Madame la présidente, mesdames et messieurs les vice-présidents, distingués membres du Comité, bonjour. Je m'appelle Neal McDougall et je suis directeur des politiques à la Writers Guild of Canada. La directrice générale de notre organisme, Maureen Parker, ne peut être présente aujourd'hui pour cause de maladie. Elle vous prie de l'en excuser. Nous tenons à remercier le Comité de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui pour discuter de la Loi sur le droit d'auteur.
La Writers Guild of Canada, ou WGC, est une association nationale qui représente plus de 2 200 scénaristes professionnels de partout au Canada travaillant aux productions de langue anglaise dans le domaine du cinéma, de la télévision, de la radio et des médias numériques. Les membres de la WGC sont la force créatrice responsable des émissions de télévision, des films et des séries Web à succès du Canada.
Tout d'abord, j'aimerais vous parler un peu de la façon dont sont payés les scénaristes canadiens qui relèvent de nous. Les scénaristes que nous représentons travaillent en vertu de notre convention collective, qui s'appelle l'Independent Production Agreement, l'IPA — ou « entente relative à la production indépendante ». Les contrats qu'ils concluent avec les producteurs portent sur des services d'écriture de scénarios. Il peut s'agir de divers types de travaux, correspondant généralement à différentes étapes de l'écriture et de l'élaboration d'un scénario, depuis les esquisses et les documents de présentation jusqu'à ce que l'on appelle les « bibles » — qui sont des documents de référence qui présentent les personnages, les décors et les autres éléments d'une série télévisée — et les ébauches de scénarios achevés.
En vertu de l'IPA, les scénaristes reçoivent ce que nous appelons des honoraires de scénariste pour chacune de ces étapes du travail. Si un scénario entre en production, le scénariste touche également ce que nous appelons des honoraires de production. Enfin, l'IPA prévoit le versement de redevances au scénariste, lesquelles correspondent à un pourcentage des bénéfices tirés de la distribution et de la diffusion de la production.
La Writers Guild of Canada a aussi mis sur pied la Canadian Screenwriters Collection Society, ou CSCS, dont le mandat est de réclamer, de percevoir, d'administrer et de distribuer, sur une base collective, les redevances d'auteurs étrangers auxquelles les auteurs de films et d'émissions de télévision ont droit en vertu de la législation nationale de certains pays.
Un scénario et une production réalisée à partir de ce scénario sont des oeuvres distinctes protégées par le droit d'auteur et, à ce titre, ils bénéficient chacun de leur propre protection. Aux termes de l'IPA, le scénariste conserve le droit d'auteur en tant qu'auteur de son scénario, et il accorde au producteur le droit de produire une oeuvre cinématographique fondée sur ce scénario. Le producteur cumule cette licence avec tous les autres droits de propriété intellectuelle dont il peut avoir besoin pour produire l'oeuvre cinématographique. Le producteur exploite ensuite commercialement la production finie sur le marché et verse au scénariste une redevance sur les profits, selon les modalités de notre convention collective.
Cela nous amène à notre première demande de la journée. Comme nous l'avons dit cet été à vos collègues du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, nous aimerions demander une simple modification à la loi afin qu'il y soit précisé que les scénaristes et les réalisateurs sont conjointement auteurs des oeuvres cinématographiques.
La notion de possession du droit d'auteur est un concept central de la Loi canadienne sur le droit d'auteur. La loi reconnaît que les auteurs créent généralement des oeuvres qui peuvent être protégées par le droit d'auteur et énonce la règle générale selon laquelle « l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre ». Les auteurs d'oeuvres cinématographiques sont le scénariste et le producteur.
Les scénaristes et les réalisateurs sont les personnes qui exercent la compétence et le jugement qui mènent à l'expression des oeuvres cinématographiques sous forme matérielle. Ils partent d'un monde de possibilités à partir duquel ils font d'innombrables choix créatifs. Les scénaristes créent un monde, choisissent l'endroit et le moment précis dans ce monde pour commencer et terminer le récit, établissent l'ambiance et les thèmes, créent des personnages avec des histoires et des personnalités, écrivent des dialogues et conçoivent une intrigue. Les réalisateurs dirigent les acteurs, choisissent les plans et la position des caméras, et ils font des choix qui déterminent le ton, le style, le rythme et la signification des images en mouvement.
Les producteurs ne sont pas des auteurs. Les producteurs sont ceux qui assument les aspects financiers et administratifs d'une production. Bien que la levée du financement et l'orchestration de la distribution soient d'importants aspects de la production filmique, aucune de ces activités n'est créatrice dans le sens artistique du terme, et elles n'ont rien à voir avec la notion de possession du droit d'auteur.
De plus, le droit d'auteur protège l'expression d'idées, pas les idées elles-mêmes. Par conséquent, même si les producteurs peuvent, à l'occasion, fournir des idées et des concepts aux scénaristes et aux réalisateurs, ce sont les scénaristes et les réalisateurs qui expriment ces idées et ces concepts sous une forme protégeable aux termes du droit d'auteur.
Un peintre est l'auteur d'une peinture; un écrivain est l'auteur d'un roman; les scénaristes et les réalisateurs sont conjointement les auteurs d'un film ou d'une production télévisuelle. Quel que soit le médium, ce sont les artistes qui font l'art.
Un tribunal canadien a déjà établi que le scénariste et le réalisateur sont les coauteurs d'un film et non le producteur. Le tribunal a jugé que le producteur individuel ne pouvait être considéré comme l'auteur du film puisque son rôle n'était pas créatif. En tant que telle, notre proposition ne change pas la loi canadienne ou la réalité du Canada. Elle ne fait que clarifier la loi et la rendre conforme à des normes internationales, telles que celles de l'Union européenne.
Pourquoi est-ce important? D'une part, la loi définit la durée de la protection du droit d'auteur en fonction de la vie de l'auteur. Si l'identité de l'auteur est incertaine, la durée de cette protection peut être incertaine. Par conséquent, il peut y avoir une incertitude quant à savoir si une oeuvre donnée est toujours protégée par le droit d'auteur ou si elle est du domaine public. D'autre part, la reconnaissance des scénaristes et des réalisateurs comme coauteurs est une façon d'appuyer les créateurs et le rôle qu'ils jouent dans l'économie créative du Canada. Elle leur donne une position avantageuse pour négocier et conclure des contrats avec d'autres intervenants de la chaîne de valeur qui préside à la production de contenu. C'est une façon d'équilibrer les rapports de force.
Étant donné que cette clarification ne modifierait pas la réalité juridique au Canada, elle ne constitue pas une menace pour les modèles d'affaires existants. Les producteurs et les autres personnes qui cherchent à engager des créateurs pour leurs oeuvres ne feraient que passer des contrats pour obtenir les droits sur ces oeuvres, comme ils l'ont toujours fait. Personne ne prétend que les romanciers ne sont pas les auteurs de leurs romans ou que les compositeurs ne sont pas les auteurs de leur musique et, assurément, personne ne prétend que les éditeurs ne peuvent pas vendre des livres ou que les maisons de disques ne peuvent pas vendre de la musique simplement parce que ces auteurs sont les premiers propriétaires de leurs oeuvres. En effet, les scénaristes sont déjà sans contredit les auteurs de leurs scénarios, et les producteurs passent déjà des contrats pour obtenir les droits d'adaptation de ces scénarios, ce qui va de soi.
Il en va de même pour les suites ou les séries télévisées, qui sont simplement des oeuvres multiples basées sur les mêmes personnages ou d'autres éléments. Beaucoup de films ou d'émissions de télévision ont été basés sur des récits bibliques, sur Jane Austen ou sur Batman, mais chaque nouvelle production est une oeuvre nouvelle et distincte, qui est protégée par le droit d'auteur. Chacune a ses propres auteurs, nommément les scénaristes et les réalisateurs qui ont écrit et réalisé cette production particulière. Chaque film ou épisode est une histoire nouvelle et différente qui fait avancer les personnages. Les choses ont toujours fonctionné de cette façon.
Enfin, dans cet environnement en rapide évolution où les bouleversements sont la règle et non l'exception, la clarification des positions des scénaristes et des réalisateurs en tant qu'auteurs offre la possibilité d'outils supplémentaires à l'égard, par exemple, de la rémunération équitable des auteurs — qui est de mise dans d'autres pays, notamment en Europe —, outils qui pourraient s'avérer utiles si cette option doit un jour être envisagée en tant que politique. Une paternité claire est une étape essentielle pour y parvenir.
Merci d'avoir pris le temps de nous écouter. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Madame la présidente, je m'appelle Erin Finlay et je suis l'avocate en chef de la Canadian Media Producers Association, la CMPA.
Je suis accompagnée aujourd'hui de Stephen Stohn, qui est président de SkyStone Media et producteur exécutif de la série télévisée à succès Degrassi: Next Class et de toutes les versions précédentes de cette grande émission.
La CMPA représente des centaines de producteurs indépendants canadiens qui oeuvrent à l'élaboration, à la production et à la distribution de contenu de langue anglaise destiné à la télévision, au cinéma et aux médias numériques. La CMPA travaille au nom de ses membres pour assurer un brillant avenir à la production médiatique et au contenu canadien.
Avez-vous une émission de télévision canadienne préférée? Tous ces films canadiens qui font l'objet d'un battage médiatique considérable sur le circuit des festivals ont très probablement été produits par nos membres.
Que ce soit Degrassi, dont Stephen va parler dans un instant, du film The Breadwinner qui a reçu une nomination aux Oscars, de l'adaptation d'Alias Grace de Margaret Atwood, de Letterkenny ou de Murdoch Mysteries, nous avons de quoi être très fiers.
L'an dernier, les 3,3 milliards de dollars en volume de production cinématographique et télévisuelle indépendante canadienne ont généré plus de 67 000 emplois équivalents temps plein à la grandeur du pays. Les réalisateurs, les scénaristes, les comédiens, les membres des équipes de production et les producteurs qui occupent ces postes de création de grande valeur créent des émissions qui offrent au public une perspective canadienne sur notre pays, sur notre monde et sur notre place au sein de ce monde.
Nos succès sont le résultat direct d'un système de réglementation très efficace. Qu'il s'agisse des contributions des câblodistributeurs, du Fonds des médias du Canada, des exigences canadiennes en matière de programmation ou des lois sur la propriété intellectuelle qui protègent et encouragent la création canadienne, notre cadre législatif en matière de communications et de droit d'auteur est la pierre angulaire de notre marché intérieur, avec toute l'actualité et tout le dynamisme qu'on lui connaît.
Mais nous sommes aujourd'hui à la croisée des chemins, à un tournant de l'économie numérique. Ce n'est un secret pour personne que nous avons un monstre culturel de l'autre côté de la frontière. Des plateformes étrangères en marge du réseau comme Netflix et Amazon attirent des auditoires et des abonnés canadiens loin de nos radiodiffuseurs et câblodistributeurs canadiens. Ces joueurs étrangers diffusent du contenu américain directement dans nos foyers, à l'abri des règlements qui contribuent à bâtir notre vigoureuse industrie créative. Cette dynamique crée non seulement un avantage concurrentiel injuste, mais elle exerce aussi une pression énorme sur le système de financement qui préside à la production de contenu canadien.
Le fait de ne pas réglementer ces entités étrangères et la façon dont le contenu atteint maintenant les auditoires met en péril l'existence même des artistes et des industries créatives du Canada. Nous devons uniformiser les règles du jeu et donner au CRTC les outils dont il a besoin pour le faire. En termes simples, notre système doit être modernisé pour exiger que les services étrangers en marge du réseau et les nouveaux canaux de distribution qui exploitent notre marché contribuent à la production de contenu canadien, sinon il n'y aura plus de droit d'auteur canadien à examiner.
La CMPA aimerait attirer votre attention sur trois aspects problématiques de l'actuelle Loi sur le droit d'auteur qui ont une incidence négative sur la rémunération des artistes dans les industries créatives.
Premièrement, ces nouvelles façons de livrer le contenu rendront éventuellement désuet le régime de retransmission de la Loi sur le droit d'auteur. Depuis sa création, ce régime a généré environ 600 millions de dollars pour les industries créatives canadiennes. Le régime de retransmission doit être modernisé et rendu technologiquement neutre pour tenir compte des utilisations en ligne et sur dispositifs mobiles des œuvres protégées par le droit d'auteur.
Deuxièmement, les outils actuellement disponibles aux termes de la Loi sur le droit d'auteur sont inefficaces contre le piratage commercial à grande échelle. Nous demandons que la loi soit modifiée pour permettre expressément aux titulaires de droits d'obtenir une injonction à l'encontre des intermédiaires, injonction qui pourrait se traduire, entre autres, par le blocage de sites et l'imposition d'ordonnances de déréférencement.
Enfin, nous nous opposons vigoureusement aux efforts déployés par les auteurs et les réalisateurs pour être considérés à titre de coauteurs des oeuvres cinématographiques au regard du droit d'auteur. Le marché s'est penché sur cette question il y a longtemps et il n'est pas nécessaire de modifier la Loi sur le droit d'auteur en ce qui concerne la paternité ou la propriété des oeuvres cinématographiques.
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Au cours de la récente renégociation de l’ALENA, maintenant connue sous le nom d’AEUMC, le Canada s’est battu avec acharnement pour que ses industries culturelles soient exemptées des dispositions de l’accord. Le premier ministre Trudeau a déclaré que le fait de renoncer à l’exemption équivaudrait à abandonner la souveraineté et l’identité canadiennes.
L’exemption préserve et appuie la diversité des voix culturelles du Canada. Elle est essentielle à la prospérité continue de notre industrie créative, mais elle court un grand danger d’être sournoisement vidée de sa substance dans le cas de l’industrie cinématographique et télévisuelle canadienne. En effet, si des géants numériques mondiaux comme Apple, Google, Netflix et leurs semblables sont autorisés à continuer de diffuser leur contenu au Canada sans être soumis à aucune réglementation, le combat que nous avons mené pour maintenir l’exemption culturelle et pour sauver les emplois des créateurs et des diffuseurs de contenu culturel n’aura servi à rien.
Comme Erin l’a fait remarquer, nous sommes maintenant à la croisée des chemins, à un moment où il faut décider si les lois et les règlements comptent ou non. Si nous nous engageons dans l’une des voies, nous pourrons continuer de participer à l’élan de l’industrie nationale. Les plateformes numériques et les canaux de distribution, tant nationaux qu’étrangers, pourront contribuer au développement d’une industrie nationale florissante. Par contre, si nous nous engageons dans l’autre voie et que nous ne réagissons pas, nous abandonnerons la partie aux plateformes et au contenu étrangers, et nous céderons le pas aux géants qui rôdent juste l’autre côté de la frontière.
J’aimerais revenir sur une question que notre collègue Neal vient juste de soulever, à savoir la quête pour faire reconnaître en tant qu’auteur le scénariste ou le réalisateur d’une émission ou d’un film télévisé. Pour des raisons pratiques, cette question est sans contredit. Depuis des décennies, les producteurs ont été traités comme les auteurs par l’ensemble de l’industrie canadienne et, surtout, par l’ensemble de l’industrie américaine. Au cours de ces mêmes décennies, des rémunérations et des droits équitables ont été fixés pour les scénaristes et les réalisateurs par tous les participants de l’industrie, grâce à la négociation intensive d’ententes avec les syndicats et les gildes de l’ensemble de l’industrie.
La production d’émissions et de films télévisés est le résultat d’un travail de collaboration. Les producteurs réunissent tous les éléments créatifs nécessaires pour permettre à un projet de passer du concept à l’écran. Nous embauchons toutes les personnes qui jouent des rôles créatifs clés, et nous travaillons étroitement avec elles. Nous travaillons avec les scénaristes — que nous adorons — afin de transformer les idées en scénarios. Nous embauchons des réalisateurs, que nous adorons également, afin de transformer les scénarios en projets. Nous travaillons avec les acteurs, que nous aimons aussi. Qui peut imaginer une émission sans ses acteurs et leur contribution créative? Nous embauchons les directeurs artistiques qui créent les plateaux de tournage, les costumiers, les compositeurs et les musiciens. Qui peut imaginer une émission sans musique? La musique est essentielle. Nous travaillons avec des monteurs, des équipes de tournage et j’en passe, afin de façonner le projet et de porter à l’écran notre vision collective.
Les scénaristes, les réalisateurs et tous les autres contributeurs sont des partenaires importants des producteurs, et nous apprécions énormément toutes ces relations. Après tout, les émissions télévisées et les longs métrages sont les oeuvres collectives suprêmes.
Je vais maintenant replacer ces idées dans leur contexte. Comme vous le savez, je produis l’émission Degrassi. Nous avons maintenant sorti 525 épisodes sur une période de près de 40 ans. La licence originale des quatre plus récentes saisons a été cédée à Netflix, et ces saisons sont maintenant visionnées dans 237 territoires et dans 17 langues distinctes. Cette émission a été un exemple de réussite.
Il est simplement inacceptable de laisser entendre, par exemple, que la scénariste que nous avons embauchée pour écrire l’épisode 487, de longues années après la mise en place des personnages, des décors, des formats, des scènes, des intrigues et de la musique, devrait être considérée comme l’auteur de cet épisode. Aussi talentueuse que cette scénariste puisse être, elle travaille à partir d’une base — une base permanente — et d’une expression créative qui a été développée au cours de nombreuses années par un grand nombre de contributeurs distincts.
Le droit d’auteur d’un producteur est le fondement de toutes les sources de financement privé et public pour les films et les projets télévisuels du Canada et des États-Unis. Dans le domaine cinématographique, la paternité d’une oeuvre et la propriété du droit d’auteur sont les éléments qui permettent au producteur de commercialiser la propriété intellectuelle. Au bout du compte, nous, les producteurs, ne pourrons pas nous acquitter de notre travail de producteur si nous ne sommes pas considérés comme les auteurs des oeuvres cinématographiques, comme c’est le cas en ce moment.
Je vous remercie tous de m’avoir donné l’occasion de discuter de ces questions avec le Comité.
Erin et moi serions très heureux de répondre à toutes les questions que vous pourriez vous poser.
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Oui, madame la présidente.
J'appuie la proposition de M. Nantel. Des témoins se sont tout de même déplacés, et cela entraîne des frais. D'autres témoins sont aussi avec nous par vidéoconférence. Le Comité a l'occasion de recueillir beaucoup de renseignements, et si nous manquons de temps, il est toujours possible de leur poser des questions additionnelles. Je trouverais cela un peu disgracieux de la part du Comité d'éconduire les représentants qui se sont déplacés. Je pense aussi à l'intérêt des contribuables.
J'ai des questions à poser aux témoins, tout comme mon collègue. Nous estimons que c'est une question importante et ce serait dommage de passer outre. Les libéraux nous parlent beaucoup d'exemptions culturelles, et ma foi, cela ne se traduit pas nécessairement par des revenus pour nos artistes. C'est pourquoi nous avons des questions importantes à poser et nous appuyons la proposition de M. Nantel à ce sujet.
J'ajouterais également que la question du rapatriement de biens culturels autochtones est importante, beaucoup d'amendements sont proposés et le temps nous manque déjà. Nous pourrions plutôt prendre le temps de nous pencher à tête reposée sur le projet de loi concernant cette question — il y a des gens qui n'ont pas nécessairement eu le temps de revoir l'ensemble du projet de loi — et d'en faire l'étude au cours d'une séance ultérieure.
Nous n'avons donc aucune objection pour ce qui est de nous consacrer au projet de loi proposé visant à désigner le mois d'avril comme Mois du patrimoine sikh. Nous pourrions sûrement en faire l'étude très rapidement.
[Traduction]
Pourquoi ne mettrions-nous pas la question aux voix afin de déterminer la façon dont nous procéderons? Je crois que la proposition de M. Nantel sur laquelle nous voterons consiste à continuer de poser des questions orales aux témoins qui comparaissent devant nous.
(La motion est rejetée. [Voir le Procès-verbal])
La présidente: Étant donné que la motion a été rejetée, je vais proposer que tous ceux qui ont des questions qu’ils aimeraient présenter par écrit à nos témoins aient la possibilité de nous les remettre.
En outre, comme je l’ai mentionné aux deux groupes de témoins, compte tenu du fait que vous pourriez souhaiter formuler des observations au sujet de vos positions par rapport aux autres témoignages que nous avons entendus aujourd’hui, vous pourrez aussi nous envoyer des mémoires écrits.
Nous allons suspendre brièvement la séance pendant que nous permettons aux gens de quitter la salle. Ensuite, nous commencerons notre étude des projets de loi d’initiative parlementaire.
:
Madame la présidente, j'ai justement des commentaires à faire au sujet de l'article 2. Le Musée canadien de l'histoire a également émis des commentaires sur cet article.
Je vous ai demandé, madame la présidente, si les recommandations du Musée canadien de l'histoire avaient été prises en considération avant qu'on formule les amendements. Ces textes ont-ils été déposés avant, de telle sorte que les parlementaires des différents partis ont pu en prendre connaissance et les inclure dans les amendements à proposer? Je n'ai pas eu de réponse de votre part. Il y a eu un commentaire de la part de M. Nantel, toutefois.
Je pense que nous avons tous un objectif commun: nous assurer que le projet de loi atteint son but, c'est-à-dire qu'il est le plus adéquat possible.
Je répète que ce musée qui nous soumet des recommandations est un gardien du patrimoine, et vous ne m'assurez d'aucune manière que ces recommandations ont été prises en compte dans les amendements qui sont proposés. Je dois donc en conclure que nous allons demander à la Chambre des communes d'étudier, à l'étape de la troisième lecture, un projet de loi bâclé et au sujet duquel on a fait abstraction de commentaires particulièrement pertinents.
Madame la présidente, je dois vous informer que j'ai l'intention de considérer les recommandations et les amendements proposés par le Musée canadien de l'histoire, parce que cela vise notre objectif d'aujourd'hui. Nous voulons un projet de loi qui soit optimal et qui tienne compte des commentaires qu'ont formulés les témoins devant le Comité, ceux qu'on n'a pas virés de bord gracieusement avant même que nous ayons pu leur poser une seule question. Excusez-moi d'utiliser cette expression, mais c'est ce qui s'est passé tout à l'heure. On dit que le dossier des droits d'auteur est important, pourtant le gouvernement nous a démontré aujourd'hui que le bulldozer n'était jamais bien loin.
Je reviens à l'enjeu qui nous concerne aujourd'hui, c'est-à-dire le projet de loi sur le rapatriement de biens culturels autochtones. Nous estimons que cela doit être fait dans les règles de l'art, et le Comité manquerait à son devoir si, avant d'adopter des amendements, il ne prenait pas en considération les recommandations du Musée canadien de l'histoire, qui, ma foi, est l'un des intervenants majeurs dans la protection du patrimoine autochtone. Il sera parmi les acteurs importants lorsque viendra le moment d'élaborer une stratégie. En effet, le Musée canadien de l'histoire sera visé par cette stratégie, étant donné qu'il dispose de collections autochtones considérables.
Madame la présidente, je vous pose de nouveau la question. Essentiellement, cela a trait au temps. Quand ce texte a-t-il été soumis aux parlementaires? Cela donnait-il suffisamment de temps aux parlementaires pour prendre en considération les recommandations du Musée canadien de l'histoire avant de soumettre des amendements qui seraient étudiés lors de l'étude article par article du projet de loi?
Sinon, je dois en conclure que nous avons un document important, mais sur lequel les membres du Comité n'ont pas eu l'occasion de se prononcer. Si on adopte une approche qui ne tient pas compte de ces éléments qui m'apparaissent pertinents et importants, on risque de taper à côté.
:
Merci, madame la présidente.
D'abord, c'était dans un esprit un peu collégial que je disais être heureux que les conservateurs voient comme un problème le fait qu'on se garroche pour adopter ce projet de loi. Je rendais les armes comte tenu de la majorité, mais, honnêtement, je remercie beaucoup mon collègue d'avoir repéré cela.
Nous avons effectivement reçu hier des informations provenant du Musée canadien de l'histoire. Nous avons aussi reçu hier, ou peut-être était-ce ce matin, quelque chose du Musée royal de la Colombie-Britannique, si je ne me trompe pas. Pendant que je vous parle, je vais chercher. J'ai reçu un courriel à 10 h 14.
[Traduction]
L’objet du courriel était « Written responses to questions on Bill » (réponses écrites aux questions portant sur le projet de loi C-391).
[Français]
Nous avons reçu cela ce matin, à 10 h 14.
Monsieur Blaney, je vais vous laisser le temps de manger. Je ne vais quand même pas vous demander de faire des commentaires avec des carottes dans la bouche. Elles sont bonnes, d'ailleurs. C'est souvent le même menu.
:
Oui, eh bien, vous voulez que je limite mes commentaires à l’article 2. Le point que je fais valoir, c’est que, pour être franc, je suis fasciné de voir que nous sommes...
[Français]
Nous sommes en train d'adopter un projet de loi, alors qu'il y a des témoins des musées à entendre. Ils ne sont pas issus des Premières Nations, mais ces témoins ont certainement à coeur le rapatriement des biens culturels autochtones et la réconciliation avec les peuples autochtones. Personne ici ne peut me regarder dans les yeux et me dire que les recommandations, la rédaction du projet de loi et les amendements tiennent compte des informations qui nous ont été envoyées par le Musée royal de la Colombie-Britannique ce matin, à 10 h 14. C'est impossible.
Comme le disait mon collègue, n'est-ce pas un peu insultant pour tous ces gens que le Comité convoque? Ce qui m'intéresse ce matin, c'est que nous fassions la bonne chose, peu importe ce que le gouvernement en pense. Et la bonne chose à faire consiste à m'assurer, en tant que représentant des néo-démocrates, que mes collègues des Premières Nations peuvent avaliser les amendements. Ce sont des gens dont nous avons beaucoup parlé, par exemple M. Saganash, qui a souvent été cité. C'est sûr que c'est mon intérêt premier.
Honnêtement, il y a un vice de procédure important lié au fait de se garrocher immédiatement dans l'adoption du projet de loi comme si de rien n'était, alors qu'il y a des témoins importants à entendre. Nous ne pouvons pas contester l'importance et la compétence professionnelle des gens du Musée royal de la Colombie-Britannique.
Je vois que vous voulez parler, madame la présidente. Je vais vous laisser le faire et nous reprendrons la parole après.
Quelqu'un peut-il m'expliquer clairement ce vice de procédure de ne pas tenir compte des points de vue de spécialistes comme ceux du Musée royal de la Colombie-Britannique et du Musée canadien de l'histoire avant d'adopter ce projet de loi?
:
L'amendement que propose M. Breton est pertinent et concerne ce que j'ai fait valoir plus tôt. Je viens d'en discuter avec M. Boissonnault. Nous avons observé que, parfois, les libéraux craignent d'inclure des définitions dans un projet de loi. Pourtant, ce sont les bases d'un projet de loi. On parle ici du rapatriement de biens culturels autochtones, mais on veut enlever la définition. Je trouve que, dès le départ, cela a comme effet d'édulcorer radicalement le projet de loi, d'autant plus que le Musée canadien de l'histoire nous recommande de faire une distinction entre les biens culturels autochtones qui proviennent du Canada et ceux qui viennent de l'extérieur du pays.
Pourquoi le Musée fait-il cette recommandation? Parce que cela permettrait de préciser à quels objets appartenant à des collections publiques hors du Canada s'applique la loi. C'est un enjeu extrêmement important, qui a été mis de côté, mais qui se trouve dans le document qui nous a été présenté hier, après la date limite pour déposer des amendements au Comité. C'est la raison pour laquelle je recommande que le Comité établisse une nouvelle échéance pour la présentation de recommandations et que nous options pour un ajournement, de façon à avoir le temps de prendre connaissance des informations nouvelles qui ont été portées à l'attention du Comité et qui vont nous permettre de prendre des décisions éclairées, par exemple sur la proposition consistant à retirer une définition. À notre avis, il est préférable d'avoir une définition, voire de rendre les définitions plus claires.
Je veux simplement préciser qu'il y a des biens de propriété publique et des biens de propriété privée. Il y a aussi des biens autochtones qui sont au Canada et d'autres qui sont à l'extérieur du pays. Cela a des conséquences importantes pour les propriétaires de ces biens autant que pour les musées. Dans le cas présent, on parle aussi des communautés autochtones qui souhaitent rapatrier ces biens. Il est important que notre approche soit ouverte, mais que cela n'empiète pas sur des droits individuels à la propriété privée.
C'est exactement dans ce sens que vont les recommandations du Musée canadien de l'histoire. Comme je l'ai déjà dit, c'est la raison pour laquelle il m'apparaît important, à ce moment-ci, que nous disposions de davantage de temps pour prendre connaissance des recommandations du Musée canadien de l'histoire, plus spécifiquement en ce qui concerne l'amendement de M. Breton, qui, pour sa part, propose qu'on enlève la définition. Je trouve que commencer par enlever les définitions est une façon curieuse de démarrer un projet de loi.
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Madame la présidente, la plus grande marque de respect que l'on puisse démontrer envers les communautés autochtones, c'est justement d'appeler les choses par leur nom et de bien les définir.
Je suis surpris de voir que, souvent, les libéraux vont exprimer de grandes intentions, mais quand il s'agit de les concrétiser, de poser des gestes concrets, cela s'évanouit.
La définition qui est proposée dans le projet de loi par le député libéral M. Bill Casey est qu'un « bien culturel autochtone » est un « objet d'importance historique, sociale, cérémonielle ou culturelle pour les peuples autochtones du Canada. » Cela me semble une définition assez large et inclusive.
Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure: il y a des objets qui sont à l'extérieur du Canada et d'autres qui sont ici, au Canada.
J'en viens encore à la définition proposée, celle d'un « objet d'importance historique, sociale, cérémonielle ou culturelle pour les peuples autochtones du Canada ». Ce que le Musée canadien de l'histoire nous demande de considérer, c'est de préciser si l'objet est conservé dans des collections à l'extérieur du Canada ou bien dans des collections publiques au Canada.
Nous voyons qu'il y a une distinction entre des collections qui sont conservées à l'extérieur du Canada et des collections qui sont conservées au Canada. Si la loi s'applique aux objets gardés au Canada, il nous est recommandé de rédiger un texte plus complexe, plus dense, que ce qu'un résumé peut contenir.
Le Musée nous a mentionné que la consultation des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice et du ministère d'Affaires autochtones et du Nord Canada est fortement recommandée, puisque la formulation actuelle a des répercussions importantes, notamment en ce qui concerne les négociations sur les revendications territoriales globales entre le Canada et les peuples autochtones, les négociations sur l'autonomie gouvernementale et les droits individuels à la propriété privée reconnus par la Constitution.
Nous parlons donc de droits reconnus dans la Constitution, de droits individuels à la propriété privée.
Il est également important de préciser que, dans la définition de « bien culturel autochtone », nous n'avons pas encore examiné ce qui a été soulevé plusieurs fois par les témoins, c'est-à-dire les restes humains.
À cet égard, l'inclusion d'objets cérémoniels et de restes humains est conforme au paragraphe 2 de l'article 12 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, dont le Canada est signataire.
Madame la présidente, un élément qui nous apparaît fondamental et qui est soulevé dans le mémoire qui nous a été présenté hier, c'est qu'il est important que la loi ne s'applique qu'aux collections publiques afin qu'elle ne porte pas atteinte aux droits des personnes qui possèdent une collection privée. Je le rappelle: nous n'avons pas eu le temps de prendre connaissance du mémoire ni l'occasion de déposer des amendements liés aux recommandations de ce que j'appelle les « gardiens du patrimoine ».
Il y a des enjeux importants, madame la présidente. Je vous rappelle que nous sommes ouverts à l'esprit du projet de loi, mais que nous voulons que cela soit bien fait. Nous ne voulons pas en arriver à ce que j'appellerais « un projet de loi émasculé de son essence même », par exemple, en enlevant la définition fondamentale de ce qu'est un bien culturel autochtone. Nous voulons plutôt en arriver à un projet de loi qui encadre bien ce que nous voulons faire. Nous voulons donner l'occasion aux communautés de rapatrier leurs biens culturels, mais en tenant compte du contexte juridique et des droits qui sont inscrits dans la Constitution.
À cet égard, nous ne pouvons pas être en faveur d'une proposition visant à enlever une définition. Au contraire, cette définition doit être beaucoup plus élaborée.
Madame la présidente, j'espère que vous allez me dire comment je dois procéder, une fois que nous aurons débattu de cet amendement, pour faire en sorte que nous puissions avoir plus de temps, vraiment, pour prendre connaissance des recommandations qui nous ont été soumises, non seulement par le Musée canadien de l'histoire, mais également par un musée de la Colombie-Britannique.
Il y a des éléments importants à considérer. Nous ne voulons pas bâcler le travail. C'est la raison pour laquelle il nous apparaît essentiel d'avoir plus de temps.