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Bonjour, monsieur le président et chers membres du Comité.
Je m'appelle Cynthia Baker. Je suis directrice générale de l'Association canadienne des écoles de sciences infirmières, soit l'ACESI. L'ACESI représente 94 écoles de sciences infirmières canadiennes offrant des programmes de baccalauréat ou d'études supérieures en sciences infirmières.
Pendant ma présentation, je vais vous donner un aperçu du problème et de sa source ainsi que des solutions possibles. Par la suite, mes collègues pourront décrire brièvement quelles sont les conséquences de ce problème dans leurs écoles et leurs régions respectives.
Commençons donc par le problème.
Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter de la menace qui pèse sur la formation en sciences infirmières en français hors Québec et, par conséquent, sur l'offre de soins et de services infirmiers en français dans les communautés en milieu minoritaire.
La source du problème est l'adoption de l'examen américain d'accès à la pratique infirmière, soit le NCLEX-RN, en raison des problèmes de traduction et du manque de ressources préparatoires en français qui en découlent.
À partir de janvier 2015, les organismes de réglementation de partout au Canada, exception faite du Québec, ont adopté l'examen américain d'accès à la pratique infirmière, le NCLEX-RN. Cet examen a remplacé l'examen national canadien bilingue, un examen qui était produit de longue date par l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, l'AIIC.
La raison avancée par les ordres professionnels pour expliquer ce changement est que l'examen canadien était un examen en version papier dans lequel on répondait aux questions par écrit, et qu'ils souhaitaient maintenant avoir un examen qu'on puisse subir par ordinateur, soit un examen adaptatif informatisé, pour qu'il puisse être subi plus fréquemment et pour qu'on puisse obtenir les résultats plus rapidement.
L'adoption de cet examen a eu des conséquences.
Tout d'abord, le taux de réussite des francophones a chuté de façon abrupte et est demeuré à un niveau catastrophique. En 2015, seulement 27 % des francophones ont réussi l'examen. L'année d'avant, l'Université de Moncton avait un taux de réussite de 93 % à l'examen canadien, soit un taux bien au-delà de la moyenne nationale. Or, son taux de réussite a chuté à 30 % en 2015.
Les diplômés qui ont déjà subi l'examen en français mettent en garde les étudiants contre la piètre traduction française de l'examen. Par conséquent, ceux-ci choisissent maintenant de subir l'examen en anglais. C'est également l'absence de ressources préparatoires en français qui les incite à faire ce choix.
Ainsi, les diplômés se sentent comme s'ils n'avaient d'autre choix que de subir l'examen en anglais. Certains ont même déclaré devant les médias que, s'ils avaient su qu'ils allaient être obligés de subir l'examen en anglais pour le réussir, ils auraient choisi d'étudier en anglais; ils se seraient inscrits à un programme de sciences infirmières en anglais.
De fait, le NCLEX-RN influe sans doute sur le nombre d'inscriptions dans les programmes de sciences infirmières offerts en français et, par conséquent, sur le nombre de nouveaux infirmiers et infirmières francophones pouvant servir la population francophone.
C'est un cercle vicieux. La piètre traduction de l'examen et le manque de ressources préparatoires à l'examen en français mènent à un faible taux de réussite. Par conséquent, moins d'infirmiers et infirmières francophones entrent sur le marché du travail francophone. À son tour, la diminution du nombre de nouveaux infirmiers et infirmières francophones offrant des soins de santé en français influe inévitablement sur les services de soins de santé en français pour les francophones.
Nous sommes conscients que la formation, l'éducation, la prestation des soins de santé et la réglementation des soins infirmiers relèvent de la compétence des gouvernements provinciaux et territoriaux. Cependant, nous croyons que c'est un problème d'envergure nationale portant sur des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés. De plus, le Consortium national de formation en santé, le CNFS, a investi de façon considérable dans les programmes de formation en sciences infirmières en français hors Québec afin d'appuyer la prestation de soins et de services en français aux personnes vivant dans les communautés francophones.
Voilà qui résume les conséquences.
Parlons maintenant de la traduction.
Les fournisseurs américains de l'examen, c'est-à-dire le National Council of State Boards of Nursing, ou NCSBN, l'ont fait traduire par la Geo Group Corporation, située à Madison, dans le Wisconsin, aux États-Unis. Ce groupe traduit des documents dans plus de 150 langues. Il est important de comprendre qu'une traduction adéquate d'un examen de ce genre, dont l'enjeu est élevé, exige un processus complexe sur le plan méthodologique, c'est-à-dire une adaptation plutôt qu'une traduction, et c'est une expertise que nous avons ici, au Canada.
L'ACESI a fait une analyse de la traduction de l'examen NCLEX-RN. Cette analyse a révélé que la conception et le processus présentaient des failles importantes. Par exemple, il n'y a aucun matériel préparatoire en français. Or la réussite à l'examen NCLEX-RN dépend énormément de la préparation des étudiants à cet examen. Aux États-Unis, les écoles investissent de grosses sommes d'argent dans l'énorme industrie commerciale qui vend du matériel préparatoire en anglais, afin d'assurer leur taux de réussite. Le NCSBN est un très gros joueur dans cette industrie commerciale. Le besoin pour de telles ressources préparatoires est énorme, et ce besoin est encore plus important au Canada qu'aux États-Unis. De fait, les deux tiers des compétences exigées pour accéder à la pratique au Canada ne sont pas évaluées dans cet examen ou ne le sont que partiellement. De plus, de 17 à 23 % des questions de l'examen évaluent les soins infirmiers en fonction du contexte américain des soins de santé.
Puisque le marché francophone est beaucoup trop petit pour présenter un intérêt pour l'industrie du matériel préparatoire, aucune ressource n'est disponible en français.
Bien que les taux de réussite des anglophones aient chuté en 2015, passant de 87 % à 69 %, les programmes d'investissement dans les différentes ressources préparatoires ont connu beaucoup de succès. Les taux de réussite des anglophones ont remonté depuis que la majorité des écoles achètent des ressources préparatoires commerciales. Malheureusement, les candidats francophones n'ont pas accès à ces ressources.
Je vais maintenant parler des solutions.
De multiples groupes nationaux et provinciaux au Canada ont écrit au président-directeur du NCSBN pour proposer des solutions, par exemple fournir les questions d'examen en anglais et en français, traduire les ressources préparatoires en français ou élaborer un lexique complet, car le lexique actuel est vraiment lamentable. Le président-directeur nie l'existence de problèmes liés à cet examen, rejette le besoin de trouver une solution et nous donne une autre version des faits. Il est donc peu probable qu'il s'efforce de résoudre le problème.
Au mois de novembre dernier, les 94 écoles membres de l'ACESI de partout au Canada ont adopté une résolution unanime qui énonce que cette situation est inacceptable et qu'elle va à l'encontre des valeurs canadiennes et des intérêts des Canadiens et des Canadiennes.
Nous croyons savoir que les ordres professionnels ont entamé des négociations afin de renouveler leur contrat avec le NCSBN, lequel prend fin en décembre 2019.
Les membres de l'ACESI demandent l'élaboration d'un examen d'accès à la pratique qui soit canadien et bilingue. L'ACESI serait heureuse de collaborer avec les ordres professionnels et de fournir son expertise dans l'élaboration de cet examen.
Je m'appelle Pierre Godbout. Je suis directeur de l'École des sciences infirmières, qui est présente sur trois campus: celui de Moncton, celui de Shippagan et celui d'Edmundston, lequel ma collègue représente aujourd'hui.
L'École des sciences infirmières est la seule institution à l'Est du Québec qui offre le baccalauréat en sciences infirmières en français. L'École possède une riche tradition: elle a fêté son 50e anniversaire il y a environ deux ans. Cela fait donc longtemps que nous offrons de la formation en sciences infirmières.
La dernière fois que l'examen canadien a été administré, le taux de réussite a été d'environ 93 %; dans les années antérieures, le taux était similaire. Il y avait un bon taux de réussite et les employeurs avaient de bons commentaires. En 2015, lorsqu'on a commencé à utiliser le nouveau format d'examen, la cohorte a obtenu un taux de réussite de 32 %. C'était une insulte pour nous, puisque les étudiants avaient travaillé très fort tout au long de leur baccalauréat. En 2016, la situation était similaire: le taux de réussite était de 39 %. Les choses ne se sont pas améliorées.
Conséquemment, les étudiants vont subir l'examen plusieurs fois, ce qui représente un gros problème, puisque cela leur coûte environ 450 $ chaque fois. Certains étudiants de la cohorte de 2015 ont subi l'examen jusqu'à six fois. Il a fallu attendre deux ans avant que le taux de réussite de cette cohorte n'atteigne environ 88 %. Les étudiants ont jusqu'à la fin du mois de mai pour terminer.
Au Nouveau-Brunswick, les programmes doivent être approuvés par l'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick; on s'assure ainsi qu'ils respectent les normes. Ils doivent également avoir l'agrément de l'Association canadienne des écoles de sciences infirmières. Ainsi, nos programmes respectent les exigences de formation tant de l'organisme provincial que de l'organisme national. Cet examen a donc été une grosse insulte.
Il est également très important de noter que le Nouveau-Brunswick est un cas d'exception, en raison de sa population francophone. Nous avons une très bonne collaboration avec l'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick en vue de trouver des solutions. C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui.
Merci.
Je suis Michelle Lalonde, professeure adjointe du programme francophone de l'Université d'Ottawa.
L'Université d'Ottawa offre un baccalauréat en sciences infirmières en anglais, en français et en immersion. Nous avons les mêmes critères d'admission aux programmes. Nos programmes ont été agréés pour cinq ans par l'Association canadienne des écoles de sciences infirmières.
Depuis l'introduction de l'examen NCLEX-RN en 2015, on a constaté une diminution du nombre de diplômés francophones de l'Université d'Ottawa qui ont subi l'examen en français. Par ailleurs, le taux de réussite a été de moins de 40 %. En 2016, seulement 15,8 % de nos étudiants ont subi l'examen en français, et le taux de passage a été de 39 %. Pour 2017, il est prévu que 64 % des étudiants subiront l'examen en anglais.
Voici les principales raisons qui incitent les diplômés de l'Université d'Ottawa à ne pas vouloir subir l'examen en français. Ils considèrent que les ressources préparatoires en français sont insuffisantes et que la traduction est mauvaise. Cela a d'ailleurs été mentionné dans les médias. Par conséquent, ils ont peur d'échouer à l'examen. Le fait d'échouer à l'examen peut entraîner la perte d'un emploi et des coûts supplémentaires, car ils devront subir de nouveau l'examen. Déjà, nos étudiants de deuxième année expriment leur crainte par rapport à l'examen.
En tant qu'école et en tant que professeurs, nous craignons que tout cela n'ait des effets négatifs sur les communautés francophones vivant en situation minoritaire.
Merci.
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Bonjour. Merci beaucoup de nous écouter.
Je m'appelle Suzie Durocher-Hendriks et je suis professeure adjointe au campus d'Edmundston de l'Université de Moncton.
En 2014, 100 % des étudiants de notre campus ont réussi l'examen d'entrée à la pratique. En 2015, le taux de réussite a été de 30 %. Pourtant, les étudiants avaient suivi exactement le même programme et la même formation.
Comme mon collègue M. Godbout l'a mentionné, malgré tout cela, notre programme a reçu l'agrément de sept ans de l'ACESI et de cinq ans de l'AIINB. Dans les deux cas, c'est la durée maximale d'agrément pouvant être accordée.
Après avoir suivi une formation entièrement en français, nos candidats à la formation n'ont d'autre choix que d'acheter du matériel en anglais, et ce, dans une province officiellement bilingue.
Plusieurs sorties médiatiques ont attribué la non-réussite des francophones au NCLEX-RN en partie au programme de l'Université de Moncton. Depuis, le nombre d'inscriptions au campus d'Edmundston a diminué. Cette année, nous avons à peine 12 nouvelles inscriptions. Dans le passé, nous recevions habituellement entre 25 et 35 inscriptions; nous avons même déjà reçu jusqu'à 60 inscriptions.
Les francophones du Nord-Ouest du Nouveau-Brunswick sont majoritairement unilingues francophones et très peu sont fonctionnellement bilingues. Étudier en français lors de sa formation pour ensuite se préparer à un examen avec des ressources entièrement en anglais va à l'encontre de tout ce qu'on connaît en pédagogie. Nos étudiants disent qu'ils passent autant de temps à comprendre l'anglais que le contenu des questions pratiques.
Conséquemment, particulièrement dans la région du Nord-Ouest du Nouveau-Brunswick, les services de santé en français à nos patients, à leur famille et à notre communauté sont menacés. C'est sans compter les répercussions émotionnelles sur nos étudiants qui n'arrivent pas à réussir cet examen.
Je suis directrice de l'École des sciences infirmières de l'Université Laurentienne, qui offre le baccalauréat en sciences infirmières entièrement en français, ainsi qu'en anglais. Le programme en français est appuyé par le Consortium national de formation en santé. Nous avons les mêmes critères d'admission que le programme en anglais, sauf qu'il y a un critère supplémentaire lié au français, parce que les étudiants doivent étudier en français. Nous avons aussi obtenu un agrément maximal de sept ans.
Dans le passé, la majorité de nos étudiants francophones subissaient l'examen national en français. Certaines de nos cohortes ont eu de très hauts taux de réussite au premier essai, allant jusqu'à 100 %. Nous avons aussi remarqué que, dans le passé, ceux qui subissaient le test en anglais avaient un taux de réussite plus bas, étant donné qu'ils avaient étudié en français pendant quatre ans.
En 2015, la majorité des étudiants ont décidé de subir le test en anglais. En 2016, 100 % des étudiants l'ont subi en anglais. En 2017, il y aura un pourcentage aussi élevé d'étudiants qui subiront le test en anglais. Parmi les raisons données, il y a le fait que les ressources préparatoires à l'examen NCLEX-RN ne sont disponibles qu'en anglais. Également, on perçoit que l'examen n'est pas bien traduit. Les étudiants disent avoir reçu cette information d'autres étudiants qui avaient subi l'examen.
Les conséquences d'un échec à l'examen ont déjà été évoquées par les autres intervenants: cela peut entraîner la perte d'un emploi et des coûts supplémentaires.
Nous avons fait un sondage auprès de nos étudiants diplômés de cette année. À ceux qui étaient inscrits dans un programme francophone, nous avons demandé si, admettons qu'ils aient la capacité de remonter le temps, ils choisiraient de s'inscrire dans un programme francophone. Seulement 44 % ont répondu que oui, ils le feraient, notamment en raison de l'intégrité de notre programme, du fait qu'ils sont à l'aise d'étudier en français et fiers d'être bilingues, et du fait qu'ils ont l'occasion de travailler dans les deux langues. Une proportion de 28 % ont répondu non, en donnant comme raisons qu'il n'y avait pas de matériel préparatoire en français à l'examen NCLEX-RN et qu'ils sentaient qu'ils n'avaient pas vraiment le choix de subir l'examen en anglais. Finalement, 28 % étaient encore incertains.
Si cette tendance se maintient, il y aura des répercussions importantes sur le nombre de diplômés francophones et sur les services de santé en français offerts aux populations francophones minoritaires. Cela va aussi à l'encontre du travail fait par le Consortium national de formation en santé, qui est d'augmenter le nombre de professionnels francophones pouvant offrir des services en français.
Il n'y a pas de représentants de l'AIIC ici aujourd'hui. Il y en a peut-être qui vont comparaître dans la deuxième portion de la séance. Si c'est le cas, nous aurons l'occasion de leur demander pourquoi c'est si difficile d'avoir une traduction adéquate de cet examen en ligne. Permettez-moi de paraphraser le premier ministre: nous sommes quand même en 2017. Vous dites qu'on a voulu passer d'un examen tenu par écrit à un examen en ligne. Si c'est effectivement la raison pour laquelle on a adopté cet examen — et j'espère que des gens de l'AIIC pourront le confirmer —, je ne peux pas croire que ce soit aussi compliqué en 2017.
Ce que j'entends aujourd'hui me dépasse vraiment. Je n'en reviens pas. Je n'ose pas exprimer mon idée par des qualificatifs. C'est à se demander si tout cela n'est pas fait exprès, pour éviter de devoir donner des services aux francophones dans leur langue partout Canada, surtout en santé. Cela me dépasse, sincèrement.
J'aurais 50 000 questions à vous poser, mais je vais me limiter à la suivante.
Dans le cadre de notre préparation à cette rencontre, nous avons remarqué que certaines personnes ne semblaient pas voir de problème en ce qui concerne les taux de réussite à l'examen. Le taux d'échec devra-t-il devoir être de 100 % pour que les gens comprennent qu'il y a un problème?
Comment se fait-il qu'on ne puisse pas faire cela au Canada?
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Merci, monsieur le président.
Madame Baker, madame Lalonde, monsieur Godbout, madame Durocher-Hendriks et madame Larocque, je vous remercie de vos témoignages.
Je viens du Nouveau-Brunswick et je suis député de la circonscription de Madawaska—Restigouche. Je connais bien l'enjeu dont vous parlez. Mon épouse était infirmière bachelière à l'Université de Moncton à l'époque de Mme Wade. Elle travaillait au centre hospitalier universitaire Dr-Georges-L.-Dumont. Bref, je connais bien la dynamique.
Ce que vous venez de nous raconter en 15 minutes, c'est un scandale, c'est une bombe pour les francophones hors Québec qui veulent étudier en sciences infirmières. On connaît très bien la situation. J'en entends parler par bribes dans mon propre village. Aujourd'hui, ce sont des professionnels du domaine qui nous exposent ce problème.
Je ne veux pas parler en détail du scandale, puisque tout ce que j'ai déjà entendu à ce sujet me donne mal à la tête, mais je voudrais savoir une chose. Pour obtenir son baccalauréat en sciences infirmières, l'étape ultime est bel et bien la formation pratique, c'est-à-dire les stages. Si je me fie au programme de l'Université de Moncton, je peux affirmer que le baccalauréat en sciences infirmières est celui qui comprend le plus de stages pratiques au cours des quatre années.
Au fait, est-ce maintenant un programme de cinq ans ou est-ce encore quatre ans?
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Bonjour et merci de nous avoir invités à témoigner au sujet de cette question importante.
L'Ordre des infirmières et infirmiers de l'Ontario a pour mandat de réglementer la prestation de soins infirmiers dans l'intérêt de la population. Nous occupons une place unique au pays, car nous sommes actuellement le seul organisme de réglementation chargé de réglementer l'ensemble des infirmières de la province, c'est-à-dire les infirmières auxiliaires, autorisées et praticiennes.
Ce mandat consiste entre autres à établir les exigences d'admission, notamment en approuvant les programmes de sciences infirmières et un examen d'admission dans la province. En 2015, l'Ordre, aux côtés d'autres organismes de réglementation des infirmières autorisées, à l'exclusion de celui du Québec, a approuvé l'examen NCLEX-RN à titre d'examen d'admission des infirmières autorisées.
Cet examen évalue si un candidat possède les connaissances, les compétences et le jugement de base nécessaires pour prodiguer des soins infirmiers sécuritaires à la population. Il sert notamment à déterminer comment les candidats évaluent le besoin de recourir à la gestion de la douleur ou la manière dont ils effectuent une évaluation exhaustive de la santé. Il ne s'agit pas d'un examen canadien ou américain, mais d'un examen administré en vertu de la réglementation.
L'examen NCLEX constitue aussi un genre différent d'examen, puisqu'il s'agit d'un examen adaptatif effectué par ordinateur. Des recherches indiquent que quand le format et les méthodes d'exécution d'un examen changent, on peut s'attendre à une diminution temporaire des résultats des candidats.
Nous vous avons fourni des données auxquelles nous ferons référence au cours de notre exposé.
Si vous regardez le premier tableau dans le document d'information, il fait état du taux de réussite à la première tentative pour les diplômés des programmes ontariens de formation d'infirmière autorisée lors de l'examen NCLEX. Vous remarquerez qu'en 2015, quand nous avons instauré le NCLEX, le taux de réussite à la première tentative a été de 69,4 %, alors qu'il était de 84,7 % en 2014 avec l'examen précédent. En 2016, le taux de réussite était de 80,3 % et est donc revenu à l'intérieur des fourchettes observées précédemment. Voilà qui montre que le phénomène auquel nous nous attendions en raison des recherches s'est concrétisé.
Cependant, quand on s'intéresse à la langue dans laquelle l'examen a été effectué, on observe un écart substantiel entre les taux de réussite des diplômés qui ont fait l'examen en anglais et ceux qui l'ont effectué en français. En 2015, 34,8 % des candidats qui ont effectué l'examen NCLEX en français l'ont réussi. Ce taux s'est légèrement accru en 2016, s'établissant à 37,5 %. Voilà qui nous préoccupe, et il semble que le problème soit aggravé par un certain nombre d'autres facteurs. Par le passé, nous avons remarqué que les taux de réussite à la première tentative sont plus bas pour les candidats qui effectuent l'examen en français. Comme vous pouvez le voir, de 2011 à 2014, lorsque les candidats faisaient l'examen d'admission précédent, il existe une différence marquée entre les taux de réussite dans trois de ces quatre années.
Nous remarquons également que le pourcentage de diplômés des programmes offerts en français qui font l'examen en français est plus bas. Avant 2015, la majorité des diplômés ayant suivi des programmes en français effectuaient l'examen d'admission en français, mais depuis 2015, la majorité d'entre eux choisissent de le faire en anglais. Il est donc difficile d'avoir une idée claire des taux de réussite de ces diplômés à l'examen.
Nous avons donc examiné le rendement global des diplômés des programmes offerts en français lors de l'examen NCLEX. L'information se trouve dans le deuxième tableau du document. On peut constater qu'en 2015, le taux de réussite moyen des diplômés des programmes offerts en français à la première tentative était inférieur à la moyenne de tous les programmes. En 2016, toutefois, ce taux était de 78,3 %, soit pratiquement le même que celui de tous les programmes.
L'autre fait intéressant que nous avons remarqué, c'est que le taux de réussite à la première tentative des diplômés des programmes offerts en français qui font l'examen en anglais est supérieur au taux de réussite global en Ontario.
Nous avons également comparé les taux d'admission des diplômés des programmes offerts en français avec ceux des diplômés des programmes offerts en anglais, et nous n'avons observé aucune différence entre ces groupes. Voilà qui montre qu'à court terme, la situation n'a eu aucune influence sur la disponibilité d'infirmières francophones dans le système de soins de santé de l'Ontario depuis l'instauration de l'examen NCLEX.
Pour confirmer notre confiance à l'égard de la traduction de l'examen, nous avons mené un examen exhaustif du processus du fournisseur de l'examen. Les résultats ont réaffirmé la rigueur de la traduction. En outre, le bureau de la traduction de Service Nouveau-Brunswick a réalisé un examen indépendant de la traduction de l'examen et a conclu que la traduction du contenu du message était juste. La personne qui a effectué cet examen a indiqué que la qualité de la traduction française de l'examen qu'elle avait étudié était satisfaisante, puisqu'elle ne contenait aucune erreur grave au chapitre du sens ou de la langue, et que la qualité du français était adéquate.
Cela étant dit, nous continuons de nous préoccuper des faibles taux de réussite des candidats qui choisissent de faire l'examen en français. Cette année, nous rencontrerons des enseignants de nos programmes d'éducation offerts en français pour discuter de la question et pour mieux comprendre la situation. Nous réaliserons aussi une recherche sur les diplômés des programmes offerts en français qui se soumettent à l'examen pour mieux comprendre comment les choses se passent au cours de l'examen et ce qui influence leur choix de langue. Nous comptons notamment nous intéresser au mélange de cours anglais et français offerts dans les programmes, à l'offre de stages cliniques en langue française en Ontario et aux compétences linguistiques de la cohorte.
Comme je l'ai déjà indiqué, l'Ordre continue de s'intéresser aux faibles taux de réussite des candidats qui choisissent de faire l'examen en français. Je tiens à souligner que cette situation n'a pas entraîné de réduction de la disponibilité d'infirmières francophones dans le système de soins de santé de l'Ontario, et l'Ordre reste déterminé à veiller à ce que la population de la province continue d'avoir accès à des services de soins infirmiers dans les deux langues officielles.
Merci.
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Monsieur le président, distingués membres du Comité, merci de nous avoir invités aujourd'hui. Je m'appelle Laurie Janes et je représente l'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick, ou AIINB, qui est une association, ainsi que l'organisme de réglementation de la profession d'infirmière.
Nous témoignons aujourd'hui pour traiter de la prestation continue de soins infirmiers sécuritaires et compétents au Nouveau-Brunswick, ainsi que de l'adoption d'un nouvel examen et de son incidence dans notre province.
Le Nouveau-Brunswick est une petite province rurale qui ne compte que 750 000 habitants, dont environ 30 % sont francophones. La province a deux régions sanitaires; l'une offre des services principalement en anglais et l'autre, des services surtout en français. La région sanitaire francophone est le seul système de soins de santé qui offre tous les services uniquement en français à l'extérieur du Québec. Un grand nombre des personnes que sert cette autorité sanitaire ne s'expriment qu'en français.
Le mandat de l'Association consiste à réglementer les infirmières afin qu'elles offrent des soins de santé sécuritaires, compétents et éthiques dans l'intérêt de la population. Nous considérons que la sécurité est optimisée quand les infirmières peuvent fournir des services dans la langue de choix du patient. En fait, le choix de la langue est un droit au Nouveau-Brunswick, la seule province bilingue du Canada. Tous les services publics doivent être bilingues et donc être offerts en français ou en anglais, selon ce que les patients et leurs familles souhaitent.
En 2012, l'ensemble des provinces et des territoires du Canada ont signé un contrat afin d'adopter un nouvel examen d'admission dont les résultats détermineraient si les diplômés des programmes de soins infirmiers pourraient travailler à titre d'infirmières autorisées. L'AIINB, qui représente la seule province bilingue, a réclamé le soutien des ressources francophones dans le cadre du processus de demande de propositions relatif au nouvel examen. Pourtant, quand le fournisseur de l'examen a été nommé, le contrat proposé ne prévoyait aucune ressource francophone.
En 2015, la première année au cours de laquelle on a fait passer l'examen au Canada, le fournisseur de l'examen a publié une nouvelle ressource en ligne à l'intention des étudiants en soins infirmiers. C'est un étudiant se préparant au nouvel examen qui nous a avisés que cette ressource était publiée en anglais seulement. Plus tard, en septembre 2015, l'AIINB a appris qu'à peine 32 % des diplômés francophones avaient réussi l'examen. Les résultats ne se sont pas beaucoup améliorés en 2016.
Une ressource était offerte aux étudiants francophones pour l'examen précédent. Certaines ressources sont proposées actuellement. Selon nous, le problème ne vient pas des ressources ou de la traduction.
Aux États-Unis, on fait passer l'examen NCLEX, comme s'appelle le nouvel examen, depuis 20 ans. Or, il ne manque pas de preuves publiées indiquant clairement que les candidats non anglophones et membres des groupes minoritaires ne le réussissent pas aussi bien que ceux dont l'anglais est la langue première. En outre, d'autres documents montrent que ces mêmes étudiants sont incapables d'obtenir un diplôme ou abandonnent en raison des politiques de progression mises en oeuvre dans le cadre des programmes de sciences infirmières, qui doivent atteindre des objectifs de rendement pour pouvoir continuer de recevoir du financement.
La population du Nouveau-Brunswick est petite pour y trouver des infirmières francophones. Pour cette raison, les étudiants francophones pourraient réussir, ou non, à satisfaire aux critères d'admission pour entrer à l'université. En outre, ils doivent suivre une formation linguistique tout en étudiant les matières exigées pour obtenir un diplôme en sciences infirmières. Ainsi, certains diplômés n'ont pas les notes nécessaires pour réussir l'examen NCLEX. C'est notamment le cas des étudiants non anglophones et membres des groupes minoritaires aux États-Unis.
Le Nouveau-Brunswick a entendu dire que dans certaines régions du pays, les diplômés en sciences infirmières autochtones éprouvent également de la difficulté à réussir l'examen NCLEX. Voilà qui soulève des préoccupations dans un pays favorable à la diversité.
Nous avons étudié intensément la possibilité que le Québec nous permette de nous associer à lui. L’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec est cependant en train d'effectuer une transition au sujet de son examen. Il compte adopter un examen informatisé et examine actuellement un modèle différent d'examen.
[Traduction]
Il nous a semblé que cette solution pourrait nous convenir, puisque l'examen et les ressources sont offerts en anglais et en français. Il existe toutefois des obstacles législatifs, et comme l'Ordre est en transition, il ne peut pas nous aider pour l'instant. Peut-être l'occasion de collaborer se présentera-t-elle dans l'avenir, mais pas pour les trois prochaines années.
Les résultats de l'examen ont de graves conséquences au Nouveau-Brunswick, un grand nombre de diplômés francophones devant faire l'examen à plusieurs reprises pour atteindre la note de passage. Voilà qui leur impose un fardeau économique substantiel. Qui plus est, peu de ressources francophones se comparent aux ressources commerciales offertes par le fournisseur actuel de l'examen.
Notre région sanitaire francophone s'inquiète de la future force infirmière francophone. Nous savons que cette année, 12 diplômés en sciences infirmières ne pourront plus contribuer à la prestation de soins infirmiers dans le Nord de la province s'ils ne réussissent pas l'examen à la fin du mois. Nous sommes très préoccupés.
L'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick considère qu'il faut évaluer les connaissances et les compétences en sciences infirmières pour assurer la prestation de soins infirmiers sécuritaires, compétents et éthiques. Cela s'inscrit dans son mandat. Nous sommes cependant troublés par les conséquences du nouvel examen au Canada, particulièrement au Nouveau-Brunswick.
En conclusion, donc, l'AIINB présenterait trois demandes au Comité.
Nous lui demandons d'abord de prodiguer des recommandations et du soutien afin que le fournisseur offre immédiatement des ressources d'étude en français. Nous réclamons qu'il le fasse depuis deux ans.
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Merci d'être venu participer à cette discussion avec nous.
De toute évidence, vous êtes ici parce que le gouvernement, vous le savez peut-être, finance et subventionne certains programmes pour offrir de l'éducation en français dans le domaine des soins de santé au Canada.
Nous avons eu vent de ce problème, et vous en avez entendu parler avant de venir ici. Le rapport est accablant. Certaines personnes se sont adressées à nous pour nous dire que cette situation nouvelle était extrêmement préoccupante.
Malheureusement, j'entends deux avis différents. Monsieur Knowles, vous nous dites que c'est effectivement un problème que vous étudierez, mais que vous ne le jugez pas urgent. Pour sa part, Mme Janes dit que son groupe a une recommandation et réclame de l'aide. Voilà les deux messages que j'entends.
Monsieur Knowles, je pense que vous avez affirmé que la population aura encore accès à des infirmières francophones. Ces dernières sont peut-être essentiellement formées, mais ne passeront pas l'examen. C'est en quelque sorte ce que vous nous dites.
C'est quelque peu difficile pour nous et certainement pour moi. Comme vous pouvez le constater, je m'exprime en anglais. Je suis francophone, mais je peux travailler en anglais également. Cela étant dit, ce n'est pas la même chose pour ceux qui ont besoin de services en français offerts par des francophones. Je suis un avocat francophone. Si je n'avais pas étudié en français, je n'aurais pas pu fournir des services adéquats dans cette langue et j'aurais probablement travaillé en anglais la plupart du temps. Il nous est donc très difficile à accepter de vous entendre affirmer qu'en dépit de la situation, les francophones peuvent encore fournir des services en français.
Vous avez entendu la recommandation de Mme Janes. Serait-il possible que l'Ontario... Je sais que vous dites souhaiter examiner la question davantage, mais compte tenu de ce que vous avez entendu aujourd'hui et de nos préoccupations, que pensez-vous du fait qu'on finance les établissements et attende de voir ce que cela donnera au bout du compte? D'après les propos que vous avez entendus aujourd'hui, y a-t-il quelque chose que nous puissions faire pour améliorer la situation actuelle et juguler la crise à laquelle nous sommes confrontés?
:
Merci, monsieur le président.
Le Comité permanent des langues officielles est déjà très préoccupé par la situation des services de santé offerts dans les communautés linguistiques en situation minoritaire partout au Canada, soit les services de santé en français hors Québec et les services de santé en anglais au Québec. Voilà que nous apprenons qu'un problème nuirait encore plus à l'offre de services en français partout au Canada.
Nous comprenons qu'il y ait un problème en Ontario, mais il n'y a pas que l'Ontario. Il faut penser à toutes les autres provinces, également. Il n'y a pas que l'Ontario qui offre des programmes en français en sciences infirmières. Je crois savoir que cette formation est offerte dans quatre ou cinq universités.
Aujourd'hui, nous avons reçu des témoins venant de plusieurs provinces où l'on offre de la formation en sciences infirmières en français. Ceux-ci nous ont fait une seule recommandation. Je pensais qu'ils auraient eu deux, trois, quatre ou cinq recommandations à nous proposer, mais non, ils ont fait une seule recommandation, soit celle de revenir à un examen canadien bilingue. Les témoins ont affirmé que cette recommandation précise permettrait de régler les autres problèmes, notamment le manque de ressources préparatoires en français.
Le Comité permanent des langues officielles est très préoccupé par cette situation. Nous venons tout juste de publier un rapport sur le nouveau plan d'action pour les langues officielles, dans lequel la santé occupe une place très importante. Il est certain que le gouvernement en place va vouloir s'assurer que les services de santé offerts dans la langue de la minorité ne seront pas diminués, mais qu'au contraire ils seront augmentés.
À la lumière de ce que je viens de vous dire, vous est-il possible de reconsidérer votre décision d'avoir adopté un examen des États-Unis, et plutôt revenir à un examen canadien bilingue? On nous a dit qu'il était possible de le faire, que la science existait et que nous avions les compétences pour le faire.
J'aimerais entendre l'opinion de chacun d'entre vous à ce sujet.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de votre témoignage, monsieur Knowles.
Madame Janes, merci de nous avoir éclairés sur la position du Nouveau-Brunswick.
Monsieur Knowles, je m'excuse, mais la naïveté avec laquelle vous abordez cette question me laisse très perplexe. Je vous fais une petite parenthèse.
Je suis avocat de profession. J'ai eu à pratiquer le droit avec des collègues français de France. Même si nous échangions sur un même document, que nous voulions atteindre le même objectif juridique et que nous parlions la même langue, nous ne lisions pas la même chose de la même manière pour arriver au même but. Pourtant, je parle très bien français et toute mon éducation a été faite en français, tout comme c'était le cas de l'avocat de France. Malgré cela, il fallait écrire de différentes façons pour arriver au même but.
Comprenez-vous cela? Comprenez-vous ce que je vous dis? Vous savez ce que je veux dire. Je veux parler des nuances.
Vous persistez à dire que l'examen n'est pas un examen américain à proprement parler. Pourtant, ce n'est pas ce que nous ont dit tous les témoins qui ont comparu au Comité en provenance d'établissements d'enseignement qui forment les gens au Canada pour devenir des infirmiers et des infirmières. Ils nous ont dit que c'était un test américain, nonobstant ce que vous dites.
Bien sûr, la langue des États-Unis, c'est l'anglais. Cependant, je reviens à mon exemple des deux avocats qui parlent français, mais qui proviennent de deux pays différents.
Pouvez-vous concevoir qu'il soit possible que le contenu écrit en anglais américain ne reflète pas exactement la terminologie utilisée en anglais canadien ou en français canadien dans le domaine des sciences infirmières? Concevez-vous que cela soit possible? Répondez seulement par oui ou non, car il me reste peu de temps.