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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 139 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 9 avril 2019

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Français]

    Bonjour, chers collègues. Je salue également les témoins qui sont avec nous ce matin.
    Comme vous le savez, des votes sont prévus et nous devons résoudre des problèmes d'ordre technique.
    Monsieur Tremblay, madame O'Donnell, je suis désolé de ces inconvénients. J'ai besoin d'une réponse rapide de la part de mes collègues du Comité.
    Nous avons deux choix: accorder d'abord dix minutes à M. Tremblay, étant donné qu'il est le premier sur la liste, et dix minutes à Mme O'Donnell à notre retour. Nous pourrions aussi accorder maintenant cinq minutes à chacun des deux témoins. Je ne veux pas utiliser 20 minutes, parce qu'il ne restera que dix minutes pour aller à la Chambre des communes, ce qui est peut-être trop court pour certaines personnes. Il n'est pas question de privilège, ici; je veux simplement m'assurer que tout le monde se rend à temps.
    Comment voulez-vous procéder?
    Nous pourrions demander aux témoins ce qui leur convient le mieux.
    Oui, c'est une bonne idée. Madame O'Donnell, monsieur Tremblay, qu'est-ce qui vous convient le mieux?
    Qu'en pensez-vous, madame O'Donnell?

[Traduction]

    Bonjour. J'ai besoin de huit minutes pour présenter mes observations liminaires, et je préférerais les faire d'une traite.

[Français]

    D'accord. D'après ce que je comprends, Mme O'Donnell voudrait utiliser son temps de parole au complet, soit dix minutes.
    Monsieur Tremblay, nous allons commencer par vous. Vous avez la parole pour dix minutes. Nous allons ensuite suspendre la réunion pour que mes collègues et moi puissions nous rendre à la Chambre pour voter, puis nous reviendrons ici.
    Monsieur Rioux, voulez-vous faire un commentaire?
     Mme O'Donnell n'est peut-être pas disponible pendant tout ce temps. Si c'est le cas, nous pourrions commencer par elle.
    Monsieur Tremblay, pouvez-vous rester ici jusqu'à midi?
    Madame O'Donnell, êtes-vous libre de midi à 13 heures?
    De midi à 13 heures?
    Oui, je peux l'être.
    Merci beaucoup.
    Conformément à l'article 108(3)f) du Règlement, nous poursuivons l'étude de la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Nous recevons aujourd'hui M. Michel Tremblay, qui est directeur général de la Société Santé en français, ou SSF, et, par vidéoconférence à partir de Montréal, Mme Lorraine O'Donnell, qui est coordonnatrice-chercheuse au Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise, de l'Université Concordia.
    Avant de continuer, j'aimerais savoir si nous avons le consentement unanime pour procéder de la sorte, selon ce que nous venons de convenir?
    Oui? Merci.
    Monsieur Tremblay, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Mesdames et messieurs, bonjour.
    Au nom de la présidente du conseil d'administration de la Société Santé en français, la Dre Anne Leis, je vous remercie de votre invitation à comparaître devant vous.
    Créée en 2002, la Société Santé en français est un organisme composé d'un secrétariat et de 16 réseaux provinciaux et territoriaux dont l'objectif est d'augmenter l'accès aux services de santé en français au sein des communautés francophones en situation minoritaire partout au Canada.
    La Société et les réseaux ont réussi à bâtir et à maintenir des partenariats et des liens solides avec les décideurs politiques, les professionnels de la santé, les gestionnaires des services de santé, les établissements de formation postsecondaire et les communautés. De cette façon, les besoins en santé de nos communautés sont partout sur le radar.
    Durant les rencontres de consultation en vue du renouvellement du Plan d'action pour les langues officielles, les Canadiennes et les Canadiens ont mentionné partout que l'accès à la santé dans leur langue est une priorité pour leur communauté et pour eux-mêmes. On peut le comprendre facilement. La langue est un élément essentiel en matière de services de santé sécuritaires et de qualité, et elle est aussi un déterminant de la santé.
    Pourquoi est-ce important? Les barrières linguistiques sont fréquemment la cause d'erreurs de compréhension ou de diagnostic, et elles peuvent être une source de complications. Cela entraîne des coûts additionnels pour les systèmes de santé et crée chez les patients un sentiment d'impuissance, de stress et d'insatisfaction puisqu'ils ont l'impression d'être incompris par les professionnels de la santé.
    La santé en français, c'est avant tout un service centré sur l'individu. Ce sont des personnes comme vous et moi qui, particulièrement quand elles sont malades et vulnérables, ont besoin de services dans leur langue. Voici quelques exemples de situations réelles qui se sont présentées dans le cadre de notre travail.
    Un enfant de 7 ans ne comprenait pas l'anglais et devait recevoir des traitements de chimiothérapie sans avoir la possibilité de communiquer directement dans sa langue avec l'équipe médicale.
    Une adolescente atteinte de troubles de santé mentale devait mettre en parole dans sa langue seconde ce qui la hantait ou trouver les bons mots pour exprimer ce qu'elle ressentait.
    Des aînés francophones qui avaient vécu toute leur vie en français ou qui avaient perdu l'usage de leur langue seconde devaient se résigner à terminer leurs jours dans un système de santé où les professionnels étaient incapables de leur parler dans leur langue.
    Un ingénieur venant du Québec, déployé quelque part en Nouvelle-Écosse, s'était présenté à l'urgence d'un hôpital avec son épouse enceinte qui souffrait de douleur aiguë. Ils étaient tous les deux en état de panique, incapables de trouver les mots en anglais pour communiquer avec les professionnels.
    Souvent, les gens retardent leur visite ou ne font pas appel aux services de santé. Ces barrières occasionnent aussi du stress pour les professionnels, qui ne peuvent communiquer efficacement avec leurs patients pour leur offrir des services de qualité. Le message ici est bien simple: quand on est malade et vulnérable, on n'est pas bilingue.
    J'en viens maintenant à la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Conjointement avec le Consortium national de formation en santé, ou CNFS, nous avons produit, avec l'appui d'un conseiller juridique, un argumentaire concernant la modernisation de la Loi et son incidence sur la santé. En décembre, le CNFS et notre organisme avons finalisé le document, et nous vous avons envoyé à chacun une copie.
    Nous avons aussi appuyé nos collègues de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, ou FCFA, dans l'élaboration d'un modèle de projet de loi pour modifier la Loi sur les langues officielles. Voici comment la loi modernisée pourrait favoriser l'augmentation de l'accessibilité à la santé en français.
    Nous appuyons la recommandation suivante de la FCFA:
Tout accord entre le gouvernement fédéral et une province prévoyant un transfert de fonds doit contenir une clause linguistique exécutoire favorisant la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne et visant l'épanouissement et le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    L'épanouissement et le développement de nos communautés ne peuvent se faire sans un accès à des services de santé en français. Par exemple, lors des récentes négociations entre le fédéral et les provinces et territoires sur les accords en matière de soins de santé mentale, de services à domicile et de soins palliatifs et de fin de vie, le CNFS et la Société ont conjointement recommandé à Santé Canada d'intégrer des mesures de rendement sur les obligations envers nos communautés, entre autres parce que ces domaines sont particulièrement névralgiques quant aux enjeux liés à la communication et à la langue.
    Dans le cadre juridique actuel, la prestation de ces services, rendue possible avec de l'argent venant du fédéral, ne se fera dans les deux langues officielles que si la province le désire, et vous savez comme moi que cela n'arrivera pas, dans la majorité des cas.
    La modernisation de la Loi sur les langues officielles devrait rendre obligatoire et non négociable la dualité linguistique dans tous les accords de transfert, y compris ceux liés au domaine de la santé.
    En ce qui concerne le domaine de la santé spécifiquement, le gouvernement fédéral possède déjà un pouvoir de dépenser dans les sphères d'activité de son choix et peut rattacher des conditions aux subventions, notamment des conditions qui relèveraient de la compétence des provinces et des territoires.
(1115)
    Dans le domaine de la santé, il y a un instrument qui s'appelle la Loi canadienne sur la santé. Cette loi reconnaît la compétence des provinces et territoires en matière de santé. Elle établit cinq conditions d'octroi quant au versement d'une contribution. Ces conditions sont la gestion publique, l'intégralité, l'universalité, la transférabilité et l'accessibilité.
    La condition d'universalité suppose que cent pour cent des personnes assurées d'une province ou d'un territoire ait droit aux services de santé assurés prévus selon des modalités uniformes.
    La condition d'accessibilité suppose que le régime provincial ou territorial offre des services de santé assurés selon des modalités uniformes et ne fasse pas obstacle, directement ou indirectement, à un accès satisfaisant à ces services. Cela s'applique également aux francophones en situation minoritaire.
    En conformité avec le projet de loi proposé par la FCFA, nous recommandons que la modernisation de la Loi sur les langues officielles inclue un amendement à la Loi canadienne sur la santé, soit l'ajout d'une sixième condition, la dualité linguistique. Cette condition suppose que les provinces et territoires élaborent un programme d'accès aux services de santé pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire en tenant compte des ressources humaines, matérielles et financières de chaque établissement ainsi que des caractéristiques socioculturelles et linguistiques de la population desservie.
    La Loi oblige les institutions fédérales à prendre des mesures positives pour mettre en oeuvre l'engagement du gouvernement consistant à favoriser l’épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu’à promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.
    Nous croyons que la Loi doit être modernisée afin de veiller à ce que les obligations fédérales en matière de santé soient respectées intégralement dans les accords de contribution conclus avec les organismes nationaux, notamment l'Institut canadien d'information sur la santé, l'Institut canadien pour la sécurité des patients, la Commission de la santé mentale du Canada et plusieurs autres.
    Comme vous le savez sans doute, pour effectuer de vrais changements, on a besoin de données probantes. Celles-ci sont nécessaires pour mesurer les résultats et les progrès. On ne peut changer que ce qu'on peut mesurer. Or la collecte de données probantes relève de plusieurs organismes. La Loi devrait contraindre les institutions fédérales à recueillir des données en matière de langues officielles et veiller à ce que ces données fassent l'objet d'analyses utiles aux communautés. Je pense, par exemple, à Statistique Canada, à Santé Canada, à l'Institut canadien d'information sur la santé, à l'Agence de la santé publique du Canada, et j'en passe.
    De plus, le gouvernement fédéral pourrait favoriser la collecte des données linguistiques par les provinces et territoires, et offrir des incitatifs financiers aux provinces et territoires pour que la variable linguistique soit intégrée à leur carte santé.
    Nous savons, étant donné la nature de notre travail, que la compréhension de la Loi et des responsabilités qui en découlent est souvent partielle ou erronée. La responsabilité individuelle et l'application de la Loi en vase clos rendent très difficile la mise en place de mesures transversales qui permettraient d'atteindre les objectifs de la Loi.
(1120)
    Il vous reste une minute, monsieur Tremblay.
    D'accord.
    La modernisation de la Loi sur les langues officielles doit donc conférer au gouvernement fédéral un rôle clair, c'est-à-dire qu'il devrait prendre toutes les mesures nécessaires et d'en faire la promotion au sein de son propre appareil.
    En conclusion, Santé Canada dépend d'organisations comme la Société et le CNFS, pour respecter ses obligations en vertu de la Loi. La Société et ses réseaux veulent continuer à exercer leur mandat auprès de nos partenaires pour qu'ils acquièrent les connaissances, les compétences, les outils et le soutien nécessaires à la prise de décisions et de mesures concrètes pour qu'ils puissent répondre aux besoins de nos communautés.
    Nous voulons poursuivre notre mission pour que les communautés aient un meilleur accès aux services de santé en français et ainsi contribuer à la vitalité de nos communautés. Nous avons besoin du leadership du gouvernement fédéral et d'une loi sur les langues officielles qui soit solide.
    Pendant trop longtemps, les francophones en situation minoritaire n'ont pas eu accès à des services d'une qualité équivalente à celle des services offerts à la communauté majoritaire, et ils ont cessé de les demander. Pourtant, il y a encore de très grands besoins. Il reste encore beaucoup de choses à accomplir et un énorme rattrapage à faire.
    Je vous remercie de nous avoir permis de vous présenter notre perspective et nos recommandations dans le cadre de l'étude de la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie, monsieur Tremblay, de votre présentation.
    J'aimerais rappeler à tout le monde, et à Mme O'Donnell, que nous devons maintenant nous rendre à la Chambre pour aller voter. Ce sont les aléas de la vie parlementaire, mais nous aimons cela. Je vous remercie de votre compréhension.
    Nous allons revenir ici après la tenue du vote. De midi à 12 h 10, madame O'Donnell, vous pourrez faire votre présentation. À 12 h 50, nous allons tout arrêter parce que les membres de notre comité doivent vraiment se rencontrer à huis clos pour régler certaines questions à venir.
    La séance est suspendue.
(1120)

(1200)
     Sans plus tarder, nous allons poursuivre avec Mme O'Donnell, de l'Université Concordia.
    Comme prévu, madame, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous.
    Messieurs Paradis, Clarke, Choquette et membres du Comité, bonjour.

[Traduction]

    Le Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise, ou QUESCREN, est né en 2008 d'une initiative entreprise en collaboration par l'Université Concordia, l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques et le ministère du Patrimoine canadien. Aujourd'hui, le Secrétariat aux relations avec les Québécois d'expression anglaise du gouvernement du Québec offre également son soutien.
    Le QUESCREN est un réseau coopératif d'institutions, de chercheurs et d'intervenants promouvant la compréhension et l'épanouissement des communautés minoritaires anglophones du Québec par la recherche, la formation, la mobilisation du savoir, le réseautage et la sensibilisation.
    Je vous remercie de m'avoir invitée à représenter le QUESCREN. Selon ce que je crois comprendre, dans le cadre de son étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles, votre comité met l'accent sur la partie VII ainsi que sur le respect de la Loi par les Canadiens et l'incidence de la Loi sur ces mêmes Canadiens. Mes commentaires porteront sur le premier et le troisième de ces éléments.
    Dans la partie VII, le gouvernement canadien s'engage à favoriser l'épanouissement des communautés francophones et anglophones en situation minoritaire du Canada et à appuyer leur développement.
    Concernant la vitalité de la communauté, M. Richard Bourhis, un chercheur et un membre du QUESCREN, a aidé à mettre au point le concept. Il a noté que plus un groupe fait preuve de vitalité, plus les chances sont grandes qu'il réussisse à survivre en tant que communauté linguistique distincte.
(1205)
    Les chercheurs ont recours à un cadre d'évaluation de la vitalité pour étudier des facteurs comme la démographie et le soutien institutionnel. Des études montrent que les communautés anglophones du Québec manquent de vitalité dans ces domaines et présentent des taux d'émigration, de sous-emploi et de pauvreté importants. À mon avis, le concept de vitalité est utile et devrait être conservé dans la nouvelle incarnation de la Loi. Je propose, cependant, quelques changements.
    Premièrement, la Loi ne donne pas de définition du terme « vitalité » et n'explique pas comment le gouvernement améliorerait le concept. Il serait utile que cela soit précisé dans la Loi modernisée.
    Deuxièmement, la Loi ne fait pas référence à des concepts utilisés dans d'autres recherches qui donnent davantage d'information sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Par exemple, des sociolinguistes et des chercheurs en ethnologie critiques comme Diane Gérin-Lajoie, une autre chercheuse du QUESCREN, montrent que l'identité des communautés linguistiques minoritaires évolue et se rattache à d'autres identités comme les identités bilingues ou multilingues.
    D'autres chercheurs utilisent des concepts intersectionnels et de minorités multiples pour expliquer que l'on peut être membre d'une minorité linguistique et de groupes raciaux ou immigrants, et aussi que les communautés linguistiques minoritaires ont leurs propres hiérarchies en matière de race et de statut d'immigrant. Par exemple, Yasmeen Abu-Laban et Claude Couture, de l'Université de l'Alberta, soutiennent que faire référence à ce qu'ils appellent « le français/l'anglais » relève de la pensée binaire, ce qu'ils considèrent utile pour l'analyse, mais qui a pour effet d'atténuer la « complexité et les nuances » nécessaires à la bonne compréhension des minorités linguistiques, selon eux.
    Il serait intéressant que la Loi modernisée reconnaisse la complexité et la diversité des communautés de langues officielles. Leurs populations ont de multiples identités et peuvent être membres de plus d'une minorité. À mon avis, les politiques et les programmes mis en oeuvre dans le cadre de la Loi devraient prendre ces facteurs en compte.
    Toujours relativement à la partie VII, si la communauté de langue officielle du Québec partage des caractéristiques avec les communautés francophones, elle est également différente. Sa population est composée de groupes régionaux et ethnoculturels uniques et diversifiés.
    Une loi modernisée devrait, à mon avis, continuer à appuyer la communauté de langue officielle en situation minoritaire tout en reconnaissant aussi explicitement le caractère distinctif et l'importance égale des deux communautés linguistiques minoritaires et en tenant compte de leurs besoins et profils distincts. Pour les communautés anglophones, cela peut vouloir dire s'attaquer aux problèmes de vitalité et aux difficultés auxquels doivent faire face les minorités multiples vulnérables et enrichir en parallèle le potentiel unique des communautés en ce qui concerne, par exemple, leur tradition d'accueil des immigrants.
    Je ne veux pas donner l'impression que le Québec anglophone est unique par son hétérogénéité ni que la Loi devrait être formulée d'une façon qui traite différemment les communautés linguistiques minoritaires. Chacune des communautés de langue officielle en situation minoritaire du Canada est face à des défis uniques, et c'est pourquoi il est vraiment essentiel de consulter pour mettre en oeuvre des mesures positives qui favorisent leur épanouissement individuel.
    Mes brefs commentaires porteront maintenant non plus sur la partie VII, mais sur l'incidence de la loi sur les Canadiens. Le Québec, comme vous le savez, a sa propre loi sur la langue, la Charte de la langue française. À ma connaissance, au Québec anglais, elle est beaucoup mieux connue que la Loi sur les langues officielles. Paul Zanazanian, chercheur et membre du QUESCREN, a étudié la mémoire historique commune de notre communauté sur le Québec. Il considère l'adoption de la Charte, et non celle de la Loi, comme un événement clé dans cette mémoire partagée. De plus, la recherche sur le Québec anglophone a accordé beaucoup plus d'attention à la Charte. Une recherche bibliographique menée par mot-clé répertorie plus de 450 publications sur la Charte et environ cinq seulement sur la Loi fédérale.
(1210)
    Je me demande dans quelle mesure les autres Québécois connaissent la Loi. Dans le cadre de la modernisation de la Loi, il pourrait être utile que le gouvernement détermine dans quelle mesure les Québécois d'expression anglaise, voire tous les Québécois connaissent la Loi. Et si, comme je le pense, ils ne la connaissent pas bien, le gouvernement devrait réfléchir aux conséquences que cela pourrait avoir sur la promotion et la mise en oeuvre des politiques.
    Un autre aspect de l'incidence de la Loi sur les Canadiens est le sentiment d'inclusion et d'exclusion. D'éminents Canadiens se sont penchés sur la question. Par exemple, Mme Abu-Laban et M. Couture, déjà cités, ont fait observer que, du point de vue des peuples autochtones — et de la théorie postcoloniale —, il y a beaucoup à dire sur le concept des « deux peuples fondateurs ». De même, un commentateur politique a récemment parlé des Canadiens autochtones et immigrants comme de groupes « dont les expériences linguistiques se produisent à l'extérieur » de ce qu'il appelle « ces cadres obsolètes » de la Loi sur les langues officielles. Il demande au gouvernement de protéger les langues de ces groupes, et pas seulement les langues officielles.
     Mes collègues du secrétariat du QUESCREN et moi-même sommes convaincus que la Loi et sa reconnaissance des communautés de langue officielle en situation minoritaire demeurent pertinentes. Cependant, nous croyons qu'il est important d'être à l'écoute des critiques. Le processus de modernisation de la Loi pourrait-il aussi, d'une façon ou d'une autre, prendre en compte les préoccupations de ces autres populations ou y répondre? Par exemple, je me demande quel sera le lien entre la Loi renouvelée et la nouvelle Loi sur les langues autochtones et, en particulier, quelles seront les conséquences pour les nombreux Autochtones anglophones du Québec.
     En conclusion, idéalement, la modernisation de la Loi sur les langues officielles aidera à maintenir la cohésion sociale au Canada à une époque de changements sociaux. Je conclurai, en m'appuyant sur les enseignements que j'ai tirés de mon expérience au QUESCREN, que la modernisation du processus devrait se faire selon les principes généraux suivants: reconnaître l'importance de la diversité, de l'inclusivité et du rapprochement entre les différentes communautés linguistiques et culturelles; avoir un dialogue respectueux; suivre un processus décisionnel fondé sur des données probantes; utiliser la recherche axée sur différentes méthodes pour saisir les nuances et comprendre la complexité.
    Je terminerai mes remarques en invitant tous les membres du Comité à assister à une conférence que nous coorganisons. Elle s'intitule « 50 ans de la Loi sur les langues officielles » et elle se tiendra à Gatineau les 29 et 30 mai.
    Merci de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Thank you.
    Merci beaucoup, madame O'Donnell. Vous avez pu faire toutes vos observations préliminaires. Vous possédez une profonde connaissance de ces questions qui intéressent le Comité.
    Madame Boucher va commencer la période de questions. Elle a six minutes.

[Français]

    Bonjour, monsieur Tremblay et madame O'Donnell.

[Traduction]

    Merci d'être avec nous aujourd'hui.

[Français]

    J'ai une question pour vous, monsieur Tremblay.
    Dans mon ancienne vie, quand j'étais au gouvernement, en 2006, je m'occupais du dossier de la santé en français. J'aimerais savoir si les choses ont changé à cet égard.
    Si oui, dans quel sens? Est-ce que la situation s'est améliorée?
    Si ce n'est pas le cas, quelles modifications souhaiteriez-vous voir apporter plus particulièrement à la Loi sur les langues officielles?
    Oui, il est évident que les choses ont changé depuis 2006. Les réseaux ont acquis de plus en plus de force, et de plus en plus de partenaires se sont ralliés autour d'eux.
     Nous venons de terminer une évaluation de la période allant de 2013 à 2018, à la suite de laquelle nous avons produit le document intitulé « Destination Santé 2018 ». Nous avons mené un sondage auprès de presque 200 personnes et tenu des entrevues. Nous constatons qu'il y a eu des percées dans certains milieux en particulier.
    À l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, le système de santé prend en compte la variable linguistique sur la carte santé depuis 2016. C'est la première province au Canada à le faire. Cela va prendre cinq ans avant que tous les citoyens aient renouvelé leur carte, mais cela nous donne déjà accès à des données. Celles-ci nous permettent notamment de connaître les besoins particuliers des personnes âgées concernant les services à domicile. Il est en effet possible de voir qui en reçoit et qui n'en reçoit pas, et nous sommes en mesure de commencer à voir les secteurs où il y a des problèmes. C'est un domaine où il y a eu de grandes avancées.
    Au Manitoba, il y a eu la création d'un nouvel organisme de services de santé partagés. Nous travaillons maintenant avec cette province en ce qui a trait à la désignation de postes bilingues.
    Le CNFS offre toujours de la formation destinée aux professionnels de la santé dans les collèges et les universités de la francophonie canadienne. D'ailleurs, cinq collèges et universités viennent de se joindre au Consortium relativement à de la formation en français. Il y a des avancées partout.
(1215)
     D'accord. S'il y a eu des avancées, c'est qu'il vous reste encore des choses à faire.
    Que voudriez-vous voir inclus dans la nouvelle loi modernisée en ce qui concerne l'avenir?
    L'exemple que j'ai mentionné tout à l'heure est le meilleur que je puisse vous donner. Il y a deux ans, on a approuvé l'attribution de fonds s'élevant à 11 milliards de dollars, lesquels étaient destinés aux provinces et aux territoires pour les aider dans les domaines de la santé mentale, des soins à domicile et des soins palliatifs. L'Île-du-Prince-Édouard est la seule province à avoir accepté qu'une portion de ces fonds serve à améliorer l'accès aux services de santé des communautés francophones et acadienne. Aucune autre province n'a agi dans ce sens puisque c'était facultatif à l'époque.
    Si une partie de cet argent était utilisée pour augmenter l'accès à des services à domicile et pour favoriser des projets en santé mentale, cela aiderait les communautés francophones et acadienne.
    Notre rôle est d'appuyer les services de santé et de fournir des outils. Nous avons d'ailleurs créé une boîte à outils. Nous avons aussi collaboré avec Agrément Canada à l'élaboration d'une norme linguistique. Nous avons donc des outils qui permettent aux établissements des diverses provinces d'agir concernant les services en français.
    On parle beaucoup de santé mentale et des lacunes en santé. Nous le savons, le secteur de la santé, c'est un problème un peu partout au Canada.
    Le problème est-il plus grand au sein des communautés en situation minoritaire? Le défi est-il le même dans les communautés qui ne sont pas en situation minoritaire?
    Le problème est beaucoup plus grand. Il est difficile de trouver un médecin francophone ou bilingue. Quand un francophone arrive à l'urgence avec un enfant malade et qu'il n'y a pas de services en français, cela peut être pénible.
    Le problème se pose souvent en santé mentale également. Je n'en ai pas encore parlé, mais les militaires et leur famille peuvent vivre des difficultés de ce genre. Je l'ai vu en Alberta, par exemple. Le gouvernement canadien est censé offrir des services bilingues aux militaires, mais il ne peut pas donner tous les soins et les services sur la base militaire même. Il faut alors les envoyer dans un hôpital où il n'y a pas de services dans leur langue, comme à Edmonton. Le fait d'avoir à chercher ses mots dans une autre langue rend les choses difficiles, surtout si on souffre d'une maladie mentale.
    Il y a encore beaucoup de travail à faire. Il ne faut pas oublier que ce ne sont pas nos réseaux qui offrent les services. Notre rôle est d'appuyer les gouvernements provinciaux et les systèmes de santé qui fournissent les services en santé, de leur donner des outils et de les inciter à les utiliser.
    Selon vous, quelle serait la chose la plus importante que vous voudriez voir dans la nouvelle loi sur les langues officielles?
    Ce serait l'ajout d'une condition liée à la dualité linguistique dans la Loi canadienne sur la santé.
    Merci.
    Monsieur Samson, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Tremblay et madame O'Donnell, merci beaucoup de votre présentation.
    Très rapidement, je vais poser une question d'abord à Mme O'Donnell, puis une autre à M. Tremblay par la suite.

[Traduction]

    Vous avez fait des remarques de nature générale à propos des défis uniques que doivent relever les différentes communautés, francophones hors du Québec et anglophones au Québec, et de tout ce qui concerne les consultations. J'ai trouvé vos commentaires très intéressants — et peut-être que vous pourriez nous en dire plus à ce sujet — parce qu'ils semblent cadrer avec certains des commentaires qui ont été faits au cours des trois ou quatre derniers mois au sujet de la dualité linguistique et de la manière dont les Canadiens comprennent cette dualité linguistique.
    Vous semblez faire une distinction subtile, à savoir que les Québécois, même les Québécois anglophones, comprennent la loi 101, au Québec. Cela ne signifie pas qu'ils sont d'accord avec elle, mais ils en comprennent le principe et la raison d'être. Il en va de même pour la Charte des droits dans une certaine mesure, mais pas pour la Loi sur les langues officielles. C'est très intéressant parce qu'on peut dire la même chose des francophones, ou même des anglophones, partout au Canada. Je ne crois pas qu'ils comprennent pleinement la richesse et la force des langues officielles.
    Madame O'Donnell.
(1220)
    Je tiens à préciser que lorsque j'ai mentionné la Charte, je faisais référence à la Charte de la langue française. Je ne peux que répéter que cette loi est très importante et que mes collègues et moi en soutenons les grandes lignes.
    En ce qui concerne l'appui aux communautés de langue officielle en situation minoritaire et le principe de dualité, je voulais faire deux remarques. La première, c'est que la Charte de la langue française n'est pas aussi bien connue que la loi 101. Il y a beaucoup à faire pour que les gens comprennent les origines de la Charte.
    La deuxième, c'est que je connais très bien la minorité de langue officielle du Québec. Il s'agit d'une communauté très diverse, dont les membres parlent différentes langues, appartiennent à différentes cultures et à des minorités dites multiples. En raison de cette diversité, il se peut même que ces personnes ne connaissent pas la Loi ou qu'ils ne comprennent pas sa pertinence particulière en ce qui concerne leurs besoins.
    Je pense qu'il y a du travail à faire sur ces deux fronts.
    Tout à fait, et je crois que nous pourrons en tirer des leçons.

[Français]

    Merci, Mme O'Donnell.
    Monsieur Tremblay, je vais d'abord donner mon opinion.
    On ne dépense pas suffisamment de fonds pour faire de la recherche. La recherche est mon thème de la journée. Je crois que les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont vraiment besoin de la recherche afin de justifier la situation sur le terrain et de démontrer à quel point elles sont défavorisées et qu'elles continuent de souffrir. Cela est un constat général.
    En ce qui concerne le domaine de la santé, un journaliste, qui n'est pas loin de nous en ce moment, M. Vachet, a écrit un article qui s'intitule « La recherche en santé en français menacée ». Il énonce clairement qu'en août dernier, L’hon. Ginette Petitpas Taylor a annoncé un investissement de 378 millions de dollars destiné au financement de 405 projets et que seulement un projet en français a été approuvé. C'est très grave.
    Voici ce dont il est question. Un programme avait été mis en place par les libéraux en 2004, précisément pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Comme vous le savez bien, en 2012, le gouvernement Harper l'a aboli, ce qui est vraiment dommage parce que nous constatons maintenant les répercussions de ces compressions.
    Malgré tout cela, rien n'a changé encore, et les libéraux en acceptent la responsabilité aussi, pour le moment.
    Parlez-moi un peu de ce programme. Pourquoi était-il important pour faire avancer la santé en français au Canada?
    Ce programme appuyait les chercheurs pour qu'ils fassent des demandes en français et qu'il puisse y avoir un processus d'évaluation au cours duquel les enjeux étaient bien compris. Toutefois, le programme a été aboli.
    Depuis ce temps, comme vous l'avez très bien résumé, les chercheurs préfèrent faire leurs demandes en anglais, étant donné que l'évaluation est faite par les pairs, et qu'elle n'est pas toujours faite par les personnes qui comprennent les enjeux des communautés.
    Nous avons de petites communautés, et c'est plus difficile pour nous d'aller chercher du soutien. Nous ne pouvons pas faire la même chose que ce qui est fait dans une immense communauté en situation majoritaire.
    En passant, le résultat est que la plupart des recherches sont faites au Manitoba, en Ontario et au Nouveau-Brunswick. On n'en fait pas dans les autres provinces parce qu'on dit qu'on n'a pas les chiffres ni les nombres. Il y a un groupe de recherche qui a eu du financement, mais, lorsqu'on en reçoit, il ne s'agit que de petits montants.
    Si vous me permettez, cela revient à la question de la modernisation de la Loi.
    Il vous reste 10 secondes.
    Avant même que les programmes soient élaborés, il est essentiel, pendant la période de réflexion — qui doit prendre en compte la lentille linguistique —, de nous assurer que les communautés de langue officielle en situation minoritaire, que ce soit les communautés anglophones du Québec ou les communautés francophones du Canada, soient à la table.
(1225)
    Il nous faut poursuivre.
    Monsieur Choquette, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Tremblay.
    Merci beaucoup, madame O'Donnell, d'être présente par vidéoconférence aujourd'hui.
    Je commencerai par vous, Mme O'Donnell.
    Cela concerne ce dont vous avez parlé.

[Traduction]

    En ce qui concerne la partie VII de la Loi sur les langues officielles, vous avez utilisé le mot « vitalité ». Vous avez dit qu'il fallait définir ce mot et s'assurer que les gens en comprennent bien le sens. Vous avez beaucoup parlé du fait que partout au Canada, et pas seulement au Québec, les communautés francophones et les autres communautés linguistiques changent, évoluent. C'est très intéressant de parler de la diversité des communautés. Avez-vous réfléchi à la définition du terme « vitalité » ? Des recherches ont-elles été faites à ce sujet? Que pouvez-vous dire là-dessus?
     Oui. Je n'ai pas pensé à apporter une définition avec moi. M. Richard Bourhis est chercheur à l'Université du Québec à Montréal et l'un de nos membres chercheurs. Il a joué un rôle déterminant dans l'élaboration de la définition du terme « vitalité des communautés » il y a quelques années. Je suis sûre qu'il aimerait en discuter avec vous.
    Il y a aussi des travaux de recherche dont je serais heureuse de parler à votre comité.
    Je suis tout à fait d'accord: nous avons vraiment besoin d'une définition de ce genre. Ce serait très utile.

[Français]

    Monsieur Tremblay, vous avez parlé, entre autres, de la fameuse clause linguistique, et vous avez ajouté le mot « exécutoire ». À ma connaissance, c'est une chose nouvelle que d'ajouter le mot « exécutoire ».
    On veut avoir des clauses linguistiques dans les ententes avec les provinces. Vous avez toutefois mentionné que seule une province dispose d'une clause linguistique, si j'ai bien compris, ou qu'elle est exécutoire — je ne suis pas sûr des détails. Qu'est-ce qui fait que les provinces ont tant de difficulté à obtenir ces clauses linguistiques? Quelle serait la façon d'avoir une meilleure relation fédérale-provinciale?
    Le problème demeure: les provinces vont dire que cela relève de leur champ de compétence, alors que les langues officielles relèvent de la compétence du fédéral. On investit, mais c'est logique d'avoir des clauses linguistiques.
    Quelle approche le gouvernement fédéral devrait-il adopter pour régler cette tension entre le fédéral et les provinces?
    Il faut que les représentants des deux paliers de gouvernement se parlent.
    Actuellement, ce n'est pas un enjeu majeur pour beaucoup de provinces. L'accès à la santé est vu comme un bien public, c'est demandé par les citoyens. Je disais dans ma présentation, et je veux le clarifier, que le fédéral n'a pas à dire aux provinces quoi faire. C'est un champ de compétence provinciale, comme vous le dites. Cependant, le gouvernement peut, en raison de son pouvoir de dépenser, ajouter une condition comme la dualité linguistique. Les gens peuvent le faire.
    On ne dira pas à tel groupe qu'il faut donner des services à domicile de telle façon, ou encore répondre à des problèmes de santé mentale de telle façon, mais on peut lui dire qu'il lui faut faire quelque chose pour obtenir de l'argent du fédéral. Le fédéral a le pouvoir de dépenser, mais les provinces devraient, si elles veulent avoir des fonds, mettre en place des mesures pour appuyer les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    Concernant la Loi canadienne sur la santé, vous vouliez ajouter une sixième condition.
    Il faudrait donc modifier la Loi canadienne sur la santé et non passer par la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Est-ce bien cela?
(1230)
    Cela pourrait se faire des deux façons.
    D'accord, expliquez-nous cela un peu.
    Cela se trouve déjà dans le projet de loi que la FCFA a élaboré. Cela nous profiterait également. Dans notre mémoire, nous recommandons aussi que cela puisse se faire par une modification de la Loi canadienne sur la santé.
    Cela pourrait donc se faire des deux façons.
    Quelle est exactement la sixième condition?
    C'est la dualité linguistique.
    Quelle force supplémentaire cela conférerait-il à la Loi, d'après vous?
    Cela ferait partie des négociations entre le fédéral et les provinces et territoires pour l'octroi de fonds. Ils devraient démontrer comment ils vont mettre en oeuvre des services ou des programmes qui répondront aux besoins des communautés.
    Parfait.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le vice-président?
    Il vous reste 15 secondes.
    En 15 secondes, je vais simplement vous remercier, encore une fois, d'être ici et d'apporter votre éclairage en ce qui a trait à la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Merci, monsieur Choquette.
    Madame Lambropoulos, vous avez maintenant la parole.
    Merci aux deux témoins d'être ici aujourd'hui.

[Traduction]

    Madame O'Donnell, c'est à vous en particulier que mes questions s'adressent.
    Vous avez dit, dans votre déclaration liminaire, que la communauté anglophone du Québec ne connaît pas aussi bien la Loi sur les langues officielles que la Charte de la langue française, et ce, pour des raisons évidentes, d'une certaine façon.
    Selon vous, dans quelle mesure le fait de connaître la Loi aiderait la communauté à s'épanouir davantage?
    Excusez-moi: il y a eu du bruit ici, à Concordia. Une urgence annoncée par haut-parleurs.
    Vous avez demandé ce que l'on pourrait faire pour que la Loi soit mieux connue ou comment cela améliorerait la situation qu'elle soit mieux connue?
    Je me demandais si le fait qu'elle soit mieux connue aiderait la communauté.
    La Loi n'est pas bien connue et, si j'ai bien compris, cela signifie, lorsqu'on parle d'appui aux communautés de langue officielle en situation minoritaire, par exemple, d'appui à nos partenaires du Quebec Community Groups Network et aux nombreux groupes partenaires, dont le mien... Je dirais que les gens du QUESCREN ne comprennent pas nécessairement d'où l'argent vient, à quoi il sert, comment ces groupes les appuient et peuvent les représenter de sorte que, quand on parle des langues officielles dans les médias, ils ne font pas nécessairement le lien entre la législation fédérale et leur sentiment d'appartenance à une communauté linguistique en situation minoritaire et l'existence de certains groupes.
     J'aimerais aussi faire remarquer de manière plus générale que, selon la recherche, c'est vraiment suite à l'adoption de la loi 101 que la communauté anglophone a pris conscience qu'elle était une minorité, même si elle a toujours été une minorité sur le plan numérique. Je dirais qu'il serait bon quand même pour la communauté d'être plus consciente de son statut de communauté linguistique minoritaire. Cela aurait une incidence sur sa capacité à s'organiser et à exprimer ses besoins, à demander de l'aide, etc.
    Vous avez également parlé de la diversité qui existe au sein de cette communauté minoritaire. Je l'ai vu moi-même en un certain nombre d'occasions, et je suppose que je reflète cette diversité moi-même. Autant certaines personnes au sein de certaines communautés se considèrent comme anglophones, autant les communautés elles-mêmes ont de la difficulté à s'associer à la communauté anglophone parce que cela pourrait leur nuire d'une certaine manière. Par exemple, je ne vais pas citer de communautés en particulier, mais il y a des communautés qui gèrent des écoles centrées sur une langue bien précise. Prenons l'exemple d'une école italienne — j'invente, je ne sais pas si une telle école existe vraiment pour la communauté italienne — qui enseigne le français, l'anglais et l'italien. Si ces communautés se présentent comme appartenant à la communauté anglophone, elles pourraient ne pas recevoir le même soutien du ministère de l'Éducation.
    C'est ce qu'elles croient, et c'est une crainte que certains groupes partagent. Ils ont peur d'être membres de cette communauté. Que pouvez-vous dire à ces groupes?
    Tout d'abord, je pense qu'il est important de reconnaître que, lorsqu'on parle des communautés de langue officielle en situation minoritaire au Québec, la définition est inclusive. Je vais entrer dans les détails un peu. Elle inclut ce que Statistique Canada appelle les personnes dont la première langue officielle parlée est l'anglais. Autrement dit, ce n'est peut-être pas leur langue maternelle, mais ça l'est pour le gouvernement canadien en raison de sa manière de comptabiliser les anglophones. Tout d'abord, je dirais à ces groupes que, s'ils comprennent comment la communauté anglophone fonctionne, ils pourront y trouver du soutien et des ressources.
    Je tiens à préciser qu'au sein du gouvernement du Québec, les anglophones sont généralement identifiés par leur langue maternelle. C'est une manière différente de compter, et le dénombrement basé sur la première langue officielle englobe plus de personnes.
     C'est sans l'ombre d'un doute le réseautage et le fait d'appartenir à un groupe plus large qui sont synonymes d'avantages pour certains groupes parce qu'à ce moment-là, vous savez qu'il est possible de travailler ensemble, qu'il y a des initiatives qui existent, des ressources disponibles, que vous pouvez apprendre l'un de l'autre, par des activités de formation et de recherche par exemple.
    Ceci dit, je connais bien la situation dont vous parlez. Je me souviens d'une discussion avec une de mes amies d'origine italienne au cours de laquelle elle m'a dit en anglais: « Je ne suis pas anglophone. » Et pour elle, cela voulait dire britannique. Je lui ai présenté les arguments que je viens de vous faire valoir.
(1235)
    Il me reste une minute, alors je vais être un peu plus précise. Les gens dont l'anglais est la première langue officielle ne veulent pas que leurs institutions soient considérées comme faisant partie de la communauté anglophone parce que, même si la Loi sur les langues officielles ou Patrimoine canadien ou autre chose peut leur procurer certains avantages, ils craignent que le gouvernement du Québec ne leur coupe les fonds pour certains projets.
    Bien que je ne puisse pas parler précisément des tenants et des aboutissants du financement de l'éducation, ce que je peux dire, c'est que, depuis 2017, la situation au Québec s'est nettement améliorée puisque le gouvernement du Québec a créé un nouvel organisme, le Secrétariat aux relations avec les Québécois d'expression anglaise. C'est un organisme très axé sur la recherche dont la tâche est d'établir le dialogue avec différentes communautés — régionales, ethnoculturelles — et aussi le gouvernement du Québec afin d'améliorer les connaissances et les relations.
    J'encouragerais ces groupes à se tourner vers le Secrétariat.
    Merci beaucoup, madame O'Donnell.
    Il nous reste deux séries de questions de quatre minutes chacune.

[Français]

    Madame Fortier, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Tremblay, merci d'être ici aujourd'hui. Je suis très contente que vous ayez pu nous faire part de certaines préoccupations, que d'autres personnes ont aussi soulevées.
     J'aimerais que vous me parliez davantage des données probantes, car c'est une question très inquiétante présentement. Comme vous l'avez dit, il est difficile de concevoir des politiques qui tiennent compte des besoins des communautés.
    On a aboli un comité en 2014, je crois. Je ne suis pas certaine de la date.
    C'était en 2012.
    D'accord. Il s'agissait d'un comité consultatif sur la recherche de l'Institut canadien d'information sur la santé, ou ICIS. Ce comité était présidé par le Dr Prud'homme.
    Faudrait-il créer un comité de ce genre dans les différentes instances ou faudrait-il plutôt prendre d'autres mesures pour ajouter la variable linguistique?
    Merci beaucoup de la question, ma chère députée. Je suis dans votre circonscription.
    J'aimerais ajouter qu'un nouveau comité a été créé il y a deux ans. Je parle du Comité consultatif fédéral du portefeuille de la santé pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire du Canada, ou CLOSM, de Santé Canada. Ce comité a déjà existé. Il avait été aboli en 2007, mais il a été recréé il y a deux ans.
    C'est un comité qui regroupe des gens du CNFS, de la SSF et, du côté québécois, du Community Health and Social Services Network, ou CHSSN, de l'Université McGill, de l'Agence de la santé publique du Canada, des Instituts de recherche en santé du Canada et de Santé Canada. Il se réunit deux fois par année. Nous avons établi un plan de travail et les données linguistiques sont l'un des sujets abordés. C'est d'ailleurs le sujet de notre prochaine rencontre, au mois de mai.
    Actuellement, nous, à la SSF, et le CNFS, Santé Canada et l'ICIS travaillons ensemble à ce dossier. Il nous reste à ajouter le volet de la recherche, qui est vraiment important. Il faut aussi savoir de quel type de données on a besoin. Statistique Canada a aussi un comité consultatif qui se penche sur le dossier.
(1240)
    Ce que nous essayons de savoir ici, à ce comité, c'est comment nous pouvons intégrer, dans le processus de modernisation de la Loi, des mesures pour faire en sorte que le gouvernement réponde à ces besoins. Quelle serait la meilleure formule, une formule qui serait nécessaire dans la Loi?
    La SSF et beaucoup d'autres organismes considèrent que l'intégration de la variable linguistique sur la carte santé est importante. L'ICIS recueille l'information qui figure sur la carte santé. Lorsque les gens font une demande de carte santé, ils ne sont pas en état de vulnérabilité. Ils vont donner leur langue maternelle.
    Nous avons réalisé que c'est ce qui se passe à l'Île-du-Prince-Édouard. On demande aux gens leur langue maternelle. On peut trouver la mention d'une centaine de langues sur les cartes, mais on demande aussi quelle est la langue officielle dans laquelle ils sont le plus à l'aise.
    On est capable d'avoir des données de nature linguistique sur les Autochtones et sur d'autres groupes. C'est une façon d'aider d'autres personnes, et pas seulement les francophones et les anglophones.
    Je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps.
    Il vous reste 30 secondes.
    D'accord.
    Dans votre mémoire, vous dites qu'on pourrait ajouter une clause exécutoire dans les ententes fédérales-provinciales, non seulement pour ajouter la variable linguistique, mais aussi pour financer les services nécessaires sur le terrain. C'est intéressant et il faudrait renforcer la Loi en ce sens.
    Avec une reddition de comptes.
    Oui.
    Merci bien.
    Monsieur Généreux, vous avez la parole pour quatre minutes.
    Monsieur Tremblay, on veut faire un ajout à la Loi canadienne sur la santé pour faciliter l'application de la Loi sur les langues officielles. Vous me direz si je n'ai pas bien compris, mais, si l'on faisait cela, ne créerait-on pas un précédent? D'autres ministères ou d'autres organisations pourraient trouver cela intéressant et vouloir qu'on change certaines lois en vue de faciliter l'application d'autres lois.
    J'essaie de faire le lien entre les deux. Si l'on modifiait la Loi canadienne sur la santé, on faciliterait l'application de la Loi sur les langues officielles. Est-ce bien cela?
    Je ne suis pas légiste.
    Je suis content de l'entendre, je ne le suis pas moi non plus.
    Si l'on touche à la question de la dualité linguistique, c'est alors une question de langue. Si l'on modifie la Loi sur les langues officielles, celle-ci pourrait modifier une autre loi.
    Les gens qu'on a rencontrés jusqu'à maintenant, et ceux et celles qui pourraient un jour ou l'autre interpréter la rencontre d'aujourd'hui, pourraient se dire que, si nous avons proposé cela pour la santé, cela pourrait peut-être se faire dans d'autres ministères. Ils pourraient aussi se dire que s'ils lèvent la main et demandent un changement dans leur ministère, peut-être seraient-ils capables de mieux appliquer la Loi sur les langues officielles.
    En quoi le changement apporté à la Loi canadienne sur la santé assurera-t-il une meilleure application de la Loi sur les langues officielles?
    Vous parlez de dualité linguistique. Je comprends que la dualité linguistique est importante, mais elle sera peut-être intégrée dans la partie sur la dualité linguistique incluse dans les modifications à apporter à la Loi.
    Croyez-vous qu'il sera nécessaire de modifier la Loi canadienne sur la santé, malgré tout?
    L'autre option serait que les accords entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux aient une clause exécutoire visant la question de la dualité linguistique.
    Dans ce contexte, il s'agit particulièrement des provinces, puisque la santé est de compétence provinciale. Il est important de respecter les provinces.
    Cela vient-il complexifier potentiellement l'application de la Loi? Cela va-t-il plutôt faciliter la situation?
    Il y a beaucoup d'exemples dans le passé récent.
    Il y a la question de la petite enfance, qui est aussi de compétence provinciale, et le fédéral a su négocier avec les provinces à cet égard. En Alberta, il y avait une clause linguistique selon laquelle une part des fonds destinés à la petite enfance devait être allouée aux services en français. Il y a d'autres domaines où cela se fait, par exemple en éducation, même si cet élément est inscrit dans la Constitution.
    Il y a d'autres éléments de compétence provinciale où le fédéral se permet, en vertu de son pouvoir de dépenser, de demander que la dualité linguistique soit prise en compte.
    J'ai terminé, monsieur le président.
    C'est parfait.
    J'aimerais remercier nos deux témoins de leurs présentations, malgré les interruptions en raison des votes.
    Monsieur Tremblay, continuez votre bon travail sur les langues officielles dans le domaine de la santé, notamment pour aider les communautés linguistiques francophones.
(1245)
    Merci.

[Traduction]

     Madame O'Donnell, merci beaucoup de nous avoir accordé tout ce temps et merci de votre compréhension pendant notre réunion.
    Un petit rappel pour vous deux: si vous avez des documents que vous voudriez que nous examinions ou des renseignements supplémentaires dont vous voudriez que nous prenions connaissance, vous pouvez toujours les envoyer à la greffière du Comité, qui nous les transmettra par courriel.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vais suspendre la séance maintenant pour que nous puissions aller à huis clos. C'est très important. Nous avons 10 minutes pour nous pencher sur les travaux du Comité.

[Français]

    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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