INDY Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 2 mars 1999
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément à un ordre de renvoi de la Chambre en date du mardi 3 novembre 1998, nous faisons l'examen du projet de loi C-54, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois.
• 1535
Nous accueillons aujourd'hui un certain nombre de témoins. Il
s'agit des représentants de l'Association des comptables généraux
agréés du Canada, M. Mark Boudreau, vice-président, Relations
publiques et gouvernementales, et de M. John Yu; de Bennett Gold
Comptable agréés, M. Robert Gold; d'Equifax Canada, M. Jackson
Chercover, secrétaire, avocat et conseiller, de l'Association des
banquiers canadiens, M. Andrew Finaly, conseiller juridique
principal, et M. Alan Young, vice-président, et de la Western
Forum of Credit & Financial Executives Association, M. Paul Cook,
directeur du Comité législatif.
Je suis très heureuse que vous puissiez vous joindre à nous cet après-midi. Nous avons dans notre ordre du jour un autre point qui n'a pas été traité à notre réunion de ce matin. Malheureusement, nous n'avons pas neuf membres présents. En attendant qu'il y ait neuf membres du comité autour ce cette table, M. Pankiw, je propose que nous entendions les témoins en espérant que, lorsqu'ils auront fini leurs exposés, nous pourrons étudier votre motion avant la période de questions. Cela vous convient?
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Merci.
La présidente: À moins que vous ayez décidé d'un ordre différent, nous allons commencer en suivant l'ordre de la liste, c'est-à-dire par les représentants de l'Association des comptables généraux agréés du Canada, MM. Mark Boudreau et Yu.
M. John Yu (FCGA, Association des comptables généraux agréés du Canada): Merci, madame la présidente. Nous sommes très heureux de vous rencontrer aujourd'hui.
Je vais vous décrire brièvement qui nous sommes. L'Association des comptables généraux agréés du Canada a été créée en 1908 et a reçu sa charte par une loi adoptée par le Parlement en 1913. Il s'agit d'un organisme professionnel autoréglementé qui compte plus de 60 000 membres et étudiants. Nos membres sont des comptables professionnels. Environ 20 p. 100 d'entre eux travaillent pour le gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et des services publics.
Nous avons des activités à l'échelle internationale. Nous avons le droit de vote au sein d'un bon nombre d'organismes internationaux de comptables. Notre programme d'études est bien connu partout au monde et exporté dans de nombreux pays. Il y a des comptables généraux agréés dans diverses parties du monde. Il est évident que nous nous intéressons au commerce électronique. Notre programme d'études est offert sur support électronique à partir d'un modèle Internet.
Passons maintenant au projet de loi C-54. Nous estimons que ce projet de loi est très important pour ce qui est de protéger la vie privée et de permettre le commerce électronique. Nous croyons que cette mesure est nécessaire au commerce, surtout avec les pays de l'OCDE et dans le domaine du commerce électronique. Le projet de loi comporte deux parties. Nous croyons qu'il vaudrait mieux scinder ces deux parties pour en faire deux projets de loi distincts. L'un des ces projets de loi traiterait de la protection de la vie privée dans le secteur privé. L'autre projet de loi porterait sur les documents électroniques. Il s'agirait en fait d'un projet de loi technique qui devrait être distinct de l'autre. Voilà notre opinion sur le projet de loi.
Pour ce qui est des règles sur la protection de la vie privée que contient ce projet de loi, nous trouvons que c'est un bon point de départ pour la protection de la vie privée des consommateurs canadiens. Ces règles sont limitées aux activités commerciales. Les Canadiens ont toutefois besoin d'une meilleure protection de leur vie privée dans toutes les activités sectorielles, y compris les activités non commerciales.
Le projet de loi prévoit un recours à un commissaire à la protection de la vie privée. Nous estimons que cette disposition est faible. Puisque le projet de loi n'offre qu'un mécanisme de résolution des plaintes, le commissaire a le pouvoir de faire des enquêtes, mais il n'a pas de pouvoir réel. Les dispositions sur la protection de la vie privée sont de nature réactive plutôt que proactive. Il faut que les droits des gens soient violés pour qu'il y ait des plaintes. Le problème, c'est que souvent les consommateurs ne savent pas qu'ils ont été lésés dans leurs droits.
Nous estimons en outre que le maximum de 20 000 $ quant aux dommages qu'un tribunal peut ordonner de verser, sous le régime du projet de loi, n'est pas suffisamment élevé. Surtout dans le domaine du commerce électronique, ceux qui enfreignent les règles compteront cela dans leurs frais généraux.
Je n'ai que quelques points précis à aborder au sujet du projet de loi. Notre exposé sera court, vu le temps qui nous est accordé. Nous allons donc discuter brièvement de l'article 7, à la partie 1, et de l'article 31, à la partie 2.
Dans la partie 1, l'alinéa 7(1)a) permet la collecte de renseignements sans le consentement de l'intéressé lorsque c'est manifestement dans l'intérêt de celui-ci. Qui décide que c'est dans l'intérêt de l'intéressé? Les gens devraient avoir le droit de décider de protéger leur vie privée.
• 1540
Toujours à la partie 1, l'alinéa 7(1)c) accorde une exception
à l'égard de la collecte faite à des fins journalistiques,
artistiques ou littéraires. Nous croyons que cette exemption est
injustifiée, à moins que l'on applique dans ces domaines un code de
déontologie aussi rigoureux que celui des comptables généraux
agréés pour protéger le public.
L'alinéa 7(2)d) n'offre aucune garantie contre l'utilisation de renseignements recueillis sans le consentement de l'intéressé. Sans ces garanties, les particuliers ne sont pas protégés, car il suffit d'appuyer sur un bouton pour diffuser l'information.
Enfin, je veux parler de la partie 2. Les dispositions qu'on y trouve constituent une modernisation, et nous en sommes satisfaits. Au paragraphe 31(1), nous aimerions que la définition du terme «document électronique» soit plus générale, puisque les données électroniques peuvent exister sous diverses formes et dans divers types de machine, outre les systèmes informatiques ou dispositifs semblables qui sont mentionnés dans ce paragraphe.
À ces exceptions près, notre association appuie le projet de loi C-54. Nous félicitons le gouvernement d'avoir présenté des mesures pour la protection de la vie privée dont les consommateurs canadiens ont tant besoin. Vous trouverez des exemplaires de notre mémoire au fond de la salle.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Yu.
Monsieur Gold.
M. Robert Y. Gold (associé-directeur, Bennett Gold Comptables Agréés): Merci, madame la présidente.
Je m'appelle Robert Gold. Je suis comptable agréé et associé-directeur d'une firme locale de Toronto connue sous le nom de Bennett Gold Comptables Agréés.
L'Institut canadien des comptables agréés et l'American Institute of Certified Public Accountants ont mis sur pied, en partenariat, un programme intitulé WebTrust. Les sites Web qui sont inscrits à ce programme doivent divulguer leurs pratiques commerciales et respecter ces pratiques. Le site Web doit veiller efficacement à l'intégrité des transactions et, mieux encore, WebTrust exige que les sites Web protègent de façon efficace les renseignements qu'ils possèdent sur leurs clients.
Je suis ici à double titre. Je suis associé-directeur d'une firme de comptables agréés et je suis associé-directeur de la première firme titulaire d'une licence WebTrust au Canada. En effet, note firme a été la première au Canada à apposer un sceau d'approbation sur un site Web de commerce électronique.
Je ne m'oppose ni au projet de loi C-54, ni aux amendements qui y sont proposés.
À titre de titulaire d'une licence WebTrust, j'ai été formé et accrédité par l'Institut canadien des comptables agréés pour effectuer des vérifications et des accréditations de commerce électronique dans le cadre du programme WebTrust.
J'ai un argument important à faire valoir, avant de passer aux deux documents que je vous ai remis. Ce que nous préconisons, c'est que le comité prenne en compte les principes et les critères du programme WebTrust comme moyen de protéger l'intérêt public et de susciter la confiance des consommateurs dans Internet. Plus précisément, le commissaire à la protection de la vie privée doit envisager d'appliquer les principes et les critères de WebTrust comme méthode de base dans les vérifications des méthodes de gestion des renseignements personnels des entreprises exploitées par l'intermédiaire d'Internet. Voilà pour l'un de mes rôles.
L'autre porte sur la protection de la vie privée et les consommateurs. Nous sommes tous des consommateurs et nous nous servons tous d'Internet dans une certaine mesure. Nous envoyons des messages électroniques et nous faisons des achats.
Notre mémoire, dont je vous laisserai des exemplaires à consulter, est accompagné d'un document de trois pages reprenant les titres de journaux. Tous ces titres sont récents.
À mon avis, c'est mon rôle le plus important. C'est bien beau d'être un comptable agréé et un titulaire de licence WebTrust, de comprendre comment vérifier les problèmes de protection de la vie privée sur un site Web de commerce électronique, mais il est bien différent de me retrouver chez moi, devant mon ordinateur, tout comme ma famille et mes collègues, et de m'inquiéter de la protection de la vie privée sur Internet.
Il faut espérer que vous aurez l'occasion de jeter un coup d'oeil sur les pages que nous vous avons remises. Tous ces titres proviennent d'articles parus récemment dans les journaux: «Une atteinte à la sécurité révèle des données sur les milles aériens des particuliers»; «Données personnelles relatives aux usagers des milles aériens disponibles sur le Web»; «Un internaute tombe sur des renseignements personnels concernant les cartes de crédit»; «Attention à la fraude lorsque vous vendez sur le Net»; «Aucune suite donnée à une atteinte à la sécurité des ordinateurs»; «La police canadienne est confondue par un vol perpétré sur l'inforoute»; «La confiance est essentielle pour le magasinage par l'Internet»; «Des escroqueries sur l'Internet débouchent sur des accusations»; et enfin, un titre qui fait dresser les cheveux sur la tête: «Les dossiers concernant des patients disponibles sur le Web pendant deux mois».
Nous avons créé ce site Web en faisant un jeu de mots sur l'expression «air miles» pour attirer l'attention du consommateur et l'avons appelé «Scare Miles». Dans ce site, nous avons également établi un important lien pour la confidentialité du commerce électronique, la confiance et l'assurance. Tout cela se trouve sur le site Web et nous les avons énumérés à la page 2 de cette brochure en couleur. Les 13 ou 14 sites Web qui figurent sur cette liste sont tous des pages, tribunes, organisations concernant la protection de la vie privée, des organismes coupables de fraude sur l'Internet, bref autant de choses qui sont très importantes pour le consommateur.
• 1545
En l'absence de normes de principes et de critères dans le
projet de loi C-54, de normes qui ne sont pas coulées dan le béton,
comme est censée l'être une loi, mais qui évolue, comme le CA
WebTrust, où la protection de la vie privée évolue et nos critères
évoluent parallèlement à la technologie et à l'Internet, les
mesures que prennent le comité et le commissaire à la vie privée en
1999 ne suffiront plus en 2002.
La version de WebTrust avec laquelle nous travaillons aujourd'hui est la version numéro 1. Les gens de notre profession ont déjà accès à une ébauche de version 1.1. Elle porte sur les services bancaires en ligne et les transactions électroniques. La version 2 doit arriver sur le marché pendant l'été. Elle concerne les divulgations détaillées de renseignements personnels.
J'ai rencontré Anne Cavoukian, Commissaire à la vie privée de l'Ontario. Selon elle, les divulgations de renseignements personnels doivent être affichées dans tous les endroits évidents, partout où un consommateur aura accès à un site Web où on recueille ou échange des renseignements. C'est là-dessus que WebTrust met l'accent dans ses principes et critères. À l'heure actuelle, nous vérifions la protection de l'information. D'ici l'été, nous insisterons pour que notre clientèle affiche toutes les divulgations de renseignements personnels, les «cookies» et l'échange d'information sur le site Web.
Pour conclure, l'objet de ma comparution d'aujourd'hui est de vous demander de prendre ces manchettes au sérieux. Elles m'effraient et devraient vous effrayer également. Elles devraient vous effrayer si vous avez des enfants ou si vous faites des affaires sur l'Internet. Ce n'est que grâce à une bonne méthodologie et des principes et critères permettant d'examiner les usages du commerce électronique que nous pourrons garantir que le Canada deviendra ce que notre premier ministre souhaite le voir devenir d'ici l'an 2002, c'est-à-dire un chef de file mondial dans le domaine du commerce électronique.
Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Gold.
Je vais maintenant donner la parole à M. Chercover.
M. Jackson L. Chercover (secrétaire, avocat et conseiller, Equifax Canada Inc.): Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs.
Je crois savoir que le texte écrit du mémoire est disponible sur le site Web d'Industrie Canada, et je ne le répéterais donc pas. Je tiens toutefois à vous informer qu'Equifax Canada est la principale agence d'évaluation du crédit du pays, chargée de recueillir et d'entreposer des renseignements sur le crédit de 19 millions de consommateurs canadiens. Cette information est diffusée, conformément au droit provincial, à nos membres, parmi lesquels se trouvent évidemment des organismes émetteurs de cartes de crédit, des institutions financières, les principaux commerçants et des organismes du gouvernement. L'an dernier, 28 millions d'évaluations ont été émises.
Dans ce mémoire, Equifax a essayé de prouver que cette entreprise est unique en son genre parmi toutes les entreprises canadiennes auxquelles s'appliquera ce projet de loi, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, contrairement à une foule d'entreprises qui utilisent l'information comme ajout aux produits et services qu'elles vendent, dans le cas d'Equifax ou des rapports sur les consommateurs, c'est l'information qui constitue le produit. En second lieu, Même si cette question relève manifestement de la compétence constitutionnelle des provinces et est donc assujettie à leur régime de réglementation, le projet de loi à l'étude s'appliquera sur-le-champ à Equifax. Il n'y aura pas de délai de trois ans, puisque le projet de loi prévoit l'échange d'information entre les provinces. Ainsi, Equifax sera en fait doublement obligée de se conformer à la loi, et ce depuis le premier jour.
Equifax sert depuis environ huit décennies les entreprises et les consommateurs canadiens en facilitant les opérations de crédit. À mesure que l'industrie a évolué, en tant que gardien responsable de renseignements personnels confidentiels, Equifax a élaboré des mesures de sécurité complexes et perfectionnées en vue de protéger la confidentialité de ces renseignements, et ces systèmes sont non seulement conformes, mais en fait supérieurs aux exigences des lois provinciales.
En revanche, les gouvernements sont relativement des nouveaux venus sur le marché de la protection des renseignements personnels. Les lois sur les renseignements concernant le consommateur ont été adoptées pour la première fois dans les années 70, les lois sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé dans les années 80 et dans les années 90, on propose d'adopter les mêmes lois pour le secteur privé.
En mettant au point les procédures dont je viens de parler, Equifax a réussi à réaliser un juste équilibre entre les intérêts des consommateurs au titre de la vie privée et le besoin légitime d'information des entreprises dans le cadre du processus d'octroi du crédit. Ce que cherche à faire le gouvernement fédéral en vertu de ce projet de loi—dont nous espérons sincèrement que les provinces s'inspireront en adoptant des lois harmonisées—c'est également établir un juste équilibre.
En dépit des critiques que votre comité a entendues de la part de divers groupes d'intérêt, nous estimons que le projet de loi C-64, malgré certaines imperfections, contribue dans une grande mesure à réaliser cet équilibre. C'est une mesure souple et sujette à examen, si besoin est. Il ne renferme aucune disposition draconienne—comme celles que bien des gens recommandent—qui permettrait au commissaire de vérifier de façon importune les méthodes d'information d'un organisme sans avoir de motif valable de le faire. Le projet de loi ne prévoit aucune exigence en matière d'enregistrement obligatoire. Ce genre de chose est peut-être utile en Nouvelle-Zélande, mais pas au Canada. Il prévoit fondamentalement un processus déclenché par des plaintes, et pourtant lorsque c'est nécessaire, le commissaire a le pouvoir et l'autorité voulus de lancer des poursuites contre un contrevenant lorsqu'une telle initiative se révèle trop complexe ou trop onéreuse pour le consommateur lui-même.
• 1550
Le principal problème qui se pose pour Equifax, c'est que
cette mesure s'appliquera sur-le-champ, dès le premier jour, à
notre entreprise. La solution simple que nous proposons dans notre
mémoire consiste à prévoir dans la loi dès à présent une exemption
pour les agences d'évaluation du crédit enregistrées ou autorisées
qui sont assujetties aux lois provinciales actuelles sur les
renseignements concernant le consommateur et les rapports de
solvabilité.
J'aimerais répondre par anticipation à une question, si vous le permettez: pourquoi faudrait-il accorder une telle exemption à une entreprise parmi toutes les autres? La réponse, c'est que, comme je l'explique dans mon mémoire, notre entreprise est tout à fait unique en son genre. Pour emprunter une phrase tirée d'autres mémoires dont vous entendrez parler, c'est parce que le système d'évaluation et d'octroi du crédit est le moteur du commerce canadien. Tout ce qui risque de compromettre ce système ou de lui nuire irait contre les intérêts des Canadiens.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Chercover.
Monsieur Young
M. Alan Young (vice-président, Politiques, Association des banquiers canadiens): Madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous avoir invités à donner notre avis sur le projet de loi C-54. Je suis accompagné de Andrew Finlay, conseiller juridique principal de la Banque Scotia. Comme l'indique l'ordre du jour, il y a également dans la salle M. George Dessaulles, vice-président de la conformité à la réglementation pour la Banque Royale du Canada, et David Braidwood, premier directeur, Sécurité et normes des cartes à puce, pour la Banque Royale. Ils nous aideront à répondre aux questions concernant leur domaine de compétence, madame la présidente, de sorte que nous serons peut-être obligés de jouer aux chaises musicales.
Le secteur bancaire est depuis longtemps un chef de file en matière de protection des renseignements concernant le consommateur. Le modèle de code de protection de la vie privée adopté en 1991 par l'ABC était le premier code de l'industrie à prévoir plus qu'un simple énoncé de principe. Notre code actuel, qui a été mis à jour en 1996, était le premier code de l'industrie à être reconnu par des parties indépendantes comme conforme aux exigences du modèle de code de protection de la vie privée adopté par l'Association canadienne de normalisation. Le code de l'Association des banquiers est axé sur la totale divulgation et le contrôle de l'information par le consommateur. À cette fin, il donne au consommateur le droit de refuser qu'on utilise des renseignements personnels s'il estime que ce n'est pas souhaitable, soit au moment de la demande de services ou de produits bancaires, soit à n'importe quel moment par la suite. Le code de l'ABC oblige les banques à obtenir le consentement du consommateur avant de communiquer ces renseignements à leurs filiales.
Au moment d'élaborer le code, les banques appartenant à l'ABC ont reconnu que le dossier médical d'une personne était de nature très délicate. Le code prévoit que ce type d'information ne sera pas partagé entre les banques et leurs filiales et prévoit également certains recours. Il est prévu que les clients peuvent déposer une plainte auprès des banques au sujet de la façon dont leur dossier a été traité, ils peuvent aussi faire appel à l'ombudsman de chaque banque, avec la possibilité d'interjeter un appel final auprès de l'Ombudsman bancaire canadien, qui est indépendant.
Le code de l'ABC et les codes individuels de la protection des renseignements personnels de nos membres attestent du sérieux avec lequel nous souhaitons protéger les renseignements concernant nos clients. Nous étions ravis que le ministre Manley promette, dans son document de fond sur la protection des renseignements personnels, des mesures législative qui soient souples sans être encombrantes. Le projet de loi C-54 commençait donc dans la bonne voie en utilisant les principes du code de protection des renseignements personnels tiré du modèle de la CSA; ce code résulte de plusieurs années de collaboration entre consommateurs entreprises—y compris les banques—et gouvernement. Nous sommes d'accord pour qu'il soit inclus dans le projet de loi, et nous souscrivons à l'engagement de notre industrie d'adhérer au code CSA, comme le prouve le nouveau code de l'ABC.
L'industrie bancaire est convaincue que le gouvernement est dans la bonnes voie. Toutefois, nous avons certaines suggestions qui permettraient d'améliorer le projet de loi, suggestions que vous trouverez dans le mémoire que nous vous avons soumis. J'aimerais toutefois vous en signaler brièvement trois.
D'abord, l'article 7 explique dans quelles circonstances—et seulement dans celles-là—une organisation peut utiliser ou divulguer des renseignements personnels sans le consentement de l'intéressé. D'après nous, la liste des intéressés n'est pas suffisamment exhaustive, car elle n'inclut aucun des cas en regard desquels la divulgation des renseignements personnels non assortie de la nécessité d'obtenir le consentement est à la fois appropriée et permise en vertu des lois actuelles.
• 1555
Ainsi, la cause Tournier—en common law—permet aux banques
d'utiliser des renseignements personnels lorsqu'elles doivent
protéger l'intérêt public. L'exemple le plus révélateur, tiré du
milieu bancaire, serait celui du blanchiment d'argent. En vertu du
projet de loi actuel, les banques n'auraient pas le droit de
divulguer qu'elles soupçonnent un cas de blanchiment d'argent,
puisqu'elles ne pourraient divulguer leurs soupçons que si elles
répondent au critère des motifs raisonnables de croire qu'un crime
a été commis ou est à la veille d'être commis. On pourrait donne
d'autres exemples comme la prévention d'actes violents contre les
aînés ou la prévention de la fraude, qui sont mentionnés tous deux
dans notre mémoire.
Le devoir de protéger l'intérêt de la population n'absout en rien la banque de la nécessité pour elle de traiter de façon responsable les renseignements personnels concernant ses clients. Par ailleurs l'article devrait être précisé pour qu'on voit plus clairement le lien qu'il y a entre la collecte, l'utilisation et la divulgation des renseignements. Si une organisation obtient le consentement de divulguer les renseignements à une autre partie en vue de certaines utilisations définies, ce consentement devrait être accepté et devrait constituer pour l'autre partie la permission de recueillir cette information et de l'utiliser pour cette même fin. Ainsi, si une organisation achète une liste de noms de quelqu'un d'autre, elle devrait pouvoir être assurée que les intéressés ont bel et bien consenti à être inscrits sur la liste en sachant que celle-ci serait vendue à des entreprises souhaitant commercialiser leurs produits auprès d'eux. Autrement dit, l'organisation acheteuse ne devrait pas avoir à demander à nouveau le consentement.
Nous sommes préoccupés, en deuxième lieu, par les dispositions de surveillance du projet de loi. Nous croyons que les rôles et pouvoirs accordés au Commissaire à la protection des renseignements personnels dépassent ceux dont il a besoin pour répondre aux objectifs déclarés de la loi. Ces pouvoirs ne peuvent être décrits, à notre avis, comme étant «souples sans être encombrants». Les pouvoirs d'enquête du commissaire incluent la possibilité pour lui d'entrer dans des lieux sans préavis, et d'examiner puis de retirer des dossiers sans mandat. Le commissaire peut assigner des témoins à comparaître et à témoigner sous serment sans qu'ils ne profitent des conseils d'un avocat. Nous sommes d'avis que ces dispositions vont à l'encontre des articles 7 et 8 de la Charte.
Nous vous suggérons donc de revoir les rôles et les pouvoirs du commissaire et vous recommandons, jusqu'à ce qu'on révise pour la première fois la loi, de vous en tenir aux plaintes. Lors de la première révision de la loi, vous aurez une idée beaucoup plus claire de la façon dont s'appliquent ces dispositions, et vous pourrez alors décider s'il faut instaurer un mécanisme de surveillance plus poussé—tel que des vérifications des pratiques s'appliquant aux renseignements personnels. Nous croyons que les modifications apportées alors tiendraient compte des progrès effectués dans les divers codes sectoriels et des mécanismes de résolution des plaintes qui existent déjà dans le secteur privé au Canada. Nous sommes d'avis que les diverses enquêtes et la publicité qui entoureraient les plaintes, conjointement au rôle que jouera le Commissaire à la protection des renseignements personnels dans la sensibilisation de la population, permettront de mettre en lumière toute pratique inacceptable de traitement des renseignements personnels de la part des organisations et dissuaderont celles-ci de les appliquer.
En troisième lieu, là où l'on soupçonne des activités frauduleuses, dans les cas où une personne fait l'objet d'enquêtes ou dans les cas où la loi interdit l'accès à des renseignements personnels, nous croyons que le projet de loi doit limiter le droit d'accès individuel à l'information détenue par les organisations.
À notre avis, les parties 2 et 3 du projet de loi qui portent sur le commerce électronique et l'utilisation de signatures électroniques, serviront à promouvoir le développement continu du commerce électronique.
Vous trouverez tous les commentaires détaillés sur ces volets du projet de loi dans votre mémoire. Aujourd'hui, nous avons choisi plutôt de mettre en lumière l'importance pour vous de consulter de façon élargie tous les intéressés en vue d'élaborer les règlements qui sont envisagés dans ces volets du projet de loi. En consultant ainsi de façon ouverte et précoce les industriels, les consommateurs et les autres parties prenantes, vous vous assurez de tenir compte des doléances de ceux-ci à l'égard des normes technologiques proposées dans le projet de loi.
Nous répondrons avec plaisir à toute question, au moment voulu.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Young.
Monsieur Cook.
M. M. Paul Cook (président du Comité législatif, Western Forum of Credit & Financial Executives Association): Je vous remercie madame la présidente, ainsi que votre comité et particulièrement votre greffier d'avoir fait en sorte que je puisse venir de Vancouver témoigner ici.
Je représente ici la Western Forum of Credit & Financial Executives Association, qui est composée de cadres qui s'occupent de la gestion du crédit en Alberta et en Colombie-Britannique. Je suis personnellement accrédité professionnellement comme FCI par l'Institut canadien du crédit, créé par une loi spéciale du Parlement dans les années 20. Cet institut forme les gestionnaires de crédit qui s'occupent de l'octroi de crédits-fournisseurs. Par conséquent, mon point de vue ne sera pas tant celui des consommateurs que celui des gens d'affaires, à la lumière des répercussions qu'aura le projet de loi sur les relations qu'ils ont entre eux.
• 1600
Nous sommes heureux de voir avancer ainsi le projet de loi, et
nous souscrivons sans réserve à l'orientation prise en vue du
commerce électronique. De plus, en tant que partie prenante
directement intéressée par les renseignements personnels, nous
souhaitons que vous adoptiez de bonnes mesures législatives.
Mes commentaires porteront sur le texte du projet de loi, tel qu'il a été déposé en octobre dernier. J'ai cru savoir que certains amendements sont prévus qui pourraient alléger certaines de nos préoccupations, et j'espère que mes propos seront compris à la lumière de ce contexte.
Le projet de loi définit de façon très large les renseignements personnels. Aucune exemption n'est prévue pour tenir compte de l'utilisation quotidienne des renseignements personnels pour des raisons réelles, raisonnables et légitimes. Par exemple, on demande souvent aux entreprises qui espèrent obtenir un crédit d'affaire les noms et titres de personnes qui travaillent pour elles. On demandera souvent les noms et titres du superviseur des comptes créditeurs, du responsable des achats, du commis au comptoir des commandes, etc., et diverses autres personnes pour qu'il soit possible de communiquer avec elles. Or, ces personnes sont rarement des directeurs, agents ou même actionnaires de la compagnie. Par conséquent, demander à ces employés des formulaires de consentement ne constitue qu'une étape parfaitement inutile, étant donné la hiérarchisation de l'organisation.
Voici un autre exemple: le libellé actuel du projet de loi obligera les organismes publics, les entreprises privées, etc., à obtenir un consentement distinct pour chaque employé, chaque bénévole, etc, pour pouvoir produire un répertoire téléphonique interne comme le prévoit la loi.
Je crois savoir que l'on envisage peut-être de recourir plutôt à des listes nominatives comme celles qui existent au Québec. Je ne sais pas trop ce que vous entendez par «liste nominative», mais j'ai l'impression qu'il faudra négocier pour trouver une solution qui permette de nous sortir de cette ornière.
Nous vous proposons un autre libellé pour l'article 7, libellé qui ressort du témoignage que j'ai fait au comité législatif de la Colombie-Britannique sur la protection des renseignements personnels; le texte que nous proposons présente uniquement les intérêts du forum, car je n'oserais un seul instant affirmer que nous sommes les porte-parole de tous les intérêts commerciaux au Canada. À notre avis, lorsqu'on recueille des renseignements personnels comme le nom, le titre d'affaire, le nom de l'entreprise, l'adresse postale et l'adresse électronique, mais qu'on ne se limite pas au téléphone d'affaire, à l'adresse de courriel ou aux activités commerciales de l'intéressé—c'est-à-dire si on ne se limite pas à recueillir les coordonnées d'affaire—le projet de loi devrait prévoir une exemption spécifique en ce sens.
Il faut savoir que conserver les renseignements personnels est important, et ce qui me préoccupe notamment comme consommateur, c'est que le projet de loi ne prévoit rien pour assurer que les banques de données seront conservées au Canada. En effet, dès que les données sont déplacées à l'étranger, elles échappent à notre surveillance. Par conséquent, lorsque j'ai constaté que rien n'obligeait les agences d'évaluation du crédit des consommateurs à entreposer leurs données ici même au Canada, je me suis inquiété. Je m'inquiète tout autant des institutions financières et autres organisations qui détiendraient des renseignements personnels de nature délicate.
Pour ce qui est de notre troisième commentaire sur les restrictions imposées sur l'utilisation des dossiers gouvernementaux, nous avons déjà constaté des problèmes d'accès en Colombie-Britannique, car le gouvernement retenait de l'information qui avait une incidence directe sur les fournisseurs de crédit. Or, ces derniers ne sont pas uniquement les grandes banques; il peut s'agir d'entreprises familiales, de moyennes entreprises, et aussi, bien sûr, de grandes sociétés.
Pour assurer la sécurité publique, il faut garder l'information bien circonscrite dans les cas de renseignements détenus par le gouvernement comme à la Division des permis et immatriculations, parce qu'il ne faudrait surtout pas qu'il devienne possible de pirater les renseignements personnels des citoyens. Mais en même temps, il faut s'assurer que les octroyeurs de crédit qui veulent obtenir des garanties aient la possibilité de se tourner vers les registres gouvernementaux pour obtenir les garanties en regard desquelles ils consentiront un prêt.
• 1605
Pour ce qui est du Commissaire à la protection de la vie
privée, nous estimons que le projet de loi lui accorde beaucoup
trop de pouvoirs. Le simple fait que celui contre qui la plainte a
été déposée doit témoigner sous serment, même si cela peut
l'incriminer, nous pousse à nous demander si cela ne va pas à
l'encontre de la Charte des droits et libertés.
Chaque fois qu'il est nécessaire d'obtenir des preuves, si le Commissaire à la protection de la vie privée estime que certaines raisons justifient qu'il obtienne des dossiers, la demande devrait être présentée devant l'appareil judiciaire et le tribunal, en tant qu'arbitre extérieur, devrait décider si le commissaire a des motifs raisonnables et probables de mener enquête.
De plus, nous nous inquiétons particulièrement de la responsabilité des employés. D'après ce que nous comprenons, la loi n'exempte jamais de responsabilités les employés qui sont chargés des dossiers de renseignements personnels auprès d'une organisation, même s'ils ont fait de leur mieux pour s'assurer que leur employeur se conforme à la loi.
De plus, il est très important que l'information concernant le crédit que se partagent les octroyeurs de crédit-fournisseur, comme le prévoit actuellement la Loi sur la concurrence, ne puisse être mise en doute d'aucune façon.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Cook.
Je remercie tous les témoins de leurs exposés et des mémoires détaillés qu'ils nous ont fait parvenir.
Avant d'ouvrir la période de questions, je voudrais passer au point qui était inscrit à notre ordre du jour, et que nous n'avons pas eu l'occasion d'aborder à la fin de la séance de ce matin.
Monsieur Pankiw.
M. Jim Pankiw: Merci, madame la présidente.
Mercredi dernier, vous avez reçu avis de cette motion portant que, étant donné le jugement intérimaire récent de l'Organisation mondiale du commerce, le Comité de l'industrie devra immédiatement entreprendre des audiences sur les conséquences qu'aura ce jugement sur le Programme canadien de partenariats technologiques.
La présidente: Merci, monsieur Pankiw.
Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Madame la présidente, je crois que cette motion est irrecevable. Il y a eu certaines fuites, et l'OMC est toujours en discussion là-dessus; nous n'avons donc pas à réagir à ce jugement. Attendons le rapport final de l'OMC, pour savoir ce qu'il contient, avant de conclure que cela nuira au Programme de partenariats technologiques. À mon avis, il est farfelu de nous demander de tout suspendre pour nous pencher sur cette affaire.
La présidente: Monsieur Lastewka, j'avais promis à M. Pankiw que nous écouterions sa motion plus tôt. Mais j'étais du même avis que vous, à première vue. Toutefois, comme la motion est correctement rédigée, je l'ai acceptée, mais les membres du comité devraient savoir que l'OMC préparera un rapport final et que toute discussion de cette affaire avant la publication de ce rapport pourrait être considérée comme allant à l'encontre des règles et des directives de l'OMC.
Cala dit...
M. Jim Pankiw: Si je peux me permettre, je dis simplement qu'il serait prudent de nous préparer. Selon toute vraisemblance, le rapport final qui sera déposé au plus tard dans deux semaines corroborera cette décision intérimaire aux conséquences d'une portée considérable.
La présidente: Monsieur Pankiw, encore une fois, je vous demanderais de vous abstenir de tout commentaire sur la décision elle-même ou sur ses implications possibles puisque l'OMC n'a pas encore rendu sa décision définitive. Nous devrions nous abstenir de toute discussion car cela pourrait être considéré comme une ingérence.
J'ai accepté votre motion. Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka: À propos de cette fuite, je trouve vraiment surprenant que le Parti réformiste se lance à la défense du programme de partenariats technologiques alors que jusqu'à présent il voulait s'en débarrasser. Poursuivre cette discussion serait totalement stérile.
La présidente: Très bien.
M. Walt Lastewka: Madame la présidente, veuillez mettre la motion aux voix.
La présidente: Je mets la motion aux voix.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la présidente, je crois que la motion est recevable. Monsieur Lastewka, tout a été fait. On s'excuse auprès de nos invités.
Comme tout le monde, je me suis inquiétée lorsque j'ai pris connaissance du rapport intérimaire de l'OMC et j'aimerais avoir de plus amples renseignements. Je voudrais que les gens du ministère nous disent ce qu'ils en pensent. Si vous me permettez de continuer...
[Traduction]
La présidente: Madame Lalonde, non je ne vous le permets pas. Madame Lalonde, j'ai clairement indiqué que je ne voulais pas que nous discutions du contenu de cette décision intérimaire, car cela constituerait une ingérence...
M. Lastewka a réclamé le vote. Je mets donc cette motion aux voix.
M. Jim Pankiw: Pouvons-nous avoir un vote par appel nominal?
La présidente: Bien sûr.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Madame la présidente, je n'avais pas fini mon intervention. Je désirais parler de procédure. Je voulais simplement signifier mon accord quant à cette motion, mais indiquer que je le réservais pour plus tard. Je souhaiterais obtenir de plus amples renseignements de la part des fonctionnaires du ministère de l'Industrie et je voudrais qu'ils viennent nous donner leur évaluation de la situation. Attendons d'abord la décision, et nous pourrons ensuite nous pencher sur la motion de M. Pankiw.
[Traduction]
La présidente: Merci, madame Lalonde. Je m'excuse. Je croyais que vous vouliez commenter le contenu de la décision intérimaire.
Nous allons procéder maintenant au vote.
- (La motion est rejetée par 6 voix contre 2)
La présidente: La motion est rejetée. Merci. Je présente nos excuses à nos témoins, mais malheureusement nous n'avons pas eu le temps de régler ce problème ce matin à la fin de notre réunion.
Nous passons maintenant aux questions concernant le projet de loi C-54. Un certain nombre de suggestions intéressantes nous ont été faites et je commencerai par M. Pankiw.
M. Jim Pankiw: Je n'ai pas de question pour le moment.
La présidente: Pas de question pour le moment.
[Français]
Madame Lalonde, avez-vous d'autres questions?
Mme Francine Lalonde: Oui, madame la présidente. Je vous remercie tous de vos interventions.
Je vais commencer par le mémoire de l'Association des comptables généraux agréés du Canada. Parlez-vous aussi au nom des comptables du Québec?
[Traduction]
M. John Yu: Oui.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Votre mémoire rejoint beaucoup certaines critiques que j'ai faites ainsi que des critiques émises au Québec. On avait entre autres une critique importante qui touchait beaucoup le monde des affaires. On dit que le Québec, qui a été le premier à agir dans ce domaine et avec lequel la plupart d'entre vous faites affaire directement ou indirectement, se trouve à être pénalisé. Si le projet de loi C-54 est adopté, les entreprises qui se sont conformées à la loi québécoise devront obéir à deux ensembles de règles, selon que les données transiteront ou non à l'extérieur du Québec. Avez-vous étudié cette question? Est-ce que vous pensez qu'il y a là un problème, comme beaucoup me l'ont dit?
[Traduction]
M. John Yu: Madame la présidente, c'est une question que nous n'avons pas vraiment étudiée. Nous y réfléchirons, si nécessaire nous consulterons nos confrères québécois et nous vous ferons parvenir notre réponse.
[Français]
Mme Francine Lalonde: D'accord. Puis-je poser une autre petite question, madame la présidente?
[Traduction]
La présidente: Oui, certainement.
[Français]
Mme Francine Lalonde: À la page 7 de votre mémoire, vous dites que le processus de plaintes pourrait coûter extrêmement cher et être fort long. Vous avez aussi dit, bien que vous ne l'ayez pas inscrit dans votre mémoire, que des entreprises pourraient considérer la somme de 20 000 $ comme étant the cost of doing business. Ai-je bien compris? Pourriez-vous expliquer davantage cette affirmation?
[Traduction]
M. John Yu: Sur l'Internet, surtout pour les activités en ligne, la vente et l'achat de renseignements sont à la base de tout si bien qu'une amende de 20 000 $ pour atteinte aux droits d'un particulier—et ce particulier doit se plaindre avant même de savoir... Il faut d'abord qu'il sache avant de pouvoir se plaindre. La procédure est tellement longue que la protection n'est pas du tout efficace pour le particulier concerné. Cette amende étant très minime, les coupables estimeront que cela fait partie des risques du métier et que c'est une chance à prendre. C'est donc notre position quant à la portée de cette sanction.
Mme Francine Lalonde: Merci. Pensez-vous que d'autres témoins aimeraient exprimer leur point de vue là-dessus?
[Traduction]
La présidente: Est-ce que quelqu'un a quelque chose d'autre à ajouter? Monsieur Gold.
M. Robert Gold: Je suis enclin à convenir que cette amende de 20 000 $, que cette sanction n'est pas très importante. Nous proposons avec notre accréditation WebTrust que les compagnies en ligne ayant passé avec succès les tests de pratique commerciale, de protection de l'information et d'intégrité des transactions soient autorisées à afficher un sceau sur leur site accompagné d'un certificat numérique indiquant immédiatement au consommateur—sur le site du web, sur la page de commande, ou à tout endroit où il y a échange de renseignements—que c'est une compagnie à laquelle il peut faire confiance. Si une compagnie ne réussit pas le test de vérification—et nous actualisons notre travail tous les 90 jours—le sceau est supprimé. Cela règle en fait l'inconvénient de l'insuffisance de l'amende de 20 000 $.
La présidente: Monsieur Chercover.
M. Jackson Chercover: Madame la présidente, j'aimerais revenir à la question de Mme Lalonde concernant la nécessité de respecter deux ensembles de règles.
[Français]
Je m'excuse, madame, mais je ne maîtrise pas très bien le français. Je devrai donc continuer mon intervention en anglais.
Mme Francine Lalonde: Veuillez utiliser la langue que vous préférez.
[Traduction]
M. Jackson Chercover: Pour nous c'est le problème le plus important. Pour Equifax, il n'y aura pas de hiatus de trois ans car dû à la nature de ses activités le projet de loi C-54 s'appliquera immédiatement à Equifax. Dès le premier jour, nous devrons a) respecter les lois provinciales qui sont constitutionnelles dans le domaine de la consommation et b) respecter les dispositions du projet de loi C-54. Ce sera une invitation ouverte à certains éléments de la société dont le crédit n'est peut-être ni comparable au vôtre ni comparable au mien à se plaindre tant auprès de la commission ou auprès d'un registraire dans l'une des provinces anglophones et auprès du Commissaire à la protection de la vie privée. C'est sur cette base que nous faisons une recommandation d'exemption. En l'absence d'une telle exemption, il nous faudra attendre l'adoption par ces provinces qui ont l'intention, comme le dit le projet de loi, d'adopter des lois essentiellement similaires puis de faire une demande d'exemption.
Maintenant, je crois qu'il est possible qu'il y ait une exemption générale pour le Québec dès que ce projet de loi entrera en vigueur à cause de l'existence du projet de loi 68 et parce qu'il a fait la démonstration qu'il donnait les résultats que vous attendez du projet de loi C-54. Mis à part cela, il y a neuf autres provinces. Notre situation est unique dans la mesure où cette loi nous affectera immédiatement. Que je sache, il n'y a aucune autre industrie qui ne bénéficiera pas de ce sursis de trois ans.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Chercover.
Monsieur Yu, vous vouliez ajouter quelque chose?
M. John Yu: Madame la présidente, je voudrais simplement dire un mot à propos du commentaire de M. Gold sur WebTrust. Je suis un des représentants canadiens qui siègent au comité de la technologie informatique de la Fédération internationale des comptables et nous avons longuement examiné ce concept de WebTrust dans l'optique internationale. Notre conclusion est que ce concept n'est pas le bon modèle pour le commerce électronique. Si vous voulez des renseignements supplémentaires, je peux vous les fournir séparément.
Le modèle de l'AICPA et du SECA s'est révélé également si peu fameux qu'on est en train de le réviser. Nous croyons que le modèle WebTrust coûte trop cher, surtout pour les petites et moyennes entreprises qui sont l'épine dorsale de l'industrie et du commerce canadiens. Ce modèle est défectueux. Au bout de deux ans, le nombre de sceaux WebTrust déployés dans le monde est tout à fait minime.
Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Yu.
M. Robert Gold: Est-ce que je peux répondre?
La présidente: Monsieur Gold.
M. Robert Gold: Il y a quelques petites précisions qui méritent d'être données. Pour commencer, le Canada, les États-Unis, l'Angleterre, l'Écosse, l'Irlande, le pays de Galles, les Pays-Bas, l'Australie et la Nouvelle-Zélande forment et accréditent actuellement leurs comptables agréés pour l'utilisation du WebTrust.
Le concept de WebTrust a été introduit pour la première fois dans la profession à la fin de 1977. Les compagnies accréditées n'ont commencé à faire leur apparition sur la scène mondiale qu'au milieu de 1998. Je suis donc d'accord avec vous à 100 p. 100 qu'il n'y a pas encore suffisamment de sceaux de ce genre sur le réseau. Les choses sérieuses ne font que commencer. Mais E*TRADE et Bell Canada ont tous les deux des sceaux WebTrust, ce qui représente une clientèle qui n'est tout de même pas négligeable.
Je conviens également que cette procédure peut paraître onéreuse, mais je ne pense pas que nous soyons ici pour discuter de frais professionnels. Il reste que participer à WebTrust peut se faire sans que cela coûte une fortune. C'est à la portée de la majorité des entreprises d'Internet et de commerce électronique et, ce qui est encore plus important, nous faisons incomber la plus grande partie de la responsabilité de la documentation en matière de protection des renseignements et d'intégrité des transactions aux clients. Ce sont eux qui préparent les dossiers de vérification et c'est nous qui nous chargeons de la vérification en tant que telle.
• 1620
S'il s'agit d'un client intelligent et de bonne réputation, ce
n'est pas une procédure onéreuse. Je ne vois pas comment quelqu'un
peut qualifier ce modèle de mauvais quand les compagnies divulguent
leurs pratiques commerciales et que nous les soumettons à
vérification et quand nous vérifions qu'ils livrent bien ce qu'ils
promettent et qu'ils sont bien ce qu'ils disent être. Nous
vérifions la protection des renseignements personnels. Ce n'est pas
un mauvais modèle, c'est le modèle.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Gold et monsieur Yu.
Pourquoi ne parlons-nous pas du projet de loi C-54 dont nous sommes saisis—et des propositions de modification?
Madame Lalonde, vous aviez une dernière question?
[Français]
Mme Francine Lalonde: Oui. Il faudrait aussi rencontrer des concurrents de M. Gold.
Je voudrais poser une question aux vénérables représentants des banques. Vous comprendrez que je vais aussi parler du Québec. Au Québec, quand il y a eu le projet de loi 68, les banques n'ont pas cherché à se demander si elles étaient couvertes ou non par la loi du Québec; elles ont au contraire décidé qu'elles l'appliqueraient si elle était adoptée.
De surcroît, lorsqu'il y a eu le projet de loi 188 sur la réorganisation des services financiers, qui prévoit des exigences encore beaucoup plus grandes pour les services financiers, l'ABC a également été d'accord pour dire que les entreprises et institutions financières qui oeuvraient au Québec s'adapteraient à cette nouvelle réglementation plus exigeante.
Est-ce que les membres de l'ABC ont réfléchi aux contraintes qui seront imposées aux banques qui font affaire sur le territoire québécois du fait qu'elles auront l'obligation de se conformer à deux ensembles de lois et de règlements?
[Traduction]
M. Alan Young: Je vous remercie de cette question.
Je me permettrais de commencer par préciser que nous n'avons pas d'avis sur WebTrust. Pour répondre à la question très sérieuse de Mme Lalonde, l'ACB espère et réclame depuis toujours un système de réglementation nationale des services financiers. Pas un système fédéral, un système national. Un système instituant la coopération entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux en matière de réglementation des services financiers y compris la question très importante de la protection de la vie privée.
Comme il y a partage des responsabilités dans la Constitution entre les divers types d'établissements financiers et comme ces établissements empiètent de plus en plus sur leurs champs d'activités respectifs, il y a des chevauchements. Nous espérons que l'avènement du projet de loi C-54 et son adoption suscitera un programme de coopération et d'harmonisation menant à un système de réglementation national parce que nous croyons que, tout compte fait, c'est la seule solution pour garantir aux consommateurs un degré minimum de protection, la protection de leurs vies privées.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Monsieur, si ce que vous souhaitez n'arrivait pas de sitôt, ou même si cela arrivait et que la réglementation québécoise était toujours plus exigeante, est-ce que vous continueriez à dire la même chose? Je veux que vous soyez précis là-dessus parce que la Loi 68 existe et que si le projet de loi C-54 est adopté tel quel—je souhaite ardemment que ce ne soit pas le cas—, les banques qui font affaire sur le territoire québécois auront un choix à faire. Si elles continuent à respecter les exigences de la loi québécoise, elles devront respecter deux ensembles de règles, de normes et de lois. C'est vrai, monsieur; vous avez affaire à cela.
M. Alan Young: Je me permettrais de répondre qu'à ma connaissance, toutes les banques ont des succursales au Québec et dans les autres provinces. Il est clair que les banques et les activités bancaires relèvent du fédéral et qu'il nous faut donc nous soumettre aux dispositions du projet de loi C-54.
L'article 27 du projet de Loi C-54 confère des pouvoirs de réglementation au Conseil des ministres, au gouverneur en conseil. C'est peut-être justement pour régler le genre de question que vous venez d'évoquer en cas de risque de confusion quant au palier législatif applicable. L'application du projet de loi C-54 nous permettra de déterminer s'il y a des problèmes et dans ce cas s'il est nécessaire de faire appel à l'article 27. L'expérience nous le dira.
La présidente: Merci, monsieur Young et merci, madame Lalonde.
Madame Barnes, s'il vous plaît.
Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je vous remercie tous de vos commentaires. Je sais que cela représente beaucoup de travail.
J'aimerais aborder deux questions. La première est que ce projet de loi contient une clause de révision quinquennale. Étant donné l'explosion d'activités dans le domaine du commerce électronique, j'aimerais que vous me disiez tous rapidement ce que vous pensez d'une telle révision tous les cinq ans. Nous pourrions peut-être commencer par l'Association canadienne des banquiers.
M. Alan Young: La Loi sur les banques est depuis toujours révisée de manière régulière. J'avouerais que ces révisions ont toujours été bénéfiques. À l'origine la Loi devait être révisée tous les dix ans afin de permettre au gouvernement d'actualiser certains effets conformément à l'évolution des marchés. En 1992, le gouvernement fédéral a décidé de ramener cette période à cinq ans pour justement tenir compte de la rapidité de l'évolution des marchés. Depuis, la Loi sur les banques ainsi que d'autres lois financières fédérales sont désormais révisées tous les cinq ans et nous trouvons cela tout à fait opportun compte-tenu de la rapidité de l'évolution des marchés. Il importe que les législateurs se fassent distancer le moins possible par l'évolution du marché.
Mme Sue Barnes: Merci.
M. Jackson Chercover: J'abonde dans le sens de M. Young et j'ajouterais que c'est aux fruits qu'on juge l'arbre. Un exemple excellent de révision quinquennale est le projet de loi 68 du Québec qui vient de donner naissance au projet de loi 451 qui est une nette amélioration. Donc, pour répondre à votre question, madame, je serai en faveur d'une révision tous les cinq ans.
Mme Sue Barnes: Monsieur Gold.
M. Robert Gold: Étant donné la manière dont le commerce électronique modifie les règles régissant l'invasion de la vie privée par la technologie, sans parler des réalités de la vie privée, je pense que cinq ans c'est beaucoup trop long. Je pencherais plutôt... deux ans c'est peut-être un peu trop, mais trois ans me semblerait certainement tout à fait logique.
En passant, je ne voudrais pas que vous pensiez que je suis ici pour défendre les intérêts des comptables agréés et du modèle WebTrust des comptables agréés.
Mme Sue Barnes: Je crois que nous avons compris.
M. Robert Gold: J'estime simplement que les critères et les principes que nous avons adoptés méritent d'être examinés. Peu m'importe qui le Commissaire à la protection de la vie privée utilisera pour faire les vérifications. Peu importe que ce soit quelqu'un dans la salle ou mon collègue représentant les comptables généraux agréés. Nous disons que ces critères sont actualisés, modernes et évoluent très rapidement.
Mme Sue Barnes: Monsieur Yu.
M. John Yu: Madame la présidente, je suis en fait d'accord avec M. Gold pour la période de révision. Nous pouvons ne pas être d'accord à propos de WebTrust et je suis personnellement impliqué dans le commerce électronique. Le rythme du changement est tellement rapide qu'il est à en perdre le souffle. Il est possible qu'attendre cinq ans ce soit trop long et je recommanderais donc une période de révision tous les deux ou trois ans. Ce serait plus raisonnable et plus pratique.
Mme Sue Barnes: Merci.
Je voudrais vous parler des rapports...
La présidente: M. Cook n'a pas eu l'occasion de répondre.
Mme Sue Barnes: Oh, je m'excuse.
M. Paul Cook: Merci.
Je suggérerais des périodes de révision sur un an, trois ans et cinq ans et pas seulement à cause de la rapidité avec laquelle la technologie du commerce électronique évolue, mais aussi pour déterminer si la loi n'a pas eu des incidences imprévues ou accidentelles. Il ne faudrait pas qu'il y ait multiplication des dégâts et des difficultés avant d'intervenir. Nous avons besoin d'une bonne loi. S'il y a des problèmes, adaptons la loi. En conséquence, je crois qu'il faudrait prévoir une révision de la loi sur un an trois ans et cinq ans.
Mme Sue Barnes: Merci.
Le mémoire des banquiers canadiens évoque rapidement une question qui m'intéresse personnellement, et vous aussi d'ailleurs monsieur Gold. Ce projet de loi est relativement muet sur les problèmes liés aux enfants. Comme vous le dites dans votre mémoire, les banquiers leur offrent déjà des comptes personnels. Avez-vous pensé à un moyen de bien faire comprendre que le commerce électronique ne doit avoir en aucun cas d'impact négatif sur les enfants? Si vous n'y avez pas réfléchi, cela ne fait rien. Je poserai la question à quelqu'un d'autre.
M. Alan Young: Nous disons dans notre mémoire vouloir nous assurer du consentement ou de l'autorisation d'un tuteur ou d'un parent de mineur, mais nous n'avons pas examiné la question dans le contexte de la sécurité électronique.
Mme Sue Barnes: Très bien. Monsieur Gold, vous pourriez peut-être nous parler des problèmes des petits gâteaux et des enfants.
M. Robert Gold: De petits gâteaux et d'enfants plutôt que de petits gâteaux et de lait.
Le problème pour moi est de savoir de quelle entreprise il s'agit et quel régime de protection des renseignements elle offre. Nous estimons qu'il faut commencer par avoir l'autorisation des parents, ce qui n'est pas facile quand on est sur Internet. Un des meilleurs exemples sur Internet actuel, est Disney.com. Ce site divulgue toutes sortes de renseignements sur la vie privée des enfants de plus de 18 ans, de moins de 18 ans, sur leurs petits gâteaux favoris, ou sur leurs aversions pour les petits gâteaux. C'est un excellent exemple.
Au moment même où nous nous parlons il y a de nouveaux problèmes technologiques qui surgissent. La nouvelle puce Pentium III qui a été annoncée porte un numéro de série. Au début, quand elle a été annoncée, elle devait être installée branchée et toutes sortes d'organismes de protection de la vie privée aux États-Unis se sont bruyamment plaints. Maintenant cette puce est installée débranchée. Mais si, par inadvertance, vous la branchez ou si un site de vente avec son logiciel parvient d'une façon ou d'une autre à la brancher, il peut faire toutes les recherches possibles et inimaginables sur vous. Si vous trouvez mon sommaire, la dernière adresse du Web correspond à un site qui vous dira exactement ce qu'il sait sur votre ordinateur et c'est assez effrayant. Si vous cliquez vous apprendrez ma marque de petits gâteaux préférés, l'appareil que j'utilise et même la résolution de mon moniteur.
C'est très délicat et je suis très préoccupé par la protection des enfants.
Mme Sue Barnes: Revenons à l'Association des banquiers canadiens. Dans votre mémoire, vous mentionnez les agences de sous-traitance qu'utilisent actuellement les banquiers de concert les uns avec les autres. Avez-vous l'impression que ce projet de loi définit clairement quelles sont les responsabilités de vos sous-traitants au niveau des restrictions que comporte le projet de loi ou dans le cadre de vos relations contractuelles? Vous avez abordé le sujet, mais vous ne vous êtes pas beaucoup étendu.
M. Alan Young: Nous allons demander à M. Dessaulles de la Banque Royale de répondre à cette question.
M. Georges Dessaulles (vice-président, Conformité à la réglementation, La Banque Royale du Canada; Association des banquiers canadiens): Le code CSA définit la relation de mandataire. Nous, à la Banque Royale, faisons preuve d'une certaine diligence raisonnable dans nos relations avec un sous-traitant afin de nous assurer que ses pratiques sont conformes, à tout le moins, avec les dispositions de notre code. Voilà essentiellement ce que nous faisons actuellement, ce qui est conforme au code CSA.
Mme Sue Barnes: Madame la présidente, de combien de temps puis-je encore disposer?
La présidente: Ce sera votre dernière question, madame Barnes.
Mme Sue Barnes: Je vais m'en tenir à un commentaire dans ce cas. Je pense que la plupart des personnes autour de cette table conviennent que nous ne voulons pas de sanction, que c'est tout simplement la rançon des affaires. En outre, il faut maintenir un équilibre entre l'activité commerciale et la protection de la vie privée, sans faire l'un aux dépens de l'autre. Il nous faut aussi être réalistes et reconnaître que les Canadiens se préoccupent considérablement de leur vie privée et je dirais même, encore plus de la protection des renseignements sur leur santé, y compris les dossiers personnels qui peuvent contenir cette information. J'aimerais que nous examinions cela d'une façon beaucoup plus approfondie que nous ne l'avons fait jusqu'à présent. Toutefois, le tollé qui entoure ce projet de loi rend les choses difficiles.
Merci.
La présidente: Merci beaucoup, madame Barnes.
Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur Young, dans votre exposé, vous avez déclaré qu'à votre avis, il fallait imposer des limites à l'accès aux renseignements personnels que détiennent, je présume, les institutions financières. Pourquoi?
M. Alan Young: Par exemple, disons que nous soupçonnons quelqu'un de s'adonner à des activités frauduleuses et qu'une enquête soit en cours, si la personne demande l'accès à toute l'information à son sujet ou à tous ses dossiers, il pourrait se trouver quelque chose dans le dossier qui indique qu'une enquête est en cours. Évidemment, cela lui mettrait la puce à l'oreille. Voilà un exemple. Dans les cas de fraude, c'est un problème important pour l'ensemble du secteur financier.
M. Alex Shepherd: En d'autres termes, si vous proposiez un amendement, ce serait dans le cas des activités criminelles. Votre capacité à refuser l'accès reposerait sur de simples soupçons d'activité criminelle, est-ce que vous me dites?
M. Alan Young: Un de mes collègues aimerait ajouter quelque chose.
M. Andrew Finlay (conseiller juridique principal, Groupe du droit du travail, Banque de la Nouvelle-Écosse, Association des banquiers canadiens): Il n'y a pas que l'activité criminelle, mais je me rends compte qu'une certaine confusion semble entourer ce projet de loi. Évidemment, si nous menons une enquête criminelle, la police y participe. Le projet de loi aborde certains aspects d'une telle situation. Toutefois, il pourrait également s'agir d'une enquête interne sur ce que je qualifierais d'irrégularités qui ne sont pas nécessairement définies comme une fraude criminelle. Il pourrait par exemple s'agir d'un employé qui dévoile de l'information personnelle. Ce n'est pas un acte criminel.
M. Alex Shepherd: Voulez-vous dire à l'intérieur de l'entreprise. Cela n'a rien à voir avec une enquête criminelle externe.
M. Andrew Finlay: Exactement. Il pourrait s'agir soit d'un client soit d'un employé qui agit de façon inappropriée ou qui utilise des comptes de façon inappropriée. Il pourrait s'agir notamment de tirage à découvert qui peut être ou non considéré comme un acte criminel selon l'intention. Je ne sais pas si les gens comprennent ce qu'est le tirage à découvert, mais c'est ce que la plupart des étudiants à l'université font pour réussir à faire leurs études—sauf moi; j'aimerais faire valoir quelque chose. Le tirage à découvert est une forme de fraude. Il s'agit d'un usage impropre de son compte et d'instruments bancaires et donc chez un client, nous ferions enquête. Ou il pourrait s'agir de faire enquête sur un employé qui divulgue de l'information ou qui...
M. Alex Shepherd: Pourquoi ne pas permettre à l'intéressé d'avoir accès à ces renseignements? Cela ne met pas fin à votre enquête. La personne obtient tout simplement copie de l'information que vous avez actuellement sur lui ou sur elle au dossier.
M. Andrew Finlay: Au milieu d'une enquête?
M. Alex Shepherd: Oui. Pourquoi pas?
M. Andrew Finlay: Comme l'a dit Alan, cela pourrait prévenir la personne qui fait l'objet de l'enquête et lui permettre de prendre des mesures afin de freiner l'enquête.
M. Alex Shepherd: Très bien. Quelles limites imposer dans ce cas? Si vous utilisez ce pouvoir pour me tordre le bras et m'empêcher d'obtenir de l'information que vous possédez sur mon compte où cela doit-il s'arrêter?
M. Andrew Finlay: Une fois l'enquête terminée et les décisions prises, à ce moment-là, il est tout à fait raisonnable de donner accès à l'information à l'intéressé.
M. Alex Shepherd: Très bien, je ne comprends pas vraiment, mais quoi qu'il en soit...
Et maintenant monsieur Cook, dans votre mémoire, vous parlez de cette affaire en Colombie-Britannique. Quelles sont vos allégations? Voulez-vous dire que le gouvernement utilise à dessein les lois sur la protection sur la vie privée pour empêcher les créanciers de réaliser une garantie?
M. Paul Cook: Je vais vous raconter ce qui s'est passé. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a adopté une mesure législative aux termes de la Social Services Tax Act, euphémisme pour la Loi sur la taxe de vente provinciale. Aux termes de ces dispositions, le gouvernement peut créer ce qu'il appelle un privilège superprioritaire rétroactivement sur les arriérés de taxe de vente provinciale. Le gouvernement peut alors saisir l'inventaire donné en garantie à un fournisseur.
Par exemple, je vous fournis un produit et je sais qu'il y a quelques problèmes, mais il n'y a rien au bureau de crédit ni à Equifax ni à Dun & Bradstreet. Et personne n'a donné avis que vous étiez en arriéré d'impôt. Je décide donc que je vais faire preuve de diligence raisonnable et que je vais déposer un nantissement du prix d'achat; je vais vous donner 50 000 ou 100 000 $ de produits. Le lendemain, le gouvernement de la Colombie-Britannique se présente, saisit ma garantie, saisit mon inventaire et le vend pour liquider l'arriéré de taxe provinciale de vente alors que dans un deuxième temps, ce même gouvernement de la Colombie-Britannique, sous le prétexte d'assurer la protection de la vie privée, a gardé secret le fait que cette entreprise était en situation d'arriéré sur sa taxe provinciale de vente.
• 1640
Cela crée une situation perdante pour les investisseurs qui
veulent investir dans la province ou dans le pays et une situation
perdante pour les créanciers. En effet, vous vous dites, très bien,
je fais preuve de diligence raisonnable; je fais mes recherches sur
les entreprises; je fais les recherches dans le registre de
propriétés personnelles; je fais tout ce que je suis censé faire
pour savoir quels sont les risques, parce que c'est une question de
risque lorsque j'accorde du crédit ou lorsqu'un investisseur veut
investir de l'argent dans ce pays. Ensuite, après s'être lancé dans
le vide, un organisme gouvernemental dit: «Désolés, nous n'avons
pas pris la peine de vous dire que ce type avait des arriérés
d'impôt de 100 000 $ et que nous pouvons, rétroactivement, saisir
cette marchandise»—voilà exactement ce qui se produit actuellement
en Colombie-Britannique.
Voilà l'une de nos préoccupations vis-à-vis de la protection de la vie privée et de la surréglementation par le gouvernement de la divulgation de l'information.
Nous parlons également dans le mémoire d'un litige avec le gouvernement de la Colombie-Britannique au sujet du registre foncier. C'est là que l'on enregistre les privilèges. Ces privilèges représentent la décision d'un juge d'enregistrer un grèvement sur une propriété. Or, certains des administrateurs au sein du ministère ont déclaré, à l'origine, que non, ils n'allaient pas publier cette information parce qu'elle était assujettie aux lois sur la protection de la vie privée. Nous avons dû nous battre pour tenter de faire modifier cette décision.
Donc non, vous ne pouvez pas censurer l'information qui fait partie du domaine public, qui fait partie d'une poursuite en justice. Voilà néanmoins des circonstances réelles que nous avons vécues.
Heureusement, la logique l'a emporté et la décision a été renversée. Toutefois, le gouvernement a plus que triplé les frais demandés pour donner des informations sur les droits de rétention, ce qui dans le secteur de la construction a pratiquement obligé les entreprises à cesser toute activité.
Notre message est donc que nous sommes tout à fait d'accord pour que des renseignements confidentiels sur les consommateurs soient protégés, mais qu'il faut être très prudent dans le libellé de la loi afin d'éviter de créer des situations inattendues.
La présidente: Merci.
[Français]
Madame Lalonde, s'il vous plaît.
Mme Francine Lalonde: Merci. Madame la présidente, je voudrais revenir sur le mémoire de CGA-Canada, dont la première partie est extrêmement intéressante et précise. On dit:
-
Au lieu d'avoir une portée générale et d'assurer la
protection des citoyens canadiens, le projet de loi
C-54 se concentre, malheureusement, sur les aspects
commerciaux. Selon nous, le Canada a besoin d'une loi
de portée générale qui non seulement régisse les
activités commerciales, mais assure également la
protection des renseignements personnels dans
l'ensemble des secteurs de l'économie canadienne...
Pouvez-vous expliquer cette affirmation?
[Traduction]
M. John Yu: Madame la présidente, je suis entièrement d'accord avec Mme Lalonde. C'est exactement cela. Nous trouvons que le projet de loi n'est pas efficace parce qu'il se limite aux activités commerciales alors qu'il y a des tas de questions concernant la protection des renseignements personnels, en particulier en ce qui concerne les actes du gouvernement, qui ne sont pas traitées.
Nous comprenons toutefois pourquoi le ministre de l'Industrie a besoin de ce projet de loi, nous avons des engagements vis-à-vis l'OCDE et nous voulons développer le commerce extérieur. Donc, d'un côté nous jugeons que le projet de loi est nécessaire, d'un autre côté, nous voudrions que la vie privée des Canadiens en général soit mieux protégée.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup.
Madame Lalonde, je ne savais pas si vous attendiez d'autres réponses.
Mme Francine Lalonde: Non, je prenais le temps de réagir.
Monsieur Chercover, vous ne semblez pas trop vous plaindre de la Loi 68.
[Traduction]
M. Jackson Chercover: Nous nous sommes amèrement plaints lorsque le premier document de réflexion est sorti.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Ça, je le sais.
[Traduction]
M. Jackson Chercover: ...et, heureusement, la logique l'a emporté et nous avons eu la loi 68. C'est loin d'être parfait mais, un peu comme dans ce projet de loi, ce n'est pas draconien. En outre, nous estimons qu'à certaines exceptions près, la commission s'est montrée très rationnelle et pratique en interprétant ce projet de loi. Il y a un message que nous voudrions transmettre au gouvernement québécois et ce n'est peut-être la meilleure tribune pour le faire...
Des voix: Oh, oh!
M. Jackson Chercover: Le meilleur endroit, peut-être.
Le projet de loi donnait au gouvernement le droit d'adopter des règlements concernant la façon dont sont purgées les informations. Toutes les autres provinces qui réglementent les déclarations des consommateurs—par exemple, pour les faillites, c'est six ans en Colombie-Britannique et sept en Ontario... Equifax suit les normes les plus strictes et supprime les renseignements concernant les faillites après six ans dans tout le pays. Toutefois, le gouvernement québécois n'a pas usé de ce droit et la commission s'est arrogé le droit de décider combien de temps les renseignements pouvaient être conservés. Le résultat est que nous avons des décisions qui ne sont pas les mêmes partout, donc, tout ce que nous disons—merci, madame la présidente—c'est que Québec devrait se décider à adopter des règlements à ce sujet.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Je pourrai donc passer le message.
[Traduction]
M. Jackson Chercover: Merci.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Je trouve quand même intéressant le jugement qu'a passé M. Chercover, parce qu'Equifax est une compagnie qui, pendant un certain temps, a eu des problèmes au Québec. Il y a eu de mauvais dossiers. Finalement, je sais qu'il y a eu des discussions, des changements de votre part et... Récemment, je n'ai pas entendu de reproches à votre endroit.
J'insiste parce qu'ici, on a parfois décrit la loi québécoise comme étant trop exigeante. Or, il y a un point que j'ai régulièrement essayé de faire ressortir, et c'est le suivant. Les grandes entreprises au Québec se sont bien adaptées à la Loi 68. Les grandes entreprises peuvent le faire, de même que les banques, qui se sont conformées à la Loi 68. Vous m'apprenez qu'elles vont changer, mais elles s'y étaient conformées.
Pour les PME, c'est toujours plus long et plus compliqué. C'est vrai de toutes les lois, par exemple de ce qui s'est fait en santé et sécurité du travail; les grandes entreprises se conforment plus rapidement et les petites prennent plus de temps à le faire.
Alors, quand un citoyen se plaint et que le commissaire a le pouvoir de trancher en sa faveur, cela aide à ce que la justice s'exerce en faveur du citoyen. Autrement, la loi ne dessert que les consommateurs que de façon très générale. Quelqu'un qui est face à un vrai problème veut en voir la fin.
Vous, les CGA, avez dit que vous trouviez le processus de plainte très long et que, pour un individu, cela pouvait coûter très cher. Une société a de l'argent, mais un individu... Alors, dans la mesure où ce projet de loi doit aussi protéger les renseignements personnels, ce pourquoi j'ai plaidé et ce sur quoi j'aimerais avoir votre avis, le commissaire devrait avoir un vrai pouvoir qui lui permette de trancher.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Yu.
M. John Yu: Madame la présidente, que puis-je dire d'autre? Je suis tout à fait d'accord.
M. Jackson Chercover: Je pensais qu'il s'agissait au début d'une question qui m'était adressée.
Des voix: Oh, oh!
M. Jackson Chercover: Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord et je vais vous dire pourquoi si la présidente me le permet.
La présidente: Certainement, monsieur Chercover.
M. Jackson Chercover: D'après ce que je comprends, le projet de loi est rédigé de cette façon afin de permettre au Commissaire à la protection de la vie privée d'user de son pouvoir discrétionnaire lorsqu'une plainte lui arrive d'un résident du Québec. Il pourra dire à la personne présentant la plainte que cette plainte ne concerne pas une société sous réglementation fédérale, la banque, mais la société Equifax. Il peut alors dire au plaignant de se présenter à la Commission de l'accès à l'information, parce que c'est l'organisme provincial qui est habilité à traiter de la question en vertu de la loi québécoise. Est-ce une situation parfaite? Certainement pas.
Vous exposez, madame Lalonde, le plus grave problème de l'histoire canadienne. Notre système avec tous ses ordres de gouvernement et toutes ses lois provinciales qui ne concordent pas est l'un des plus gros coûts que supporte le secteur privé au Canada aujourd'hui. Ce n'était pas un problème en 1867. Cela ne convient plus toutefois à l'ère du commerce électronique de l'an 2000. Nous n'obtenons jamais que les provinces s'entendent. Lorsque les premiers ministres se réunissent, ils ne peuvent même pas se mettre d'accord sur une définition de l'environnement.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Madame la présidente...
[Traduction]
La présidente: Allez-y, mais c'est votre dernière question.
Mme Francine Lalonde: Si je puis dire cela en anglais, ce sera en effet une belle première. Vous savez, nous avons beaucoup essayé de vous aider.
Des voix: Oh, oh!
M. Jackson Chercover: Certains diront peut-être qu'avec ce genre d'aide et ce genre d'amis, on n'a pas besoin d'ennemis.
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Merci beaucoup.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Ma question maintenant.
[Traduction]
La présidente: Non, un peu plus tard.
[Français]
Madame Jennings, s'il vous plaît.
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci beaucoup, monsieur Chercover. Vous avez exposé ou expliqué, parfois mieux que nous qui sommes les élus, la situation ou la réalité qu'on vit quotidiennement depuis de nombreuses années. Mais je laisse les choses au point où elles en sont.
M. Jackson Chercover: Mais il faut comprendre que c'est... [Note de la rédaction: Inaudible].
Mme Marlene Jennings: Oui, oui. Premièrement, j'aimerais m'excuser auprès de vous d'avoir manqué une bonne partie de vos présentations; j'avais un autre engagement assez urgent. Je ne poserai pas de questions à ceux des présentateurs dont j'ai manqué la présentation.
Toutefois, j'ai eu la chance, pendant la séance, de parcourir votre mémoire écrit et j'ai également entendu M. Young affirmer que le commissaire avait trop de pouvoirs. Je vous poserai donc une question là-dessus. Mais j'aimerais d'abord en venir à votre question qui porte sur l'exemption de votre industrie.
Si je ne me trompe pas, l'alinéa 27(2)d) prévoit déjà la possibilité d'exempter un organisme ou une activité déjà régi par une loi provinciale similaire ou meilleure. Donc, je dois présumer que la compagnie Equifax pourrait fort bien être exemptée. Alors, pourquoi insistez-vous tellement pour que votre industrie soit exemptée dans la loi?
Deuxièmement, malgré cela, lorsque vous avez constaté que la recommandation d'exemption que vous aviez faite aux fonctionnaires d'Industrie Canada avant la rédaction du projet de loi n'avait pas été retenue, vous êtes-vous adressés à ces fonctionnaires pour leur en demander l'explication? C'est ma première question.
Ma deuxième question s'adresse à l'Association des banquiers canadiens et au Western Forum of Credit et porte justement sur leur opinion voulant que le projet de loi, tel qu'il est, accorde trop de pouvoirs au commissaire. Vous savez que plusieurs organismes quasi judiciaires ont exactement les mêmes pouvoirs qui se trouvent dans ce projet de loi. On n'a qu'à penser aux commissions d'enquête, aux commissions de police qui existent au Canada depuis 30 ans et aux comités d'examen des plaintes dans plusieurs secteurs qui ont justement ce genre de pouvoir.
• 1655
Je vous demande donc pourquoi vous voulez
soustraire les
renseignements personnels à la protection qu'un
organisme comme celui du commissaire à la protection
de la vie privée
pourrait leur accorder s'il disposait
de pouvoirs tels
que ceux de perquisition, de contraindre des
personnes à témoigner sous serment, etc.
Pourquoi?
[Traduction]
La présidente: Madame Jennings, vous aviez deux questions.
[Français]
Mme Marlene Jennings: Ce sont mes deux questions.
[Traduction]
La présidente: Je crois que la première question s'adressait à M. Chercover.
[Français]
Mme Marlene Jennings: Oui.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Chercover.
M. Jackson Chercover: La première question, si j'ai bien compris, était pourquoi je n'avais pas demandé aux légistes qui ont rédigé le projet de loi...
Mme Marlene Jennings: Je croyais que vous aviez déjà demandé cela avant que ne soit rédigé ce projet de loi. Quand vous avez vu l'avant-projet de loi et que vous avez constaté que les légistes n'avaient pas suivi votre recommandation, êtes-vous allé leur demander pourquoi?
M. Jackson Chercover: Nous en avons discuté.
N'allez pas croire que vous pensiez que je veux les critiquer. Si l'on pense au nombre d'intervenants dans ce processus, il y en a qui disent que le Commissaire à la protection de la vie privée devrait avoir plus de pouvoirs, d'autres qu'il en a déjà trop—et c'est pourquoi j'ai parlé de juste équilibre. On m'a répondu, je crois, qu'on avait fait tout ce qu'on pouvait dans les circonstances, mais qu'il ne fallait pas que j'hésite à en parler au comité de l'industrie. C'est pourquoi je suis ici.
Votre deuxième point, toutefois—et j'en aurai terminé—est que si les déclarations des consommateurs sont, comme nous le savons tous, régies par des lois provinciales, pourquoi demanderais-je une augmentation maintenant alors que le gouverneur en conseil peut garantir cette exemption? Son pouvoir d'exemption, si vous lisez correctement le libellé de cet article, consiste à exempter une province dont la loi est «essentiellement similaire». Le projet de loi C-54 vise spécifiquement à protéger les renseignements personnels alors que les lois concernant les déclarations du consommateur visent la protection du consommateur. Il n'y est pas question de «renseignements personnels» ou de «confidentialité», même si nous savons que c'est là l'objet de ces lois. Si vous pouviez m'assurer que le gouverneur en conseil, dans sa sagesse, conviendrait avec vous et moi que la Loi sur la protection du consommateur est une loi sur la protection des renseignements personnels, je retirerais cette demande.
Mme Marlene Jennings: Merci.
La présidente: Vouliez-vous répondre à la deuxième question, monsieur Young ou monsieur Finlay?
M. Andrew Finlay: Si j'ai bien compris la question, vous demandez pourquoi nous entendons des points de vue contradictoires sur les pouvoirs accordés au commissaire et à ses enquêteurs.
Mme Marlene Jennings: Non, je n'ai pas dit qu'il y avait des points de vue contradictoires. J'ai entendu un point de vue exprimé par M. Young, puis par M. Cook et c'était le même: à savoir que la loi, telle qu'elle est rédigée, donne trop de pouvoirs au commissaire. Il a en effet le droit de sommer à comparaître certaines personnes durant une enquête et de les obliger à témoigner oralement ou par écrit. C'est trop de pouvoir.
Ce que je disais, c'est qu'au Canada, nous avons des organes administratifs qui ont des pouvoirs quasi-judiciaires et que cela remonte au début de notre Confédération et à l'adoption du système juridique britannique. Il y a beaucoup de secteurs d'activité au Canada qui sont régis par des organisations de gouvernance qui détiennent de tels pouvoirs et je vous ai donné l'exemple des commissions de police. La police a été soumise exactement au même genre de choses. J'aimerais donc savoir pourquoi vous voudriez exempter des organisations qui s'occupent de recueillir, entreposer, diffuser ou transmettre des renseignements personnels de l'application de ce genre de pouvoir d'enquête.
M. Andrew Finlay: La Commission canadienne des droits de la personne est un autre organisme qui dispose de pouvoirs semblables. La commission s'occupe des droits de la personne. Je crois que certains estiment que nous créons des droits, dans le contexte des renseignements personnels. Mais si vous examinez soigneusement les pouvoirs d'enquête conférés par la Loi canadienne sur les droits de la personne, vous constaterez qu'ils n'arrivent pas à la cheville des pouvoirs de l'enquêteur, d'après ce projet de loi. Celui-ci permet en effet au commissaire, dans le cadre de l'examen d'une plainte, d'assigner et de contraindre des témoins à comparaître, de faire prêter serment, de recevoir des éléments de preuve. Et celui que j'aime bien, c'est le droit de s'entretenir en privé avec toute personne se trouvant dans un local visité. On ne sait pas trop bien si cette personne a droit à un avocat ou aux conseils d'un avocat.
Si on regarde maintenant la Loi canadienne sur les droits de la personne, on y parle de droits. Cette loi est très bien administrée, depuis nombre d'années. Il n'y a pas beaucoup de critiques au sujet des pouvoirs d'enquête, ni de préoccupations de qui que ce soit, et il n'y a pas les mêmes pouvoirs. Pour parler à quelqu'un ou pour entrer quelque part pour examiner des documents, il faut obtenir un mandat, qui sera accordé s'il y a des motifs raisonnables de le faire. Il est presque risible de dire que c'est une loi sur les droits et que par conséquent, on peut enfreindre les droits procéduraux fondamentaux, et compromettre l'équité de la procédure.
Si vous voulez parler d'autres organisations, je ne sais pas si l'on devrait se tourner vers la police, parce que la police et les droits... la procédure pénale est une chose, mais si vous voulez voir un modèle...
Mme Marlene Jennings: Je parle du droit administratif.
Andrew Finlay: Le droit administratif? Je pense que la Commission canadienne des droits de la personne est un excellent modèle à étudier, et que ce serait juste.
Mme Marlene Jennings: Et il y a bien d'autres modèles canadiens ou qui ont existé au Canada, avec les mêmes pouvoirs prévus dans ce projet de loi.
Lorsque j'ai parlé de la police, je ne parlais pas du pouvoir des policiers de visiter des lieux. Je parlais des commissions qui ont un pouvoir d'examen des plaintes du public contre la police. Ce genre d'organisme existe au Canada depuis les années 60 et ont exactement ce genre de pouvoir. Ce que je voulais dire, c'est dans le cadre du droit administratif, il y a de nombreuses organisations et de nombreux tribunaux administratifs qui ont des pouvoirs quasi judiciaires exactement semblables à ceux que ce projet de loi accorderait au commissaire et il y a de nombreux secteurs au Canada qui sont régis par ces lois.
La présidente: Merci, madame Jennings. Peut-être une réponse de M. Finlay et de M. Cook?
Andrew Finlay: Je vous signale qu'en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, de nombreux pouvoirs sont accordés à Revenu Canada, pour faire la même chose. Les tribunaux ne seront certainement pas d'accord. Il y a des divergences de vues, mais que vous acceptiez ou non que ces pouvoirs soient constitutionnels ou conformes à la Charte, c'est une chose, mais ce qui est intéressant, c'est le colossal volume de jurisprudence et de procès découlant de ce genre de loi, alors qu'il n'y en a presque pas au sujet de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il faut se demander si nous essayons de concevoir des lois qui encouragent la tenue de procès, ou si nous préconisons des lois qu'on aura tendance à respecter. Je pense que quelqu'un a choisi la mauvaise voie. C'est essentiellement ce que dit le secteur bancaire.
Mme Marlene Jennings: Merci
La présidente: Monsieur Cook.
M. Paul Cook: Merci.
Je suis d'accord avec l'ABC sur cette question. J'ai un point de vue assez particulier, parce que pendant 25 ans, j'ai été policier à plein temps ou à mi-temps, en Colombie-Britannique. Cette loi accorde au commissaire des pouvoirs que n'ont pas les policiers qui enquêtent sur des meurtres. Lorsqu'il s'agit de recueillir des preuves, le processus d'enquête est certainement distinct du processus judiciaire qui rendra la décision, ultimement. Je ne pense pas qu'il soit raisonnable...
Mme Marlene Jennings: Je vais vous interrompre. Renseignez-vous sur les pouvoirs du commissaire de police de la Colombie-Britannique. Je connais cette loi, et je peux vous dire qu'il a ces pouvoirs.
M. Paul Cook: Je le comprends, mais nous parlons ici du gouvernement—je vais vous lire le projet de loi. Voici l'un des pouvoirs énoncés:
-
de visiter, à toute heure convenable, tout local—autre qu'une
maison d'habitation—occupé par l'organisation, à condition de
satisfaire aux normes de sécurité établies par elle pour ce local.
Je pense qu'il est inconvenant de recourir à des pouvoirs administratifs conférés par diverses lois pour balancer notre Charte des droits et libertés, notamment, parmi les plus importants, le droit pour des particuliers ou des entreprises de ne pas subir d'intrusion gouvernementale.
À notre époque, je crois dangereux d'accorder des pouvoirs disproportionnés à un organisme d'enquête. De nos jours, je ne crois pas qu'il suffise de dire que parce que quelqu'un a fait quelque chose, on peut faire fi de ses droits et libertés.
Je le répète, il s'agit d'une personne assermentée. Cette personne pourrait, sous serment, faire des révélations qui pourraient l'incriminer. Au moins pour le cas d'un employé dont le salaire est le seul revenu familial, je pense que ce genre de pouvoir ou d'utilisation d'un pouvoir est injustifié.
La présidente: Merci monsieur Cook.
Il faut continuer, madame Jennings.
Mme Marlene Jennings: Très rapidement, d'après les règles de la preuve, si quelqu'un est obligé de témoigner devant un policier ou, dans ce cas-ci, devant le Commissaire à la protection de la vie privée, la preuve ne peut être utilisée pour toute autre procédure, si cette personne s'est incriminée elle-même. Au sujet de votre préoccupation quant aux droits qui seraient enfreints, ce que je voulais dire, c'est que nous avons déjà des systèmes comme celui-là, en plus de la Charte des droits. On a conclu qu'on n'enfreignait pas la Charte des droits, puisqu'il y a d'autres protections, comme le droit de la preuve.
La présidente: Merci beaucoup madame Jennings.
Mme Marlene Jennings: Merci.
La présidente: Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.
Je sais que nous manquons de temps, mais les propos de Mme Jennings m'intéressaient beaucoup. Cela faisait partie de mes questions.
La présidente: Très bien, puisque vous aurez beaucoup de temps.
M. Walt Lastewka: Je serais ravi de lui céder le temps qui m'est imparti, mais j'aimerais revenir un peu en arrière.
L'ABC affirmait que ce projet de loi, qui était censé être peu contraignant, a finalement un cadre plus sévère, etc. Je pense que ce qui manque, c'est qu'on aurait souhaité que le plaignant et l'entreprise règlent le problème sans intervention gouvernementale. Je peux donner d'autres exemples à l'ABC, au besoin. On aurait préféré que la banque et l'entreprise règlent leur litige plutôt que de faire intervenir l'ombudsman de la banque, etc. Je pense quÂon a prouvé jusqu'ici que la procédure de recours à l'ombudsman a été une bonne chose pour tous, pourtant. Je pense que c'est ce que préfère l'ABC.
Est-ce que cela ne revient pas au fait que le plaignant et l'entreprise doivent régler leurs différences sans l'intervention d'un tiers? N'est-ce pas là un cadre peu contraignant?
La présidente: À qui s'adresse cette question? À tous?
Monsieur Young.
M. Alan Young: Je crois que le paragraphe 13(2) du projet de loi prévoit, par exemple, qu'un plaignant doit d'abord épuiser les procédures de règlement de griefs existants, avant de s'adresser au commissaire. Comme vous l'avez dit, monsieur Lastewka, si nos clients sont préoccupés par la confidentialité de leurs renseignements personnels, nous préférerions certainement qu'ils s'adressent d'abord à la banque et que l'ombudsman de celle-ci s'occupe du dossier. Si la question n'est pas réglée à la satisfaction du client, elle pourrait ensuite être renvoyée au bureau de l'Ombudsman bancaire canadien.
Ainsi, en effet, j'estime que le projet de loi tient compte du fait que les clients se prévaudraient tout d'abord des services de l'ombudsman, tout au moins dans notre cas, du fait que nous disposons d'un processus auto-réglementation et très efficace de traitement des plaintes.
Mme Walt Lastewka: Voilà, selon moi, l'esprit du projet de loi. Lorsque le commissaire a comparu, il a dit très clairement qu'il fallait d'abord informer la population canadienne, et que le problème devrait être réglé au premier palier.
Permettez-moi de vous poser une question au sujet du respect de la vie privée. À votre connaissance, quelle est la menace la plus grave au respect de la vie privée dans le secteur bancaire à l'heure actuelle?
M. Alan Young: Rien de particulier me vient à l'esprit au sujet du respect de la vie privée. Nous avons établi des procédures pour contrer l'activité frauduleuse. À titre d'exemple, la fraude visant les cartes de crédit et les cartes de débit entraîne de graves conséquences. Nous veillons à établir des systèmes qui nous permettent de contrer les fraudeurs. Ainsi, pour le secteur bancaire, je crois que ce serait-là l'aspect le plus important.
M. Walt Lastewka: Vous voudrez peut-être répondre à ma prochaine question, mais je vais l'adresser tout d'abord aux représentants d'Equifax.
Vous avez soigneusement pris la peine d'expliquer pourquoi vous devriez être exemptés de certaines dispositions. L'aspect qui me vient à l'esprit est celui des entreprises de commercialisation qui effectuent l'achat et la vente de listes d'une province à l'autre. Devraient-elles être exemptées? Les émetteurs de cartes de crédit qui vendent des renseignements concernant les achats de leurs clients doivent-ils être exemptés? Où donc faut-il tirer la ligne en matière d'exemption?
M. Jackson Chercover: Votre question est fort valable. Equifax ne fait ni l'achat, ni la vente de listes. Je vous recommande de poser cette question au représentant de la Canadian Marketing Association. Pour ma part, je ne suis pas au fait des activités de vente interprovinciale de listes, mais il ne conviendrait pas, me semble-t-il, d'accorder une exemption dans un tel cas.
M. Walt Lastewka: Ne constituez-vous pas diverses listes de crédit d'information sur des millions de personnes pour les fournir ensuite à des membres?
M. Jackson Chercover: En effet, dans la mesure où ces derniers poursuivent des fins admissibles au terme des lois provinciales, c'est exactement ce que nous faisons. Cependant, il ne s'agit pas de listes, mais bien de rapports de crédit individuels. Parlez-vous de la compilation de listes?
M. Walt Lastewka: Non. Vous fournissez un service à diverses personnes, n'est-ce pas?
M. Jackson Chercover: En effet.
M. Walt Lastewka: Vous leur fournissez des renseignements que vous avez réunis au sujet de certaines personnes.
M. Jackson Chercover: En effet.
M. Walt Lastewka: Puis-je obtenir les renseignements qui ont été réunis à mon sujet?
M. Jackson Chercover: Êtes-vous membre d'Equifax? Dans le cas contraire, je vais vous transmettre une demande d'adhésion.
M. Walt Lastewka: Non, je suis un simple député, et je souhaite savoir quels sont les renseignements que vous avez réunis à mon sujet.
M. Jackson Chercover: Ah bon, vous souhaitez savoir ce que nous avons réuni à votre sujet. Oui, tout à fait.
[Français]
Mme Francine Lalonde: La loi du Québec
[Traduction]
vous accorde ce droit.
M. Jackson Chercover: Ce droit est prévu dans toutes les lois provinciales que je connais. Vous avez non seulement le droit de connaître le contenu du dossier, mais aussi de l'apprendre sans que cela ne vous coûte quoi que ce soit, et vous pouvez contester l'exactitude de tout élément d'information. Nous sommes alors tenus de vérifier l'information auprès de la source de crédit qui nous l'a fourni. Si l'information ne peut pas être vérifiée, il se peut qu'elle soit supprimée. Si elle est prouvée inexacte, elle doit être modifiée. Une fois qu'elle l'a été, nous sommes tenus de transmettre le rapport modifié à toutes les personnes qui nous avons transmis le rapport erroné au cours des six mois précédents.
M. Walt Lastewka: Donc, tout ce qui fait défaut...
[Français]
Mme Francine Lalonde: Il faudrait le vérifier dans la loi fédérale.
[Traduction]
M. Walt Lastewka: ...c'est que vous ne me l'avez pas demandé.
M. Jackson Chercover: Je ne vous ai pas demandé quoi?
M. Walt Lastewka: Vous ne m'avez pas demandé si vous pouviez recueillir ces...
M. Jackson Chercover: Je n'ai aucun lien contractuel avec vous, monsieur, mais lorsque vous vous êtes rendu à la banque pour demander un prêt, on vous a demandé de signer un document. Selon ce document, vous consentiez à la production de rapport de consommation de manière à ce que la banque puisse décider si elle souhaitait ou non vous prêter de l'argent, et vous avez également consenti à ce que cette information soit échangée avec des bureaux de crédit de manière à ce que d'autres personnes à qui vous pourrez soumettre une demande de crédit soient en mesure de déterminer votre solvabilité.
En prenant connaissance de mon document, vous constaterez qu'il n'existe aucun lien contractuel entre Equifax et le consommateur. Nous devons nous appuyer sur le consentement que vous avez accordé à votre institution financière, à Visa, ou à un autre établissement.
M. Walt Lastewka: C'est justement là où il faut prévoir l'aspect éducation du public dans le projet de loi. Ainsi, à la banque, je pourrais cocher le formulaire à l'endroit qui convient pour signifier que je ne souhaite pas que l'information circule ailleurs.
M. Jackson Chercover: Tout à fait. C'est un aspect intéressant. Si vous cochez pour dire que vous ne souhaitez pas échanger de renseignements concernant votre crédit avec les agences de renseignements sur la consommation, alors la banque doit pouvoir vous inviter à faire affaire ailleurs.
M. Walt Lastewka: Est-ce bien l'attitude de la banque?
Mme Sue Barnes: En effet.
M Alan Young: Évidemment, les banques doivent protéger les dépôts des déposants, etc. Il ne serait pas généralement acceptable de consentir un prêt sans avoir effectué une vérification de crédit.
La présidente: Merci, monsieur Lastewka.
[Français]
Madame Lalonde, avez-vous d'autres questions?
Mme Francine Lalonde: Je vais continuer. On voit l'importance d'avoir une disposition qui permette de voir son dossier et de le faire corriger au besoin. Or, une telle disposition n'est pas présente dans le projet de loi C-54. Cela n'existe pas.
M. Jackson Chercover: Excusez-moi, mais cela existe. Si vous lisez l'annexe, vous l'y verrez.
Mme Francine Lalonde: Oui, mais cela n'existe pas dans le cas du code CSA.
[Traduction]
M. Jackson Chercover: Oui, cela existe.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Vous n'avez pas le pouvoir de faire retirer ou changer...
[Traduction]
M. Jackson Chercover: Je vais le trouver.
Mme Francine Lalonde: Bon, faites donc cela.
[Français]
Je sais que je suis devant des gens pour qui une loi plus faible que celle du Québec pourrait être un atout, mais je ne suis pas certaine que ce serait le cas parce que le projet de loi C-54 a une faiblesse importante, soit la confusion entre le code CSA, qui n'a pas été conçu pour être une loi et qui comporte un certain nombre d'obligations mais aussi des recommandations—tous ces conditionnels ne sont pas des obligations—, et l'article 7 qui comporte un certain nombre de précisions pour interpréter le code CSA. Une grande entreprise qui a un bureau pour s'occuper de cela peut définir assez facilement, ou peut-être difficilement mais elle peut y arriver, une stratégie pour l'entreprise. Cependant, pour les petites et moyennes entreprises, il est extrêmement difficile de s'y retrouver et de savoir où est l'obligation. Si on ne sait pas quelle est l'obligation, il est encore moins intéressant de s'y conformer. Au moins, quand vous connaissez l'obligation, vous savez ce que vous faites ou ce que vous ne faites pas, mais vous le savez.
Pour le citoyen, c'est encore plus compliqué parce que déjà, dans le cas d'une loi claire, il peut ne pas connaître ses droits. Vous êtes d'accord avec moi, n'est-ce pas?
[Traduction]
La présidente: Madame Lalonde, la question portait sur le point 4.9 de l'annexe.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Oui, mais la démonstration est tout de même importante. Si le citoyen n'est pas capable de savoir quel est son droit, il ne pourra pas le faire respecter. Donc, il est essentiel qu'une loi comme celle-là définisse clairement les obligations et les droits, et j'affirme que le projet de loi C-54 pèche par un manque de clarté.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Chercover.
M. Jackson Chercover: Il m'a semblé que c'était là plutôt une déclaration qu'une question. Toutefois, si vous me permettez de réagir, je suis plutôt sympathique à votre argument, mais il vaut pour chaque loi de chaque pays, état, province et municipalité. Il y a des gens qui ne comprennent pas les lois. C'est peut-être pour cela que nous, les avocats, arrivons à gagner notre vie.
• 1720
Tout d'abord, pour ce qui est de votre premier commentaire
selon lequel le projet de loi 68 et la Loi sur les renseignements
concernant les consommateurs en Ontario sont des mesures efficaces
étant donné qu'elles exigent que les intéressés aient accès à leurs
dossiers et que toute erreur soit modifiée, c'est prévu dans
l'annexe. En effet, voyons le principe 9:
-
une organisation doit informer toute personne qui en fait la
demande
...c'est prévu dans la loi...
-
de l'existence de renseignements personnels qui la concernent, de
l'usage qui en est fait et du fait qu'ils ont été communiqués à des
tiers, et lui permettent de les consulter. Il sera aussi possible
de contester l'exactitude et l'intégralité des renseignements et
d'y faire apporter des corrections appropriées.
Ainsi, la première partie...
[Français]
Mme Francine Lalonde: Continuez, parce que cela n'est pas précis: «il aura la possibilité de contester». Cela veut dire que la compagnie...
[Traduction]
Mme Marlene Jennings: C'est tout à fait ce qui est visé par la rubrique 4.9.5.
M. Jackson Chercover: C'est ce que je crois. Mais, en tout cas, ne perdons pas de vue l'essentiel. Ce qui importe, c'est l'équilibre entre le degré de compréhension du public que vous souhaitez et que je favorise également, et l'aspect pratique qui consiste à fournir aux Canadiens le degré de protection qu'ils méritent d'avoir. Vous déclarez que le cas de CSA ne fait pas l'affaire. Vous avez peut-être raison, mais il faut voir la chose dans l'optique d'Industrie Canada et de Justice Canada. Ces ministères se sont engagés à proposer quelque chose d'ici l'an 2000.
Or, le code CSA, tout comme le projet de loi C-68 d'ailleurs, a été scruté à la loupe en Europe et en Australie et a fait l'objet de commentaires très favorables à presque tous les égards. Il me semble très novateur, madame Lalonde d'intégrer dans une mesure législative une norme qui, entre autres choses, correspond aux exigences de la direction européenne. Nous nous devons de le faire. Nous devons protéger le public tout en assurant la bonne marche des affaires. La mesure est-elle parfaite? Non.
La présidente: Merci, monsieur Chercover.
[Français]
Mme Francine Lalonde: [Note de la rédaction: Inaudible] ...vous allez finir par avoir votre exemption, j'en suis sûre.
[Traduction]
La présidente: Madame Lalonde, M. Young souhaite également répondre. Monsieur Young.
M. Alan Young: Merci.
Je voulais tout simplement aborder un autre aspect de la question de Mme Lalonde portant sur l'éducation des consommateurs. Nous sommes bien d'accord pour dire qu'il s'agit là d'une dimension très importante de la sensibilisation à l'importance de la protection des renseignements personnels et du respect de la vie privée.
J'aurais deux commentaires à faire. Tout d'abord, cela est prévu dans le projet de loi C-54. Le commissaire fédéral a un rôle extrêmement important à jouer en matière d'éducation, et nous nous en réjouissons. Pour nous, l'éducation des consommateurs est d'une extrême importance.
Le deuxième élément, c'est que quand dans une brochure intitulée La sauvegarde de vos intérêts, qui a été remise à tous les membres du comité—si vous n'en avez pas, je me ferai un plaisir de vous en remettre une—l'ABC aborde la question de la protection de la vie privée et donne des renseignements sur les pratiques bancaires. Nous aussi, nous avons assumé volontairement la responsabilité de participer à l'éducation des consommateurs; 85 000 copies de ce document ont été distribuées à des Canadiens et des milliers d'autres ont été téléchargées à partir du site Web de l'ABC. L'éducation est donc importante pour nous.
Nous assumons notre rôle et nous pensons que le commissaire à la protection de la vie privée a aussi son rôle à jouer.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Young. Nous serons heureux de recevoir des exemplaires de cette brochure. Nous ne l'avons pas.
Monsieur Murray.
M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci, madame la présidente.
Nous n'entendons plus parler de WebTrust depuis un certain temps. N'importe qui peut répondre. M. Gold a peut-être des idées. Je n'ai pas besoin de faire référence à WebTrust, mais ce pourrait être n'importe quelle entreprise qui serve les mêmes objectifs que WebTrust.
Je pense que les forces du marché se révéleront peut-être plus puissantes que la loi en ce qui concerne les affaires sur Internet. Nous envisageons de réviser cette loi tous les ans, tous les trois ans ou tous les cinq ans ou selon le rythme de l'évolution de l'industrie, mais il me semble qu'un outil comme WebTrust est peut-être plus puissant pour protéger les intérêts des consommateurs que la loi, il est peut-être mieux connu.
• 1725
J'aimerais savoir si, d'après vous, nous serons un jour
essentiellement protégés par un produit disponible dans le
commerce, avec une intervention secondaire de la loi.
La présidente: Monsieur Gold.
M. Robert Gold: Vous avez tout à fait raison. Ce que l'on a constaté aux États-Unis, particulièrement à l'occasion des achats de Noël, c'est l'effet multiplicateur des achats par Internet. On constate deux choses. Il y a un mouvement qui se développe à la base, car les gens commencent à se familiariser avec ce nouveau médium, et on remarque aussi une génération Internet des gens de moins de 25 ans qui n'ont pas peur d'utiliser leurs cartes de crédit sur Internet et de communiquer des renseignements personnels. Ceux de plus de 25 ans ont plus de retenue, ils ont parfois été victimes de fraude à cause de leur carte de crédit et veulent savoir ce qu'il advient des renseignements qu'ils peuvent fournir. Il y a donc une dichotomie entre la génération élevée devant l'ordinateur et la génération élevée devant la télévision, dont nous faisons partie.
Pourtant, au Canada, les transactions commerciales électroniques sont loin d'être aussi nombreuses. Dans le Report on Business de cette semaine, on peut lire que d'après de récents sondages, la protection de la vie privée devient la principale préoccupation parmi les utilisateurs d'Internet, avant même les questions de censure.
Tant que les consommateurs sur Internet et les utilisateurs de ce réseau au Canada n'auront pas reçu certaines assurances concernant la protection de la vie privée, je ne crois pas qu'ils se précipiteront en grand nombre pour acheter sur Internet.
Aux États-Unis, malgré les centaines de millions de dollars dépensés sur Internet en décembre, ces transactions ne représentent que moins de 1 p. 100 de l'ensemble du marché de détail, qui se chiffrent en billions de dollars.
Le commerce électronique signifie-t-il quelque chose? Certainement, il signifie des centaines de millions de dollars. Actuellement, dans la situation globale du commerce, il ne signifie pas grand-chose. Je définis le commerce électronique comme l'échange d'information, et non pas uniquement les transactions financières. Si vous me donnez votre nom, votre numéro de téléphone et votre adresse postale, c'est un échange commercial électronique.
Je crois qu'à mesure que la génération Internet va prendre de l'âge, le mouvement de la base va vaincre les hésitations, mais au Canada, nous essayons de devancer le reste du monde dans l'environnement du commerce électronique. C'est ce que veut faire le premier ministre et c'est apparemment l'objectif de la mesure législative en préparation. Allons de l'avant. Nous vivons déjà dans un environnement câblé, nous avons plus de satellites, de téléphones cellulaires et de connexions par habitant que tout autre pays au monde. Je crois qu'il faut passer à l'étape suivante.
Les consommateurs ont besoin de voir quelque chose à l'écran, que ce soit WebTrust ou autre chose, qui leur montre que leur vie privée est protégée et qu'ils n'ont pas à craindre d'utiliser Internet pour échanger de l'information. Et nous verrons bien ce qu'il faut faire pour prendre de l'avance sur les autres et faire progresser le Canada. Je ne pense pas que la solution soit de garder la loi enterrée dans les officines du pouvoir et de laisser le public dans l'ignorance. La réponse, c'est quelque chose que chacun pourra voir à l'écran.
La présidente: Merci.
M. Ian Murray: Le marché finira par prendre les choses en main.
M. Robert Gold: Je suis d'accord.
La présidente: Monsieur Yu.
M. John Yu: Aux États-Unis, particulièrement, on voit beaucoup de sceaux émis par le Better Business Bureau et intitulés «BBB On-line». On trouve des milliers de ces sceaux sur les sites web; c'est donc le marché qui s'exprime.
Je ne pense pas que le commerce électronique au Canada ait quoi que ce soit à voir avec la confiance des consommateurs. Notre problème, dont je voudrais parler pendant quelques instants, c'est la vétusté de notre régime fiscal.
M. Jackson Chercover: Bravo!
M. John Yu: Absolument.
La présidente: Merci, monsieur Murray.
La réunion de cet après-midi a été très intéressante. Juste avant de nous séparer... Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka: Dans le cadre de notre souci constant d'amélioration, j'aimerais déposer environ 29 amendements qui seront distribués par la greffière dans les deux langues officielles.
La présidente: Merci.
Mme Sue Barnes: Mais pas uniquement...
La présidente: C'est le début des amendements.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Une citation de la loi.
[Traduction]
La présidente: La greffière les distribuera demain quand elle aura pu en faire des copies. Chacun pourra alors les étudier.
Je tiens à rappeler aux autres membres du comité qu'ils ont intérêt à présenter leurs amendements le plus tôt possible pour que nous ayons le temps d'en prendre connaissance, de les étudier et d'en parler, et de voir s'il y a lieu ou non d'en apporter d'autres.
Je tiens encore une fois à remercier nos témoins.
Je tiens à préciser quelque chose pour le compte rendu. M. Chercover a dit que si l'on voulait modifier quelque chose dans son dossier, on pouvait le faire. Est-ce la même chose pour les banques, monsieur Young? Si je veux modifier mon dossier auprès de la banque, est-ce que je peux le corriger ou en supprimer des éléments?
M. Alan Young: Oui, vous pouvez demander à faire modifier vos dossiers.
La présidente: Merci. Un membre du comité a soulevé cette question tout à l'heure.
Mme Francine Lalonde: Ce n'est pas dans le projet de loi C-54. Chez Equifax, on peut le changer.
[Traduction]
La présidente: Non, la question a été soulevée tout à l'heure par M. Pankiw. Il sera ici cet après-midi, et je tenais simplement à préciser les choses auprès des banques, qui n'étaient pas là au début de nos travaux d'aujourd'hui.
Encore une fois, je remercie chacun d'entre vous d'avoir pris le temps de venir nous voir. La séance est levée