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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 15 avril 1999

• 0911

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi adopté par la Chambre le mardi 10 octobre 1998, nous poursuivons l'examen du projet de loi C-235, Loi modifiant la Loi sur la concurrence (protection des acquéreurs de produits de fournisseurs intégrés qui leur font concurrence sur le marché de détail).

Ce matin, nous accueillons deux groupes distincts de témoins. Le premier est représenté par M. McTeague et son avocat, M. Kelen. Nous entendrons ensuite les porte-parole du Bureau de la concurrence, après quoi nous passerons à l'étude article par article.

Monsieur McTeague, vous et M. Kelen souhaitez-vous faire chacun un exposé?

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Nous nous partagerons le temps qui nous est alloué, soit les cinq minutes, madame Whelan.

La présidente: D'accord.

M. Dan McTeague: Madame la présidente et chers membres du comité, c'est pour moi un honneur de me retrouver ici. J'espère que, durant les cinq derniers jours de délibérations,

[Français]

de ce comité, vous avez eu l'occasion de jeter un coup d'oeil sur la situation qui existe dans notre économie à l'heure actuelle.

[Traduction]

Quand bien même les témoignages de ces cinq derniers jours ne vous auraient que laissé entrevoir les problèmes inhérents à la structure de la concurrence au Canada, vous auriez une assez bonne idée de ce que j'ai appris, au cours de mes recherches des trois dernières années.

Il n'arrive pas souvent qu'un député ait l'occasion de faire de la recherche et de contester les idées reçues en ce qui concerne ceux qui, en apparence, détiennent le monopole de ce qui est bon et des outils de la concurrence au Canada. J'ai essayé de le faire et j'espère avoir semé suffisamment de doute dans votre esprit pour que vous mettiez en question la validité de la loi actuelle.

Le projet de loi C-235 ne représente qu'un très léger changement de la loi, mais il faut bien commencer quelque part. C'est un point de départ essentiel si nous, en tant que comité de législateurs, sommes vraiment résolus à protéger la petite entreprise dans un contexte où chaque secteur est de plus en plus dominé par un seul joueur ou deux.

D'autres pays que nous ont leur propre façon de concevoir la concurrence. Notre conception de la concurrence aux termes du projet de loi à l'étude et selon les nombreux témoignages que vous avez entendus—et ils n'en représentent en réalité qu'une fraction—est très éloquente quant à l'insuffisance de notre loi actuelle.

Aujourd'hui, nous pouvons décider de la validité de cette loi et la mettre de côté. Nous pouvons envisager peut-être de l'étudier davantage plus tard. La réalité, c'est que, chaque jour, le carcan dans lequel est enfermée la petite entreprise au Canada se fait de plus en plus lourd.

Je remarque qu'on s'inquiète de la fiscalité et de l'accès au capital, mais nul ne semble s'inquiéter du fait que, si les règles du jeu, au niveau de la vente au détail, vous défavorisent, vous ne survivrez pas.

[Français]

Ce projet de loi, qui a été recommandé par le comité libéral sur l'essence, auquel 50 députés ont participé, est fondé sur le fait que la Loi sur la concurrence telle qu'elle est actuellement libellée est inefficace. Les gens qui demandent l'adoption de ce projet de loi sont incapables d'aller au secours des petites entreprises.

• 0915

[Traduction]

Madame la présidente, avant de céder la parole à M. Kelen, je tiens à rappeler la situation qui régnait quand j'ai pour la première fois décrit la situation. Comme l'écrit Peter C. Newman dans son livre intitulé Titans, à la page 155, l'actuelle Loi sur la concurrence actuelle rédigée par ceux-là mêmes qu'elle est censée encadrer. En réalité, il s'agit-là d'une anomalie par rapport à ce qui se passe ailleurs dans le monde. Très peu de pays occidentaux ont permis à une pareille situation d'éclore.

On a souvent demandé s'il ne s'agissait pas d'une mesure de contrôle des prix. Ce n'est pas le cas. Il ne s'agit pas de supposer qu'à un certain stade, le projet de loi imposera d'une façon quelconque de l'inefficacité sur le marché. Le projet de loi traite plutôt de la réalité contemporaine où des joueurs efficaces sont éliminés, comme le laissent entendre le Bloomberg Oil Buyer's Guide et les Fred Wade de ce monde.

Plus ouvertement, s'il a des préoccupations ou qu'il craint certaines des conséquences que lui ont décrites des témoins, le comité, j'espère, s'éloignera des situations hypothétiques et se penchera sur la réalité contemporaine. Des milliers de petites entreprises ont dû mettre la clé sous la porte au Canada. On ne tolérerait pas une pareille situation au sud de la frontière.

Vous avez, je crois, entendu suffisamment de témoignages prouvant que ceux qui se sont présentés devant vous armés du pouvoir du Bureau de la concurrence—qui, soit dit en passant, fait des pieds et des mains pour tuer dans l'oeuf le projet de loi à l'étude—et des poids lourds du pays... Je demande simplement au comité d'envisager la possibilité de donner à David la pierre caillou dont il a besoin pour faire tomber Goliath.

Je cède maintenant la parole à Michael Kelen qui terminera notre exposé.

M. Michael Kelen (avocat): Merci, monsieur McTeague, madame la présidente et chers membres du comité.

Ces importantes audiences publiques ont permis de mettre à nu un énorme problème de concurrence au Canada, c'est-à-dire la baisse de la concurrence attribuable aux prix d'éviction et à l'incapacité de la Loi sur la concurrence de faire respecter les dispositions pénales interdisant cette pratique. La preuve en est faite dans au moins deux secteurs, soit dans celui du gaz et dans celui de l'alimentation: la concurrence livrée par les indépendants se meurt. Le chien de garde de la concurrence est soit assoupi ou inefficace, car la loi actuelle, c'est-à-dire l'alinéa 50(1)b) de la Loi sur la concurrence interdisant les prix d'éviction, est inexécutable.

Le projet de loi à l'étude a pour objet simplement de combler le vide qui existe actuellement dans la Loi sur la concurrence. Il consiste à protéger la concurrence, non pas à contrôler les prix. Il vise à protéger la concurrence là où il existe un vide actuellement.

J'ai fait circuler un mémoire final, dont je vous épargne la lecture, qui passe en revue les témoignages donnés par certains. Ainsi, Fred Wade, l'épicier indépendant de la vallée de l'Annapolis, en Nouvelle-Écosse, qui est venu témoigner devant vous, il y a deux jours, a affirmé devant la Fédération canadienne des épiciers indépendants qu'il était la preuve vivante que ces épiciers ont les mains liés par les grandes chaînes qui les contrôlent. Le porte-parole de la fédération a été incapable de réfuter cette affirmation.

Nous avons entendu le témoignage des détaillants indépendants d'essence qui ont été expulsés du commerce par les prix d'éviction pratiqués par les fournisseurs verticalement intégrés.

La conclusion que l'on tire de tous les témoignages est donc très claire: les entreprises verticalement intégrées sont en train soit d'expulser les indépendants au moyen de prix d'éviction ou d'en prendre le contrôle. Nous avons entendu hier un avocat de Washington spécialisé en droit de la concurrence, M. Tim Columbus, nous expliquer avec beaucoup d'éloquence comment les détaillants indépendants sont la source réelle d'une concurrence des prix. Ils ne rivalisent pas avec d'autres marques, ils ne rivalisent pas à coup de publicité, ils rivalisent par les prix. Naturellement, les détaillants et grossistes intégrés souhaitent les éliminer.

Le projet de loi est essentiel. On s'est servi d'habiles diversions pour détourner votre attention. Entre autres, on a fait valoir la possibilité que le projet de loi nuise au droit des entreprises de consentir des escomptes de volume. Le projet de loi à l'étude ne change pas la loi en ce qui concerne les prix discriminatoires. Il est toujours possible de consentir des rabais sur les volumes d'achat en gros. Cela ne s'applique pas à la vente au détail, puisqu'il s'agit d'un autre niveau du circuit de distribution. Par conséquent, la loi interdisant les prix discriminatoires, c'est-à-dire les articles 50 et 51 de la Loi sur la concurrence, continueront de s'appliquer.

En ce qui concerne le refus de fournir un produit, ils affirment que les grossistes cesseront d'alimenter les détaillants indépendants en produits. L'article 61 de la Loi sur la concurrence dit que le refus, par une entreprise, de fournir un produit en raison de la politique de faible prix pratiquée par une personne en particulier est une infraction criminelle. L'article 75, lui, prévoit que le refus de traiter avec un fournisseur particulier est une infraction civile.

• 0920

Donc, on a utilisé de nombreux faux-fuyants pour essayer de détourner l'attention du comité de ce que fait M. McTeague, soit de combler un important vide juridique de la Loi sur la concurrence en ce qui concerne les prix d'éviction.

Cette loi n'est pas d'avant-garde. Elle ne changera pas le monde. Elle comble un vide évident dans la loi, et j'espère que le comité l'adoptera.

La présidente: Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague: Madame la présidente, je tiens, moi aussi, à remercier le comité de l'excellent travail qu'il a fait. Je sais que des décisions très difficiles l'attendent. Je tiens à préciser au comité qu'il n'y a rien dans le projet de loi à l'étude qui soit différent d'autres articles de la Loi sur la concurrence. Le projet de loi comme tel est un modèle qui, comme vous l'avez entendu dire hier, est adapté à la réalité d'aujourd'hui au Canada, soit que, si vous êtes une petite entreprise, vous ne survivrez pas si votre fournisseur ou votre bailleur féodal est déterminé à vous éliminer.

Hier, il était clair que la menace de H.R. 2966 brandie au Congrès des États-Unis a réussi à réinjecter de la discipline dans le marché. Des lois équivalentes ont éliminé les menaces qui pesaient sur la petite entreprise, et celle-ci prospère d'une manière qui est tout simplement impossible au Canada.

Madame la présidente, voilà qui met fin à mon exposé.

La présidente: Je vous remercie, monsieur McTeague.

Je ne suis pas sûre du nombre de membres du comité qui souhaitent poser des questions. Monsieur Jaffer, avez-vous des questions?

M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): J'aurais deux petites questions, si vous me permettez de les poser. Les témoignages que j'ai entendus n'ont pas réussi à me convaincre de deux choses. Vous pouvez peut-être vous essayer une dernière fois.

Tout d'abord, le projet de loi à l'étude ne serait pas en fait favorable aux consommateurs. Nous avons entendu plusieurs témoins dire qu'à long terme, les prix grimperont et que le projet de loi ne prévoit rien en vue de protéger la concurrence par les prix et les concurrents futurs, surtout en ce qui concerne les prix de détail. En fait, les prix grimperaient.

Vous pourriez aussi éclaircir un autre point. Je constate une évolution des cycles économiques. Si le projet de loi à l'examen n'est pas adopté, il devrait y avoir de la concurrence, qu'elle se livre entre les poids lourds ou entre petites entreprises. Même s'il n'y a qu'un seul joueur sur le marché, il y a souvent de la concurrence, comme nous en avons discuté avec les témoins hier.

Il est admirable de vouloir protéger la petite entreprise, et c'est très important; cependant, il existe des cycles naturels. Certaines entreprises survivront, d'autres pas, ou elles se repositionneront, qu'elles soient de petites entreprises ou qu'elles concurrencent des entreprises verticalement intégrées, et ainsi de suite. J'ignore si vous tenez compte de ces cycles.

M. Dan McTeague: Ce sont là d'excellentes questions, monsieur Jaffer. Je commencerai par répondre à la dernière.

La plupart de ceux qui comprennent bien la théorie économique et son impact sur le marché sont préoccupés non pas tant par la taille des entreprises, mais par la domination qu'elles exercent sur le marché. Cette préoccupation est très évidente dans l'article que je vous ai tous présenté au début. C'est très intéressant, parce qu'aux États-Unis, les divers modèles du passé, comme la présumée théorie de Chicago, sont contestés.

Il est inutile d'aller bien loin pour comprendre ce qui arrivera à ceux qui décideront d'essayer de livrer concurrence à leurs fournisseurs qui ne souhaitent pas les voir en affaires, sur une période prolongée. C'est certes le cas de l'industrie de l'essence. Le phénomène devient de plus en plus évident dans l'industrie de l'alimentation, comme nous l'ont dit certains témoins, mais nous n'avons certes pas eu le temps de traiter de tout cela.

Votre question concernant les prix plus élevés est intéressante. Il existe deux façons de voir les pratiques déloyales de fixation de prix. Dans un article dont j'aimerais vous faire la lecture, on laisse entendre que, d'après les économistes, la situation est différente si l'entreprise occupe déjà une position dominante sur le marché. La pratique peut alors renforcer sa position de domination et accroître ses profits, aux frais du consommateur. C'est ce que disait un article paru dans The Economist, l'an dernier.

On sait maintenant que, si vos pratiques déloyales ont du succès et que vous éliminez un concurrent, que vous contrôlez entièrement la vente en gros et, désormais, la vente au détail, vous n'augmenterez pas forcément votre prix. Cependant, comme l'a affirmé M. Columbus hier, la concurrence se livrera à 70c. le litre par opposition à ce qu'il devrait être aujourd'hui, soit 45c. le litre.

Je ne crois pas qu'un grand nombre d'entre nous, dans la salle, aient besoin qu'on leur dise ce qui se produit quand une industrie contrôle l'approvisionnement dans la mesure où nous l'avons vu—exception faite de votre province, monsieur Jaffer—en essence durant les longs week-ends. Les taxes n'ont rien à voir avec ce phénomène. Le manque de concurrence est probablement déterminant. Les marges, dans la région de Toronto d'où je viens, étaient de 1c. ou de moins de 0,5c. par litre parce que, selon les témoignages entendus ici, les principaux fournisseurs intégrés peuvent survivre sur moins d'un cent par litre, même s'ils ont des stations qui leur rapportent 2 millions de dollars. Ils jouissent actuellement de marges de profit de 10c. par litre au détail parce qu'il n'y a plus personne, à ce niveau, pour leur livrer concurrence au prix réel.

• 0925

Quand vous contrôlez la structure des prix, quand vous contrôlez le produit, vous pouvez forcément contrôler le consommateur. Fait plus important, au besoin, étant donné l'énorme coût englouti pour pénétrer le marché où le concurrent a de si fortes marges, si vous êtes intelligent, d'après cet article et selon certains des témoignages entendus ici, vous abaisserez le prix au point où il devient impossible pour vous de recouvrer les coûts engloutis.

Il y a l'anomalie... Je suis désolé de ne pas pouvoir vous répondre avec autant de précision et de concision que lorsque vous avez posé la question, mais la question est très complexe. Jusqu'à maintenant, le comité n'aurait jamais compris cela. Il incombe en réalité au comité non seulement d'étudier toute la Loi sur la concurrence mais également de mettre à jour ses connaissances au sujet de l'état de la concurrence au Canada.

Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Kelen?

M. Michael Kelen: Oui, je vous remercie beaucoup. J'aimerais revenir à la première question, soit de savoir si le projet de loi à l'étude, bien qu'il soit louable comme initiative visant à protéger l'entreprise indépendante, protégera le consommateur ou si les prix grimperont.

En fait, j'ai dû vérifier que l'aide que je donne à M. McTeague n'est pas en conflit avec mon rôle de conseiller juridique auprès de l'Association des consommateurs du Canada qui conteste deux fusions dans le secteur de l'alimentation. En fait, les consommateurs seront protégés par le projet de loi à l'étude parce que la faiblesse des prix s'explique par la présence d'entreprises indépendantes. Si celles-ci sont expulsées du marché par ces grandes entreprises, l'oligopole entraîne un parallélisme délibéré, c'est-à-dire que l'un suit l'autre. Il n'y a pas d'infraction à la Loi sur la concurrence. Les entreprises ne communiquent pas entre elles pour décider d'accroître le prix de 3 cents.

Comme vous avez entendu beaucoup de témoins vous le dire, c'est pourquoi les prix de l'essence semblent augmenter uniformément chez les quatre grandes pétrolières. Elles agissent par parallélisme conscient parce qu'il n'y a pas suffisamment d'entreprises indépendantes pour leur livrer concurrence. Le projet de loi à l'étude est extrêmement important pour le consommateur parce qu'il protège les prix. Comme en a témoigné M. Wade, dans sa région, il ne reste plus que deux concurrents après qu'il a été chassé du secteur par Loblaws et après que les autres indépendants de la vallée d'Annapolis ont été achetés par les grandes chaînes Sobey's et Loblaws. Ils augmenteront leurs prix. Ils seront heureux de se partager le marché, selon lui. Ils seront heureux de laisser les prix grimper et de ne pas se livrer de guerre de prix.

Le Royaume-Uni vient tout juste d'ordonner la tenue d'une enquête sur la vente au détail d'aliments le 8 avril, parce que les quatre grandes chaînes qui contrôlent ce commerce n'ont pas de prix concurrentiels. Il ne se fait plus de concurrence par les prix. Le projet de loi de M. McTeague visant à protéger l'entreprise indépendante protège donc en réalité le consommateur et la concurrence sur le plan des prix. C'est la raison d'être du projet de loi à l'étude.

M. Dan McTeague: Madame la présidente, une des observations que j'ai faites était tirée de Bloomberg Oil Buyer's Guide. J'ai dit que l'industrie pétrolière avait amorcé une rationalisation, d'après les propres témoignages de ses porte-parole et d'après Bloomberg, parce que les indépendants étaient des exploitations efficaces, ce qui avait resserré leur marge de profit. Ce point a de l'importance en termes de ce que vous recherchez, monsieur Jaffer.

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Peric, vous aviez une question?

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Ma question s'adresse au second groupe de témoins, madame la présidente.

La présidente: Désolée.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Je vous remercie beaucoup de votre exposé.

Des porte-parole de l'industrie des télécommunications ont déposé des documents devant notre comité. Si j'ai bien compris leur témoignage, le coût des nouvelles technologies est parfois si élevé que l'entreprise qui les a mises au point est disposée à en subventionner le prix de détail, dans l'espoir qu'en s'accaparant une part importante du marché, elle pourra en faire baisser le coût. La mesure législative à l'étude, en dépit des amendements, l'empêcherait en fait de le faire.

J'aimerais répondre à cette question.

M. Dan McTeague: Madame Jennings, aucun actionnaire, peu importe le pays, n'accepterait de voir une entreprise investir beaucoup d'argent dans une technologie nouvelle et ensuite décider soudainement de ne rien faire pour récupérer son investissement. Ils n'accepteraient pas une chose pareille, sauf, bien entendu, si c'est dans le but d'accroître votre part de marché, et ce fait à lui seul montre que le projet de loi contient des lacunes en ce qui concerne la pratique de prix abusifs.

• 0930

Si vous ne pouvez obtenir un rendement acceptable sur vos investissements... Supposons que vous rencontrez Peter Lynch, du Fidelity Investors' Magelland Fund aux États-Unis, pour le petit déjeuner ou le déjeuner et que vous lui dites, «Nous allons dépenser des millions de dollars pour mettre au point cette nouvelle technologie, et en passant, nous allons subir des pertes importantes pendant un certain temps», vous n'arriverez pas à le faire, parce que vous allez constater très rapidement qu'ils vont vous couper l'herbe sous le pied.

Quand vous avez un marché libre concurrentiel, et ce n'est pas le cas pour l'instant au Canada, vous laissez entendre essentiellement qu'il est normal de briser les règles du jeu, d'écraser les petites entreprises indépendantes, de cacher aux actionnaires le fait que vous pratiquez l'interfinancement, comme le fait Bell Canada. Or, si l'on revient à la question qu'a posée, je crois, Mme Lalonde concernant AOL, il y a à ce sujet un article fort intéressant dans le National Post de ce matin. AOL est le plus important fournisseur Internet aux États-Unis. Au Canada, il occupe le deuxième rang, après Sympatico, qui est le fournisseur Internet des principales compagnies canadiennes de téléphone.

Or, devons-nous avoir recours à des pratiques qu'une personne raisonnable qualifierait d'illégales, qui défient toute logique et que les actionnaires dans un marché libre concurrentiel jugeraient peu orthodoxes, pour pouvoir récupérer ces coûts? Il serait préférable de dire que si vous bénéficiez d'un monopole depuis 25 ou 30 ans, comme c'est le cas des câblodistributeurs et de Bell Canada, il devrait y avoir des règles du jeu équitables au niveau du détail, et c'est tout ce que ce projet de loi essaie de faire.

Mme Marlene Jennings: Monsieur Kelen, avez-vous des commentaires à ajouter?

M. Michael Kelen: Non. Je pense que M. McTeague a bien résumé la situation. Merci.

Mme Marlene Jennings: Merci. Je n'ai pas d'autre question à poser.

[Français]

La présidente: Madame Lalonde, avez-vous des questions?

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur McTeague, dans votre exposé, vous avez dit que dans l'actuelle économie de transformation du marché, il y avait une lutte féroce entre les grands et les petits entrepreneurs et que votre projet de loi visait à aider les petits entrepreneurs. Je pense que ce n'est pas exact. Pour moi, c'est un problème important parce que les détaillants indépendants peuvent être très gros et ne se trouvent pas soumis aux mêmes règles que les fournisseurs intégrés. Je pense que cela met les petits détaillants indépendants dans une situation difficile.

J'ai infiniment de sympathie et d'admiration pour vous dans cette bataille que vous faites et je pense que cette bataille doit se poursuivre, mais je ne suis pas certaine que l'instrument que vous nous proposez soit adéquat.

M. Dan McTeague: Madame Lalonde, cet instrument que je propose est simplement un point de départ. Si ce point de départ est enrayé, la victoire ira aux autres, à ceux qui veulent le statu quo quant à la concurrence.

Le Canada est reconnu comme un pays dans lequel il existe, du moins pour les entreprises, une sorte de libre régime dans lequel on peut faire presque tout ce que qu'on veut. Si un entrepreneur ou une grande compagnie a des fonds adéquats pour contrôler l'infrastructure des prix, elle sera capable de contrôler non seulement les agents avec lesquels elle fait affaire, mais aussi les aspects qui concernent les consommateurs. La question, à mon avis, ne se pose pas au sujet des grands et des petits indépendants.

J'ai dit, au début de l'intervention que j'ai faite il y a quelques semaines, que lorsque quelqu'un contrôle à lui seul la façon d'obtenir un produit ou un service, comme dans le cas de l'oligopole qui existe dans l'industrie pétrolière au Canada et dans d'autres circonstances, l'actuelle Loi sur la concurrence n'est pas adéquate pour qu'on puisse, en premier lieu, déceler un acte anticoncurrentiel. Il faut aussi prendre en considération le fait qu'avec les fusions qui se font aujourd'hui, le contrôle et l'abus du marché sont fréquents.

• 0935

Je pense que le Bureau de la concurrence n'est pas en mesure de régler ces questions, à moins qu'il y ait une poussée politique, comme on l'a vu lors de la fusion proposée des banques ou lorsque nous avions fait des recommandations dans le cas de Petro-Canada et Ultramar il y a quelques mois.

Ce qui m'inquiète, c'est le fait que deux choses se produisent en même temps: l'économie change, et certains aspects de notre économie sont contrôlés par un ou deux joueurs. Ce phénomène n'a pas l'intensité... Je pense que c'est ce comité-ci, madame la présidente, qui a reçu des documents indiquant que les fusions de l'année 1998 avaient été les plus importantes de l'histoire. Ce n'est peut-être pas ce comité-ci. Donc, le timing de ce projet de loi est très important.

Mme Francine Lalonde: Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, madame Lalonde.

Monsieur Jones, avez-vous des questions?

Monsieur Solomon?

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Nous avons recueilli des témoignages de l'industrie et de particuliers. Nous avons entendu, hier, l'avocat de l'Association du Barreau canadien, qui a aidé à préparer le mémoire de l'Association. Il a adopté dans celui-ci une position différente de la vôtre, monsieur Kelen. Il a déclaré que le projet de loi ne protège pas les consommateurs. Comme l'Association du Barreau canadien compte des clients parmi l'industrie du pétrole, je ne sais pas dans quelle mesure son mémoire est objectif.

Ma question est la suivante. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de jeter un coup d'oeil sur le mémoire de l'Association, mais nous avons ici deux points de vue différents, le vôtre et celui de l'Association. Or, lequel des deux défend le mieux les intérêts des consommateurs?

M. Michael Kelen: J'étais présent, hier, quand il a donné son témoignage, et celui-ci m'a beaucoup étonné et déçu, parce que le représentant de l'Association du Barreau canadien, un avocat d'Edmonton spécialisé en droit de la concurrence, ne semblait pas comprendre que le projet de loi protégerait les entreprises indépendantes, que celles-ci jouent un rôle important en ce sens qu'elles encouragent la concurrence par les prix dans une industrie qui est dominée par les fournisseurs intégrés.

Il n'avait pas l'impression que le projet de loi protégeait le consommateur. Or, j'ai eu l'occasion de conseiller l'Association des consommateurs du Canada dans le dossier relatif au projet de fusion des grands magasins d'alimentation, et je sais très bien ce qui doit être fait pour protéger les intérêts des consommateurs. Je ne crois pas que le représentant de l'Association du Barreau canadien ait entendu le témoignage des représentants des détaillants d'essence indépendants ou de Fred Wade, un épicier indépendant. Il aurait été à même de mieux comprendre que le projet de loi, en protégeant d'abord la concurrence et ensuite la concurrence par les prix, va aussi protéger le consommateur et les entreprises indépendantes.

M. John Solomon: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Solomon.

Je n'ai pas d'autres intervenants sur ma liste.

Je vous remercie, monsieur McTeague, de l'exposé que vous nous avez présenté ce matin et de votre participation à la réunion. Nous allons attendre de voir comment les choses vont évoluer pendant la journée, mais j'espère que nous aurons beaucoup appris de cette discussion et des témoignages que nous avons entendus.

M. Dan McTeague: Madame la présidente, je tiens moi aussi à vous remercier pour le professionnalisme dont ont fait preuve les membres du comité. Je tiens à les remercier tous personnellement. Je sais que ce n'était pas facile. Vous avez été très patients. Je tiens également à remercier la Chambre et j'espère qu'on lui transmettra ce message. Et bien entendu, donnons aux petits joueurs la chance de vaincre les plus gros.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur McTeague.

Nous allons maintenant entendre d'autres témoins. Nous allons demander aux représentants du Bureau de la concurrence de se joindre à nous. Nous allons leur donner une minute pour qu'ils se préparent.

• 0939




• 0941

La présidente: Nous allons reprendre la séance.

Je souhaite la bienvenue au Bureau de la concurrence. Je suis heureuse d'accueillir M. Konrad von Finckenstein, le commissaire de la concurrence; M. Harry Chandler, le sous-commissaire de la concurrence, affaires criminelles; et M. Don Mercer, chef de l'unité des modifications. Nous sommes heureux de vous accueillir.

Je vais demander à M. von Finckenstein de nous présenter son mémoire, après quoi nous allons passer aux questions. Monsieur von Finckenstein.

M. Konrad von Finckenstein (commissaire de la concurrence, Bureau de la concurrence): Je vous remercie, madame la présidente, de me permettre de comparaître devant le comité afin de présenter mes observations finales sur le projet de loi C-235.

[Français]

La dernière fois que j'étais venu ici, c'était en rapport avec le projet de loi C-20. J'aimerais profiter de cette occasion pour remercier le comité d'avoir donné son appui à ce projet de loi, qui est maintenant en vigueur, et d'avoir donné au bureau les outils nécessaires pour faire son travail.

[Traduction]

Le Bureau de la concurrence a assisté avec intérêt à ces audiences et a entendu les nombreux témoins qui ont comparu devant le comité et qui, de façon évidente, sont, tout comme le Bureau, perturbés par ce projet de loi. À notre avis, l'objet du projet de loi est très simple. Il prévoit que les fabricants a) ne peuvent pas vendre à des détaillants indépendants à des prix plus élevés qu'à leurs propres affiliés; et b) ne peuvent pas vendre en gros aux détaillants indépendants à des prix plus élevés que leur propre prix de détail.

Ceci a clairement pour but de protéger les détaillants indépendants qui ont le sentiment d'être menacés par les fabricants intégrés qui les approvisionnent. L'hypothèse sous-jacente au projet de loi est qu'en protégeant les détaillants indépendants, on favorise la concurrence et on protège les consommateurs.

Fondamentalement, le Bureau est en désaccord avec cette approche et cette hypothèse pour les raisons suivantes, la plus importante étant celle-ci: l'objet de la Loi sur la concurrence est de protéger la concurrence et non pas les concurrents. Elle vise à faire en sorte que nous ayons un système concurrentiel. Les modifications proposées dans le projet de loi C-235 s'écartent de ce principe en créant des protections spéciales pour une classe de concurrents, soit les détaillants indépendants.

Ensuite, contrairement à l'intention sous-jacente à ces modifications, la protection de classes précises de concurrents peut mener non pas à des prix plus bas pour les consommateurs, mais à des prix plus élevés, comme l'ont indiqué les témoins experts qui ont comparu devant vous.

Une autre différence fondamentale concernant le projet de loi C-235 est qu'il prétend que le fait de vendre à des prix de gros inférieurs aux prix de détail équivaut à une pratique d'éviction, pratique qui vise à évincer les concurrents. Toutefois, comme l'ont indiqué de nombreux témoins, il y a souvent des raisons valables pour vendre à de tels prix. Permettez-moi de vous donner trois exemples.

D'abord, lorsqu'un nouveau venu fait concurrence afin d'obtenir une part du marché. Dans certains marchés établis, le fait de couper les prix peut être la seule façon d'y avoir accès ou d'inciter les consommateurs à essayer une nouvelle marque concurrentielle.

Ensuite, lorsqu'il y a une offre excédentaire dans le marché. Une offre excédentaire dans un marché peut mener les grossistes à se débarrasser de leurs inventaires à des prix exceptionnellement bas. Après tout, il y a un coût relié à la conservation d'inventaires. Or, le projet de loi va interdire cette pratique.

• 0945

Enfin, pour des raisons de commercialisation et de promotion. Quand un nouveau produit arrive sur le marché, souvent les détaillants offrent un bas prix spécial ou baissent leurs prix en réaction à une promotion des concurrents.

Ces pratiques commerciales tout à fait légitimes. Elles n'ont rien à voir avec les pratiques d'éviction. Elles n'ont pas pour but de nuire ou de causer du tort à un concurrent, ou encore de l'évincer. Ces pratiques sont légitimes. Or, elles ne seront pas permises en vertu de ce projet de loi.

Les cas où l'on a recours à de véritables pratiques d'éviction, le genre qui nuit à une saine concurrence sur le marché, sont rares et difficiles à prouver, parce qu'il est compliqué d'en obtenir la preuve et à cause de l'invraisemblance du recouvrement. Quand vous vous livrez à cette pratique, vous devez vraiment subir des pertes dès le départ et espérer que votre concurrent va finir par disparaître ou va être tellement affaibli par la concurrence qu'il va aligner ses prix sur les vôtres, ce qui va vous permettre d'augmenter les vôtres et de récupérer vos pertes. C'est un jeu risqué. Il y aura toujours de nouveaux concurrents sur le marché, et recueillir des preuves demeurera une tâche difficile. Nous l'avons constaté non seulement au Canada, mais ailleurs également.

La Loi sur la concurrence s'applique à toutes les industries. Même si nous savons que les détaillants d'essence et les épiciers sont au centre de vos préoccupations, le projet de loi C-235 visera toutes les industries, y compris celles des produits et des services. Ceci veut dire que le projet de loi est susceptible d'avoir diverses conséquences inattendues. Il est très difficile de prédire ce que cela pourrait être. Or, à mon avis, le projet de loi a une portée trop vaste.

Il risque, par inadvertance, de chasser les investissements. Les concurrents étrangers vont jeter un coup d'oeil sur cette règle rigide et se demander, «Est-ce que je veux vraiment investir dans ce pays?». Il risque d'envoyer le message que ce qui est gros est mauvais. Le fait d'être un fabricant intégré ne veut pas dire qu'on fixe des prix abusifs, qu'on ne respecte pas les règles du jeu. Cela veut peut-être tout simplement dire que l'entreprise est très efficace et bien dirigée.

Le projet de loi risque aussi d'arrêter ou de ralentir les nouveaux développements ou les innovations, et cela nous préoccupe beaucoup. Le système Internet, qui ne cesse de prendre de l'essor, n'existait pas il y a dix ans. Il est en train de bouleverser les réseaux actuels de distribution. Un nombre croissant de fabricants essaient déjà de contourner les distributeurs et les détaillants et de vendre directement aux consommateurs grâce à Internet. Vous avez tous entendu parler d'Amazon, qui vend des livres de cette façon, et de Dell, qui vend ses ordinateurs directement sur Internet et dans les magasins, ainsi de suite. Diverses méthodes de distribution verront le jour grâce à Internet. Le projet de loi risque de freiner ce phénomène en disant que, lorsque vous vendez directement aux consommateurs, vous devez respecter ces règles, même si vous avez des raisons tout à fait légitimes de recourir à de telles méthodes, raisons qui n'ont rien à voir avec les pratiques d'éviction, malgré ce que l'on pourrait être porté à croire.

Ce projet de loi est très intrusif. En disant aux fabricants comment fixer le prix de leurs produits, il réglemente de façon très efficace les prix de gros. À notre avis, la réglementation des prix finit toujours par nuire au consommateur.

L'article 2 du projet de loi C-235, et on en a très peu parlé, ajoute à la Loi sur la concurrence une version civile à l'infraction criminelle de maintien des prix. Nous ne voyons pas pourquoi cette disposition est nécessaire. Les dispositions criminelles actuelles se trouvant à l'article 61 de la loi sont très claires. Elles fonctionnent bien et ont été appliquées de manière efficace dans le passé. Nous ne voyons pas l'utilité de cet ajout. À notre avis, la création d'une option civile diminuera le caractère sérieux de la disposition criminelle sur le maintien des prix, de sorte que ce comportement sera plus susceptible de se produire.

Pour terminer, madame la présidente, à notre avis, la preuve n'a pas été faite que les dispositions criminelles et civiles existantes qui traitent des pratiques de prix d'éviction sont insuffisantes pour résoudre le problème lorsqu'il survient.

Toutefois, j'ai écouté les témoins, j'ai lu leur témoignage, et je comprends leur inquiétude. Je comprends également les préoccupations qu'a le comité. Le Bureau est certainement disposé à revoir ces lignes directrices afin de savoir si nous devons réviser notre approche pour déterminer, par exemple, si elles doivent être mises à jour.

• 0950

Comme je l'ai déjà dit, quand j'ai comparu devant vous pour discuter du projet de loi C-20, la Loi sur la concurrence devrait être souple et s'adapter à l'évolution dynamique du marché. Si des changements s'imposent, nous les apporterons. Toutefois, je ne suis pas prêt à changer le concept sous-jacent, qui est de protéger la concurrence, ou encore à faire de cette mesure une loi qui vise à protéger une classe de concurrents, comme le fait le projet de loi C-235. Le projet de loi, s'il est adopté, modifierait ce concept de façon radicale, ce qui entraînerait des conséquences imprévisibles et potentiellement désastreuses.

Merci. Je répondrai volontiers à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur von Finckenstein.

Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Jaffer, en avez-vous à poser?

M. Rahim Jaffer: Non, je pense que l'exposé était assez clair. Je vais laisser passer mon tour. Merci.

La présidente: Madame Lalonde?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Non, merci.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Jones?

M. Jim Jones (Markham, PC): Oui.

Hier, un témoin de Montréal, M. Bellemare—qui n'a aucun lien de parenté avec celui que nous connaissons—a fait de sérieuses allégations au sujet de votre bureau, de vos activités. Pouvez-vous nous en parler? Vous avez sans doute lu...

M. Konrad von Finckenstein: Oui, elles portaient sur le fait que nous avions retenu les services d'un avocat de l'extérieur. C'est très compliqué, parce qu'il n'y a pas beaucoup de spécialistes en droit de la concurrence au Canada.

Il avait dénoncé le fait que nous avions retenu les services d'un avocat pour nous aider dans un dossier, une affaire qui se déroulait à Montréal, la fusion de CAST, à laquelle nous nous opposions. L'avocat ne travaille plus pour nous parce que le dossier est maintenant clos. Un nouveau joueur est arrivé sur le marché, et le risque de monopole n'existe plus. Ses services ont été retenus par d'autres parties—dans ce cas-ci, Loblaws. Loblaws participe à un projet de fusion, et l'affaire est devant... Il voit là un conflit d'intérêts.

D'abord, je tiens à préciser que ce n'est pas moi qui recrute les avocats, mais le procureur général. C'est le procureur général qui prend cette décision.

Ensuite, la question des conflits d'intérêts me préoccupe beaucoup. À tel point que quand j'ai été nommé, j'ai retenu les services de M. Colin Campbell, du cabinet Fasken, Campbell et Godfrey, à Toronto, pour me conseiller là-dessus. Il est spécialisé dans le domaine des conflits d'intérêts. Il a depuis été nommé juge de la Cour supérieure de l'Ontario. Il m'a donné des conseils sur la façon d'éviter les conflits d'intérêts. Nous avons consulté le Barreau à ce sujet, et nous avons émis une directive. Nous suivons les conseils que nous a donnés M. Colin Campbell, et nous en avons discuté avec l'Association du Barreau canadien. Nous sommes convaincus qu'il n'y a absolument pas de conflit d'intérêts.

Dire qu'un avocat qui nous a conseillés une fois dans un dossier ne peut intervenir dans une cause totalement différente—il n'y a absolument aucun lien entre la question du monopole exercé dans le port de Montréal et les magasins d'alimentation—ne peut maintenant représenter un particulier dans une affaire qui relève de droit de la concurrence est inacceptable.

Il soutient que nous devrions uniquement consulter les avocats internes. Nous le faisons—c'est-à-dire, des avocats du ministère de la Justice—mais nous consultons également des avocats de l'extérieur qui ont les compétences requises, ou s'il n'y a pas suffisamment de ressources au sein du ministère de la Justice. C'est une pratique tout à fait normale, et je ne comprends pas vraiment ce qui inquiète M. Bellemare.

M. Jim Jones: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Jones.

Monsieur Peric.

M. Janko Peric: Monsieur von Finckenstein, prenons la Loi sur la concurrence et appliquons ces mêmes règles à un match de soccer, par exemple, où vous avez deux équipes, deux séries de joueurs. Supposons qu'au bout de 90 minutes, vous vous retrouviez avec des joueurs qui ont des jambes cassées, d'autres qui sont morts, d'autres qui ont des nez fracturés, ainsi de suite.

Vous dites à la page 3 de votre mémoire, paragraphe (1), que l'objet de la Loi sur la concurrence est de protéger la concurrence et non pas les concurrents. Or, comment pouvez-vous avoir de la concurrence dans ce cas-là? Comment peut-on avoir un match? Vous avez des règles, un match, mais pas de joueurs. Voilà pour le premier point.

• 0955

Deuxièmement, croyez-vous honnêtement que la Loi sur la concurrence protège bien les entreprises, et croyez-vous honnêtement que le Bureau de la concurrence fait bien son travail quand l'épicier indépendant est écarté du marché par les grandes entreprises?

Troisièmement, et c'est ma dernière question, vous êtes au courant du rapport qu'a déposé Loretta Mahoney, qui a été embauchée par le Bureau de la concurrence. Ce rapport a été déposé en mars 1999. Je pense qu'il vient de la même source indépendante. À votre avis—et je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'y jeter un coup d'oeil—est-ce que ce rapport est objectif et à jour?

M. Konrad von Finckenstein: Je vais répondre aux quatre questions dans l'ordre dans lequel vous les avez posées.

En ce qui concerne le match de soccer, si vous voulez comparer la concurrence au soccer, dans ce jeu, vous n'avez pas le droit de faire du tort à votre concurrent. Vous avez le droit de lui livrer concurrence. Vous essayer de compter des buts, autant de buts que possible. Toutefois, si vous frappez quelqu'un délibérément à la cheville ou si vous le bousculez, etc., vous allez être pénalisé. Si le geste est grave, vous allez avoir une pénalité sévère. Au pire, vous allez être expulsé du match.

M. Janko Peric: Oui.

M. Konrad von Finckenstein: Il en va de même dans ce cas-ci. Vous pouvez livrer concurrence aux autres, mais vous ne pouvez pas leur faire du tort délibérément. Si vous le faites, vous allez vous voir imposer une injonction restrictive. Si vous continuez à le faire, vous allez être expulsé—c'est-à-dire, vous allez vous retrouver en prison. L'analogie est la même.

La question qu'il faut se poser est la suivante: quelle sanction doit-on imposer? Est-ce qu'elle doit être très sévère? Encore une fois, l'arbitre doit prendre une décision: est-ce que cela faisait partie du jeu? Quand deux personnes courent très vite après un ballon, elles peuvent se heurter de façon tout à fait accidentelle, ou de façon délibérée. Voilà ce qu'il faut décider.

M. Janko Peric: Je comprends. C'est exactement ce que Loblaws a fait à Wade, et vous, en tant qu'arbitre, n'êtes pas intervenu...

M. Konrad von Finckenstein: Je n'ai pas fini.

M. Janko Peric: ...votre bureau n'est pas intervenu.

M. Konrad von Finckenstein: Vous m'avez posé quatre questions. Permettez-moi d'y répondre.

Pour ce qui est de la deuxième question, vous voulez savoir si la Loi sur la concurrence protège bien les joueurs? À mon avis, elle le fait. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il n'est pas seulement question ici de règles, mais de preuves, de preuves qui doivent être portées devant le tribunal. Quand on parle de fixation de prix abusifs, on parle d'un acte criminel et vous devez prouver que cet acte a été commis au-delà de tout doute raisonnable. On ne peut pas tout simplement dire, voici les preuves. Vous devez vous assurer qu'il n'y a pas d'autres explications possibles. S'il y en a, vous allez soulever un doute raisonnable et vous ne pourrez pas obtenir une condamnation.

Vous voulez en savoir plus sur l'affaire Wade et savoir ce que nous pensons du rapport de Mme Mahoney. Comme c'est M. Mercer qui s'est occupé de l'affaire Wade et qui a pris la décision de ne pas poursuivre, je vais lui demander de vous expliquer cette décision.

M. Don Mercer (chef, Unité des modifications, Bureau de la concurrence): Merci. Je suis heureux de pouvoir répondre à cette question.

La première chose qu'il faut savoir, je crois, c'est que nous prenons toutes les plaintes au sérieux. Il s'agit d'une plainte de prix d'éviction, et comme Konrad l'a déjà indiqué, nous devons en prouver le bien-fondé hors de tout doute raisonnable.

Nous devons également prendre en compte la jurisprudence, par exemple, l'affaire Consumers' Glass, et il est indiqué que cet article—l'article relatif au prix d'éviction—ne vise pas à déclarer coupable d'un acte criminel tout concurrent qui réduit ses prix dans le but d'obtenir la part du marché, tant que la réduction des prix est une minimisation des pertes, même s'il chasse un concurrent du marché. C'est la conclusion à laquelle nous sommes arrivés dans cette affaire.

Pour l'affaire qui nous concerne, car nous la prenons au sérieux—M. Wade ayant été en contact avec nous pendant quelque temps—nous y avons affecté un agent ainsi qu'un économiste.

M. Janko Peric: Étaient-ils indépendants?

M. Don Mercer: L'agent est un agent du bureau. Le bureau est une agence indépendante d'enquête. L'économiste est à l'emploi du bureau, lequel, je le répète, est une agence indépendante.

• 1000

À quelle conclusion en sommes-nous arrivés? Avant de répondre à cette question, j'imagine que je devrais faire remarquer que lorsque nous faisons une enquête, nous rassemblons des preuves. Toutes nos conclusions doivent être fondées non sur des suppositions, non sur des hypothèses, non sur des affirmations, mais sur des preuves. C'est la règle du droit: quelles sont les preuves? Cela représente bien sûr notre formation et, dans ce sens-là, nous sommes une agence indépendante. Nous sommes formés pour traiter des preuves. Nos agents sont formés à ce travail. Nous examinons et rassemblons les preuves, nous n'en fabriquons pas, c'est impossible.

Il est apparu clairement que les faits dans cette affaire étaient compatibles avec la concurrence légitime. Nous n'avons pas pu conclure que ces prix étaient excessivement bas dans ce marché. Par contre, les faits sont compatibles, je le répète, avec la concurrence légitime.

On était en présence d'un marché stable—pendant une période suffisamment longue, en fait—où, Sobey's est arrivé en premier lieu, et ensuite, Loblaws. Loblaws est arrivé sur le marché à froid; cette société voulait percer ce marché. Comment percer un marché stable? Il n'y a qu'une seule façon de le faire—à moins d'offrir un nouveau produit ou une innovation—c'est par les prix. Il faut attirer les concurrents chez vous. C'est exactement ce que Loblaws a fait. Ils ont baissé leurs prix pour pouvoir entrer sur ce marché. C'est la seule façon pour eux non seulement de percer ce marché, mais aussi d'y prendre de l'expansion.

C'est un facteur—il s'agit de concurrence légitime—qui de lui-même jette un doute, or, il faut prouver cette affaire hors de tout doute raisonnable.

Je ne peux que conclure en disant ce qui s'est produit par la suite, car était-il possible...? Bien sûr, M. Wade a disparu du marché. Qu'est-il arrivé sur ce marché par la suite? Les prix ont- ils monté? A-t-il été possible de récupérer quoi que ce soit? Non. Les preuves dont nous disposons aujourd'hui démontrent que ce marché continue d'être concurrentiel. Les prix sont extrêmement variés. Pour certains des produits dont parlait M. Wade l'autre jour, les prix ont augmenté, pour d'autres, ils ont baissé, d'autres prix sont restés stables. C'est un signe de marché concurrentiel. Telle a été notre conclusion.

M. Janko Peric: Monsieur Mercer, vous venez juste de prouver que la loi actuelle ne pouvait par protéger M. Wade et que ce projet de loi le protégerait, tout comme les emplois et la concurrence.

M. Don Mercer: Je ne le crois pas.

M. Janko Peric: D'après ce que j'ai entendu...

La présidente: Monsieur Peric, c'était votre dernière question.

M. Harry Chandler (sous-commissaire de la concurrence, Direction des affaires criminelles, Bureau de la concurrence): Pour ce qui est des statistiques, madame la présidente, nous avons nommé une spécialiste reconnue dans ce domaine pour qu'elle fasse un rapport exhaustif pour le comité sur les parts du marché dans les grandes villes du Canada pendant une assez longue période. Nous l'avons fait avec une spécialiste indépendante et autonome, en utilisant les données d'une société reconnue. Nous cherchions, je le répète, à présenter au comité des faits à propos des parts du marché.

Je crois—je vais être très rapide—que le rapport de Mme Mahoney donne des résultats très contrastés au sujet de la présence d'indépendants dans le commerce de détail de l'essence et de l'allégation selon laquelle nous parlons en quelque sorte d'une espèce en voie de disparition. La part des indépendants dans certains marchés augmente; elle reste stable dans d'autres...

M. Janko Peric: Je demande simplement... Vous n'avez pas répondu à ma question.

La présidente: Monsieur Peric, je suis désolée...

M. Janko Peric: Ce manuel ou ces documents sont-ils à jour ou non?

M. Harry Chandler: Ils sont à jour, monsieur.

M. Janko Peric: À 100 p. 100?

M. Harry Chandler: Oui.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Solomon.

• 1005

M. John Solomon: Merci, madame la présidente.

Messieurs, merci beaucoup pour votre exposé.

J'aimerais revenir sur plusieurs points qui ne sont pas très clairs pour moi. Au point 7, dans votre dernière phrase, vous dites que la réglementation des prix finit toujours par nuire aux consommateurs. Parallèlement à cette déclaration, diriez-vous que la déréglementation finit toujours par profiter aux consommateurs?

M. Konrad von Finckenstein: Vous avez raison; dire que la réglementation des prix finit toujours par nuire aux consommateurs semble très catégorique. Il conviendrait d'ajouter «si les marchés ne sont pas concurrentiels.» Si l'on réglemente les prix au lieu de favoriser des marchés concurrentiels, on finit par nuire aux consommateurs. Il est alors impossible d'extraire des efficiences du système—pour innover et produire de nouveaux produits. Il faudrait donc indiquer que la réglementation des prix nuit à la sur-concurrence. Ce que je veux dire, c'est qu'il vaut mieux opter pour la concurrence plutôt que pour la réglementation.

M. John Solomon: Par conséquent, la déréglementation équivaudrait à la concurrence. Serait-ce...

M. Konrad von Finckenstein: La déréglementation est un sujet très difficile à cerner. Nous ne sommes pas des fanatiques qui prétendent que tout doit faire l'objet d'une déréglementation. Certaines choses doivent de toute évidence être réglementées, et nous travaillons en étroite collaboration avec d'autres agences—par exemple, nous donnons des conseils au CRTC sur la déréglementation.

Lorsque l'on impose la déréglementation, on se retrouve habituellement avec une ou deux sociétés qui détiennent une énorme part du marché, si bien qu'il faut prévoir des règles transitoires, pour ne pas empêcher à de nouvelles sociétés d'entrer sur le marché, etc. Il faut donc progressivement supprimer les obstacles réglementaires, prévoir quelques nouvelles règles transitoires, en espérant que l'on arrive au point où on ne réglemente que ce qu'il faut absolument réglementer. Par exemple, dans le secteur des télécommunications, il faudrait réglementer les règles d'accès; cela ne fait aucun doute. Mais il faut également pouvoir soutenir la concurrence dans d'autres domaines.

M. John Solomon: Si je pose cette question, madame la présidente, c'est parce que je suis un ancien planificateur d'entreprise dans l'industrie des télécommunications. La déréglementation de la téléphonie et d'autres industries des communications ne s'est pas en fait traduite par une baisse des coûts des services de base offerts aux consommateurs. En fait, dans l'exemple de la Saskatchewan, que je connais le mieux, la déréglementation a doublé le prix des services de base pour tous les consommateurs et l'a augmenté de plus de 100 p. 100 à l'extérieur des grandes villes de la Saskatchewan.

Autre exemple, lorsque j'ai été élu en 1993, le prix d'un billet d'avion pour aller à Ottawa sur Air Canada, société en concurrence avec Canadian et d'autres concurrents, par suite de la déréglementation de cette industrie, était deux fois moins cher—il y cinq ans et demi—qu'aujourd'hui. Cela signifie que les billets plein tarif ont augmenté de 50 p. 100 et plus. Bien sûr, il y a des soldes de places, mais il est très difficile d'en profiter lorsque l'on voyage chaque semaine.

Je me pose donc des questions, lorsque vous dites que la réglementation des prix finit toujours par nuire aux consommateurs alors que, dans ces deux exemples que je connais très bien, la déréglementation a malmené les services de base. Pour ce qui est de la téléphonie, comme vous le savez, soit vous êtes sur le système, soit vous ne l'êtes pas, et presque tout le monde au Canada est abonné au service de base. La déréglementation a diminué le prix de certains services concurrentiels, mais pas celui des services de base.

M. Konrad von Finckenstein: Soyons honnêtes. Parlons de la téléphonie et non de l'accès local. Il suffit d'examiner l'interurbain pour s'apercevoir que les prix ont considérablement baissé. Il suffit d'examiner les divers services et options proposés dans la téléphonie par suite de la déréglementation pour s'apercevoir que toute une gamme de services est offerte aujourd'hui, alors qu'elle ne l'était pas auparavant.

Nous en sommes également au tout début de la concurrence au niveau local. Plus il y aura de concurrence entre fournisseurs de services locaux—câble, sans fil, etc.—plus nous en verrons l'effet au niveau des prix. Il faut envisager le monde de la téléphonie dans son ensemble. Lorsque vous dites que les consommateurs n'en ont pas profité, je ne suis pas d'accord. C'est une industrie qui est toujours en transition et nous ne savons pas ce que tout cela va donner.

M. John Solomon: Je suis d'accord avec vous pour ce qui est des services optionnels dont les coûts ont baissé. Par contre, les coûts des services de base sont montés en flèche, et tout le monde utilise le service de base, contrairement aux services optionnels. C'est ce que je voulais dire. Je ne veux pas...

M. Konrad von Finckenstein: Je comprends ce que vous voulez dire. Bien évidement, la déréglementation présente des inconvénients et je ne veux pas dire que c'est le nirvana.

M. John Solomon: Je voulais poser une question, monsieur von Finckenstein, à propos de ce que vous dites à la page 3, à savoir que l'objet de la Loi sur la concurrence est de protéger la concurrence et non pas les concurrents. Je me demande si vous pourriez expliquer ce qui s'est passé en Saskatchewan dans le domaine de la commercialisation de l'essence.

La présidente: C'est votre dernière question.

• 1010

M. John Solomon: Permettez-moi de vous situer le contexte pour ma dernière question. Vous savez que le cours du pétrole brut est passé entre l'été et l'automne de 1997 de 25 $ environ le baril à 10 $ à 13 $ environ le baril, et que ce cours s'est maintenu sur une période de 15 mois. Le prix de l'essence dans tout le pays a parallèlement diminué, non pas immédiatement, mais au bout de quelques semaines. Pour ce qui est de la concurrence en Saskatchewan, les prix ont légèrement baissé tout au long des 16 ou 18 mois précédents. Lorsque le cours du pétrole était bas, le litre d'essence en Saskatchewan coûtait entre 4 et 20 cent de plus que partout ailleurs.

Je pourrais comprendre s'il s'agissait du nord de l'Ontario, mais nous produisons du pétrole, nous en faisons l'extraction et nous le raffinons dans notre province. Il n'y a pas beaucoup de coûts supplémentaires. Nous avons les coûts les plus bas après l'Alberta, et pourtant les consommateurs n'ont pas pu profiter de ces prix peu élevés. Il a fallu attendre 15 mois pour que le prix baisse de 5c. le litre, mais pas contre, il n'a fallu que 15 heures pour rajuster le prix une fois le cours relevé non pas à 25 $ le baril, mais à 14 $ ou 15 $ le baril.

Dans ce que vous dites au sujet de la concurrence, je me demande comment la Loi sur la concurrence a protégé notre million de consommateurs en Saskatchewan pour ce qui est de la vente de l'essence.

M. Harry Chandler: Madame la présidente, en ce qui concerne les prix de l'essence, je pense que nous avons déjà dit que cela dépend inévitablement des conditions du marché local et de la situation qui y prévaut. Lorsque j'ai comparu devant le comité il y a quelques semaines, j'ai indiqué que nous étions saisis de la plainte de M. Solomon. Nous faisons une enquête, nous examinons sa plainte et je ne pense pas qu'il est opportun de s'étendre sur le sujet.

M. John Solomon: Merci beaucoup, monsieur, et merci, madame la présidente.

La présidente: Madame Barnes.

Mme Sue Barnes (London—Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.

Messieurs, je vous remercie pour votre témoignage. Il est tout à fait opportun, à mon avis, que vous reveniez devant le comité. Même si vous n'êtes pas présents tous les jours, je suis sûre que vous lisez tout ce qui se dit, si bien que j'en conclus que vous savez ce qui a été dit jusqu'ici.

Des choses importantes ont été dites à propos de votre situation et de votre organisation. Je suis sûre que le témoignage de M. Bellemare, du Centre d'études sur les industries réglementées, est plein de non-dits et qu'il n'a pas voulu parler que du conflit d'intérêts. En effet, il a parlé de différences au sujet de l'importance des plaintes et du nombre de déclarations de culpabilité, notamment en ce qui a trait aux prix d'éviction.

Peut-être pourrais-je commencer par un travail de base. Disons que le projet de loi de M. McTeague est en place et que nous avons donc cette sanction pénale. Monsieur Mercer, la charge de la preuve est-elle différente de ce qu'elle est actuellement en vertu de vos articles?

M. Don Mercer: C'est une sanction pénale, soit une preuve hors de tout doute raisonnable.

Mme Sue Barnes: Il serait donc tout aussi difficile d'avancer une déclaration de culpabilité, que ce projet de loi soit en place ou non.

M. Konrad von Finckenstein: Je suppose que vous parlez du projet de loi avec l'amendement présenté par M. McTeague.

Mme Sue Barnes: Je parle du projet de loi sur lequel nous devrions voter aujourd'hui.

M. Konrad von Finckenstein: Eh bien, dans le contexte du projet de loi, on fait une comparaison de prix.

Mme Sue Barnes: Je parle de la charge de la preuve.

M. Konrad von Finckenstein: Ce que je dis, c'est que la charge de la preuve est la même, mais il faut établir les prix de vente, hors de tout doute raisonnable, un point c'est tout.

Mme Sue Barnes: Ce que je veux dire, monsieur Mercer, c'est qu'il est difficile d'établir la charge de la preuve. Est-ce aussi astreignant dans ce cas, en vertu de la loi actuelle, que cela le serait en vertu de toute autre sanction pénale, peu importe la façon dont ce serait rédigé?

M. Don Mercer: La charge de la preuve reste la même.

Mme Sue Barnes: J'essaye de l'expliquer à ceux qui ne sont pas avocats et qui doivent le comprendre.

Quand les lignes directrices ont-elles été examinées pour la dernière fois?

M. Don Mercer: Ces lignes directrices ont été publiées en mars 1992.

Mme Sue Barnes: Que vous soyez d'accord ou non avec ce qui a été dit, monsieur Mercer, certains messages ont été transmis autour de cette table. Comme vous êtes responsable des modifications, il serait utile que vous indiquiez aux fins du compte rendu les messages que vous avez reçus au cours de cette semaine et demie de témoignages, ainsi que les points de préoccupation qui ont été soulevés. Au bout du compte, indépendamment de ce que vous avez entendu, nous allons voter sur ce qui est nous est présenté aujourd'hui, mais j'aimerais, à tout le moins, que le compte rendu indique ce que vous considérez comme des points de préoccupation.

• 1015

M. Konrad von Finckenstein: Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, il est clair que vous vous inquiétez et que l'industrie s'inquiète du fait que les dispositions relatives aux prix d'éviction ne sont pas appliquées comme il le faudrait et que les détaillants indépendants ne sont pas suffisamment protégés par la loi ou par la façon dont la loi est appliquée. C'est à mon avis le message global qui ressort très clairement des témoignages entendus. C'est un point qui nous préoccupe beaucoup, non seulement en termes de perception, mais aussi par rapport au fait que des gens souffrent—ou ont l'impression de souffrir—de la situation et qu'ils ont le sentiment que nous n'en faisons pas assez.

En tant que chef de cette agence, je ne suis pas heureux de voir que les Canadiens ont l'impression que la Loi sur la concurrence ne les protège pas suffisamment. Cela ne me fait pas plaisir, cela me préoccupe beaucoup. Comme je l'ai dit dans ma conclusion, il est évident que nous devons examiner nos lignes directrices pour voir si elles sont toujours applicables ou si nous devons modifier notre approche à la lumière des changements économiques, technologiques, etc. Je crois que ce message est très clairement reçu.

Mme Sue Barnes: Merci beaucoup de l'indiquer aux fins du compte rendu.

La présidente: Merci, madame Barnes.

Monsieur Bellemare, avez-vous une question?

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Oui, Madame.

La présidente: Est-ce une question rapide?

M. Eugène Bellemare: Cinq minutes.

Vous conviendrez certainement que ce projet de loi touche d'autres industries, comme vous l'avez dit dans votre exposé. Nous avons l'affaire Loblaw-Provigo et celle de la compagnie de gestion Oshawa et Sobeys. Pour ce qui est de Loblaw-Provigo, la nouvelle entité fusionnée contrôlera de 75 à 80 p. 100 du marché d'alimentation de détail dans Ottawa-Carleton. Ces propositions de fusion méritent donc un examen soigné, car elles ont le potentiel de sérieusement toucher les intérêts du consommateur.

Est-ce que le Bureau de la concurrence examine automatiquement ces genres de fusions? Quels sont les facteurs examinés? Tout ce que vous pouvez nous dire sur la façon dont votre bureau traiterait normalement ces genres de propositions de fusion serait évidemment très apprécié.

Vous êtes le commissaire du Bureau de la concurrence lequel, je crois, relève du ministère de l'Industrie et aussi du Comité de l'industrie. J'imagine que vous aidez le Comité de l'industrie dans ses délibérations, etc., si bien que je me demande pourquoi, alors que je vous ai écrit le 17 novembre, soit il y a cinq mois exactement, en tant que vice-président de ce comité, je n'ai pas encore reçu de réponse de votre part?

M. Konrad von Finckenstein: Monsieur Bellemare, si vous n'avez pas reçu de réponse, veuillez m'en excuser. Je ne le savais pas. C'est inexcusable et ne devrait pas se produire.

La fusion Loblaw-Provigo fait toujours l'objet d'un examen. Comme vous le savez, il faut donner préavis d'une fusion, lorsqu'elle vaut plus de 400 millions de dollars. C'est clairement le cas ici et nous avons des discussions avec ces sociétés en ce moment. Comme dans tous les cas de fusion, nous essayons d'examiner le marché, la concurrence, les niveaux de concentration après la fusion et les recours qui existent si ces niveaux sont inacceptables.

Dans le cas de cette fusion comme dans d'autres de ce type, nous obtenons ce que l'on appelle un engagement à garder à part. Même si Loblaw a acheté Provigo, les deux sociétés sont exploitées de façon distincte, et une gestion est prévue pour tout l'ensemble. En fait, ce sont deux sociétés distinctes avec un propriétaire commun, pendant la durée de notre enquête. Lorsque nous la terminerons, le cas échéant, nous leur ferons remarquer ce qui, d'après nous, pose des problèmes de concurrence et ils essayeront de les résoudre. S'ils peuvent les résoudre comme nous le voulons, nous passerons aux étapes qui s'imposent. Sinon, nous saisirons le tribunal de la concurrence de l'affaire et nous lui demanderons d'annuler cette fusion, d'obliger Loblaw à vendre Provigo ou des parties de Provigo, cela entraînant le jeu de la concurrence.

Pour vous montrer que nous prenons les choses au sérieux, je vous citerais l'exemple de la tentative de fusion entre Ultramar et Petro-Canada au Québec. Il s'agissait d'une fusion de 8 milliards de dollars et nous l'avons rejetée catégoriquement, si bien qu'elle a été abandonnée. Elle aurait donné lieu à un quasi-monopole au niveau des grossistes et d'après nous, les détaillants indépendants d'essence n'auraient eu aucune chance dans un tel contexte. Nous avons donc tout fait pour les protéger.

C'est la même chose pour les épiceries. Nous allons examiner la fusion de ces épiceries de très près; c'est ce que nous sommes en train de faire. Tout un groupe de mes collègues travaille sur ce dossier; nous allons rencontrer les représentants de Loblaws pour nous assurer que si cette fusion est autorisée, il ne faut absolument pas qu'elle conduise à une diminution marquée de la concurrence.

• 1020

La présidente: Votre dernière question.

M. Eugène Bellemare: Est-ce que je vais recevoir une réponse à ma lettre ou la réponse donnée aujourd'hui est-elle celle que je devrais recevoir?

Vous dites également que le bureau est prêt à examiner ses lignes directrices pour voir si vous devez réviser vos approches et pour déterminer, par exemple, s'il faut les mettre à jour ou non. Vous dites également que vous êtes prêt à examiner la Loi sur la concurrence. Seriez-vous heureux de le faire?

M. Konrad von Finckenstein: Oui, je...

M. Eugène Bellemare: Est-ce à dire que cet examen est nécessaire?

M. Konrad von Finckenstein: Il est toujours nécessaire d'examiner des lois-cadres, comme la Loi sur la concurrence, pour s'assurer qu'elles sont à jour. Il y a à peine un mois, j'ai comparu devant votre comité en faveur du projet de loi C-20 parce qu'il m'apparaissait nécessaire de régler le problème du télémarketing, qui n'existait pas il y a encore cinq ans mais qui est maintenant très répandu. Il est donc clair qu'il faut moderniser la loi.

Pour ce qui est de votre lettre, nous allons vous répondre. Comme je l'ai dit, je m'excuse à ce sujet. Je ne sais pas ce qui s'est passé. On aurait dû vous répondre. J'ai établi des règles précises pour assurer que les représentants de la population, comme vous, obtiennent une réponse rapide à leurs questions, et je ne sais tout simplement pas ce qui s'est passé dans votre cas.

M. Eugène Bellemare: Merci.

La présidente: Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Puis-je poser une brève question complémentaire à celle que vient de poser M. Bellemare?

La présidente: Non, il y a d'autres membres qui ont demandé de poser des questions. Vous devrez attendre votre...

M. Stan Keyes: Je voulais simplement demander si le bureau serait lui aussi favorable à cet examen.

La présidente: Vous devrez attendre votre tour, monsieur Keyes.

J'aimerais vous dire que j'ai essayé d'accorder la même période de temps aux témoins que nous avons invités ce matin. Le temps que j'avais prévu pour le témoin actuel est écoulé. Je vais vous laisser poser d'autres questions, mais je tenais à vous le signaler et à vous rappeler que la réunion de ce matin doit se terminer à 11 heures.

Madame Jennings.

[Français]

Mme Marlene Jennings: Monsieur von Finckenstein, merci beaucoup de votre présentation. J'ai été très heureuse de vous entendre dire que vous preniez au sérieux les préoccupations du comité concernant les pratiques possibles du Bureau de la concurrence dans le traitement des plaintes et que vous étiez prêt à réviser le guide des principes d'enquête et ainsi de suite.

J'aimerais vous parler du paragraphe 4, qui commence ainsi:

    Les cas de véritables pratiques d'éviction—le genre qui nuit à une saine concurrence sur le marché—sont rares et difficiles parce qu'il est compliqué d'en obtenir la preuve et à cause de l'invraisemblance du recouvrement.

Vous avez certainement entendu les allégations qu'a faites hier M. Daniel Martin Bellemare. Je ne parle pas spécifiquement du cas que vous avez mentionné ce matin, mais selon lui, il est fréquent que des avocats soient engagés à contrat par le ministère de la Justice pour agir au nom du Bureau de la concurrence. Selon la nature de leur propre pratique privée, ces avocats pourraient se trouver en conflit d'intérêts apparent. Vous avez expliqué de façon très habile et très claire que vous aviez mis en place, avec le concours d'un spécialiste, des principes et un guide sur la question des conflits d'intérêt.

Ma question est celle-ci. Compte tenu que c'est le ministère de la Justice qui engage des personnes pour agir en votre nom, est-ce qu'il les engage selon les principes que vous avez vous-mêmes mis en place? Et même si le ministère a respecté ces principes, si, au cours d'une enquête, vous arrivez à la conclusion que cet avocat n'est pas impartial ou n'a pas l'apparence d'être impartial, avez-vous l'autorité nécessaire pour lui dire de cesser d'agir en votre nom? Est-ce que vous avez l'autorité de mettre fin aux contrats, pour cause évidemment?

[Traduction]

M. Konrad von Finckenstein: Le ministère de la Justice possède ses propres règles sur les conflits d'intérêts. Quand il retient les services d'un avocat pour le compte du Bureau de la concurrence, il tient compte de ses règles et des nôtres sur le sujet. Si un avocat dont nous avons retenu les services se trouve en conflit d'intérêts réel ou apparent, il aurait tout intérêt à mettre fin lui-même au contrat parce que ce genre d'allégation peut nuire à son travail. Je serais très surpris d'avoir à le congédier.

• 1025

Mais si la situation que vous évoquez se présentait, je devrais signaler au ministère de la Justice que je ne pense plus pouvoir faire appel à cette personne en raison de certains facteurs, parce qu'il y a apparence... Le ministère de la Justice, qui est très sensible à ce genre de situation, mettrait fin immédiatement au contrat. Il n'y a pas de problème à ce sujet.

[Français]

Mme Marlene Jennings: Qu'arrive-t-il quand votre évaluation du cas et celle du ministère de la Justice diffèrent? J'essaie de déterminer qui a la dernière autorité lorsqu'il y a, au niveau du Bureau de la concurrence ou du ministère de la Justice, quelqu'un qui a déjà été engagé et qu'il y a une évaluation quelconque, d'une part ou de l'autre, qu'il y a, non pas un conflit d'intérêts, mais simplement absence d'apparence d'impartialité. Qui, en dernier lieu, a l'autorité de dire que cette personne doit cesser d'agir au nom du Bureau de la concurrence?

[Traduction]

M. Konrad von Finckenstein: La situation ne s'est jamais présentée et je ne vois pas comment elle le pourrait. Mais, pour les fins de la discussion, en pareil cas, je commencerais par refuser de payer les honoraires que je dois rembourser au ministère de la Justice pour le travail de cette personne, ce qui devrait régler le problème; ensuite, je refuserais de rencontrer cette personne, qui ne pourrait plus se présenter à mon bureau, ce qui devrait clore le dossier. Mais, comme j'ai dit, je ne peux imaginer comment une situation semblable pourrait se produire.

La présidente: Merci.

[Français]

La présidente: Madame Lalonde, s'il vous plaît.

Mme Francine Lalonde: Ma question s'adresse à qui pourra y répondre.

Vous connaissez bien, j'imagine, la loi québécoise sur les pratiques abusives dans la vente de l'essence et du carburant. Si le projet de loi de M. McTeague était adopté, les deux lois pourraient, dans leur application, créer des résultats différents. Au Québec, l'ensemble des entreprises sont soumises aux mêmes conditions quant aux prix de détail. Selon la loi fédérale, tous les joueurs ne sont pas soumis aux mêmes conditions. De gros détaillants indépendants, par exemple, pourraient prétendre qu'ils ne sont pas liés par cette loi et qu'ils peuvent en conséquence fixer les prix qu'ils veulent.

Est-ce qu'il y a une jurisprudence à cet effet? Est-ce qu'on pourrait prétendre que la loi fédérale est une loi de fixation de prix et qu'elle ne s'applique pas d'autre part? Autrement dit, est-ce qu'il peut y avoir là un contentieux juridique?

[Traduction]

M. Konrad von Finckenstein: Voulez-vous tenter de répondre?

M. Harry Chandler: Madame la présidente, la défense de la conduite réglementée est bien établie dans la jurisprudence, et elle traite des conflits entre les règlements et la Loi sur la concurrence. Il arrive souvent que la jurisprudence cite un règlement provincial en précisant que la réglementation en vigueur empêche l'application de la Loi sur la concurrence. C'est une question qu'il faudra régler si le projet de loi est adopté. S'il y a conflit entre le régime en vigueur au Québec et cette disposition, la question devrait être tranchée par les tribunaux.

M. Konrad von Finckenstein: Selon la jurisprudence actuelle, dans la mesure où le régime provincial réglemente précisément cette question, il est clair que la Loi sur la concurrence ne s'appliquerait pas. Il n'y aurait aucun doute à ce sujet.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Globalement?

[Traduction]

M. Konrad von Finckenstein: Il faut vérifier ce que prévoit la loi du Québec, puis vérifier les activités visées par la régie. Pour ce qui est des activités visées, il n'y a pas de problème. Pour ce qui est des pouvoirs que la régie a ou n'a pas exercés, la question reste ouverte, comme M. Chandler l'a dit.

• 1030

[Français]

Mme Francine Lalonde: Mais il pourrait y avoir litige.

M. Konrad von Finckenstein: Il est toujours possible qu'il y ait des litiges.

Mme Francine Lalonde: Pour ceux dont ce serait l'intérêt. Merci.

[Traduction]

La présidente: Sur ma liste, il reste M. Pillitteri et M. Keyes, pour une question complémentaire, et ce sera tout.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je comprends que vous voulez assurer la protection des activités commerciales et des petites entreprises, mais j'aimerais vous exposer un problème. Je ne sais pas si vous serez en mesure de me répondre.

Dans une industrie que je connais très bien, deux groupes contrôlent 84 p. 100 de l'ensemble des produits fabriqués en Ontario. Cette industrie compte aussi une cinquantaine d'entrepreneurs indépendants en Ontario qui réussissent très bien et qui ont une source d'approvisionnement. Toutefois, si ces entrepreneurs ne sont pas en mesure de payer plus cher pour obtenir leur produit, ils vont faire faillite.

Ces 50 entrepreneurs, qui occupent seulement 14 p. 100 du marché de ce secteur d'activité, engagent plus d'employés que les deux autres groupes. Ils ne violent aucune loi et la majorité de ces petits entrepreneurs sont des producteurs, des fabricants et des détaillants, les trois combinés. Si le projet de loi était adopté et que ces petits entrepreneurs n'étaient pas en mesure de payer plus cher que le prix négocié, ils feraient faillite.

Dites-moi, si la loi était adoptée et que ces 50 entrepreneurs, qui sont des producteurs, des fabricants et des détaillants, vendaient leur produit à un prix différent, n'agiraient-ils en contravention de la loi? Je parle ici du domaine de l'agriculture.

M. Harry Chandler: Sont-ils grossistes?

M. Gary Pillitteri: Ce sont des grossistes, des détaillants et des fabricants, les trois combinés.

M. Harry Chandler: Madame la présidente, je pense que le projet de loi C-235, comme je le comprends du moins, vise le fournisseur, un fabriquant qui vend. Je ne sais donc pas si l'exemple que vous présentez...

M. Gary Pillitteri: Ces entrepreneurs fabriquent un produit et le vendent au détail et en gros. S'ils ne peuvent modifier les prix de ce qu'ils vendent, agiraient-ils en contravention de la loi?

M. Konrad von Finckenstein: Ils pourraient très bien, oui. Je ne peux vous répondre de façon catégorique sans avoir plus de renseignements sur, entre autres, les marchés où ils font affaire, leurs concurrents et les prix en vigueur.

M. Gary Pillitteri: Ils vendent leur produit au niveau international sur le marché canadien. Ils concurrencent des produits importés et d'autres fabriqués en Ontario et au Canada, et ils exportent aussi à l'étranger.

Une voix: Parlez-vous de vin?

M. Gary Pillitteri: Je vais vous le dire. Je parle de vin et j'ai un vignoble, monsieur.

M. Konrad von Finckenstein: Vous nous fournissez maintenant un élément de plus, à savoir qu'il s'agit de vin. Certains aspects de la vente du vin sont réglementés, et d'autres non. On vend le vin par l'entremise de la RAO ou différents points de vente, ou on peut le vendre directement au vignoble.

M. Gary Pillitteri: Oui. Je le vends directement au vignoble et aussi par l'entremise de la Régie des alcools de l'Ontario. Je le vends aussi à l'étranger et à des groupes privés. J'en vends par tous les moyens.

M. Konrad von Finckenstein: Vous soulevez justement la question dont j'ai parlé dans mon exposé.

M. Gary Pillitteri: Je voulais simplement avoir une explication, madame la présidente.

La présidente: Monsieur Pillitteri, laissez-le finir; il va simplement revenir sur ce qu'il a expliqué dans sa déclaration.

M. Gary Pillitteri: Je vois.

• 1035

M. Konrad von Finckenstein: Le projet de loi s'applique à tous les produits et impose un régime très rigide. S'il s'applique à votre cas particulier, il peut, sans que ce ne soit voulu, avoir de graves conséquences en raison de sa portée. C'est ce que j'ai signalé et votre exemple vient simplement le souligner.

M. Gary Pillitteri: Merci beaucoup.

La présidente: Merci, monsieur Pillitteri.

Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer ce matin. La discussion a été très intéressante, et j'aimerais vous signaler que le comité va se prononcer, pas aujourd'hui mais à notre prochaine séance, sur une motion demandant l'examen de la Loi sur la concurrence. Nous aurons probablement l'occasion de nous revoir si la motion est adoptée, si cette question est inscrite à nos travaux futurs.

Cela dit, nous allons donner congé aux témoins pour passer à l'étude article par article du projet de loi.

Monsieur von Finckenstein, je vous remercie beaucoup, vous et vos collègues, d'être venus témoigner devant nous.

M. Konrad von Finckenstein: Merci.

(Article 1)

La présidente: Nous sommes saisis du projet de loi C-235. M. McTeague a présenté deux amendements à cet article. Les amendements doivent être proposés officiellement par un membre du comité pour que nous les examinions.

Madame Jennings?

Mme Marlene Jennings: Oui.

La présidente: Et vous avez l'autorisation de M. McTeague?

Mme Marlene Jennings: Oui.

La présidente: Nous examinons l'article 1 et les amendements apportés à l'article 1 que Mme Jennings vient de proposer.

J'imagine que nous allons étudier les amendements séparément. C'est la meilleure façon de procéder. L'amendement que Mme Jennings vient de proposer est celui dont vous allez pouvoir prendre connaissance. Vous devriez avoir deux pages pour les amendements. Nous l'appellerons l'amendement 1.

Madame Jennings, avez-vous des observations à formuler à ce sujet?

Mme Marlene Jennings: Non.

La présidente: Il n'y a rien à dire au sujet de cet amendement?

Mme Sue Barnes: Pour plus de précision, pourriez-vous le lire à voix haute pour que je puisse m'assurer que je consulte le bon document.

La présidente: D'accord. L'amendement propose que le projet de loi C-235, à l'article 1, soit modifié par substitution, aux lignes 11 à 18, page 2, de ce qui suit:

      a) au prix de détail exigé par le fournisseur intégré verticalement dans le même secteur de marché;

C'est l'amendement que nous étudions actuellement.

Monsieur Solomon.

M. John Solomon: J'ai l'amendement. Celui qui le propose ou quelqu'un d'autre peut-il expliquer exactement ce que l'amendement veut dire, je vous prie.

La présidente: Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Merci.

Si j'ai bien compris, quand le projet de loi C-235 a été présenté à la Chambre, puis renvoyé au comité, le ministre avait certaines réserves au sujet de l'article 1 tel qu'il était rédigé, et cet amendement a été apporté justement en réponse aux préoccupations du ministre à ce sujet. Donc cet amendement vise précisément à dissiper les craintes du ministre concernant l'article 1.

La présidente: Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): À propos du rapport sur l'essence présenté par M. McTeague au comité, le ministre en a contesté certains aspects, et il l'a fait savoir au député. Cet amendement ne répond pas aux préoccupations du ministre.

Je pourrais signaler qu'une partie de la réponse faite au comité découlait d'informations... comment pourrais-je vous dire? Nous avons entendu à plusieurs reprises des informations douteuses et erronées de la part de personnes ayant des intérêts reliés. Le ministre a alors recommandé qu'on fasse un examen complet du secteur canadien de la vente au détail du pétrole. Et il a demandé que toutes les associations, qu'il s'agisse des entrepreneurs indépendants, des pétrolières, des fournisseurs, de l'association du Québec, de tous ceux associés au réseau des détaillants de gros...

En même temps, nous avons demandé à toutes les provinces de faire partie du comité directeur. Toutes les provinces ont accepté sauf la Saskatchewan et j'essaie de régler le problème avec le membre de la Saskatchewan. Et il y a aussi des membres d'autres secteurs du gouvernement qui sont touchés.

• 1040

On voulait effectuer une étude approuvée par tous les partis, à l'intention de ces membres du comité de direction pour éliminer la confusion au sujet de l'exactitude des renseignements. C'est la raison pour laquelle le ministre a proposé cette étude, pour savoir ce que nous avons et ce que nous n'avons pas, ce qu'il faudrait recommander et dans quel sens s'orienter.

J'ai essayé de faire en sorte que toutes les provinces soient représentées, et M. Solomon et moi-même allons veiller à ce que ce soit le cas, pour que ce soit une étude complète et détaillée à l'échelle de tout le Canada. L'étude serait soumise au comité et nous pourrions en étudier les données sans craindre qu'elles soient partiales ou erronées. Ce serait une étude d'ensemble. C'est ce que voulait le ministre et j'approuve sa proposition, surtout compte tenu de tous les témoignages que nous avons entendus depuis quelque temps et de toute la confusion dans les données. Il y a toujours des contradictions dans les témoignages, mais c'est ce que le ministre veut.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka.

Y a-t-il d'autres observations au sujet de l'amendement? Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: L'inquiétude que nous avons par rapport à ce projet de loi tient au fait qu'il est limité aux fournisseurs intégrés et que, comme je l'ai indiqué tout à l'heure aux représentants du Bureau de la concurrence, il pourrait être utilisé au Québec pour tenter de défaire l'effet assuré dans le secteur pétrolier par la Régie de l'énergie, qui se penche d'ailleurs encore sur cette question.

Il est évident que nous sommes extrêmement sympathiques à l'objectif visé. Quant à nous, il faudrait continuer à faire en sorte qu'il y ait, au Québec et au Canada, une véritable concurrence. Mais pour qu'elle s'exerce, on devrait, d'une part, tenir davantage compte des conditions des petites et moyennes entreprises et, d'autre part, ne pas faire de différence entre les fournisseurs intégrés et les gros détaillants. Cela nous semble être un problème.

Nous avons cherché à formuler un amendement. Franchement, nous avons eu de la difficulté à trouver quelque chose qui puisse amender cela. Nous souhaitons vivement que nous poursuivions cette étude. J'ai entendu hier une motion que j'avais pensé proposer moi-même, et le Bureau de la concurrence s'est aussi dit intéressé.

Je pense qu'on fait mieux d'amorcer une étude plutôt que de défaire en Chambre une proposition qui n'aurait pas été suffisamment étudiée dans l'aspect de l'élargissement qu'elle représente pour les autres secteurs.

Tout en félicitant M. McTeague pour le travail fait et en disant qu'il a été une bougie d'allumage pour un travail qui doit se poursuivre et que le comité en entier devrait s'engager à poursuivre, je dirai qu'à cette étape-ci, nous serons contre ce projet de loi.

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Madame la présidente, mardi, à la séance à laquelle M. Bellemare comparaissait, j'avais proposé qu'on tente d'obtenir certains documents, parce que les gens du Conseil canadien de la distribution alimentaire et de la Fédération canadienne des épiciers indépendants avaient été incapables de répondre à certaines questions relatives aux parts de marché occupées par les intégrés et les indépendants.

• 1045

On voit bien qu'il y a deux classes d'indépendants: les indépendants regroupés, qui sont en fin de compte des franchisés, et les indépendants individuels. Je pense qu'il faut faire de telles distinctions. J'aimerais donc avoir des détails sur les parts de marché, leur positionnement et ainsi de suite. Je pense qu'on doit être capable de trouver cela quelque part, à Statistique Canada ou ailleurs. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Comme il n'y a pas d'autres commentaires, quels sont ceux qui sont en faveur de l'amendement...?

M. Jim Jones: J'aimerais qu'on procède à un vote par appel nominal.

(L'amendement est rejeté par 12 voix contre 3)

La présidente: Vous aviez un deuxième amendement à proposer, madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Étudions-nous les amendements avant...

La présidente: Il s'agit du deuxième amendement concernant le même article. Les deux amendements traitent de l'article 1. Nous allons étudier tous les amendements avant de discuter de l'article. Il vaut mieux procéder de cette façon, je pense.

Mme Marlene Jennings: D'accord, je propose donc le deuxième amendement apporté à l'article 1.

La présidente: Pour éviter toute confusion, l'amendement propose que le projet de loi C-235, à l'article 1, soit modifié par suppression des lignes 21 à 29, page 2. Avez-vous quelque chose à dire au sujet de cet amendement?

M. Jim Jones: J'aimerais qu'on procède à un vote par appel nominal.

La présidente: M. Jones aimerait qu'on procède à un vote par appel nominal.

(L'amendement est rejeté par 10 voix contre 5)

La présidente: Comme il n'y a pas d'autres amendements, du moins à ce que je sache, l'article 1 est-il adopté?

Une voix: J'aimerais qu'on procède à un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

La présidente: Ce sera un vote par appel nominal.

(L'article 1 est rejeté par 10 voix contre 5)

• 1050

La présidente: L'article 2 est-il adopté? Voulez-vous encore un vote par appel nominal, monsieur Jones?

M. Jim Jones: Oui, je veux un vote par appel nominal dans tous les cas.

La présidente: C'est ce que vous voulez. Je ne perdrai donc pas de temps à vous poser la question chaque fois.

Monsieur Jones, le résultat du vote peut-il s'appliquer aux autres? Êtes-vous tous d'accord pour que nous appliquions le résultat du dernier vote aux autres?

M. Jim Jones: Oui.

Des voix: Oui.

La présidente: C'est d'accord.

(L'article 2 est rejeté—Voir le Procès-verbal)

La présidente: Le titre est-il adopté? Peut-on utiliser le résultat du dernier vote?

M. Jim Jones: Oui.

(Le titre est rejeté—Voir le Procès-verbal)

La présidente: Walt.

M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.

Comme les articles et le titre ont été rejetés, j'aimerais que la greffière nous explique les choix qui s'offrent à nous.

La présidente: Je m'excuse, vous me regardez. Tout le monde me regarde.

M. Walt Lastewka: Oui, madame la présidente, vous êtes la responsable.

La présidente: C'est mon travail.

Pour votre information, comme nous avons rejeté le titre et les articles, nous pouvons faire rapport du projet de loi à la Chambre, à l'étape du rapport, et il serait alors possible de rétablir le titre et les articles par voie de motion. Nous pouvons aussi adopter une motion demandant de ne pas donner suite au projet de loi, ce qui voudrait dire qu'il n'y aurait pas d'étape du rapport. Le rapport pourrait tout de même être discuté à l'appel des motions, et c'est à ce moment-là que nous pourrions présenter notre rapport. Vous pourriez donc adopter une motion demandant de ne pas donner suite au projet de loi, et nous ferions rapport de cette motion à la Chambre qui pourrait en discuter à l'appel des motions.

M. Walt Lastewka: Ça se décide à la Chambre?

La présidente: Au moment des affaires courantes, il y a une période qui est réservée à la présentation des rapports de comité. Nous produirions tout de même un rapport indiquant que le projet de loi n'a pas été retenu par le comité et la question pourrait alors être débattue.

M. Walt Lastewka: Et la question est discutée à la Chambre. D'accord.

La présidente: À ce stade, elle pourrait être débattue à la Chambre.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones: J'aimerais faire un rappel au Règlement. Pourquoi ne poursuivons-nous pas avec les deux derniers points?

La présidente: Cette discussion prépare la prochaine question que je vais vous poser au sujet de l'adoption du projet de loi. Nous devons décider comment procéder, parce que c'est nouveau. Une nouvelle procédure a été établie pour les projets de loi émanant des députés. Nous sommes seulement le deuxième comité à l'appliquer et j'ai pensé qu'il était utile de l'expliquer. Avant l'adoption de cette nouvelle procédure, il y avait beaucoup de mécanismes différents pour les projets de loi d'initiative parlementaire. La nouvelle procédure nous offre différentes options.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Je crois comprendre que nous appliquons la nouvelle procédure et je vais donc proposer de ne pas donner suite au projet de loi.

La présidente: Pour quelle raison?

M. Walt Lastewka: Parce que nous avons perdu la confiance du comité permanent.

La présidente: Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

Monsieur Jones.

M. Jim Jones: Madame la présidente, j'invoque le Règlement parce que je ne suis pas d'accord. Je pense que nous devrions continuer l'étude et faire un rapport du projet de loi à la Chambre.

La présidente: Vous ne m'avez pas compris, monsieur Jones. Nous allons faire rapport du projet de loi à la Chambre, mais tout dépend de ce que nous décidons. Il y a différentes possibilités selon le rapport que nous faisons.

M. Jim Jones: D'accord, nous allons proposer que...

La présidente: Nous allons proposer de ne pas donner suite au projet de loi. Si cette motion est adoptée, j'indiquerai que notre comité est d'avis qu'il ne faudrait pas donner suite au projet de loi. Je présenterai ce rapport pendant les affaires courantes. C'est alors que le rapport pourrait être débattu. Autrement, si nous supprimons le titre et les articles, il sera présenté à l'étape des rapports à la Chambre et il y a d'autres possibilités.

Est-ce que tout le monde a compris? Je ne veux pas éviter de vous demander si vous voulez adopter le projet de loi. J'explique que nous devons procéder autrement parce que nous avons déjà rejeté des motions. Il y a deux options différentes qui s'offrent à nous.

Monsieur Jaffer.

M. Rahim Jaffer: J'aimerais avoir une autre précision. Je comprends ce qui va se passer si nous adoptons la motion qui vient d'être présentée. Quelle est l'autre option? Vous avez dit que nous pourrions laisser la Chambre en débattre. Qu'arrive-t-il si nous choisissons l'autre option?

• 1055

La présidente: Si nous rejetons le titre et les articles et ne présentons pas une motion demandant de ne plus donner suite au projet de loi, il y aura l'étape du rapport et, d'après ce que m'a dit la greffière, le titre et les articles du projet de loi pourraient alors être rétablis.

M. Jim Jones: Le projet de loi serait-il débattu à la Chambre quand il en sera fait rapport à la Chambre?

La présidente: Si la motion dont nous sommes actuellement saisis est adoptée, le projet de loi pourra être débattu pendant les affaires courantes, à l'appel des motions. Il le pourra.

M. Rahim Jaffer: Pas nécessairement.

La présidente: J'imagine qu'il le sera.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Si le comité adopte la motion que vient de présenter M. Lastewka et que vous en faites rapport à la Chambre, ce qui donne lieu à un débat, selon la nouvelle procédure, le projet de loi peut-il être rétabli durant ce débat par voie de motion?

La présidente: La greffière à la procédure est peut-être en mesure de nous donner une explication.

Mme Marlene Jennings: Ma question est la suivante: si ce n'est pas possible, pourquoi alors en débattre? C'est ce que j'essaie de savoir.

La présidente: Vous n'allez pas aimer cette réponse.

Mme Marlene Jennings: J'essaierai d'être impartiale.

La présidente: La greffière vient tout juste de me dire qu'il se peut fort bien que les greffiers au bureau ne sachent pas trop quoi faire vu qu'il y a longtemps que la chose ne s'est pas produite.

Mme Marlene Jennings: Autrement dit, il n'y a pas de réponse claire à ce qui peut sortir...

La présidente: La décision reviendra au président. C'est un nouveau processus...

Mme Marlene Jennings: Je comprends.

La présidente: ...une nouvelle procédure. De nouveaux précédents seront établis.

Mme Marlene Jennings: Il n'y a donc pas de réponse claire.

La présidente: Je m'excuse si j'ai tort. En ce qui a trait à l'avis qu'on nous donne maintenant, étant donné mon âge je ne suis pas trop au courant de ce qui a pu se passer avant à la Chambre et je m'en remets dans ce cas-ci à mes conseillers.

Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Je comprends tout à fait le débat qui pourrait s'ensuivre si cette motion est mise aux voix et se rend à la Chambre. À l'étape du rapport du projet de loi, une motion est mise aux voix et fait l'objet d'un débat. Je crois ne pas me tromper en affirmant qu'il est impossible qu'elle puisse être reprise lors de ce débat à cette étape.

Par contre, j'aimerais que l'on me renseigne au sujet de l'autre aspect—si la motion est rejetée. Ce projet de loi est renvoyé à la Chambre en tant que projet de loi C-235 sans titre, sans articles et, à l'étape du rapport... Cela semble un peu drôle, mais à l'étape du rapport, je crois comprendre que des motions peuvent être présentées et des votes peuvent être tenus au sujet du projet de loi, de ses articles et de son titre.

La présidente: Des motions peuvent être présentées pour rétablir le titre et les articles.

M. Stan Keyes: Je sais que vous vous y connaissez dans beaucoup de domaines, mais je veux entendre la greffière au bureau.

Merci.

La présidente: La greffière m'informe que des motions peuvent être présentées alors pour rétablir le titre et les articles. Je crois comprendre qu'il y a déjà une motion de ce genre, donc...

M. Stan Keyes: Désolé, je ne comprends pas.

La présidente: Il y a eu des motions de ce genre-là pour d'autres projets de loi adoptés par le passé.

M. Stan Keyes: Mais il s'agit d'un nouveau processus. Comment peut-il y avoir d'autres...?

La présidente: Il y a un autre comité. J'ai dit que nous étions le second comité. Dans le cas du projet de loi de Mme Guarnieri, un processus est déjà en place.

M. Stan Keyes: Oui, mais le comité avait fait rapport d'un projet de loi vide et elle n'avait aucune chance de... Ne l'a-t- elle pas fait à l'étape du rapport?

La présidente: Je ne fais que suivre l'avis qu'on me donne ici. Ce qu'on me dit, c'est qu'elle pourra présenter ces motions à l'étape du rapport.

Madame Lalonde et nous passerons ensuite à Mme Barnes.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Si on ne renvoie pas le tout à la Chambre, il n'y aura pas de débat à la Chambre. Je pense que c'est clair. La question est de savoir si on veut poursuivre le débat à la Chambre.

[Traduction]

La présidente: Non, ce n'est pas clair du tout. Vous ne comprenez pas ce que je dis.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Eh bien, expliquez-le une seconde fois. D'habitude, je comprends vite.

[Traduction]

M. Stan Keyes: [Note de la rédaction: Inaudible]... ce projet de loi et vient simplement d'en faire rapport, et ensuite rien ne se passe ou...

La présidente: Non, j'ai dit très clairement que si cette motion est adoptée, lorsqu'il sera fait rapport du projet de loi à la Chambre, il sera alors possible d'en débattre au moment de l'étude des motions.

M. Stan Keyes: Exact.

La présidente: Mais non à l'étape du rapport.

M. Stan Keyes: Exact.

La présidente: J'essaie d'expliquer. Il est possible qu'on en discute de nouveau à la Chambre. Il n'est donc pas juste de dire qu'il n'en serait pas discuté à la Chambre.

• 1100

M. Stan Keyes: Nous devons attendre cinq minutes afin d'obtenir des éclaircissements, parce que je ne vais pas voter à l'égard de la motion alors que je ne sais pas de quoi parle la greffière. Allons chercher quelqu'un qui s'y connaît en la matière.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Ce que vous avez dit est exact, la façon dont vous avez décrit la chose.

M. Stan Keyes: Je croyais avoir raison, mais la greffière s'y perd.

La présidente: Une tout petit instant, on me donne une explication. Nous allons suspendre la séance une minute pendant que la greffière obtient des éclaircissements.

• 1101




• 1104

La présidente: Nous reprenons nos travaux.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Madame la présidente, je ne pensais pas que j'allais compliquer les choses ici. J'essayais d'accélérer le processus.

M. Stan Keyes: Pour qui?

M. Walt Lastewka: Je serais heureux de retirer la motion si nous dispositions d'un mécanisme nous permettant de faire simplement rapport du projet de loi à la Chambre. Je ne sais pas comment vous faites rapport d'un projet de loi qui n'a ni titre ni articles, mais je suis sûr que vous pourriez trouver une solution d'ici là.

• 1105

La présidente: Non, un mécanisme est déjà en place et il a déjà été utilisé. Un comité a déjà fait rapport d'un projet de loi sans titre, ni articles.

M. Walt Lastewka: Alors, avons-nous besoin d'une motion pour cela?

La présidente: Oui. Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre?

Un petit instant. Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Parce que cette motion a maintenant été retirée par M. Lastewka, je vais vous parler au sujet de la motion «Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre?»

La présidente: Attendez un instant, avant cela il faut que je présente la motion suivante: le projet de loi est-il adopté?

M. Stan Keyes: D'accord. Rejetons celle-là d'abord et discutons ensuite de la partie suivante.

La présidente: Nous ne procédons pas ainsi maintenant parce que nous avons rejeté tous les articles. Il n'y a donc rien à adopter. Nous passerons donc à la motion suivante.

Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre? Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Pour revenir à la motion «Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre», d'après ce que nous avons pu tirer de l'information qui nous a été fournie... et tout n'est pas encore clair comme de l'eau de roche, à dire vrai. Mais cela dit, M. McTeague, qui n'a pas ménagé ses efforts en ce qui a trait à ce projet de loi, a pu le présenter au comité.

Nous avions tous nos raisons pour voter en faveur de ce projet de loi ou nous y opposer. Je crois qu'il devrait maintenant suivre le processus et retourner à la Chambre des communes, où il en est fait rapport. M. McTeague pourra alors donner d'autres précisions, d'autres éclaircissements et que sais-je encore pour présenter son projet de loi d'initiative parlementaire. Je veux insister sur le fait qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi du gouvernement ni de personne d'autre, il s'agit de sa propre mesure législative. S'il peut le faire à la Chambre des communes, que Dieu le bénisse alors et je lui souhaite bonne chance. S'il ne peut le faire et que d'autres députés de la Chambre des communes ne sont pas convaincus, comme ce fut le cas pour moi à ce comité parce que nous n'avons eu que deux semaines à consacrer à un sujet que M. McTeague maîtrise après plus de trois ans d'efforts, nous voterons alors à la Chambre.

La présidente: Monsieur Keyes, je veux simplement faire le point sur l'information que j'ai et sur celle que j'ai transmise au comité.

La greffière m'a informée que le rapport peut être débattu au moment de l'étude des motions et des rapports de comité. Je n'ai pu joindre M. Marleau. Au Bureau du leader du gouvernement à la Chambre on m'a dit que, dans le cas de la motion de M. Lastewka, on ne croyait pas que ce serait le cas s'il était fait rapport du projet de loi. M. Lastewka a alors accepté de retirer sa motion. Je veux simplement le signaler. Je suis désolé si on vous a mal renseignés. C'est l'avis que m'a donné notre greffière à la procédure et cela ne semble pas corroborer celui du Bureau du leader à la Chambre, pour ce qui est de notre côté à tout le moins.

Étant donné qu'il s'agit d'un nouveau processus, je ne savais pas avant d'arriver ce matin que cela pouvait être une possibilité. Je n'avais nullement l'intention de causer des problèmes à quiconque au comité. Je suis entièrement d'accord avec vous pour dire qu'il existe un processus en ce qui a trait aux projets de loi d'initiative parlementaire et que nous devrions le suivre.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Premièrement, je vous remercie des éclaircissements.

Avant qu'on en finisse avec cette question, je vous félicite de l'excellent travail que vous accomplissez à titre de présidente de ces audiences et d'autres audiences. Je crois que vous avez fait preuve d'une grande patience, de tolérance et d'un bon sens de l'humeur dans des moments très difficiles. Je parle en mon nom mais je ne crois pas me tromper en disant que je me fais le porte-parole du comité.

M. Stan Keyes: Bravo!

M. Janko Peric: Non, non, non.

La présidente: Monsieur Peric, je savais que je vous pouvais compter sur vous.

Des voix: Oh, oh!

Mme Marlene Jennings: Je veux dire que j'appuierai la motion disposant que nous fassions rapport du projet de loi à la Chambre. Si je le fais, c'est parce que la Chambre des communes—si nous mettons le Sénat à part, vu que le Sénat a un rôle à jouer—est le siège suprême du gouvernement au Canada. Nous y sommes élus. Je suis d'accord avec M. Keyes et j'aurais du mal à faire avorter ou à émasculer une mesure législative dans la mesure où les députés de la Chambre des communes n'ont pas l'occasion d'en débattre et de décider de son sort.

Je veux aussi profiter de l'occasion pour féliciter mon collègue M. McTeague. M. McTeague s'est donné corps et âme à cette mesure législative.

En tant que nouvelle députée qui ne siège au Parlement que depuis les élections de 1997, je dois dire que vous nous donnez l'exemple du genre de travail et du dévouement auxquels les Canadiens sont en droit de s'attendre de la part de leurs députés, indépendamment de la partisannerie ou de l'affiliation politique. Vous m'avez beaucoup appris.

La présidente: Madame Jennings, je suis désolée...

Mme Marlene Jennings: J'ai terminé.

La présidente: ...mais nous avons dépassé le temps qui nous était imparti. Nous devons en finir avec cette question ou nous devrons revenir à 15 h 30. Les membres d'un autre comité attendent que nous libérions la salle.

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Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre?

M. Jim Jones: Dans sa forme modifiée.

La présidente: Il n'y avait pas d'amendement.

Une voix: Cela compte comme un amendement.

La présidente: Cela compte comme un amendement. Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre dans sa forme modifiée?

Des voix: D'accord.

La présidente: La séance est levée.