des effets sur les ressources.
M. John McKay: Et ça peut être contraire au but recherché.
M. Andrew Finlay: Ce pourrait l'être.
Le vice-président (M. John Maloney): Merci monsieur McKay.
Monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Je trouve que le simple fait d'avoir à coeur de servir les clients, l'intérêt même des banques et des autres entreprises, contribue en grande partie à résoudre le problème et, si l'on y ajoute la mesure législative, cela devrait suffire à dissiper toute crainte à ce sujet. Pour ce qui est des employés, c'est une autre paire de manches.
Je voudrais entendre vos commentaires. En plus d'être des employeurs et des banquiers, vous avez des clients, de petites entreprises, qui peuvent à tout moment, pendant leur année financière, se retrouver mal en point.
Nous ne voulons assurément pas... et je vous demande si vous trouvez que cette mesure législative peut nuire à l'objectif fondamental, qui est d'aider et de voir à ce que les handicapés puissent fonctionner sur les lieux de travail, conserver leur emploi et même se faire embaucher. À mes yeux, tel est l'objectif de la mesure.
D'après ce que vous savez de votre clientèle et du monde des affaires en général, pouvez-vous nous dire quels seront à votre avis, les effets, positifs ou négatifs, que ces changements auront sur les petites entreprises? Si une petite entreprise aux abois se retrouve obligée de faire des accommodements, comment pourra-t-elle les financer? Les banques vont-elles adopter des dispositions spéciales pour accommoder leurs clients ou bien ces derniers auront-ils le choix entre fermer leur porte ou faire de leur mieux?
Pourriez-vous nous donner votre point de vue là-dessus?
Mme Judy Jaeger: Je vais essayer de commenter certains points que vous avez soulevés.
La plupart des petites entreprises, selon la nature de leurs activités, peuvent subir le contrecoup de cette mesure législative, mais pas nécessairement, quoique le concept avancé dans cette mesure pourrait prendre d'autres formes.
En Ontario, la loi impose l'obligation de faire des accommodements sans aller jusqu'à causer des difficultés intolérables mais cela peut effectivement avoir des conséquences sur la rentabilité des entreprises.
Cela dit, d'après mon expérience, du moins dans le cas des employés que nous avons embauchés, la plupart des accommodements ne coûtent pas assez cher pour menacer la viabilité d'une entreprise.
• 1620
On peut imaginer certains cas particuliers. Andrew a fait
allusion à un cas où, à notre avis, la solution retenue à l'issu
d'un litige était déraisonnable, parce qu'elle avait effectivement
réduit la capacité du chiropraticien en question de servir d'autres
clients. Enfin de compte, il a été obligé de vendre son immeuble et
de prendre diverses mesures, notamment d'hypothéquer son
entreprise, afin de respecter cette ordonnance.
C'est un cas inhabituel, d'après mon expérience, quoi que nous ayons déjà eu un employé pour lequel il nous aurait fallu dépenser 20 000 $ ou 25 000 $ en dispositifs techniques. C'est un coût additionnel pour cet employé. Chose certaine, c'est un investissement dans cet employé. Pour un chef de petite entreprise, cela peut être tout à fait impossible. Les gens seront assurément tentés de se dire: pourquoi embaucherais-je cette personne si elle doit me coûter tellement plus que n'importe quel autre candidat?
Cela fait partie de la campagne de sensibilisation qui est nécessaire. Il y a certaines aides pour cela, mais des coûts de ce genre sont inhabituels. D'habitude, les accommodements sont beaucoup moins coûteux.
Je ne peux pas dire que les banques ont décidé qu'il faudrait un programme spécial de prêt pour les employeurs qui sont dans cette situation. Cela se ferait dans le cadre des programmes ordinaires de prêt aux petites entreprises. On peut imaginer qu'il devienne très difficile pour une petite entreprise de respecter cela, si la solution n'est pas raisonnable, parce qu'il faut qu'elle le soit pour les deux parties.
Il y a eu au moins un cas en Ontario où, à notre avis, la solution n'était peut-être aussi raisonnable pour l'entreprise qu'elle l'était pour la personne en cause.
M. Howard Hilstrom: Pour trancher en pareil cas, je pense qu'Andrew a évoqué la possibilité d'un ombudsman. Y a-t-il en Ontario un ombudsman qui sert de liaison entre l'employeur et l'employé, par exemple? Voilà ce qui me préoccupe. L'affaire aboutit-elle devant les tribunaux?
M. Andrew Finlay: Vous demandez si la législation ontarienne exige l'intervention d'un ombudsman?
M. Howard Hilstrom: Oui. C'est toujours mieux de régler tout cela hors cour, ou en tout cas sans trop de tracas judiciaires. Il arrive parfois qu'un employeur et un employé soient en désaccord et c'est alors qu'une plainte est déposée. Comment l'affaire peut-elle être résolue à l'extérieur des lieux de travail?
M. Andrew Finlay: C'est une excellente question. Je voudrais bien y répondre.
Cela peut se résoudre sur les lieux du travail. Il est certain que les banques ont un mécanisme quelconque qui fait office d'ombudsman, afin que les employés ou les employés éventuels qui ont des préoccupations puissent les soulever auprès d'une tierce partie s'ils hésitent à le faire auprès de leurs gestionnaires, du supérieur de celui-ci, etc.
Je ne suis pas certain que cela existe dans toutes les banques; je soupçonne que c'est le cas, mais il y a habituellement une deuxième voie, un service distinct de l'entreprise qui est chargé de réagir aux griefs d'un employé en matière de discrimination, et c'est d'ailleurs l'une des tâches de mon groupe. Un employé qui a des griefs en matière de discrimination ou d'accommodement peut communiquer directement avec moi, et je travaille alors avec cet employé et avec ma direction pour essayer de trouver une solution.
Cela fait des années que nous appliquons ce principe de l'accommodement raisonnable et nous essayons de trouver des exemples de cas où il nous a été impossible de faire des accommodements. C'est très difficile, parce qu'avec beaucoup d'imagination et une grande souplesse et grâce à la concertation de tous les intervenants, nous trouvons toujours un moyen quelconque de résoudre le problème, presque sans exception.
Le vice-président (M. John Maloney): Merci.
Avez-vous une autre question, monsieur Lee?
M. Derek Lee: Il y a une question, monsieur le président.
Je reviens à la notion de l'accommodement raisonnable. Vous avez dit qu'on vous avait avisé que, de l'avis du ministère de la Justice, le mot «raisonnable» était implicite. Vous rappelez-vous qui vous a dit cela, comment vous en avez été avisé?
M. Andrew Finlay: C'était dans le cadre de discussions avec des fonctionnaires de la justice, à peu près à l'époque de la rédaction ou de la présentation du projet de loi.
M. Derek Lee: C'était des discussions verbales?
M. Andrew Finlay: Oui.
M. Derek Lee: Monsieur le président, je me demande si nous pourrions vérifier cela. Le comité n'est pas conseillé par un avocat tant que nous ne faisons pas l'étude article par article, n'est-ce pas?
Le vice-président (M. John Maloney): En effet. Si vous avez une demande précise, nous pourrions...
M. Derek Lee: Si je comprends bien, je ne suis pas en mesure de demander aujourd'hui à notre personnel de dire si nous avons de bonnes raisons de croire que le mot «raisonnable» est implicite.
Le vice-président (M. John Maloney): Nous pouvons poser la question aux fonctionnaires lors de l'étude article par article, monsieur Lee. Cela vous satisferait-il?
M. Derek Lee: Je vais laisser la question en suspens et j'y reviendrai. Merci.
Le vice-président (M. John Maloney): Très bien.
Y a-t-il d'autres questions? Comme il n'y en a pas, je remercie les représentants de l'Association des banquiers canadiens d'être venus témoigner cet après-midi et de nous avoir fait part de leurs commentaires pour nous aider dans l'étude de ce projet de loi. Merci beaucoup.
La séance est levée.