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Merci, madame la présidente et distingués membres du Comité. Je suis honorée de pouvoir témoigner devant le Comité permanent au sujet de l'état des musées.
La mine souterraine de Bellevue, dont je suis l'ancienne présidente, est une ressource historique provinciale de l'Alberta et un musée reconnu par l'Alberta Museums Association. Je suis l'ancienne présidente et l'ancienne directrice exécutive de ce musée, qui est situé à Crowsnest Pass, en Alberta. Je termine actuellement un diplôme en gestion des ressources culturelles. J'étais la première directrice de la mine sans aucune connaissance ou expérience antérieure dans le domaine des musées.
La mine souterraine de Bellevue est la seule mine souterraine historiquement authentique qui est accessible au public dans l'Ouest canadien. Elle est ouverte de mai au début de septembre pour les visites sans réservation et, le reste de l'année, on accepte des visites uniquement sur réservation. Le personnel interprète l'histoire de l'exploitation du charbon à Crowsnest Pass sous l'angle de l'immigration, de l'édification des collectivités, de la croissance économique locale et du Canadien Pacifique. La mine souterraine de Bellevue reçoit, chaque année, 22 000 visiteurs. C'est là tout un exploit, sachant que le site est à 200 kilomètres du centre urbain le plus près et qu’il se trouve dans une collectivité de seulement 5 589 habitants.
Comme l'ont dit d’autres témoins avant moi, les musées, les sites historiques et les institutions culturelles contribuent à la santé, au bien-être, à l’économie et à l’environnement du Canada. Ainsi, la mine génère des retombées en revenus dans une petite localité dont l’assiette fiscale commerciale rétrécit de plus en plus.
La situation de la mine est comparable aux circonstances auxquelles font face d’autres musées et sites historiques ruraux. Cependant, nous devons assumer un fardeau supplémentaire: entretenir un tunnel de roulage minier authentique d'une longueur de 1 000 pieds, soit 300 mètres, et des portails d’entrée de béton. La grande priorité de la mine souterraine de Bellevue est de maintenir son authenticité tout en assurant la longévité et la pérennité du site. Au nombre des défis que nous devons relever, mentionnons le fait qu'en plus d'entretenir le tunnel, l'organisation doit également recueillir des fonds pour la remise en état des portails de béton de la mine. Ces deux projets coûtent cher. Toutefois, grâce au travail bénévole de houilleurs qualifiés, nous parvenons à réduire le coût de la main-d'oeuvre et des matériaux utilisés dans le tunnel.
Ces mineurs bénévoles âgés passent des centaines d’heures à effectuer des travaux de réfection et à recueillir des dons de matériaux et d’équipements. Au cours des 10 dernières années, ils ont permis de maintenir les frais d’entretien du tunnel sous la barre des 30 000 $ par année. Si jamais nous devions perdre leur expertise, la solution de rechange consisterait à retenir les services de consultants, d’ingénieurs et d’entrepreneurs, ce qui pourrait coûter des millions de dollars.
Le manque de moyens financiers est l’une des raisons pour lesquelles le tunnel et le portail n’ont pas pu faire l’objet d’une étude d’ingénierie ces dernières années. Il est déconcertant de voir que ces hommes — dont la plupart ont plus de 60 ans — s’évertuent à maintenir le site ouvert, sans grande aide de l’extérieur. En plus de l'entretien du tunnel, les mineurs assureraient également l'entretien des portails, mais il s’agit là d’un projet distinct de remise en état qui nécessite le recours à des études géotechniques, des ingénieurs, des architectes et des spécialistes de la conservation. Une injection massive de fonds est essentielle pour la remise en état des portails et du tunnel minier. Il est irréaliste de croire que huit personnes — et c'est à peu près tout — puissent recueillir les capitaux nécessaires pour assurer la sécurité et la restauration du site.
Même si la popularité de la mine souterraine de Bellevue continue d'augmenter, comme en témoigne le nombre croissant de visiteurs en provenance du Canada et de l'étranger, il y a un immobilisme quant à son avenir. Il est inconcevable que ce petit groupe dispose un jour de la capacité de répondre aux besoins financiers écrasants de la mine souterraine de Bellevue. Sans une importante infusion de capitaux, l'Alberta perdra ce site historique.
Il existe un écart important entre, d'une part, notre financement et nos ressources et, d'autre part, ceux des musées nationaux et des sites sans but lucratif gérés par l’État. Par exemple, le centre d’interprétation du glissement de Frank — un site historique provincial, à deux kilomètres de la mine — reçoit les mêmes groupes scolaires et visiteurs que le musée de la mine souterraine de Bellevue. Comme il s’agit d’un centre administré par l’État, on y emploie des préposés à l’accueil, des concierges et des programmeurs. Le centre compte également des installations spacieuses qui peuvent accueillir de grands groupes.
À l'opposé, le bâtiment d'orientation de la mine est un ensemble de deux garages. On peut y accueillir à peine 30 personnes ou un groupe scolaire de taille moyenne. Si plusieurs groupes se succèdent, le deuxième groupe doit attendre à l’extérieur, beau temps mauvais temps. Les deux salles de bain, qui sont de qualité inférieure, ne suffisent pas pour des groupes d’écoliers et de voyageurs de taille moyenne. Le directeur exécutif s’occupe de tout, de l’administration jusqu’au nettoyage des toilettes. Le centre d’interprétation du glissement de Frank verse un salaire de 18 $ l’heure à ses guides-interprètes, alors que le musée de la mine arrive à peine à payer 15 $ aux siens. Le directeur exécutif de la mine touche 3 $ de plus par heure qu’un guide-interprète du centre d’interprétation. L’écart dans les taux de rémunération et les conditions de travail entre les deux sites fait en sorte qu’il est difficile d’attirer des spécialistes du secteur muséal et de retenir les guides-interprètes formés.
Même si le musée de la mine de Bellevue n’a pas la chance d’embaucher un programmeur ou d’organiser des expositions professionnelles, il obtient sans cesse des taux de satisfaction élevés et enregistre un nombre important de visites de retour. Il est décourageant pour le personnel et les bénévoles de savoir que, malgré leurs efforts inlassables et la popularité du site, ils ne sont pas en mesure d’offrir de nouveaux programmes ou services après 30 ans d’existence du musée. En raison de l'infrastructure inadéquate et du manque de personnel, il leur sera impossible de continuer à répondre à l'augmentation annuelle du nombre de visiteurs. C'est un site populaire.
En tout cas, il s'agit là d'une question secondaire par rapport à la difficulté de recueillir les fonds nécessaires pour maintenir la sécurité du tunnel et du portail. À une certaine époque, les sociétés minières locales accordaient des dons importants et des fonds de commandite au musée de la mine souterraine de Bellevue. Aujourd’hui, elles mettent l'accent sur la santé et le bien-être des collectivités, ce qui est tout à fait admirable, mais cela n'aide pas à la viabilité à long terme du musée. C'est d'ailleurs ce que révèlent des entretiens avec une société minière de la Colombie-Britannique, laquelle a indiqué qu'avant de s'engager à faire des dons considérables, elle serait tenue de confirmer qu'il y a un engagement substantiel de la part du gouvernement.
Nous avons quelques recommandations qui visent, en grande partie, l'ensemble des musées.
Tout d'abord, nous avons besoin de subventions souples et adaptées aux besoins des musées canadiens de toutes les tailles. À la page 3 du mémoire de l’Association des musées canadiens à l’intention du Comité permanent, on trouve un tableau sur la taille et les budgets d’exploitation des musées de l’ensemble du Canada. L’échantillon révèle que 62 % des musées sont dotés d’un budget d’exploitation de moins de 500 000 $. Vu le nombre de petits musées ayant un financement de subsistance, il serait bien d’assurer une répartition plus juste des fonds entre les musées gérés par l’État et les musées sans but lucratif. L’octroi de nouvelles subventions destinées à répondre aux besoins des musées ruraux serait un avantage additionnel.
Il faut également des subventions qui appuient chaque étape de croissance d'un musée ou d'un site historique. Les subventions devraient favoriser la transformation d'une organisation en un musée reconnu. Le modèle des bibliothèques pourrait être intégré afin de recueillir des fonds supplémentaires pour les musées et les sites historiques. Des fonds de dotation, comme ceux établis pour les arts visuels et les arts de la scène, pourraient donner un regain de vigueur aux musées et aux sites historiques.
Les recommandations que je viens de mentionner sont d'ordre général, et elles seraient utiles pour les musées à long terme. Or, le temps presse pour le musée de la mine souterraine de Bellevue, ce qui est bien dommage; compte tenu de son histoire captivante et de son nombre de visiteurs, il est justifié d'investir dans son avenir. Le musée n'atteindra jamais son plein potentiel s'il ne reçoit pas un financement considérable, en temps voulu, de la part du gouvernement provincial ou fédéral.
Je vous remercie encore une fois d'avoir lancé cette étude importante, et merci du temps que vous m'avez accordé ce matin.
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Je vous remercie infiniment de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui. Je me sens honorée d'être ici et de vous faire part de mes réflexions.
Je me suis dit qu'il serait utile de vous fournir quelques renseignements biographiques. Je suis née à Toronto et j'ai obtenu un baccalauréat en beaux-arts. J'ai déménagé au Royaume-Uni dans les années 1990 pour obtenir un diplôme d'études supérieures en histoire de l'art à l'Université de Leeds et, par la suite, j'ai occupé des postes de gestion et de leadership à Vancouver, à la Tate Gallery à Londres pendant huit ans et, plus récemment, au musée d'art contemporain de Chicago, avant de retourner au Canada pour assumer les fonctions de directrice exécutive et de présidente du Museum of Contemporary Art Toronto Canada, ou MOCA.
Comme bon nombre d'entre vous le savent peut-être, le MOCA ouvrira bientôt ses portes au public dans un nouvel espace de cinq étages: un édifice industriel patrimonial qui offre plus de 55 000 pieds carrés d'espace d'exposition, de programmes publics, de locaux d'apprentissage et de bureaux. Le musée se targuera d'avoir 20 employés permanents à temps plein et un budget de fonctionnement annuel de 8 millions de dollars.
Ma migration professionnelle et ma vaste expérience auprès de différentes institutions dans différentes disciplines, en collaboration avec des collègues internationaux dans divers pays, ont forgé ma sensibilité et ont fait de moi une créature hybride inusitée dans le monde des musées. Même si mon point de vue pourrait être considéré comme progressiste ou même avant-gardiste, je sais que les spécialistes des musées partout dans le monde tentent de comprendre le nouveau contexte mondial du musée du XXIe siècle. Il y a là matière à réflexion.
Je suis convaincue que l'expérience artistique, l'inspiration et les réactions que provoque l'art peuvent permettre aux gens de se comprendre et de comprendre le monde qui les entoure. Je crois que l'art contemporain et les artistes posent des questions difficiles et incitent les gens à réfléchir et à donner libre cours à leur imagination, et ce, de manière nouvelle et différente, en faisant preuve d'une plus grande curiosité et, nous l'espérons, d'une plus grande civilité.
Les musées sont les vestibules où se produit un échange entre l'art, les artistes et les visiteurs. Notre travail, en tant que professionnels, est de créer des espaces pertinents qui font en sorte que les musées reflètent le monde dans lequel nous vivons, ainsi que la diversité et la pluralité.
En ce moment, je dirais que les musées sont en difficulté, car ils n'ont pas la souplesse voulue pour se réinventer. Ils accordent trop d'importance à leur expertise et prétendent ainsi faire autorité en matière de pertinence culturelle. Je crois que c'est parce qu'ils n'ont pas examiné comment le monde autour d'eux a changé ou encore parce qu'ils ne savent pas comment évoluer en fonction de ces changements. Il vaut la peine de souligner que de nombreux musées de petite et moyenne taille ne changent que très lentement.
Pour moi, la question de la pertinence a retenu mon attention pendant des décennies, et c'est d'ailleurs assez intéressant. Les musées doivent en tenir compte, et c'est là un aspect déterminant de nombreuses pratiques exemplaires à l'échelle mondiale. Je crois qu'il vaut la peine d'examiner et de se demander, dans le contexte canadien, comment les musées peuvent devenir plus pertinents au XXIe siècle pour les Canadiens.
Selon moi, nous devons d'abord tenir compte de l'auditoire ou du public. La plupart des musées de grande ou moyenne envergure ont du mal à retenir leur auditoire et à attirer une clientèle plus jeune. D'après le profil démographique des visiteurs de la plupart des musées, il s'agit surtout d'une clientèle de race blanche et d'âge adulte, du moins dans le domaine des arts visuels, sans compter les caractéristiques démographiques du personnel, des administrateurs et du bassin des donateurs. Dans tous ces cas, le financement et le soutien se font de plus en plus rares. Si nous ne remplissons pas notre obligation culturelle de répondre aux besoins des auditoires au-delà des modèles traditionnels, notre pertinence tout au long du XXIe siècle sera gravement menacée parce que nous ne serons pas au diapason des multiples pratiques culturelles ou des diverses collectivités que nous servons.
Selon l'étude « Culture Track » de 2017, une initiative menée par la société de consultation américaine, LaPlaca Cohen — et je sais que vous en avez entendu parler —, les auditoires ne font plus la distinction entre la grande et la petite culture. Pour le consommateur de culture, aller à une foire de rue a la même valeur qu'assister à un opéra. Le visiteur considère qu'une expérience est réussie s'il a pu apprendre quoi ce soit, faire quelque chose de nouveau, s'amuser et faire preuve d'engagement social. Les musées qui défendent l'idée que leur seule responsabilité consiste à assumer le rôle singulier et notable de gardiens d'objets et ceux qui croient occuper une position spéciale et unique risquent d'être déphasés par rapport au public contemporain.
À mon avis, le défi que doivent relever les musées est de déterminer comment différencier une expérience des autres possibilités, de le faire avec intégrité et de trouver la meilleure façon de lier l'art et les idées avec les intérêts et les ambitions des communautés pertinentes partout dans le monde. Au MOCA, nous visons à être un musée à l'écoute des gens et un endroit accueillant où nous chercherons à établir une relation réciproque avec la collectivité, le public et le monde; nous sommes résolus à miser sur un dialogue continu dans le cadre de toutes nos activités. Les musées doivent tendre l'oreille.
Il y a 20 ans, le Harvard Business Review publiait un article intitulé « How the Arts Can Prosper Through Strategic Collaborations », c'est-à-dire comment les arts peuvent prospérer grâce à des collaborations stratégiques. En voici un extrait:
Les arts ont été durement touchés par la diminution des auditoires et l'alourdissement de la dette. Le financement gouvernemental a fait l'objet de compressions draconiennes, et de nombreuses sources de financement... ont réservé des subventions pour des programmes particuliers, si bien qu'il y a moins de fonds disponibles pour les budgets de fonctionnement généraux.
Cet article portait exclusivement sur la situation aux États-Unis, mais son contenu pourrait s'avérer pertinent aujourd'hui au Canada. Les organismes artistiques et culturels dans le monde entier doivent redoubler d'efforts pour ce qui est d'établir des partenariats avec les entreprises, l'industrie et les sociétés de haute technologie. Ils doivent offrir une expérience captivante et pertinente aux visiteurs et générer des revenus dont ils ont grandement besoin.
Alors que notre industrie cherche à être pertinente et à rejoindre le public, il lui serait infiniment utile que le gouvernement joue un rôle pour faciliter les collaborations entre les secteurs culturel et privé afin qu’ils échangent leurs pratiques exemplaires. Il pourrait notamment s’agir de pratiques exemplaires concernant les avancées technologiques, l’expertise en matière de stratégie de service à la clientèle, les renseignements sur la recherche et la psychologie du consommateur.
Le Cooper-Hewitt design museum à New York a lancé un exemple dynamique de pareille collaboration en 2014. Il s’agissait d’un style interactif qui permettait aux visiteurs de concevoir de nouveaux projets à partir de la collection permanente et de verser ces travaux à un répertoire permanent. Il a été créé en partenariat avec Hewlett Packard, Local Projects et Sistelnetworks, chef de file dans le domaine de la technologie sans fil. Le gouvernement fédéral pourrait favoriser pareils partenariats en créant des réseaux interdisciplinaires chargés de recueillir des données sur les nouvelles pratiques, les pratiques exemplaires et les travaux de recherche des meilleurs dans la catégorie.
Je suis intéressée de voir comment le gouvernement pourrait mener une discussion à l’échelle nationale sur la culture et la croissance économique. Un exemple très bien appuyé est celui du lancement, par le Parti travailliste du Royaume-Uni, de l'image de marque « Cool Britannia » dans les années 1990. C’était un modèle de campagne intéressant qui célébrait l’image publique moderne de la Grande-Bretagne avec un nouveau type d’industrie et de main-d’oeuvre. Je vivais à Londres à l’époque et je pense que cette campagne était perçue comme une occasion de redéfinir l’avenir économique. On s’en servait pour tenter de réimaginer l’Angleterre comme un lieu d’entrepreneurs créatifs de toutes les sphères de la société plutôt qu’un simple regroupement d’usines et de banquiers de Fleet Street.
« Cool Britannia » a alimenté les industries créatives et rehaussé la prospérité. Elle a fait de villes industrielles auparavant ordinaires comme Manchester des destinations culturelles; elle a interrelié les arts et les entreprises, revitalisé les zones urbaines et attiré des travailleurs qualifiés. Cultural Capital: The Rise and Fall of Creative Britain de Robert Hewison, publié par Verso en 2014, est un bon livre qui mérite d’être cité.
Des musées comme le MOCA sont résolus à générer et à favoriser du contenu canadien. Il nous serait utile, alors que nous nous occupons de jeunes artistes et de producteurs culturels, de bénéficier d’ambassadeurs internationaux qui feraient valoir et souligneraient les qualités, les avantages, l’ingéniosité, le talent et la pluralité de la culture canadienne à l’échelle mondiale.
Enfin, le leadership et le mentorat sont des thèmes communs qui sont ressortis des nombreuses présentations que vous avez entendues à ce jour et qui, selon moi, profiteraient aux Canadiens ainsi qu’au MOCA. À cette fin, il y a deux excellents programmes de leadership à considérer ou à examiner, dont l’un offre des débouchés aux Canadiens. Au Royaume-Uni, le Clore Leadership Programme favorise la croissance professionnelle des muséologues et, aux États-Unis, le programme du Getty Leadership Institute, que j’ai suivi, aide des directeurs culturels et des directeurs de musée chevronnés du monde entier à devenir de meilleurs leaders et vise à renforcer leurs propres capacités institutionnelles ainsi qu’à faire avancer le domaine international des musées.
Comme tant de personnes talentueuses sont venues au Canada au cours des dernières années, je pense aussi que le gouvernement a la possibilité d’instaurer un programme de mentorat officiel dans le cadre duquel les directeurs de grands et de moyens musées, surtout ceux qui ont acquis de l’expérience ailleurs, seraient encouragés à former des partenariats avec des collègues mentors de petites institutions. Le mentorat est un élément essentiel de programmes comme celui du Center for Curatorial Leadership à New York, et il ne limite pas l’apprentissage à la salle de cours.
Dans la même veine s’inscrivent le renforcement des capacités et la philanthropie au Canada. Bien qu’il s’agisse de systèmes différents qui n’ont pas les mêmes origines, nous savons que, aux États-Unis, 373 milliards de dollars sont versés par des particuliers, des fondations et des entreprises et que les dons sont de deux à 20 fois plus élevés chez eux que chez nous.
Les années que j’ai passées au MCA à Chicago m’ont appris à comprendre l’histoire de la philanthropie aux États-Unis ainsi que les traditions sociopolitiques qui la sous-tendent. Je pense qu’il serait bon pour le Canada de tirer parti de cette pratique exemplaire et que les professionnels des musées de taille moyenne pourraient apprendre à mieux entretenir les liens avec les donateurs, chose qu’ils ont besoin d’apprendre.
En terminant, pour ce qui concerne les questions de l’accès, de l’équité et de l’inclusion, nous savons qu’il est difficile d’approfondir le répertoire de personnes talentueuses et de leaders dans le secteur muséal canadien. Le réseau est limité chez nous. Le défi est aussi de taille étant donné que les professionnels des musées ne sont pas représentatifs des groupes socioéconomiques et raciaux au pays. Pour une personne qui bâtit au Canada un musée d’art contemporain en vue sur la scène internationale et qui espère être un chef de file en matière de pratiques exemplaires, il est difficile de trouver les compétences et l’expertise de l’industrie au pays. Il est aussi difficile de former une équipe qui reflète la diversité et la pluralité des voix au Canada. Une initiative qui permet la croissance du mentorat et du leadership et qui contribue à diversifier le secteur muséal au Canada afin qu’il reflète la complexité et l’excellence de ce pays serait bien accueillie.
Je tiens à vous remercier de m’avoir invitée et de m’avoir permis de vous faire part de mes opinions.
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Madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de nous avoir invités.
Compte tenu de la position du Temple de la renommée du hockey comme organisme sans but lucratif bien financé et organisme de bienfaisance enregistré qui honore et préserve l’histoire de notre grand sport d’hiver national, je ne savais pas au départ ce que nous pourrions apporter d’utile à la discussion quand on nous a demandé de témoigner devant le Comité. Phil et moi sommes tous les deux des diplômés de programmes de gestion des sports. Phil est notre vice-président et conservateur. Il oeuvre au sein du Temple de la renommée du hockey depuis 30 ans. J'en suis à ma 32e année, et cela fait 20 ans que j’occupe le poste de directeur et de président de l’organisme.
Comme je l’ai mentionné, notre position est unique au pays, et pas seulement ici, mais dans le secteur muséal, car nous sommes un des quatre grands temples de la renommée sportive en Amérique du Nord. Nos homologues du basketball, du football et du baseball se trouvent tous aux États-Unis. Il est clair que notre succès résulte de partenariats stratégiques, non seulement dans le monde du hockey, mais aussi dans le monde des affaires, et qu’il est aussi attribuable, bien entendu, à notre solide relation avec la Ville de Toronto qui remonte au premier musée, inauguré sur le site de l’Exposition nationale canadienne en 1961.
Nous vous avons déjà remis un résumé de notre organisme, alors je n’y consacrerai pas beaucoup de temps ce matin. Il répond à bien des questions et donne des renseignements que nous avons jugé être pertinents, certes. Nous avons dressé pour le Comité une liste des avantages publics; le soutien gouvernemental, qui a été minimal aux échelons fédéral et provinciaux; et le soutien que nous recevons de la Ville de Toronto par l’intermédiaire d’exemptions fiscales et de l’accord de développement économique qui a permis l’établissement du Temple de la renommée du hockey, qui sont précieux pour nous, évidemment.
En tant qu’organisme autonome, notre réussite et notre viabilité vont bien au-delà du prix des billets d'entrée au musée. On ne devient pas autonome et bien financé sans effort. Nous avons une entreprise de vente au détail, des activités corporatives et d’accueil, des commandites, et les licences de nos droits de propriété intellectuelle. En raison de la place que nous occupons dans le hockey national et le hockey professionnel, ces droits nous donnent un avantage sur les autres musées qui ne jouissent peut-être pas de ce privilège.
La sensibilisation est une des clés de notre succès — nous offrons des programmes et des activités éducatives un peu partout. Nous avons un programme avec le Collège Seneca qui s’appelle « Hockey Hall of Fame Presents ». Nous offrons des services sur le terrain. Nous sommes le photographe officiel de la Fédération internationale de hockey sur glace et nous sommes responsables de toute la photographie à leurs cinq championnats mondiaux et olympiques importants. Un autre exemple est notre relation et notre partenariat à long terme avec les Oilers d’Edmonton. Ils ont construit leur nouvel aréna il y a deux ans. Nous avons participé à la conception, en partie, de certaines de leurs installations d’exposition et nous entretenons une relation continue avec eux pour offrir des services de conservation.
Cela dit, nous sommes confrontés à des défis semblables à ceux de l’industrie muséale, particulièrement en ce qui concerne le catalogage et la préservation de nos vastes archives et collections. En 2009, nous avons mis sur pied le Centre de ressources hockey D.K. (Doc) Seaman. Doc Seaman était l’ancien propriétaire des Flames de Calgary et un grand philanthrope. Par l’intermédiaire du Fonds pour le hockey canadien Daryl K. Seaman de la Fondation Calgary, nous avons été en mesure de recevoir du financement pour construire une nouvelle installation d’archivage éloignée afin d'héberger nos collections. En fait, dans le cadre du programme Espaces culturels du Canada, grâce à de l’équipement spécialisé, nous avons été en mesure de recevoir du financement pour ce projet en particulier. Quoi qu’il en soit, au fur et à mesure que nos collections prennent de l’ampleur, nos ressources financières sont limitées et les réinvestissements dans les attractions des musées publics ont généralement préséance. C’est vraiment difficile d’arriver à rester à jour dans le catalogage et la préservation de nos collections.
Sur ce, c’est une année spéciale pour le Temple de la renommée du hockey. Ce sont nos 75e et 25e anniversaires, soit le 75e anniversaire de la création du Temple de la renommée du hockey et le 25e anniversaire de son installation à son emplacement actuel au centre-ville de Toronto. Il a connu beaucoup de succès à l’intersection des rues Yonge et Front. C’est pour nous une année importante. Nous avons récemment créé un fonds de contrepartie appelé le fonds de développement et de préservation du Temple de la renommée du hockey. Au cours de cette année anniversaire, nous allons financer notre campagne de collecte de fonds inaugurale. Nous avons réussi à obtenir des contributions initiales de la part de la Ligue nationale de hockey. Nous tiendrons un gala de financement important en juin. Le premier programme de contrepartie qui a été nommé, celui de la famille Tanenbaum, créera le fonds des spécialistes des légendes du hockey à l’appui des initiatives éducatives des jeunes Autochtones. Nous sommes assez fiers de ce programme.
Ce qui compte pour le Temple de la renommée du hockey dans la présente discussion, c’est vraiment les relations avec les donateurs et le fait de rehausser les avantages qu’ils tirent de leurs dons, tant du point de vue du financement que de la viabilité, mais aussi des dons en nature. C’est le domaine de Phil, qui est notre conservateur. Il peut évidemment en parler et répondre à toutes vos questions.
Lorsque je prends les principales recommandations, du moins en ce qui concerne le financement de contrepartie, celle d’élargir le mandat du Fonds du Canada pour l’investissement en culture, qui est généralement, je crois, orienté vers les organismes artistiques, est assurément quelque chose qui pourrait profiter au secteur muséal. Elle correspond tout à fait à ce que nous faisons au stade initial d’élaboration de ce fonds de contrepartie.
Pour ce qui concerne les dons en nature, le marché des souvenirs de sport est très concurrentiel. Je crois que certains des avantages qui découlent des biens culturels qui sont certifiés sous le régime de la Loi sur l’exportation et l’importation de biens culturels doivent être considérés comme étant généraux pour les musées en raison de la compétitivité et des avantages fiscaux comme l’élimination de la taxe sur les gains en capital et l’extension des limites de déduction. Ces types de choses compteraient beaucoup pour le Temple de la renommée du hockey, car je pense que nous laissons filer beaucoup de matériel de nos collections chez les collectionneurs privés. En plus, le Musée canadien de l’histoire a aussi récemment acheté une collection pour 3 millions de dollars d’un collectionneur de Toronto, et j’estime qu’une bonne partie de cette collection devrait se trouver au Temple de la renommée du hockey.
Nous vous savons vraiment gré de nous avoir invités aujourd’hui. Nous espérons pouvoir apporter quelque chose à la discussion; nous pouvons certainement le faire d’un point de vue philosophique, celui de la muséologie. Nous avons des employés qui travaillent dans ce domaine particulier.
J’admire l’éloquence des deux autres intervenants. Il est clair que nous pouvons comprendre les défis auxquels font face les musées en général à la grandeur du pays du point de vue des collections. Nous sommes bien financés et bien soutenus, non seulement dans le monde du hockey, comme je l’ai mentionné, mais aussi à l’extérieur. Notre financement gouvernemental est très limité. Honnêtement, ce n’est pas la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd’hui. Nous sommes plutôt venus pour parler des relations avec les donateurs et du rehaussement de ces avantages.
Merci au Comité de nous avoir invités.
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Je vais parler au nom de nos archives. Premièrement, merci beaucoup de nous avoir invités. Nous sommes ravis d’être ici. Je pense que les temples de la renommée et les musées occupent une place spéciale dans la société canadienne.
Dans l’optique du Temple de la renommée du hockey, le hockey a grandi avec le Canada. Il existe un lien spécial entre ce sport et le pays: c’est notre sport national. Il est joué dans plus de 80 pays dans le monde aujourd’hui. Les gens qui viennent vivre au Canada aiment le sport et y participent en raison de sa signification pour les Canadiens.
Nous avons vu au cours de la dernière semaine au pays comment le Canada et la société ont évolué ensemble, mais comme Jeff l’a mentionné, nous faisons beaucoup de choses avec les archives et les activités de sensibilisation. Nous offrons un cours au Collège Seneca dans lequel on enseigne l’histoire du jeu. C’est un cours entièrement multiculturel. Nous y parlons de diversité, de l’histoire du sport et de la mesure dans laquelle il a pris de l’ampleur au Canada et dans le monde entier.
Nous avons eu la chance au cours des dernières années d’être contactés par les gouvernements de la Chine, de la République tchèque et du Kazakhstan, et la semaine prochaine, nous irons en Hongrie pour présenter une exposition sur la signification du hockey pour les Canadiens et la façon dont il peut influer sur leur pays. Ils espèrent que le hockey pourra influer aussi sur leurs pays à eux.
Au nom des archives, nous sommes membres de l'Association canadienne pour l'héritage sportif et membres des temples de la renommée et musées internationaux. Nous parlons globalement de la façon de préserver le sport, qui occupe une place importante dans notre société. Le hockey est évidemment près de nous, mais chaque sport joue un rôle différent au Canada, et un de nos principaux objectifs est de préserver cette histoire et les archives.
Comme Jeff l’a mentionné, ces jours-ci, le monde des collectionneurs joue un rôle énorme au chapitre des artéfacts, et c’est toujours une question de gros sous. Il nous faut, en quelque sorte, leur faire concurrence et, comme Jeff l’a aussi dit, avec le travail du gouvernement et de Patrimoine canadien, je pense que nous pourrions tous travailler ensemble à préserver non seulement notre sport national, mais aussi chaque musée et temple de la renommée au Canada et montrer aux Canadiens ce que cela signifie vraiment d’être Canadien.
Merci beaucoup du temps que vous nous avez accordé. Nous nous ferons un plaisir de discuter avec vous et de répondre à vos questions.
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Cinquante pour cent des personnes qui achètent des billets d’entrée proviennent de l’Ontario, 15 % sont originaires du reste du Canada, environ 22 % proviennent des États-Unis, et le reste des visiteurs viennent de l’étranger. À une époque, le nombre d’Américains était beaucoup plus élevé, mais, en raison des événements du 11 septembre et de tous les problèmes à la frontière, ce nombre a chuté.
Étant donné que le Temple de la Renommée et musée du Hockey revêt une importance non seulement nationale, mais aussi internationale, sa commercialisation représente un défi du point de vue de l’utilisation de notre budget limité de marketing. C’est pourquoi nous tirons parti de partenariats. Les sociétés avec lesquelles nous avons établi de solides partenariats comprennent TSN, Imperial Oil et d’autres entreprises. La clé de la stimulation de notre fréquentation repose sur l’établissement continu de partenariats et sur l’exposition du Temple de la Renommée et musée du Hockey au-delà de Toronto, sans faire appel à nos propres ressources financières.
En ce qui concerne notre viabilité, nous nous trouvons à un stade intéressant, après 25 années d'activités. Au cours des 10 dernières années, en particulier, nous avons connu une intense période de croissance du point de vue du développement. Nous nous sommes établis dans un immeuble de bureaux de catégorie A situé au centre-ville de Toronto, ce qui est unique, alors que les autres principaux temples de la renommée se trouvent dans de petites collectivités. En particulier, il y a Cooperstown, une collectivité du nord de l’État de New York qui compte quelques milliers d’habitants, Canton pour le football, dans l’Ohio, puis Springfield pour le basket-ball, dans le Massachusetts.
Nos défis à venir comprendront la difficulté de développer le musée dans un immeuble de bureaux de catégorie A situé au centre-ville de Toronto, où les loyers sont substantiels et l’espace disponible, très limité. Puis, il y a la question de savoir quand la croissance est trop importante, car il est toujours nécessaire de réinvestir. Voilà en quoi consistait le principe fondateur du Temple de la Renommée et musée du Hockey: un réinvestissement et des changements continus pour garantir notre pertinence. Il n’est pas seulement question du passé, mais aussi du présent. Nos recherches ont révélé que les amateurs de hockey souhaitent voir des objets tant d’aujourd’hui que d’hier. Ces souhaits comptent donc beaucoup pour nous.
Selon certaines de nos études de marketing initiales, nous avons constaté que, lorsque nous avons ouvert nos portes à notre emplacement actuel, les gens pensaient que le Temple de la Renommée et musée du Hockey se trouvait uniquement dans l’édifice historique situé au coin de Yonge et Front, car l’édifice leur rappelait un musée. Pour les amateurs de hockey, ce n’était pas un point positif. Par conséquent, nous avons frappé fort afin de souligner les éléments interactifs du temple. La plupart de nos campagnes de publicité s’inspirent de cela, et je pense que c’est la raison de notre réussite.
Il y a quelques années, un article a paru dans le The Wall Street Journal qui indiquait que la génération Internet snobait Cooperstown…
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Merci beaucoup de m'avoir invité à venir vous parler aujourd'hui.
[Traduction]
Je m'appelle Tim Jones, directeur général d'Artscape, à Toronto.
Je vais en quelque sorte vous présenter cinq recommandations aujourd'hui au sujet des centres culturels communautaires, mais je veux d'abord remercier le gouvernement et le ministère du Patrimoine canadien d'avoir modifié récemment les critères du Fonds canadien pour les espaces culturels afin de tenir compte des centres communautaires. C'est là une excellente démarche qui est importante.
Aujourd'hui, je voudrais vous parler de ce que le gouvernement fédéral peut faire pour renforcer les mesures habilitantes pour ceux d'entre nous qui établissent des centres communautaires au Canada. Il faut d'abord renforcer la capacité de ceux qui conçoivent ces centres, réaliser un peu de recherche sur les effets, apporter des modifications aux règlements de l'Agence du revenu du Canada en ce qui concerne la manière dont les organismes de bienfaisance peuvent investir dans des propriétés, accroître les investissements que le gouvernement effectue dans les centres communautaires, et envisager la réutilisation d'installations gouvernementales à cet égard.
Je vais vous donner quelques informations de base sur Artscape, une organisation de développement urbain sans but lucratif qui existe depuis 32 ans, dont la mission consiste à faire de la place à la créativité et à transformer des communautés. À Toronto, nous avons constitué un portefeuille de projets immobiliers qui non seulement fournit des espaces abordables au milieu des arts, mais agit aussi à titre de catalyseur de premier plan pour la revitalisation des communautés et des quartiers où elles vivent.
Au Canada, nous sommes des pionniers du développement de ce genre de nouvelle forme d'installation appelée centre culturel communautaire. Nous réutilisons parfois d'anciennes écoles, des édifices publics ou des installations de transport, et construisons parfois de nouvelles installations, comme nous l'avons fait à Regent Park.
À l'heure actuelle, nous avons quatre projets en construction. Deux d'entre eux entrent dans la catégorie des centres communautaires, dont celui appelé Artscape Daniels Launchpad, qui s'inscrit dans le projet de développement de la cité des arts qui ouvrira plus tard cette année. Il s'agit d'un centre d'entrepreneuriat dans les domaines des arts et du design qui nous emballe et dont nous pensons qu'il aura une incidence considérable sur les artistes et des concepteurs du Sud de l'Ontario.
Nous nous employons également à accroître l'établissement de centres culturels communautaires en périphérie de Toronto, lançant une première initiative en ce sens dans le village de Weston. Nous espérons constituer un réseau d'installations semblables au cours des prochaines années.
Il y a en tout 11 projets en exploitation et quatre en construction, environ 2 800 créateurs qui travaillent et, dans certains cas, vivent dans nos installations, et quelque 140 organisations et 42 lieux publics dans notre portefeuille. Voilà qui vous donne une idée de l'ampleur et de la portée de notre travail.
Il est crucial de comprendre l'incidence que les centres communautaires ont sur la communauté. Nous les concevons et les construisons à partir de zéro au sein de la communauté dans le cadre d'un processus de conception communautaire, ce qui est essentiel pour les répercussions sociales, culturelles, économiques et environnementales positives que ces projets peuvent avoir dans les régions concernées. Il est très important de comprendre ce travail et d'en tirer parti afin de favoriser le développement de ces endroits.
Il y a une dizaine d'années, nous avons qualifié notre travail de « construction créative », que nous définissons comme le fait de tirer parti de l'art et de la culture pour en faire un catalyseur de changement, de croissance et de transformation d'endroits. Il existe vraiment un domaine de pratique international en croissance à cet égard, et rien ne pourrait probablement mieux l'illustrer que le rôle que nous avons joué dans la revitalisation de Regent Park et la création du centre Daniels Spectrum.
Peut-être savez-vous que Regent Park constitue le plus ancien et le plus grand parc de logements sociaux du Canada. Le gouvernement l'a construit dans les années 1940. Au fil des décennies, bien des lacunes se sont révélées au chapitre de la conception et du développement de Regent Park. Le fait de réunir les démunis dans un quartier, le manque de services et de commodités, et la conception des lieux comme telle ont fait de cet endroit un lieu où tous les vestiges de la pauvreté étaient très présents. La réputation de Regent Park n'est plus à faire au pays.
Il y a une dizaine d'années, on a osé prendre la décision de tout démolir et de repartir à zéro. Ce processus est maintenant bien avancé; certaines personnes ont été installées temporairement ailleurs avant d'être réintégrées dans une nouvelle communauté. Dans le cadre de cette initiative, on a accordé au plan de développement social une importance égale à celle du plan directeur, ce qui est, selon moi, très important. Cela a eu une incidence considérable sur la croissance et l'évolution de cette communauté.
De nombreuses infrastructures sociales ont été créées dans le cadre de la stratégie de revitalisation. Notre rôle à nous était de nous pencher sur l'importance de la culture, sur la façon dont la culture aide à rassembler les gens lorsqu'une communauté connaît une telle transformation. Comment la culture renforce-t-elle la cohésion sociale et comment peut-elle servir de base à l'expression et aux échanges culturels? Quarante-six pays d'origine sont représentés dans Regent Park et 67 langues y sont parlées; c'est donc une grande occasion de tirer parti de la culture pour apporter des changements et de créer une nouvelle vision de ce qui était devenu une communauté hautement stigmatisée.
En travaillant avec un comité de direction communautaire, nous avons développé l'idée de créer un endroit ancré à Regent Park, mais ouvert à tous. Le centre est ouvert depuis près de six ans, et je suis ravi de vous dire qu'il a eu des retombées importantes sur la communauté et sur le voisinage. Les jeunes comme Mustafa the Poet, que vous avez vu il y a un instant, ont aidé à créer une nouvelle vision positive et vitale de la communauté, sans édulcorer les nombreux défis posés par la revitalisation.
Or, je dirais que globalement, cette communauté réussit à se revitaliser, et le centre culturel communautaire a fourni un lieu où les gens peuvent se réunir pour aider à renforcer la cohésion sociale, comme la Société de logement communautaire de Toronto souhaitait le faire. Il donne aux artistes du quartier une tribune où échanger et s'exprimer. Pour les militants communautaires, c'est un endroit où venir passer du temps, ce que je trouve très important. En outre, le centre a joué un rôle essentiel dans la création d'un marché immobilier résidentiel de plusieurs milliards de dollars à un endroit où, il y a 10 ans, on disait qu'il était impossible de vendre un seul condominium.
À mon avis, cela montre tout le pouvoir que les centres culturels communautaires peuvent avoir sur plusieurs plans. Je suis très heureux que vous examiniez la question, car selon moi, de tels projets agissent comme des catalyseurs, et ils pourraient faire de même partout au pays.
J'aimerais revenir aux cinq choses que je vous encourage à considérer. D'abord, je vous recommande de songer aux façons dont nous pourrions renforcer les capacités des promoteurs de centres partout au pays. Il y a beaucoup d'innovation dans les secteurs de la construction créative, de l'aménagement communautaire, de la gestion et de la gouvernance communautaires, ainsi que des partenariats public-privé. Lorsque nous concevons des projets de ce genre, nous devons penser et travailler différemment. C'est important que nous aidions les promoteurs de centres à s'améliorer dans ce domaine.
J'ai parlé des répercussions multidimensionnelles de certains de ces projets, du fait qu'ils peuvent avoir des résultats sur quatre plans. Il y a un besoin réel de mener de meilleures recherches pour montrer les répercussions et les résultats de ces projets sur les plans culturel, économique, social et environnemental.
Un de nos plus grands défis en ce moment, c'est de trouver comment financer ces projets, non seulement avec l'aide du gouvernement, mais aussi grâce à des dons de bienfaisance. J'ai oublié de mentionner, au sujet de notre modèle, qu'une fois les fonds initiaux reçus, nos projets sont tous autosuffisants. Pour en arriver là, nous avons besoin de l'aide du gouvernement, du secteur privé, des prêteurs et des donateurs. Nous ne pouvons rien faire si nous ne sommes pas en mesure d'amasser des fonds, et les dons de bienfaisance sont essentiels à la réalisation de nos projets.
À l'heure actuelle, la réglementation de l'ARC limite étroitement la possibilité pour un organisme de bienfaisance d'investir dans des installations, en particulier des installations à usages multiples qui regroupent des organismes sans but lucratif, des organismes de bienfaisance et d'autres types d'organismes. Il faut donc renouveler les dispositions réglementaires relatives aux investissements des organismes de bienfaisance dans les projets d'immobilisations.
Ces trois premières suggestions sont assez faciles à mettre en oeuvre. Elles sont peu coûteuses. Les autres, selon moi, sont tout aussi importantes, mais elles requièrent une plus grande mise de fonds. Je suis encouragé par le nouvel investissement dans le programme du Canada pour les espaces culturels. Cette initiative est très importante, mais ce programme n'aurait pas suffi pour réaliser un projet comme le centre Daniels Spectrum. Nous avons été très chanceux d'obtenir 24 millions de dollars du Fonds de stimulation de l'infrastructure lorsque celui-ci était en place. Les projets d'une telle envergure, qui auront de grandes retombées sur la collectivité, requièrent de grands investissements.
Il faut absolument ouvrir le Fonds Chantiers Canada, ou peu importe le nom de la nouvelle version de ce programme, aux organismes sans but lucratif pour que nous puissions exécuter de tels projets.
Enfin, il y a beaucoup d'innovations intéressantes par rapport à l'aliénation des propriétés excédentaires du gouvernement. J'ai vu à Toronto que le gouvernement pouvait vendre un bien à la valeur marchande, mais qu'il pouvait du même coup fournir un centre culturel communautaire comme celui dont j'ai parlé. D'après moi, le gouvernement fédéral doit absolument examiner comment de vieux bureaux de poste et d'anciens édifices du gouvernement pourraient être utilisés pour générer à la fois des avantages sociaux et des revenus.
Merci beaucoup.
Bonjour, et merci de m'avoir invitée à vous parler de l'importance et des retombées des centres culturels. Mon témoignage portera précisément sur la conception indépendante de jeux vidéo et sur la création numérique. Je m'appelle Liv Lunde et je suis la directrice exécutive de L'Espace Ludique. Avant de travailler dans le domaine du jeu vidéo, j'ai fait carrière dans l'industrie canadienne de la musique. J'ai grandi dans un milieu riche en débouchés culturels parce que mes deux parents étaient administrateurs dans le domaine des arts. Je suis donc ici aujourd'hui à titre tant personnel que professionnel.
L'Espace Ludique est un organisme sans but lucratif qui fournit un espace de travail partagé de 10 000 pieds carrés au centre-ville de Montréal, spécifiquement pour la conception indépendante de jeux. Nous avons ouvert nos portes il y a trois ans grâce à un petit investissement des secteurs public et privé. Nous hébergeons actuellement 100 créateurs de 20 studios différents et nous offrons du soutien à l'ensemble de la communauté locale de 2 000 créateurs indépendants de jeux de plus de 100 studios, dont la majorité — je tiens à le préciser —, sont de petites entreprises québécoises qui créent de la propriété intellectuelle canadienne.
Mon but aujourd'hui est de souligner la valeur des centres culturels comme le nôtre, le besoin de financement et de soutien pour de tels centres, ainsi que le rôle essentiel que nous jouons pour favoriser l'innovation, la collaboration et le développement économique. Pour commencer, je dois établir que les jeux vidéo font partie de l'économie de la culture; ils appartiennent aux arts et à la culture. La force de L'Espace Ludique en tant que centre culturel, c'est que nous fournissons, justement, des espaces ludiques, et non seulement des murs et des bureaux, uniquement aux membres de la communauté de créateurs indépendants de jeux vidéo. Il s'agit d'un tremplin vers la réussite.
Les créateurs indépendants de jeux travaillent dans des conditions précaires. Leur situation est beaucoup moins stable que celle des grands studios appartenant à des intérêts étrangers, en raison d'un manque de financement, d'un marché concurrentiel, de longs cycles de développement, ainsi que d'un manque de compétences en affaires et en marketing. Un centre comme le nôtre permet à une masse critique de développeurs travaillant côte à côte de partager des ressources. C'est vrai non seulement pour les studios qui travaillent chez nous quotidiennement, mais aussi pour les organismes communautaires qui utilisent nos espaces pour des réunions, des ateliers, des expositions, etc. En perfectionnant leur art dans notre espace communautaire, ils s'inspirent et se guident les uns les autres au quotidien.
J'aimerais vous présenter deux de nos exemples de réussite les plus remarquables. Le premier est un studio qui a fait ses débuts chez nous, et le second est un organisme qui utilise régulièrement nos espaces.
Outerminds était l'un des premiers studios à utiliser L'Espace Ludique. L'équipe nous a littéralement aidés à construire des tables et des chaises. Au départ, le studio comptait 4 cofondateurs, et en l'espace de 2 ans, le personnel a atteint 25 employés. Deux de ses jeux ont été de meilleurs vendeurs dans l'App Store. De fait, la demande pour le deuxième était si élevée qu'elle a causé une panne de tous ses serveurs le jour du lancement, et le jeu a rapidement été téléchargé plus de 25 millions de fois.
Pendant que leur entreprise prospérait, les membres de l'équipe sont restés fidèles à la communauté qui les avait accompagnés dans leurs moments les plus durs. La valeur immatérielle de la communauté de L'Espace Ludique a poussé l'entreprise à rester chez nous longtemps après qu'elle ait eu les moyens de déménager. Elle n'est pas restée par obligation, elle est restée par choix. Aujourd'hui, nous nous prévalons tous de son succès puisqu'elle maintient le cycle du soutien en offrant des conseils et de l'aide financière aux plus petits studios et aux organisations, ainsi qu'en appuyant les activités communautaires.
L'une de ces organisations est Pixelles, un autre exemple de réussite de L'Espace Ludique. Sa mission est d'aider les femmes à transformer les jeux vidéo et à en créer. Depuis trois ans, nous lui permettons d'utiliser nos espaces aussi souvent qu'elle en a besoin. Elle offre des ateliers mensuels, ainsi qu'un groupe d'écriture et qu'un groupe de conception de jeux à des femmes qui n'ont que peu ou pas d'expérience dans le domaine des jeux vidéo. Presque toutes les femmes qui ont participé au programme d'écriture narrative ont ensuite trouvé des emplois dans l'industrie. Nombre de femmes qui suivent les programmes de Pixelles deviennent à leur tour bénévoles et servent de mentors au prochain groupe de femmes qui entrent dans le milieu. L'accès à un espace physique stable et sécuritaire pour la tenue de ses programmes a été un élément essentiel du succès de Pixelles. Nous avons d'autres exemples, mais puisque notre temps est limité, nous ne vous les présenterons pas.
Si nous avons tellement de succès, où est le problème?
Ce ne sont pas tous nos studios qui connaissent un succès critique et financier. On peut viser la même réussite qu'Outerminds, mais comme l'industrie le sait, la majorité des studios indépendants n'atteindront pas cet objectif. La plupart des artistes sont par nature mauvais en affaires, et ils ont besoin de soutien. Le Fonds du Canada pour les espaces culturels appuie la collaboration entre les entrepreneurs et les créateurs. C'est exactement ce que sont les jeux vidéo.
La production d'un ballet requiert la collaboration de compositeurs, de musiciens, de concepteurs de costumes, de décorateurs, de chorégraphes et de danseurs. La création d'un jeu vidéo requiert la participation de musiciens, d'artistes visuels, de concepteurs, d'historiens, d'animateurs, d'auteurs et de chorégraphes. C'est la même chose. Ces gens sont des artistes. Ils sont hautement qualifiés dans leur art, exactement comme les danseurs et les acteurs. Nous devons cesser d'ignorer ce fait et de le tenir pour acquis. Nous devons également arrêter de considérer le produit final comme la seule partie importante de l'équation.
La vocation unique de notre centre est notre force: nous rassemblons une masse critique de gens talentueux et d'entreprises qui peuvent se soutenir les uns les autres, apprendre des uns des autres, ainsi qu'attirer des gardiens de l'accès à l'industrie et des influenceurs. Pourtant, c'est notre faiblesse quand vient le temps de présenter des demandes de financement. Nous ne répondons pas à toutes les exigences. Obliger les centres à vocation unique déjà établis à modifier leur mandat pour être admissibles à des fonds semble contre-productif.
Nous respectons le soutien offert aux arts et nous en reconnaissons la valeur. Toutefois, il faut élargir la définition des activités considérées comme culturelles au Canada et repenser la façon dont le financement peut réellement aider les communautés visées. Aujourd'hui, le volet expérimental du Fonds des médias du Canada demeure la seule source de financement à laquelle nous pouvons demander de l'appui financier, et lorsque je dis « nous », je veux dire nos studios, car notre centre culturel est inadmissible.
À l'heure actuelle, il n'y a nulle part où demander de l'aide financière pour les coûts de fonctionnement liés à la culture. Les intermédiaires culturels, le personnel administratif qui soutiennent ces organismes au quotidien n'ont pas accès à du financement. Nous sommes l'échafaudage invisible des industries créatives et nous avons besoin de soutien, nous aussi.
Je suis ici aujourd'hui pour vous demander de revoir l'affectation des fonds consacrés à la culture. Lorsque nos centres culturels recevront de l'appui adéquat, nos industries prospéreront. Si les intermédiaires culturels qui fournissent tout, d'un esprit communautaire à de la formation, en passant par un véritable toit, disparaissent par manque de financement, il sera impossible de soutenir les industries culturelles.
Merci de m'avoir invitée et écoutée.
Merci, madame la présidente.
Messieurs les vice-présidents, mesdames et messieurs les députés, je suis conseillère municipale dans l'arrondissement de Rosemont—La Petite-Patrie. À la Ville de Montréal, je suis responsable des dossiers de la culture, du patrimoine et du design. Je suis accompagnée de Mme Laverdière, qui est directrice du Service de la culture, à la Ville de Montréal.
Je tiens d'abord à vous remercier de nous avoir conviées à participer à cette étude.
Mon intervention se divisera en quatre parties. La première abordera les quartiers culturels, la deuxième sera consacrée à notre nouvelle politique de développement culturel, la troisième traitera des retombées économiques des quartiers et des pôles culturels et, pour conclure, j'aborderai le rôle que nous jouons quant à la revitalisation de la culture.
La question des quartiers culturels fait partie de notre vision depuis 2005, comme en témoigne la première politique de développement culturel de la Ville de Montréal, qui avait été mise en oeuvre avec divers partenaires, dont le gouvernement canadien.
Notre toute nouvelle politique de développement culturel 2017-2022 est en continuité avec la démarche de création et de développement des quartiers culturels sur tout le territoire montréalais. Dans ce processus, Montréal passe ainsi du concept de pôle culturel à celui de quartier culturel.
Sans négliger les pôles déjà consolidés, Montréal adopte aujourd'hui la vision des quartiers culturels afin d'offrir à la population montréalaise une offre culturelle de proximité de qualité. Nous souhaitons ainsi encourager la participation des citoyens au développement et à l'amélioration de leur milieu de vie.
La culture devient ainsi partie intégrante du quotidien de ces quartiers par la présence d'artistes ou d'institutions culturelles, tant sur les artères commerciales que dans les parcs, les places publiques et près des modes de transport collectif.
Nous avons la conviction que ce sont les arrondissements qui sont les maîtres d'oeuvre de la consolidation et du développement des quartiers culturels. Toutefois, la Ville les accompagne, notamment dans l'élaboration de leur propre plan culturel et de la cartographie des points forts contribuant au développement des quartiers culturels, ainsi que dans la mise en oeuvre de divers projets pilotes.
La nouvelle politique de développement culturel de la Ville considère la présence d'ateliers d'artiste dans les quartiers centraux comme un axe prioritaire de l'aménagement des quartiers culturels, et ce, dans une perspective de développement durable.
La précédente politique avait reconnu la difficulté qu'ont les artistes à se loger et à trouver des espaces de création à prix abordables dans les quartiers les plus recherchés.
La Ville de Montréal a donc posé un premier geste en accordant du financement au projet Le Chat des artistes pour l'installation de 43 ateliers d'artiste dans une usine de textiles désaffectée de la rue Parthenais, il y a une douzaine d'années. Nous nous sommes par la suite dotés d'un cadre d'intervention assorti d'un fonds spécial d'aide de 13 millions de dollars. Ce fonds a permis de pérenniser l'accessibilité des artistes à des espaces de création totalisant maintenant 28 000 mètres carrés.
Parlons maintenant de la Politique de développement culturel intitulée « Conjuguer la créativité et l'expérience culturelle citoyenne à l'ère du numérique et de la diversité ». Notre champ d'action est présentement guidé par cette politique novatrice. Nous vous avons apporté des exemplaires de cette politique.
La vision qui inspire notre politique culturelle est portée par une volonté d'inscrire la culture comme partie prenante de nos principales interventions en matière de développement économique, de patrimoine, de développement social et de ville intelligente.
Nous nous appuyons notamment sur les valeurs d'inclusion et d'équité. Ces valeurs impliquent une conception du vivre-ensemble qui favorise l'apport et la représentativité de tous les citoyens et de toutes les influences culturelles afin que chacun s'y reconnaisse et développe son plein potentiel.
Les quartiers culturels permettront alors aux différentes expressions artistiques locales de se manifester et d'interagir en cohérence avec le visage de la diversité si caractéristique des quartiers montréalais.
Par ailleurs, la qualité et la vitalité culturelle des milieux de vie passent par une présence et un engagement accrus des artistes, des créateurs et des organismes, plus particulièrement dans les quartiers culturels.
Je vous invite à consulter cette carte, qui présente les lieux d'implantation de nos équipements culturels. Les quartiers culturels se définissent autour de ces lieux phares de culture de proximité.
Le développement des quartiers culturels doit se traduire par l'adoption d'une approche intégrée de mise en valeur des attraits patrimoniaux ainsi que d'implantation d'équipements culturels municipaux, gouvernementaux et privés.
J'aimerais maintenant aborder la question des retombées des quartiers et pôles culturels de la métropole.
Prenons l'exemple du Quartier des spectacles. Celui-ci affiche la plus forte concentration et diversité de lieux culturels en Amérique du Nord dans un même secteur d'à peine un kilomètre carré.
On y compte plus de 28 000 sièges répartis dans une trentaine de salles de spectacle. On y trouve aussi une quarantaine de lieux d'exposition, des cinémas et huit places publiques où se tiennent plus de 40 festivals tout au long de l'année.
Je reviendrai maintenant un peu en arrière.
Lors du Rendez-vous de Montréal, métropole culturelle en 2007, les différents paliers de gouvernement se sont engagés à appuyer financièrement le Quartier des spectacles.
Une opération importante de réaménagement urbain a été proposée dans le cadre du Programme particulier d'urbanisme pour le secteur de la Place des Arts. Cette opération, qui comportait la création d'un réseau de places publiques autour de ce secteur névralgique, avait pour objectif d'assurer la pérennité des grands festivals et événements culturels. Elle visait à faire de la Place des Arts un véritable milieu urbain convivial, une destination à longueur d'année, animée et agréable à fréquenter, tant pour les Montréalais que pour les visiteurs.
Le gouvernement fédéral a contribué au projet à hauteur de 40 millions de dollars, soit le tiers des coûts admissibles, dans le cadre du Fonds Chantiers Canada. Plusieurs études ont été réalisées afin d'évaluer les retombées du Quartier des spectacles, dont l'une très récemment. Voici quelques données probantes: depuis 2007, 1,5 milliard de dollars ont été investis dans 60 projets immobiliers recensés; les investissements immobiliers ont permis de récolter des revenus de TPS et de TVQ d'environ 228 millions de dollars depuis 2007; l'ensemble des retombées économiques associées à la réalisation de ces projets s'élève à 2,2 milliards de dollars; enfin, les revenus annuels de taxation, foncière et scolaire, ont plus que triplé au cours des 10 dernières années.
Pour illustrer d'autres retombées concrètes dans un quartier culturel, je vais donner un seul exemple, soit celui du Cinéma Beaubien, qui est situé dans l'arrondissement que je représente.
Une étude récemment publiée a démontré que ce seul cinéma de quartier, depuis sa réouverture en 2001, a véritablement revitalisé le quartier. Non seulement le Cinéma Beaubien a contribué à la transformation de la rue Beaubien, son artère commerciale, mais il a également favorisé le renouvellement du cadre bâti et de l'offre commerciale.
La Ville de Montréal est très engagée dans le développement et la création de nouvelles installations et de nouveaux équipements culturels. Plusieurs projets d'envergure sont en cours ou à l'étude, et l'aide financière du gouvernement, aux divers paliers, est fondamentale pour les concrétiser.
Montréal a déjà pu compter sur l'appui du gouvernement fédéral à certains projets d'infrastructures culturelles comme celui relatif au musée de Pointe-à-Callière et, plus récemment, au Musée d'art contemporain de Montréal, mais il ne faut pas s'arrêter là. D'autres projets culturels structurants pour la Ville sont en cours.
Les travaux d'expansion du musée Pointe-à-Callière se poursuivent, et nous invitons le gouvernement fédéral à contribuer à la réalisation de la phase 3 en investissant dans le projet relatif au Parlement du Canada-Uni. Ce projet vise à mettre en valeur les vestiges du premier parlement permanent du Canada, qui datent de 1844.
Nous souhaitons également que le gouvernement fédéral investisse de nouveau dans le Vieux-Port de Montréal afin d'en faire un véritable lieu de rencontre accessible aux citoyens et aux visiteurs.
À cet effet, une occasion unique se présente aujourd'hui de participer au projet de centre culturel et touristique des Premières Nations du Québec et du Labrador au Vieux-Port, le projet DestiNATIONS.
Ce centre deviendra un pôle de diffusion, de production et de création culturelle de calibre international dédié à la découverte des cultures autochtones. C'est un projet qui s'inscrit favorablement dans la vision de la Société immobilière du Canada concernant le développement du Vieux-Port.
En terminant, je tiens à souligner l'importance des travaux de votre comité. Ils permettront de mieux saisir les principaux enjeux en lien avec la création de districts et de centres culturels à l'échelle canadienne. De plus, ils mettront en lumière l'importance cruciale du soutien fédéral dans le développement et la consolidation des quartiers culturels en appuyant notamment les équipements, les espaces culturels ainsi que les grands festivals et événements.
Merci énormément de votre attention.
:
Contrairement à la croyance populaire, nous sommes chichement financés. Je consacre la plus grande partie de mon temps à la recherche de nouvelles sources de financement et d'arguments pour convaincre les gens que nous sommes un pôle culturel produisant des oeuvres artistiques. Nous travaillons aussi dans les technologies, mais je pense qu'une partie de nos réalisations passe complètement inaperçue.
Sans vouloir offenser les représentantes de Montréal, à côté de moi, cette ville ne nous considère pas comme un joueur culturel. Nous n'avons donc pas d'aide à attendre d'elle. Même constat, pour les mêmes raisons, à l'échelon de la province. Pour être financés, nous nous démenons autant que les collectivités rurales.
Ayant grandi dans une petite ville de l'Alberta, je connais toute l'ampleur de la difficulté. Mes parents, des administrateurs artistiques, y exploitaient l'un des cinémas locaux. Toute ma vie j'ai saisi la difficulté que ça présentait. J'éprouve de l'empathie pour les petites collectivités, privées de ressources et coupées du financement. Ma mission est d'aider précisément la collectivité à l'intérieur de mes murs et celles qui assistent à nos manifestations, mais je n'ai pas hésité à m'adresser aux pôles des petites collectivités du Québec et à nouer avec eux des liens, pour voir comment leur être utile.
J'ai de la chance. Les jeux vidéo sont en soi une forme d'art numérique. Nous pouvons donc collaborer avec les gens et leur servir de mentors par l'entremise de l'Internet. Nous pouvons accéder à leur travail et mettre en commun notre travail par voie numérique. Pas besoin de se trouver physiquement dans le même local qu'eux.
Nous avons aussi réussi à maintenir tous nos coûts bas. Depuis trois ans, nous n'avons organisé que deux manifestations à entrée payante. L'entrée des autres est libre et publique, accessible, donc, à toutes les personnes désargentées. Pour l'étudiant qui veut entrer dans l'industrie, pour celui qui souhaite seulement un accès, c'est là. Je pense que ç'a contribué à attirer des curieux dans notre espace et dans notre espace en ligne aussi. Si je pouvais faire plus de réalisations extérieures dans les petites collectivités, je le ferais.
[Traduction]
Voilà pourquoi je le demandais.
[Français]
C'est un peu comme l'exemple d'une municipalité, d'un village, d'une ville, d'un quartier qui a une vision. Pour la réaliser, on peut consulter ce genre d'organisation.
En tout cas, avant de poser une question bien précise à chacun d'entre vous, je tiens à vous dire que les témoignages de ce matin — spécialement celui des représentantes de la Ville de Montréal — démontrent à quel point la portée de l'étude est vaste et qu'elle est difficile à circonscrire. Vous avez présenté quatre présentations distinctes portant sur divers aspects, en passant par la pixélisation de l'offre culturelle à Montréal, quartier par quartier, jusqu'au projet DestiNATIONS qui est, je crois, l'archétype de ce qui est un peu comme le rêve à concrétiser, au bout du compte, en ce qui concerne le programme portant sur les centres culturels. Vous avez aussi parlé de la notion de districts culturels et mentionné notamment le Quartier des spectacles.
Vous êtes donc allés tous azimuts pour démontrer à quel point Montréal accorde de l'importance à la culture. En tant que propriétaire d'une maison à Montréal, je suis très fier de cela, mais je pense qu'il va falloir préciser certaines choses.
Madame Lunde, vous comprenez bien la quête de la dimension musicale du milieu culturel puisque que vous faisiez partie, je crois, de l'équipe de gestion chez Ariane Moffatt, à une certaine époque.
J'ai travaillé autrefois dans un studio d'enregistrement où on facturait 200 $ l'heure pour la location. Éventuellement, presque tous les studios, sauf celui où je travaillais, ont été démontés. Un regroupement d'artistes s'est alors rassemblé dans une grande salle, chez Studios Piccolo. Chacun apportait sa petite contribution pour payer la location.
Vous avez fait la même chose en ce qui concerne le concept d'espace de travail partagé. J'ai eu la chance de rencontrer les gens du Garage & co, un organisme situé à Longueuil qui a adopté ce mode de collaboration. On se souviendra de la présentation du 312 Main, à Vancouver Downtown Eastside. Il y avait là regroupées les dimensions touchant la culture, la mission sociale et l'espace de travail partagé. C'est de la vertu, c'est merveilleux.
J'ai aussi rencontré des gens de l'organisme Montréal Cowork, et ce que je constate, c'est que tout créateur, pas seulement les créateurs artistiques, mais toute personne qui a une approche créative relativement à son travail — qui pense en dehors des sentiers battus —, veut faire partager son expérience. C'est ce qui ne se fait plus dans les entreprises. Ces dernières se sont débarrassé de leurs employés, arguant que les charges sociales étaient trop lourdes. Cela a l'air cynique de dire cela en parlant des entreprises, mais c'est quand même la réalité. Finalement, c'est pour payer moins d'impôts qu'elles ont congédié des employés, et on se retrouve avec le déficit que l'on connaît aujourd'hui.
On voit donc de plus en plus de travailleurs à la pige, et ils finissent par ressentir le besoin de se regrouper. Le dynamisme de ces personnes est tout à fait merveilleux.
Il est vrai que Montréal est comparable à un vaisseau amiral pour ce qui est du concept d'espace de travail partagé en général. La question que je veux vous poser à vous trois ou à vous quatre, y compris M. Jones, est la suivante. Qu'est-ce que vous nous recommandez? Selon vous, quels sont les périls? Quelles approches devrions-nous adopter? Ce que nous accomplissons ici, c'est clairement du débroussaillage pour Patrimoine Canada.
Pouvons-nous cerner précisément les lacunes et arriver à formuler quelques recommandations afin que le gouvernement du Canada puisse soutenir les initiatives comme les vôtres sans s'ingérer dans des compétences locales?