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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 12 mai 1998

• 1532

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre en date du mardi 17 mars 1998, examen du projet de loi C-20, Loi modifiant la Loi sur la concurrence et d'autres lois en conséquence.

Je signale aux membres du comité que nous allons commencer par le paragraphe B de l'ordre du jour. Nous étudierons le paragraphe A non pas aujourd'hui, mais demain à 15 h 30. Cette motion n'a pas fait l'objet d'un préavis de 48 heures, et comme il n'y a pas consentement unanime, nous étudierons le budget demain à 15 h 30.

Nous allons commencer aujourd'hui avec les témoins que nous accueillons à propos du projet de loi C-20. Nous avons la chance d'avoir plusieurs témoins. Je vais proposer à chacun d'entre eux de nous présenter son exposé.

Nous accueillons six témoins aujourd'hui: M. Don Vickery, de la Canadian Office Machine Dealers Association; M. John Gustavson, de l'Association canadienne du marketing direct; Mme Leslie King, du Bureau d'éthique commerciale; M. Ivor Thompson, du Canadian Survey Research Council; M. Al Finn, de Visa Canada Association, et M. Barry Elliott, de la Police provinciale de l'Ontario.

Je vous propose de procéder dans l'ordre qui figure à l'ordre du jour, c'est-à-dire que nous allons commencer par M. Vickery, qui est directeur exécutif de la Canadian Office Machine Dealers Association. Un instant, monsieur Vickery, s'il vous plaît.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Dans quel ordre doivent être les documents qui nous ont été remis?

La présidente: J'ai oublié de signaler que vous avez reçu plusieurs documents. Vous devriez en avoir un de la Canadian Office Machine Dealers Association. Vous devriez avoir une chemise de l'Association canadienne du marketing direct; l'exposé se trouve à l'intérieur. Le Bureau d'éthique commerciale n'a pas remis de mémoire écrit. Vous devriez avoir le mémoire du Canadian Survey Research Council. Il n'y a pas de mémoire écrit de Visa Canada Association. Et chaque parti d'opposition devra se partager un document de la Police provinciale de l'Ontario.

Madame Lalonde et monsieur Dubé, vous avez un document de la Police provinciale de l'Ontario à vous partager. Il devrait y en avoir quelques-uns à partager du côté libéral. Est-ce qu'on y est?

• 1535

Monsieur Vickery, vous pouvez commencer.

M. Don Vickery (directeur exécutif, Canadian Office Machine Dealers Association): Je suis heureux de pouvoir comparaître devant ce comité pour parler du projet de loi C-20 et des changements apportés à la loi en matière de télémarketing et de publicité trompeuse.

La Canadian Office Machine Dealers Association, COMDA, est une association commerciale de concessionnaires et de fournisseurs de matériel de bureau qui travaille à l'amélioration de ce secteur industriel.

La COMDA représente ce secteur industriel depuis 55 ans et nos membres représentent l'ensemble du secteur. Les activités ininterrompues des parties en cause, qui ne craignent pas les mesures dont leurs activités pourraient faire l'objet, attestent bien de la rentabilité du télémarketing dans notre secteur. Il est évident que les sociétés qui y ont recours ont une bonne connaissance des produits offerts et du matériel utilisé par les consommateurs.

Comment fonctionnent-elles? Elles commencent par des appels téléphoniques initiaux sous forme de sondage, au cours desquels elles se renseignent sur les photocopieuses, les télécopieurs et les imprimantes utilisés dans les bureaux de la société qu'elles appellent. Une fois cette information obtenue, elles font un deuxième et souvent un troisième appel pour faire affaire avec ce consommateur non averti.

Les exemples suivants indiquent les formules utilisées au cours des appels une fois que le type de produits utilisés est connu:

—Je représente l'entrepôt de votre fournisseur habituel.

—Vous pouvez vous fournir chez nous à meilleur marché.

—Je suis le représentant national d'un fabricant ou d'un distributeur de photocopieuses, de télécopieurs ou d'imprimantes.

—Un client de votre région a changé de photocopieuse et il ne peut pas utiliser ses fournitures ordinaires.

—Votre concessionnaire—et on donne toujours le nom du concessionnaire—m'a demandé de vous appeler.

—Votre concessionnaire—on donne son nom—se retire des affaires et nous a cédé son territoire.

Parallèlement à cela, je signale qu'à Yorkton, en Saskatchewan, des agents de télémarketing ont appelé, il y a environ six mois, un client sans méfiance et lui ont annoncé que son concessionnaire faisait faillite. Il se trouve que le client qu'ils appelaient était l'avocat du concessionnaire en question et il n'avait jamais entendu dire que son client se retirait des affaires. Voilà le genre de choses qui peuvent se produire.

Toutes ces démarches peuvent amener leur destinataire à croire qu'il a affaire à une société en bonne et due forme ou à un représentant de notre secteur industriel. Malheureusement, les clients qui achètent ces produits constatent, à leur grand étonnement, que les prix facturés sont beaucoup plus élevés que ceux de leur concessionnaire habituel. Par ailleurs, la quantité de produits par caisse n'est pas la même, si bien que le prix par caisse peut être inférieur, mais les quantités livrées le sont également.

Notre association fournit à ses membres des bulletins et des étiquettes autocollantes destinées à leurs clients, et qui visent à les avertir de ce genre de problème. Vous trouverez ci-joint, à titre d'information, des exemplaires de bulletins et d'autocollants.

Depuis son entrée en vigueur, l'opération PhoneBusters a grandement aidé nos membres et leurs clients à dénoncer aux autorités les escroqueries de ce genre. Nous avons signalé à tous nos membres que s'ils reçoivent des plaintes de leurs clients, ils doivent transmettre toute l'information à l'opération PhoneBusters. Nous savons que les responsables de cette opération reçoivent des copies des documents et des factures envoyés aux consommateurs.

Notre secteur d'activité est extrêmement compétitif. Les concessionnaires et les fournisseurs s'affairent à promouvoir la vente de leurs produits, de leurs fournitures et de leurs services. Nos membres ne craignent nullement la concurrence. En revanche, ce genre de concurrence sur le terrain du télémarketing illicite est préjudiciable non seulement pour nos consommateurs, mais également pour la réputation des concessionnaires et des fournisseurs.

Le conseil d'administration de notre association approuve sans réserve les changements apportés à la loi dans le domaine du télémarketing et de la publicité trompeuse. Nous sommes particulièrement favorables aux points suivants qui, à notre avis, devraient permettre de faire échec à ceux qui pratiquent cette forme de commerce illicite.

• 1540

Les agents de télémarketing seront tenus de divulguer certains renseignements au cours de la conversation téléphonique avec le client. Nous pensons que ce genre de divulgation devrait être bien défini dans la loi.

Il sera plus facile, pour les tribunaux, d'émettre des injonctions provisoires pour mettre un terme aux activités des agents de télémarketing soupçonnés de fraude. Nous pensons que si le projet de loi est adopté, les agents de télémarketing illicites prendront conscience des sanctions pénales auxquelles ils s'exposent, ce qui devrait mettre un terme au problème tel qu'il existe actuellement.

Le télémarketing est un outil important. S'il est bien utilisé, il peut être intéressant aussi bien pour le consommateur que pour le concessionnaire et le fournisseur. Nous pensons que grâce aux modifications proposées, notre industrie et nos membres seront sur un pied d'égalité avec tous les intervenants du marché.

Je suis heureux d'avoir pu comparaître devant le comité au nom de notre conseil d'administration et d'avoir pu exprimer notre appui aux modifications envisagées dans le projet de loi C-20. Si vous avez des questions concernant cet exposé ou sur tout autre sujet, je me ferai un plaisir d'y répondre dans la mesure de mes moyens.

Encore une fois, notre association est tout à fait favorable aux changements proposés.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Vickery.

Je donne maintenant la parole à M. John Gustavson, le président-directeur général de l'Association canadienne du marketing direct.

M. John Gustavson (président-directeur général, Association canadienne du marketing direct): Merci, madame la présidente.

L'ACMD représente le secteur du télémarketing légitime du pays, ainsi que d'autres disciplines de marketing. Je suis heureux d'avoir l'occasion de me prononcer sur le projet de loi C-20. Je voudrais exprimer l'appui de l'ACMD aux amendements proposés à la Loi sur la concurrence.

Fondée en 1967, l'ACDM est la plus importante association de marketing fondé sur l'information du Canada. Nos 750 sociétés membres comprennent les principales institutions financières du Canada, des éditeurs, des producteurs de catalogues et des organismes de charité, ainsi que divers fournisseurs de produits et de services.

Les sociétés membres de l'ACDM sont à l'origine de plus de 80 p. 100 des ventes par publicité directe, totalisant 12,4 milliards de dollars au Canada en 1997. Il s'agit d'une augmentation de 12 p. 100 par rapport à 1996.

Nos membres utilisent toutes sortes de médias, que ce soit l'imprimerie, l'électronique, les médias interactifs ou le téléphone, pour vendre des produits et des services ou pour solliciter des dons de charité. Ils emploient plus de 230 000 Canadiens et Canadiennes. Les centres téléphoniques emploient actuellement des dizaines de milliers de personnes dans toutes les régions du pays.

Les achats à domicile sont devenus très pratiques dans la vie active d'un grand nombre de Canadiens et de Canadiennes. Le magasinage par téléphone ne constitue pas uniquement un choix pour certains consommateurs, mais également une nécessité absolue pour un grand nombre de personnes âgées et handicapées.

Ces personnes doivent pouvoir faire des affaires par téléphone en toute confiance. Nous reconnaissons que la confiance est essentielle à ce secteur dynamique. C'est pourquoi l'Association canadienne du marketing direct possède une solide histoire d'autoréglementation. Les membres de l'ACMD savent que les normes élevées de pratique commerciale constituent leur responsabilité fondamentale envers le public, qu'elles sont essentielles pour gagner et conserver la confiance des consommateurs, et qu'elles sont le fondement d'une industrie prospère et indépendante.

Tous nos membres se conforment à un code de déontologie et à des normes de pratique obligatoires qui incluent, entre autres, les dispositions visant la divulgation complète et équitable des détails relatifs à l'agence de marketing et à l'offre en question.

Je cite notre code de déontologie:

    Les offres doivent être claires et véridiques; elles ne doivent pas représenter faussement un produit, un service, une sollicitation ou un programme; enfin, elles ne comporteront aucun énoncé, aucune technique de démonstration, ni aucune comparaison visant à tromper le client.

Vous trouverez un exemplaire de notre code de déontologie dans la chemise d'information qui vous a été distribuée cet après-midi.

Cependant, les compagnies ne sont pas toutes liées par le code de déontologie de l'ACMD. L'adhésion à cette association est volontaire, et malgré le fait que nous représentons environ 80 p. 100 des ventes de marketing direct au Canada, certaines agences de marketing, responsables ou non, n'en sont pas membres.

Il est également malheureux de constater qu'au fur et à mesure que l'industrie prend de l'expansion, certaines entreprises dont les pratiques commerciales sont douteuses ou illégales s'intégreront au secteur afin de profiter de cette croissance et, évidemment, de la confiance des consommateurs qui a été établie.

Les malfaiteurs ont toujours fait partie du décor, mais avec l'arrivée des nouveaux outils technologies, ils tentent de trouver de nouvelles façons d'exploiter des victimes innocentes, spécialement les plus vulnérables, comme les personnes âgées. La fraude téléphonique touche actuellement beaucoup trop d'individus chaque année et elle menace également la confiance des consommateurs à effectuer des opérations commerciales par téléphone.

Nous croyons que le rôle du gouvernement consiste à créer et à faire respecter des lois qui protégeront les consommateurs et préviendront la fraude dans le secteur du télémarketing. Les changements proposés dans le projet de loi C-20 permettront d'améliorer le cadre de réglementation actuel et fourniront aux organismes d'application de la loi les outils d'enquête nécessaires pour réprimer la fraude.

Nous sommes heureux de constater l'ajout de mesures comme l'écoute électronique des malfaiteurs suspects, un processus de règlement plus rapide et des peines plus strictes pour les contrevenants. En outre, la disposition prévoyant la divulgation complète de l'information rapproche cette loi du code de déontologie et des normes de pratique de l'ACMD.

• 1545

J'aimerais préciser que les amendements proposés aujourd'hui aideront certainement les Canadiens et les Canadiennes à éviter de devenir les victimes des malfaiteurs, mais l'ACMD croit fermement que le meilleur moyen de se défendre contre toute forme de fraude demeure l'éducation et la mise en garde des consommateurs.

L'ACMD s'est engagée à sensibiliser les consommateurs aux moyens d'éviter la fraude liée au télémarketing. En décembre dernier, nous avons participé à une activité sur la fraude téléphonique intitulée «Gare aux escrocs... Raccrochez!», organisée en collaboration avec le gouvernement de l'Ontario, le projet «PhoneBusters» et les groupes de personnes âgées. Cette initiative conjointe visait à «renverser la vapeur», c'est-à-dire donner aux personnes âgées la possibilité d'appeler des victimes possibles et de les mettre en garde contre les malfaiteurs.

L'ACMD a également participé, avec Industrie Canada, à la production de la vidéo «Attention Arnaque!» visant à sensibiliser les consommateurs; elle a participé à un groupe de discussion sur la répression du télémarketing trompeur, organisé par le gouvernement, et elle a collaboré avec Bell Canada et d'autres groupes afin de régler la question touchant les appareils à composition automatique. Au milieu des années 90, à la demande de l'ACMD et de Bell Canada, le CRTC a adopté des éléments clés de notre code de déontologie afin d'établir un cadre réglementaire pour les agences de télémarketing.

Nous croyons que l'éducation des consommateurs est primordiale, car il existe des moyens permettant aux Canadiens et aux Canadiennes de se prémunir contre les fraudes téléphoniques, notamment traiter seulement avec les entreprises connues ou qui ont une bonne réputation; ne pas être incité à acheter immédiatement: les agences de télémarketing légitimes enverront toujours du matériel écrit aux fins de consultation; et en cas de doute, consulter des amis, des parents ou des voisins avant de prendre la décision d'acheter.

En principe, les consommateurs doivent être en mesure de poser des questions et de juger par eux-mêmes s'ils font affaire avec une entreprise fiable par téléphone. C'est seulement à ce moment qu'ils devraient fournir des renseignements financiers personnels. Toutefois, nous avons constaté que ce n'est pas toujours le cas, et c'est pourquoi le marché doit être doté de mesures législatives strictes comme celle du projet de loi C-20.

En conclusion, l'ACMD souhaiterait que les relations positives entre les agences de marketing et les consommateurs continuent d'évoluer. Le projet de loi C-20, conjugué aux autres initiatives de sensibilisation, aidera les Canadiens à se prémunir contre la fraude téléphonique et encouragera la croissance d'entreprises responsables dans le secteur du télémarketing.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de commenter ces changements.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Gustavson.

Nous allons maintenant donner la parole à Mme Leslie King, du Bureau d'éthique commerciale. Mme King est la présidente du comité de gestion et directrice de l'organisme. Soyez la bienvenue, madame King.

Mme Leslie King (présidente, Comité de gestion, directrice, Bureau d'éthique commerciale): Je tiens à remercier la présidente et les membres du comité d'avoir invité le Bureau d'éthique commerciale d'Ottawa à comparaître devant vous.

Le Bureau d'éthique commerciale est un organisme de ressources pour le public, les entreprises et le gouvernement. Nous sommes une source d'informations au niveau communautaire. Trop souvent, les appels que nous recevons proviennent de personnes désespérées qui viennent de se rendre compte qu'elles ont fait une erreur de jugement. Elles ont eu le tort de faire confiance à une voix enjôleuse qui leur a fait croire au téléphone qu'elles avaient gagné un prix. Nous savons tous ce que cela veut dire. Au BEC, nous pouvons donner des conseils, nous mettons le public en garde par l'intermédiaire des médias et nous renvoyons les victimes au projet PhoneBusters, mais en général, nous ne réussissons pas à faire échec au télémarketing trompeur à sa source, ni à obtenir des remboursements.

Toutes les agences du Bureau d'éthique commerciale du Canada accueillent avec enthousiasme les modifications proposées dans le projet de loi C-20. C'est une excellente initiative pour lutter contre une forme de commerce fondée sur l'accumulation de mensonges. À notre avis, les modifications proposées devraient obliger les agences de télémarketing à divulguer l'endroit exact où sont effectués les appels. Cette divulgation devrait comprendre une adresse complète indiquant le nom de la rue, la ville et le code postal.

L'agence de télémarketing devrait être obligée d'annoncer d'emblée le produit qu'elle vend. L'annonce d'un prix gagné ne devrait pouvoir être fait que par écrit, et non par téléphone. Le consommateur devrait pouvoir inspecter le prix et, au besoin, le renvoyer. Les victimes du télémarketing frauduleux devraient toujours recevoir un remboursement complet équivalent au prix qu'ils ont payé, que le défendeur soit condamné à une amende, à une peine d'emprisonnement, ou aux deux pénalités.

Nous vous recommandons fortement d'inclure les agences du Bureau d'éthique commerciale parmi les organismes à consulter en cas de plaintes. En fait, ils constituent un moyen de recours efficace qui devrait faire partie de la solution à apporter au télémarketing trompeur.

Nous vous félicitons pour le travail que vous avez effectué et nous attendons avec impatience une loi formulée simplement, qui nous sera très utile. Merci.

La présidente: Merci beaucoup, madame King.

Nous allons maintenant passer à M. Ivor Thompson, du Conseil canadien de la recherche par sondage.

M. Ivor Thompson (président, Canadian Survey Research Council): Merci beaucoup, madame la présidente. Je voudrais remercier le comité de me donner l'occasion de comparaître ici aujourd'hui pour présenter le point de vue de notre secteur d'activité sur le projet de loi C-20.

Le Canadian Survey Research Council représente plus de 50 sociétés canadiennes qui proposent des services de commercialisation et de recherche par sondage. Il représente également plus de 50 grandes sociétés canadiennes qui demandent des sondages sur le marché et qui en utilisent les résultats.

• 1550

Notre activité, comme de nombreuses autres, repose sur la confiance et la coopération des Canadiens qui acceptent de participer à des sondages, que ce soit par courrier, par téléphone ou par entrevue directe.

Les sondages commandés par ce secteur d'activité sur lui-même, notamment à l'initiative de certains ministères et organismes comme le CRTC, montrent que la majorité des Canadiens comprennent et approuvent le rôle de la recherche par sondage sur le marché et les avantages qu'elle apporte à l'industrie canadienne pour la mise au point et la commercialisation de nouveaux produits et services. Le public canadien comprend également le rôle de notre industrie dans l'évaluation des services gouvernementaux et dans l'élaboration de nouvelles politiques et initiatives gouvernementales. Dans tous ces domaines, les Canadiens nous sont très favorables. Pour notre industrie, il est essentiel de préserver cette confiance et cet appui, et de ne pas abuser des privilèges qui en découlent.

Cependant, le télémarketing trompeur mine cette confiance et restreint quotidiennement la coopération du public, qui est pourtant essentielle à notre succès. Il y a deux ans, nous avons créé un mécanisme qui permet à toute personne, avant de participer à un sondage, d'appeler un numéro 1-800 pour vérifier l'authenticité du sondage ou de la société qui prétend faire un sondage. Ce mécanisme faisait suite aux initiatives prises par le gouvernement dans le domaine de la protection de la vie privée, et auxquels nous avons apporté notre appui.

Aujourd'hui, nous approuvons fortement le projet de loi C-20. Nous pensons que c'est un autre progrès important dans la lutte contre les utilisations trompeuses des nouvelles technologies qui sont pourtant essentielles dans un grand nombre d'industries et de secteurs.

En tout état de cause, nous demandons instamment au gouvernement d'aller encore plus loin en ce qui concerne les dispositions du projet de loi C-20 sur la divulgation en exigeant que dans tout appel non sollicité auprès du public canadien, l'auteur de l'appel indique clairement dès le début l'objet de cet appel, que ce soit un sondage, la collecte de fonds pour un organisme de bienfaisance ou pour quelqu'autre cause, ou la vente d'un produit ou d'un service, l'appel étant dans ce cas légitime et fait de bonne foi.

Dans notre mémoire, nous signalons un projet de loi semblable qui a été adopté par le Congrès américain, et qui énonce les éléments à divulguer immédiatement et de façon non équivoque, notamment l'identité de la personne qui appelle et l'objet de l'appel. Nous approuvons l'ajout d'une disposition semblable aux exigences de divulgation du projet de loi C-20.

Dans son intervention du 30 avril, l'Association du Barreau canadien a signalé que la divulgation était une exigence trop importante pour rester du domaine de la réglementation. Nous pensons que cette exigence de divulgation serait très utile pour maintenir la confiance et la coopération du public canadien.

Au nom du Conseil canadien de la recherche par sondage, je vous remercie d'avoir pris le temps d'étudier notre mémoire.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Thompson.

Je vais maintenant donner la parole à M. Al Finn, de Visa Canada Association.

M. Al Finn (chef de la gestion des risques et de la sécurité, Visa Canada Association): Merci, madame la présidente, de nous avoir invités.

Mon intervention d'aujourd'hui est consacrée exclusivement aux dispositions du projet de loi C-20 concernant le télémarketing trompeur.

Nous avons participé à la tribune d'Industrie Canada sur le télémarketing trompeur et dans l'ensemble, nous sommes satisfaits de la teneur du projet de loi C-20. Dans le secteur des cartes de crédit, nous pensons qu'il est bon d'exercer un certain contrôle sur les agences de télémarketing qui sont dépourvues de scrupules. Nous voulons cependant indiquer clairement qu'à notre avis, la grande majorité des ces agences au Canada font un travail légitime et irréprochable. Les difficultés sont imputables à une minorité d'escrocs du télémarketing.

À notre avis, l'application des dispositions du projet de loi C-29 ne devrait pas être préjudiciable aux agences légitimes qui participent à la croissance rapide du télémarketing au Canada. Malheureusement, le télémarketing trompeur s'en prend à des personnes âgées et à des consommateurs démunis, et l'escroquerie revêt diverses formes. Des personnes âgées, qui ont passé leur vie à faire confiance, voient cette confiance trahie. Les escrocs profitent d'elles.

• 1555

Les consommateurs qui ont un problème de crédit ont bien tort d'acquitter les frais requis pour la prétendue fourniture d'une carte de crédit que de toute façon, l'escroc ne peut pas fournir. Au Canada, il n'y a qu'une seule façon d'obtenir une carte de crédit, c'est de passer par une banque habilitée à émettre des cartes de crédit. Aucun autre organisme ou entité ne peut le faire.

Les pressions exercées sur les consommateurs pour qu'ils divulguent le numéro de leur carte de crédit au téléphone se soldent par des prélèvements non autorisés sur le compte de la carte de crédit. Je pourrais continuer, mais je dirai simplement que les agences de télémarketing trompeur ne sont jamais à court d'imagination. C'est une activité très lucrative, qui fait souvent appel à des ventes pyramidales.

Une personne a été arrêtée récemment à Edmonton. Lorsque la GRC est intervenue, le propriétaire de l'entreprise était sur place et il a reconnu avoir reçu environ 40 000 demandes de carte de crédit du monde entier, à 200 $ l'unité, ce qui devrait donner environ 8 millions de dollars. À supposer qu'il n'y ait que 25 p. 100 des gens qui répondent, c'est quand même une activité extrêmement lucrative.

D'habitude, nous sommes informés des escroqueries par les consommateurs qui s'en plaignent directement à nous ou qui veulent vérifier si Visa ou MasterCard approuve telle ou telle activité. Récemment, nous avons eu également les témoignages des employés recrutés par ces escrocs, qui ont travaillé pendant un jour ou deux et qui se sont rendu compte de quelque chose de louche. Ils nous ont téléphoné pour savoir si nous accordions notre appui au produit ou à l'activité en question.

Nous disons nous aussi qu'à notre avis, la meilleure défense contre les escrocs du télémarketing trompeur est l'éducation. C'est pourquoi nous avons approuvé sans réserve les efforts d'éducation d'Industrie Canada. Nous sommes très heureux que le télémarketing trompeur fasse l'objet d'exigences en matière de divulgation, et que des infractions spécifiques aient été créées dans la loi pour faire échec à certaines pratiques de télémarketing trompeur.

Nous voudrions vous soumettre deux sujets de réflexion. Si ce projet de loi est adopté, il va à notre avis contraindre les agences de télémarketing trompeur à passer à Internet. Nous ne savons pas exactement comment elles vont procéder, même si nous avons quelques idées à ce sujet, mais il serait utile de surveiller l'apparition d'activités nouvelles sur Internet.

Deuxièmement, nous pensons qu'avec l'appui des compagnies de téléphone, nous serions indiscutablement en mesure d'éliminer cette activité. Je veux dire par là que lorsqu'une compagnie téléphonique reçoit une demande concernant l'installation de 20 ou 25 téléphones dans une pièce de trois mètres sur cinq, elle devrait se douter qu'il y a anguille sous roche. Je sais bien qu'une compagnie téléphonique a pour mission d'assurer un service, et non pas de se substituer à la police, mais j'estime qu'elle a néanmoins une responsabilité sociale.

Encore une fois, je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant le comité. Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Finn.

Nous allons maintenant passer à M. Barry Elliott, qui est sergent-détective d'état-major et coordonnateur du projet PhoneBusters à la Police provinciale de l'Ontario. Je rappelle aux membres du comité qu'on a distribué des deux côtés des copies qui vous permettront de suivre l'exposé de M. Elliott.

Monsieur Elliott, c'est à vous.

Le sergent-détective d'état-major Barry Elliott (coordonnateur du projet PhoneBusters, Police provinciale de l'Ontario): Merci beaucoup. Je remercie le comité de m'avoir invité aujourd'hui.

Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas PhoneBusters, il s'agit d'un organisme regroupant les autorités fédérales et provinciales ainsi que des sociétés privées et qui vise à lutter contre la fraude dans le télémarketing. Nous centralisons les données sur les victimes du télémarketing et sur les tentatives d'escroquerie dans l'ensemble du pays, y compris sur les victimes américaines de compagnies canadiennes.

Notre groupe comprend des représentants de la Police provinciale de l'Ontario qui coordonnent le service PhoneBusters, le ministère de la Consommation et des Relations commerciales de l'Ontario, Industrie Canada, le ministère albertain des Affaires municipales, Visa et MasterCard Canada, le solliciteur général du Canada, lÂAmerican Association of Retired Persons, la Gendarmerie royale du Canada, la police de la Communauté urbaine de Toronto, la police de la Communauté urbaine de Montréal, les bureaux d'éthique commerciale au Canada et aux États-Unis, la Canadian Courier Association et l'Association des banquiers canadiens.

• 1600

Pour vous donner une idée de ce que nous savons sur la fraude par télémarketing, PhoneBusters a reçu depuis 1995 environ 56 000 plaintes de victimes canadiennes, parmi lesquelles on compte 10 000 personnes qui ont perdu cumulativement environ 30 millions de dollars canadiens.

L'une des choses que beaucoup de gens ignorent c'est que la fraude par télémarketing est l'un des crimes qui sont les moins signalés au Canada étant donné que la plupart des victimes sont trop gênées pour le faire.

Ce sont surtout les personnes âgées qui sont la cible des fraudeurs. Nos statistiques révèlent clairement que ce sont les gens de plus de 60 ans qui ont perdu plus de 5 000 $. Les fraudeurs sont prêts à s'en prendre à n'importe qui, peu importe l'âge, peu importe le sexe, ils sont prêts à vous dépouiller mais ce sont surtout les aînés et leurs économies qui les intéressent. Ce genre de fraude détruit littéralement la vie non seulement de la personne âgée qui en est victime, mais également celle de sa famille. C'est un fléau pour tout le monde.

Beaucoup de gens pensent que la fraude au télémarketing est un crime de col blanc, un genre de crime où la violence n'intervient guère. Mais sur le plan mental, le genre de violence qui accompagne la fraude par télémarketing peut fort bien acculer quelqu'un au suicide. Pouvez-vous vous représenter quelqu'un qui a 80 ans et qui, en l'espace de quelques mois, perd les économies d'une vie entière? Que faire lorsqu'on a 80 ans et que l'on vient de se faire dépouiller ainsi par un fraudeur? À qui s'adresser? Comment récupérer cet argent?

La police est favorable au projet de loi C-20. Ce n'est pas que nous voulons amoindrir la responsabilité des corps policiers dans la lutte contre le télémarketing frauduleux, étant donné qu'il s'agit en substance d'une activité criminelle organisée et qui a été reconnue comme telle. Grâce à ces règlements, aux injonctions obtenues au plan civil et à certains des recours qui pourraient peut-être être utilisés rapidement pour ralentir un peu ces voyous, nous sommes tout à fait favorables à cette initiative et nous appuyons toutes les recommandations qui sont ainsi faites, y compris l'écoute électronique dont les policiers ont besoin pour faire enquête. Nous pensons que c'est une excellente idée.

Il y a autre chose encore que beaucoup de gens ignorent, et il s'agit de l'ampleur de la fraude dont les victimes sont aux États-Unis. Plusieurs compagnies implantées au Canada s'en prennent à des Américains, et on en trouve à Toronto, à Montréal et à Vancouver. Bien sûr, cela ne nous aide guère dans nos relations avec les États-Unis, d'autant plus que les fraudeurs canadiens s'en prennent aux personnes âgées aux États-Unis.

Pour vous donner une idée, nous avons reçu depuis 1996 environ 10 000 plaintes provenant de citoyens américains, et nous avons recensé 4 500 victimes qui ont perdu environ 10 millions de dollars.

Lorsque je cite ce genre de chiffres, il faut bien comprendre que nous ne parlons que d'une seule pratique frauduleuse, la plus répandue, c'est-à-dire celle qui fait intervenir l'appât d'un prix. Cela ne comprend pas la fraude au télécopieur, ni la fraude aux bijoux, ni encore la fraude à l'investissement. Il y a toute une série d'escroqueries et d'arnaques extrêmement sophistiquées conduites par télémarketing et qui sont rarement signalées. C'est un genre de fraude extrêmement diversifiée, à plusieurs paliers et qui évolue sans cesse.

Nous pensons que ce projet de loi, et en particulier la disposition 52.1(3) qui interdit de promettre quoi que ce soit en réclamant une mise de fonds pour obtenir un prix. Je pense que cette disposition aura des effets énormes. Là encore, tant et aussi longtemps que la police aura les moyens de faire appliquer ces nouvelles dispositions... même si la loi est parfaite, elle sera inutile si on ne prévoit pas les moyens financiers nécessaires pour la faire appliquer.

Autre chose encore qui à notre avis... et c'est d'ailleurs la solution adoptée par les États-Unis: une peine plus lourde lorsqu'il s'agit d'un crime commis au détriment d'un certain groupe. On ne parle pas expressément ici des personnes âgées. Les Américains ont simplement précisé qu'il s'agissait de groupes vulnérables. Par exemple, les personnes qui souffrent de la maladie d'Alzheimer ou qui sont vulnérables en raison d'un âge avancé devraient faire partie de cette catégorie. Il est à espérer qu'ainsi le juge condamnera à des peines plus lourdes.

Je suis tout à fait en accord avec ce que vous a dit Al Finn de Visa, en l'occurrence que le CRTC et Stentor pourraient prendre davantage l'initiative pour lutter contre les crimes de ce genre, et il en va de même pour Postes Canada. Au Canada, la meilleure façon de perdre son argent consiste à l'envoyer par messagerie. La principale compagnie de messagerie dans ce pays est Postes Canada avec son service de poste prioritaire.

• 1605

Il y a toute une série de statistiques, accompagnées de leur ventilation, que j'ai remises aux trois partis. Si vous avez des questions à poser ici ou même plus tard, téléphonez-moi à mon bureau. Si vous voulez que je vous transmette un complément d'information par télécopieur ou par la poste, je serais ravi de le faire.

Je vous remercie.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Elliott.

Je tiens à remercier tous les témoins pour leurs déclarations liminaires et nous allons maintenant passer aux questions en commençant par M. Schmidt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci, madame la présidente.

J'aurais plusieurs questions à poser et j'aimerais commencer par quelque chose qui a été dit par les représentants du Canadian Survey Research Council. Je pense que plusieurs d'entre vous ont fait remarquer que vous vouliez peut-être plus de transparence. Je relève à la page 4 de votre mémoire... Mais avant de parler de cela, vous voudrez bien m'excuser si j'ai omis de vous remercier d'être venus. C'est tout à fait réconfortant de voir une aussi large palette de témoins allant du Bureau d'éthique commerciale aux corps policiers en passant par les gens de Visa. J'ai été tout à fait ravi de vous voir tous ici.

Pour en revenir au Canadian Survey Research Council, vous parlez à la page 4 de quatre éléments de divulgation. Je pense que ce que vous avez dit était que vous vouliez plus de transparence et, à la lecture des paragraphes 52.1(2) et 52.1(3) du projet de loi, il me semble que ces quatre éléments dont vous parlez à la page 4 de votre intervention sont effectivement couverts par ces dispositions. Qu'aimeriez-vous y voir de plus?

M. Ivor Thompson: Ce que nous donnons ici dans ces quatre secteurs sont les éléments qui figurent déjà dans le projet de loi américain et ce sont eux que nous voulons voir adopter. Nous parlions du texte de l'article 13, où il est question simplement d'une manière juste et raisonnable, alors que ce que nous voulons en fait vraiment c'est que l'identité de la personne qui téléphone et l'objet de son appel soient mentionnés aussi rapidement que possible dès le début de la conversation et que l'identité de la personne en question soit précisée dans les meilleurs délais.

M. Werner Schmidt: La partie que je ne comprends pas tout à fait est l'alinéa a) du paragraphe 52.1(2) du projet de loi qui est formulé comme suit:

    à la divulgation, d'une manière juste et raisonnable, au début de chaque communication téléphonique, de l'identité de la personne pour le compte de laquelle la communication est effectuée, de la nature du produit ou des intérêts commerciaux dont la promotion est faite et du but de la communication;

Je ne suis pas trop sûr, mais j'essaye de trouver le moyen de vous aider.

M. Ivor Thompson: D'accord. Non, je dois admettre que c'est exactement ce que nous voulons.

M. Werner Schmidt: Vous avez donc gain de cause et le projet de loi correspond à ce que vous vouliez?

M. Ivor Thompson: En effet.

M. Werner Schmidt: Fort bien.

Ma deuxième question portera sur le dédommagement. C'est Mme King je pense du Bureau d'éthique commerciale du Canada qui en a parlé. En quoi voulez-vous que nous modifiions la loi pour y ajouter cette notion de dédommagement?

Mme Leslie King: Je proposerais qu'il y ait peut-être une période de temporisation. À l'heure actuelle, en Ontario, cela n'existe pratiquement pas, si ce n'est que lorsqu'un vendeur itinérant vient vous vendre quelque chose à domicile et si vous ne payez pas, il y a une période de réflexion de 48 heures. Il faudrait quelque chose de semblable, un peu plus long peut-être—à supposer que les choses se passent par la poste ou par messagerie—mettons une période de temporisation d'une semaine qui permette à la personne de renvoyer l'article si elle n'est pas satisfaite. Ainsi, avant que les vendeurs puissent vous offrir un prix et que vous vous retrouviez avec un porte-clés ou un stylo ou tout autre bricole de peu de valeur, et pour laquelle vous avez peut-être payé 600 $, il faudrait j'imagine une période de temporisation qui vous permettrait de renvoyer ces articles et de vous faire rembourser.

M. Werner Schmidt: Je me demande si cette suggestion est réaliste étant donné que certains de ces vendeurs ne passent même plus par les lignes téléphoniques conventionnelles mais utilisent plutôt des téléphones numériques sans fil et qu'avant même que vous ne soyez allé chercher votre prix au bureau de poste, ces gens-là ont sans doute déjà changé de province. Ils n'arrêtent pas de se déplacer un peu partout et je me demande si c'est vraiment une solution pratique. Comment procéderiez-vous?

Mme Leslie King: Je l'ignore parce que si quelqu'un veut vraiment vous arnaquer en utilisant tout ce que la technologie a à offrir, il est certain qu'il va se cacher. Il va travailler depuis un camion et il n'aura même pas de véritable adresse.

M. Werner Schmidt: J'aime beaucoup cette notion de dédommagement, de restitution ou de remboursement et j'aimerais demander leur avis aux policiers qui sont ici. Comment vous y prendriez-vous et pensez-vous que cela puisse marcher?

• 1610

S/D Barry Elliott: Je pense qu'on peut voir les choses sous deux angles. En ce qui concerne la mise de fonds initiale, cela deviendrait illégal...

M. Werner Schmidt: En effet.

S/D Barry Elliott: ...de demander une mise de fonds préalable, et cela en soit mettrait déjà fin à toute une série d'arnaques par lesquelles on vous donne l'impression que vous avez gagné un prix.

Pour ce qui est du dédommagement, je ne sais pas au juste ce qu'ils veulent faire ici, mais ce que je sais, c'est qu'on a déjà envisagé la possibilité de confisquer le produit de ces activités criminelles. Je ne sais pas si la loi le leur permettrait. On pourra par exemple envisager la possibilité d'invoquer les dispositions actuelles du Code criminel concernant le produit des actes criminels, ce qui pourrait ainsi leur permettre de récupérer une partie de leurs pertes.

M. Werner Schmidt: Voilà une notion intéressante.

J'aurais une dernière question à poser si vous me le permettez et il s'agit également de quelque chose que M. Elliott avait dit en ce qui concerne les moyens nécessaires pour faire appliquer la loi, et j'imagine que vous y avez déjà réfléchi. Pour commencer, quel genre de mécanisme faudrait-il mettre en place pour faire appliquer la loi? Quel serait l'effectif nécessaire, quelle serait la technologie nécessaire et comment faudrait-il s'y prendre pour se doter de tous les moyens voulus afin de faire appliquer cette loi?

S/D Barry Elliott: Encore une fois, en ce qui concerne la Loi sur la concurrence, ce sont les enquêteurs d'Industrie Canada qui la font respecter et non pas les policiers ontariens. Le ministère a ses propres enquêteurs qui sont chargés de faire respecter la loi. Ce que je voulais faire valoir, c'est que même après l'adoption de la loi, il faudra continuer sur votre lancée et faire en sorte que le ministère ait les ressources dont il a besoin et le personnel dont il a besoin pour continuer à s'attaquer à ce problème et traduire autant de ces criminels que possible devant les tribunaux.

M. Werner Schmidt: Et vous iriez un peu plus loin encore en faisant en sorte que toute infraction à la loi soit punissable en vertu du Code criminel, en particulier pour ce qui est des dispositions 52.1(2) et 52.1(3), n'est-ce pas?

S/D Barry Elliott: Je pense qu'il est indubitable que la police a un rôle important à jouer.

M. Werner Schmidt: En vertu du Code criminel.

S/D Barry Elliott: C'est bien cela. Et je pense que vous allez voir de plus en plus d'enquêtes comme celles qui sont déjà instituées aujourd'hui et menées à la fois par les corps policiers américains et canadiens pour continuer à combattre ce genre de crime grâce au Code criminel mais également en utilisant ce mécanisme pour intensifier ce que nous faisons déjà sans pour autant remplacer nos interventions. Nous pensons que c'est là un outil extrêmement utile, surtout dans les dossiers où la ligne de démarcation entre une fraude en vertu du Code criminel et une simple tromperie est relativement floue, et là où les preuves ne sont peut-être pas suffisantes selon le Code criminel pour pouvoir poursuivre sans pour autant nous empêcher d'obtenir rapidement une condamnation en vertu de cet instrument-ci. Et avec tous les recours au civil, on pourrait peut-être faire obstacle plus rapidement encore puisque nous savons que pour intervenir en vertu du Code criminel cela nous prend un certain temps.

M. Werner Schmidt: Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Monsieur Thompson, voulez-vous répondre?

M. Ivor Thompson: Je voudrais simplement revenir à la première question de M. Schmidt.

Nous essayons ici surtout d'insister non pas sur les éléments de divulgation mais plutôt sur la terminologie qu'on trouve aussi au début, ces mots «juste et raisonnable», qui peuvent encore une fois donner lieu à interprétation. Nous préconiserions davantage l'utilisation des termes employés aux États-Unis qui font que ces renseignements doivent impérativement être fournis d'entrée de jeu. Notre préoccupation vaut donc davantage pour les termes «juste et raisonnable» que pour la liste proprement dite.

M. Werner Schmidt: Parfait, je vous remercie.

La présidente: Monsieur Lastewka, je vous prie.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Madame la présidente, je voudrais également profiter de l'occasion pour remercier nos témoins d'être venus nous parler de ce projet de loi qui a de plus en plus d'importance pour la société canadienne.

Vous vous êtes tous dit d'accord sur la formulation actuelle du projet de loi. Je ne veux pas vous paraître soupçonneux, mais y a-t-il des choses que nous ayons oubliées en cours de route, des choses que vous voulez voir ajoutées au projet de loi pour l'améliorer? Je voudrais également que vous compariez ce que vous savez de la situation aux États-Unis à ce que nous essayons nous de faire au Canada. Y a-t-il des choses différentes? Vous pourriez peut-être commencer par cela.

• 1615

La présidente: Monsieur Vickery.

M. Don Vickery: Pour répondre à votre question concernant la divulgation, nous disons effectivement dans notre mémoire que les vendeurs par téléphone doivent être tenus de divulguer certaines choses aux consommateurs pendant la communication téléphonique. C'est ce que dit le projet de loi. Nous ajoutons à cela qu'il faut que le projet de loi définisse clairement de quel genre de divulgation il s'agit. En d'autres termes, le projet de loi doit être explicite.

Prenons à titre d'exemple ce qui se passe actuellement dans le secteur: lorsque le téléphone sonne dans votre bureau de circonscription et qu'il s'agit d'un sondage, la première question que pose votre interlocuteur est: «Quels sont les types de télécopieurs, de photocopieuses et d'imprimantes que vous avez?» Si vous n'avez pas donné ordre à vos filles de ne pas divulguer ce genre de renseignements, vous recevez sitôt après un autre coup de téléphone et votre interlocuteur vous dit cette fois-ci: «Nous avons tel ou tel produit et c'est désormais nous votre distributeur.» Ils vous donnent une longue liste et vous finissez par recevoir du matériel qui vous a déjà été vendu par votre vendeur précédent et que vous êtes déjà en train de payer.

Nous estimons donc que la divulgation doit être extrêmement précise de sorte que lorsque l'on traduit ces escrocs devant un tribunal, on disposera déjà de l'une ou l'autre preuve ou l'une ou l'autre information qui permettra précisément au tribunal de se prononcer.

La présidente: Monsieur Gustavson.

M. John Gustavson: Merci, madame la présidente.

J'ignore si les membres du comité sont au courant, mais un grand nombre des organismes représentés ici ont participé au processus consultatif qui a présidé à la mise au point de ces règlements. Il y a d'ailleurs eu un forum sur le télémarketing frauduleux, forum auquel ont participé un grand nombre d'organismes afin d'élaborer une réglementation qui permettrait de se débarrasser de ces gens qui étouffent les industries licites tout en n'imposant pas des limitations trop abusives de manière à permettre la croissance d'un secteur créateur d'emplois au Canada. L'homogénéité des opinions que vous entendez ici est donc peut-être attribuable au fait que nous avons eu l'occasion de participer nous-mêmes à l'élaboration de certaines de ces propositions.

Je voudrais maintenant prendre quelques instants pour insister sur le fait que ce n'est pas tant ce qui manque dans le projet de loi qui importe mais plutôt ce qui doit l'accompagner, c'est-à-dire davantage de ressources pour l'édification du consommateur. Vous auriez beau légiférer autant que vous le voulez, il y aura toujours des gens qui trouveront le moyen de rejoindre les consommateurs et de les inciter à dépenser leur argent alors qu'il s'agit d'une escroquerie. Je ne saurais vous dire combien de fois les gens nous téléphonent pour nous dire: «Je viens d'envoyer de l'argent à une case postale à Las Vegas et je voudrais que vous m'aidiez à le récupérer», sans avoir aucune idée du tout de l'adresse de la compagnie.

Qu'il s'agisse d'Internet, de télémarketing ou de sollicitation postale, il faut donner au consommateur le moyen de se protéger lui-même. J'espère qu'Industrie Canada et le Bureau de la protection du consommateur songent à une campagne d'édification des consommateurs qui soit plus dynamique.

La présidente: Monsieur Thompson, avez-vous quelque à ajouter?

M. Ivor Thompson: Non, c'est effectivement un excellent argument.

La présidente: Monsieur Finn.

M. Al Finn: Suite à ce que j'ai dit à propos des compagnies de téléphone et du CRTC, il serait sans doute utile de voir ce qui se passe aux États-Unis. Que je sache, les compagnies de téléphone travaillent en étroite collaboration avec les corps policiers pour lutter contre ces arnaqueurs. Je crois également savoir que les compagnies de téléphone communiquent automatiquement avec la police dès qu'elles soupçonnent quelque chose de louche, par exemple comme je le disais il y a quelques instants, une demande d'installation de 25 lignes téléphoniques dans un local de 15 mètres carrés.

Cela vaudrait peut-être la peine d'étudier davantage cette question, car ce serait un moyen peu coûteux de réduire le nombre des escroqueries.

La présidente: Monsieur Elliott.

S/D Barry Elliott: Je suis entièrement d'accord avec John Gustavson. En fait, le comité qui avait été créé au départ pour aider à rédiger cette nouvelle mesure législative continue d'exister et constitue maintenant un forum national d'éducation. Je ne voudrais pas donner l'impression que seule l'exécution des lois importe pour moi. Il ne fait aucun doute que je suis un chaud partisan de l'éducation, car cela a été l'une de nos plus grandes réussites.

Pour répondre à votre première question, ce qui nous manque et que j'aimerais importer des États-Unis, ce sont les lignes directrices américaines sur la détermination de la peine. Toutefois, cela ne fait pas partie de ce projet de loi.

La présidente: Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Je tiens simplement à signaler que j'ai participé avec M. Elliott à une émission du canal communautaire, il y a quelques mois. Sa contribution a été très précieuse.

Quelqu'un a déjà dit qu'il faut informer davantage les consommateurs. Le nombre de demandes que j'ai reçues après avoir réalisé un projet dans la région de Niagara m'a convaincu de façon absolue qu'il faut mieux informer les consommateurs de ce qu'ils doivent ou ne doivent pas faire. Pour moi, ce message est très clair.

• 1620

Vous avez dit que le groupe Stentor, le CRTC et la Société canadienne des postes font davantage. Pourriez-vous nous en donner quelques exemples, afin que cela se trouve dans le compte rendu.

S/D Barry Elliott: Je ne saurais trop chanter les éloges de tous nos partenaires, surtout de l'Association des banquiers canadiens, de Visa et de MasterCard. Ils ont été des chefs de file du secteur privé dans la lutte contre les fraudes de télémarketing en fermant des comptes, en faisant des vérifications de comptes Visa, etc. En plus de la fraude de télémarketing, ces entreprises font souvent également du blanchiment d'argent.

À l'heure actuelle, un télémarketeur malhonnête a bien de la difficulté à ouvrir un compte en banque légitime à Montréal, où l'on trouve environ 95 p. 100 des victimes de ces fraudes au Canada. En fait, ces télémarketeurs doivent acheter leurs propres entreprises bancaires aux États-Unis, en Grande-Bretagne ou ailleurs pour toucher leurs mandats ou blanchir l'argent. Ils ont des méthodes très raffinées.

Les banques ont fait un travail extraordinaire pour ce qui est de faire légalement obstacle au fonctionnement de ces entreprises. Nous interceptons des mandats dans les caisses de crédit et les succursales bancaires de tout le pays. Les banques nous aident énormément.

Nous n'obtenons pas toutefois la même collaboration de la Société canadienne des postes ou de Stentor. Nous avons longuement discuté avec le CRTC et Stentor pour qu'il soit possible d'éliminer le numéro de téléphone associé aux fraudes de télémarketing sur la foi d'une plainte de consommateur, tout comme les banques ferment des comptes sur la foi des plaintes des consommateurs et les données que peut fournir PhoneBusters. De cette façon, les télémarketeurs ne pourraient plus utiliser ces numéros de téléphone.

En fait, un représentant de Bell Canada Ontario m'a téléphoné l'autre jour. Bell Canada perd de l'argent régulièrement car bon nombre de ces comptes ne sont pas payants. Il serait donc dans son intérêt de les abolir.

Dans le cas de la Société canadienne des postes, la façon la plus efficace et la plus rapide d'envoyer de l'argent à Montréal pour le lendemain, au Canada, c'est par courrier privé. Auparavant, il suffisait de donner son numéro de carte de crédit au téléphone. Il n'y a rien de plus rapide que cela. C'est de l'argent instantané.

Nous avons éliminé cette possibilité. Vers 1992 ou 1993, les banques perdaient environ 5 millions de dollars par année dans des fraudes réalisées au moyen de cartes de crédit de comptes commerciaux. Grâce à notre partenariat avec Visa et MasterCard, ces pertes sont maintenant inférieures à 250 000 $. Bien sûr, les Canadiens ne perdent plus cet argent parce qu'ils ne donnent plus leur numéro de carte de crédit au téléphone.

La Canadian Courier Association s'est jointe à PhoneBusters. Supposons que vous envoyiez un colis par FedEx, UPS, ou tout autre service de messagerie privé. Supposons que vous envoyiez 10 000 $ et que quelqu'un vous signale que vous commettez peut-être une erreur. Il vous suffit de communiquer avec FeDex avant que l'envoi soit livré pour que l'envoi vous soit retourné. FedEx retournera l'envoi à l'expéditeur puisque c'est lui qui paie les frais. Vous devrez peut-être payer des frais de retour, mais vous récupérerez vos 10 000 $.

Dans le cas de la poste prioritaire, vous ne pourrez pas récupérer votre envoi, car ces envois sont considérés comme du courrier et doivent être livrés. Même s'il s'agit de vos derniers 10 000 $, il ne sera pas possible d'obtenir un mandat.

Je ne sais pas très bien quand la Loi sur la Société canadienne des postes a été réexaminée la dernière fois. Cela fait bien longtemps. La Société dit que dans certains domaines, elle ne peut être proactive, mais il existe de nombreuses zones grises pour lesquelles la Société ne semble vouloir prendre aucune mesure. Je ne vois pas pourquoi la Société ne pourrait pas être plus proactive et, en se fondant sur des motifs raisonnables et probables, retourner sur demande les envois.

Les fraudeurs savent que l'argent ne sera pas retourné. Il en va de même des boîtes à lettres des bureaux de poste de la Société. Ces bureaux de poste ne collaborent pas autant avec nous que les bureaux de poste privés pour lutter contre les fraudeurs.

Ils pourraient faire pourtant tant de choses pour nous aider à lutter contre les fraudes de télémarketing au Canada. Lorsqu'on y réfléchit, ils représentent les Canadiens de tout le pays, surtout les personnes âgées.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci beaucoup pour ces exposés fort intéressants. J'aimerais commencer par des questions sur les statistiques de PhoneBusters.

• 1625

Je crois comprendre que ce sont des statistiques relatives aux plaintes que vous avez reçues. Est-ce bien cela?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Oui.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Comment interprétez-vous les statistiques? Est-ce parce qu'il y a davantage de fraudes en Ontario ou que l'on connaît davantage PhoneBusters en comparaison avec le Québec, où il n'y aurait eu que 26 plaintes en 1995 et seulement 10 en 1997? Je suis portée à me dire qu'on n'a pas besoin de loi lorsque l'on constate les statistiques.

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Au Canada, il y a trois grands groupes de fraudeurs. L'un à Montréal, l'autre à Toronto et le troisième à Vancouver. Ceux de Vancouver et de Toronto trouvent surtout leurs victimes aux États-Unis. Le groupe de Montréal est un groupe de crime organisé anglophone qui place des appels partout au pays, sauf au Québec. Il se sert ou s'est servi des questions de compétence pour contrecarrer les enquêtes de la police.

Les groupes américains procèdent de la même façon. S'ils sont situés dans l'État du Nevada, ils placent des appels partout au pays, sauf dans cet État. Lorsque la police s'apprête à agir, il leur suffit de déménager dans un autre État. Au Canada, le groupe est resté au Québec. C'est pourquoi les chiffres sont aussi faibles. Il y a des victimes du télémarketing au Québec aussi, mais cela n'a rien à voir avec ce groupe de criminels organisés. Les Québécois ne sont pas la cible de ce groupe. Dans le reste du pays, les victimes se trouvent en Ontario, en Colombie-Britannique et en Alberta puisque ce sont les endroits les plus peuplés.

Ai-je bien répondu à votre question?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Oui. Cela veut donc dire qu'à cause de la barrière de la langue, pour une fois, les gens sont un peu moins attaqués au Québec.

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Il existe peut-être des entreprises de télémarketing de langue française au Québec, mais je ne les connais pas.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Est-ce que ceux qui sont de langue anglaise et qui sont soumis à ces pressions viennent d'autres provinces ou des États-Unis? Est-ce que ce sont des citoyens québécois de langue anglaise?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: C'est exact. Au Québec, ce sont les anglophones qui commettent les fraudes. Ils appellent partout au pays, y compris aux États-Unis, à partir de Montréal. Plus de 95 p. 100 de toutes les victimes canadiennes se font avoir par des entreprises montréalaises, par des groupes de criminels anglophones.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Vous parlez des Montréalais anglophones. Alors, le mal est à Montréal.

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Oui.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Merci. C'est important de comprendre et vous êtes des spécialistes.

À quoi attribuez-vous la diminution des plaintes de 1995 à 1997?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: L'éducation. Nous n'avons pas réussi à leur faire peur. Nous avons remporté un certain nombre de poursuites judiciaires, mais les peines imposées sont si légères que les criminels ne sont pas dissuadés de continuer. Et il n'existe à peu près pas de dédommagement. Si le nombre des victimes canadiennes diminue, c'est tout simplement parce que nous informons petit à petit le public canadien. Mais c'est encore un grand problème.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Êtes-vous d'accord sur la définition donnée au télémarketing dans le projet de loi ou si vous formulez des remarques à l'instar de certains autres intervenants?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Vous parlez bien de l'article 52.1 proposé?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Oui.

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Oui, c'est également visé.

• 1630

Ce qu'il faut savoir, de cette mesure législative, c'est qu'elle est peut-être bien bonne aujourd'hui, mais qu'il faudra peut-être y apporter certaines modifications à l'avenir puisque ces criminels évoluent, ils s'adaptent constamment. Lorsque cette mesure législative sera appliquée... En fait, je ne serais pas étonné qu'ils aient déjà des exemplaires de ce projet de loi et que leurs avocats soient déjà en train de voir comment ils pourraient le contourner.

Dans la plupart des cas, quelle que soit la façon dont ils sont décrits, les boniments de télémarketing donnent toujours l'illusion que vous avez gagné un prix et que vous devez envoyer de l'argent. C'est vrai la plupart des cas. Il y a toutefois un type de télémarketing qui n'est pas visé dans la mesure législative, celui des numéros 900, et cela m'inquiète beaucoup. Les gens reçoivent des cartes avec une case à gratter et composent un numéro 900, pensant avoir gagné un prix. Je ne sais pas si la mesure législative vise cette activité. Mais cela nous inquiète.

M. John Gustavson: Madame la présidente, j'ai remarqué que dans les lignes directrices proposées qui seront adoptées en application de la loi, il sera interdit d'utiliser des numéros 1-900 pour exiger des paiements pour la livraison d'un prix. Même si cela ne se trouve pas dans le projet de loi, le bureau a l'intention de considérer cette activité comme un paiement préalable à la livraison d'un prix.

[Français]

Mme Francine Lalonde: J'ai une autre question. Il y a une ligne fine entre le télémarketing frauduleux et une pression indue pour vendre des produits. On peut donner toutes les informations possibles, mais si on a au bout de la ligne une personne qui est vulnérable, qui commence à être atteinte de la maladie d'Alhzeimer, même en divulguant tout, on peut abuser d'elle.

Est-ce qu'à ce moment-là la solution ne serait pas de retenir ce qui existe dans la Loi sur la protection du consommateur du Québec, c'est-à-dire la possibilité pour le consommateur, pendant une certaine période de temps, de changer d'idée?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Je suis d'accord avec cela. Ce serait bien si tout le monde était d'accord avec cela, mais ce n'est probablement pas le cas.

Chez PhoneBusters, nous n'avons aucune difficulté à établir quelles entreprises sont honnêtes et lesquelles ne le sont pas. Nous ne recevons pas de plaintes au sujet de Sears ou d'autres entreprises honnêtes qui font du télémarketing. On peut ne pas être d'accord avec leur style, leur méthode ou leur éthique, mais ce sont des problèmes que la Direct Marketing Association of Canada peut régler très facilement. Mais pour les gens de mon bureau, il est facile de déterminer si les plaintes portent sur du télémarketing frauduleux. Ce ne sont pas les sociétés honnêtes qui nous inquiètent.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Mais vous êtes d'accord pour dire qu'il y a quand même une ligne fine entre une pression indue et de la fraude.

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Lorsque les télémarketeurs frauduleux m'appellent pour discuter avec moi et déterminer si leur mensonge est petit ou gros, je leur réponds toujours qu'un mensonge est un mensonge. S'ils ne mentent pas, tant mieux. Les pressions exercées honnêtement ne m'inquiètent pas.

La présidente: Monsieur Finn.

M. Al Finn: Madame Lalonde, plus il y a de renseignements disponibles au départ, plus le consommateur est en mesure de prendre une décision éclairée, malgré les pressions. Le problème, à l'heure actuelle, c'est qu'ils font l'objet de toutes les pressions mais qu'on ne leur fournit pas de renseignements. Si les pressions étaient assorties de certains renseignements, il y aurait encore des escrocs, mais les consommateurs seraient mieux en mesure d'en juger.

La présidente: Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Mes questions vont aussi dans le même sens. Nous parlons des dispositions de la loi, mais nous reconnaissons déjà que ces gens sont des escrocs. Ils sont donc prêts à violer ces dispositions également, celles de l'identification et toutes les autres. Dans un contexte juridique, qu'apportera cette loi? Devrions-nous lancer une campagne massive d'information?

• 1635

S/D Barry Elliott: Premièrement, la loi pourra agir plus rapidement. On y dit expressément qu'il est interdit de ne pas faire certaines choses. On y énonce donc des violations précises. La loi est moins générale que par le passé. À l'heure actuelle, il faut faire de longues enquêtes pour prouver la fausse représentation et c'est pareil pour nous. Nous pensons donc qu'il faudra moins de temps... tant en droit civil qu'en droit pénal.

Il faudra néanmoins déterminer ce qui constitue une fraude criminelle et ce qui relève de l'application de ce projet de loi. Il y aura encore un peu de chevauchement, mais nous pourrons travailler en harmonie les uns avec les autres contre ces activités.

M. Alex Shepherd: D'après certaines statistiques, il semble que l'on retrace moins souvent les incidents... la mesure législative permettra l'écoute électronique, et on dit aussi que ces gens se déplacent partout au pays. Cette mesure est-elle pertinente?

S/D Barry Elliott: Si vous voulez que les enquêteurs utilisent cette mesure législative, il faut leur donner les outils dont ils ont besoin pour prouver l'existence du délit. Pour ma part, je ne vois rien de mauvais à permettre l'écoute électronique. La décision d'appliquer cette mesure ou non dépendra entièrement des preuves dont les enquêteurs disposeront, des motifs raisonnables et probables qu'ils fourniront un juge de la Cour suprême pour en obtenir la permission. Compte tenu de toutes les fraudes et, comme vous le dites, même si ces gens-là se déplacent constamment, une semaine d'écoute électronique pourrait fournir bien des preuves qui pourraient être produites devant les tribunaux.

M. Alex Shepherd: Pourriez-vous me décrire brièvement comment cela fonctionne. Supposons que quelqu'un communique avec moi et que j'aie des doutes. Je vous donne un coup de fil. Je sais que cette personne me téléphonera de nouveau le lendemain à 16 heures. Vous branchez mon téléphone sur écoute électronique. Est-ce que cela fonctionne de cette façon?

S/D Barry Elliott: Ce qu'on essaiera sans doute, c'est de brancher le téléphone du télémarketeur sur écoute électronique pour intercepter tous ses appels, pas seulement le vôtre. À l'heure actuelle, les Canadiens peuvent enregistrer volontairement leurs conversations téléphoniques sur bandes magnétiques sans avoir recours à l'écoute électronique. Ces bandes magnétiques peuvent être utilisées devant les tribunaux. Je ne peux pas leur proposer d'enregistrer leurs conversations, mais ils ne violeraient certes aucune loi en le faisant. Ces bandes pourraient être utilisées devant les tribunaux.

Ce qu'on essaierait de faire, c'est d'enregistrer les conversations téléphoniques d'un local ou d'un télémarketeur. Une fois qu'on sait à partir d'où ces appels sont placés, pendant une semaine ou deux, on peut intercepter les conversations faites à partir d'un téléphone cellulaire ou d'un téléphone ordinaire, quoi qu'il utilise, et enregistrer 10 ou 15 boniments dans lesquels il ment. Sa voix est reconnaissable. C'est une excellente preuve et cela met fin à l'enquête.

M. Alex Shepherd: Dans cette mesure législative, on essaie de permettre l'écoute électronique également dans d'autres domaines. Cette mesure ne vous inquiète peut-être pas, mais nous avons discuté de complot. Le projet de loi porte également sur le trucage des offres. Est-il acceptable d'accepter également les preuves obtenues par écoute électronique dans certains de ces cas? Vous n'avez peut-être pas d'opinion à ce sujet, je n'en sais rien.

S/D Barry Elliott: En effet, je n'en ai pas. Je m'occupe particulièrement du télémarketing.

M. Alex Shepherd: La mesure serait appliquée davantage dans le domaine du télémarketing.

S/D Barry Elliott: D'une façon générale, tant que les pouvoirs utilisés ne sont pas supérieurs à ce qu'ils devraient être pour réaliser la tâche tout en demeurant suffisants, ce n'est pas considéré comme déraisonnable. Si vous demandez à quelqu'un d'appliquer une loi sans lui donner les pouvoirs nécessaires, c'est bien difficile.

Les services policiers coûtent très cher, quels que soient leurs coûts aujourd'hui. S'il est possible d'obtenir des preuves rapidement et efficacement, cela représente d'énormes économies d'argent et de temps.

M. Alex Shepherd: En moyenne, quelles sont les peines imposées? Combien de mois? Combien d'années?

S/D Barry Elliott: Je vais vous parler de la dernière condamnation, pour vous en donner une idée. Un prévenu a plaidé coupable au début de 1997. Sa fraude représentait environ un million de dollars canadiens et touchait à peu près 400 victimes partout au Canada. Le prévenu avait déjà un dossier criminel fort lourd, pour toutes sortes d'infractions. Sous le régime des nouvelles lignes directrices sur l'établissement de la peine, il a été condamné à un an d'emprisonnement, à ce que nous appelons la prison virtuelle, puisque le condamné purge sa peine chez lui. Il a été condamné à payer des dédommagements de 250 $ par mois pendant trois ans, ce qui représente un total d'environ 7 000 $. Cela ne payait même pas les frais de poste dans mon mémoire. Et devinez ce qu'il faisait dès le lendemain!

• 1640

La présidente: Monsieur Finn.

M. Al Finn: Pour revenirà votre première question sur l'efficacité du projet de loi, monsieur Shepherd, il existe une grande différence quant à l'un des amendements, celui qui reconnaît la responsabilité des administrateurs et des propriétaires de l'entreprise. Jusqu'à présent, les propriétaires et les dirigeants d'entreprises se défendaient au moyen de scripts ou de déclarations de leurs employés.

Lorsque les services policiers arrivaient, ils disaient qu'il y avait erreur et que le problème, c'était l'employé B, C ou D qui avait depuis quitté l'entreprise. Grâce au nouvel amendement, le propriétaire et l'administrateur, quoi qu'ils disent, sont considérés comme responsables, et c'est une énorme amélioration comparativement à ce qui existe maintenant.

La présidente: Monsieur Vickery.

M. Don Vickery: Monsieur Shepherd, vous avez parlé d'écoute électronique dans le contexte du trucage d'offres et de fixation des prix. Ce ne serait pas efficace dans mon secteur, mais j'imagine que si quatre ou cinq entreprises décidaient de se réunir pour truquer des offres ou autre chose de ce genre, rien de tout cela ne serait communiqué par téléphone. Cela se ferait dans une chambre d'hôtel, quelque part, et à moins que les enquêteurs de Barry nous suivent, ils auraient bien de la difficulté à intercepter nos conversations.

À moins que ces compagnies ne soient tout à fait stupides, elles ne vont pas communiquer ce genre de renseignement au téléphone. Comme cela se fait dans la mafia américaine, elles vont se servir d'une ligne fermée impénétrable. La plupart d'entre nous au Canada n'en ont pas. Je ne pense pas que l'écoute clandestine puisse servir dans le domaine de la fixation des prix ou de la collusion. C'est important dans le cas de la publicité trompeuse et du télémarketing, mais pas pour le trucage des offres ou les fusions parce que les intéressés sont trop futés pour en parler au téléphone.

La présidente: Merci, monsieur Shepherd.

Monsieur Schmidt, aviez-vous d'autres questions?

M. Werner Schmidt: Ma question porte sur les forces policières. Cela a trait à l'interception des communications ou à l'écoute électronique. La technologie, dit-on, avance à un rythme fou. Quand vous parliez de moyens, monsieur Elliott, parliez-vous de moyens d'interception qui permettraient aux forces policières d'intercepter des formes de plus en plus perfectionnées de communication?

S/D Barry Elliott: Non. Je sais personnellement combien il est important pour un juge d'entendre le boniment du télémarketeur. Il entend le suspect devant lui mentir au téléphone. C'est enregistré et il n'y a aucun doute sur ce qui est dit: c'est sa voix à lui et c'est ce qu'il dit. La preuve ne vient pas d'une écoute électronique; elle est tirée de bandes que les victimes se sont trouvées à enregistrer au téléphone.

Quand je parlais d'écoute électronique, pour recueillir ce genre de preuves, je voulais dire que si on peut faire un court enregistrement... Il n'est pas nécessaire d'avoir un long enregistrement dans le cas d'un centre de télémarketing, parce que cela oblige à faire beaucoup de transcriptions. On peut faire quelque chose de court. Cela va satisfaire le ministère public. On a la preuve et il sera possible de convaincre le juge. On peut même obtenir un plaidoyer de culpabilité parce que la défense aura eu connaissance de la preuve. Cela a donc des chances de faire gagner beaucoup de temps et de faire de grosses économies et c'est une preuve incontournable. En revanche, une opération d'écoute peut coûter très cher, surtout si elle dure longtemps et si elle est compliquée.

M. Werner Schmidt: Je me suis peut-être mal exprimé. Existe-t-il aujourd'hui une technologie qui permet aux forces policières d'intercepter une communication hyperperfectionnée?

S/D Barry Elliott: Je ne pourrais pas vous répondre. Je sais que nous sommes pas mal perfectionnés, mais il faudrait poser la question à un spécialiste technique.

M. Werner Schmidt: Cela me semble être à la fine pointe du progrès, dans bien des domaines. Ils évoluent très très vite.

S/D Barry Elliott: Je suis au courant de la triangulation pour les clones de téléphone cellulaire; ils peuvent tous le faire aujourd'hui.

M. Werner Schmidt: Oui, mais c'est quelque chose d'élémentaire aujourd'hui.

S/D Barry Elliott: Pour ce qui est de ce que nous réserve l'avenir et la façon dont les truands évoluent pour répondre à leurs besoins, je ne saurais dire.

M. Werner Schmidt: D'accord. Mon autre question porte sur Postes Canada. Comment Postes Canada pourrait-elle faire comme il faut le travail que vous faites.

S/D Barry Elliott: Non, je suis contre cette idée.

M. Werner Schmidt: Bon, très bien. Je m'attendais à cette réponse.

• 1645

S/D Barry Elliott: Pour moi, Postes Canada a un rôle social à jouer. C'est une société au service de tous les citoyens et elle jouit d'une très grande confiance. Elle a l'obligation morale de s'assurer qu'elle ne fait pas sciemment du blanchissage d'argent. Fermer les yeux sur le problème et ne pas intervenir lorsqu'elle sait qu'elle sert de principal mécanisme de blanchiment d'argent pour les escrocs du télémarketing, et refuser de prendre les devants... On m'a dit que cela prendrait sept ans pour penser à modifier la loi, sept ans pour la changer et sept ans encore pour l'adopter. Pourquoi faudrait-il s'y mettre maintenant?

M. Werner Schmidt: C'est une accusation terrible, mais je veux revenir à autre chose. Le mot clé dans ce que vous avez dit, c'est «sciemment».

S/D Barry Elliott: Oui.

M. Werner Schmidt: Vous avez dit des choses très intéressantes à propos des banques et de ce qu'elles font. Est-ce aussi facile pour la poste de détecter les abus? Est-ce que ça se voit?

S/D Barry Elliott: Oui, et elle pourrait faire beaucoup. Je ne dis pas que cela n'arrivera jamais, mais la poste pourrait faire bien plus aujourd'hui, à commencer par rendre l'argent, ce qu'elle ne fait pas, et en colmatant toutes les brèches pour s'assurer que son réseau ne devienne pas la coqueluche des escrocs du télémarketing.

La présidente: Madame King.

Mme Leslie King: Il y a environ cinq ans, à Ottawa, une fausse facture a été envoyée. Elle portait le logo du gouvernement du Canada et l'en-tête s'appelait «Le Répertoire canadien». L'adresse de l'expéditeur était le 240 rue Sparks—il y a des boîtes postales au sous-sol. La facture a été envoyée à toutes les grandes compagnies canadiennes et réclamait 100,25 $ et portait un faux numéro de TPS, un faux numéro de TVP ou TVQ.

On a découvert la manoeuvre. On a informé la Société canadienne des postes. Elle a refusé de suspendre la livraison du courrier. Il y a une lucarne sur la boîte postale. Je suis allée voir parce que c'est directement devant mon bureau. C'était bourré d'enveloppes, de toutes sortes de couleur, avec des chèques dedans. La poste a refusé d'y toucher. Elle a dit qu'elle allait informer la police et que la police assurerait la surveillance de la boîte. C'est tout ce qu'elle a fait. Nous avons fini par alerter les médias et à prévenir les gens de ne pas envoyer de chèque, que cette facture était fausse et qu'elle n'avait rien à voir avec le gouvernement.

Cela a dû leur donner la frousse. Il se trouve qu'ils ne s'étaient pas identifiés correctement. Lorsqu'on ouvre une boîte postale, on est censé montrer son permis de conduire mais eux ne l'avaient pas fait. Ils ne sont jamais venus ramasser le courrier, heureusement.

Il y en avait tellement qu'il ne tenait plus dans la boîte. La Société a renvoyé à l'expéditeur ce qui ne tenait plus dans la boîte. C'est tout ce qu'elle a fait. Voilà donc pour la Société canadienne des postes.

La présidente: Merci, madame King. Merci, monsieur Schmidt.

[Français]

Madame Lalonde, avez-vous une autre question?

Mme Francine Lalonde: Non.

La présidente: Monsieur Dubé, vous avez la parole.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Ma question s'adresse à M. Elliott. Vous faites partie du regroupement, mais vous appartenez également à la Police provinciale de l'Ontario. En termes de ressources humaines, combien de personnes s'occupent de façon spécifique de ce problème du télémarketing?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: À la suite du rapport binational terminé en novembre 1997... Si vous vous souvenez, le premier ministre Chrétien et le président Clinton se sont rencontrés peu avant les élections l'an dernier, en mai ou avril. Parce quÂà partir surtout de 1995 les Américains étaient la cible d'escrocs à Montréal, Toronto et Vancouver, la question de la fraude transfrontière a été soulevée lors de cette rencontre. Auparavant, il se faisait peu de choses. Nous essayions d'attirer l'attention sur cette escroquerie, mais nous n'arrivions pas à obtenir l'attention ou les moyens nécessaires.

À cause de cela et des réunions qui se poursuivent—j'ai participé à l'une d'elles ce matin et il y en aura d'autres la semaine prochaine à Washington—nous avons une esquisse de mécanisme qui regroupe tout le monde, Industrie Canada, la police, dans la lutte contre ce problème.

• 1650

Un groupe de travail appelé Projet Colt, lancé il y a environ trois semaines à Montréal, regroupe la GRC, la Communauté urbaine de Montréal et la Sûreté du Québec. Il y aura un groupe de travail sous peu, espérons-nous, à Toronto, en plus du groupe PhoneBusters, qui est le dépôt central de toutes les plaintes. Un groupe de travail entre en activité à Vancouver, dirigé par la GRC. Nous collaborons tous avec les forces policières canadiennes et américaines.

Pendant le week-end, j'ai participé à une arrestation—je ne sais pas si vous avez vu cela dans le journal. Il s'agit d'un type d'Ottawa qui traversait la frontière à Alexandria Bay, un individu que nous connaissons bien. Il s'en prenait à la fois aux Américains et aux Canadiens. Nous avons réussi à l'épingler à la frontière et il est aujourd'hui à Newark, dans le New Jersey, et fait face à environ 10 ans de prison.

[Français]

M. Antoine Dubé: Vous avez parlé de certaines formes de crime organisé. Bien sûr, le crime organisé suppose une structure. Je pense ici à la mafia ou à des groupes de cette nature. Est-ce que les gens qui ont été arrêtés et condamnés, ou même ceux que vous surveillez ont des liens avec de grosses organisations ou s'ils appartiennent plutôt à de petites organisations?

[Traduction]

S/D Barry Elliott: Il y a de tout. Il y a des liens avec les motards, la mafia traditionnelle. Les services secrets nous envoient des rapports de Buffalo à Las Vegas. Il y a des liens entre le Canada et les États-Unis. Toronto, par exemple, est relié au crime organisé jamaïquain dans le secteur des escroqueries de prêts.

Il y a tellement d'argent à gagner, pourquoi vendre de la drogue? On peut gagner beaucoup plus d'argent dans le télémarketing et on ne risque pas la prison. L'escroquerie des cols blancs a beaucoup de valeur auprès du crime organisé parce qu'il y a beaucoup d'argent à gagner et aucun risque.

C'est donc relié à tout. Il y a même eu une exécution de type mafieux. Un des accusés d'escroquerie par télémarketing, à Montréal, a décidé de parler et de témoigner à propos d'une exécution à Montréal. Il y a toutes sortes de drogues dans le secteur du télémarketing et ils sont associés pour blanchir l'argent.

C'est relié à beaucoup de choses. On vient à peine de reconnaître que l'escroquerie par télémarketing est une forme de crime organisé. C'est grave. J'espère qu'on le reconnaîtra dans les procès qui s'en viennent.

La présidente: Monsieur Vickery.

M. Don Vickery: Barry conviendra avec moi que ce que l'on espérait trouver dans le projet de loi, en plus des amendes et des peines pour les compagnies de télémarketing, est de s'assurer que les propriétaires exploitant des compagnies eux aussi sont touchés. La façon la plus facile de leur donner la frousse c'est de leur faire savoir que s'ils sont condamnés, ils vont aller en prison; je ne parle pas d'assignation à résidence ou de maison de repos à la Allan Eagleson, mais de vraies prisons. Qu'ils aillent sécher en prison en application du Code criminel. Dans bien des cas, ça leur calmerait l'envie.

Je ne sais pas si Barry est d'accord avec moi, mais c'est ce que je pense. J'ai eu affaire à pas mal de télémarketeurs.

La présidente: Merci, monsieur Dubé.

Monsieur Bellemare, vous êtes le dernier sur la liste.

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Merci.

Monsieur Elliott, y a-t-il un regroupement quelconque qui assure la liaison entre les différentes forces policières: le Québec, l'Ontario, la GRC, les U.S. troopers, le FBI?

S/D Barry Elliott: Oui. Je reviens encore au comité binational créé l'an dernier pour ce rapport; nous venons de tenir une réunion, organisée par Industrie Canada, le solliciteur général et la GRC. Nous faisions partie de ce comité, comme d'autres. Nous sommes en train de donner suite aux idées dont on parle dans le rapport, comme une structure quelconque, une ossature.

Il faut savoir qu'il s'agit d'un problème national aux ramifications internationales. Un seul corps policier ou un seul ministère, comme Industrie Canada, ne peut pas s'en occuper tout seul.

Nous pensons maintenant avoir quelque chose en place, même si tout n'est pas prêt. Nous n'avons pas encore tout ce que nous voulons, mais nous nous en approchons.

M. Eugène Bellemare: Vous avez dit plus tôt que vous avez besoin d'outils pour travailler et épingler ces malfaiteurs.

S/D Barry Elliott: Oui—et aussi de peines de prison.

• 1655

M. Eugène Bellemare: Y a-t-il des outils qu'à votre avis nous devrions ajouter à ce que prévoit la loi?

S/D Barry Elliott: Ce dont le pays a besoin, pour être honnête, je pense, ce sont des lignes directrices sur les peines à imposer. Il nous en faut absolument.

M. Eugène Bellemare: C'est une autre question.

Pour terminer, vous vous en êtes pris à la Société canadienne des postes, dans certains domaines en tout cas.

S/D Barry Elliott: Oui.

M. Eugène Bellemare: Vous avez dû rencontrer quelqu'un à la Société canadienne des postes pour en discuter.

S/D Barry Elliott: Oui. La Société canadienne des postes fait partie de notre groupe de sensibilisation. Mais il semble y avoir un certain blocage quelque part au sommet...

M. Eugène Bellemare: Où au sommet?

S/D Barry Elliott: Je ne sais pas.

M. Eugène Bellemare: J'aimerais bien savoir qui, au nom de la Société canadienne des postes, a dit qu'il faudra sept ans pour y réfléchir, sept ans pour adopter la loi et sept ans encore pour l'appliquer.

S/D Barry Elliott: Quelqu'un de la sécurité.

M. Eugène Bellemare: Oui. Cette personne n'avait peut-être pas l'autorité voulue de dire cela. C'était en quelque sorte une observation désinvolte.

Madame la présidente, je pense qu'il est extrêmement important que nous décidions aujourd'hui qu'une personne de Postes Canada ayant l'autorité compétente comparaisse devant notre comité pour que nous puissions aborder certaines de ces questions.

La présidente: Nous pouvons peut-être faire cela. Je ne suis pas certaine si nous aurons le temps de le faire avant de terminer l'étude du projet de loi, mais nous verrons.

M. Gustavson allait également répondre à la question que vous avez posée précédemment.

M. John Gustavson: En fait, au sujet de cette question concernant Postes Canada, madame la présidente, ce n'est certainement pas mon travail de défendre Postes Canada, mais en toute équité je pense qu'il faut faire quelques observations.

Comme les membres du comité le savent peut-être, au Canada, nous n'avons pas le même concept de l'utilisation du courrier pour la fraude qu'aux États-Unis. La raison est bien simple: c'est qu'aux États-Unis le droit pénal relève de la compétence des États. Par conséquent, l'un des rares outils dont dispose le gouvernement fédéral aux États-Unis pour combattre les activités criminelles consiste à utiliser certaines de ces agences, notamment le service postal, tandis qu'au Canada en théorie, naturellement, le droit criminel relève de la compétence fédérale et les outils pour appliquer le Code criminel du Canada et d'autres lois contre les infractions criminelles relèvent de la compétence nationale. Nous avons pensé que nous n'avions pas besoin des mêmes outils qu'aux États-Unis. C'est donc l'une des raisons pour lesquelles Postes Canada ne joue pas le même rôle dans ce genre d'affaires que son homologue américain.

Cela étant dit, je pense que s'il y a un certain manque de volonté de la part de Postes Canada à faire ce qu'elle peut faire à l'intérieur du cadre juridique dans lequel elle opère, nous serions certainement heureux plaisir de communiquer avec les personnes que nous connaissons à la très haute direction de Postes Canada pour voir, en collaboration avec Barry Elliott, ce qu'elles pourraient faire.

Je dois cependant mettre en garde les membres du comité en vous disant qu'il se peut fort bien qu'il s'agisse d'une question législative—certainement pas sept ans, sept ans et sept ans—non pas tout simplement un manque de volonté de la part de Postes Canada pour aider.

La présidente: Merci.

Je n'ai pas d'autres personnes sur ma liste.

Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui pour poursuivre notre débat sur le projet de loi C-20. Vous nous avez certainement éclairés davantage concernant ce projet de loi. Nous vous remercions de vos exposés et de vos observations sur l'application et le fonctionnement du projet de loi lorsqu'il sera adopté. Nous sommes impatients de vous rencontrer de nouveau lors d'une séance future.

La séance est levée.