Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Je déclare ouverte la 138e séance du Comité permanent du patrimoine canadien. Bienvenue et bon retour à tous. Nous nous réunissons dans notre nouveau local de l'édifice de l'Ouest.
Nous poursuivons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-369, lequel porte sur la Journée nationale des peuples autochtones. Nous recevons Natan Obed, président, et Tim Argetsinger, conseiller politique, d'Inuit Tapiriit Kanatami, ou ITK, ainsi que Virginia Lomax et Casey Hunley, conseillères politiques de l'Association des femmes autochtones du Canada.
Nous procéderons dans l'ordre dans lequel vous figurez dans l'ordre du jour. Nous commencerons donc par l'ITK.
Nakurmiik. Merci. C'est un honneur de témoigner cet après-midi. Je suis impatient de discuter avec vous.
En ce qui concerne le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, nous devrions profiter de toutes les occasions qui s'offrent de célébrer les peuples autochtones. Les échanges actuels sur la réconciliation, la manière dont le gouvernement du Canada comprend ses obligations quant aux droits des peuples autochtones et la concordance entre nos gouvernements autonomes et les structures fédérales sont tous en évolution, selon moi, et le demeureront pendant un certain temps. J'espère qu'en reconnaissant les peuples autochtones et en instaurant une journée expressément à cette fin, nous pourrons poursuivre les échanges sur la réconciliation. Cette journée peut nous permettre de transmettre mutuellement nos messages et faire en sorte que le pays reconnaisse et célèbre ses peuples autochtones. Du même coup, nous pouvons éduquer la population canadienne à propos des peuples autochtones.
Pour commencer, le terme englobe trop souvent tous les peuples autochtones du pays, auparavant appelés premiers peuples, particulièrement aux termes de l'article 35 de la Constitution. Nous pouvons remplacer ce terme par ce que nous sommes vraiment, c'est-à-dire les Premières Nations, les Inuits et les Métis. L'ITK recommande premièrement que le titre du projet de loi contienne les véritables noms de nos peuples au lieu de simplement parler de peuples autochtones. Ce faisant, le gouvernement obligerait les Canadiens à comprendre qu'il existe au pays un ensemble complexe de nations et de groupes différents. Il y a ici un lien direct avec l'article 35 de la Constitution, qui indique que le Canada comprend trois peuples autochtones: les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
Nous tous, ici présents dans la salle, comprenons peut-être la complexité de la conversation, mais les Inuits sont souvent amalgamés aux idéologies d'autres peuples autochtones du pays, et bien des gens ne comprennent pas la différence entre les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Nous avons donc ici une occasion en or d'indiquer très précisément de qui on parle quand il est question d'une journée des peuples autochtones. Ce terme est employé aux Nations unies et dans un contexte mondial, mais j'espère que dans les lois canadiennes, nous pourrons mettre l'accent sur les peuples autochtones reconnus à l'article 35 de la Constitution. Il existe d'autres lieux et d'autres occasions où nous pouvons célébrer globalement le rôle des peuples autochtones de tous les pays.
Il faudrait aussi se pencher sur l'objectif de cette journée. Selon nous, il vaudrait bien mieux qu'elle soit positive et tournée vers l'avenir au lieu d'être une sorte de jour du souvenir où on se souviendrait des griefs du passé, même si l'histoire faisait évidemment partie de la conversation. Je sais qu'il existe des liens directs entre les appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation et le présent projet de loi. Sans vouloir dissoudre ces liens complètement, je voudrais que les Canadiens et les Premières Nations, les Inuits et les Métis puissent parler des éléments positifs et de la grande force que nous apportons à la société canadienne, des grands chefs que comprennent nos communautés et des visions que nous avons quant à l'avenir à titre de Canadiens, mais aussi à titre d'Autochtones exerçant leurs droits à l'autonomie gouvernementale.
La date à laquelle cette journée sera ajoutée au calendrier est, selon moi, moins importante que les deux premiers points: il faut que cette journée témoigne de la complexité des peuples autochtones en parlant des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et il faut que ce soit un jour férié positif synonyme de célébration plutôt qu'une journée soulignant simplement les violations des droits de la personne ou les génocides dont notre pays a été le théâtre.
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Cela ne signifie pas que nous ne parlerions pas de ces choses. Je pense simplement que compte tenu de l'époque à laquelle nous vivons et du désir que, je le sais, les Canadiens éprouvent d'en apprendre davantage à propos des Premières Nations, des Inuits et des Métis, ce serait la meilleure manière d'utiliser ce jour férié.
Je voudrais d'abord souligner que nous sommes réunis aujourd'hui dans le territoire traditionnel non cédé des Algonquins-Anishinabe.
Depuis 1974, l'Association des femmes autochtones du Canada, ou AFAC, est le représentant national choisi des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre autochtones. Nous représentons des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre, qu'il s'agisse d'Autochtones inscrites, non inscrites ou laissées pour compte vivant à l'intérieur ou à l'extérieur des réserves, de Métisses ou d'Inuits membres de notre association. Nous défendons leurs droits pour que leurs voix soient entendues.
Aujourd'hui, nous nous unissons à la Commission de vérité et de réconciliation pour réclamer la création de deux jours fériés pour les peuples autochtones au Canada.
Sachez d'abord que l'AFAC appuie la création d'un jour férié pour célébrer les peuples autochtones. Au pays, le fait de prévoir un jour férié pour célébrer la Journée nationale des peuples autochtones est un témoignage de réconciliation. Le Canada doit réserver du temps pour attirer l'attention du pays sur les cultures magnifiquement riches et diversifiées des peuples autochtones, qui méritent d'être célébrées.
Les peuples autochtones méritent de faire l'objet d'une célébration afin d'avoir l'occasion de faire connaître leurs réalisations et leurs accomplissements, de les honorer et de se reconnecter avec eux alors que le pays les regarde et les écoute. En tenant une journée expressément pour célébrer les peuples autochtones, les Canadiens ont l'occasion de se renseigner sur la diversité et la richesse culturelles des peuples autochtones du Canada. Il est temps d'écouter et de célébrer.
À l'heure actuelle, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon célèbrent la Journée nationale des peuples autochtones, un jour férié qui permet de reconnaître et de souligner la précieuse contribution des peuples autochtones au développement sain des communautés, du territoire et du pays, et de célébrer le patrimoine unique, les cultures diversifiées et les réalisations hors du commun des peuples autochtones du Canada. Les peuples autochtones et leurs cultures méritent indubitablement d'être célébrés.
En outre, l'AFAC, à l'instar de la Commission de vérité et de réconciliation, réclame la tenue d'un jour férié de vérité et de réconciliation le 1er octobre. Nous devons, chaque année, honorer et commémorer les enfants qui ont fréquenté les pensionnats, tant les survivants que les disparus.
L'appel à l'action no 80 de la Commission indique que la tenue d'un jour férié permettrait aux familles de participer à une journée pour honorer ensemble les enfants. Cela pourrait les aider à réfléchir aux liens d'amour cruciaux qui existent entre parents et enfants, des liens fondamentaux pour vivre une bonne vie, des liens rompus si abruptement par les pensionnats. Cela permettrait aux enfants pris en charge de comprendre l'amour dont ils ont besoin de la part de leurs parents, et offrirait aux parents une occasion de réfléchir à l'horreur inhérente au fait de se faire arracher de force un enfant.
Pour ouvrir la porte à une ère de réconciliation, nos communautés et nos nations doivent honorer et guérir les personnes. Nous devons nous souvenir des répercussions antérieures et actuelles de la colonisation. Les pensionnats, la rafle des années 1960 et les autres stratégies d'assimilation ne peuvent être oubliés ou ignorés, et nous ne pouvons pas oublier. Nous devons réserver du temps pour éduquer les gens, pour réfléchir et pour reconnaître le cheminement vers la réconciliation, et ce, à l'échelle du pays.
Enfin, l'AFAC recommande instamment la création de deux jours fériés distincts. Il y aurait d'abord la Journée nationale des peuples autochtones, un jour de célébration permettant de faire connaître les histoires des peuples autochtones, qui sont pleines de cultures riches et diverses, et qui font des contributions substantielles, pas seulement au sein des communautés et au Canada, mais dans le monde entier. Le second jour férié serait une journée nationale de vérité et de réconciliation porteuse de réflexion et de souvenir, un jour pour rendre hommage aux victimes, éduquer les Canadiens quant aux répercussions antérieures et actuelles de la colonisation, et admettre le traumatisme intergénérationnel qui touche nos communautés à ce jour.
Nous sommes d'avis qu'il est inapproprié et irrespectueux de combiner une journée de célébration et un jour du souvenir. Je voudrais vous laisser avec une réflexion pour vous aider à mettre les choses en contexte et vous faire voir les choses comme nous les voyons. Est-ce que quelqu'un dans cette pièce envisagerait de combiner la fête du Canada et le jour du Souvenir?
Natan, merci beaucoup d'être venu pour nous faire part de vos réflexions.
Comment pensez-vous que nous pourrions tenir une célébration tournée vers l'avenir à un autre moment que la Journée nationale des peuples autochtones? Si nous envisagions de réserver le 30 septembre ou un jour d'automne à cette fin, comment pourrions-nous commémorer les faits et respecter les appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation, tout en faisant ce que vous préconisez aujourd'hui, c'est-à-dire d'être positifs et tournés vers l'avenir? Comment commémorer le passé et regarder vers l'avenir?
Voilà une excellente question. L'Association des femmes autochtones du Canada a fort bien expliqué qu'il est difficile de combiner le fait de reconnaître les violations des droits de la personne et celui de célébrer le dynamisme des peuples autochtones du pays.
Je célèbre la Journée nationale des peuples autochtones, autrefois appelée Journée nationale des Autochtones, depuis mon enfance, et c'est un jour de célébration. Je n'ai jamais considéré qu'il s'agissait d'un jour au cours duquel on revient sur un moment précis du passé. Simplement, nous sommes là, nous sommes résilients et nous avons beaucoup à célébrer. La Journée du chandail orange et le désir croissant des Canadiens de comprendre les pensionnats et peut-être d'autres problèmes comme la relocalisation sont, je pense, des questions au sujet desquelles les Canadiens voudront en savoir de plus en plus à mesure que les gens comprendront exactement ce qu'il s'est passé.
Il est vraiment difficile de combiner les deux. Pour ce qui est de recommander un jour du calendrier, je crains de ne pas pouvoir vous être utile. Cependant, peu importe le jour choisi dans ce projet de loi, il faudra définir clairement les deux aspects et, d'une manière ou d'une autre, arriver à les concilier.
Je suis désolé de ne pas avoir de meilleure solution.
C'est excellent. Je voulais simplement savoir ce que vous pensiez. Je vous remercie. Ce n'est pas un secret que je suis en faveur de deux jours. Je considère qu'il faut maintenir la Journée nationale des peuples autochtones telle qu'elle est et créer un autre jour de réflexion et de respect pour rendre hommage aux peuples autochtones, aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis. Nous devons commémorer cela.
J'ai été frappé par les témoignages, et j'ai parlé à des collègues qui ont été sidérés par les propos d'enfants autochtones et non autochtones qui pensaient que la Journée du chandail orange n'était qu'une journée où on arbore un chandail orange. Ils doivent savoir pourquoi on le fait. Nous devons tous le savoir. Nous devons aller au coeur de la question et prévoir un jour à notre calendrier pour prendre un temps d'arrêt afin de réfléchir. L'argument monétaire ne me convainc pas. Les gens seront payés quand même.
Prévoyons donc un temps d'arrêt pour que tout le monde... C'est 11 millions de dollars. Vaut-il la peine de dépenser une telle somme pour commémorer ce volet de notre histoire. Oui, absolument.
Virginia et l'AFAC, je vous remercie de ce témoignage émouvant. Comment pouvons-nous préserver le meilleur de la Journée nationale des peuples autochtones tout en commémorant ce qu'il faut commémorer un autre jour?
La réponse la plus claire qui me vienne à l'esprit, c'est qu'il faut tenir deux journées distinctes. Je ne peux vraiment pas proposer quelque chose de mieux que de tenir deux journées distinctes à des fins différentes.
Vous avez aussi indiqué qu'il importe pour vous de regarder vers l'avenir, mais aussi de commémorer les faits du passé. Que conviendrait-il de faire le 30 septembre, qui serait un nouveau jour férié? Que voudriez-vous qu'il se passe un jour comme celui-là?
Je pense que nous voudrions qu'on mette beaucoup d'accent sur l'éducation, du moins initialement. Je pense que vous avez fort bien mis en évidence le fait que bien des gens ne comprennent même pas l'origine de la Journée du chandail orange. Si on prévoit une journée distincte pour rendre hommage aux victimes, commémorer les faits et se souvenir des pensionnats et de la rafle des années 1960, il faut combiner le tout avec des démarches d'éducation sur ce qu'il s'est passé, sur que ce que cela signifie et sur ce que cela continue de signifier. Je m'efforcerais de combiner les commémorations avec des initiatives d'éducation. Si on pouvait proposer d'ajouter de l'information sur ces journées aux programmes pédagogiques des écoles, ce serait un bon point de départ.
Je n'ai pas d'opinion à ce sujet, à ce stade-ci. J'ai grandi en Saskatchewan, et je ne me rappelle pas d'avoir déjà eu de l'école le jour du Souvenir. Nous étions à une cérémonie en ville. Chez moi, ce qui était, entre autres, hors du commun, c'est que la cérémonie avait lieu à l'école. Même si nous avions congé en principe, nos parents nous conduisaient à l'école pour que nous apprenions, pour que nous rendions hommage et pour que nous nous souvenions.
À mon avis, nous pourrions certainement en faire autant aujourd'hui.
Natan, de quelle autre façon pourrions-nous être plus prudents dans notre choix de mots? Le gouvernement emploie le terme « autochtones ». Nous ne ratons pas une occasion de dire « Premières Nations, Métis et Inuits ». Que pouvons-nous faire d'autre pour faire attention aux termes que nous employons au gouvernement?
Il n'existe pas de terme panautochtone. Chaque terme que vous employez et qu'un membre d'une Première Nation, un Inuit ou un Métis emploie provient de sa communauté et de sa société. Les Inuits ne parlent pas de l'île de la Tortue, même si nous respectons les Premières Nations qui décrivent le monde ainsi.
La complexité de la vision du monde des Autochtones au pays, les Premières Nations, les Inuits et les Métis, correspond à celle de tout grand groupe ethnique sur le plan sociétal et religieux. Quand on parle d'une cérémonie, de ces choses, il est question d'une partie des Premières Nations, des Inuits et des Métis au pays, pas de l'ensemble de ceux-ci. Il n'y a pratiquement aucune façon de désigner en même temps l'ensemble des croyances religieuses et sociales de tous les peuples autochtones du pays. Lorsqu'on s'abstient d'employer ce genre de tournures générales, on est plus prêt du respect de l'ensemble des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Je vous dis à vous deux, dans la langue crie que j'apprends, tatawaw, c'est-à-dire, bienvenue, il y a de la place pour tout le monde, et hay-hay. Vous êtes tous les deux des leaders, tout comme vos organisations. Merci d'être à nos côtés dans ce cheminement.
Je vous suis reconnaissant d'être ici pour nous informer et nous sensibiliser sur ces questions. J'aimerais revenir un peu sur votre explication concernant l'emploi de ces trois termes plutôt qu'un seul. Je crois que vous avez fourni une explication quand on vous a demandé des éclaircissements, et c'était très intéressant.
Aimeriez-vous en dire davantage à ce sujet? Nous n'en avons pas entendu parler avant. Ce sont pour nous de nouveaux renseignements. Vous avez cédé la parole à... Nous avons discuté du terme « autochtone », et vous parlez de quelque chose de différent. Pouvez-vous en dire un peu plus à ce sujet, s'il vous plaît?
Vous devez comprendre que les différences entre Premières Nations, Inuits et Métis dans le contexte fédéral sont étonnamment difficiles à comprendre. Très peu de personnes au pays, même au sein de la profession juridique, peuvent expliquer la façon dont chacun de ces trois peuples autochtones interagit avec la Couronne, ou avec les provinces et les territoires.
Nous ne sommes pas à l'origine de cette complexité. Elle découlait souvent des ressources naturelles de l'endroit, des gouvernements fédéral provinciaux et territoriaux de l'époque lorsqu'ils avaient besoin de quelque chose sur nos terres. C'est inutilement complexe. Nous n'en sommes pas à l'origine, et pour y résister, nous devons dire dans la Constitution qu'il y a trois peuples autochtones: les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
En ce qui nous concerne, nous interagissons avec le gouvernement fédéral au moyen de traités modernes, d'accords sur les revendications territoriales. Un lien existe entre nous et la Couronne. Pour de nombreux Autochtones au pays, c'est la Loi sur les Indiens. Nous n'y sommes pas assujettis. Différentes lois et différentes règles s'appliquent aux différents segments de la population autochtone au pays, et par conséquent, le recours à une démarche panautochtone exclut ou minimise souvent l'expérience de certains groupes d'Autochtones au pays.
Pendant des dizaines d'années, les Inuits ont entendu parler d'investissements du gouvernement fédéral pour les Autochtones, dans le cadre de budgets ou autres, qui ne se sont jamais rendus aux communautés inuites. C'est pour le gouvernement fédéral un moyen simple de parler de peuples autochtones tout en excluant dans ce contexte les intérêts de certaines Premières Nations, de certains Inuits ou de certains Métis.
L'une des façons d'empêcher cela est d'affirmer délibérément qu'il existe trois peuples autochtones en vertu de la Constitution du pays et d'employer cette terminologie. On élève ainsi le niveau de discussion: Pourquoi y a-t-il une différence? Quelle est la différence? Comment pouvons-nous l'apprécier et ensuite y donner suite? Le seul ajout du mot « Inuits » dans cette mesure législative représenterait une énorme victoire pour les Inuits du pays.
Nous avons encore de la difficulté à avoir une idée de qui nous sommes. Je crois que la plupart des Canadiens savent qu'il y a des Inuits au pays. Ils emploient peut-être un autre terme pour nous désigner, mais ils savent que nous vivons dans l'Arctique, que nous avons une nature symbolique et que nous sommes de bons artistes, probablement, mais il y en a très peu qui en savent davantage. Nous devons répéter au fil du temps que nous faisons partie de la communauté autochtone du pays, sans être des Premières Nations ou des Métis, et que nous avons une relation très différente avec le gouvernement fédéral.
Nous nous rapprochons un peu plus de ces réalités lorsque nous retirons le terme « autochtones » et que nous le remplaçons par les termes « Premières Nations, Inuits et Métis ».
Je vous suis reconnaissant de ces explications, car vous avez apporté d'autres éclaircissements. Je pense que cela revêt une nette importance dans la mesure où, comme vous le laissez entendre, c'est un des points de départ possibles, qui mène à cette autre discussion, et de toute évidence à la sensibilisation qui en découlerait en présentant les choses ainsi.
Je sais que vous avez répondu un peu en remettant en question le moment. Vous avez dit que vous avez grandi en célébrant un jour précis, mais vous n'avez pas mentionné la date.
La Journée nationale des peuples autochtones a lieu le 21 juin.
Dans la collectivité où j'ai grandi, nous recevons un financement du gouvernement fédéral pour organiser des festivités ce jour-là. Dans l'Inuit Nunangat, notre patrie, nos organisations inuites tiennent également des activités, et c'est souvent un jour de congé.
À l'heure actuelle, d'un bout à l'autre de notre patrie, nous célébrons de différentes façons la Journée nationale des peuples autochtones avec le gouvernement du Canada.
C'est donc une journée dont vous vous souvenez, un jour précis. C'est tout ce que je voulais savoir, car la date — le 21 juin — a été mentionnée à maintes reprises.
Je voulais juste préciser que c'est une date qui cadrerait avec ce que vous faites déjà.
Merci de parler de la Saskatchewan et du jour du Souvenir. C'est semblable en Alberta, mais différent dans une grande partie du pays. Ce n'est pas un jour férié; c'est un jour d'école.
Si nous avons ce genre de disparité d'un bout à l'autre du pays, il pourrait être intéressant de voir s'il y a d'autres moyens de rassembler les différentes régions autour de la même question. Je pense que nous pourrions peut-être aller au-delà d'une simple journée de congé. Il pourrait peut-être y avoir une sorte de programme fédéral qui couvre la période précédant la journée. Je suis certaine que nous nous rappelons tous, par exemple, des Minutes du patrimoine à Radio-Canada. Nous pourrions peut-être avoir une campagne de relations publiques similaire en prévision du choix de journées des provinces pour encadrer ces activités de différentes manières ou si différents employeurs ne sont en quelque sorte pas tenus de donner ces journées de congé à leurs employés, qui ne pourront pas les passer avec leurs enfants. Il y aurait à tout le moins une sorte de plan national en place pour attirer l'attention sur l'importance de la journée même si la date n'est pas en soi ce qui importe. Je pense que cela renvoie aux autres observations que nous avons formulées. Ce n'est pas la date qui importe; c'est plutôt la signification de la journée.
Je vous invite tous à mettre votre oreillette. Les commutateurs du bas servent à passer de l'anglais au français. Un jour, les services de traduction seront peut-être également offerts dans des premières langues. C'est déjà ainsi à la nouvelle Chambre des communes, ce qui est une excellente nouvelle.
C'est la question à laquelle nous devons répondre. Nous avons beaucoup discuté de ce sujet dans les derniers mois. Je me souviens que mon collègue M. Blaney a évoqué le jour du Souvenir. Il y a eu des dialogues passionnés entre les députés des deux côtés, qui voulaient tous rendre hommage à nos militaires et qui se demandaient si c'était une bonne chose de créer un jour de congé.
Franchement, la question ici ne concerne pas la date, même s'il faut en choisir une, bien sûr. Mme Lomax a précisé qu'on ne penserait pas à mélanger le 1er juillet, ou la fête de la Confédération, et le jour du Souvenir.
Je crains que ce dossier ne s'embourbe et je pense qu'il faut procéder. Nous avons entendu beaucoup de points de vue et, effectivement, il y a un risque qu'on mélange les dates. On se demande si la création d'une nouvelle journée le 21 juin est une bonne chose alors qu'il y a aussi la Journée du chandail orange.
Monsieur Obed et madame Lomax, j'aimerais que vous en parliez davantage. Comme vous l'avez bien dit, madame Lomax, on ne penserait pas à mélanger le jour du Souvenir et la journée de célébration du 1er juillet. Selon vous, y a-t-il matière à procéder?
Je suis inquiet, car ce sera bientôt la fin de la session de la Chambre des communes, et j'aimerais m'assurer que ce projet de loi verra le jour après tout ce processus.
Pour que les choses soient claires, la question consiste à déterminer ce que nous ferions pour éviter de mélanger ces deux journées, n'est-ce pas? Pour être bref, il faut les séparer pour distinguer sans équivoque leur signification respective. Je pense qu'il serait également prudent de recourir à des programmes distincts pour les différentes journées afin de les distinguer sur le plan conceptuel.
La journée de célébration, pendant laquelle il y aura de la danse et de la musique pour souligner des cultures très distinctes et très dynamiques, se déroulera dans un esprit différent que celle visant à sensibiliser les gens et à les faire réfléchir.
Pour moi, la façon de les distinguer consiste non seulement à les séparer clairement dans le temps, mais aussi à faire en sorte que le gouvernement fédéral donne l'exemple en montrant ce qu'elles sont censées signifier et ce qu'elles signifient.
Chaque collectivité de l'Inuit Nurangat, notre patrie, reçoit un peu de financement du gouvernement fédéral pour célébrer la Journée nationale des peuples autochtones. C'est le financement auquel j'ai fait allusion. À propos de l'effort des Autochtones, des Premières Nations inuites et des Métis pour en faire un jour férié, c'est une discussion qui a été amorcée bien avant la Commission de vérité et réconciliation. Des organisations représentant les Inuits, nos gouvernements et nous avons déjà commencé à reconnaître cette journée comme un jour férié au sein de nos propres structures.
Quant à la désignation dans ce projet de loi d'un jour férié pour tous les Canadiens, je ne voudrais pas que ce soit formulé comme ce l'est maintenant, soit un appel à l'action de la Commission de vérité et réconciliation au moyen de la désignation d'un jour férié le 21 juin, car cela mélange manifestement l'emplacement et l'objet établis pour une Journée nationale des peuples autochtones à cet aspect de l'appel à l'action de la Commission.
Une fois de plus, que le jour férié soit le 21 juin ou une autre date du calendrier est une question sur laquelle je n'aurai pas d'opinion avant de plus amples consultations.
Puis-je demander des éclaircissements? Laissez-vous entendre qu'il y a de fortes chances pour qu'aucune de ces journées ne soit créée si elles ne sont pas combinées?
Je n'invoquerais pas cette possibilité. La réalité, c'est que nous en parlons depuis longtemps et qu'il y a beaucoup de points de vue. Comme vous l'avez dit, je ne voudrais pas qu'une atteinte aux dates soit l'effet secondaire de ce projet de loi. Je pense que, de manière très efficace, comme vous le dites, le jour du Souvenir, le 11 novembre, est une chose et que le 1er juillet en est une autre.
De notre point de vue, si l'on craint que la poursuite du débat sur l'importance de dates distinctes nuise à la progression du projet de loi, je dirais que donner suite à une mesure législative qui ne respecte pas l'esprit distinct des deux journées dont nous parlons reviendrait à trahir l'objet du projet de loi.
Tout d'abord, je vous suis reconnaissant de votre contribution. Elle est très utile. Ce projet de loi est extrêmement important, et nous ne pouvons apprendre qu'au moyen de consultations, non seulement avec vous, mais aussi avec d'autres groupes et d'autres personnes.
Je veux d'abord savoir si des consultations ont eu lieu avant le dépôt de ce projet de loi à la Chambre des communes par l'auteur de la motion, la députée Jolibois.
Monsieur Obed, y a-t-il eu des consultations? Est-ce la première fois qu'on vous demande votre opinion?
Si je peux me permettre d'intervenir pour obtenir une précision. Je ne sais pas si la réponse est affirmative: oui, c'est la première fois que vous êtes consultés, ou oui, vous avez été consultés avant.
Monsieur Obed, vous avez affirmé plus tôt que vous préférez que la journée soit positive et tournée vers l'avenir. La Journée nationale des Autochtones a été créée en 1996. Son objectif était de souligner « le patrimoine unique, la diversité culturelle et les réalisations remarquables des Premières Nations, des Inuits et des Métis. » Elle faisait partie du programme gouvernemental Le Canada en fête qui englobe la Saint-Jean-Baptiste, la Journée canadienne du multiculturalisme et la fête du Canada. La Journée nationale des peuples autochtones ne satisfait-elle pas déjà aux exigences qui importent le plus selon vous?
L'évolution de la Journée nationale des peuples autochtones a été formidable à voir. Du début des années 2000 jusqu'à maintenant, je pense qu'elle a gagné en importance, et des célébrations ont maintenant lieu d'un bout à l'autre du pays, et un plus grand nombre de Canadiens savent de quoi il s'agit. Beaucoup de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis l'attendent avec impatience et la célèbrent. Donc, oui, je pense que l'esprit de ce que j'imagine en tant que jour férié s'y trouve déjà, même s'il semble que la création d'un jour férié a plus de poids et permet de sensibiliser davantage les gens à l'aide d'une plus grande tribune. Quand on pense aux congés, aux jours fériés et à la façon dont ils ont été désignés au fil du temps, on constate qu'ils sont de nature coloniale et qu'ils se rapportent au fondement du pays, sans nécessairement tenir compte des peuples autochtones établis au Canada. On se démarquerait ainsi considérablement de cet héritage. Je pense que c'est une excellente occasion.
Oui. C'est l'idée de tenir une journée de reconnaissance et de réflexion, non seulement en ce qui concerne les pensionnats, mais plus généralement les effets très négatifs du colonialisme sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis de ce pays, en particulier, comme je l'ai dit, les déplacements et autres violations des droits de la personne. Je crois que c'est nécessaire. Pas plus tard que la semaine dernière, j'étais à Arviat, au Nunavut, où le gouvernement du Canada a présenté des excuses aux Arviarmiut, un groupe d'Inuits qui a subi trois déplacements dans les années 1950. La famine a tué de nombreux Arviarmiut. Cela s'est passé à la même époque que les procès de Nuremberg. C'est la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale, l'époque où ce pays participait à la réflexion sur la création des Nations unies et sur le respect des droits de la personne pour tous. Nous pourrions tirer des leçons de toutes ces choses qui se sont produites dans ce pays, à un moment et un endroit différent, sans que ce soit moins important, et prendre simplement conscience de ce qui s'est produit ici; l'effet de cela pourrait être vraiment puissant aussi.
Je crois qu'il est important que ces deux jours soient fériés, simplement en raison du poids que cela donnerait à ces journées si ce sont des jours fériés au gouvernement fédéral. D'après moi, le gouvernement fédéral donnerait ainsi un exemple concernant la réconciliation.
Dans son libellé actuel, le projet de loi ne prévoit qu'une journée nationale des Autochtones — je ne sais pas si c'est bien la bonne appellation —, qui serait un jour férié.
Notre enjeu est de créer une journée commémorative comportant des aspects positifs dont nous pouvons tous être fiers. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais notre gouvernement a résolu de mettre en œuvre tous les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, et c'est peut-être l'occasion de mettre en œuvre un de ces appels à l'action ou pas. Cela incombe au Comité.
Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec l'honorable député Blaney.
Premièrement, j'aimerais remercier toutes les personnes qui sont venues aujourd'hui. Votre contribution est très importante.
J'ai discuté avec de nombreux groupes autochtones, des membres des Premières Nations et des Métis — il n'y a pas d'Inuits dans ma circonscription —, mais le problème, c'est qu'ils n'arrivent pas à choisir une date. Un groupe veut que ce soit le 30 septembre, et l'autre veut que ce soit le 21 juin. Il n'y a pas vraiment de date précise, et d'après moi, ce qui est prévu dans ce projet de loi, tel qu'il a été conçu et présenté, c'est la création d'un jour férié national. Nous sommes un peu coincés en ce moment.
Qu'est-ce que vous entendez dans vos collectivités ? De toute évidence, vous parlez avec de nombreux membres de la collectivité. Est-ce que les gens sont divisés dans votre secteur concernant la date à choisir? Si vous deviez choisir une date, comment se passerait la discussion?
Je veux entendre les points de vue et les expériences de tous les membres, si c'est possible.
Nous n'avons pas beaucoup discuté de cela chez les Inuits. Ce n'est pas une préoccupation première de notre population, par rapport à tous les autres enjeux socioéconomiques et aux espoirs que nous nourrissons concernant le renouvellement de notre relation.
C'est à n'en pas douter une excellente chose — nous ne voulons pas donner l'impression que ce n'est pas une chose très positive. Dans la hiérarchie des divers besoins des Inuits, ce serait une très bonne chose à avoir, mais nous préférerions nettement que nos besoins en infrastructure et nos problèmes de logement soient complètement couverts par des fonds du gouvernement fédéral. Si nous devions choisir, c'est ce qui importerait le plus. Bien entendu, ce n'est pas ce que nous faisons, mais c'est juste une façon de vous dire qu'il n'y a pas eu beaucoup de discussions à ce sujet. Je suis sûr que le gouvernement du Canada fera de son mieux pour trouver la date qui convient le mieux à la majorité des Canadiens.
À notre point de vue, le 21 juin serait la date prévue comme journée de célébration. D'après ce que mon client m'a dit, les dates comme telles, à ma connaissance, ne sont pas aussi importantes que l'adoption de dates distinctes ayant des significations distinctes.
Pour nous, vous savez, l'enjeu est d'essayer de mettre tout le monde au courant. Bien des gens ne sont pas au fait des discussions qui se déroulent en comité. Croyez-vous qu'il faut prévoir plus de temps pour des rencontres avec les diverses collectivités, ce qui permettrait une meilleure compréhension?
En ce moment, je sais qu'il faut aussi une composante éducative. Nous voulons nous assurer que les enfants qui vont à l'école comprennent la différence entre les deux journées. L'une est une célébration, alors que l'autre fait appel à la mémoire. Il faut discuter de l'intégration de cela dans les programmes d'enseignement à l'échelle provinciale, je crois, et dans les territoires. Je parle avec mon petit-fils et je lui demande: « Qu'est-ce que tu apprends à l'école? Est-ce que tu as appris ceci ou cela? » Souvent, cela ne fait pas partie du programme. Je crois que nous devons faire mieux sur le plan de l'éducation. Si nous voulons aller de l'avant, nous devons consacrer plus de ressources à notre système d'éducation.
Natan, trouvez-vous que l'éducation est un élément essentiel de cette reconnaissance?
Absolument. Les aspects éducatifs des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation sont mis en oeuvre en certains endroits, mais pas partout. Je crois qu'il reste encore à faire une importante percée concernant le respect qu'on doit aux représentants des peuples autochtones quant à l'orientation de l'élaboration des programmes d'études et à la finalisation des programmes dans les systèmes scolaires provinciaux et territoriaux qui sont censés parler en leur nom. On se retrouve devant des vestiges du colonialisme quand un conseil scolaire crée un programme et le met en oeuvre lui-même, sans l'accord ou l'approbation des Premières Nations, des Inuits ou des Métis, ou même sans que ces peuples puissent y contribuer ou créer eux-mêmes un programme.
En ce qui concerne le temps qu'il faut pour discuter du projet de loi dont il est question ici et pour mener des consultations, je crois que c'est accessoire à la nécessité d'instaurer un jour férié, et je crois qu'au fil du temps nous pourrons créer quelque chose de positif à partir de ce jour férié en particulier. Je sais qu'il n'y aura jamais de consensus parmi les collectivités des Premières Nations et les collectivités inuites et métisses, concernant la date de ce jour férié, mais comme pour tout autre débat ou pour tout autre projet de loi que vous étudiez, il y aura toujours des Canadiens qui ne seront pas d'accord avec les lois qui cheminent au Parlement.
Je vous remercie beaucoup de votre présence. Vous avez présenté plusieurs perspectives nouvelles que nous n'avions pas encore entendues de la part des divers témoins qui se sont adressés à nous, alors nous vous en sommes reconnaissants.
Vous avez parlé de paternalisme et de colonialisme, ainsi que des problèmes qui découlent de cela, et vous avez un peu parlé des célébrations qui seraient envisageables.
À un moment donné, madame Lomax, vous avez dit que le gouvernement fédéral devrait peut-être apporter des idées à ce sujet ou faire preuve de leadership à cet égard. Nous voulons manifestement le faire, mais nous ne voulons évidemment pas faire preuve de paternalisme ni pour cela ni pour le processus. Quand vous avez mentionné cela, je crois que ce que vous disiez, c'est que le gouvernement fédéral devrait proposer des façons d'envisager cela. Je crois que chacun de vous a parlé de valeurs et de principes unificateurs à l'appui de cela. Pourriez-vous nous dire quelles seraient pour vous ces valeurs? Et si vous étiez le gouvernement fédéral, comment vous engageriez-vous dans ce processus de manière à veiller à ce que non seulement les résultats, mais aussi le processus soient respectueux, comme nous le rappellerait la Commission de vérité et réconciliation? C'est une valeur que nous tenons à promouvoir.
Est-ce que chacun de vous peut nous dire quelles seraient certaines de ces valeurs, puis ce que vous verriez comme étant un processus respectueux?
Je parle des principes et des valeurs dont vous voulez que ces journées soient le reflet. J'aimerais ensuite que nous pensions à ce que sera cette journée dans 10 ans et au sentiment qu'elle laissera aux participants alors, si tout fonctionne comme vous le voulez et si tout se déroule comme nous le disons. Quelles sont les valeurs qui seront avancées et que nous devons intégrer maintenant dans ce que nous faisons de sorte qu'elle puisse constituer un élément permanent des célébrations et des souvenirs?
Pour la journée des peuples autochtones, nous souhaitons une journée de célébrations favorisant le respect et la promotion, ce qui contribuerait même, au bout du compte, à la longévité et à l'épanouissement des cultures autochtones dynamiques et diverses. C'est ce que nous espérons d'une journée nationale des peuples autochtones.
Cependant, nous voulons que la deuxième journée — une journée de commémoration dans l'optique de la vérité et de la réconciliation — serve à rendre hommage aux victimes, survivantes ou non, des pensionnats autochtones, de la rafle des années 1960 et des diverses pratiques d'assimilation employées au Canada et perpétuant l'héritage du colonialisme. Nous voyons cela comme une journée réservée aux souvenirs, à l'éducation et à la réflexion.
L'esprit de chacune de ces deux journées est très différent. Si le gouvernement fédéral va de l'avant et réalise ces journées comme je l'ai décrit précédemment dans mon témoignage… il faut que cela commence à la base. Il faudrait entamer une conversation avec les collectivités et les organismes afin de savoir ce que ces journées doivent leur apporter. Il n'y a pas que ce que nous voyons. Ce qui importe, ce sont les besoins des personnes à la base, des personnes dans les collectivités.
Selon mon interprétation de ce que je crois vous entendre dire, les valeurs que vous projetez sont les valeurs que nous intégrerions dans les principes de ce projet de loi ou, du moins, que nous réaliserions. Une fois que le projet de loi aura été adopté, vous dites que les activités qui découleraient de cela devraient faire l'objet de discussions dans les collectivités ou être entièrement confiées aux collectivités, lesquelles en assumeraient la responsabilité. Est-ce que c'est juste comme interprétation?
Oui. Et si nous voyons cela comme étant quelque chose que le gouvernement fédéral peut soutenir grâce à des fonds destinés au développement des capacités au sein des collectivités et des organisations, pour que ces dernières puissent faire valoir ce que ces journées signifient pour les collectivités particulières qui ont des cultures très distinctes, je crois que les gens à la base seraient un excellent point de départ.
Monsieur Obed, j'aimerais avoir aussi vos observations à cet égard, concernant les valeurs que vous voyez, puis le processus permettant la réalisation, la mise en œuvre, la célébration ou la commémoration de ces valeurs.
Je crois que le Canada n'a pas encore terminé son apprentissage sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis, et sur la place que nous occupons dans ce pays. Presque tout le travail que nous accomplissons en matière législative et concernant le renouvellement de la relation repousse les frontières de l'ignorance et de l'incapacité de comprendre les droits que nous avons en tant que peuples autochtones à l'échelle mondiale et les droits que nous avons en tant que Premières Nations, Inuits et Métis dans ce pays.
Un jour férié, surtout si c'est pour des célébrations, aurait pour effet de mieux faire accepter que, même si nous sommes des membres de Premières Nations, des Inuits et des Métis dans ce pays, nous pouvons aussi célébrer en tant que Canadiens et saisir les occasions de jeter des ponts, car il y a encore dans ce pays de nombreux peuples autochtones qui ne se sentent pas très à l'aise de faire partie de ce pays.
Les Inuits en particulier ont souvent dit être les premiers Canadiens et être des Canadiens en premier, mais nous avons souvent été les seuls dans la pièce à exprimer ce point de vue. Ce serait formidable si tous les Canadiens étaient mieux disposés à admettre les incroyables contributions des Premières Nations, des Inuits et des Métis dans ce pays, et à célébrer cela, de même que l'avantage de cette caractéristique pour la croissance du pays plutôt que de la voir comme un problème à régler.
Je parle souvent de la façon d'être un très bon fonctionnaire, et de la façon d'être très bon bureaucrate au sein de ce qu'on appelait avant le MAINC. C'est maintenant différent, mais vous deviez savoir comment restreindre les dépenses du gouvernement du Canada pour les peuples autochtones, peu importe le dossier dans lequel vous travailliez. Que ce soit pour des droits, pour des programmes ou des services, ou encore pour des politiques, vous étiez un bon fonctionnaire si vous trouviez un moyen de consacrer le moins d'argent possible ou pas d'argent du tout aux choses que les peuples autochtones demandaient dans ce pays.
Nous voulons transformer cela complètement. Nous voulons déterminer comment créer un pays qui voit les peuples autochtones réussir aux côtés de tous les autres Canadiens, pour le bien-être et la bonne santé de l'ensemble du Canada. Nous n'en sommes pas encore là d'après moi. Ce jour férié peut contribuer dans une grande mesure à garantir que dès leur plus jeune âge, tous les Canadiens auront un lien positif avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Ce n'est pas le cas en ce moment, et nous n'y travaillons pas comme nous devrions le faire.
Je salue mes collègues et je remercie nos témoins d'être présents.
Monsieur Obed, votre vision est très inspirante. Je suis convaincu qu'il y a de l'intérêt au Canada pour une vision d'ensemble et constructive des communautés autochtones, qu'il s'agisse des Premières Nations, des Métis ou des Inuits. C'est la raison pour laquelle nous avons appuyé ce projet de loi. Je vous ai écouté attentivement, vous et Mme Lomax.
En tant qu'ancien ministre des Anciens Combattants, je participais le 21 juin à la Journée nationale des peuples autochtones, alors qu'on soulignait ici à Ottawa la contribution des Autochtones lors des conflits et des guerres, tout près du Monument national aux anciens combattants autochtones. C'était un beau moment, où on célébrait l'apport des Autochtones à la liberté.
Le 1er juillet dernier, j'ai vécu le paradoxe d'un moment touchant alors que j'étais en France, à Beaumont-Hamel. Ce jour-là, il paraît qu'à Terre-Neuve tous les volets sont fermés l'avant-midi. C'est une demi-journée de tristesse qui rappelle le sacrifice d'une génération de Terre-Neuviens, fauchés lors de la Première Guerre mondiale dans des circonstances très brutales. L'après-midi, par contre, on célèbre l'adhésion de Terre-Neuve au Canada. Nous faisons donc face à ces paradoxes.
Ce dont je me rends compte, c'est que le 21 juin, date actuelle de la Journée nationale des peuples autochtones, n'est pas un jour férié. Cet après-midi, vous nous éclairez beaucoup. Nous constatons qu'il n'a pas eu de consultations entourant le projet de loi C-369 dans sa forme actuelle, et il est maintenant question de deux jours au lieu d'un seul. Comment concilier commémoration et célébration? Nous ne sommes pas certains de la date. Le 21 juin me semble une date appropriée pour donner corps à la vision de M. Obed. J'aimerais vous entendre à ce sujet, mais je tenais à vous faire part de mes commentaires.
À ce stade-ci, le fait d'indiquer vouloir deux jours fériés reviendrait à dénaturer le projet de loi. Il faudrait soit repartir à zéro, soit tenir davantage de consultations. Je repars aujourd'hui avec plus de questions que de réponses, mais j'aimerais vous donner l'occasion de formuler des commentaires pendant le temps qu'il me reste.
En réponse à votre question, je crois qu'il y a une façon de trouver un juste équilibre de sorte que l'attention d'une journée se concentre sur les violations des droits de la personne commises dans le passé à l'encontre des peuples autochtones et que ces derniers cherchent à surmonter. Cette journée pourrait, en même temps, être une occasion de nous concentrer sur notre responsabilité de prendre des mesures positives pour résoudre certaines des difficultés qui découlent des expériences du passé. Ce pourrait être une journée de reconnaissance et une journée qui nous donne l'occasion de mettre en évidence les efforts positifs déployés par les collectivités, organismes et gouvernements des Premières Nations, des Inuits et des Métis afin de résoudre certaines des difficultés qui sont liées aux expériences du passé, comme les pensionnats autochtones et les déplacements.
Je crois que nous pourrions équilibrer les choses de cette façon.
Mon client estime qu'il devrait y avoir deux jours distincts, et c'est de cela que je suis en mesure de parler en ce moment.
Cela étant dit, tout projet de loi qui aurait des effets sur les peuples autochtones doit faire l'objet de consultations claires avec eux. Si des questions subsistent concernant ce projet de loi et ses incidences possibles sur les Premières Nations, les Métis et les Inuits, il faut pousser plus loin les consultations afin de faire ressortir ces incidences. C'est une possibilité.
Je ne peux pas dire si ce projet de loi en particulier doit faire l'objet de plus de consultations ou pas, car je ne sais pas en fait dans quelle mesure il y a eu des consultations à son sujet. Je ne peux pas parler de cela. Nous estimons en général que tout ce qui peut produire des incidences sur les peuples autochtones doit être réalisé par les peuples autochtones ou à tout le moins réalisé avec leur concours.
Monsieur Hogg, je crois comprendre que vous souhaitez poser une dernière question. On vous a accordé du temps supplémentaire lors de votre dernière intervention, alors pourriez-vous, s'il vous plaît, essayer de ne pas dépasser trois minutes?
M. Blaney a, d'une certaine façon, couvert en partie cette question, et vous avez vous-même commencé à l'aborder. Les consultations font l'objet de toutes sortes d'attentes. On s'attend notamment à ce qu'elles soient offertes dans un certain format, et à ce qu'elles soient sincères et intéressantes. Un certain nombre de principes s'y appliquent.
Je vais vous donner à chacun une minute du temps qu'il me reste. Pourriez-vous m'indiquer ce qui constituerait, selon vous, un processus de consultation adéquat pour cette mesure législative? Même si elle est adoptée, comment devons-nous à présent examiner ce qui va se passer ces jours-là et déterminer ce qui constitue une mobilisation adéquate? Pourriez-vous répondre chacun brièvement à cette question? Je vous remercie.
Ces dernières années, un certain nombre de textes de loi ont fait l'objet de consultations.
La loi sur les langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis me vient à l'esprit à titre d'exemple d'approche fondée sur les distinctions adoptée par le gouvernement fédéral pour réaliser une consultation auprès des peuples autochtones, et organiser des séances réunissant un groupe diversifié de nos citoyens, pour que les Inuits puissent formuler des commentaires au sujet de cette loi. On devrait également fournir plus de renseignements sur l'objectif de la mesure législative.
Cela dit, je pense bien évidemment que cette question concerne l'ensemble du Canada, et que les consultations devraient donc être tenues dans l'ensemble du pays.
J'aimerais ajouter que les consultations devraient être réalisées en premier. Nous commentons cette loi après sa rédaction. Certains de ces problèmes auraient peut-être pu être résolus.
Vous avez tous deux fourni une description générale du concept de consultation. Cela signifie-t-il que nous devons de nouveau demander à des personnes de venir ici? Devons-nous nous rendre dans ces communautés? Faut-il organiser des tables rondes et des séances? Ces méthodes sont-elles assez solides? Qu'en pensez-vous?
Je pense qu'il faudrait conjuguer toutes ces méthodes. Il est clair que, si le but est de cerner les besoins des Autochtones, des membres des Premières Nations, des Métis et des Inuits, il faut leur demander quels sont leurs besoins.
Il s'agit d'un projet de loi du gouvernement du Canada. En tant que représentants des peuples autochtones, nous nous retrouvons souvent dans une situation difficile lorsqu'on nous demande de réaliser des consultations au nom du gouvernement fédéral, parce qu'au bout du compte, ce n'est pas notre loi. Nous ne pouvons également pas garantir à nos citoyens que le gouvernement fédéral répondra à nos demandes.
On vient de me rappeler qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi du gouvernement, mais d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Ce n'est donc pas un projet de loi du gouvernement. Parallèlement, le principe de bonne politique publique exige que l'on mobilise les personnes qui seront les plus touchées, celles qui sont intéressées et qui souhaitent examiner le projet de loi.
C’est mon but, parce que les processus ne mobilisent souvent pas les gens de façon assez significative pour qu’ils se sentent écoutés et pour que les responsables des politiques et les décideurs soient bien informés. Je pense que nous ressentons tous cette frustration quant à l’émotion viscérale suscitée par l’incidence que cela a… Vous avez commencé à nous le montrer un peu, mais je ne veux pas finir ce processus et réaliser tout à coup que — oh, mon dieu — on aurait dû faire quelque chose d’autre.
Je passe beaucoup de temps à étudier les processus de mobilisation du public dans le monde entier. Je ne pense pas qu’il en existe de fantastiques, mais certains sont certainement bien meilleurs que d’autres. C’est ce qui me tracassait. Que pouvons-nous faire? Si vous étiez à ma place, que diriez-vous qu'il faut faire? Comment le feriez-vous?
Je vous remercie beaucoup d'avoir témoigné aujourd'hui.
Comme l'a rappelé mon honorable collègue, ce projet de loi n'émane pas du gouvernement; il a été présenté par Georgina Jolibois, Dénée de La Loche, en Saskatchewan. Je pense que l'objet du texte officiel du projet de loi est en réalité... Il y aura un débat au sujet de la date, mais le projet de loi n'en évoque aucune. On y parle du « jour fixé par proclamation comme Journée nationale des peuples autochtones ».
Nous devons évidemment nous mettre d'accord sur la date, mais je pense que nous devons surtout nous entendre sur le fait qu'il doit s'agir d'un jour férié. Si on poursuit la comparaison avec le 1er juillet et le jour du Souvenir, la Journée nationale des peuples autochtones pourrait devenir un jour férié pour que nous puissions tous célébrer notre patrimoine et nos liens avec les Premières Nations et les peuples autochtones, les Métis et les Inuits. C'est l'objet de ce projet de loi. Il ne s'agit pas d'établir une date. Nous pouvons en proposer une, mais le projet de loi ne vise-t-il pas à faire du « jour fixé par proclamation comme Journée nationale des peuples autochtones » un jour férié? Comme je l'ai entendu dire de nombreuses fois en face, il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un investissement judicieux. Nous devons célébrer ce jour, et nous devons rectifier cette erreur.
Je m'excuse de la manière cavalière dont j'ai décrit le projet de loi. De mon point de vue, nous avons une gouvernance et une démocratie inuites, et il s'agit d'une initiative du gouvernement du Canada. Je ne souhaite pas nécessairement faire un amalgame entre un projet de loi d'initiative parlementaire et un projet de loi du gouvernement du Canada.
Cette discussion a été très intéressante. Vous avez formulé de nombreux commentaires que nous n'avions encore jamais entendus. Cela nous a été très utile à tous. Je souhaite vraiment vous remercier pour votre temps.
C'est la fin de cette discussion. Je vais suspendre brièvement la séance pour que nous puissions passer à huis clos.