INDY Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 9 mars 1999
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte.
En conformité avec l'ordre de renvoi adopté par la Chambre le mardi 3 novembre 1998, nous examinons maintenant le projet de loi C-54, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois.
Nous recevons aujourd'hui deux groupes de témoins, premièrement TELUS Corporation, de 15 h 30 à 16 h 30, puis, à 16 h 30, Bell Canada. Nous accueillons Mme Lorna Higdon-Norrie, vice-présidente, politique publique et affaires gouvernementales, et M. Makaryshyn, conseiller principal, politique industrielle. Je ne sais pas qui fera la déclaration liminaire, je vais donc vous céder la parole.
[Français]
Mme Lorna Higdon-Norrie (vice-présidente, Politiques publiques et affaires gouvernementales, BCT.TELUS): Je tiens d'abord à vous remercier, madame la présidente, pour cette occasion qui nous est offerte de participer aux audiences du Comité de l'industrie dans le cadre du processus de consultation portant sur le projet de loi C-54.
[Traduction]
Je vous remercie beaucoup de nous donner cette possibilité de comparaître devant le comité. Je m'appelle Lorna Higdon-Norrie, et mon titre a, en fait, changé depuis la fusion. Je suis maintenant vice-présidente des affaires gouvernementales et communautaires de BCT.TELUS, et je suis accompagnée de notre conseiller principal en politique industrielle, John Makaryshyn. J'espère sincèrement que John pourra répondre à toutes les questions techniques que pourrait poser le comité.
[Français]
Récemment formé à la suite d'une fusion entre TELUS et BC Telecom, BCT.TELUS est la deuxième plus importante compagnie de télécommunications au Canada.
[Traduction]
Avec nos filiales en propriété exclusive et nos coentreprises, nous employons 25 000 Canadiennes et Canadiens et nous gérons des actifs de près de 9 milliards de dollars. Les sociétés qui composent BCT.TELUS fournissent des services de données vocales, de communications visuelles, d'information et de publicité.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de commenter ce projet de loi. Nous considérons le projet de loi C-54 comme une initiative législative importante et bien nécessaire pour susciter la confiance envers le marché numérique et pour protéger les droits des Canadiens en matière de protection de la vie privée. Il est absolument essentiel d'avoir au Canada un cadre législatif fédéral clair en matière de protection de la vie privée afin de promouvoir la croissance du commerce électronique et de fournir le niveau de protection de la vie privée que désirent les Canadiens. À notre avis, le projet de loi C-54 fournit un cadre équilibré cohérent pour la protection de la vie privée au Canada.
Le projet de loi est basé sur le Code type de l'Association canadienne de normalisation sur la protection des renseignements personnels, et nous pensons que c'est un excellent modèle pour une loi cadre fédérale sur cette question. La norme de la CSA reconnaît les droits des particuliers à contrôler et limiter l'utilisation des renseignements personnels. Il reflète les besoins légitimes des entreprises concernant l'utilisation de renseignements à des fins commerciales et stipule qu'elles ont l'obligation de rendre compte de leurs activités, d'obtenir un consentement éclairé, de protéger les renseignements personnels et de rendre leurs politiques et leurs pratiques transparentes aux particuliers.
Nous félicitons donc le gouvernement de présenter le projet de loi C-54 et nous recommandons pleinement son adoption avec les quelques amendements précis que nous vous proposons.
Avant de faire des suggestions précises concernant les améliorations à apporter à cette importante initiative, je voudrais signaler brièvement certaines des initiatives que les sociétés qui font partie de BCT.TELUS ont entreprises pour régler les problèmes de protection de la vie privée qui nous préoccupent tous. Je voudrais également brièvement faire part au comité de certains points de vue exprimés par nos clients dans les groupes de discussion que nous avons organisés. Comme vous le savez, le commerce électronique connaît une croissance énorme et, face aux nouvelles technologies et aux nouvelles façons de recueillir, d'utiliser et de communiquer les renseignements, des questions concernant la vie privée, la sécurité et la protection des consommateurs sont apparues.
• 1535
Nous pensons que, pour connaître la réussite sur le marché,
les entreprises canadiennes doivent bien comprendre les nouvelles
questions liées à la vie privée que les nouvelles technologies ont
suscitées. Le succès des relations commerciales, en particulier sur
l'Internet, nécessite qu'une confiance soit établie. La mise en
oeuvre de codes complets de protection de la vie privée et de
solutions technologiques qui inspirent confiance aux consommateurs
permet une interaction personnalisée.
BCT.TELUS se penche très activement sur ces questions qui préoccupent les Canadiens. Nous comprenons qu'il est nécessaire d'assurer la sécurité et la protection des renseignements des consommateurs et de respecter les droits à la protection de la vie privée, et je suis d'avis que nous avons fait la preuve de notre engagement à cet égard.
En tant qu'entreprise socialement responsable, nous sommes d'avis qu'il est dans notre intérêt de protéger les renseignements personnels des consommateurs et les données concernant nos employés. Les consommateurs apprécient la protection et choisissent de traiter avec les fournisseurs de service qui respectent leur vie privée. Je pense que c'est très important. C'est particulièrement vrai dans le monde actuel, où la technologie de pointe est si présente.
Les questions touchant la vie privée sont également très importantes pour nos clients. Nous avons organisé des séances de consultation auprès d'eux pour savoir ce qu'ils ont à dire à propos de la vie privée et, en particulier, de la norme de la CSA, qui était ce que nous examinions à ce moment-là.
Un autre message clé que nous avons alors reçu de nos clients est qu'ils voulaient, à ce moment-là, que nous adoptions un code de protection de la vie privée basé sur la norme de la CSA. Tant qu'ils exercent un choix, les clients préfèrent traiter avec des entreprises qui ont adopté un code de protection de la vie privée et ils considèrent la norme de la CSA comme une norme très importante pour protéger leurs droits. Nous avons travaillé très fort avec d'autres membres de notre industrie pour réaliser le code de protection de la vie privée de Stentor, et nous avons tout à fait l'intention de mettre ce code en oeuvre dans l'ensemble du groupe de sociétés BCT.TELUS.
Dans la documentation que nous avons apportée aujourd'hui, nous avons inclus des exemplaires du code de protection de la vie privée de BCT.TELUS et des renseignements sur les services de commerce électronique que nous offrons et qui renforcent à la fois la protection de la vie privée et la sécurité des données. De plus, les sites Web de notre société contiennent des déclarations très claires au sujet de nos pratiques en la matière.
L'adoption d'un code de protection de la vie privée démontre aux particuliers et aux entreprises qui constituent notre clientèle que nous répondons aux préoccupations croissantes de la population au sujet de la protection des renseignements personnels. Les dix principes de la norme de la CSA représentent un ensemble équilibré et complet de principes et de pratiques de gestion de l'information pour régir l'utilisation, la collecte et la diffusion des renseignements personnels. Nos clients nous ont dit qu'ils comprennent que nous basions la politique de protection de la vie privée de notre société sur cette norme et qu'ils jugent cela intéressant.
Un autre message important que nos clients nous ont communiqué est qu'ils sont d'accord pour que nous échangions des renseignements à l'intérieur de notre groupe de sociétés afin de pouvoir leur offrir une gamme complète de services de communication. Il est essentiel de pouvoir échanger librement des renseignements à l'intérieur d'une organisation pour répondre aux besoins des consommateurs. Nos clients le savent et exigent que nous leur fournissions les meilleurs services possible.
C'est en tant que société canadienne de communication qui se soucie et continuera de se soucier activement des droits de ses clients et de ses employés en matière de protection de la vie privée que nous nous présentons avec plaisir devant vous aujourd'hui pour exprimer notre appui à ce projet de loi. BCT.TELUS appuie en particulier le fait que le projet de loi C-54 adopte la norme de la CSA en tant que référence en matière de protection des droits au respect de la vie privée dans le secteur privé.
Nous avons examiné avec soin le projet de loi, et nous voudrions maintenant vous soumettre quelques commentaires spécifiques au sujet de ce qui, à notre avis, pourrait contribuer à l'améliorer afin qu'il serve bien les intérêts de la population et des entreprises canadiennes.
Je commenterai deux domaines traités dans ce projet de loi. Le premier concerne les pouvoirs du commissaire à la protection de la vie privée, et le deuxième certains amendements de détail visant à reconnaître l'existence et l'utilisation des renseignements publics et à faire en sorte que ce projet de loi ne pose aucun obstacle au transfert de renseignements à l'intérieur d'une société.
• 1540
Nous proposons deux amendements concernant spécifiquement les
pouvoirs du commissaire à la protection de la vie privée tels
qu'ils sont énoncés dans le projet de loi C-54.
Le premier amendement que nous proposons à cet égard concerne son pouvoir d'effectuer des vérifications au sujet de violations présumées des pratiques commerciales recommandées, tel qu'il est énoncé à l'annexe 1 du projet de loi. Le paragraphe 5(2) stipule que, dans l'annexe contenant la norme de la CSA, l'emploi du conditionnel indique qu'il s'agit d'une recommandation adressée à une société et non pas d'une obligation. À notre avis, une société ne devrait pouvoir faire l'objet d'une vérification que lorsqu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une violation de la loi a été commise, mais cela ne devrait pas être étendu aux conflits portant sur des pratiques commerciales recommandées. À notre avis, les vérifications constituent une forme d'ingérence, et elles imposent un fardeau administratif qui entrave les activités commerciales des entreprises. Le pouvoir de vérification devrait donc être utilisé judicieusement pour couvrir les violations présumées des obligations énoncées dans le projet de loi mais ne devrait pas être étendu pour permettre une microgestion des pratiques commerciales recommandées.
Par exemple, l'alinéa 4.7.3 de l'annexe 1 stipule que:
-
Les méthodes de protection devraient comprendre
-
a) des moyens matériels, par exemple le verrouillage des classeurs
et la restriction de l'accès aux bureaux;
-
b) des mesures administratives, par exemple des autorisations
sécuritaires et un accès sélectif; et
-
c) des mesures techniques, par exemple l'usage de mots de passe et
du chiffrement.
L'alinéa 4.7.2 stipule que: «Les renseignements plus sensibles devraient être mieux protégés.»
Les procédures exactes utilisées pour respecter ces pratiques commerciales varieront probablement beaucoup, en fonction de divers facteurs tels que la nature de l'entreprise, le type de renseignement en question, le caractère approprié des procédures existantes, etc. Ce sont des pratiques recommandées très utiles qui aideront les entreprises canadiennes à respecter la loi, mais, à notre avis, le pouvoir de vérification ne devrait pas s'appliquer aux pratiques recommandées.
Permettez-moi d'être absolument clair. Il nous paraît très important d'assurer l'application des pratiques commerciales appropriées. Toutefois, d'autres parties du projet de loi fournissent déjà au commissaire à la protection de la vie privée les outils nécessaires pour assurer le respect de ces pratiques commerciales. L'article 11 permet à un particulier de déposer une plainte s'il pense qu'une organisation contrevient à la loi ou ne met pas en oeuvre une pratique commerciale recommandée. En outre, l'article 12 confère au commissaire le pouvoir de faire enquête sur toute plainte de cette nature, y compris les plaintes selon lesquelles une organisation ne met pas en oeuvre une pratique commerciale recommandée. Et il a également le pouvoir de tenter de parvenir au règlement d'une telle plainte.
Nous recommandons donc à cet égard d'amender la partie concernant les vérifications, plus particulièrement en supprimant «ou n'a pas mis en oeuvre les recommandations énoncées dans l'annexe 1» au paragraphe 18(1).
Le deuxième domaine concerne notre préoccupation relative à la garantie d'utilisation d'une procédure équitable, plus particulièrement pour ce qui est de savoir si une autorisation judiciaire préalable devrait être obtenue avant que le commissaire à la protection de la vie privée...
La présidente: Puis-je vous demander de résumer le reste de votre mémoire? Le greffier avait signalé à tout le monde que les exposés ne devaient pas dépasser cinq minutes, et toute personne voulant présenter un mémoire plus long aurait dû le soumettre à l'avance. Je vous demanderai donc de résumer le reste.
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je suis désolée, nous ne nous sommes sans doute pas compris. J'avais prévu une durée de 10 à 12 minutes. Je vais certainement essayer de résumer très rapidement mon exposé.
La deuxième question de fond concernant les pouvoirs du commissaire à la protection de la vie privée est notre préoccupation quant à la nécessité de respecter ou non une forme de procédure équitable avant que le commissaire n'exerce ses pouvoirs en matière de perquisition et de saisie. À l'heure actuelle, il peut pénétrer dans les locaux d'une organisation sans autorisation judiciaire préalable. C'est un très grand pouvoir, et nous aimerions approfondir avec le comité la question de savoir s'il ne devrait pas être tenu d'obtenir un mandat avant de perquisitionner et d'effectuer une saisie.
Je passerai très rapidement en revue les deux amendements de détail que nous voulions mentionner, parce qu'en fait, ceux que le gouvernement fédéral a déposés la semaine dernière ont réglé les deux problèmes qui nous préoccupaient. Il s'agissait de l'utilisation des renseignements publics et de l'utilisation interne de renseignements, et nous sommes tout à fait en faveur de ces mesures telles qu'elles ont été déposées.
Je vous prie de m'excuser d'avoir dépassé le temps prévu pour les déclarations liminaires. Permettez-moi de souligner qu'à notre avis, le projet de loi C-54 constitue une partie intégrante d'un bon cadre de réglementation du commerce électronique, et nous vous invitons à l'adopter en tenant compte de ces recommandations.
La présidente: Merci beaucoup. Je vous présente mes excuses. Je sais qu'il va y avoir plusieurs questions, et il se trouve que nous ne disposons que d'un temps limité pour cela.
Monsieur Jaffer.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Merci. J'ai quelques questions à vous poser. J'essaie de voir lesquelles sont les meilleures, vu le temps limité dont nous disposons.
J'aimerais faire un commentaire au sujet de TELUS. Je vous remercie de votre présence ici aujourd'hui et de vos recommandations. Je pense que vous avez soulevé une question très importante en ce qui concerne les pouvoirs du commissaire à la protection de la vie privée, et je pense que nous l'avons négligée dans une certaine mesure.
Nous avons, mon collègue au sein de ce comité et moi, demandé à des commissaires à la protection de la vie privée antérieurs s'il y avait des preuves empiriques de plaintes concernant des violations de la vie privée par rapport aux normes de l'Association canadienne de normalisation qu'ils pouvaient nous présenter. Nous n'avons pas réellement reçu ces renseignements, ou ils ne sont pas encore très plausibles. Rien ne semble indiquer qu'il y a eu de nombreuses violations du droit au respect de la vie privée. La représentante d'AOL, qui a dit qu'elle était au courant d'une plainte présentée actuellement en vertu de la norme de la CSA, a été la seule à en signaler une, c'était jeudi dernier.
Ma question est la suivante. Tous les membres de ce comité sont en faveur de ce projet de loi, et il me paraît évident que vous avez déclaré que vous l'étiez aussi, mais en ce qui concerne la protection de la vie privée...
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): [Note de la rédaction: Inaudible]
M. Rahim Jaffer: Je suppose que ma collègue du Bloc dit que le Bloc est contre. Ce projet de loi est-il réellement nécessaire si le code actuel de la CSA satisfait manifestement les exigences de la plupart des gens en matière d'ingérence dans la vie privée?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je pense que oui. En fait, je crois que les entreprises de notre secteur en sont probablement assez convaincues. Les sociétés comme la nôtre, les très grandes sociétés qui disposent de vastes ressources et manipulent une grande quantité de données sensibles, ont, je pense, fait la preuve de leur engagement à cet égard. Nous avons publié nos codes, et je pense que cela contribue fortement à nous gagner la confiance de nos clients et de nos employés. Néanmoins, le monde change très rapidement, et même les gens qui traitent avec les sociétés comme la nôtre seront encore plus confiants, surtout dans le domaine du commerce électronique, s'il existe aussi un recours, une instance auprès de laquelle ils peuvent se plaindre de nous.
Ce qui me paraît encore plus important est qu'il y a beaucoup d'entreprises qui ne disposent peut-être pas de ces ressources et n'ont pas tenu compte de l'aspect délicat de ces questions autant qu'on le souhaiterait, et je pense qu'un cadre législatif fédéral est utile, sinon essentiel, pour orienter leurs pratiques et fournir un recours à leurs clients.
M. Rahim Jaffer: En ce qui concerne les pouvoirs du commissaire à la protection de la vie privée... Étant d'Edmonton et traitant avec TELUS, je sais que cette société prend cette question très au sérieux, surtout en ce qui concerne les renseignements personnels.
Il me semble qu'une des préoccupations que vous avez soulevées est que, si nous maintenons cette partie du projet de loi sous sa forme actuelle, nous donnons beaucoup de pouvoir à un organisme non élu qui pourrait gêner beaucoup les entreprises qui essaient, en fait, de s'acquitter de leurs obligations et de leurs engagements envers leurs clients.
Premièrement, il est évident que des droits fondamentaux pourraient être violés si cet article n'est pas amendé comme vous le proposez.
Deuxièmement, quel coût votre entreprise aurait-elle à assumer du fait que le commissaire à la protection de la vie privée aurait des pouvoirs aussi étendus que vous l'avez laissé entendre et que nous l'avons constaté si cet article n'est pas modifié?
Je peux peut-être poser cette question à John. Puisque vous êtes avocat, vous pouvez y répondre.
Mme Lorna Higdon-Norrie: J'interviendrai d'abord.
Je ne pense pas que nos recommandations affaiblissent de quelque façon que ce soit les pouvoirs conférés au commissaire par ce projet de loi. En fait, nous proposons une certaine équité relativement à l'obtention d'une ordonnance judiciaire, parce que cela nous paraît juste et que c'est une norme appliquée dans d'autres lois. Il nous paraît difficile d'envisager que le commissaire ou, d'ailleurs, qui que ce soit d'autre puisse pratiquer une perquisition sans que nous puissions nous adresser quelque part pour déterminer si c'est équitable ou justifié dans les circonstances. Bien entendu, si c'est équitable et justifié, l'ordonnance judiciaire correspondante sera émise. Cela arrive tout le temps dans d'autres enquêtes commerciales, nous ne pensons donc pas que cela retire le moindre pouvoir au commissaire à la protection de la vie privée.
• 1550
Bien entendu, pour votre question sur les coûts, c'est un
nouveau projet de loi, un domaine nouveau pour nos tous. Qui peut
le savoir? Je pense qu'il est expressément prévu que ce projet de
loi sera examiné au bout d'un certain temps. À ma connaissance, les
périodes correspondantes sont en cours de discussion. Cette
question pourrait être soulevée à ce moment-là, si cela coûte, en
fait, plus cher au commissaire, au secteur privé ou aux
particuliers que personne ne le voulait réellement. Je ne saurais
me prononcer, sinon pour dire que les coûts concrets assumés
réellement par une société sont une chose, et que les coûts
potentiels en ce qui concerne sa réputation en est une autre. Nous
attachons beaucoup d'importance aux coûts potentiels qu'une
perquisition peut entraîner pour la réputation d'une société.
M. Rahim Jaffer: Aviez-vous quelque chose à ajouter à cela?
M. John Makaryshyn (conseiller principal, politique industrielle, BCT.TELUS): Merci.
J'ajouterai simplement qu'il est important de comprendre que, dans notre proposition, nous parlons simplement des pouvoirs de perquisition et de saisie qui existent dans le cas d'une enquête, article 12, ou d'une vérification financière, article 18. Le commissaire à la protection de la vie privée dispose de vastes pouvoirs en dehors de la perquisition et de la saisie pour obtenir des témoignages, des documents, faire prêter serment à quelqu'un ou s'entretenir avec qui que ce soit où que ce soit—tout cela sans jamais avoir à s'adresser à un tribunal.
Mais c'est au moment où la décision est prise de pénétrer dans des locaux privés, comme les bureaux d'une organisation, qu'à notre avis, le souci de l'équité exige non seulement qu'il existe des motifs raisonnables, mais qu'une décision ait été prise par une partie neutre et objective qui n'est pas non plus chargée de l'enquête prévue par la loi ou par le projet de loi.
La présidente: Merci beaucoup, M. Jaffer.
Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.
Certains de vos commentaires m'étonnent un peu, mais permettez-moi d'aborder cette question de la façon suivante. Quand vous parlez des pouvoirs du commissaire et de la possibilité de pénétrer dans des locaux, etc., il y a d'autres inspecteurs et commissaires qui possèdent aujourd'hui un tel pouvoir, qu'il s'agisse des inspecteurs de l'agriculture ou, pour les codes provinciaux, des inspecteurs du travail.
Si j'ai bien compris, vous ne voulez pas que des pouvoirs du même type soient conférés au commissaire qui se soucie du respect de la vie privée des Canadiens. Vous voulez qu'il y ait diverses procédures à accomplir avant qu'il puisse réaliser une inspection. Relativement à une question touchant la vie privée, domaine si important pour tous les Canadiens, pourquoi envisagez-vous cela ainsi?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Permettez-moi, avant tout, de vous donner des précisions. Je n'avais certainement pas l'intention de vous laisser entendre que nous proposions de barrer la route au commissaire avant qu'il ne fasse enquête ou avant qu'il n'exerce la vaste majorité des pouvoirs accordés. La seule question que nous soulevons, à propos de laquelle nous aimerions qu'on procède de façon un peu plus équitable, concerne le moment où il va exercer son pouvoir de perquisition et de saisie. À cet égard, nous ne demandons rien d'autre qu'une simple ordonnance judiciaire, une demande ex parte—qui, si les circonstances le justifient, est généralement accordée très rapidement. Nous n'avons pas l'impression que cela retarderait ou entraverait indûment les choses.
M. Walt Lastewka: Je pense que je suis d'accord avec vous. Aux termes des lois sur la protection de la vie privée qui existent dans notre pays, d'autres commissaires possèdent des pouvoirs semblables à ceux que nous avons inclus dans ce projet de loi, et j'essaie simplement de voir quelle est la différence.
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je pense qu'une différence importante est que la plupart des commissaires, dans l'ensemble du pays, sont des organismes gouvernementaux qui font enquête sur eux-mêmes.
• 1555
Quand un fonctionnaire examine les documents provenant d'un
autre organe de la fonction publique, je pense que c'est une chose.
Quand on parle, en fait, de pénétrer dans les locaux d'une
entreprise, petite ou grande, pour perquisitionner et saisir des
documents, c'est tout à fait autre chose. Je ne crois pas que ce
pouvoir de perquisition et de saisie sera exercé très souvent par
le commissaire; tout au moins, j'espère certainement que non.
J'espère que la vaste majorité des problèmes pourront être réglés
bien avant qu'on en arrive là, et je pense que le commissaire à la
protection de la vie privée semblait l'espérer lui aussi quand il
a comparu devant le comité.
Étant donné tous les autres pouvoirs d'enquête, concernant la consultation avec toutes les parties, etc., il me semble que ce serait une situation très grave. Beaucoup d'éléments complexes se présenteront probablement avant qu'un tel cas ne se produise, nous demandons donc qu'on procède de façon équitable.
M. Walt Lastewka: Sachant que ce pouvoir serait utilisé très rarement, étant donné ce qu'a dit le commissaire à la protection de la vie privée et la façon dont le comité s'est toujours prononcé, je crois, au sujet de la protection de la vie privée, que c'est contre ceux qui y portent vraiment atteinte qu'il faudrait intervenir. J'ai compris que vous disiez que cette notion de procédure équitable devrait également s'appliquer à ces derniers, je pense donc que nous pouvons être en désaccord.
L'autre chose dont je veux parler est la définition de la collecte de renseignements en vue de leur utilisation dans d'autres parties d'une société. Bien entendu, les sociétés deviennent maintenant constamment de plus en plus grosses. Mais si les données sont collectées à une fin précise dans une partie d'une société, dites-vous qu'on devrait pouvoir transmettre ces renseignements à une autre partie en vue d'une utilisation qui n'était pas prévue au départ, ou qu'un consentement devrait être obtenu à nouveau à ce moment-là?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Non, à notre avis, si les renseignements sont transférés à une autre partie de l'entreprise à des fins différentes de celles pour lesquelles ils ont été collectés, il faudrait obtenir un consentement express.
Dans notre cas, je suppose qu'il y a un problème de définition. Nous nous définirions comme des fournisseurs de services de télécommunications. Si vous vous procurez auprès de nous un téléphone cellulaire, un téléphone local, un service internet, une page Web, etc., tout cela sert, fondamentalement, à une fin, la fourniture de services de télécommunications. Transférer d'un service à l'autre de l'entreprise des renseignements liés à tous ces aspects correspond apparemment à une interprétation raisonnable de la souplesse qu'il faudrait accorder. Si, pour des raisons qui m'échappent actuellement—mais on ne sait jamais—nous décidons de nous lancer dans la vente d'aspirateurs, ce serait une fin différente.
M. Walt Lastewka: Vous disiez, dans cet exemple, que les renseignements étaient collectés pour cette raison spécifique. Selon vous, sous sa forme actuelle, le projet de loi ne vous permet donc pas de le faire?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Avec l'amendement que le gouvernement a apporté à la définition d'«utilisation», nous pourrions maintenant transférer des renseignements de ce type. Mais, sans cet amendement, cela nous préoccupe un peu.
M. Walt Lastewka: Nous essayons tous de nous tenir à jour des amendements afin d'être sûrs de comprendre ce qui est différent, ce qui a changé.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.
[Français]
Madame Lalonde, s'il vous plaît.
Mme Francine Lalonde: Selon ce que j'ai lu dans les journaux dans l'Est et au Québec, la fusion de TELUS et de BC Telecom énerve un peu les concurrents. Si, comme certains vous en prêtent l'intention, vous venez faire des affaires au Québec, allez-vous respecter la loi québécoise sur les renseignements personnels?
[Traduction]
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je pense que je vais demander à M. Makaryshyn de parler des questions de juridiction qui sous- tendent votre question.
M. John Makaryshyn: Pour ce qui est des entreprises fédérales comme les compagnies de télécommunications, je crois savoir qu'elles sont assujetties aux lois fédérales. Dans la mesure où des lois provinciales s'appliquent, nous n'exerçons actuellement aucune activité au Québec, mais si nous le faisions et si les lois s'appliquaient à une de nos divisions ou de nos filiales, nous les respecterions assurément et nous collaborerions avec le gouvernement et le commissaire pour les respecter.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Si je vous disais qu'un de vos concurrents potentiels au Québec, ne se demandant pas s'il était constitutionnellement soumis ou non à la loi, a accepté de s'y conformer, est-ce que vous me répondriez toujours la même chose?
[Traduction]
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je vous dirai que oui. Nous respectons la juridiction fédérale qui couvre l'ensemble des télécommunications. Plusieurs de nos compagnies relèvent actuellement de la juridiction des provinces. Comme l'a dit John, s'il y en avait qui relevaient de la juridiction du Québec, nous agirions dans le cadre de la législation québécoise.
Je dois également signaler que, comme beaucoup d'autres compagnies, nous considérons les dispositions du projet de loi C-54 comme un minimum, pas un maximum. Dans la mesure où, à un endroit donné, nos clients souhaiteraient que leur vie privée soit encore mieux protégée, nous chercherions évidemment à satisfaire leurs besoins.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Merci.
J'aimerais vous parler de la partie 2 du projet de loi et en particulier des définitions de «signature électronique» et de «signature électronique sécurisée». J'aimerais entendre votre point de vue, d'autant plus que la définition de «signature électronique sécurisée» nous renvoie à une annexe qui n'est pas là et à des règlements qui ne sont pas là non plus.
[Traduction]
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je parlerai de façon générale de cette partie du projet de loi, puis je demanderai à John d'ajouter quelque chose au sujet des annexes.
De façon générale, nous pensons que ce qui figure dans le projet de loi au sujet de la signature électronique est bien fondé. Nous n'y voyons aucun problème. Cela a été rédigé d'une façon que nous trouvons tout à fait rassurante. C'est technologiquement neutre et fournit essentiellement aux particuliers la même protection avec un contrat que tout autre type de loi sur les contrats.
Cela dit, je demanderai à John de répondre à la question que vous avez soulevée.
M. John Makaryshyn: Merci.
Nous sommes absolument en faveur de ce qui figure à la partie 2 et à la partie 5 du projet de loi au sujet des signatures électroniques et des signatures électroniques sécurisées. Nous comprenons que le gouvernement fédéral doit exiger, à certaines fins, de meilleures garanties de sécurité dans certains cas. Là encore, nous nous félicitons que le projet de loi soit technologiquement neutre, si bien qu'on peut utiliser diverses technologies différentes pour répondre aux critères énumérés au paragraphe 48(2) en matière de signature sécurisée. Quant à son application au secteur privé, à ma connaissance, ce projet de loi n'indique pas, par exemple, au secteur privé quels types de signatures utiliser. Il respecte la liberté de contrat, c'est en fait le gouvernement fédéral qui se donne lui-même les moyens d'entrer dans l'ère numérique.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Avez-vous étudié les différentes technologies qui s'offrent pour la sécurisation des signatures et pourriez-vous nous en parler?
[Traduction]
Mme Lorna Higdon-Norrie: Nous pourrions certainement nous engager à vous faire envoyer des renseignements par des gens qui connaissent mieux ces questions de technologie que nous, mais permettez-moi encore d'en parler de façon générale.
• 1605
Là encore, nous sommes très heureux que le gouvernement
canadien ait jugé bon d'autoriser l'utilisation d'une technologie
puissante de chiffrement. C'est un des types de... Comme je l'ai
mentionné dans notre document,
[Français]
nous avons publié une brochure portant sur les solutions au commerce électronique,
[Traduction]
et cela peut vous donner un certain aperçu des types de technologie que nous offrons dans notre compagnie. Nous utilisons la technologie du chiffrement si nos clients le désirent pour la protection de leurs données.
Il y a de nombreuses façons différentes de garantir la sécurité. Les compagnies peuvent en offrir une ou deux ou un grand nombre, selon les exigences de leurs clients. Les méthodes évoluent avec le temps, et c'est une des raisons pour lesquelles nous sommes réellement heureux que le projet de loi ne soit pas tombé dans le piège de rester confiné dans la situation actuelle, avec la technologie disponible aujourd'hui. Il énonce plutôt des principes concernant l'autorisation numérique qui seront présumément encore valables longtemps dans l'avenir.
La présidente: Dernière question, madame Lalonde.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Dans votre introduction, vous dites que vous voulez que la loi soit claire afin qu'on puisse assurer la sécurité des consommateurs. Je m'attendais donc à ce que vous formuliez des critiques très sévères à l'endroit de la loi. Je suis loin d'être la seule à avoir soulevé le fait que cette loi est basée sur le code CSA, qu'on trouve en annexe et qui n'a pas été conçu pour être une loi. On l'interprète ensuite dans le corps de la loi, à l'article 7, ce qui est loin de nous donner une loi claire, que ce soit pour celui qui a des obligations ou celui qui a des droits.
[Traduction]
Mme Lorna Higdon-Norrie: Dans notre suggestion à ce sujet, je pense que nous cherchons certainement un peu plus de clarté. Actuellement, le projet de loi semble créer une certaine confusion entre ce qui est requis, ce qui est recommandé et la sanction éventuelle si une pratique qui est, en fait, dans le projet de loi n'est pas adoptée. C'est simplement une recommandation, et c'est pourquoi nous avons suggéré cet amendement.
Cela pose un problème. Dans l'ensemble, toutefois, je pense que le projet de loi fournit un cadre assez clair. Il est quasiment aussi proche de la perfection qu'un texte législatif peut l'être, étant donné qu'à de nombreux égards, il est tourné vers l'avenir. Il ne légifère pas sur des questions appartenant au passé.
Il peut donc y avoir des imperfections, mais cela ne veut pas dire que le projet de loi souffre de vices fondamentaux. Ce n'est pas notre avis. Nous aimerions un peu plus de clarté dans les domaines que nous avons indiqués, mais je pense qu'il fournit un cadre assez clair qui permet, dans l'ensemble, aux entreprises et aux consommateurs de savoir à quel niveau acceptable de protection ils ont droit.
La présidente: Merci, et merci, madame Lalonde.
Madame Barnes, je vous en prie.
Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je pense que nous essayons de trouver une solution nous permettant d'être satisfaits aussi bien du point de vue du commerce que du respect de la vie privée et de sentir qu'un équilibre est atteint. Ce projet de loi n'impose pas des dispositions très contraignantes en droit criminel; il adopte plutôt une approche légère, souple, de façon aussi informelle que possible. Il est judicieux et limite l'utilisation de certains des pouvoirs qu'aurait le commissaire.
Par ailleurs, j'ai entendu mon collègue du parti Réformiste faire part d'une préoccupation concernant le fait que des droits fondamentaux seraient violés par ce projet de loi. J'aimerais simplement demander au conseiller en politique si c'est ainsi qu'il voit les choses.
M. John Makaryshyn: Je ne sais pas exactement ce qu'il en est des droits fondamentaux. Si nous parlons des perquisitions et saisies sans mandat...
Mme Sue Barnes: C'est de cela que nous parlons. C'est cette question qu'il a soulevée.
M. John Makaryshyn: D'accord. Pour ce qui est des perquisitions et des saisies sans mandat, elles sont déraisonnables prima facie. Cela a été déterminé dans un certain nombre d'affaires, y compris par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Hunter c. Southam Inc. Elles peuvent être jugées inacceptables. Notre proposition est donc probablement à l'avantage non seulement de la partie faisant l'objet de la perquisition, mais du commissaire lui-même. Quand on prend des mesures à ce niveau, qu'on envisage de s'en prendre à des locaux privés, c'est une mesure grave et une grande ingérence dans le secteur privé. Une demande ex parte...
Mme Sue Barnes: Je vais peut-être vous arrêter là, parce que je pense que c'est le problème. Il y a deux exceptions qui figurent déjà dans le projet de loi et interdisent l'accès aux maisons d'habitation. C'est une exception très explicite.
M. John Makaryshyn: Je comprends.
Mme Sue Barnes: Je comprendrais ce que vous voulez dire, parce que ce serait des questions tombant sous le coup de la Charte, mais nous avons spécifiquement exclu cela aux termes des articles 12 et 18. J'aimerais donc voir ce que vous voulez dire par là.
M. John Makaryshyn: Fondamentalement, ce sont les circonstances particulières qui déterminent si la perquisition est raisonnable ou non. Je ne peux donc pas dire pour le moment s'il s'agit assurément d'une violation de la Charte ou non, cela dépendrait réellement de la situation concrète. Nous ne parlons pas de maisons d'habitation, mais d'organisations du secteur privé. Il pourrait s'agir d'une petite entreprise individuelle du nord de l'Alberta. Il pourrait s'agir de situations de ce genre.
Mme Sue Barnes: Je pense qu'il vaut mieux que je précise, madame la présidente, que les paragraphes des articles 12 et 18 excluent spécifiquement les maisons d'habitation, et je pense qu'il faut clarifier cela pour que ce soit très clair.
Je vais passer à autre chose, parce que je pense que vous avez tort à ce sujet. Mais, si vous voulez, je reprendrai ultérieurement les affaires que vous citez. On peut peut-être les soumettre à la présidente si elles sont applicables. Mais passons aux coûts que peut entraîner le fait d'essayer de prévoir un système souple, la procédure bureaucratique à laquelle il faudrait avoir recours.
Pensez-vous qu'on peut obtenir les mandats que vous demandez dans une situation non criminelle quand on essaie de suivre les normes que les industries ont acceptées et dont, je pense, vous êtes un utilisateur modèle...? Ce n'est pas ce que nous disons. Je pense que vous vous en tirez très bien dans votre industrie, comme le font de nombreuses entreprises dans tout le pays. Je ne vois pas pourquoi nous voudrions nous exposer à des procédures judiciaires coûteuses quand il ne s'agit pas de droit criminel ou de procès, mais de la protection de la vie privée selon une norme que l'industrie a acceptée et qui va avoir force de loi. J'ai du mal à comprendre que vous disiez que vous êtes en faveur de cela pour ensuite vouloir qu'il y ait des obstacles de nature financière. Il s'agit-là de ressources limitées des deux côtés, et je pense que cela crée aussi cet équilibre.
Mme Lorna Higdon-Norrie: Puis-je intervenir à ce sujet?
Mme Sue Barnes: Oui.
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je comprends votre préoccupation. Si on essayait de limiter ce pouvoir et d'en limiter au maximum l'utilisation, je pense qu'on pourrait prendre certaines mesures qui vont beaucoup plus loin que le type de procédure équitable que nous demandons. Nous ne voulons certainement pas qu'on en arrive là, parce que, vous avez raison, on nuirait à l'efficacité du projet de loi si on créait assez d'obstacles pour risquer d'être pris dans le bourbier des tribunaux pendant des mois; vous le savez, l'enquête peut être bloquée.
De façon générale, il semble en effet que cela coûte cher et prenne beaucoup de temps et nuise à l'application efficace de la loi, et nous ne proposons pas de s'engager sur cette voie. Nous suggérons simplement qu'il puisse y avoir des mesures ayant un effet relativement rapide—comme l'expérience semble le montrer.
C'est une question simple. C'est en quelque sorte le principe selon lequel, si on peut l'éviter, on ne devrait pas être à la fois juge et jury. Le commissaire à la protection de la vie privée sera vraisemblablement déjà très avancé dans son enquête à ce moment-là et se sera fait une idée. On peut supposer que l'autre partie aura aussi un autre point de vue, et, si j'imagine que, dans notre propre cas, nous en arrivions là, comme je l'ai dit précédemment, il y aurait probablement des questions dont il serait bon qu'un tiers impartial soit saisi avant qu'une perquisition et une saisie n'aient lieu, ce qui est réellement une mesure tout à fait extrême.
La présidente: Avez-vous d'autres questions, madame Barnes?
Mme Sue Barnes: Non, c'est très bien. J'ai entendu ces commentaires, et nous les prendrons en considération.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Jaffer, aviez-vous d'autres questions?
M. Rahim Jaffer: J'ajouterai une sorte de question ou de commentaire à ce qu'a dit ma collègue. Une des choses qu'il me semble que ce problème fait ressortir, tout au moins la préoccupation que vous avez mentionnée, est qu'en fait, comme vous l'avez souligné, vous essayez à nouveau non pas de retirer des pouvoirs au commissaire, mais simplement d'ajouter un élément pour prévenir tout abus. Je pense que c'est équitable envers toutes les parties. Il ne me semble pas qu'il s'agisse de quoi que ce soit d'autres.
• 1615
Ma collègue Mme Barnes a cité l'article 12, qui parle
d'habitations privées ou de maisons d'habitation, ou de quelque
chose de ce genre. Vous avez manifestement établi une distinction
claire entre le mandat des commissaires à la protection de la vie
privée relativement aux institutions publiques et les cas où une
institution privée est touchée, et je ne pense pas que ce projet de
loi soit apparemment très clair à cet égard, d'après ce que vous
dites.
Seriez-vous donc d'accord pour dire que, fondamentalement, l'idée que vous essayez d'exprimer est que ce système garantissant un équilibre fait peut-être actuellement défaut, problème auquel votre amendement remédierait, tout au moins pour ce qui est du commissaire à la protection de la vie privée?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je pense que c'est un équilibre que nous aimerions voir introduire à un moment donné dans cette procédure avant que les mesures les plus extrêmes ne soient prises. C'est réellement tout ce que nous suggérons. Comme je l'ai dit, nous pensons que, dans leur vaste majorité, ces situations peuvent être réglées bien avant qu'on en arrive là. Mais la possibilité d'un mandat de perquisition et de saisie nous donne beaucoup à réfléchir, et nous aimerions qu'on introduise à ce stade-là cet élément supplémentaire d'impartialité.
M. Rahim Jaffer: Je suis convaincu que personne ne contesterait... qu'on donne à qui que ce soit des pouvoirs outrepassant la loi dans un domaine quelconque de notre société.
J'apprécie vos commentaires. Merci.
La présidente: Merci, monsieur Jaffer.
Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon collègue. J'ai du mal à voir pourquoi nous autorisons un commissaire à la protection de la vie privée à pouvoir porter atteinte à la vie privée des gens, ce qui est bien ce que vous dites, n'est-ce pas?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Qu'est-ce que «des gens» et qu'est-ce que «la vie privée» quand on parle d'une société, je suppose?
M. Alex Shepherd: Quoi qu'il en soit, ce que je veux réellement examiner est la chose suivante. Vous avez notamment dit dans votre argumentation que c'était des recommandations et non pas des obligations pour la société. Premièrement, la question qui se pose est l'importance de cela. En fait, nous ne faisons rien d'autre que présenter des recommandations. La société ne les a pas respectées. Et alors?
Mme Lorna Higdon-Norrie: «Eh alors» représente pour nous, je pense, une question de clarté. Comme je l'ai dit, le projet de loi énonce certaines choses qui sont manifestement des obligations, et le commissaire a des pouvoirs de vérification, ainsi que certainement d'autres, si une organisation ne s'acquitte pas des obligations que lui impose le projet de loi.
Ce qui nous préoccupe à propos de la question que vous soulevez est qu'un commissaire semble aussi avoir essentiellement les mêmes pouvoirs en matière de recommandation, si bien que nous ne savons pas si cela transforme la recommandation en une obligation, parce que si on ne le sait pas, on sera de toute façon assujetti à la vérification complète, à tout le poids des pouvoirs. Le projet de loi devrait réellement établir clairement ce dont on peut avoir à rendre compte et quelles sont les recommandations qui peuvent, là encore, donner lieu à une enquête. Nous ne proposons pas de limiter n'importe laquelle des choses de ce genre, mais, dans le cadre d'une vérification, on est censé démontrer ce qu'on a fait.
C'est une procédure qui prend beaucoup de temps et porte sur quelque chose qui, en fait, ne constitue pas une obligation, et j'imagine—en fait, cela s'est produit en réalité—des avocats passant des heures dans des salles de réunion à essayer de voir exactement ce qu'on pourrait bien avoir à faire pour s'exécuter et, quand on est dans cette situation, cela ne serait peut-être tout simplement pas une bonne loi. Vous pourriez saisir cette occasion pour clarifier un peu mieux les choses à notre intention.
M. Alex Shepherd: J'ai deux autres questions, dont une sur votre code de protection des renseignements personnels. Vous ne dites pas «devrait», mais «doit». Vous dites que BCT.TELUS «doit se conformer globalement à ces dix principes.» Vous avez donc en fait imposé à votre société une obligation plus stricte que ne le fait la loi, n'est-ce pas?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Oui.
M. Alex Shepherd: Vous ne vous opposez donc pas tellement à cela, en réalité, puisque vous avez pris ces recommandations pour en faire des obligations, n'est-ce pas?
Mme Lorna Higdon-Norrie: Je vois que John veut faire un commentaire.
M. John Makaryshyn: En fait, en fin de compte, ce que nous disons là est que c'est vrai, notre société interprète cela et assure le niveau le plus élevé de sécurité et de respect de la vie privée. Mais, si un commissaire à la protection de la vie privée, à l'issu d'une enquête, conclut qu'il existe potentiellement un différend au sujet des pratiques commerciales recommandées, mais qu'en fin de compte, la sécurité de tous les renseignements est assurée et qu'aucune obligation n'est violée, tout ce que nous disons alors est qu'il ne devrait pas avoir la possibilité d'exiger à ce moment-là le déclenchement d'une vérification à part entière à propos de recommandations de ce genre.
M. Alex Shepherd: Je ne veux pas consacrer beaucoup de temps à cela. Je veux passer à la question du consentement tacite, parce que vous l'avez également soulevée dans votre code de protection des renseignements personnels. Vous avez donné la définition suivante: «Un consentement tacite est un consentement qu'on peut raisonnablement déduire de l'action ou de l'inaction d'une personne.» Qu'est-ce que cela veut dire?
Mme Lorna Higdon-Norrie: John.
M. John Makaryshyn: Je pense qu'en fin de compte, il s'agit de voir ce qui est raisonnable, et le consentement éclairé des personnes concernées doit être obtenu dans tous les cas, que ce soit pour la collecte, l'utilisation ou la communication des renseignements. Ce qui est raisonnable dans un cas donné dépendra donc un peu des circonstances. Mais je pense que l'élément clef, fondamental, est qu'il faut obtenir le consentement quel que soit... la forme peut varier.
M. Alex Shepherd: Ne vaudrait-il pas mieux que la loi dise simplement que tout le monde doit donner son consentement positif en éliminant toute la notion de consentement tacite?
M. John Makaryshyn: Non, je ne suis pas d'accord, simplement parce que cela requiert beaucoup de souplesse. Il peut bien être raisonnable dans certaines circonstances d'avoir différentes formes de consentement. Tout n'a pas à être signé, scellé et présenté par écrit sur une feuille de papier. Dans certains cas, le consentement peut être verbal; cela peut être raisonnable, et d'autres formes de consentement peuvent bien être raisonnables. Dans la mesure où le client ou l'individu comprend la situation, est informé et donne son consentement éclairé, ou si on peut raisonnablement le déduire des circonstances, c'est acceptable.
M. Alex Shepherd: Donc, si la loi exigeait un consentement exprès, en quoi cela ferait-il obstacle à vos activités?
M. John Makaryshyn: Je vais vous donner un exemple au sujet de modalités de service potentielles dans lesquelles consentement exprès signifierait expressément signifié par écrit. Si un client téléphone et dit: «Fournissez-moi des services d'internet, et je consens à ce que vous me les vendiez» et si, pour une raison quelconque, il fallait que nous ayons cela par écrit, nous devrions alors dire au client: «Venez nous voir pour que nous signions un contrat, parce que votre consentement verbal n'est pas valide.» Ce serait une restriction artificielle.
M. Alex Shepherd: Il pourrait exprimer son consentement en utilisant le site; il ne doit pas nécessairement se rendre en personne à vos locaux.
M. John Makaryshyn: Bien sûr, dans ce cas-là, ce serait peut- être raisonnable, mais c'est un type de consentement qui n'est pas donné par écrit. Mais nous pouvons appeler cela un consentement tacite ou exprès...
M. Alex Shepherd: À mon avis, c'est un consentement exprès. Quelqu'un fait quelque chose qui signifie: «J'accepte de consentir à ce que vous utilisiez ces renseignements me concernant comme condition du contrat par lequel vous vous engagez à me fournir un service d'internet.»
M. John Makaryshyn: Je pense certainement que, dans le contexte de l'internet, un grand nombre de ce que j'appelle des clauses d'adhésions volontaires sont tout à fait raisonnables. Vous savez avec certitude que quelqu'un vous donne son consentement à cette fin particulière, il n'y a donc aucune équivoque.
Mais là encore, les circonstances dépendent selon que ce consentement est exprès ou tacite dans un cas donné. Je pense donc que le projet de loi et le code de la CSA prévoient assez de souplesse et certaines lignes directrices dans l'annexe pour aider les entreprises à savoir quoi faire, mais, en fin de compte, je pense que c'est également un point fort du projet de loi, parce qu'avec le fort mandat d'éducation donné au commissaire à la protection de la vie privée à l'article 24, s'il y a des zones grises que nous ne comprenons pas, nous pouvons essayer de régler ces problèmes avec le commissaire.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Shepherd.
[Français]
Madame Lalonde, avez-vous d'autres questions?
Mme Francine Lalonde: Non, merci.
[Traduction]
La présidente: Je veux remercier nos témoins de TELUS d'avoir comparu devant nous cet après-midi. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de préparer votre mémoire et de venir ici, et nous prendrons assurément vos préoccupations en considération.
Nous allons prendre trois minutes pendant que nous changeons de témoins. Nous allons demander à TELUS de quitter la table et à Bell de se joindre à nous. Je vais donc lever la séance pendant environ trois minutes.
La présidente: Nous allons reprendre nos travaux. J'ai le grand plaisir d'accueillir Bell Canada cet après-midi à notre table. Comparaissent au nom de Bell Canada M. Bernard Courtois, chef du service de la réglementation, Mme Suzanne Morin, conseillère juridique principale. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Bernard A. Courtois (chef du service de la réglementation, Bell Canada): Merci, madame la présidente.
[Français]
Madame la présidente, nous avons apporté les versions française et anglaise de notre mémoire, qui vous ont été distribuées. Je n'ai pas l'intention de le lire, ni en tout ni en partie. Je vais simplement faire quelques commentaires, après quoi j'aurai le plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
J'insisterai simplement sur le fait que nous représentons six compagnies de téléphone, Bell Canada et les principales compagnies des provinces atlantiques et du Manitoba. En outre, en tant que chef du service de la réglementation et ombudsman pour la protection de la vie privée de Bell, je suis également en mesure de parler au nom de plusieurs de nos filiales, y compris Sympatico. De plus, Suzanne a travaillé avec le groupe Stentor qui a participé à l'élaboration du code Stentor et du code de la CSA avec tous les représentants qui y ont collaboré.
De notre point de vue, même si nous appuyons le projet de loi dans son ensemble, nous concentrerons nos commentaires sur la partie 1, qui porte sur les questions de protection de la vie privée. Nous avons une vaste expérience de ces questions. Par nature, une compagnie de téléphone doit être dès le départ très sensible aux questions de sécurité et de protection des renseignements personnels des consommateurs aussi bien en ce qui concerne le traitement des appels que les renseignements concernant les clients. Nous sommes également depuis bien des années assujettis aux exigences des règlements relatifs à cela. Nous avons donc l'habitude de cette réglementation et de la protection de la vie privée depuis beaucoup plus d'années que la plupart des industries.
Nous sommes heureux de la présentation de ce projet de loi. Nous pensons qu'il établit un bon équilibre entre les différentes méthodes susceptibles d'être adoptées. Comme vous l'avez entendu dire sans aucun doute par beaucoup de représentants de notre industrie, la confiance, surtout à l'ère du commerce électronique—et, d'ailleurs, le commerce électronique a commencé il y a longtemps avec les transactions conclues verbalement au téléphone—est extrêmement importante, sinon le commerce électronique ne décollera pas. Pour atteindre notre objectif, étant donné que notre industrie est désormais de nature mondiale et qu'il faut susciter la confiance, il est important d'avoir quelque chose qui soit reconnu par les consommateurs et les clients. Il est important, il est utile que ce projet de loi s'appuie sur le travail réalisé par divers groupes pour élaborer le code de la CSA et s'appuie sur les lignes directrices de l'OCDE, qui peuvent devenir une norme mondiale que les consommateurs reconnaîtront et dans laquelle ils verront un bon outil de protection de la vie privée.
• 1630
Il est également bon que ce projet de loi étende ensuite le
système utilisé pour le code de la CSA à différents secteurs
industriels pour assurer également une protection plus générale de
la vie privée afin de renforcer encore la confiance du public en
s'appuyant sur elle. En même temps, il existe certaines méthodes
qu'on aurait pu considérer comme assez difficiles à adopter à notre
époque et qui auraient consisté à imposer à ce processus tout un
nouvel ensemble contraignant de mécanismes de réglementation et de
bureaucratie. Le projet de loi établit un bon équilibre à cet
égard, et nous pensons qu'il contribuera très positivement à la
réussite du commerce électronique et à une protection appropriée de
la vie privée des Canadiens.
Dans notre mémoire, nous avons énuméré les amendements mineurs qui pourraient aider à améliorer le projet de loi. J'attire l'attention sur celui qui concerne les renseignements publics: nous appuyons les amendements proposés par le gouvernement, qui établiront clairement qu'il n'est pas nécessaire d'imposer des procédures complexes pour régir la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements publics comme ceux qu'on trouve dans les annuaires téléphoniques.
L'autre sujet est celui dont vous avez parlé tout à l'heure avec les gens de TELUS, et nous pensons qu'il serait un peu paradoxal qu'un projet de loi visant à protéger la vie privée des Canadiens autorise les fonctionnaires, ou des gens auxquels ils auraient délégué ces tâches, à pénétrer dans des locaux commerciaux pour perquisitionner et saisir des documents en l'absence d'une protection très simple consistant à faire examiner la situation par un tiers devant donner son autorisation.
[Français]
En conclusion, madame la présidente, j'aimerais dire que nous appuyons les grandes lignes de ce projet de loi. Nous avons formulé certains commentaires dans notre mémoire et proposé quelques amendements. Nous aurons maintenant le plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Courtois.
Je vais maintenant donner la parole à M. Jaffer pour les questions.
Monsieur Jaffer.
M. Rahim Jaffer: Merci.
Je remercie les deux représentants de Bell Canada pour leur mémoire.
Je viens de recevoir ce mémoire, j'espère donc l'examiner de façon un peu plus détaillée après la séance du comité. Il y a toutefois deux questions que j'aimerais vous poser, dont une porte sur vos déclarations liminaires relatives à la confiance envers le commerce électronique et au degré de confiance des consommateurs désireux d'utiliser les services fournis.
Il m'a semblé, jeudi dernier, quand des représentants de différents fournisseurs d'internet ont comparu devant le comité, que cette industrie est actuellement en pleine croissance, mais je pense qu'ils ont dit que le chiffre d'affaires actuel sur l'internet atteignait presque 100 millions de dollars. Pour moi, c'est extraordinaire, étant donné que c'est un domaine en croissance et qu'il y a encore beaucoup à faire pour instaurer cette confiance.
La question que j'ai posée à certains d'entre eux jeudi dernier—et je vais vous poser la même—concerne le fait que c'est une industrie qui s'est déjà constituée sans aucune véritable législation, sans aucune véritable protection. En fait, c'est uniquement les entreprises qui ont fourni ces services qui ont permis de renforcer cette croissance grâce à l'éducation et à différentes façons d'associer leurs clients à leurs activités...
Vous avez parlé de la question de l'équilibre à établir dans ce projet de loi. J'aimerais savoir ce que vous pensez des conséquences qu'il y aurait si certains des amendements que vous proposez ne sont pas retenus. Le projet de loi pourrait-il alors devenir trop pesant ou, en fait, limiter la croissance de cette industrie alors que, sans lui, elle semble connaître actuellement une forte croissance.
Je serais heureux que vous commentiez cela.
M. Bernard Courtois: Oui, je répète qu'à mon avis c'est à cet égard que le projet de loi établit un bon équilibre, parce que le commerce électronique, même s'il a une croissance très rapide et que de grosses sommes d'argent sont en jeu, ne représente encore qu'une fraction minuscule des ventes au détail, par exemple. Il y a également le domaine des transactions entre les entreprises et leurs fournisseurs.
Ce qui est préoccupant est qu'une confiance pourrait s'instaurer envers les marques bien connues, les gros, ceux qui jouent un grand rôle dans l'industrie, et pas nécessairement ceux qui n'ont qu'un rôle secondaire. Un des très bons côtés de l'Internet est qu'il démocratise tout et que tout le monde peut y participer; tout le monde peut intervenir à l'échelle mondiale et se lancer dans le commerce. Ce qui se passerait est que les petites entreprises seraient laissées de côté parce que les gens reconnaîtraient les grands noms, les IBM de ce monde, et que c'est à eux qu'ils feraient confiance, et non pas aux petits détaillants.
• 1635
Deuxièmement, il suffit de quelques incidents horribles
concernant des gens traitant avec quelqu'un qui n'est pas fiable et
en subissant toutes sortes de désagréments, et, au lieu de
progresser, on reviendrait en arrière. Les interactions avec les
clients et les sondages révèlent qu'un manque de confiance ou une
crainte au sujet de ce qu'il advient des renseignements personnels
sur l'internet, par exemple, constitue une entrave au développement
du commerce électronique. Donc, un projet de loi comme celui-ci,
qui met réellement à profit la coopération avec les associations
représentatives et l'industrie à laquelle on doit l'existence du
code de la CSA et l'étend à divers secteurs de l'industrie, avec un
représentant du gouvernement qui supervise la situation et
conseille les parties prenantes, me paraît constituer un juste
milieu très judicieux comparé aux affrontements qui ont lieu dans
d'autres parties du monde à propos de solutions plus extrêmes
penchant d'un côté ou d'un autre.
M. Rahim Jaffer: Cela clarifie les choses. Merci.
Ma dernière question concerne le problème qu'on a abordé avec TELUS et auquel vous avez fait référence au sujet du commissaire à la protection de la vie privée. Je pense que vous venez juste de mentionner l'importance de la réputation des entreprises avec lesquelles les consommateurs peuvent vouloir traiter. Nos témoins précédents ont signalé qu'une vérification effectuée auprès d'une entreprise ou, sous leur forme actuelle, les pouvoirs du commissaire pourraient avoir réellement des répercussions sur la réputation des entreprises s'il n'y a rien pour limiter ou équilibrer les pouvoirs actuels du commissaire.
Je vous demanderai donc si, à votre avis, le commissaire est actuellement placé au-dessus des lois ou si nous devons réellement envisager de lui imposer certaines limites pour que nous puissions nous sentir protégés dans une certaine mesure en ce qui concerne le respect de la vie privée?
M. Bernard Courtois: Oui, je pense que les entreprises ont également des préoccupations à cet égard, et pas seulement les particuliers dans leur foyer. Par exemple, l'arrêt de la Cour suprême faisait entrer en jeu la Loi sur la concurrence, ce par quoi on entend habituellement la perquisition dans les entreprises et la saisie des renseignements qu'elles détiennent. Le fait que, comme je l'ai dit, un fonctionnaire peut venir perquisitionner et saisir des documents impressionne beaucoup les gens. Ce n'est pas quelque chose qui se fait sans anicroche et qu'on accepte très facilement.
En outre, simplement l'idée que ces pouvoirs ne seront pas utilisés très souvent... et je pense qu'on s'attend à ce qu'ils ne soient pas utilisés souvent; l'expérience acquise jusqu'à présent avec les diverses commissions qui les détiennent montre qu'ils ne seront pas utilisés souvent. Mais, à l'inverse, s'ils ne sont pas utilisés souvent, pourquoi un tiers ne procéderait-il pas à un examen indépendant pour assurer ce niveau de protection? Ce niveau de protection s'étend aussi bien aux entreprises qu'aux particuliers, je pense donc que c'est très simple. Cela n'empêchera pas du tout d'utiliser ces pouvoirs, et cela revient simplement à accorder quelque chose qui me paraît plus conforme à une loi visant à protéger la vie privée.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Jaffer.
Madame Barnes, je vous en prie.
Mme Sue Barnes: Je vais continuer directement sur ce sujet, et vous avez entendu le témoin précédent.
Dans le cadre juridique canadien, nous avons eu, au fil du temps, des normes différentes en droit criminel et en droit civil. Dans ce projet de loi, dans votre propre mémoire—que je viens de recevoir et auquel j'ai jeté un coup d'oeil après avoir interrogé le dernier témoin, soit dit en passant—, je vous félicite de montrer la différence entre une norme criminelle et une norme civile. Vous signalez à la page 8 de votre mémoire que le projet de loi C-54 répond déjà au troisième critère d'une norme criminelle, l'existence de motifs raisonnables, ce qui constitue donc un facteur limitatif.
Bon, dans ce monde, la plupart des gens ne sont pas juristes, je m'en tiendrai donc à une simple prémisse que la plupart des gens au Canada pourraient comprendre, parce qu'ils connaissent la différence entre les preuves exigées dans des poursuites civiles et dans des poursuites criminelles. Mme Morin pourrait peut-être simplement expliquer la différence en matière de fardeau de la preuve. Qu'est-ce qui sera nécessaire pour étayer une poursuite criminelle, quel sera le fardeau de la preuve?
Je vais simplifier cela. On dit qu'il faut que la culpabilité soit prouvée au-delà de tout doute raisonnable, ce qui est une exigence plus rigoureuse que la prépondérance des probabilités du droit civil. En fait, c'est un élément fondamental.
M. Bernard Courtois: Oui.
Mme Sue Barnes: La seule affaire que vous avez citée ici est celle que le témoin précédent a également citée, c'est une affaire criminelle. Ce que vous demandez ici est une norme criminelle, et cela me pose de réels problèmes parce que je crois que des ressources limitées... La plupart des grandes sociétés—et je ne parle pas de votre entreprise, mais de la plupart des grandes sociétés—ont des ressources beaucoup plus importantes. Ce commissaire à la protection de la vie privée aura seulement accès à un montant limité de fonds pour éduquer la population, ce qui me paraît constituer un rôle important à assumer par ce commissaire dans un monde très complexe.
• 1640
Il me semble que, si on se retrouve avec un mandat de
perquisition à un niveau différent—le niveau criminel est, en
quelque sorte, la norme que vous demandez ici, et non pas le niveau
civil dans le domaine commercial, ce qui est un niveau
inférieur—vous pourrez anéantir pour toujours la personne
concernée. Je ne veux pas dire vous personnellement, je ne veux pas
être directive ici. J'essaie d'examiner le fait que, chaque fois
qu'un document est nécessaire, des mandats de perquisition... Quel
résultat essayons-nous d'atteindre là?
C'est comme dans toute autre situation où les bons n'auront pas à s'inquiéter, comme vous le savez, et les mauvais pourront, si nous faisons cela, à coup de frais, de retards, de démarches bureaucratiques, bloquer... On ne prévoit pas là un financement illimité. Le système est censé être léger, souple; c'est pourquoi nous avons choisi un code qui, dans son ensemble, est précatif.
Je pense qu'on a dit des choses justes à propos de l'emploi ou non du conditionnel, mais souvent, même si vous prenez l'exemple qu'on a utilisé tout à l'heure—et je n'aime guère faire de tels renvois—, la partie rédigée au conditionnel était, en fait, suivie d'une autre qui imposait une obligation quant au respect du caractère privé des documents. Donc, pour beaucoup de ces choses- là, même si on pourrait apporter certaines clarifications dans un domaine, je pense que, dans ce domaine-ci, la loi s'en retrouve affaiblie.
En premier lieu, ma question porte sur ce que vous avez signalé dans votre mémoire. Voulez-vous que cette norme figure là et dans quelle mesure pensez-vous, d'un point de vue et de l'autre, que cela contribuerait raisonnablement à l'atteinte des objectifs?
M. Bernard Courtois: La norme concernant le fait que quelque chose a été prouvé au-delà de tout doute raisonnable ou en vertu de la prépondérance des probabilités ou tout ce qui peut déterminer ce qu'il advient des preuves présentées une fois qu'on les détient...
Mme Sue Barnes: Oui, c'est exact.
M. Bernard Courtois: ...et une fois qu'un procès a lieu ou quelque chose comme cela; cela ne s'applique pas à la notion...
Mme Sue Barnes: Il y a une distinction.
M. Bernard Courtois: Oui. Donc, cela ne s'applique pas à ce qui est en jeu ici. Ce qui est en jeu ici est qu'une personne est sur le pas de votre porte, elle veut entrer et fouiller dans vos dossiers et vos papiers, et c'est très différent du fait de savoir si, en fin de compte, les preuves permettront de vous déclarer coupable de quelque chose ou non. Cela n'a rien à voir avec... Et la Loi sur la concurrence, par exemple, contient des articles civils ainsi que des articles criminels.
Ce dont il s'agit ici, c'est par exemple quelqu'un, qui pourrait être une petite entreprise, et même si le commissaire à la protection de la vie privée ne dispose pas de fonds énormes, il représente quand même le gouvernement et, pour le propriétaire d'une petite entreprise, c'est le gouvernement qui vient à sa porte ou qui envoie quelqu'un qu'il a délégué pour venir à sa porte et fouiller dans ses papiers. Le fait qu'un tiers aura examiné la chose à l'avance pour s'assurer qu'aucun abus n'est commis offre un degré supplémentaire de protection qui me paraît tout à fait dans l'esprit de quelque chose qu'on appelle une loi visant à protéger la vie privée des Canadiens. Donc je pense que c'est raisonnable pour cela.
Bon, le commissaire n'émettra pas des mandats tous les jours. Il ne va pas dépenser beaucoup d'argent pour faire ces choses-là. Il n'exercera pas ses pouvoirs sauf dans des cas extrêmement rares, si bien que le fait d'avoir à s'adresser au préalable à un juge ne devrait avoir aucune répercussion sur sa capacité financière à s'acquitter de ses tâches.
Mme Sue Barnes: Ce que je voulais dire, madame la présidente, était précisément qu'il y a des normes différentes en droit.
M. Bernard Courtois: Pour la décision en fin de compte, mais pas pour le fait de savoir si quelqu'un prend vos papiers sans votre consentement.
Mme Sue Barnes: Eh bien...
La présidente: Merci.
[Français]
Madame Lalonde.
Mme Francine Lalonde: Bonjour.
M. Bernard Courtois: Bonjour, madame.
Mme Francine Lalonde: Dans le passé, vous avez respecté la Loi 68 du Québec. Qu'allez-vous faire à l'avenir?
M. Bernard Courtois: Nous allons faire comme par le passé. Nous aurons une loi fédérale et, comme vous le savez, nous étions déjà couverts par une réglementation fédérale. Nous avons d'ailleurs toujours été régis par une réglementation ou une autre. Certaines de nos filiales font affaire au niveau de la juridiction provinciale, tout comme Bell et certaines entreprises font affaire au niveau fédéral. Comme vous nous l'avez entendu dire, nous sommes intéressés à donner une grande importance à la protection de la vie privée de nos clients et de nos employés. Si la commission québécoise nous adresse une demande d'information, nous ne sommes pas intéressés à nous empêtrer dans des questions de juridiction. Nous préférons collaborer. Nous ne sommes jamais allés jusqu'à nous demander si nous devions contester la compétence juridictionnelle de la commission ou non. Comme nous venons de le dire, notre entreprise a peut-être fait déjà fait face à des complications juridictionnelles et nous préférerions que les entreprises ne soient pas entraînées dans de telles complications.
• 1645
Ce projet de loi s'applique nettement aux
entreprises de compétence fédérale.
Il prévoit laisser la place à la loi du Québec dans son secteur de
compétence. Cela nous semble une façon assez
ingénieuse de ne pas nous embarquer dans des disputes
juridictionnelles inutiles.
Mme Francine Lalonde: Vous semblez tenir deux discours en même temps et j'ai de la difficulté à vous suivre.
Quand un citoyen va continuer à se plaindre au Québec, à la Commission d'accès à l'information, allez-vous répondre à la commission ou plutôt dire que cela ne relève pas de la juridiction du Québec? C'est très important parce que, dans le passé, vous n'avez pas posé cette question.
J'ai fait ma petite enquête et identifié des cas où l'on vendait des listes. La loi québécoise interdit la vente de listes nominatives sans qu'on offre aux personnes concernées le droit de se retirer. Il semble que vous ayez trouvé un règlement, mais il est très important que vous indiquiez si vous allez appliquer la loi fédérale, qui ne prévoit pas de tels cas, ou si vous allez ne pas vous en embarrasser, comme vous dites, et répondre à la Commission d'accès à l'information du Québec quand elle vous dira qu'elle a reçu une plainte.
M. Bernard Courtois: En tant qu'avocat, je pourrais sûrement vous dire que sur le plan purement juridique, il y a certaines entreprises sous mon giron qui sont assujetties à la loi provinciale et d'autres qui ne le sont pas, mais notre comportement à ce jour démontre que dans de tels cas, nous ne soulevons pas de questions de juridiction. Nous voulons plutôt aller au fond du problème et collaborer. Ça ne changera pas la question de la juridiction, à savoir quelle loi devrait prévaloir en droit, mais en pratique, il est évident que s'il arrivait une circonstance dans laquelle nous croirions que nous sommes traités injustement ou qu'il y avait un problème avec la loi, nous serions en mesure de nier la juridiction du commissaire québécois. Dans la pratique, nous ne nous attendons pas à soulever ce genre de problèmes; nous nous attendons à collaborer à la fois avec le commissaire fédéral et avec le commissaire provincial.
Mme Francine Lalonde: Ce n'est pas à vous que je devrais rappeler que la Loi 68 a été adoptée au Québec en 1994, au moment où un gouvernement libéral fédéraliste détenait le pouvoir et que cette loi a reçu l'appui du Parti québécois. Je ne vous apprends rien en vous disant qu'au Québec, on aurait souhaité qu'on parte de cette loi québécoise pour bâtir la loi fédérale.
Il y a un jugement de valeur sur le fait que la loi fédérale créerait un nouveau modèle se situant entre deux extrêmes, qui seraient la directive européenne, à laquelle vous devrez vraisemblablement vous soumettre à un moment donné de toute manière, et les États-Unis. Placez-vous la loi du Québec à une extrémité?
M. Bernard Courtois: Non. On a toute une gamme de possibilités et la loi du Québec se trouve entre ces deux extrêmes. Il faut être conscient que l'industrie du commerce électronique, sur laquelle on compte pour un important développement, subissait de fortes influences américaines et éprouvait beaucoup de résistance à l'idée que le gouvernement se mêle de quelque façon de l'Internet. On se préoccupait aussi du fait que certaines gens de la grande entreprise s'y fieraient et d'autres pas. Tout ce que je dis, c'est que le projet de loi C-54 semble très bien aborder le sujet et traiter les divers intérêts de façon assez ingénieuse.
Mme Francine Lalonde: Les seules personnes qui ont dit cela ici, ce sont celles qui représentaient des entreprises. Les autres groupes n'estiment pas que c'est une loi équilibrée. Je vous laisse à votre jugement.
Revenons à l'Internet, à cette économie du savoir. Nous sommes à l'aube de cette ère. Est-ce que cette loi n'est pas beaucoup trop molle pour rassurer les citoyens?
• 1650
À chaque jour, il y a des nouvelles de nature à nous
énerver. Ce matin, on apprenait que Windows 98, que
beaucoup d'entre nous ont installé sur leur ordinateur, est un
délateur contre lequel on ne
peut rien faire. On dit que ce n'est pas
directement connecté, mais ce l'est. Il ne se passe
pas une journée sans qu'on entende des choses comme
celle-là, et cette loi, comme on dit en chinois, ne
«s'adresse» pas beaucoup à cette question.
M. Bernard Courtois: Vous soulignez justement le fait que les entreprises ne veulent pas semer dans la population un doute ou une inquiétude, ce qui nous nuit directement. On veut que la loi soit efficace et qu'elle fonctionne bien. Le code CSA a été élaboré grâce à la collaboration de groupes d'intérêt public. Nous vous apportons peut-être une expérience encore plus solide que celles des autres conseillers ou représentants d'entreprises qui sont venus vous parler.
Si une technologie comme le Pentium 3 d'Intel ou quelque chose sur le système de Microsoft pouvait recueillir de l'information contre le gré des clients, il y aurait un tollé dans le marché. Mais la loi s'appliquerait à de telles situations et les entreprises n'auraient pas le droit de s'en servir. Alors c'est neutre; la technologie n'affecte rien ici. La loi empêche les gens de faire de telles choses. Les gens n'ont pas peur de la machine, mais plutôt que la machine recueille des renseignements dont quelqu'un va se servir. La loi s'applique à cette utilisation-là.
Mme Francine Lalonde: Renseignements qu'on ne pourra pas rattraper.
M. Bernard Courtois: C'est cela. La loi s'applique à de tels cas.
Mme Francine Lalonde: Mais le citoyen n'a pas le droit d'exiger.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, madame Lalonde.
Monsieur Lastewka, s'il vous plaît.
M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente. J'apprécie les propos des témoins.
Je veux poser quelques questions. Mme Barnes a couvert ce domaine.
D'après ce projet de loi, les Canadiennes et les Canadiens devraient bénéficier d'un vaste programme d'éducation. Plusieurs témoins, de même que divers commissaires dans leur rapport, dans toutes les provinces, ont parlé de l'importance de cette éducation. Ce sera un vaste mandat.
J'aimerais donc que vous nous disiez quel rôle vous pensez que le commissaire devrait jouer ou entendre vos suggestions éventuelles quant à la façon d'éduquer les Canadiens au sujet de la protection de la vie privée. Vous avez acquis beaucoup d'expérience à ce sujet depuis de longues années, surtout dans votre secteur d'activité. Comment éduquer les Canadiens pour qu'ils comprennent ce que c'est et ce qu'ils devraient attendre de grandes entreprises comme la vôtre?
M. Bernard Courtois: Je pense qu'une des choses que donne, par exemple, cette loi, que j'ai mentionnée, est qu'en utilisant les lignes directrices de l'OCDE, on en a plus pour son argent, d'une certaine façon, parce qu'on se retrouve finalement avec un ensemble de principes qui sont ensuite généralement reconnus. Si chaque secteur ou chaque entreprise devait avoir son propre ensemble très complexe de principes concernant la protection de la vie privée, faire l'éducation de la population serait une tâche monumentale, et ce le serait aussi pour la population si elle voulait déterminer ce que tout cela signifie. C'est simplifié par le fait que les gens se rendent compte qu'il y a quelque chose qui s'applique à tous les domaines et qui va devenir la norme mondiale.
L'éducation, donc, je pense, n'est pas tant une façon formelle... Je n'ai pas de suggestion ou d'idée personnelle quant à la manière dont on pourrait dispenser une éducation formelle à la population canadienne, mais il faut en discuter. Je ne pense pas que les Canadiens aient besoin d'être informés de tous les petits détails d'un code ou de son mode de fonctionnement. Il faut qu'ils comprennent fondamentalement qu'ils ont certains droits, qu'ils sachent où s'adresser s'ils doivent se plaindre et quels sont les principes de base, et cela résulte d'un débat public. Cela pourrait résulter de ce qu'on en dit dans les médias, des discussions dans différentes sortes d'émissions. Sur l'internet, il y a des sites que les gens utilisent pour parler de la protection de la vie privée et qu'ils peuvent consulter pour s'informer à ce sujet.
Je pense qu'il faudra utiliser divers moyens. Je ne pense donc pas nécessairement à une éducation formelle—réunissez un groupe de gens dans une salle et faites-leur un exposé pendant deux heures.
M. Walt Lastewka: Non, je ne m'attendais pas non plus à cela. Je suppose que quand ce projet de loi sera adopté et que le commissaire fera son travail, etc., on s'attendra aussi à ce que les grandes entreprises participent au processus d'éducation, d'abord auprès de leurs propres clients, et ensuite auprès de leurs clients potentiels et du reste de la population canadienne. Puis-je entendre vos commentaires à ce sujet?
M. Bernard Courtois: Oui, je pense qu'il y a une autre chose qui va se faire. Comme vous l'avez probablement entendu dire et l'entendrez encore dire par divers représentants de notre industrie, nous avons besoin qu'on instaure ce sentiment de sécurité, et nous avons besoin que les gens sachent que cette protection existe et que ces principes sont appliqués. Il est donc dans notre intérêt de participer aux initiatives visant à ce que cela soit mieux connu en utilisant nos divers moyens de communiquer avec le public. Oui, je pense que vous pouvez compter sur le fait que nous mettrons cela à profit.
La présidente: Madame Morin, voulez-vous également nous faire part de votre réaction?
Mme Suzanne L. Morin (conseillère juridique principale, Bell Canada): Nous pouvons en fait vous en fournir des exemplaires, mais un des outils d'éducation que les compagnies de téléphone, dont BCT.TELUS, ont contribué à commanditer était la mise au point d'un jeu utilisant l'internet, un CD-ROM intitulé Jouer sans se faire jouer, et il est en cours de distribution dans des écoles de tout le pays. Le ministre, M. Manley, a assisté à son lancement en mai. Nous en avons envoyé des exemplaires à Hong-Kong. La Nouvelle- Zélande nous en a demandé. Il est conçu pour les enfants de sept à dix ans. C'est quelque chose dont nous sommes réellement fiers, et on l'a beaucoup exploité, et si quelqu'un a des enfants de sept à dix ans, je serais heureuse de vous en donner des exemplaires.
Il a été réalisé en collaboration avec le réseau Media Awareness Network, qui a fait beaucoup de travail sur l'Internet. En fait, même quand le document de travail relatif à ce projet de loi a été publié en janvier dernier, ce réseau avait organisé une tribune sur l'internet où on pouvait présenter des commentaires à son sujet. Nous étions donc très contents d'être associés à ce groupe à propos de cet outil pédagogique destiné aux enfants.
M. Walt Lastewka: J'ai une autre question. Qu'est-ce qui vous paraît constituer la plus grosse menace à la protection de la vie privée en matière de télécommunications dans votre domaine aujourd'hui?
M. Bernard Courtois: Aucune chose particulière ne me vient à l'esprit. Je pense que la plus grosse menace est de ne pas avoir d'emblée le degré de confiance dont la population aura besoin pour utiliser les nouvelles technologies. Je pense que c'est une menace que quelque chose ne se produise pas plutôt qu'une menace de nature individuelle.
M. Walt Lastewka: Je pense que les grandes sociétés qui, disons, rentreront dans le jeu de façon appropriée et feront une promotion appropriée obtiendront très rapidement un avantage sur le plan de la confiance et seront en meilleure posture que leurs concurrents. Êtes-vous de cet avis?
M. Bernard Courtois: Oui, et, dans ce sens, il y a divers processus d'accréditation qui sont en cours.
Par exemple, Bell Canada a été la première entreprise à obtenir le sceau WebTrust, qui est accordé par Ernst & Young, un important cabinet comptable. Vous constaterez que, dans de nombreux cas, certains essaient d'obtenir un avantage concurrentiel. Comme je l'ai mentionné, les marques jouissant d'une bonne réputation essaieront de le faire et pourront peut-être y parvenir rapidement.
Cela nous intéresse aussi parce que nous sommes un transporteur et que nous profitons du fait que tout le monde utilise ces nouvelles technologies. Il est aussi dans notre intérêt que ce niveau de confiance se répande dans l'ensemble de l'économie et des activités commerciales, parce qu'il ne fait aucun doute que, par exemple, si nous attachons de l'importance à cela, au fait d'être les premiers à recevoir le sceau WebTrust, et si d'autres ont différentes formules d'accréditation, c'est parce qu'on considère que c'est un moyen très utile de renforcer notre succès commercial.
M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.
Avant de passer à d'autres questions, je veux préciser quelque chose à propos de la question de Mme Barnes. Elle parlait de deux normes différentes. Vous demandez une norme—et je ne suis pas criminaliste, je me trompe donc peut-être—qu'on utiliserait normalement dans les procédures criminelles pour la perquisition et la saisie.
M. Bernard Courtois: Non, ce n'est pas ce que nous demandons. Pour clarifier ce dont je parlais, la norme criminelle n'a rien à voir avec ce que nous proposons ici. Cela s'applique à ce qu'on fait avec les renseignements une fois qu'on les détient.
Nous disons qu'en matière civile ou criminelle, il faudrait qu'un tiers examine toute perquisition ou saisie éventuelle, que ce soit aux fins d'une procédure civile ou d'une procédure criminelle.
La présidente: Si j'ai bien compris, Mme Barnes citait des exemples d'autres procédures civiles pour lesquelles les droits de perquisition seraient les mêmes que ceux qui sont proposés dans ce projet de loi, et vous demandez une norme plus élevée qu'on utiliserait normalement pour les affaires qui pourraient donner lieu à des poursuites criminelles. J'essaie d'être bien claire.
M. Bernard Courtois: Juste pour être clair, non, nous ne demandons pas—comme la Loi sur la concurrence, par exemple.
La présidente: Mais la Loi sur la concurrence a des articles civils et des articles criminels; pensez-vous donc que, dans cette loi, nous devrions avoir à la fois des articles civils et des articles criminels?
M. Bernard Courtois: Non, je dis simplement que...
La présidente: Vous voulez une partie de la Loi sur la concurrence, mais pas sa totalité.
M. Bernard Courtois: Oui. Qu'il s'agisse de la partie civile ou de la partie criminelle de la Loi sur la concurrence, si une perquisition et une saisie doivent avoir lieu, il faut une autorisation préalable. Cela n'a donc rien à voir avec l'aspect civil ou criminel. Cela s'appliquera aussi bien aux questions civiles qu'aux questions criminelles relevant de la Loi sur la concurrence. C'est la raison pour laquelle nous ne faisons pas cette distinction ici.
La distinction qui présente peut-être plus d'intérêt est que, dans certains autres cas, il peut, dans la pratique, être impossible d'obtenir une autorisation préalable pour des raisons d'urgence ou de sécurité. Il peut s'agir de sécurité alimentaire, de sécurité aérienne, de conduite en état d'ivresse, ou de je ne sais quoi. On ne peut pas alors suivre une telle procédure. Ici, il n'y a aucune raison de ne pas faire d'abord examiner la situation par quelqu'un pour assurer une protection.
La présidente: Je sais que récemment, par exemple, j'ai reçu à mon bureau un appel d'un électeur qui était très indigné par le fait qu'il avait essayé de contacter Revenu Canada et que chaque fois qu'il faisait le numéro, la ligne était occupée, et que Bell diffusait alors un message téléphonique disant que si vous appuyez sur je ne sais quel bouton pendant 30 minutes... il trouvait que c'était une forte ingérence dans sa vie privée. Il essayait d'appeler Revenu Canada et il voulait savoir pourquoi cela se produisait.
M. Bernard Courtois: Oui. Nous avons beaucoup de messages diffusés automatiquement, peut-être parce que la ligne est surchargée ou, comme pour Industrie Canada, ce pourrait être un système de réponse vocale automatique. C'est choses-là sont parfois tout à fait irritantes pour le public, et parfois tout à fait utiles. Bien entendu, ces systèmes permettent aux gens de traiter avec le gouvernement, avec leur banque ou avec je ne sais quoi sept jours par semaine, 24 heures par jour. Ils peuvent être très pratiques. Ils permettent de faire des économies et peuvent être très efficaces. Mais nous sommes encore en train d'apprendre comment utiliser ces choses-là pour les rendre simples et conviviales, ce qui n'est parfois pas le cas. Mais je ne pense pas que cela aille plus loin que cela.
La présidente: La plupart des gens supposent probablement que les appels locaux ne sont pas identifiés—pas repérés—parce qu'on fait gratuitement des appels locaux de chez soi. Quand on le fait, est-ce que l'appel est repéré?
M. Bernard Courtois: Non. Le commutateur, qui est un gros ordinateur, collecte l'information, qu'il s'agisse d'un appel local ou d'un appel interurbain, mais aucun système n'est installé pour extraire et collecter cette information, parce que nous ne l'utilisons pas pour la facturation ou quoi que ce soit d'autre. Donc, elle n'est tout simplement pas utilisée. Mais le numéro d'où vient l'appel est disponible, et c'est comme cela qu'on peut identifier le correspondant ou retracer un appel après coup si quelqu'un a essayé de le bloquer. Il y a donc une information qui existe.
La présidente: Merci, monsieur Jaffer, avez-vous d'autres questions?
M. Rahim Jaffer: Oui.
Étant donné l'amendement que vous demandez, à propos duquel la présidente vient de vous demander des précisions, quand il s'agit de dispositions visant à empêcher les abus, je me demande si, en ce moment, il y a dans la loi actuelle une disposition quelconque qui vous offre un recours si le commissaire à la protection de la vie privée entreprend une vérification ou veut effectuer une perquisition et une saisie et que cela vous paraît complètement farfelu. Existe-t-il un recours dont vous pourriez actuellement vous prévaloir pour faire la lumière sur cette situation?
Aux termes de l'article 22 de ce projet de loi, si le commissaire agit de bonne foi et suit les étapes de la procédure, il est littéralement intouchable. Dans ces conditions, en l'absence de la disposition que vous proposez dans l'amendement, je me demande s'il y a quelque chose que vous pouvez faire pour faire la lumière sur quelque chose qui vous paraît inéquitable?
M. Bernard Courtois: Oui, mais ce qu'il y a de gênant dans quelque chose de ce genre c'est que quand c'est fait, c'est fait. On ne peut pas revenir en arrière. Si, par exemple, quelqu'un tombait sur des renseignements confidentiels, ceux qu'un client communique à son avocat, vous pourriez essayer d'intervenir à ce sujet après coup, mais si quelqu'un a regardé des choses qu'il n'aurait pas dû regarder, eh bien, c'est trop tard. Il les a regardées, il s'est déjà rendu dans vos locaux, il est déjà venu, que vous ayez donné votre consentement ou non. Donc, en pratique, on ne peut réellement rien faire contre cela après coup.
M. Rahim Jaffer: Ma dernière question fait suite à celle qu'a posée Mme Lalonde et porte spécialement sur la compétence des provinces en matière de protection de la vie privée et ce projet de loi fédéral. En ce qui concerne l'existence de telles lois dans les provinces, il y a en actuellement seulement une au Québec. Mais si cela continue et si d'autres provinces se mettent à apporter des changements à la protection de la vie privée et à mettre sur pied quelque chose qui correspond à leurs préoccupations, ne risquerait- on pas de se retrouver en fin de compte avec un système assez complexe? Ou trouvez-vous positif que différentes provinces aient différentes lois et que, dans le cadre des activités de votre entreprise, vous ayez à surmonter ces obstacles que différentes provinces mettent sur votre chemin?
M. Bernard Courtois: Oui, cela pourrait devenir assez gênant si ces lois présentent de grandes différences. C'est un autre bon côté de ce projet de loi, parce qu'il contient un mécanisme visant à faire en sorte qu'il n'y ait pas d'énormes différences entre elles. Vous parlez d'une industrie qui, par nature, est même mondiale. Si le Canada peut montrer la voie et couvrir au moins cela, nous aurons une bonne base, et les gens auront l'impression qu'on peut nous faire confiance pour ce qui est de la protection de la vie privée.
Dans la mesure où ces lois sont assez semblables, les entreprises ne devraient pas avoir de gros problèmes. Nous avons l'habitude précisément de cette situation, étant assujettis aux exigences réglementaires fédérales. L'article 11 de nos modalités de service est très détaillé en ce qui concerne la protection de la vie privée et l'information des clients, et nous avons l'habitude d'avoir des filiales assujetties à la loi provinciale. Comme vous l'avez entendu dire, même quand le commissaire provincial demande de tels renseignements à la société qui n'est pas assujettie à la loi provinciale, nous coopérons toujours.
Donc, tant que les lois sont comparables de façon générale, les entreprises pourront tout à fait s'en accommoder. Mais s'il n'y avait pas un mécanisme comme celui qu'il y a dans cette loi, et si on laissait simplement les lois provinciales avoir préséance dans leurs domaines de juridiction et si elles étaient tout à fait différentes, cela deviendrait alors tout à fait gênant pour les entreprises. Je pense que nous ne pourrions pas alors atteindre l'objectif de donner aux Canadiens l'impression qu'il existe un certain niveau de protection de leur vie privée.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Jaffer.
Madame Barnes.
Mme Sue Barnes: Merci, madame la présidente.
Je viens d'entendre les réponses à ces questions, et je vais vous référer à votre propre mémoire, page 7, parce que cela sème maintenant fortement la confusion dans mon esprit. Vous avez apparemment dit le contraire de ce qui figure à la page 7 de votre mémoire, où vous dites: «En matière criminelle, la Cour suprême du Canada a établi trois conditions préalables pour que la perquisition et la saisie soient valides.» Vous citez l'affaire Hunter, et vous énoncez les points i), ii) et iii), le point iii) portant sur les motifs raisonnables.
Je vais maintenant vous faire lecture du paragraphe qui figure dans votre mémoire:
-
Nous sommes conscients du fait que ce projet de loi ne relève pas
du droit criminel, mais nous pensons que les mêmes conditions
préalables
—celles qui ont été citées juste avant à propos de l'affaire criminelle et sont les normes prévalant dans ce domaine—
-
devraient s'appliquer quand le commissaire à la protection de la
vie privée désire exercer ses pouvoirs de perquisition et de saisie
dans le contexte de la réalisation d'une enquête ou d'une
vérification.
Bon, je fais peut-être erreur, mais je vous ai entendu répondre à la question de la présidente que vous ne vouliez pas que le niveau criminel s'applique à la perquisition et à la saisie.
M. Bernard Courtois: Je pense qu'il est bon de clarifier cela. Nous avons dit cela ici parce que l'arrêt de la Cour suprême s'appliquait à une affaire criminelle. Nous disons dans notre mémoire qu'il devrait également s'appliquer quand il ne s'agit pas d'une affaire criminelle. En fait, la Loi sur la concurrence a ensuite été modifiée, si bien que la même protection s'applique aux mesures qui sont prises en vertu des parties civiles ou des parties criminelles de la Loi sur la concurrence. Voilà ce que nous disons. À notre avis, même si ce jugement porte sur une affaire criminelle, nous pensons qu'il devrait s'appliquer ici même s'il ne s'agit pas d'une affaire criminelle. Et la Loi sur la concurrence en est un autre exemple.
Mme Sue Barnes: Justement. Vous voulez qu'il s'applique à cette chose quand il n'y a pas de protection criminelle...
M. Bernard Courtois: C'est exact.
Mme Sue Barnes: D'après ce que j'ai compris, c'est le contraire de la réponse que vous avez donnée il y a deux minutes.
M. Bernard Courtois: Oh, je vois, je suis désolé. Je pensais avoir dit que nous voulons que cette protection s'applique, qu'il s'agisse d'une affaire criminelle ou non. C'est donc une loi qui n'est pas de nature criminelle, mais nous voulons que cette protection s'applique. C'était une procédure judiciaire qui était de nature criminelle, et cette protection s'appliquait. La Loi sur la concurrence a alors été modifiée pour que le même type de protection s'applique aux affaires non criminelles.
Donc, pour que cela soit bien clair, qu'il s'agisse d'une question criminelle ou civile, nous pensons qu'une protection contre une perquisition et une saisie non autorisées reste nécessaire.
Mme Sue Barnes: La norme criminelle.
M. Bernard Courtois: Non, je suis désolé, la protection contre la perquisition et la saisie n'est pas une question criminelle, mais simplement une protection contre la perquisition et la saisie. Elle peut s'appliquer dans une affaire criminelle ou dans une affaire civile. Nous disons que c'est une affaire civile et qu'elle devrait s'appliquer dans une affaire civile.
Mme Sue Barnes: D'accord, nous comprenons maintenant clairement ce que vous dites.
La présidente: Merci beaucoup, madame Barnes et monsieur Courtois.
[Français]
Madame Lalonde, s'il vous plaît.
Mme Francine Lalonde: J'aimerais d'abord indiquer que le code CSA n'a pas été conçu pour devenir partie intégrante de la loi. Je connais des gens qui n'auraient jamais participé à sa mise en oeuvre autrement.
Vous dites que vous ne témoignez devant nous que pour nous parler de la partie 1. J'aimerais quand même vous demander ce que vous pensez de la définition de «signature électronique» et de «signature électronique sécurisée». J'ai devant moi le rapport d'un groupe de travail des Nations unies qui dit qu'on ne devrait pas utiliser l'appellation «signature» parce que dans de tels cas, ce ne sont pas des signatures.
Puisque j'ai un exemplaire de ce rapport en anglais, je vous le lirai dans cette langue:
[Traduction]
-
[...] [ce sont] plutôt des techniques qui ont permis d'identifier
l'émetteur d'un message contenant des données et d'identifier le
message à envoyer. Par conséquent, rien ne justifiait l'utilisation
du terme «signature» pour désigner de telles techniques et, en
fait, l'utilisation de ce terme pouvait être source de confusion
étant donné que le terme «signature» s'accompagne de connotations
étroitement liées à son utilisation dans le contexte des documents
sur papier et aux effets juridiques de son utilisation dans ce
contexte.
J'aimerais, tout comme M. Lastewka, entendre ce que vous avez à dire là-dessus.
M. Bernard Courtois: Comme je le disais, c'est en raison de notre expérience dans le domaine de la protection de la vie privée que nous avons fait des commentaires sur cet aspect-là. Je n'ai pas étudié en détail les autres aspects du projet de loi, que je trouve très utile.
À l'article 31 figure une définition de «signature électronique». Il est possible qu'une autre terminologie soit préférable, mais je crois qu'une fois qu'une expression est définie dans la loi, il n'y a plus de doute et on ne risque pas d'éprouver de problèmes. Pour des raisons de style, un rédacteur pourrait choisir d'utiliser une expression différente, mais puisqu'il s'agit d'un projet de loi où l'on définit cette expression, il n'y aura pas de doute. Le terme aura l'effet voulu puisqu'il est défini expressément.
Mme Francine Lalonde: Mais le problème, c'est qu'on définit déjà ce qu'est une signature dans le code civil ou le common law. On se retrouvera face à deux effets juridiques non voulus s'il y a deux types de signatures. J'ai écouté le point de vue des savants juristes à ce sujet. C'est une question que je pose en même temps aux membres du comité. Il faudra certainement se pencher sur cette définition.
M. Bernard Courtois: Les tribunaux appliquent à la fois le common law, le droit civil et le droit statutaire et ils appliqueront cette loi-ci, y compris la définition telle qu'elle y est inscrite. Est-ce que le législateur pourrait utiliser une expression mieux choisie? Je ne le sais pas. Je n'ai aucune solution de rechange à vous proposer, mais je crois que du point de vue juridique, le projet de loi pourra s'appliquer sans problèmes puisque cette définition y figure. Les tribunaux appliqueront tantôt une définition qui est dans le code civil, tantôt une définition que contient une loi provinciale ou fédérale, selon le cas, à condition que la loi soit claire.
Mme Francine Lalonde: Je vais reprendre vos expressions sur les bleus. Il y a peut-être des gens qui ne sont pas d'accord avec vous. Merci quand même.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup.
Je tiens à vous remercier tous deux pour votre présence parmi nous. Nous vous sommes reconnaissants de votre exposé détaillé et de votre participation à ces audiences.
Je signalerai aux membres du comité, juste avant qu'ils ne s'en aillent, que je veux soulever une question au sujet de ce qu'il advient du projet de loi C-54. Un certain nombre de témoins nous ont téléphoné. La semaine dernière, à la réunion du comité directeur, nous avons dit que nous recevrions seulement des mémoires. Je veux simplement informer les membres du comité qu'environ cinq autres groupes ont demandé à comparaître. Nous avons actuellement prévu de nous réunir la semaine prochaine mardi matin, mardi après-midi, mercredi après-midi, jeudi matin et jeudi après-midi. La seule façon de pouvoir avoir une autre réunion serait de siéger en soirée ou lundi après-midi. Ce qui créerait sans doute le moins de conflit d'horaire serait lundi après-midi. Je ne sais toutefois pas ce qu'en pense le comité, si bien que je soulève cette question avec vous.
Mme Francine Lalonde: Est-ce le 22 mars?
La présidente: Non, le 22 mars est le lundi suivant.
Une voix: C'est le jour où nous allons à Montréal.
La présidente: Non, nous parlons de lundi prochain, pas du 22 mars.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Il n'y a aucun problème.
[Traduction]
La présidente: Très bien. Je pense donc que nous essayerons de recevoir les autres témoins lundi après-midi, si tout le monde est d'accord.
Mme Sue Barnes: Pendant combien de temps?
La présidente: La durée prévue pour toutes les réunions est de deux heures.
Mme Sue Barnes: Deux heures? Ce serait donc lundi après la période des questions.
La présidente: Oui, ce pourrait être lundi après-midi. C'est ce que je pense.
Mme Sue Barnes: D'accord.
La présidente: Très bien.
La séance est levée.