Madame la présidente, je vous remercie de cette occasion de présenter les résultats de nos audits sur la création et le déploiement du système de paie Phénix et sur les problèmes liés à ce système. Le directeur principal responsable de ces deux audits, Jean Goulet, m'accompagne.
En 2009, Services publics et Approvisionnement Canada a lancé son initiative de transformation de l'administration de la paie pour changer sa façon de traiter la paie de ses 290 000 employés. Deux projets ont été entrepris: l'un visait à centraliser les services de paie pour 46 ministères et organismes qui employaient 70 % des employés fédéraux, et l'autre visait à remplacer le système de paie datant de 40 ans qui était utilisé par 101 ministères et organismes.
[Français]
Lors de nos audits, nous avons examiné comment Services publics et Approvisionnement Canada avait développé et mis en place le système de paie Phénix et comment le ministère avait géré les problèmes causés par le déploiement de Phénix.
Lors de notre audit sur la création et le déploiement de Phénix, nous avons vérifié si la décision de lancer le nouveau système de paie avait tenu compte de certaines considérations, notamment si le système était entièrement mis à l'essai, fonctionnel, sécuritaire et à même de protéger les renseignements personnels des employés.
Nous avons conclu que le projet Phénix était un échec incompréhensible de gestion et de surveillance de projet, qui avait abouti à la décision de déployer un système qui n'était pas prêt.
Afin de respecter les budgets et les échéances, Services publics et Approvisionnement Canada a décidé de supprimer des fonctions de paie essentielles, de limiter les tests du système et d'annuler un projet pilote de mise en place du système.
[Traduction]
Les cadres responsables de Phénix n'ont pas tenu compte des signes évidents indiquant que le centre de paie de Miramichi n'était pas prêt à s'occuper du volume de transactions liées à la paie, que les ministères et organismes n'étaient pas prêts à migrer vers le nouveau système et que le système Phénix lui-même n'était pas prêt et ne permettrait pas de payer adéquatement les employés fédéraux. Quand ces cadres ont informé le sous-ministre de Services publics et Approvisionnement Canada du fait que Phénix était prêt pour le lancement, ils n'ont pas mentionné les problèmes importants dont ils étaient au courant. Enfin, la décision de déployer le système n'a pas été documentée.
Dans le cadre de notre audit des problèmes de paie liés à Phénix, nous avons vérifié si Services publics et Approvisionnement Canada avait collaboré avec les ministères et organismes retenus afin de régler ces problèmes, de sorte que les employés du gouvernement reçoivent la bonne paie en temps voulu. Après le déploiement de Phénix, en février 2016, il est arrivé souvent que le gouvernement fédéral ne puisse pas payer ses fonctionnaires au bon montant ou en temps voulu. Nous avons constaté que les problèmes de paie avaient continué d'empirer tout au long de la période visée par notre audit.
Un an et demi après que le gouvernement a lancé le système de paie Phénix, le nombre de fonctionnaires en attente du traitement d'une demande d'intervention de paie était passé à plus de 150 000 au sein des 46 ministères et organismes dont le service de paie avait été centralisé. Ces 150 000 employés attendaient qu'environ 500 000 demandes d'interventions de paie soient traitées. Ce chiffre ne comprenait pas les demandes en attente dans les 55 ministères et organismes dont le service de paie n'avait pas été centralisé, ni les demandes en attente liées aux conventions collectives signées avec les syndicats de la fonction publique fédérale à l'automne 2017.
[Français]
Les problèmes ont tellement augmenté qu'à la fin de juin 2017, la valeur des erreurs non corrigées dans la paie des fonctionnaires dépassait un demi milliard de dollars. Ce montant englobait les sommes dues à des fonctionnaires qui avaient été sous-payés et les sommes dues à l'État par des fonctionnaires qui avaient été trop payés.
Les ministères et les organismes ont connu des problèmes dès le lancement de Phénix. Cependant, il a fallu quatre mois à Services publics et Approvisionnement Canada pour admettre la gravité des problèmes de traitement de la paie.
Nous avons conclu que Services publics et Approvisionnement Canada n'avait pas cerné ni réglé les problèmes de paie de manière durable pour garantir que les fonctionnaires fédéraux reçoivent le bon montant de paie au bon moment. De fait, selon le ministère, le nombre des demandes d'intervention de paie a continué d'augmenter après la date de conclusion de notre audit.
À mon avis, trois facteurs communs ont miné la mise en place à la fois du projet Phénix et des mesures d'urgence du ministère pour régler les problèmes de paie après le lancement du système:
Il y a eu un manque de surveillance ou de gouvernance en vue de guider les activités de gestion, un manque d'engagement auprès de les ministères touchés et une sous-estimation de la gravité des problèmes.
[Traduction]
Avant de conclure, je veux mentionner qu'en plus des deux audits que j'ai mentionnés, le rapport du vérificateur général du printemps 2018 comprenait un message de ma part précisant que je croyais que la culture du gouvernement fédéral avait permis à Phénix de devenir un échec incompréhensible, et je crois que le Comité devrait se demander comment cette culture a contribué à cet échec.
Madame la présidente, voilà qui conclut ma déclaration préliminaire. Nous serons heureux de répondre à toutes les questions que le Comité pourrait nous poser.
Merci.
:
Merci, madame la présidente.
Mon sous-ministre délégué, Les Linklater, m'accompagne. Nous sommes reconnaissants d'avoir la possibilité de comparaître devant vous afin de discuter des études du vérificateur général portant sur Phénix. Services publics et Approvisionnement Canada accepte les recommandations du vérificateur général et a pris des mesures afin d'y donner suite.
Je veux commencer par reconnaître que ce problème touche essentiellement les gens. Cette situation a mis de nombreux fonctionnaires à rude épreuve, et j'en suis profondément désolée. Je sais que nous l'avons déjà dit, mais nous sommes sincèrement désolés.
Ce problème touche également les personnes qui triment dur pour remettre en état le système de paie. Je peux vous assurer que nous disposons d'équipes extraordinairement dévouées qui travaillent d'arrache-pied dans le but de régler les problèmes de paie de leurs collègues. Il ne fait aucun doute que cette situation a été très lourde de conséquences pour un trop grand nombre d'employés.
[Français]
Le rapport du printemps du vérificateur général porte sur la planification et le développement de Phénix entre avril 2008 et avril 2016. Cette période précède l'entrée en fonction des dirigeants principaux qui travaillent désormais à la rémunération de Services publics et Approvisionnement Canada. Même si les décideurs ont changé, il ne faut pas oublier les leçons tirées des actions passées.
Des lacunes majeures ont été relevées dans la planification et la mise en oeuvre de Phénix ainsi que dans l'initiative de transformation de l'administration de la paie dans son ensemble. Nous savons que la priorité a été accordée aux coûts et aux échéanciers. De mauvaises décisions ont été prises. Des éléments cruciaux du projet, notamment certaines fonctionnalités du système, la mise à l'essai, la gestion du changement et la formation, ont été annulés ou reportés. Ces décisions, combinées à la suppression de 700 postes en rémunération ainsi qu'à la perte connexe de capacités essentielles et d'expertise, ont donné lieu à une transformation pangouvernementale qui n'a évidemment pas produit les résultats escomptés. En outre, les utilisateurs n'étaient pas prêts à faire face à ce changement important.
Aux niveaux supérieurs de SPAC, et je dirais plutôt à l'échelle du gouvernement, la portée et les répercussions du projet ont été grandement sous-estimées. Le rapport de Goss Gilroy Inc. disait aussi que cette lacune fondamentale était une grande faiblesse du projet. À la date d'échéance de la mise en oeuvre, on croyait que le système était prêt à être lancé. De toute évidence, ce n'était pas le cas.
[Traduction]
Je ne pense pas que quiconque ait agi de mauvaise foi, mais les deux cadres supérieurs responsables du projet et relevant du sous-ministre n'ont pas évalué adéquatement la complexité de la tâche, l'effet cumulatif de leurs décisions ni la gravité des signes précurseurs.
Le rendement de ces cadres supérieurs a fait l'objet d'une évaluation, et les mesures qui s'imposaient ont été prises. Ils ne prennent plus part à l'administration de la paie et n'ont pas reçu de prime de rendement pour le travail qu'ils ont accompli relativement à Phénix durant l'exercice 2015-2016, quand le système a été parachevé et lancé.
Comme je l'ai mentionné, cette situation a causé un stress important à de nombreux employés. Naturellement, les gens veulent trouver un coupable. Ce qui est arrivé est inacceptable. Le vérificateur général a déclaré que les cadres supérieurs de SPAC ont commis d'importantes erreurs, mais il a également reconnu qu'il y avait eu des problèmes liés à la surveillance et à la gouvernance. Je crois que plusieurs éléments ont contribué à l'échec. Nous devons tirer des leçons de chacun d'eux.
Pour que des projets comme la transformation de la paie soient un succès, la responsabilisation doit être assortie de pouvoirs. Les responsables de Services publics et Approvisionnement Canada détenaient les pleins pouvoirs à l'égard de Phénix, mais pas des processus relatifs aux ressources humaines à l'échelle du gouvernement. Par exemple, nous aurions dû adopter une approche intégrée en matière de RH et de paie dès le départ.
Nous devons faire mieux. Nous devons offrir à nos employés les outils et l'environnement dont ils ont besoin pour réussir.
Madame la présidente, nous ne pouvons pas réécrire l'histoire, mais nous pouvons la mettre à profit. Le rapport du vérificateur général donne de précieux conseils qui nous aident à aller de l'avant.
[Français]
Passons maintenant aux recommandations spécifiques formulées par le vérificateur général dans son rapport du printemps, lequel porte principalement sur la planification future des projets de TI. Services publics et Approvisionnement Canada gère depuis longtemps, pour le compte des clients, de nombreux grands projets complexes comportant plusieurs volets, par exemple la modernisation des services et des systèmes de pensions ainsi que la vision et le plan à long terme pour la Cité parlementaire. Nous gérons présentement plus de 430 projets représentant un budget de plus de 13 milliards de dollars.
SPAC dispose d'un processus rigoureux et efficaces pour gérer les projets de grande envergure. Notre expérience avec Phénix a fait ressortir la nécessité d'adopter une approche améliorée pour la gestion des projets complexes de TI dont la portée est pangouvernementale.
Afin de combler cette lacune, nous allons développer un outil qui permettra de déterminer si un projet en particulier, sous notre responsabilité, devrait être géré au moyen de pratiques et de processus de gestion de projets ministériels ou d'une approche améliorée de gestion de projet de TI pangouvernementale.
Nous développerons aussi un guide amélioré de gestion de projet détaillant la façon dont les projets de TI pangouvernementaux doivent être gérés et indiquant clairement ce qui doit être fait et par qui. Il traitera notamment des principes, des rôles et des responsabilités en matière de gouvernance, de surveillance et de gestion de projet ainsi que de la fonction de vérification.
[Traduction]
Ces mesures nous permettront de donner suite aux recommandations du vérificateur général, en nous assurant de disposer d'une gouvernance et d'une surveillance rigoureuses pour l'ensemble des projets de TI pangouvernementaux dont nous sommes responsables. Cette approche garantira également que les projets de TI menés à l'échelle de l'organisation comprendront un plan de mobilisation des intervenants visant à assurer une collaboration active avec les ministères et organismes. Cette mobilisation nous permettra de mieux définir les exigences relatives au système et, surtout, de valider son rendement. Ces projets de TI comprendront également un plan officiel de mise à niveau des logiciels et un plan d'urgence complet.
Enfin, SPAC veillera à ce que les audits internes fournissent à la sous-ministre l'assurance appropriée concernant la gouvernance, la surveillance et la gestion des projets.
Madame la présidente, nous sommes en train de travailler à l'élaboration et à l'officialisation du processus d'établissement de points de contrôle et du guide, mais je veux préciser aux députés que nous sommes déjà en train d'appliquer les leçons tirées de Phénix au sein de SPAC. Pour l'instant, notre priorité demeure l'aide aux employés faisant face à des problèmes liés à la paie.
En novembre, nous avons annoncé une série de mesures visant à stabiliser le système de paie et à réduire les temps d'attente et les transactions tardives dans le cas des paies manquantes. Ces activités étaient fondées sur les conclusions du rapport de Goss Gilroy et correspondaient aux recommandations formulées à l'automne par le vérificateur général. La surveillance a été renforcée. Les ministères et organismes peuvent maintenant surveiller la qualité de leurs données et prendre des mesures à cet égard. La consignation dans Phénix de renseignements opportuns et exacts sur les RH a une incidence majeure sur la rapidité et sur l'exactitude de la paie.
En mai, la a visité le centre de paie de la fonction publique situé à Miramichi et a annoncé la mise en œuvre étendue d'une nouvelle approche par groupe de paie, une idée qui provient du personnel. Les groupes de paie sont des équipes composées de spécialistes de la paie qui sont affectées au service exclusif d'un ministère ou d'un organisme en particulier. Un projet pilote de la nouvelle approche a permis de réduire l'arriéré de cas des trois ministères pilotes de 30 % en général, et leur arriéré de plus de 30 jours a diminué de 41 %.
Nous sommes très optimistes au sujet de l'incidence positive de l'approche par groupe de paie, et nous avons hâte de constater ses effets, à mesure qu'elle sera mise en oeuvre dans un plus grand nombre de ministères au cours de la prochaine année.
[Français]
Enfin, nous avons accru la capacité et amélioré le service aux employés.
Comme je l'ai mentionné, une lacune majeure a été créée lors de la suppression de plus de 700 postes en rémunération, en 2014. Phénix a donc dû être mis en oeuvre avec seulement 550 employés de la rémunération. Nous avons depuis presque triplé le nombre d'employés.
Conscients de la nécessité d'améliorer le soutien offert aux employés, nous avons aussi accru notre effectif au Centre de contact avec la clientèle et ils ont maintenant un accès direct à Phénix ainsi qu'aux autres systèmes. Les employés peuvent ainsi obtenir des renseignements détaillés sur leur dossier de paie en s'adressant directement aux fonctionnaires du Centre.
Nous poursuivons les améliorations, et nous commençons à constater des progrès lents, mais constants.
Notre plus récent tableau de bord indique que notre arriéré a baissé de 25 000 mouvements par rapport au mois dernier et, avec des fluctuations mineures, il diminue graduellement depuis janvier 2018. Grâce à l'élargissement des groupes de paie, nous nous attendons à ce que cette diminution des mouvements en retard soit plus rapide.
[Traduction]
Madame la présidente, les problèmes continus qui touchent la paie dans la fonction publique sont tout à fait inacceptables, et la plus grande priorité de notre ministère consiste encore à les régler. Nous travaillons sans relâche à nous assurer que les fonctionnaires touchent le bon salaire en temps voulu.
Des lacunes majeures ont été relevées dans la planification et la mise en œuvre de la transformation de la paie. Il est clair que de multiples éléments ont contribué à l'échec. Notre responsabilité consistera dorénavant à nous assurer que nous tirons des leçons de toutes les erreurs commises, de sorte que chose pareille ne se reproduise plus jamais.
Nous avons hâte de répondre à vos questions.
:
Merci infiniment de l'invitation à comparaître devant votre comité et à vous aider à accomplir votre tâche importante consistant à examiner le rapport du vérificateur général sur la conception et la mise en œuvre de Phénix.
Sandra Hassan, sous-ministre adjointe du Secteur de la rémunération et des relations de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor, m'accompagne aujourd'hui.
[Français]
En tant que secrétaire du Conseil du Trésor, j'appuie le Conseil dans son rôle d'employeur de l'administration publique centrale.
À ce titre, je tiens d'abord à dire que le gouvernement prend très au sérieux sa responsabilité de payer ses employés avec exactitude et, bien sûr, rapidement.
[Traduction]
Il ne fait aucun doute que les problèmes de paie qui touchent actuellement les employés et leur famille sont inacceptables, et nous en sommes profondément désolés. Je me fais l'écho des sentiments exprimés par Mme Lemay. Nous prenons des mesures non seulement pour régler ces problèmes, mais, bien sûr, aussi pour soutenir les employés qui ont été touchés.
Le gouvernement a mis en place plusieurs mesures à l'intention des employés touchés. Bien entendu, ces mesures consistent notamment à s'assurer que des avances sont versées de façon prioritaire, à faire preuve de souplesse en ce qui a trait au recouvrement des trop-payés, et à établir des processus de réclamation efficaces pour indemniser les employés pour les dépenses qu'ils ont engagées ou les pertes financières qu'ils ont subies relativement à Phénix.
Parallèlement à ces efforts de soutien, d'énormes pressions sont actuellement exercées, sous la direction de Services publics et Approvisionnement Canada, dans le but de stabiliser le système de paie. En même temps — et cela concerne bien sûr les thèmes clés soulevés par le vérificateur général la semaine dernière —, nous sommes également déterminés à atténuer les risques associés à Phénix et à nous assurer que nous ne serons plus jamais confrontés à l'échec d'un projet de cette envergure.
L'an dernier, le Secrétariat du Conseil du Trésor a mandaté Goss Gilroy pour examiner certaines des questions mêmes qui ont été soulevées par le vérificateur général. Nous considérons les recommandations formulées dans ce rapport ainsi que celles du vérificateur général comme des consignes de base. Dans sa réponse du mois d'octobre 2017 adressée à Goss Gilroy, le gouvernement a affirmé qu'il est déterminé à renforcer les capacités dans des domaines clés, comme la gestion des projets, de l'information et de la technologie, à revoir son approche et ses politiques en matière de gestion de projet et d'approvisionnement et, bien entendu, à exceller dans la prestation de services au profit des Canadiens.
Concernant la transformation de la paie plus précisément, le gouvernement a déjà mis en place une nouvelle gouvernance interministérielle, au sein de la haute direction de la fonction publique et par l'intermédiaire du groupe de travail ministériel.
Je vais maintenant aborder la recommandation adressée par le vérificateur général au Conseil du Trésor dans son dernier rapport.
[Français]
On y spécifie que, pour tous les projets en technologies de l'information, nous devrions procéder à des examens indépendants des décisions clés du projet selon lesquelles le projet peut aller de l'avant ou non, et communiquer aux sous-ministres et aux cadres supérieurs les conclusions de ces examens.
[Traduction]
Nous approuvons sans réserve cette recommandation d'une importance cruciale. Nous effectuerons des examens indépendants des projets de portée gouvernementale afin de déterminer les mesures correctives à prendre, et nous les communiquerons, ainsi que les conclusions. Entre temps, bien entendu, nous renforçons nos politiques et améliorons la gouvernance en modifiant le rôle du dirigeant principal de l'information afin de mieux nous assurer que les initiatives pangouvernementales de TI sont bien planifiées et exécutées. Je me fais l'écho des sentiments exprimés par ma collègue il y a quelques instants.
Je vais maintenant aborder le budget de 2018 et Phénix.
Dans le budget de 2018, le gouvernement a pris un certain nombre d'engagements pour ce qui est de relever les défis actuels liés au système de paie Phénix. L'un de ces engagements qui touchent directement le Secrétariat du Conseil du Trésor, c'est le versement d'une somme de 16 millions de dollars afin que des experts du secrétariat ainsi que nos collègues des syndicats du secteur public et des fournisseurs de technologie nous mènent sur la voie à suivre pour l'adoption d'un nouveau système de paie.
En examinant toutes les options, nous prêterons une attention constante à l'utilisateur et au système qui lie les mesures de RH aux transactions de paie. Ce changement n'aura pas lieu du jour au lendemain, et cela ne devrait pas être le cas, compte tenu des leçons que nous avons tirées de Phénix. Nous appliquerons avec diligence ces leçons et veillerons à ce que tous les projets aillent de l'avant de façon constructive, rapide et réfléchie.
En conclusion, laissez-moi répéter que mon ministère, de même que la haute direction de l'ensemble de la fonction publique, est pleinement mobilisé à l'égard de ce dossier.
Merci. Nous avons hâte de répondre à vos questions.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins.
Avant que je commence à poser mes questions, je voudrais déposer le document suivant, dans les deux langues officielles. Il a été obtenu dans le cadre du projet d'accès à l'information. Je voudrais le remettre au greffier afin qu'il le distribue à tous les députés. Ce document est lié à la séance d'information qui a été présentée à la ministre le 18 février relativement à la situation de la mise en œuvre de Phénix.
À l'intention des témoins: merci beaucoup de votre témoignage. Une importante transformation organisationnelle dépendant de la technologie, comme la mise en œuvre de Phénix, est habituellement effectuée selon une approche très structurée, lorsqu'elle est dirigée par l'une des cinq grandes organisations de mise en œuvre. Un certain nombre de discussions ont été tenues concernant les problèmes, comme la surveillance et la culture, mais je veux vraiment me concentrer sur les activités qui ont lieu avant ce qu'on appelle « déploiement » dans le jargon des grandes transformations organisationnelles.
En guise de contexte et à des fins de transparence, j'ai été conseiller en gestion pendant 25 ans. J'ai mis en œuvre beaucoup de grandes transformations organisationnelles dépendant de la technologie, alors je connais très bien le processus qui a été suivi dans le cas de Phénix.
En ce qui concerne les décisions d'aller de l'avant ou non, habituellement, on procède à un appel, ou bien on prend ces décisions selon une séquence. Durant ce processus, on examine divers aspects des évaluations de l'état de préparation du projet, comme la gestion de projet, la capacité de procéder au déploiement ainsi que la transition et la stabilisation.
Les politiques touchant notamment, la sécurité, l'accès à l'information, les processus — le fait qu'ils sont remaniés ou non —, les technologies, telles que le bon fonctionnement de toutes les composantes du système, les gens, la formation et le fait que la restructuration de l'organisation a été effectuée ou non... Il y a deux autres éléments dont je n'ai pas beaucoup entendu parler. L'un est la mise en œuvre d'une stratégie de déploiement, et l'autre est le plan d'urgence.
En ce qui concerne la mise en œuvre d'une stratégie de déploiement, habituellement, nous adoptons soit une approche par étapes, ou bien ce qu'on appelle une approche « de choc ».
Dans le cadre d'une approche par étapes, le projet pilote est lancé pour un ministère particulier, et on s'assure ainsi que toutes les composantes fonctionnent. D'après votre témoignage, on dirait que l'étape du projet pilote a été sautée, ou bien qu'il a été décidé de ne pas procéder à cette étape. Par conséquent, en guise de stratégie de mise en œuvre, on a décidé que toutes les fonctionnalités, tous les aspects... ou bien qu'une approche dite « de choc » serait adoptée.
Lorsqu'une organisation choisit de recourir à une stratégie de choc ou à une stratégie de mise en œuvre, l'énorme risque qu'elle court en ce qui concerne le déploiement du système tient à la possibilité que quelque chose tourne mal. Ainsi, la notion d'un plan d'urgence, qui prévoit essentiellement la façon de revenir en arrière et qui énonce une stratégie de rétablissement au cas où quelque chose tournerait mal, a un énorme rôle à jouer à cet égard.
Durant l'examen de l'évaluation de l'état de préparation qui a été effectué, a-t-il au moins une fois été question d'une stratégie de rétablissement ou d'un plan d'urgence? Le cas échéant, de quoi s'agissait-il?
Je présente cette motion dans le but de tenter d'obtenir plus de temps pour l'étude du budget des dépenses. Je respecte nos témoins ici présents, et je ne veux pas utiliser tout le temps dont nous disposons pour leur poser des questions sur un enjeu important, mais le fait est que ce budget des dépenses ne ressemble à aucun autre. Le nouveau crédit central au titre du Conseil du Trésor modifie de façon très sérieuse et importante la nature de la surveillance parlementaire des dépenses gouvernementales. Il s'agit d'une cause que je tente de plaider sur un grand nombre de tribunes. J'ai décidé de la plaider devant le Comité, mais nous avons également tenté de formuler cet argument à la Chambre.
Au moment où nous l'avons fait, le Président nous a dit que le bon endroit pour aborder le budget des dépenses, c'est en comité, et nous avons entendu certains témoins. Deux ou trois motions ont été présentées sous diverses formes et à diverses étapes de l'étude dans le but d'appeler d'autres ministres à comparaître dans le Comité afin qu'il en entende davantage au sujet des initiatives proposées au titre du crédit 40. Ma motion à ce sujet a été rejetée. D'autres motions ont été adoptées, mais nous n'avons pas eu le temps d'étudier adéquatement le budget non plus, même si nous avons proposé plus de 200 modifications à apporter au crédit 40 seulement.
Si nous devons nous faire dire par le Président de la Chambre que nous devons régler ces questions concernant le budget des dépenses en comité, je pense qu'il nous incombe de prévoir du temps à cette fin. Je voudrais vraiment voir cela arriver, mais je n'ai tout simplement pas été en mesure de faire en sorte que cela se produise, jusqu'ici.
En ce qui concerne la question générale de la surveillance que cette situation soulève, selon moi, compte tenu du crédit 40 du Conseil du Trésor, je pense qu'il est intéressant que cette motion soit présentée à l'occasion de notre dernière séance avant que le budget des dépenses ne soit considéré comme ayant fait l'objet d'un rapport et que nous discutons de Phénix à cette occasion, car l'échec de Phénix est en réalité directement lié à la responsabilité. Il concerne des gens qui avaient pour tâche de poser les bonnes questions au bon moment, et qui ne les ont pas posées ou ne disposaient pas des renseignements dont ils avaient besoin pour être en mesure de le faire.
J'affirme au Comité que quelque chose de semblable est en train de se passer. Le Comité n'a pas entendu le témoignage des personnes qu'il doit entendre afin de pouvoir poser les bonnes questions au sujet des dépenses proposées dans le crédit 40, et, si nous ne prenons pas le temps nécessaire pour nous occuper du budget des dépenses, nous ne poserons pas ces questions.
Je pense que ce serait malheureux. La semaine dernière, nous avons tenu une séance, à laquelle nous avons mis fin 40 minutes à l'avance, après avoir décidé deux fois de ne pas nous occuper du budget des dépenses. Il s'agissait d'une séance prévue à l'horaire. Je pense qu'habituellement, tout le monde réserve le temps normalement consacré au Comité dans le but d'être là. La salle était accessible. Les interprètes étaient là. Nous disposions de tout ce dont nous avions besoin pour pouvoir nous occuper du budget des dépenses à ce moment-là, mais nous avons décidé de ne pas le faire et de ne pas profiter de ces 40 minutes.
Voilà pourquoi je suis dans la position malheureuse d'avoir à utiliser une partie de la période prévue pour l'étude de Phénix aujourd'hui dans le but qu'on prévoie plus de temps pour ce qui, selon moi, est une affaire très appropriée pour le Comité. Je ne prendrai pas plus de temps, mais voilà les raisons pour lesquelles, selon moi, nous devons adopter cette motion.
:
Certainement. Merci de poser la question.
Nous travaillons en étroite collaboration avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et avec les ministères et les organismes à l'échelle du gouvernement pour assurer un suivi à l'égard des recommandations formulées dans le rapport de l'automne. Nous nous penchons sur les principales causes fondamentales. Nous avons mis sur pied un groupe l'été dernier, qui comptait des représentants du gouvernement ainsi que d'IBM et d'autres, pour analyser en profondeur les racines du problème, qu'elles soient liées à la technologie, à la formation ou à la gestion du changement.
Nous déployons maintenant un ensemble de mesures, dont la a fait l'annonce en novembre dernier, pour permettre à la communauté interministérielle de se pencher sur une première série de priorités clés avec les dirigeants de mon équipe. Nous avons apporté des améliorations à la gouvernance, comme il avait été recommandé. Nous avons un comité interministériel en place, le comité de surveillance des sous-ministres dont je relève, qui est présidé par le sous-greffier. Nous disposons de structures à l'échelon du SMA et du DG qui reproduisent cela, afin que nous puissions systématiquement nous pencher sur tout enjeu aura une incidence sur le traitement de la file d'attente et sur l'atteinte de résultats améliorés en matière de rémunération aux fonctionnaires.
Nous avons également examiné les enjeux liés au renforcement des capacités auxquels Mme Lemay a fait allusion. Nous avons, en effet, presque triplé l'effectif à l'échelle du pays, à Miramichi et dans les bureaux satellites, pour pouvoir véritablement traiter les demandes d'intervention de paye en attente et favoriser la transition vers notre modèle de traitement confié aux équipes mixtes de paye, dans le cadre duquel, nous allons maintenant examiner les dossiers complets des employés plutôt que les transactions à la pièce. Une fois que les dossiers seront en ordre et que nous serons à jour, il ne devrait plus y avoir d'autres problèmes d'arriérés.
Nous nous sommes également penchés sur un certain nombre d'enjeux concernant la stratégie d'intervention qui a été annoncée dans le budget de 2018 sous la direction du Conseil du Trésor. Les travaux sont en cours.
Nous traitons également les problèmes techniques qui continuent de survenir, en examinant essentiellement les demandes de changement à l'égard du système qui ont le plus de répercussions sur les améliorations du système et les questions liées à l'interface entre les 32 systèmes de ressources humaines et Phénix. Nous voulons ainsi nous assurer que, dans la mesure du possible, nous obtenons un meilleur alignement des données et que nous fournissons aux ministères et aux organismes de nouveaux outils assurant l'exactitude et le caractère opportun des données pour leur permettre d'examiner leurs propres processus internes — comme Mme Lemay le disait —, des employés aux ressources humaines, avant que les ressources humaines envoient les données au centre de paye à Miramichi.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins de leur présence.
Monsieur Ferguson, votre rapport est très clair. Nous l'attendions depuis longtemps, particulièrement en ce qui concerne Phénix et la façon dont il a été implanté. Vous avez parlé de culture, et de mon côté, j'aimerais parler de philosophie. Vous me direz si ces deux aspects peuvent avoir un lien.
Une de mes sources est le Commissariat à l'information du Canada, qui commentait les préparations de budgets autour de 2010 et de 2011. Le ministre des Finances de l'époque était M. Flaherty. Le mot d'ordre donné par le gouvernement était très clair: réduction, réduction, réduction et contrôle des budgets pour pouvoir, éventuellement, contrôler le déficit et revenir à un budget équilibré. On a appelé cela le Plan d'action pour la réduction du déficit du Commissariat à l'information du Canada. Cela remonte à l'époque où Phénix était en préparation. On avait supprimé 700 postes et tout était mis en oeuvre pour réduire les coûts de 5 à 10 % partout.
Dans votre rapport, au point 1.62, en guise de message général, vous dites ceci:
[...] l’absence de surveillance exercée à l’égard du projet Phénix, les cadres responsables de Phénix ont pu mettre en œuvre le nouveau système tout en sachant qu’il comportait de sérieuses failles. [...] Les cadres responsables de Phénix étaient plus préoccupés par les limites de temps et d'argent à respecter que par ce que le nouveau système devait accomplir.
C'est là que la philosophie et la culture se rejoignent. Je sens une culture de la peur transpirer du rapport. On ne voulait pas signaler d'erreur de peur de se faire pointer du doigt. On savait qu'on se dirigeait vers le mur, mais on a quand même avancé dans ce sens. On avait tellement peur qu'on ne l'a pas dit.
Maintenant, il y a des nouveaux fonctionnaires et un nouveau gouvernement, et ils se font pointer du doigt. Il y a aussi des employés en cause qui n'ont pas été nommés et qu'on ne voudra pas nommer. Honnêtement, cela ne servirait à rien de le faire. C'est sur le plan de la culture qu'il y a quelque chose à changer, et c'est ce qui est en train de se passer. Il faut adopter une nouvelle façon de fonctionner et réembaucher des personnes ressources. C'est ce qui est fait et c'est ce que Mme Lemay nous répète toujours. On essaie de réembaucher les bonnes personnes connaissant les bonnes pratiques et ayant de l'expérience.
Finalement, ce sont la culture de la peur et la philosophie consistant à ne pas faire de déficit à tout prix qui ont mené à cette situation. Les libéraux se font faire quotidiennement des reproches liés au déficit. Cela ne veut pas dire qu'il faut qu'il y ait des déficits, mais vient un moment où il faut faire des choix philosophiques et économiques.
Comment peut-on réconcilier cette culture d'atteinte des objectifs à tout prix et les pots cassés qu'on est encore en train de ramasser? Bien qu'on constate une amélioration, on n'en voit pas encore la fin.
:
Merci, madame la présidente.
Je crois que je suis le dernier intervenant, alors je vais remercier le ministère, honnêtement, de travailler dans une situation difficile en vue de réaliser des progrès et d'obtenir les résultats que nous escomptons afin de s'assurer que tous les fonctionnaires fédéraux soient payés rubis sur l'ongle. Alors félicitations pour tout ce que vous faites afin de nous aider à nous remettre d'une situation que nous considérons tous, j'en suis certain, très difficile. Ce problème est survenu pour une multitude de raisons, qui sont énumérées dans les rapports que nous avons lus et les témoignages que nous avons entendus au Comité. Il y a eu des économies forcées de 70 millions de dollars, la mise à pied de 800 fonctionnaires et le manque de surveillance dont fait état le plus récent rapport. Certains de ces comportements ont en réalité été considérés comme novateurs, ce qui est inapproprié à mon avis.
Maintenant, nous allons de l'avant et tentons de trouver une solution, ce qui est important, et je félicite tous ceux d'entre vous qui ont joué un rôle pour nous aider, comme fonctionnaires, à améliorer la situation et la vie des gens touchés. Nous avons tous de l'empathie et de la sympathie pour les employés qui se trouvent dans une situation précaire pour des raisons liées à leur paye, soit parce qu'ils ne sont pas payés à temps, soit parce qu'ils ont des impôts à payer, ce fait en sorte qu'ils ne peuvent pas acquitter leurs factures.
Au nom de tous ceux qui siègent au Comité, je pense qu'il est juste de vous remercier des efforts que vous déployez. Il reste encore beaucoup à faire, mais il est toujours bien de voir des progrès. Je vous en remercie.
Je voudrais revenir à l'aspect dont nous avons beaucoup parlé: la culture. Je ne veux pas parler de culture du bouc émissaire parce que, lorsqu'on dit « bouc émissaire », on suppose que la personne est innocente. Toutefois, je crois qu'on peut blâmer la culture et dire qu'elle est à tout le moins responsable de certaines des lacunes.
Monsieur Ferguson, c'est vous qui avez parlé de ce mot ou de ce concept au cours des délibérations de notre Comité avec votre deuxième rapport. Comment décririez-vous la culture qui était en place pendant la période de huit ans que couvre votre deuxième rapport, soit de 2008 à 2016, si vous pouvez la décrire?