Bonjour. Aujourd'hui, nous recevons les témoins par vidéoconférence et en personne. Comme vous le savez, nous étudions l'accès des communautés locales aux histoires et expériences canadiennes dans l'ensemble du pays, sur le plan des nouvelles et autres types d'information... Le contenu canadien, pour ainsi dire.
Qu'arrive-t-il lorsque les médias sont regroupés? Quelles sont les conséquences? Sont-elles positives? Sont-elles négatives? Nous examinons toutes les plateformes, y compris les plateformes numériques. Nous cherchons des solutions et des façons d'accroître le contenu canadien — y compris les nouvelles —, et d'accroître l'accès à ce contenu.
Nous recevons ce matin les représentants de Télé Inter-Rives Ltée: les directeurs, M. Harvey et M. Nadeau, et la vice-présidente, Mme Simard. Nous recevons également les représentantes de The Tyee: la cofondatrice Michelle Hoar et la rédactrice en chef Robyn Smith, qui se joignent à nous depuis la belle ville de Vancouver.
Voici comment nous allons procéder: chaque groupe disposera de 10 minutes pour présenter son exposé. Ensuite, les membres du comité pourront vous poser des questions.
Vous pouvez décider qui d'entre M. Harvey, M. Nadeau ou Mme Simard prendra la parole ou encore vous partager les 10 minutes qui vous sont accordées.
Madame Smith et Mme Hoar, vous pourrez procéder de la même façon.
Allez-y.
Bonjour, tout le monde.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés et membres du Comité, je m'appelle Cindy Simard et je suis vice-présidente, Information, des quatre stations de télévision locales de Télé Inter-Rives ltée, une propriété de la famille Simard. J'ai maintenant 40 ans et j'ai moi-même été journaliste. Maintenant, je suis la lectrice principale du bulletin de nouvelles locales de notre station CIMT, affiliée à TVA, à Rivière-du-Loup.
J'ai à mes côtés Pierre Harvey, directeur général de la station CHAU-TV, affiliée à TVA, à Carleton-sur-Mer. Cela fait 40 ans que Pierre y travaille.
Je vous présente également Jean-Philippe Nadeau, qui est directeur de l'information pour nos stations CIMT-TVA et CKRT-TV, affiliée à Radio-Canada.
Madame la présidente, j'aurais aimé vous dire quelques mots en anglais, mais malheureusement mon anglais n'est pas assez bon et ce serait trop long. Pourtant, ma mère est anglophone et, par un drôle de hasard, je suis née en Ontario, mais cela s'arrête là pour mon anglais.
Notre famille oeuvre en radiodiffusion depuis plus d'un demi-siècle. Mon grand-père, Luc Simard, a fondé la première station de télévision à Rivière-du-Loup affiliée à Radio-Canada. L'ouverture de cette première station de télévision a eu lieu au début des années 1960, alors que le gouvernement du Canada, par l'entremise de la Société Radio-Canada, avait besoin de petits entrepreneurs privés dans les régions pour donner le premier service de télévision aux Canadiens. En 1978 et en 1986, mon père, Marc Simard, a répondu à l'appel du CRTC et a ainsi fondé notre affiliation à TVA et, par la suite, à TQS, qui aujourd'hui se nomme Vtélé.
Nos stations de télévision desservent aujourd'hui tout l'Est du Québec, incluant la Gaspésie et la Côte-Nord, ainsi que la province du Nouveau-Brunswick, qui compte 235 000 francophones, majoritairement des Acadiens. L'ensemble de notre marché desservi par nos stations représente environ 650 000 personnes.
Comme ils l'ont fait au cours des audiences de Parlons télé, les Canadiens ayant participé au forum en ligne ont mentionné sans équivoque qu'ils accordaient une grande importance aux nouvelles locales et qu'ils les considéraient comme leur source principale de nouvelles et d'information. Dans un sondage, 81 % des Canadiens ont affirmé que les nouvelles locales à la télévision étaient importantes pour eux.
Dans les forums de discussion de Parlons télé, de nombreux Canadiens se sont clairement exprimés sur l'importance des nouvelles locales, et la plupart des participants ont noté qu'ils se fiaient d'abord et surtout aux nouvelles télévisées pour demeurer informés sur les questions d'intérêt public et qu'ils n'utilisaient les journaux et Internet que comme un complément aux nouvelles à la télévision.
Chaque année, nos quatre stations de télévision locales dépensent près de 3,5 millions de dollars uniquement pour notre service de nouvelles locales, ce qui représente évidemment la dépense la plus importante de toutes nos stations de télévision. Depuis près de 60 ans, soit depuis l'arrivée de la télévision au Canada, les stations de télévision locales dans toutes les régions du pays, à l'exception des grands réseaux de télévision, n'ont qu'une seule source de revenus, soit la vente de publicités.
Contrairement aux canaux spécialisés, les grandes entreprises de distribution en radiodiffusion, les EDR, soit les câblodistributeurs et les distributeurs par satellite, captent nos signaux de télévision locaux et ne nous versent aucune somme d'argent pour les distribuer et les revendre ensuite à leurs abonnés. Pendant ce temps, les canaux spécialisés ont bénéficié, en plus des revenus d'abonnement payés par les consommateurs, de revenus supplémentaires tirés de la publicité, et cela, sans aucune obligation de produire de la programmation locale et des nouvelles locales dans les régions du Canada. Voilà l'une des raisons pour lesquelles la télévision conventionnelle est dans une situation précaire, en plus de l'arrivée d'Internet.
Les nouveaux médias sont aujourd'hui un complément essentiel à nos stations de télévision. Nous considérons les nouveaux médias comme une fenêtre supplémentaire pour diffuser nos nouvelles locales. Cependant, nos sites Internet ne génèrent pratiquement aucun revenu. Ce sont nos recettes publicitaires de la télévision qui soutiennent les coûts de nos sites Internet.
En Amérique du Nord, les sites majoritairement consultés sont exploités par les grands télédiffuseurs comme CNN, ABC et NBC. Au Canada, on pense notamment à Radio-Canada, à TVA, à CTV. Évidemment, c'est attribuable à leur capacité de livrer de l'information produite par des professionnels, par des journalistes. C'est exactement la même chose dans nos régions, où les sites de nouvelles locales de nos stations sont également les plus consultés, en raison de la justesse et de la fiabilité de leur contenu et de la notoriété de nos stations auxquelles les gens font confiance.
Dans tous les cas, que ce soit dans les grands centres ou en région, tout l'argent nécessaire pour alimenter et exploiter les sites Internet provient des revenus publicitaires de la télévision ou des canaux spécialisés de nouvelles. Il est évidemment inutile de vous dire qu'exploiter des sites Internet de nouvelles coûte extrêmement cher.
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Aux États-Unis, l'équivalent de notre CRTC, la FCC, a pratiquement obligé les câblodistributeurs et les distributeurs par satellite à payer les stations de télévision locales pour obtenir le droit de distribuer leurs signaux, tout comme ils le font avec les canaux spécialisés.
Au Canada, malheureusement, et malgré le désir du CRTC de mettre en avant une telle pratique, certains grands câblodistributeurs et entreprises par satellite se sont objectés à ce projet. Il y a quelques années, la Cour suprême du Canada, dans un jugement favorable de trois contre deux, a jugé que ce projet était inapplicable, en raison de certaines dispositions de la Loi sur le droit d'auteur.
À notre avis, il aurait été plus logique pour les stations de télévision conventionnelles d'obtenir des revenus d'abonnement pour leurs signaux, ce qui aurait amélioré la situation financière de l'ensemble de notre industrie.
Une des solutions serait que le gouvernement du Canada apporte les modifications requises à la Loi sur le droit d'auteur afin de permettre aux stations de télévision conventionnelles d'obtenir des revenus d'abonnement.
Face aux difficultés financières des stations de télévision conventionnelles et locales, le CRTC, dans les circonstances, a pris la meilleure décision en annonçant, le 15 juin dernier, le Fonds pour les nouvelles locales indépendantes, le FNLI, en utilisant les mêmes ressources financières disponibles à l'intérieur du système de radiodiffusion.
Nous approuvons et appuyons ce fonds. Nous remercions également le CRTC de l'avoir instauré afin que les Canadiens puissent continuer, comme ils le désirent, à bénéficier de nouvelles locales de très haute qualité.
Cependant, il se pourrait que cette somme soit insuffisante pour combler tous les besoins dans l'avenir. Rappelons que la Loi sur la radiodiffusion oblige les distributeurs à remettre 5 % de leurs revenus à la production d'émissions canadiennes. Nous croyons que cette somme pourrait être augmentée par le CRTC, si les besoins pour maintenir les nouvelles locales l'exigent.
En terminant, nous voulons vous souligner qu'il est absolument fondamental pour nos quatre stations de télévision locales de maintenir leur affiliation aux trois grands réseaux francophones de télévision, soit TVA, Radio-Canada et V.
De fait, 95 % de nos émissions proviennent de ces trois grands réseaux et 70 % de nos revenus proviennent des ventes publicitaires réseaux. Sans une affiliation réseau, il serait tout à fait impossible d'exploiter une station de télévision locale dans les régions.
Dans une décision rendue en 2007 touchant des aspects réglementaires de la télévision en direct, le CRTC mentionnait ceci:
Le Conseil estime que les télédiffuseurs indépendants jouent un rôle important en offrant des émissions locales à l'extérieur des grands marchés. Pour être en mesure d'offrir des émissions locales de haute qualité, ils doivent obtenir les ressources financières provenant d'ententes d'affiliation et de soutiens financiers raisonnables.
Après plus de 50 ans d'expérience en radiodiffusion, nous demandons au gouvernement du Canada, par l'entremise du ministère du Patrimoine canadien, de maintenir et de renforcer tous les pouvoirs du CRTC, et ce, dans l'intérêt de tous les Canadiens afin qu'ils aient accès à des nouvelles locales de grande qualité. Soulignons-le, cet organisme public est le seul gardien du système de radiodiffusion au Canada.
Finalement, nous croyons encore profondément à la télévision locale et à ce qu'elle demeure la première source d'information des Canadiens.
Nous remercions le Comité permanent du patrimoine canadien de son invitation à comparaître aujourd'hui et de son intérêt manifesté envers les activités de nos stations de télévision locales. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.
Merci.
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Bonjour. Je vous remercie de nous inviter à témoigner devant vous aujourd'hui.
Je suis accompagnée de Michelle Hoar, qui a cofondé The Tyee et a dirigé les activités opérationnelles de l'entreprise pendant 13 ans. Elle pourra m'aider à répondre à vos questions à la suite de mon exposé.
Vous étudiez aujourd'hui la situation de l'industrie des médias du Canada, l'incidence des nouveaux médias et les perspectives d'avenir. J'espère que mon expérience avec The Tyee pourra vous éclairer.
Je me sens privilégiée de travailler en journalisme. J'ai obtenu mon diplôme en 2011, alors que les médias traditionnels étaient déjà confrontés à une révolution numérique. Mes collègues étaient inquiets, mais puisque nombre de nos héros travaillaient toujours pour les grands journaux, nous espérions qu'un plan B s'opérerait.
Or, les choses n'ont fait qu'empirer. Les recettes publicitaires n'ont cessé de diminuer et ont entraîné des vagues de mises à pied dans les grandes chaînes. Les traditions, l'expertise et l'âme du journalisme ont disparu alors que le personnel réduit des salles de nouvelles tentait de suivre le rythme du cycle de nouvelles numériques en continu. Facebook et Google ont fait fondre les recettes publicitaires qui aidaient à la production de nouvelles. Les salles de nouvelles ont réagi en créant un flou entre les vrais reportages et les articles publicitaires.
Pendant ce temps, CBC/Radio-Canada a dû procéder à des réductions draconiennes. Nous avons vu des journalistes que nous admirions accepter des indemnités anticipées ou quitter l'industrie.
Quelques-uns de mes amis ont trouvé un bon emploi, mais nombre d'entre eux ont abandonné. Ils ne pouvaient pas vivre du peu de travail qui était offert ou ne pouvaient pas supporter les tendances de l'industrie à chercher les clics à tout prix ou à écrire du contenu commandité fade pour servir les annonceurs. Selon ce qu'on me dit, les journalistes indépendants d'il y a 20 ans étaient payés trois à cinq fois plus cher le mot que ceux d'aujourd'hui. Dans quelle autre industrie l'échelle salariale est-elle inversée de façon aussi drastique?
Je dis cela pour établir clairement que les difficultés qu'ont connues les médias traditionnels n'ont pas seulement nui au journalisme d'intérêt public. Le Canada compte beaucoup de personnes intelligentes qui veulent faire ce travail, qui usent de toutes leurs capacités et de toute leur passion pour alimenter une conversation démocratique essentielle, mais il y a maintenant moins de place pour eux et moins de mentors qui ont le temps de leur enseigner.
Par conséquent, nous n'arrivons pas à nourrir la prochaine génération de journalistes, ceux qui nous aident à concrétiser les changements réels et nécessaires dans le monde, et c'est une grande perte.
J'ai eu la chance d'atterrir chez The Tyee qui, au cours des 13 dernières années, a su bâtir un lectorat régional sain et accroître son lectorat national parce qu'il donne au public ce que les médias regroupés n'offrent pas. Or, malgré toute notre fierté, nous nous inquiétons pour notre industrie. Je ne veux pas que les journalistes qui travaillent dans l'intérêt du public — peu importe où ils travaillent — perdent leur emploi.
Personne au Canada n'a encore réussi à mettre en oeuvre un modèle opérationnel exclusivement numérique qui puisse soutenir un grand bassin de journalistes professionnels payés à temps plein. Aucun des médias numériques locaux n'a la taille ni l'échelle des médias traditionnels de l'époque. Nous craignons qu'un dangereux fossé se soit creusé avec la chute des médias traditionnels, et que les médias numériques n'arrivent pas à faire le pont et à rattraper ce que nous avons perdu.
Personnellement, je ne crois pas que le renflouement des grands médias soit la solution. Je préfère un avenir où les entreprises médiatiques monolithiques du Canada sont fractionnées et où les bureaux de presse et les services d'information sont achetés par de petites entités régionales qui se soucient de leur communauté et entretiennent d'importantes relations avec les institutions locales qui les appuient.
Cela étant dit, je crois qu'avec de l'imagination et un désir de changement, le gouvernement peut en faire beaucoup pour raviver l'industrie.
Supposons que le Canada soit doté d'un secteur reconnu, valorisé et bien soutenu pour les médias numériques comme le nôtre. Imaginons une profusion de Tyees, de tous les horizons, qui ont diverses missions et divers modèles opérationnels; une association d'organismes de bienfaisance, d'organismes à but lucratif, de coopératives et de structures hybrides. Il faudrait certains investissements, mais il seraient modestes. L'argent n'a même pas à provenir directement du gouvernement, mais le gouvernement peut nous aider à y arriver.
J'ai récemment demandé à notre fondateur et rédacteur en chef, David Beers, combien avait coûté le démarrage du magazine The Tyee en 2003. C'était 190 000 $. À l'époque, il n'y avait pas beaucoup de modèles comme le nôtre. David et notre investisseur s'étaient dit: « Tout ce qu'il faut au Canada, c'est un modèle, et tout ce dont nous avons besoin, c'est de 190 000 $. Si l'entreprise porte des fruits au cours de la première année, alors nous investirons plus. Sinon, nous nous retirerons. » C'est ainsi que The Tyee est né.
Aujourd'hui, 190 000 $ représentent moins du cinquième du coût d'une maison bonne à démolir dans la ville de Vancouver. C'est aussi, d'après ce que j'ai entendu, un peu moins que le coût du déménagement de deux assistants du de Toronto à Ottawa.
Ces 190 000 $ ont permis de démarrer l'entreprise. On a fait d'autres investissements similaires par la suite, puisque The Tyee sortait la nouvelle, attirait de plus en plus de lecteurs et taillait sa place. Ces 190 000 $ ont permis d'établir plusieurs autres sources de revenus qui appuient maintenant nos opérations, notamment des recettes publicitaires et même des commanditaires pour les ateliers de maître Tyee, et de plus en plus de soutien direct de la part de nos lecteurs.
Les engagements d'investisseurs patients et les sources de revenus diversifiées ont permis à The Tyee de rester en vie et de devenir une plateforme respectée et primée dans le domaine du journalisme d'intérêt public. Il est vrai qu'il faudrait aujourd'hui plus que les 190 000 $ qui ont permis le démarrage de The Tyee en 2003. Disons qu'il faudrait aujourd'hui 350 000 $. Le lancement de 20 médias comme The Tyee au Canada coûterait donc 7 millions de dollars. C'est le prix de sept maisons à Vancouver.
C'est cette vision que je vous présente ici aujourd'hui. Le Canada a besoin d'une association d'innovation politique et de priorisation volontaire pour que les 190 000 $ qui ont permis le lancement de The Tyee puissent servir encore et encore au journalisme indépendant de partout au Canada.
Il faut établir des mesures incitatives comme des crédits d'impôt, des subventions de contrepartie et une levée des restrictions associées à la philanthropie pour encourager les intervenants de nos collectivités à financer les médias indépendants. Nous avons besoin d'infrastructures pour aider les médias indépendants comme The Tyee à se faire une place dans le réseau, à former un regroupement reconnu de médias indépendants qui partageraient les coûts de base, les sources de revenus, les projets de reportages, les avancées technologiques et les auditoires.
Le gouvernement peut jouer un rôle à cet égard, sans financer directement le contenu. Sauf votre respect, The Tyee ne voudrait pas être financé par le gouvernement parce que nous commentons vos activités. Toutefois, il reste beaucoup à faire pour accroître le potentiel éprouvé — mais mal nourri — du secteur des médias indépendants à titre de complément aux grands médias et à CBC/Radio-Canada.
J'aimerais revenir rapidement au commentaire que j'ai fait sur le changement des lois en matière de philanthropie. Au fil des ans, The Tyee a profité des contributions d'institutions philanthropes avant-gardistes par l'entremise de son organisation soeur à but non lucratif, Tyee Solutions Society. C'est la preuve qu'il est possible de réaliser de grandes choses, mais nous avons aussi appris que les politiques fédérales rendaient la collaboration entre les philanthropes et les journalistes difficile.
Lorsque Tyee Solutions Society a accès à l'investissement philanthrope, elle fait un travail de journalisme axé sur les solutions. Le journalisme axé sur les solutions a recours à des techniques de reportage d'enquête, mais ne vise pas à nuire aux politiciens. Il vise à régler des problèmes épineux, et fonctionne bien. Au cours des sept dernières années, nos activités dans ce domaine ont atteint une valeur de près d'un million de dollars. Nous avons abordé des sujets critiques comme la salubrité alimentaire, l'éducation des Autochtones, le logement abordable et le futur énergétique du Canada, et nous l'avons fait malgré les règles très restrictives du Canada en matière de philanthropie. C'est le genre de journalisme qui intéresse ma génération.
En résumé, nous ne vous demandons pas de financer notre contenu. Nous vous demandons de trouver des façons de dégager les fonds. Nous vous demandons de songer à un fonds de démarrage pour les nouvelles entreprises médiatiques comme la nôtre. Nous vous demandons de nous aider à attirer plus d'investissements de base et à établir un meilleur climat d'investissement pour les médias de l'ensemble du Canada, qu'il s'agisse de fiducies des collectivités ou de crédits d'impôt. Enfin, nous vous demandons de faciliter la philanthropie individuelle et institutionnelle, pour favoriser le journalisme axé sur les solutions.
Je suis chanceuse d'avoir pu entreprendre ma carrière à The Tyee et je vous demande de favoriser la création et le soutien d'autres endroits pour les gens comme moi. Merci.
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En fait, le fonds global pour les indépendants représente environ 13 millions de dollars. Il y aura donc une vingtaine d'indépendants de partout au Canada qui vont en bénéficier à partir du 1
er septembre 2017.
Comme nous l'avons mentionné dans notre exposé, nous sommes satisfaits de ce geste du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. Ce fonds va, dans un premier temps, maintenir les niveaux d'information locale produite dans les différentes stations. Dans un deuxième temps, lorsque les stations de télévision indépendantes vont renouveler leur licence devant le CRTC, ce dernier va examiner avec elles si le niveau d'information locale présentée doit être maintenu ou augmenté selon les circonstances qui vont se présenter pour chaque station.
Il importe de comparer ce fonds avec d'autres fonds que nous avons déjà reçus. Auparavant, il y avait un petit fonds destiné aux indépendants pour pallier la non-distribution de leur signaux sur les satellites. C'est ce qu'on appelait le Fonds pour la programmation locale dans les petits marchés, le FPLPM. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a éliminé ce petit fonds afin de créer le nouveau fonds. Donc, il y avait déjà des sommes provenant de ce fonds et nous en avons bénéficié au cours des dernières années. Par ailleurs, de 2009 à 2012, nous avons bénéficié du FAPL, soit le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale.
Selon les estimations que nous avons faites au cours des dernières semaines, ces deux fonds étaient plus importants que ce que nous allons recevoir par l'entremise du nouveau fonds créé par le CRTC. Cela nous fait dire que le nouveau fonds pour les nouvelles locales va surtout aider à maintenir les niveaux de production locale que nous avions, mais il ne nous aidera pas à faire d'autres genres d'émissions locales qui sont très appréciées de nos auditoires.
Nous, à Télé Inter-Rives, nous avons souvent été cités en exemple par le CRTC pour l'utilisation des fonds qui nous ont été remis au cours des dernières années pour faire de la nouvelle programmation locale. Vous comprendrez que nous sommes un peu déçus de ce nouveau fonds.
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Nos stations à Rivière-du-Loup, CIMT et CKRT, couvrent un territoire qui est quand même très grand. Nous diffusons dans le secteur de Rivière-du-Loup, dans Charlevoix et au Nouveau-Brunswick. Nous avons donc des équipes en place un peu partout. Nous embauchons de jeunes journalistes. Nous sommes une école de formation en région, puisque plusieurs journalistes qui sont maintenant ici, à Ottawa, sont passés par Rivière-du-Loup, de même que d'autres ailleurs au pays. Nous avons toujours embauché des gens passionnés.
En fait, les gens qui vivent en région ont autant besoin d'information de qualité, produite avec la rigueur journalistique nécessaire. Étant donné que nous sommes affiliés également à des réseaux comme TVA et Radio-Canada, les normes journalistiques sont les mêmes, que l'on serve un petit marché ou un grand. Cela n'est pas différent dans le cas de Rivière-du-Loup. La particularité est que nous couvrons de grands territoires, avec des équipes d'information parfois réduites.
Par ailleurs, au cours des dernières années, nous avons continué à embaucher du personnel, malgré un contexte économique difficile pour les médias. Nous avons toujours eu le souci de maintenir la qualité de l'information, parce les gens ont besoin d'être informés sur les plans local et régional. En fait, l'information locale est le fondement de la démocratie. Les gens veulent savoir ce qui se passe au sein de leur municipalité, de leur commission scolaire, des hôpitaux. Les prises de décision les concernent au quotidien.
En l'absence de médias locaux comme les nôtres, les gens écouteraient des informations nationales. Le centre d'intérêt se situerait donc beaucoup plus loin. C'est ainsi que nous, en région, réussissons à atteindre les gens. D'ailleurs, ceux-ci nous le disent quotidiennement. Quand nous croisons des gens sur le terrain, ils nous remercient de leur parler de leur coin de pays, parce qu'ils veulent savoir ce qui se passe près de chez eux. C'est pour cela qu'il est important de pouvoir aider davantage les stations régionales comme les nôtres à maintenir cette qualité de l'information.
Il y a eu beaucoup de changements technologiques ces dernières années, de sorte qu'il a fallu investir sur le plan de la haute définition. Notre station a été l'une des premières au Québec, après Montréal, à effectuer ce virage. Je répète que les gens en région veulent avoir un produit de qualité égale en ce qui a trait à l'image et à l'information. Il y a aussi tout le virage numérique, avec Internet. Les gens veulent être informés rapidement et, de notre côté, nous devons maintenir, avec le même nombre de journalistes, non seulement notre programmation locale, mais nos sites Internet. Nous alimentons nos sites continuellement, 24 heures sur 24. Il faut donc davantage de moyens, mais nous n'avons pas plus d'effectifs pour autant.
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Je vous remercie d'être parmi nous.
Messieurs et madame qui représentez Télé Inter-Rives ltée, comme le disait mon collègue M. Waugh, le fait que votre station de télé soit de propriété familiale est tout à fait intéressant. Ce modèle est représentatif de bon nombre de réalités médiatiques, notamment la retransmission.
Vous avez évoqué des enjeux relatifs à Radio-Canada, qui a changé un peu sa manière de répartir ses revenus publicitaires. Ici, quand nous écoutons TVA — qui appartient ici à Radio Nord Communications inc., si je ne m'abuse —, il y a souvent en bloc des messages publicitaires locaux. Parfois, c'est le réseau qui prend le relais.
Comment les choses fonctionnent-elles, chez vous?
Sauf erreur, TVA, en vous octroyant 20 minutes par bulletin de nouvelles, vous permet de pénétrer davantage le marché local et d'augmenter le sentiment d'appartenance.
Est-ce que Radio-Canada est plus restrictif quant à l'ampleur de votre production originale?
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Rappelons-nous que les chaînes généralistes américaines se demandent actuellement si elles ne vont pas presser le bouton d'éjection de la distribution de leur signal au Canada, pour lequel elles ne reçoivent pas de redevances. C'est quand même incroyable.
J'aimerais poser une question à Mme Smith et à Mme Hoar, du magazine en ligne The Tyee de Vancouver.
Tout d'abord, j'aimerais vous dire, madame Smith, que j'ai beaucoup aimé votre allocution. Je crois que nous devons constamment nous faire à l'idée que le système que nous avions, et qui fonctionnait, ne fonctionne plus ou qu'il fonctionne moins bien, et qu'il est certainement très en danger. Il ne faut pas non plus être alarmiste. Ça va bien, tout le monde gagne sa vie, mais c'est de plus en plus difficile.
Par contre, on vous a laissé tomber comme étudiante en vous disant que le métier de journaliste était plaisant. Il est bien entendu qu'une faculté de journalisme n'ira pas dire à tous ses étudiants qu'ils auront besoin de bien de la chance pour trouver un emploi. Évidemment, on ne leur dira pas cela, puisque ce serait trop décourageant, mais c'est quand même une réalité.
Vous avez mis en ligne la présentation que vous avez faite ce matin. L'un de vos abonnés a souligné que si vos écrits sont toujours liés au financement, s'ils s'adressent toujours à un groupe de gens qui veulent lire des articles portant sur certains sujets, il y a peut-être un risque que vos enquêtes portent toujours sur les sujets que demande cette clientèle.
J'en viens à ma question. Avez-vous été consultée par la ? Elle était à Vancouver hier, relativement à des questions de modernisation. Avez-vous été invitée à la consultation de la ministre Joly?
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Madame la présidente, chers membres du Comité, je suis heureux de pouvoir contribuer aujourd'hui à votre enquête sur des questions liées aux collectivités locales et à leurs besoins d'information.
Je veux vous faire part d'idées provenant de quatre décennies consacrées à l'étude de questions relatives à l'économie, à la concurrence et au pluralisme des médias ainsi qu'aux besoins d'information des collectivités. J'ai présenté un mémoire — je sais que vous l'avez —, mais je tiens à souligner quelques points et quelques idées avant de répondre aux questions sur lesquelles vous souhaitez vous concentrer.
Les défis associés à la production de nouvelles locales ne se trouvent pas qu'au Canada, mais leurs répercussions sur les administrations locales, provinciales et fédérale sont propres au Canada. De plus, la structure et l'économie des nouvelles locales au Canada présentent des défis particuliers auxquels vous devrez faire face si vous voulez essayer d'améliorer la situation actuelle.
Au Canada, la production de nouvelles locales repose sur des journaux locaux, des quotidiens et des journaux communautaires. De toute évidence, certains services offerts par la SRC offrent également un soutien. Malheureusement, une réduction des ressources et une concentration de la propriété les ont rendus moins efficaces pour répondre aux besoins de nouvelles communautaires et d'information locales, ce qui a mené à la création d'un contenu homogène provenant de l'ensemble du pays.
Le coût de la production et de la distribution de nouvelles traditionnelles fait en sorte qu'il est très difficile pour de nombreux médias de survivre en préservant la structure qu'ils avaient auparavant. Bien entendu, à cela s'ajoutent les progrès réalisés dans le domaine des technologies numériques et, surtout, les changements de comportement des auditoires qui rendent très difficile la diffusion de nouvelles au moyen de la méthode traditionnelle. Les médias numériques augmentent grandement la capacité de répondre aux besoins d'information locale compte tenu de leurs avantages financiers considérables qui s'expliquent par leurs moindres coûts de production et de distribution.
Les membres du Comité devraient songer à la façon dont ils peuvent exploiter les possibilités offertes, et il faudrait que ce soit un élément important de tout effort visant à combler les lacunes dans la production de nouvelles locales.
Comme je l'ai indiqué dans mon mémoire, il faudrait déployer des efforts visant précisément à soutenir les entreprises en démarrage et les jeunes entreprises du domaine des technologies numériques, car elles seront de plus en plus importantes dans les années à venir.
Les mesures visant à soutenir les fournisseurs de nouvelles existants ne régleront toutefois pas le problème. À long terme, elles échoueront parce que les difficultés auxquelles ils font face ne concernent pas seulement leurs revenus. Ils sont désavantagés par leurs structures de coûts, ce qui est aggravé par la façon dont le public reçoit et échange maintenant l'information et les nouvelles locales.
Cela dit, certaines mesures à court et à moyen terme pour appuyer les fournisseurs existants pourraient convenir, notamment des efforts visant à favoriser le passage des entreprises au numérique ainsi qu'à soutenir à l'échelle locale des fonctions journalistiques précises qui ne sont pas bien assumées de nos jours. Toutes les mesures visant à soutenir les médias traditionnels devraient toutefois être conçues de manière à entraîner des changements dans la façon dont ces fournisseurs mènent leurs activités ou dans leurs structures de coûts, plutôt que de se contenter de remplacer des ressources perdues. À défaut de quoi, ces mesures n'amélioreront pas à long terme les conditions dans le milieu des nouvelles locales.
Les radiodiffuseurs doivent également faire partie de la solution, ce qui serait possible au moyen d'exigences accrues en matière de production de nouvelles locales ainsi que d'incitatifs et de mesures de soutien ayant pour but d'améliorer la production de nouvelles et d'information locales. Ces mesures ne devraient pas viser uniquement la radio communautaire ou la radio publique, mais aussi la radio commerciale.
Les lois fiscales et les lois régissant les organismes de bienfaisance doivent également être prises en considération au Canada, surtout pour soutenir la croissance de fournisseurs de nouvelles locales à but non lucratif, qui sont de plus en plus importants dans beaucoup de pays. À l'heure actuelle, les dispositions du Canada pour appuyer le journalisme à but non lucratif comptent parmi les moins favorables du Commonwealth et du monde anglophone. Une attention particulière devrait être accordée aux possibilités existantes.
Il n'existe aucune solution simple aux problèmes auxquels vous faites face, car nous vivons dans une ère de transformation de la façon dont l'information est créée et diffusée. La solution devra comporter plusieurs volets et régler les problèmes associés à la production de nouvelles et d'information, et elle devra être caractérisée par le genre de sagesse et d'efforts que vous seuls pouvez lui donner.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Je vous remercie, monsieur Picard, de votre exposé succinct, mais également du mémoire que vous avez remis à l'avance au Comité.
Je crois qu'il convient de noter, pour le compte rendu, que nous venons tout juste d'entendre les représentantes de Tyee, qui ont témoigné depuis la Colombie-Britannique. Leur exposé figure déjà en manchette de leur site Web, thetyee.ca. Elles ont immédiatement donné suite aux événements en cours. Je pense que cela en dit plutôt long.
Vous avez étudié en Scandinavie et en France, non seulement à Paris, mais plus précisément dans les régions. Il est bien que vous vous joignez à nous. Dans votre exposé, vous parlez directement de la situation du Canada. J'ai toujours hâte de commencer à parler de solutions, car je crois que d'autres personnes ont assez bien décrit les problèmes. Il semble que vous pourriez très bien en parler.
À propos des autres administrations, pourriez-vous nous parler de certaines des solutions les plus intéressantes et, surtout, les plus efficaces qui ont été prises par des gouvernements étatiques, régionaux ou nationaux pour soutenir les nouvelles locales?
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Je dirais qu'il y a différentes options en ce qui concerne les fonds de démarrage. Il faudrait notamment offrir de la formation dans les entreprises en démarrage, précisément pour les gens qui vont oeuvrer dans le domaine du journalisme local.
On pourrait aussi mettre en place des mécanismes, offrir des technologies déjà disponibles sur le marché, que les entreprises pourraient utiliser à l'échelon local. On pourrait alors octroyer une subvention ou du financement à quiconque n'importe où au Canada, par exemple, et peut-être même à l'étranger.
Si on opte pour le capital de risque en ce qui concerne les entreprises en démarrage, la situation est très différente, car les subventions entrent en jeu. Il faut traiter avec des organismes subventionnaires. On peut y arriver, et ce, d'une manière qui n'est pas discriminatoire. Souvent, il faut obtenir du financement par l'entremise d'un organisme dont le conseil est entièrement non partisan. C'est quelque chose qui s'est déjà fait et qui a bien fonctionné. C'est possible.
On peut aussi le faire en faisant appel à des organisations au sein de la communauté, par exemple, en demandant à l'université ou au collège local, ou même à certaines écoles secondaires, de mettre sur pied un site de nouvelles locales, en précisant qu'on leur versera des fonds pour l'achat du logiciel nécessaire, l'achat du site et pour tout ce qu'il faut.
Il y a plusieurs façons de s'y prendre, mais il ne faut pas nécessairement beaucoup d'argent pour démarrer une entreprise locale dans le domaine du numérique, car au départ on commence avec seulement deux à cinq employés et des gens qui travaillent à temps partiel ou qui apportent une contribution.
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Nous entrons dans une époque où les sources d'information sont très différentes de ce qu'elles étaient. Auparavant, nous nous rendions au travail le matin puis nous revenions à la maison à la fin de la journée pour lire le journal, toutes les 34 ou les 56 pages qu'il contenait. C'est ce que je fais encore tous les matins; ma femme et moi s'arrachons les journaux. Dans la plupart des communautés, c'est ce que fait le quart de la population, et le reste écoute les bulletins d'information télévisés, mais l'époque où les gens s'assoient pour regarder le journal télévisé d'une demi-heure tire à sa fin.
Maintenant, nous recevons des nouvelles à la pièce par l'entremise des médias sociaux et des alertes sur nos téléphones. Les informations sont affichées dans l'autobus, sur les murs des édifices. Si quelque chose nous intéresse, nous y avons accès. Si un ami nous informe qu'une nouvelle locale devrait nous intéresser, nous y avons accès grâce à nos médias sociaux.
Au bout du compte, ce changement a une incidence sur la façon dont les nouvelles doivent être diffusées et dont les services d'information doivent être financés. Le problème est que quelqu'un doit créer la nouvelle au départ. C'est là où toute cette transformation crée un goulot d'étranglement, car il faut déterminer qui créera la nouvelle. En ce qui concerne les nouvelles nationales et internationales, cela ne pose pas problème parce qu'il y a suffisamment de sources qui s'en occupent. Le problème réside au niveau des nouvelles provinciales, et précisément locales. Les grandes villes peuvent se débrouiller seules, quoiqu'elles aimeraient obtenir du soutien, mais c'est dans les petites communautés que le soutien est vraiment nécessaire.
Comment s'y prendre? Actuellement, nous observons que, de plus en plus dans les petites communautés dans de nombreux pays, les services des nouvelles cherchent à obtenir diverses sources de financement pour la diffusion de l'information locale. Au cours des 25 à 50 dernières années, ils ont compté essentiellement sur les recettes publicitaires, qui, en Amérique du Nord, représentaient entre 75 % et 85 % des revenus. En Europe, c'était environ 60 %. Le reste provenait des ventes liées à la diffusion.
Nous revenons donc à l'époque où les services des nouvelles devaient disposer de diverses sources de financement. Certains organisent des activités, d'autres obtiennent des subventions, et d'autres encore se lancent dans des activités commerciales, comme offrir des services publicitaires et des services de diffusion en continu, pour essayer de multiplier leurs sources de revenu.
Cela ressemble grandement à ce que faisaient les journaux et les médias il y a une centaine d'années, lorsque l'imprimeur local imprimait tout, des bulletins paroissiaux aux livres. C'est ainsi qu'on finançait les journaux. C'est cette tendance qui se dessine en ce qui a trait au financement des services des nouvelles locales. C'est une tendance lourde à mon avis, à savoir trouver diverses sources de revenu. Je crois que nous observerons cela de plus en plus.
En ce qui concerne les organisations sans but lucratif, je dirais que oui, c'est un des mécanismes. Ce n'est pas le seul mécanisme, mais c'en est un qui peut fonctionner et qui peut s'ajouter aux autres. Il contribue à créer des sources d'information secondaires, de sorte que les collectivités locales ne dépendent pas d'une seule source. Nous savons que, lorsqu'il existe plus d'une source d'information au sein d'une communauté, tous les services des nouvelles dans cette collectivité s'améliorent et affectent davantage de ressources à l'information locale, car c'est ce qu'ils doivent faire. Cela signifie que l'éditeur doit remettre l'achat d'une nouvelle Cadillac à plus tard et embaucher plutôt un autre journaliste. Dans les communautés où la concurrence existe, c'est ce qu'on observe souvent.
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Vous n'êtes certainement pas le seul à vous interroger au sujet du problème de la culture.
Il existe de nombreuses façons de régler ce problème. La concentration n'est pas nécessaire pour favoriser la promotion de la culture et des nouvelles nationales, mais c'est une façon de le faire, et ça fonctionne. Le problème, c'est qu'il y a de nombreux désavantages, parce qu'après un certain temps, si la concentration est forte, on cesse d'investir de façon importante.
Un des problèmes est que le Canada a toujours eu peur de la culture et des médias américains, pour de bonnes raisons, et qu'au Québec, on a peur de tout ce qui est anglophone, encore une fois pour de bonnes raisons, et cela a favorisé la concentration, et nous nous sommes dit qu'au moins nous tenions les autres à l'écart. Le problème c'est qu'il aurait fallu instaurer des mécanismes pour faire en sorte d'inclure davantage d'entreprises canadiennes, plutôt que de se limiter à un petit nombre d'entreprises canadiennes. Le Canada a fait du très bon travail en ce qui concerne notamment la législation en matière de radiodiffusion. Il a très bien fait à ce chapitre.
Le Canada n'est pas le seul pays dans cette situation. En Irlande, la situation est passablement difficile parce que ce pays est touché par les deux côtés de l'Atlantique, à savoir le Royaume-Uni, ce que l'Irlande trouve dérangeant pour diverses raisons politiques, les États-Unis et dans une moindre mesure le Canada, alors il éprouve des difficultés à faire valoir la culture irlandaise. D'autres pays sont aux prises avec ce problème, notamment l'Autriche à cause de l'Allemagne, et il est important de s'y attaquer, mais la concentration n'est pas nécessaire.
De nombreuses politiques culturelles peuvent être utilisées et de nombreuses politiques propres aux médias peuvent aussi être utilisées pour faire en sorte qu'on diffuse suffisamment de productions culturelles au Canada.
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C'est ce qui se produit. L'automne dernier, je me trouvais dans un petit village en Angleterre, et j'ai demandé aux gens comment ils faisaient pour savoir ce qui se passait dans le village et comment ils communiquaient avec le maire lorsqu'ils avaient besoin de lui parler. Ils m'ont répondu qu'ils se rendaient au pub. C'est ainsi que les choses se passent.
Un des problèmes, c'est que nous pensons souvent qu'Internet n'est qu'un réseau auquel il faut être connecté grâce à des fils et à des services à large bande, mais en fait, Internet comme source d'information est devancé par les services Internet mobiles offerts grâce aux réseaux sans fil qui sont aujourd'hui de très bonne qualité. Même dans un grand nombre de très petites collectivités rurales, les services sans fil sont très acceptables. C'est une autre solution.
S'il existe un lieu où les gens se retrouvent normalement, notamment un centre commercial, un centre communautaire, etc., il s'agit d'un bon endroit pour obtenir de l'information, et il faut maintenir cela également.
Dans une démocratie, il faut s'assurer qu'il y a des endroits et des personnes qui veillent à ce que les divers enjeux dont il faut débattre au niveau de l'administration locale soient diffusés. Que se passe-t-il dans les écoles, dans les commissions et au service de gestion de l'eau? Ce sont toutes des choses importantes qu'il faut savoir à l'échelon local. Il est essentiel de savoir ce que font les conseils municipaux. Quelqu'un doit veiller à ce que l'information soit diffusée. Dans les plus grandes communautés, ce sont plutôt les médias commerciaux qui s'en chargent, mais dans les petites communautés, il faut trouver d'autres moyens de diffuser l'information.