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Je vous remercie de votre patience.
J'ai jugé utile d'ouvrir la séance, juste pour quelques minutes, afin d'informer nos invités qui témoignent aujourd'hui qu'un vote va avoir lieu au Parlement. La sonnerie va sans doute retentir ici dans une minute. Je veux juste faire savoir que c'est ce qui va se passer à nos invités qui vont témoigner par vidéoconférence ou en personne, ce matin. Comme nous n'avons pas le temps de commencer maintenant l'audition des déclarations, le Comité se réunira de nouveau le plus tôt possible, vers midi. Je crois que le vote doit avoir lieu à 11 h 45. Il nous faut habituellement 15 minutes pour voter à la Chambre, chers collègues. Nous serons donc de retour ici vers 12 h 15, heure d'Ottawa. Je voulais seulement que tout le monde sache ce qui se passe.
Merci beaucoup de votre aide, monsieur le greffier.
Notre greffier, Jean-François, restera en contact avec nos témoins pour leur faire savoir quand nous reprendrons, et il va voir également si nous pouvons continuer à occuper la salle après 13 heures.
Sur ce, nous allons maintenant suspendre la séance jusqu'à notre retour du vote. Merci.
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Nous reprenons la séance.
Au nom du Comité, je désire présenter nos excuses à tous nos témoins pour les avoir laissé attendre aussi longtemps. Comme les votes ont priorité sur toutes nos autres fonctions, nous n'avions pas le choix.
Nous allons commencer dans un instant. Je voudrais demander aux membres du Comité s'ils sont d'accord pour rester jusqu'à 13 h 30 pour l'audition de nos témoins. Faites-vous signe que oui? Merci beaucoup.
Nous avons quatre témoins: M. Crowfoot, directeur général de l'Aboriginal Multi-Media Society of Alberta; Ken Waddell, des Neepawa Banner, Neepawa Press et Rivers Banner; Casey Lessard et Bruce Valpy, de Northern News Services Ltd. et Mark Lever, de The Chronicle Herald.
Nous allons demander à chacun d'entre vous de faire une déclaration d'une durée de cinq minutes, après quoi nous passerons à une période interactive de questions et réponses. Je vous ferai signe lorsqu'il ne vous restera plus qu'une minute. D'accord?
Comme vous le savez, nous étudions l'accessibilité des médias dans les communautés locales de tout le Canada. Quels ont été les effets positifs ou négatifs de la concentration des médias à cet égard, sur toutes les plateformes, y compris numériques? Quels effets le numérique a-t-il eus sur l'accès aux nouvelles locales et aux réalités canadiennes dans l'ensemble du pays?
Nous espérons que vous pourrez nous le dire et peut-être nous aider grâce à quelques suggestions pour résoudre le problème de l'accès aux nouvelles locales.
Je vais commencer par M. Crowfoot.
J'ai failli témoigner en langue blackfoot, mais je vais plutôt le faire en anglais.
L’Aboriginal Multi-Media Society a été créée il y a 34 ans, en 1983. Au début, nos supports multimédias comprenaient une émission de radio et un seul journal, le Windspeaker, qui était consacré à la couverture des populations autochtones de l’Alberta. Tout comme pour les médias d’information en général, l’Aboriginal Multi-Media Society a évolué en adoptant de nouvelles technologies et en saisissant les nouvelles occasions. Les journaux sont passés de la composition à l’éditique aux sites Web, blogues et médias sociaux.
Windspeaker a lui aussi évolué; il a élargi sa portée des nouvelles provinciales aux nouvelles autochtones nationales pour remplir le vide créé par la fermeture de 11 journaux autochtones d’un bout à l’autre du pays. Ce vide a été créé par l’abolition du Native Communications Program en 1990.
L’AMMSA a ensuite produit une nouvelle publication, Alberta Sweetgrass, pour remplir le vide en Alberta quand Windspeaker s’est étendu à l’échelle nationale. Les deux publications sous la bannière de l’AMMSA ont été portées à quatre, avec Saskatchewan Sage et Ontario Birchbark, puis à cinq, avec Raven’s Eye pour la Colombie-Britannique, avec d’autres publications spécialisées comblant les lacunes des intérêts et des attentes des lecteurs. Buffalo Spirit, un guide sur la spiritualité et la culture autochtone, et Windspeaker Business Quarterly.
L’offre radio est passée d’une émission à une station, CFWE, à un réseau avec des sites Web, des chaînes YouTube et une application mobile. Les gens peuvent maintenant écouter nos nombreuses chaînes radio à partir d’un téléphone intelligent pratiquement partout dans le monde. L’AMMSA continue de transmettre notre signal terrestre aux petites comme aux grandes collectivités et de s’appliquer constamment à améliorer la qualité du signal dans les régions éloignées. L’équipe radio travaille également à étendre le service de collecte des nouvelles de l’organisation et à tirer profit du travail accompli du côté de l’édition de l’AMMSA.
Le rythme du changement vécu par l’ensemble des médias d’information a été considérable, particulièrement ces 10 dernières années. Dans le domaine de l’édition, les pixels remplacent maintenant l’encre. Le papier journal est remplacé par les écrans d’ordinateur, les téléphones et les tablettes. L’AMMSA peut atteindre plus de gens chaque jour et plus rapidement qu’avec l’ancien modèle de publication bihebdomadaire.
Bien que les changements aient été excitants, ceux-ci n’ont pas été entièrement positifs. Les lecteurs ont un appétit vorace pour les nouvelles disponibles gratuitement. Ils les veulent tout de suite, ils les veulent en tout temps, et ils les veulent gratuitement. Ces besoins mobilisent fortement les ressources financières des petits éditeurs. L’AMMSA n’est pas à l’abri, mais le fardeau est aggravé par le fait que notre zone de couverture est étendue, éloignée ou isolée. Pendant ce temps, les publicitaires se creusent la tête sur l’efficacité du nouveau modèle numérique et ont des difficultés à investir leurs budgets de revenus dans ce modèle.
Il y a aussi la question des communautés rurales, éloignées ou isolées qui souffrent des problèmes de connectivité. Certaines communautés ne sont pas connectées du tout à Internet. Même si les communautés ont accès à Internet, la pauvreté extrême peut empêcher les gens d’en jouir. Les membres des communautés peuvent ne pas avoir d’ordinateur dans leur foyer, et s’ils en ont un, le coût du service Internet peut être largement au-delà de leurs moyens.
Les connaissances en informatique sont inférieures à celles du grand public dans plusieurs communautés autochtones. Ces barrières dépassent l’isolement géographique et marginalisent les peuples autochtones et leurs communautés davantage à partir des nouvelles et des informations importantes qui les affectent.
Ce qui demeure constant au fil du temps, cependant, c’est le désir de nos lecteurs et de nos auditeurs de se reconnaître clairement dans la couverture des nouvelles. Ils veulent que l’on discute de leurs problèmes et de leurs préoccupations en partageant leur vision du monde. Ils veulent qu’on accorde de la valeur à leur histoire, à leur culture, à leurs traditions et à leurs points de vue.
Depuis la création de l’AMMSA, nos publications et notre programmation radio ont contribué à combler le fossé de l’incompréhension entre les peuples autochtones et la société canadienne. C’était bien avant que la Commission de vérité et réconciliation nous dise qu’une telle compréhension entre les peuples était essentielle.
Nous prenons toutefois notre voie à suivre des anciens, qui nous confient qu’il est encore plus important que les peuples autochtones apprennent à se connaître et à se comprendre eux-mêmes avec un regard autochtone, pas avec la vision faussée du point de vue des non-Autochtones, amplifiée par les médias classiques.
La vision du monde, la culture et les traditions des peuples autochtones sont rarement dépeintes fidèlement par les médias classiques, et les reportages prennent souvent une perspective panautochtone du peuple autochtone du Canada. Ils ne font aucune distinction entre les nations, faisant dévier encore davantage la compréhension des communautés autochtones par la société canadienne d’un océan à l’autre.
Les nouvelles des peuples autochtones par les grands éditeurs sont généralement axées sur les activités des peuples autochtones qui sont contraires aux initiatives, aux valeurs et aux points de vue des populations canadiennes. Pas de couverture des potlatchs ou des pow-wow, des cérémonies de passage à l’âge adulte, du rodéo indien, des activités comme la pêche, le perlage ou le tissage. Pas de couverture sur ce qui étoffe notre connaissance et notre compréhension des communautés autochtones familiales.
Les journalistes traditionnels n’ont pas souvent l’occasion de tisser des liens avec les communautés autochtones environnantes pour acquérir la connaissance approfondie des peuples autochtones qui découle de ces liens. C’est pourquoi il est important que la radio et les publications autochtones aient la possibilité de prospérer, parce que ces liens sont établis.
Les éditeurs des médias d’information autochtones…
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… sont avec les communautés dans les bons et les mauvais moments.
En ce qui concerne la concentration médiatique, le rôle des médias autochtones indépendants est important et très précieux pour les lecteurs et les auditeurs autochtones. Une multiplication des médias autochtones est survenue dans les années 1980 et 1990, mais, ces dernières années, une baisse a été enregistrée. L’explosion des coûts de production et le changement technologique ont créé un obstacle financier que plusieurs organisations médiatiques autochtones régionales ne pourraient surmonter. Au cours des dernières années, les revenus publicitaires ont été plus difficiles à trouver. Nous avons réduit nos services afin de refléter une nouvelle réalité économique considérablement amoindrie.
Le lancement de l’APTN en 1999, et son rôle grandissant à titre de fournisseur de nouvelles nationales, a été une alternative aux médias classiques appréciée. Il y a encore beaucoup d’histoires très importantes qui ne sont pas racontées.
La concentration médiatique…
Je m'appelle Ken Waddell. Je suis de Neepawa, au Manitoba. C'est une ville d'environ 4 500 habitants et la principale municipalité d'une région où vivent environ 10 000 personnes.
Je suis actif dans le domaine de l'édition et de la rédaction depuis 50 ans, mais à plein temps depuis 1989, l'année où, à partir de rien, nous avons ouvert le Neepawa Banner, en concurrence directe avec le Neepawa Press, qui était publié depuis 1896. En 2010, le Neepawa Press a été vendu à une grande société qui voulait aussi acheter notre journal, mais j'ai refusé de le lui vendre et elle nous a vendu son journal, à ma famille et moi-même, il y a cinq ans.
Pour les communautés locales, l'information doit être exacte et présentée dans le respect du principe de la reddition de comptes. Voilà pourquoi les médias locaux sont si importants. L'information doit être digne de confiance, et la seule façon de s'en assurer est par la reddition de comptes locale. L'information est-elle fiable? Est-elle vérifiable? Si l'information n'est pas fiable et vérifiable, elle est au mieux inutile, et au pire dangereuse. Dans le monde des journaux, cela signifie que la propriété, ou du moins le rôle d'éditeur, doit être local. Quelle que soit la taille de la collectivité, l'éditeur doit être local.
La concentration des médias a été néfaste pour les communautés, grandes et petites. La recherche du rendement rapide et optimal pour les actionnaires détourne trop facilement les entreprises médiatiques de leur mandat en matière de nouvelles et d'information. L'éditeur doit être prêt à investir dans son personnel, ses installations et son matériel et il doit avoir du personnel sur le terrain pour s'assurer que l'information est recueillie localement. Si un journal n'est pas en croissance, il se meurt.
Les médias numériques constituent un ensemble d’outils qui aide l’industrie des journaux. Bien entendu, nous utilisons des sites Web, Facebook et Twitter et nous publions souvent nos reportages dans notre site avant même que l'édition imprimée ne soit distribuée. Malgré tout, l’impression demeure l’assise de notre modèle d’affaires. Nous avons trois journaux. L'un d'eux se classe au premier rang des journaux imprimés du sud-ouest du Manitoba, un autre au deuxième rang et le troisième au sixième rang.
Les journaux imprimés locaux se portent bien dans la mesure où ils respectent leurs caractéristiques fondamentales, à savoir la publication de nouvelles locales. Et je pourrais ajouter « imprimée »; c'est le seul moyen de vérifier les nouvelles, car vous pouvez changer ce que vous voulez dans un site Web.
Comme je l'ai mentionné, les nouvelles doivent être vérifiables et responsables. Les journaux sont comme un tabouret à trois pattes. Les trois pattes représentent des nouvelles vérifiables et responsables, des pages éditoriales ou d'opinions de qualité et des annonces. Nous pouvons recueillir des nouvelles. Nous pouvons offrir des pages éditoriales, mais nous ne pouvons pas fournir les annonces.
Les annonceurs doivent se rendre compte des conséquences du placement de leurs annonces. Cela vaut tant pour les entreprises que pour le gouvernement. Si vous placez vos annonces dans un site Web, n'oubliez pas que les producteurs du site Web, Facebook, YouTube et tous ces sites, ne vont pas soutenir votre club de hockey local ou donner de l'argent à l'hôpital local. Ils ne le feront pas. Il est très important d'en être conscient.
En général, Facebook n’engage pas de travailleurs sur place, ne dépense pas d’argent dans les entreprises locales et n’appuie pas le sport local ou les organismes communautaires. Si les entreprises et les gouvernements coupent la patte des annonces, le tabouret va se renverser et les communautés du Canada seront entraînées dans sa chute.
Merci.
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Merci de nous avoir invités, mes collègues et moi-même, pour discuter de notre expérience au Nunavut.
Bruce et Mikle pourront répondre aux questions concernant notre expérience dans les Territoire du Nord-Ouest. Bruce est le rédacteur en chef et Mikle Langenhan le rédacteur adjoint du Kivalliq News et ils gèrent deux journaux au Nunavut. Ils vont participer à la réunion d'aujourd'hui à partir de Yellowknife.
Je m'appelle Casey Lessard. J'ai récemment été nommé rédacteur en chef du Nunavut News/North. Le Nunavut News/North a célébré son 70e anniversaire l'année dernière. Il a d'abord couvert l'ensemble des Territoires du Nord-Ouest, mais nous avons maintenant deux journaux distincts pour le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ainsi que le Yellowknifer et des journaux communautaires à Kivalliq et dans plusieurs villes des T.N.-O.
Je n'ai pas besoin de vous dire que le secteur des journaux communautaires est en pleine transition. Pour ceux qui sont à l'avant-garde de notre secteur, la presse écrite est déjà un produit du passé, comme Bert Crowfoot vous l'a laissé entendre. En revanche, nous avons eu une expérience similaire à celle dont M. Waddell a parlé. Les journaux établis de longue date se sont demandé si leur entreprise allait pourvoir survivre en dehors du modèle d'affaires qui leur était familier.
Je constate que les journaux d'un grand nombre de petites villes du sud du pays n'ont même pas de site Web ou de page Facebook. Cette incertitude vient du fait que beaucoup de gens aiment beaucoup l'imprimé. C'est mon cas. Les entreprises qui nous soutiennent veulent des résultats mesurables. Elles veulent la preuve que leur argent donne des résultats. Dans le Nord, nous tirions l'essentiel de nos revenus des annonces gouvernementales, mais le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a été le premier à s'éloigner de la publicité imprimée et celui du Nunavut a suivi l'année dernière. Les deux gouvernements continuent de publier des annonces, mais c'est une perte énorme par rapport à ce que nous avions il y a quatre ou cinq ans.
La transition au numérique n'est pas sans risque pour nous et les autres journaux communautaires. Il y a beaucoup moins d'argent à gagner pour les petits joueurs, ceux qui n'ont pas des grands réseaux pour les soutenir. Notre réseau a huit journaux qui desservent plus de 70 000 personnes. Au Nunavut, nous avons environ 37 000 habitants répartis sur le cinquième de la superficie du Canada. Nous sommes un réseau de taille moyenne qui couvre un vaste territoire pour un petit nombre de gens.
Nous croyons toujours que nous sommes le porte-parole des petites collectivités, mais Facebook et la SRC peuvent maintenant en dire autant. Néanmoins, nous ne sommes pas tout à fait sur un pied d'égalité avec ces concurrents, sur le plan financier.
Nos frais généraux sont extrêmement élevés. Cela comprend le loyer de petits bureaux dans deux communautés du Nunavut qui nous coûtent environ 5 000 $ par mois, ainsi que le logement du personnel qui coûte au total plus de 10 000 $ par mois. Les billets d'avion sont onéreux. Pour venir à Ottawa, je dois débourser 2 500 $. C'est 3 800 $ pour me rendre d'Iqaluit à Yellowknife. Il est également très coûteux de voyager à l'intérieur du Nunavut. Un vol aller-retour d'Iqaluit à Grise Fiord peut coûter jusqu'à 5 000 $.
Nous traduisons le maximum d'articles en inuktitut et notre journal le Kivalliq News, dans le sud-ouest du Nunavut, est entièrement traduit, chaque semaine, par Mikle, qui est avec nous par téléconférence. L'aide que le gouvernement fédéral nous apporte dans le cadre du Fonds du Canada pour les périodiques nous aide à couvrir une partie de ces coûts, et nous l'apprécions. Il y aurait de nombreuses façons d'améliorer ce programme pour nous aider à faire la transition au numérique.
Je sais que certaines personnes dans cette pièce ont des diplômes prestigieux. Le Nunavut est un territoire où peu de gens ont la possibilité de quitter leur communauté ou peuvent rêver d'aller à l'université. Une énorme proportion de la population inuite du Nunavut, que nous desservons, vivent de l'aide sociale. Le territoire a le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires le plus bas et le taux de chômage le plus élevé du Canada.
La population que nous essayons de rejoindre est à 85 % inuite. Elle a beaucoup de difficulté à accéder à Internet, pour rester en contact avec la famille ou les amis. Vous voyez souvent des gens réunis à la bibliothèque dans le cadre du programme d'accès communautaire en train d'attendre qu'un ordinateur se libère pour utiliser Internet. Internet est extrêmement coûteux et lent.
Pour la plupart des gens, notre journal est très avantageux à 1 $ par semaine. C'est vers lui que les gens se tournent pour trouver un emploi ou avoir des nouvelles de leurs amis et parents dans leur langue. Je vois nos pages découpées et affichées sur les murs dans les écoles et les bureaux des hameaux chaque fois que je voyage d'un bout à l'autre du Nunavut. Vous ne pouvez pas mesurer ce que cela représente pour les gens.
Il existe des solutions permettant à notre secteur de survivre. Les journaux gratuits, les éditions spéciales et les contenus commandités en sont quelques exemples. Nous devons trouver le moyen de gagner de l'argent grâce au numérique avant de perdre le capital que les journaux communautaires ont constitué en tant que source fiable de contenu local, comme l'a dit M. Waddell. Nous avons besoin de programmes qui aideront l'infrastructure numérique à nous permettre d'élargir notre auditoire numérique tout en aidant les vétérans de l'industrie à continuer à rapporter les réalités locales.
Nous pourrions perdre le capital important que représentent les personnes qui n'ont pas les compétences nouvelles. C'est tout ce que j'ai à dire, à moins que vous ayez des questions à me poser.
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Je vous remercie très sincèrement de M'avoir invité à partager avec vous mes réflexions et mes idées au sujet du paysage médiatique canadien. J'ai plus précisément le plaisir d'être ici au nom de
The Chronicle Herald, pour parler des défis auxquels sont confrontés les quotidiens comme le nôtre dans l'ensemble du pays.
The Chronicle Herald a été constitué en société en 1875, mais nos origines remontent à 1824. C'est le seul quotidien indépendant qui existe encore au Canada. Nous rapportons les nouvelles du jour et nous relatons l'histoire de la province de Nouvelle-Écosse depuis l'époque précédant la Confédération. Au cours de nos presque deux siècles d'histoire, nous avons été témoins de la naissance de la nation et nous avons relaté les heures tragiques et glorieuses des guerres mondiales du XXe siècle. Nous sommes l'institution culturelle dont l'histoire est si étroitement liée à celle de la province que les deux sont presque indissociables
Malheureusement, nous devons aujourd'hui nous battre pour notre propre survie en raison des changements dans les habitudes de consommation des médias et de l'arrivée d'une concurrence perturbatrice qui n'a pas de coûts hérités à assumer. Je nommerai ici les nouveaux médias évidents comme Facebook et Google, mais j'ajouterais les perturbateurs canadiens comme la SRC financée par le gouvernement. Tous ces acteurs ont largement fragmenté le lectorat et accaparé les recettes publicitaires.
La prolifération actuelle des médias n'a pas changé la mission de base des journalistes qui est de faire rapport des agissements des gouvernants pour fournir aux citoyens l'information dont ils ont besoin pour porter un jugement, de faire rapport des besoins de nos collectivités et de soutenir tout le monde à faisant la lumière sur les événements d'une importance cruciale.
Joseph Howe, un père fondateur de la presse libre du Canada et l'éditeur du Novascotian, l'ancêtre de The Chronicle Herald, a tenu ces célèbres paroles sur le rôle du journaliste:
… lorsque je m'assois, dans la solitude de mes tâches et de ma profession, les seules questions que je me pose sont: qu'est-ce qui est bien, qu'est-ce qui est juste, qu'est-ce qui est pour le bien public?
C'est une évidence. Le journalisme conserve un rôle primordial dans notre démocratie. C'est fondamental. Nous sommes un pays riche et dynamique composé de milliers de communautés. C'est le journalisme local qui nous unit et nous aide à tisser une histoire cohérente de notre nation.
C'est là le noeud du problème. Sans les conteurs d'histoires qui unissent les communautés de toute la nation, nous devenons des individus isolés ou des masses sans nom et sans visage, sans lien cohérent.
Les plates-formes des médias sociaux ne sont pas centrées sur le genre de contenu qui est important pour une société démocratique. Ce qui les intéresse, c'est le volume du contenu, le divertissement, les pièges à clics et les commentaires de faible qualité. Pas plus tard qu'hier, Oxford Dictionaries a annoncé son mot de l'année: post-truth ou post-vérité. Il le définit comme un adjectif qui fait référence à des circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d'influence pour modeler l'opinion publique que les appels à l'émotion et aux opinions personnelles.
Le Brexit et l'élection de Trump sont deux événements de l'année écoulée que l'on doit à ce phénomène qui bouleverse le monde. Les journaux et les journalistes des communautés de tout le Canada sont les sources qui alimentent notre démocratie, mais ces sources risquent sérieusement de se tarir. Le modèle d'affaires des médias est en mutation.
À l'échelle mondiale, seulement 9 % environ des gens paient pour le contenu. Les journaux n'ont jamais pu compter entièrement sur les abonnements pour leur financement, même s'ils revêtent toujours une importance cruciale pour soutenir le travail des journalistes. La publicité, qui constituait autrefois la principale source de revenus des journaux, soit les deux tiers de leurs recettes totales, ne représente plus que les programmes des dépenses de certains segments de leurs lectorats et groupes d'affinité.
De plus, nous avons subi, plus que l'ensemble du secteur, la transformation spectaculaire des dépenses de nos partenaires du gouvernement. Notre gouvernement provincial et le gouvernement fédéral ont réduit leurs achats d'annonces dans nos produits, probablement parce qu'ils ont augmenté leurs annonces auprès des sociétés étrangères comme Google et Facebook qui n'ont pas de liens avec nos collectivités et n'investissent rien pour produire le journalisme sur lequel nous comptons.
J'ai le grand regret de vous dire que mon journal a enregistré une baisse de 54 % de ses recettes tirées des annonces des gouvernements provincial et fédéral au cours des trois dernières années. Elles sont passées de 600 000 $ en 2013 à seulement 280 000 $ cette année. Comme tous les autres journaux du Canada, The Chronicle Herald est confronté aux changements dans les tendances des consommateurs et dans la publicité.
Les gens sont souvent étonnés d'apprendre que malgré des années de diminution de notre tirage payé, nous rejoignons un lectorat plus important que jamais. Les gens consomment davantage de contenu et ils ont un besoin crucial de journalisme local et basé sur les faits.
Cela ne veut pas dire que le Canada a cessé de soutenir le journalisme. La SRC reçoit près de 700 millions de dollars par année en financement fédéral. Comme toujours, ce sont ceux qui sont dans les tranchées et dans les collectivités, c'est-à-dire les journaux, qui doivent porter le journalisme à bout de bras.
Il est sidérant que selon la société mondiale d'analyse comScore, plus de 88 % de toutes les recettes publicitaires numériques canadiennes sont maintenant accaparées par les grands sites de médias sociaux appartenant à des intérêts étrangers.
Le journalisme est vital pour notre démocratie. C'est le fondement d'un discours public rationnel qui commence dans chacune des collectivités de notre pays. La SRC est une institution publique formidable dont chaque Canadien a tout lieu d'être fier. Néanmoins, elle n'est pas plus capable de tisser à elle seule l'histoire de notre nation, de Cape Spear à l'île de Vancouver ou l'île d'Ellesmere, que Facebook n'est capable de faire état des besoins des Canadiens ou de fournir des nouvelles apportant aux citoyens l'information dont ils ont besoin pour exercer leur droit de vote.
Pour que les réalités canadiennes continuent d'être relatées d'un océan à l'autre, nous allons devoir nous tourner vers d'autres modèles. Les partenaires du gouvernement peuvent et doivent jouer un rôle dans cette transition.
Je vous remercie de votre temps et de votre attention. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Je voudrais tous vous remercier d'avoir partagé ces renseignements avec nous. Ce sont des belles histoires. Les principaux mots que j'ai retenus, bien sûr, sont « contenu canadien » et « contenu local » dont vous avez parlé explicitement. Je vous en remercie infiniment.
Je voudrais adresser ma question à M. Lever, de The Chronicle Herald. Bien sûr, je viens de Nouvelle-Écosse et je m'inquiète donc toujours quand nous avons une grève et des gens en chômage.
Étant donné la situation dans laquelle vous vous êtes trouvé — je sais que ce n'est pas facile et qu'il y a toujours deux versions d'une même histoire — je voudrais savoir ce que vous pensez du journalisme? D'autre part, comme certaines personnes sont en grève et qu'il n'y a pas d'experts à la table, êtes-vous en mesure de livrer du contenu local et canadien comme vous le souhaiteriez?
Nous aimerions que le Chronicle redevienne ce qu'il était, alors comment envisagez-vous l'avenir? Pourriez-vous nous en parler, s'il vous plaît?
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Les personnes en grève dans notre salle de nouvelles me considèrent certainement comme l'ennemi, mais je tiens à dire que je représente la dernière ligne de défense du journalisme canadien. Étant donné les changements survenus dans notre contexte de travail, nous n'avons pas les moyens de signer des contrats que nous ne pourrons pas respecter.
Nous avons eu beaucoup de chance à The Chronicle Herald. Il y a eu une pénurie d'emplois pour les journalistes du pays et nous avons pu embaucher des jeunes journalistes de talent. Personne ne souhaite plus que moi le retour au travail de nos journalistes, mais compte tenu des incertitudes, il y a certaines ententes financières auxquelles je ne peux pas souscrire.
Croyez-moi si je vous dis qu'une salle de nouvelles avec 120 employés vaut beaucoup mieux qu'une salle de nouvelles avec 30 employés, mais 30 est tout ce que nous pouvons nous permettre aujourd'hui. Également, les changements qui se produisent dans le contexte que j'ai essayé de décrire dans une déclaration qui était censée durer dix minutes… J'aurais sans doute pu aborder davantage de questions journalistiques que dans une déclaration de cinq minutes que j'ai dû modifier à la volée. Sans rédacteur, je ne suis pas sûr de l'avoir bien décrite.
Je tiens à vous assurer que nous faisons de gros efforts pour mettre fin à la grève, mais notre entreprise ne bénéficie d'aucun financement externe. Nous sommes une entreprise familiale qui ne peut pas compter sur le marché pour obtenir plus d'argent. Telle est la nature de notre entreprise; nous ne pouvons pas signer une entente.
J'aimerais beaucoup ramener les gens au travail. Je pensais avoir obtenu un accord, le 4 novembre, pour tout vous dire. Nous avions travaillé pendant trois semaines et pensions être parvenus à un accord, mais il est tombé à l'eau. Nous travaillons fort en coulisse pour essayer de mettre fin à la grève.
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Ce que nous faisons? Notre travail est très local.
Pour vous donner quelques exemples, si un représentant du Club Rotary vient nous demander un prix de faveur pour annoncer les enchères du Club, nous disons d'accord, ce sera 50 %. Comme c'est un organisme de bienfaisance, c'est 50 %. Le personnel n'a pas toujours le pouvoir de prendre cette décision. Dans le cas en question, l'autre entreprise avait offert de publier les annonces gratuitement. Les représentants du Club Rotary sont revenus nous dire qu'ils n'avaient pas les moyens de nous payer. Je leur ai dit d'aller voir les autres étant donné que c'était gratuit.
L'autre entreprise a vendu les annonces au rabais. Sa grille tarifaire manquait de cohérence. Elle embauchait n'importe qui et ne donnait pas d'instructions à ses employés. Des gens compétents étaient livrés à eux-mêmes, si bien que leurs reportages étaient pires que les nôtre — si la chose est possible.
Des voix: Oh, oh!
M. Ken Waddell: Quoi qu'il en soit, la collectivité a abandonné ce journal, parce qu'elle était mal servie. Il n'y avait pas d'éditeur; il y avait seulement un gestionnaire de bureau. Il n'y avait pas de source d'information locale.
L'entreprise ne se débrouille pas trop mal dans les localités où elle a une source d'information locale ou une personne sur place, ayant l'autorité voulue pour prendre ce genre de décisions. Comme je l'ai mentionné, une entreprise appartenant à un propriétaire local qui s'intéresse à la collectivité est selon moi le seul modèle qui puisse nous permettre de nous en sortir. C'est le seul modèle qui ait jamais fonctionné pour une entreprise familiale ayant plus de 100 années d'existence, comme l'a dit M. Lever.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie nos témoins d'aujourd'hui d'être venus nous faire leurs observations. J'apprécie la franchise avec laquelle ils ont tous parlé. Je connais M. Waddell, du Manitoba, depuis un certain nombre d'années et je suis habitué à sa franchise. Mes collègues l'ont constatée aujourd'hui. C'est ce dont nous avons besoin au Comité, il faut bien le dire.
Ken, je voudrais vous poser un certain nombre de questions et les autres peuvent également y répondre. Vous avez expliqué, je crois pourquoi votre entreprise a eu du succès et pourquoi vous avez procédé ainsi. Les nouvelles locales sont très importantes. L'information recueillie sur le terrain est exacte et, comme vous l'avez dit dans votre déclaration, lorsqu'elle est imprimée, il y a une meilleure reddition de comptes. Pouvez-vous nous parler davantage de la nécessité qu'elle soit basée sur les faits?
Je voudrais aussi savoir qui sont vos principaux concurrents. Vos autres collègues ici présents ont souligné aujourd'hui la concurrence que la SRC vous oppose. Beaucoup d'argent y est investi. Vous pourriez me dire, par exemple, si le Comité devrait réexaminer le mandat de la SRC.
Mais surtout, je voudrais en savoir plus sur l'approche que vous avez adoptée pour réussir dans votre région. Pourriez-vous commencer, Ken, s'il vous plaît?
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Pour faire suite à la question précédente, lorsque nous avons racheté l'autre journal, nous avions huit employés tandis qu'il n'en avait plus que trois. Je veux parler du personnel sur le terrain; de l'engagement local. J'aurais certainement gagné plus d'argent si j'avais réduit mon personnel à trois employés, car vous pouvez continuer d'avancer clopin-clopant pendant un certain temps. J'ai 68 ans. Je n'ai pas à tenir le coup pendant bien longtemps, mais comme je n'ai pas l'intention de prendre ma retraite, je vais être là jusqu'au bout, que ce soit pendant deux ans ou 20 ans.
En réalité, la concurrence vient surtout des prospectus distribués par Postes Canada. La poste a la particularité d'être notre fournisseur pour une partie de notre tirage — plus de la moitié. Nous diffusons également une partie de notre tirage dans les magasins, les boîtes à journaux et ce genre de choses, mais Postes Canada est notre fournisseur et notre concurrent. Je considère depuis longtemps que Postes Canada subventionne son courrier publicitaire sans adresse avec son courrier de première classe. Je ne pense pas que ce soit juste.
Il est également très injuste que la SRC reçoive les trois quarts de 1 milliard de dollars, et j'ai même entendu parler d'un milliard. Je ne m'opposerais pas à ce que le gouvernement achète pour un milliard d'annonces à la SRC, mais je ne vois pas pourquoi nous devrions lui accorder une subvention de 1 milliard de dollars.
L'ancien programme d'aide aux publications, qui est maintenant le Fonds du Canada pour les périodiques, s'élève à 75 millions de dollars d'après les derniers chiffres que j'ai entendus. Ces 75 millions de dollars sont répartis entre plus de 1 300 publications de tout le Canada alors que 1 milliard de dollars — ou trois quarts de milliard, si vous préférez utiliser le chiffre plus bas — va à la SRC. C'est absolument ridicule.
Si vous vous demandez pourquoi le gouvernement n'est pas capable d'aider les publications en achetant des annonces — ce ne sont pas des subventions, selon moi — voilà où va votre argent.
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En effet; c'est parce qu'il fait de la distribution gratuite. Comme notre tirage est payé, nous obtenons de l'argent du Fonds du Canada pour les périodiques pour compenser les coûts de ce tirage.
La tendance est en faveur des modèles gratuits qui permettent aux gens d'obtenir le journal gratuitement — Metro ou également dans les petites collectivités — mais il n'est pas possible d'obtenir de l'aide pour lancer ce genre de modèle.
Si vous voulez lancer un journal dans un territoire où 85 % des habitants n'ont peut-être même pas les moyens d'acheter un journal, par exemple, vous ne pouvez pas le distribuer gratuitement pour diffuser l'information qui les aiderait à trouver un emploi, etc.
Un de nos principaux concurrents est la SRC qui est à la radio dans toutes les localités du Nunavut; autrement, nous sommes les seuls sur le terrain. Les gens peuvent regarder la télévision. Ils regardent APTN, car elle a un bureau sur place et, bien entendu, tout ce qui est diffusé sur le câble, mais les véritables concurrents sont la SRC et Facebook que les gens utilisent pour obtenir de l'information gratuitement. Même si Facebook ne nous concurrence pas forcément au Nunavut, le gouvernement du territoire consacre certainement de l'argent à faire de la publicité sur Facebook au lieu de le dépenser chez nous. C'est un bon exemple.
Je ne sais pas si Bruce a quelque chose à ajouter.
L'un des plus importants journaux au Canada nous a fait remarquer dans ce Comité que son principal concurrent était la CBC, et non un autre journal. J'apprécie, dans ce cas, les observations que vous avez faites.
Monsieur Lever, je crois que c'est vous qui avez mentionné que la CBC constitue un interrupteur. Pouvez-vous élaborer là-dessus et nous faire connaître votre opinion sur l'opportunité de revoir son mandat?
Ensuite, s'il reste du temps... Ken, vous avez dit dans votre témoignage que le papier est encore un support crédible. Dans les petites localités, il me semble que les gens lisent encore le journal, alors donnez-nous vos observations...
:
Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins. Je vais m'adresser à M. Crowfoot.
[Traduction]
Je vais m'exprimer en anglais.
J'aimerais vous demander d'envoyer votre texte. Je sais qu'il devrait être dans les deux langues. Je suis certain que nous trouverons un moyen. Je suis convaincu que ce que vous aviez à dire était précieux, alors s'il vous plaît, envoyez-le.
Je vous félicite pour les initiatives que vous avez prises pendant toutes ces années et pour votre courage face à cette difficile époque où les nouvelles technologies imposent un important changement de paradigme. Nous pourrions parler de l'Internet à large bande pendant longtemps, à savoir s'il est accessible ou pas, se préparer à sa venue, pour ensuite être envahi par la compétition du numérique.
Je vais passer à M. Lever. Vous avez parlé de l'importance des sites Internet de la CBC et de Radio-Canada, qui vous prennent des parts du marché des ventes publicitaires sur support numérique, et c'est vrai. On l'a mentionné plus d'une fois dans le cas des journaux, parce que le travail journalistique y est excellent. C'est aussi pourquoi les gens la consultent beaucoup. Nous avons entendu souvent qu'elle ne devrait pas avoir recours à la publicité. Elle peut l'utiliser comme complément, mais elle ne devrait pas vendre de publicité.
Lorsque vous dites que 88 % de la publicité en ligne va à l'international et que vous vous battez avec la CBC pour les seuls 12 % qui restent, c'est bien exact? Le changement draconien n'est pas là. Le vrai changement serait de s'assurer que vous receviez votre juste part de publicité parmi vos lecteurs et vos spectateurs. Le grand changement réside dans ces 88 % de ventes publicitaires qui vont aux États-Unis. Est-ce que c'est exact de dire cela, monsieur Lever?
:
Certains problèmes viennent des journaux eux-mêmes. J'y ai fait allusion plus tôt. C'est-à-dire, ils sont devenus moins pertinents aux yeux des gens. Il doit y avoir des gens sur le terrain pour présenter des histoires locales.
Tous les nouveaux agrégateurs, tous les sites Web, la CBC et tous les autres obtiennent une bonne part de leurs filons des journaux locaux, que ce soit dans un village, une petite ville ou même une grande ville. C'est une blague qui circule dans le milieu des journaux, on dit: « On devrait écouter la chaîne de radio ce matin pour qu'ils puissent lire nos histoires. »
Les journaux constituent la base fondamentale de la création ou de la collecte d'histoires, et il se peut que nous n'ayons pas réussi aussi bien que nous l'aurions dû à ce chapitre. Je crois que c'est fondamental. Sans les journaux dans les collectivités locales — et il y a 650 journaux communautaires au Canada, en plus des quotidiens et des plus grands journaux — nous allons perdre beaucoup de nouvelles crédibles et vérifiables.
Si vous enlevez les journaux, si vous fermez tous les journaux du Canada demain matin...
:
Merci, madame la présidente.
Merci beaucoup à tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Vous avez tous mentionné que les médias communautaires sont des médias qui nous unissent, qui sont rassembleurs dans les régions éloignées et les collectivités rurales. Vous l'avez bien dit: la transition actuelle que nous vivons dans le domaine des médias en met certains en danger. C'est préoccupant. Je suis moi-même d'une région où les journaux communautaires connaissent la même situation.
Vous nous avez beaucoup parlé de vos défis et des problèmes que vous vivez tout un chacun. De belles initiatives ont quand même été prises. Je félicite M. Crowfoot du tournant effectué par l'entreprise qu'il dirige.
J'aimerais que, à tour de rôle, en 90 secondes chacun — vous n'avez eu que cinq minutes chacun pour vos présentations —, vous suggériez au gouvernement des moyens d'effectuer cette transition, qui est inévitable pour les médias. Je vais vous donner l'occasion d'en parler davantage.
Nous allons commencer par M. Crowfoot.
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J'écoutais le français et je ne comprenais pas. J'ai écouté la dernière partie en anglais.
Nous avons survécu parce que nous vendions de la publicité il y a 33 ans. Les neuf autres journaux n'opéraient pas selon un modèle d'affaires lorsque le programme a été éliminé — le Programme des communications sociales des autochtones. Ils opéraient selon un modèle de services. Ils fournissaient des nouvelles localement, alors quand le programme a été éliminé, ils se sont retrouvés sans ressources. Nous vendions de la publicité, et nous avons survécu pendant les 24 dernières années.
La publicité a toujours représenté une lutte pour nous. Nous avons réussi à survivre, mais quand les ventes publicitaires se sont mises à diminuer, nous nous sommes débrouillés avec ce que nous avions et nous avons dû réduire le personnel. Nous sommes allés vers des modèles qui ne... Pour produire un journal, l'imprimer et le poster, il nous en coûtait un quart de million de dollars. Le fait de passer au numérique nous a fait économiser ces coûts. Les générations se succèdent, les lecteurs changent. Comme je l'ai dit plus tôt, les jeunes et beaucoup de gens passent aux appareils mobiles et délaissent le papier, alors nous tentons de suivre ces tendances.
:
J'ai quelques idées. Premièrement, encourager le gouvernement, que ce soit au niveau fédéral, territorial ou provincial, à annoncer localement. Je pense que c'est certainement notre perte la plus importante. On n'a pas pu entendre Bruce, mais nous avons connu des pertes importantes au cours des cinq dernières années. Ça allait très bien jusqu'en 2011-2012 environ, est c'est là que ça a commencé à faire mal, et ça a vraiment frappé fort l'an dernier au Nunavut. Nous avons connu des baisses majeures de recettes publicitaires. Du souvenir de bien des gens de notre chaîne, c'était la première fois que nous avons dû faire des mises à pied. C'était l'an dernier.
Je pense que le gouvernement doit se préparer à cette éventualité, ou peut-être est-il déjà prêt? Je n'en suis pas certain. Nous avons quelques années de retard dans le Nord par rapport à ce qui se passe dans le Sud. Plus il y aura de gens incapables de gagner leur vie dans les médias locaux, le plus il y aura de gens à la recherche d'un emploi. Ce sont souvent des personnes plus âgées. J'ai vu ça souvent dans le Sud: mes amis qui travaillaient dans des journaux locaux se sont retrouvés sans travail parce qu'ils n'étaient pas prêts à affronter le numérique.
Je pense que des programmes de formation disponibles par l'entremise de l'assurance-emploi ou quoi que ce soit d'autre, qui serviraient à former des journalistes ou des producteurs pour la presse numérique seraient utiles. Une autre façon serait d'encourager les députés et les entreprises en offrant un crédit d'impôt pour la publicité locale. Je ne parle pas seulement des journaux. Ça pourrait être pour le numérique aussi. Si on regarde le Fonds du Canada pour les périodiques, il offre des programmes pour la production de publications numériques, mais je dirais qu'ils ne sont pas aussi généreux pour les gens qui effectuent la transition vers le numérique qu'ils ne le sont pour les publications basées sur des abonnements.
Il n'y a aucun soutien pour une compagnie qui voudrait faire une distribution complète. Il y a des avantages importants à attirer des annonceurs. Le moyen le moins cher de le faire serait probablement de soutenir la distribution gratuite, ce qui donnerait l'apparence — et même la réalité — d'une copie papier entre les mains de tous. C'est beaucoup plus quantifiable que les histoires de fraude que l'on entend, même aujourd'hui, à propos de Facebook et Google, et leurs chiffres truqués qui sont bien au-delà de ce qui est véritablement livré aux gens qui paient des sommes importantes à des entreprises étrangères. Si un dollar canadien va à Facebook et que seulement 50 ¢ du produit est livré, ce n'est pas vraiment un modèle juste, quand on peut garder physiquement chaque dollar.
C'était ma réflexion sur le sujet.
:
Une fois de plus, je suis d'accord avec l'idée que le gouvernement canadien devrait dépenser en publicité, de façon à contribuer au journalisme canadien et au contenu canadien. Google et Facebook, qui s'approprient fréquemment le contenu produit par des journaux canadiens, ne devraient pas ajouter l'Insulte à l'injure en s'appropriant les dépenses gouvernementales en plus.
Patrimoine Canada devrait élargir son Fonds pour les périodiques afin d'y intégrer les journaux quotidiens basés sur des abonnements. Il y a aussi l'idée d'instaurer des dotations pour le journalisme d'enquête, de sorte que chaque dotation viendrait subventionner des enquêtes selon une formule mathématique basée sur le nombre de citoyens qui lisent les reportages.
Ce sont trois domaines spécifiques où je pense que le gouvernement pourrait apporter son aide. Je ne crois pas une seconde que le gouvernement doive s'ingérer dans nos affaires. La base de cette transition — et toutes les entreprises doivent affronter des perturbations — pose le défi de notre héritage, qui est si important pour le patrimoine et l'histoire du Canada, mais cet héritage a un prix. Par conséquent, en ce qui a trait à la transition, nous ne pouvons pas repartir à zéro. Il faut négocier la transition.
M. Samson a amené le sujet de la grève qui a lieu au Herald et c'est une grande partie, c'est cher...
Je pense que nous devons passer à une autre partie de notre Comité. J'aimerais remercier de nouveau les témoins de leur présence. Je suis désolée que vous ayez dû attendre si longtemps, mais comme vous le savez, les votes ont la préséance sur tout le reste au Parlement et ce sont des votes qui nous ont empêchés de venir ici plus tôt. C'est pourquoi nous vous avons demandé de limiter la durée de vos témoignages à cinq minutes, et c'est pourquoi nous n'aurons qu'un tour de questions. Je voudrais vous remercier encore pour votre patience et pour la qualité de vos témoignages aujourd'hui. Merci beaucoup.
Je vais maintenant demander au Comité d'aller très vite. Nous devons réaménager la salle afin d'accueillir de nouveaux témoins. Pendant ce temps, monsieur Nantel, il y a un rapport que M. Bert Crawford nous a présenté, mais il est seulement en anglais et il ne nous est pas permis, en vertu des règles de la Chambre des communes qui régissent les comités, de vous l'envoyer. Le greffier le fera traduire et tous les députés s'en verront distribuer une copie.
J'ouvre la séance suivante de ce Comité. Nous avions pensé terminer à 1 h 30, mais en faisant un simple calcul, nous devrons terminer cinq minutes après 1 h 30 pour donner la chance à chacun de poser une question. Je demanderais au Comité s'il est d'accord qu'un tour ne pourra pas durer sept minutes, il devra durer cinq minutes. Tous ceux qui poseront une question auront cinq minutes au lieu de sept. Sinon, si vous le souhaitez, nous pourrions finir bien plus tard, mais je ne crois pas que ce soit souhaitable.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à Facebook, Inc. et m'excuser d'avoir à limiter la durée de leur présentation à cinq minutes. Merci de vous adapter à cette contrainte. Nous avons M. Kevin Chan, directeur, Politiques publiques, Facebook Canada et Marc Dinsdale, directeur, Partenariats médiatiques, Facebook Canada.
Si je comprends bien, monsieur Chan, c'est vous qui allez témoigner pendant cinq minutes.
:
Madame la présidente et membres du Comité, je m'appelle Kevin Chan et je suis le directeur des politiques publiques pour Facebook Canada.
[Français]
Je suis ici, aujourd'hui, avec mon collègue Marc Dinsdale, directeur des Partenariats médiatiques chez Facebook Canada.
La mission de Facebook est de rendre le monde plus ouvert et branché. Nous sommes honorés du fait que 22 millions de Canadiens utilisent notre service. Je tiens à profiter de notre présence aujourd'hui, sur la Colline du Parlement, pour dire notre fierté de voir à quel point notre plateforme a permis aux partis politiques canadiens de créer des liens avec les citoyens de tout le pays. Comme vous pouvez le constater, nous sommes fiers et honorés de travailler avec tous les partis politiques.
[Traduction]
Les Canadiens utilisent Facebook essentiellement pour communiquer avec leurs proches et amis et échanger des histoires et des informations personnelles sous forme de messages, de photos et de vidéos. Même si Facebook n'a pas été conçu à l'origine pour la diffusion de nouvelles, les gens y ont recours de plus en plus pour se tenir au courant, ce qui a considérablement augmenté la taille de la clientèle qui pourrait s'intéresser aux actualités locales, nationales et internationales.
Bien que nous soyons primordialement une société de technologie qui a construit une plateforme pour que les gens puissent communiquer entre eux, Facebook aide les gens à se renseigner sur ce qui se passe dans le monde et prend ses responsabilités très au sérieux. J'en veux pour preuve les engagements que nous avons pris au Canada sur cette importante question, notamment en participant à l'étude du Forum des politiques publiques sur les nouvelles et la démocratie. Plus tôt cet automne, nous avons travaillé avec le forum pour organiser une table ronde portant sur les produits Facebook destinés aux organes d'information, où nous avons été ravis d'accueillir des représentants de M. O'Regan, du bureau de Mme Fry et du Bureau du premier ministre.
Nous sommes également honorés de savoir que la ministre du Patrimoine canadien utilise Facebook en direct comme plateforme clé pour demander l'avis des Canadiens lors de ses consultations culturelles.
J'aimerais montrer au Comité comment les Canadiens communiquent entre eux et partagent des informations sur Facebook. Au cœur de ce processus se trouve la technologie du service de presse de Facebook, qui propose un flux continu de nouvelles conçu pour que chacun y trouve les histoires les plus importantes pour lui. Il y a autant de flux que d'abonnés à Facebook dans le monde, c'est-à-dire 1,8 milliard.
Sur Facebook les gens construisent leurs propres flux de nouvelles en se connectant aux personnes et aux organisations qui leur importent. Par exemple, pour lire un article, les gens cliquent sur le message d'un éditeur sur leur page Facebook, ce qui les transporte directement au site Web de l'organisation médiatique en question. Les gens peuvent également hiérarchiser le contenu émanant de médias concrets en veillant à ce que leurs nouvelles figurent toujours en premier sur leur flux. Nous pensons que c'est une excellente façon de ne jamais manquer les nouvelles de son organe d'information préféré.
Au-delà des flux d'informations, nous avons également travaillé en partenariat avec des organes d'information pour créer des produits innovants et je peux désormais vous parler, mesdames et messieurs, de Facebook en direct, Facebook 360 et Instant Articles, articles instantanés.
Facebook en direct est notre produit de diffusion en flux et de nombreux médias canadiens l'utilisent de diverses manières. Voici Katie Underwood de Chatelaine dans une récente vidéo en direct aux prises avec un gros petit déjeuner à la Michael Phelps.
Comme vous le savez sans doute, voilà quelques semaines déjà que CBC diffuse The National sur Facebook en direct toutes les nuits, avec des milliers de spectateurs chaque fois. La chaîne d'affaires publiques par câble, ou CPAC, a récemment diffusé intégralement l'interrogatoire parlementaire du candidat à la Cour suprême Malcolm Rowe sur Facebook en direct, générant environ 32 000 visites.
Nous communiquons régulièrement avec les organes de presse pour savoir comment améliorer cet outil. Voici en avant-première et exprès pour vous un exemple inédit de pause publicitaire. Les éditeurs aiment bien le produit, mais ils souhaitent le monétiser et nous espérons qu'ils le feront à l'avenir, sur Facebook en direct, bien entendu. La voici donc.
Facebook 360 est un nouveau produit qui permet aux organes d'information d'offrir des expériences vraiment immersives à leur public à l'aide de vidéos à 360°. Voici par exemple une vidéo de feux de forêt à Fort McMurray tournée par le Huffington Post du Canada.
L'année dernière, nous avons eu l'honneur de collaborer avec Rideau Hall et le Gouverneur général pour une vidéo à 360° sur ses Prix pour l'innovation. Elle a été visionnée plus d'un million de fois.
Enfin, les articles instantanés de Facebook sont un produit qui permet aux médias d'offrir à leur public une expérience incroyablement rapide et immersive sur Facebook. Le contenu est chargé instantanément et contient des images et des graphiques. Détail intéressant pour le Comité, quand les médias utilisent leur inventaire publicitaire existant pour les articles instantanés, ils gardent 100 % du revenu.
Nous sommes constamment à la recherche de commentaires sur les articles instantanés. Un aspect essentiel — et peut-être que mon collègue peut en parler plus tard — c'est qu'on nous a demandé plus d'espace publicitaire dans les articles instantanés et nous avons donc modifié le produit en conséquence.
[Français]
J'aimerais remercier le Comité permanent du patrimoine canadien d'avoir écouté notre présentation.
Je suis à votre entière disposition pour répondre à vos questions.
Merci.
:
Nous sommes très heureux que vous soyez ici car, comme nous l'avons déjà dit, tous les chemins mènent à Facebook et à Google. C'est ce que nous avons entendu de nos témoins aujourd'hui et tout au long de notre étude.
Bien que Facebook ne se veut pas une société de médias, il est manifeste que c'est le plus grand agrégateur de contenu au monde. J'ignore quels sont les chiffres au Canada pour les flux d'information dont vous parliez, mais j'imagine qu'ils ne diffèrent pas tellement de ceux des États-Unis. Environ 44 % des abonnés lisent ou regardent les nouvelles sur Facebook. Quant aux recettes publicitaires, Facebook a obtenu, je crois, 7 milliards de dollars au troisième trimestre cette année, soit environ 3 milliards de plus qu'à la même époque l'an dernier. C'est énorme et, comme vous l'avez dit, le flux de nouvelles est puissant, il a beaucoup de pouvoir. Et qui dit grand pouvoir, dit grande responsabilité.
Comme vous avez décrit les flux de nouvelles en disant que vous aviez le loisir de choisir les points de vue qui vous semblent les moins dérangeants ou les plus attirants, je me demande jusqu'où vous poussez ce genre de myopie. Beaucoup de gens sont inquiets en ce moment.
Je lisais un article dans le magazine Fortune où il était question du manque de rédacteurs susceptibles de favoriser d'autres points de vue. Dans cette analyse on ne peut plus pessimiste Fortune affirme que les médias conventionnels et le discours politique deviennent de plus en plus insulaires à une vitesse effroyablement accélérée. Pour illustrer la situation, le magazine évoque l'exemple d'une histoire fabriquée de toutes pièces qui a circulé un million de fois avant d'être prouvée fausse, selon laquelle le pape se serait prononcé en faveur du président élu Donald Trump.
Il y a une grande responsabilité dans tout cela. Je sais que votre directrice générale et votre président ont insisté sur le fait que le site n'a eu aucune incidence sur l'élection, mais l'affaire a provoqué un débat féroce au sein de votre entreprise. Je m'interroge simplement sur la responsabilité morale d'exprimer des points de vue différents et dans quelle mesure vos flux d'information peuvent être touchés à l'avenir.
:
Pour vous donner quelques statistiques, au Canada, près de 1,5 million de personnes, soit environ 10 % des utilisateurs quotidiens de mobiles au Canada, consultent chaque jour un article instantané et plus de 7 millions de personnes, soit plus de 40 % des 17 millions d'adeptes quotidiens de Facebook au Canada, consultent directement le contenu de l'éditeur en cliquant sur le lien qui les amène tout droit sur le site correspondant.
Pour ce qui est de votre autre question, monsieur, je crois que vous faites allusion à une bulle de filtrage ou à une chambre d'écho, selon les descriptions que j'ai pu lire. Des recherches empiriques, examinées par des pairs, ont été publiées à ce sujet. Elles montrent qu'à en croire les chiffres, il s'avère que les gens sont exposés à des points de vue plus différents en ligne qu'ils ne le seraient dans leur vie quotidienne. C'est peut-être intuitif, car dans notre vie quotidienne, nous rencontrons les mêmes personnes tous les jours, alors que sur Facebook, par exemple, on prend contact avec des amis du lycée, de l'université, du travail et avec des voisins.
Notre directrice générale, Sheryl Sandberg, a décrit ces personnes comme des liens forts et faibles. En fait, vous verrez probablement des points de vue beaucoup plus divers exprimés sur Facebook que vous n'auriez trouvé par le passé en rencontrant cinq à dix personnes par jour ou en obtenant votre contenu d'une chaîne de télévision ou d'un journal donné.
C'est incroyable de voir où Facebook en est aujourd'hui après seulement 12 ans d'existence. Nous venons d'entendre des témoins dire que le gouvernement du Canada leur donne moins d'argent qu'avant pour la publicité, mais c'est un record absolu pour Facebook maintenant, avec 3,8 millions de dollars de novembre 2015 à juin 2016. Il suffit de comparer ces chiffres aux 5,8 millions de dollars d'avril 2006 au début de juin 2014. C'est une augmentation massive pour Facebook.
J'ai un article ici, c'est en fait sur papier, qui dit que Destination Canada a dépensé telle ou telle somme et le ministère de l'Immigration telle autre. Je vais jouer le dinosaure. Il est évident que le gouvernement peut dépenser une tonne d'argent sur les annonces numériques, mais savons-nous si elles fonctionnent?
C'est mon problème avec le numérique. Si je vois quelque chose dans le journal, si je le vois à la télévision, ou si je l'entends à la radio, ça suscite mon intérêt. Je ne sais pas si c'est le cas avec le numérique. Est-ce que nous voyons cela? Est-ce que Travaux publics, qui s'occupe de la publicité du gouvernement fédéral, sait ce qui se passe?
:
Je soumets respectueusement, monsieur, que les questions relatives à Travaux publics devraient être directement adressées à ce ministère.
Je pense que l'avantage des annonces numériques, et je parle seulement pour Facebook, c'est qu'on peut se faire une idée du nombre de gens que ces annonces ont attiré.
Le livre de John Stackhouse a été évoqué dans le passé, et je crois qu'il y fait une description assez bonne, à savoir qu'auparavant, on plaçait une annonce quelque part sans trop savoir si le public cible en prendrait connaissance. Ce qui est impressionnant de la publicité numérique, c'est que l'on est beaucoup plus certain d'atteindre son public.
En ce qui concerne les projets de dépenses du gouvernement du Canada, malheureusement, je ne suis pas en mesure de vous répondre.
:
Merci, madame la présidente.
Merci MM. Dinsdale et Chan d'être présents parmi nous.
Notre greffier nous a fait part du fait que vous prépariez un mémoire écrit. Malheureusement, alors que nous voulions tellement vous rencontrer, nous nous retrouvons à la bourre. C'est quand même incroyable! Nous nous précipitons pour vous poser des questions, et notre temps d'intervention sera d'à peine 20 minutes.
C'est pourquoi il est de mon devoir, comme député fédéral et représentant des gens de ma circonscription, de vous demander de soumettre tout de même votre mémoire par écrit. Actuellement, nous disposons de trop peu de temps.
Facebook est un gros joueur qui représente, selon les chiffres, environ 20 % des ventes publicitaires en ligne, dont 80 % ont échappé au marché intérieur canadien. C'est, grosso modo, ce que nous avons entendu de la part des gens et des médias venus témoigner ici. C'est 80 % des ventes publicitaires en ligne qui s'en vont vers des fournisseurs américains ou internationaux, en tout cas pas des Canadiens. Ces fournisseurs n'ont que quelques employés au Canada, dont vous d'ailleurs. Vous possédez environ le cinquième de ces 80 %. Selon un article récemment paru sur le site Bloomberg, vous obtenez environ 20 % des ventes en ligne, Google obtenant les 80 % restants.
Comment réagissez-vous comme Canadiens à cette accusation qui nous arrive de partout? Il y a probablement quelques nuances, quelques personnes qui capotent sur Radio-Canada qui met de la publicité en ligne. On se chamaille au sujet de 12 %. Honnêtement, excusez-moi, mais c'est accessoire. Nous avons un contrôle dans ce domaine, nous pouvons parler aux responsables de Radio-Canada et leur demander de faire un effort. Cependant ce n'est pas le noeud du problème, mais bien les 82 % qui restent. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
:
Je vous remercie de votre réponse, et je comprends votre prudence.
Cependant, la réalité — je ne suis pas économiste et je ne connais pas ce genre de grandes analyses statistiques — est que je suis assez âgé pour savoir qu'au cours des années 1960, il y a eu le Pacte de l'automobile. Les Américains expédiaient toutes leurs autos au Canada . Le gouvernement canadien s'est alors dit que, si les citoyens devaient acheter autant de ces produits, il ferait aussi bien d'en fabriquer au pays parce que, éventuellement, les dollars canadiens s'en allaient toujours à l'extérieur du pays.
Actuellement, c'est quand même ce qui se passe, en somme, du côté des ventes publicitaires sur Internet. Le modèle imprimé disparaît tranquillement en laissant une certaine nostalgie. On écoute des disques vinyles et on lit le journal imprimé le samedi matin — comme vous; c'est beau, et merci d'avoir tant d'affection pour nos vieux supports —, mais nous allons devoir régler cette situation. Nous sommes en train de laisser partir — on ne peut pas qualifier cela de ressource naturelle — notre marché publicitaire à l'étranger. Dans ce contexte, je voulais vous demander quelle est la proportion d'achats commerciaux réalisés en ligne comparativement aux achats individuels.
En tant qu'individu, j'achète moi-même de la publicité sur Facebook. Évidemment, je vous épargne le débat sur les taxes de vente. Je crois que le gouvernement essaie actuellement de déterminer la possibilité de facturer les taxes transactionnelles sur les achats publicitaires. Quelle est la proportion d'achats? Je suis persuadé que tout le monde ici, tous les députés, achètent de la publicité sur Facebook et ferment les yeux sur le fait qu'ils ne paient pas de taxes et de TPS. Est-ce que des compagnies comme Honda Canada doivent se présenter comme
[Traduction]
votre concessionnaire automobiles local
[Français]
ou bien comme Honda Canada?
Marc, je ne sais pas si vous avez des renseignements à ce sujet.
Les groupes privés sont des groupes privés. J'ai une anecdote intéressante sur la façon dont les gens s'y prennent. L'été de l'an dernier, nous étions avec Niki Ashton, dans sa circonscription. Elle nous a invités à aller voir comment les communautés des Premières nations utilisent des groupes de Facebook.
Nous l'avons accompagnée pendant qu'elle nous expliquait comment chaque personne de la communauté était en fait dans le groupe Facebook. Le moment venu pour que le petit Jimmy rentre à la maison pour le dîner, au lieu d'appeler la personne concernée, un message fut inséré dans la page du groupe: « Dites à Jimmy qu'il est temps de rentrer ».
En effet, dans de nombreuses communautés, et en particulier dans des régions rurales éloignées, les groupes Facebook sont incroyables sur le plan du partage. On peut supposer que cela comprend le partage d'articles.
:
Merci beaucoup. Les cinq minutes ont été dépassées.
Nous en sommes arrivés à la fin de notre série de questions et de réponses. En tant que présidente, j'aimerais toutefois poser une question.
Aujourd'hui, un de nos témoins, M. Waddell, du Neepawa Banner nous a dit que l'information devrait être vérifiable et responsable. C'est au cœur de ce qui préoccupe beaucoup d'entre nous. Quand quelqu'un partage ce qui est considéré comme une nouvelle, la chose responsable à faire serait de s'assurer qu'elle est vérifiable. Je ne parle pas de nouvelles bidons ou de blagues. Je parle de Mme Unetelle qui affiche sa nouvelle et sa nouvelle est acceptée sans conteste.
Si Facebook doit devenir un agrégateur ou un fournisseur de nouvelles, je comprends et je pense que c'est très bien d'envoyer des gens au journal ou à la télévision ou la radio pour vérifier leurs nouvelles car toutes ces autres plates-formes ont le devoir d'être vérifiables et responsables. Quand les informations ne sont pas vérifiables, la responsabilité entre en jeu et il existe une loi pour rendre la personne responsable de l'affichage de nouvelles non vérifiables. Ce que beaucoup se demandent, c'est si quelqu'un publie une nouvelle qui va être reprise dans les médias, ces médias ne doivent-ils pas avoir une responsabilité égale?
Si tout le monde va à Facebook comme plateforme, si tout le monde regarde les nouvelles et nous sommes en pleine période électorale — l'élection de M. Trump a été le résultat de la dernière, le Brexit étant un autre exemple — les gens croient mordicus à ce qu'ils lisent. Comment une démocratie peut-elle être bien servie lorsque l'information n'est pas vérifiable? Les gens prendront des décisions en fonction de ce qu'ils considèrent comme des nouvelles. Il s'agit de définir ce que l'on entend par « nouvelles » sur ces types de médias. Je ne sais pas si quelqu'un vous a parlé de cela ou si vous pensez agir dans ce sens. Autrement, les gens obtiennent des informations qui sont fausses et ils agissent en conséquence. Il y a une responsabilité à assumer.
:
Merci, madame la présidente.
Comme je l'ai dit à M. O'Regan, notre directeur général Mark Zuckerberg se préoccupe énormément de la question. Il a affiché un message à ce sujet samedi et je peux certainement le distribuer au Comité si les gens ne l'ont pas vu. Je crois qu'il a dit entre autres que plus de 99 % du contenu que les gens voient sur Facebook est authentique.
Ensuite, il s'agit de savoir quelles mesures supplémentaires nous devrions prendre. Il est tôt, comme je l'ai mentionné, mais nous nous attachons à résoudre la question. Je pense que Mark fait également remarquer, à la fin de l'article, qu'il est possible de trouver un savant équilibre entre ce qui est vraiment faux et un canular et ce qui n'est qu'une opinion, etc.
Je tiens à ce que vous sachiez, vous et le Comité parlementaire, que Facebook prend ses responsabilités très au sérieux et nous espérons pouvoir vous en dire davantage dans les semaines et mois à venir.