:
La séance se tient maintenant en public.
J'aimerais remercier les témoins qui sont avec nous aujourd'hui dans le cadre de notre étude sur l'embauche d'anciens combattants au sein de la fonction publique.
Il nous a été difficile ces derniers jours d'entendre les témoignages et de mener à bien les travaux du Comité à cause de la sonnerie et des votes, et j'espère qu'il n'y aura pas d'interruptions aujourd'hui.
Comme je n'ai pas prévu d'ordre particulier pour les témoignages, avec votre permission, mesdames et messieurs les témoins, nous allons suivre l'ordre du jour que j'ai devant moi. Cela signifie donc que le premier intervenant sera M. Richards.
D'après ce que le greffier m'a dit, vous avez tous une brève déclaration préliminaire ne dépassant pas cinq minutes. Elles seront donc immédiatement suivies d'une période de questions de la part des membres du Comité.
Monsieur Richards, vous avez la parole.
J'aimerais remercier le comité de me permettre de m'adresser à vous aujourd'hui.
À titre de vétéran des Forces armées canadiennes travaillant maintenant au sein de la fonction publique fédérale, je pourrai peut-être fournir certains renseignements aux membres du Comité dans le cadre de leur étude sur l'embauche d'anciens combattants au sein de la fonction publique.
J'ai été militaire pendant 18 ans, tant dans la Force régulière que dans les Forces de réserve. Pendant mon service, j'ai été déployé dans le cadre de la mission de maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine et de la mission de combat en Afghanistan.
Cela fait maintenant six ans que je suis à l'emploi de la fonction publique en tant qu'agent des services frontaliers pour l'Agence des services frontaliers du Canada.
J'ai moi-même décidé de quitter les forces armées afin de poursuivre une autre carrière. J'ai répondu à un affichage externe dans le cadre d'un processus de recrutement d'agents des services frontaliers. Il ne s'agissait pas d'un affichage interne, et je n'avais pas été libéré pour raisons médicales des Forces armées canadiennes. Il n'y a donc pas eu de traitement accéléré ou de processus d'embauche prioritaire dans mon cas.
Afin de me préparer à faire la transition de la vie militaire à la vie civile, j'ai décidé de commencer par obtenir une attestation d'études postsecondaires. Je vis dans la région de Vancouver et, à l'époque, l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique venait de lancer un programme destiné à aider les anciens combattants qui souhaitaient poursuivre des études postsecondaires. Avec l'appui de la Légion royale canadienne, l'Institut aidait les anciens combattants à faire une demande et à transférer leur formation et leur expérience au sein des forces armées dans des domaines et des crédits d'études postsecondaires pertinents dans le cadre de ce qui était appelé le Programme de conversion des compétences militaires de la Légion royale canadienne. Ce programme a été présenté au Sous-comité sénatorial des anciens combattants et à Roméo Dallaire, qui était président de ce sous-comité en 2012, je crois.
J'ai suivi le programme d'études postsecondaires en gestion des affaires et j'ai obtenu un diplôme avec distinction en 2012.
Je souhaitais poursuivre une carrière dans la fonction publique après mon service militaire. La fonction publique gagne à bénéficier des connaissances des anciens combattants et à conserver les aptitudes, la formation et l'expérience qu'ils ont acquises pendant leur service militaire.
Il y a aussi un avantage financier à embaucher des anciens combattants dans la fonction publique, car le gouvernement a déjà investi temps et argent pour leur formation et des choses aussi simples que les accréditations de sécurité qu'ils détiennent déjà.
La politique annoncée en 2012 concernant la reconnaissance des services antérieurs dans les Forces canadiennes pour les besoins du calcul des droits aux congés annuels a incité de nombreux anciens combattants à faire la transition dans la fonction publique après leur service militaire.
Certains obstacles empêchant toujours les anciens combattants de se joindre à la fonction publique méritent qu'on s'y arrête. Il existe des programmes pour aider les anciens combattants ayant été libérés des Forces armées canadiennes pour raisons médicales à changer de carrière, mais il ne semble pas y avoir de programmes semblables pour ceux qui décident d'eux-mêmes de changer de carrière. Les affichages dans la fonction publique qui énumèrent des exigences en matière d'expérience ou d'études postsecondaires précisent « ou expérience militaire équivalente », et que les anciens combattants admissibles peuvent également présenter une demande. Quelle peut être cette expérience équivalente lorsqu'il s'agit de la fonction publique?
La politique sur la reconnaissance des services antérieurs pour les besoins du calcul des droits aux congés annuels doit composer avec les conventions collectives des divers groupes qui travaillent au sein de la fonction publique. Il faut déterminer si les années de service militaire comptent comme des années de service dans la fonction publique ou uniquement au titre du calcul des droits aux congés annuels. Dans certaines conventions collectives, les années de service militaire comptent pour le calcul de l'ancienneté.
Dans le groupe dont je fais partie, les années de service militaire comptaient pour le calcul de l'ancienneté. Ce n'est toutefois plus le cas depuis l'entrée en vigueur de la plus récente convention collective.
Récemment, les membres du syndicat ont tenu un vote afin de déterminer si le service militaire devrait être inclus ou non dans la définition de service passé dans la fonction publique. Les membres — dont la plupart ne sont pas des anciens combattants — ont majoritairement voté non. Vous pouvez imaginer les tensions qu'un tel vote peut créer dans le milieu de travail, sans compter que cela pourrait dissuader des anciens combattants qui cherchent actuellement à faire la transition de la vie militaire à envisager une carrière dans la fonction publique.
C'est avec plaisir que je vous fournirai d'autres renseignements afin d'aider les anciens combattants qui cherchent à faire la transition des Forces armées canadiennes à la fonction publique et d'aider le gouvernement dans la création et la mise en oeuvre de toute politique future.
Merci pour le temps que vous m'avez accordé aujourd'hui.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, bonjour.
J'aimerais d'abord vous remercier de me permettre de présenter certains points de vue sur les possibilités d'emploi que la fonction publique fédérale offre aux anciens combattants. Dans ce contexte, j'aimerais me concentrer sur les anciens combattants qui ont subi une blessure physique ou psychologique, que ce soit ou non dans le cadre de leurs fonctions, au cours de leur emploi au sein des Forces armées canadiennes.
À titre personnel, j'ai le privilège d'occuper deux postes en ce moment, dont celui de président de la Pacific Coast University for Workplace Health Sciences, la seule université reconnue au pays jamais créée par projet de loi d'initiative parlementaire ayant obtenu l'appui unanime de tous les députés de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique et consacrée à l'enseignement et à la recherche de tous les aspects du cycle de la santé en milieu de travail. Nous offrons actuellement des programmes de formation générale et d'éducation permanente en retour au travail et en gestion des limitations fonctionnelles.
J'occupe également le poste de directeur exécutif de l'Institut national de recherche et de gestion de l'incapacité au travail, qui a été fondé il y a environ 25 ans par un important groupe d'employeurs, de syndicats et de représentants gouvernementaux dans le but de stimuler l'innovation, le leadership éclairé, les pratiques exemplaires et les résultats économiques et sociaux dans la foulée d'une déficience physique ou mentale afin de créer des situations gagnantes pour les personnes handicapées, les employeurs et la société.
Dans ce contexte, et afin de constamment atteindre ces résultats, nous avons élaboré des normes professionnelles et de prestation de programmes en matière de retour au travail et de gestion des limitations fonctionnelles et créé un organisme de type ISO, l’International Disability Management Standards Council, de sorte qu'aujourd'hui, les normes de compétence en gestion de l'invalidité au travail sont reconnues dans 64 pays.
Pour illustrer les innombrables possibilités d'emploi que la fonction publique fédérale offre aux anciens combattants, j'utiliserai l'exemple de ma propre expérience. Il y a de nombreuses années, je travaillais pour MacMillan Bloedel, qui était alors la plus importante société de produits forestiers du pays. À mon cinquième jour de travail, une barbe d'aulne de 50 pieds de long est tombée sur moi et m'a brisé le dos. Avec l'appui de la compagnie, du syndicat — aujourd'hui le Syndicat des Métallos — et du Worker’s Compensation Board de la Colombie-Britannique, j'ai pu continuer à travailler au sein de l'entreprise, d'abord en administration forestière, le domaine dans lequel j'avais initialement obtenu mon diplôme, puis, après un recyclage professionnel, en comptabilité.
Tout cela après un retour au travail réussi incluant notamment la construction d'un accès physique au bâtiment administratif d'un chantier forestier totalement inaccessible de près de 500 travailleurs sur la côte Ouest de l'île de Vancouver. À l'instar d'une entreprise diversifiée telle que MacMillan Bloedel, qui comptait alors plus de 20 000 cols bleus et cols blancs, absolument rien ne pourrait empêcher la fonction publique fédérale, avec ses quelque 260 000 employés partout au pays, d'embaucher la majorité des anciens combattants handicapés.
Le maintien réussi de l'emploi avec l'employeur précédent — en l'occurrence le gouvernement du Canada — à la suite d'une blessure physique ou psychologique nécessite la combinaison de trois éléments qui sont à la base de tout retour au travail, où que ce soit dans le monde. Il s’agit de la créativité, car tous les cas sont différents et varient en fonction des circonstances; de la collaboration entre les diverses parties intéressées; et d'une communication ouverte et transparente.
Supposons que le projet de loi , la loi canadienne sur l’accessibilité, est adopté et que, selon ses dispositions, l'embauche de 5 000 personnes au cours des prochaines années crée un contexte d'embauche unique pour les anciens combattants handicapés. Cela nécessitera toutefois souplesse et créativité de la part de la Commission de la fonction publique, qui devra faire preuve d'imagination afin de passer en revue et d'éliminer, au besoin, une foule d'obstacles bureaucratiques et d'exigences inutiles en matière d'études afin de permettre une plus grande souplesse sur le plan de la formation.
Il serait possible de prendre quelques mesures concrètes. Un maintien en emploi efficace auprès de l'employeur d'avant l'invalidité nécessite une intervention précoce, une première étape absolument essentielle afin que des facteurs psychosociaux ne s'ajoutent à l'invalidité physique et rendent la personne inemployable.
Les personnes qui ont un handicap mental ou physique — peu importe la cause — devraient faire l'objet d'un tri aussi rapidement que possible. Cela permettra de déterminer si elles peuvent continuer à occuper leur emploi ou si elles doivent changer de poste, ce qui pourrait impliquer un recyclage professionnel ou un redéploiement dans un autre poste, soit au sein du ministère de la Défense nationale ou ailleurs dans la fonction publique.
À l'heure actuelle, les contacts entre le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens Combattants peuvent souvent nuire aux débouchés potentiels des anciens combattants handicapés. Cette situation mériterait d'être radicalement améliorée. Je ne dis pas que le fait d'obtenir un emploi dans la fonction publique fédérale réglera tous les problèmes pour ces personnes. En fait, 70 % des personnes handicapées qui sont embauchées à la fonction publique fédérale ne réussissent pas à se maintenir en poste pendant la période de probation. Il y a des problèmes systémiques qu'il faut régler et qui vont bien au-delà du cadre de la conversation que nous sommes en train d'avoir.
Vu l'expérience de nombreux autres pays, nous sommes certainement prêts à offrir certaines mesures concrètes qui favoriseraient de meilleurs résultats socioéconomiques pour les anciens combattants handicapés.
Merci beaucoup.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs du Comité, je m'appelle Debbie Lowther. Je suis la présidente et cofondatrice de Veterans Emergency Transition Services, ou Services de transition d'urgence pour anciens combattants, communément appelé VETS Canada. Je suis accompagnée aujourd'hui par Walter Semianiw, qui siège au comité de la direction, mais qui est aussi responsable de l'élaboration de la politique sur la priorité d'embauche à Anciens Combattants Canada.
Merci de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui, et merci d'avoir entrepris cette étude très importante sur l'embauche des anciens combattants au sein de la fonction publique. C'est un privilège pour moi d'être parmi vous pour faire connaître notre point de vue à l'égard de cette étude.
VETS Canada est un organisme à but non lucratif enregistré au fédéral voué à répondre aux besoins immédiats des anciens combattants des Forces armées canadiennes et de la GRC qui sont itinérants ou risquent de le devenir, ou qui vivent tout autre type de crise. Nous existons depuis 2010 et nous avons des bureaux partout dans le pays, où des centaines de bénévoles dévoués viennent directement en aide aux anciens combattants. La plupart des bénévoles sont eux-mêmes des anciens combattants.
Notre administration centrale se trouve à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, et nos bénévoles sont répartis partout au Canada. Nous avons répondu à plus de 7 000 demandes d'aide de la part d'anciens combattants et de leurs familles, d'un bout à l'autre du pays. Nous sommes disponibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, même les jours fériés. Actuellement, nous recevons entre 200 et 300 demandes d'aide chaque mois.
Les anciens combattants auprès de qui nous travaillons en sont à différentes étapes de leur transition du service militaire vers la vie civile; nombre de ceux avec qui nous avons travaillé ont participé au processus d'embauche prioritaire, tout comme bon nombre de nos bénévoles. Cependant, à ce jour, aucun de ces anciens combattants n'a réussi à obtenir un emploi dans la fonction publique en passant par ce processus.
Lorsque certains des anciens combattants qui ont postulé sans succès à différents postes ont demandé pourquoi ils n'avaient pas été sélectionnés, ils recevaient généralement des réponses vagues, comme: « Vous n'étiez pas la personne qu'il nous fallait. » Un de nos bénévoles qui est un ancien combattant a participé à un concours de dotation à Anciens Combattants Canada dans le cadre de l'embauche prioritaire. Lorsqu'il n'a pas été sélectionné, il a demandé pourquoi. On lui a dit qu'il n'avait pas suffisamment d'expérience à communiquer avec les officiers militaires supérieurs. Pourtant, il a servi pendant 23 ans et a été libéré avec le grade de major. Pour ceux parmi vous qui ne connaissent pas les grades militaires, un major est un officier supérieur.
Nous croyons que la politique d'embauche prioritaire est robuste. Il semble — en théorie — répondre aux besoins des anciens combattants. Cependant, en fin de compte, la décision d'embauche est laissée aux gestionnaires, qui n'ont aucune obligation et aucun intérêt à embaucher des anciens combattants. Nous croyons donc que, puisque la politique est robuste et que le processus est bon, mais que la mise en oeuvre laisse à désirer, il faudrait envisager d'adopter des cibles, ou des quotas, comme le font nos voisins au sud. Il est beaucoup plus facile d'évaluer le succès d'un programme ou d'une initiative lorsqu'on a établi des résultats mesurables.
On a beaucoup discuté de l'obligation sacrée du gouvernement du Canada envers ceux qui ont combattu et qui ont été blessés au service de leur pays. Nous croyons que les personnes qui acceptent de mettre leur vie en jeu pour leur pays sont le droit de savoir que le pays qui les a placés en situation de danger sera là pour elles à la fin de leur service. Une manière simple pour le pays de respecter cette obligation sacrée est de fournir des emplois à ceux qui sont en mesure de travailler.
Monsieur le président, merci. Il me fera plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président, et merci à tous ceux qui sont présents.
Je ne m'intéresse pas tant aux histoires de réussites qu'à ce qui manque sur le terrain. Madame Lowther, je pense que vous avez bien exposé les lacunes pour nous. Certainement, je suis loin du terrain et je ne vois pas toujours ce qui se passe véritablement.
Monsieur Zimmerman, vous avez dit que 70 % des candidats ne réussissent pas à garder leur poste à la fin de la période de probation; il s'agit là d'un problème sérieux. Lorsque vous avez dit cela, j'ai pensé au fait que ces gens ne sont pas accueillis comme il faut dans leur nouvel environnement.
D'après votre expérience et vos observations, quelles mesures pourrions-nous prendre pour veiller à ce que ceux qui sont embauchés maintenant réussissent leur période de probation afin de réduire cette statistique? Je vous pose la question parce que 70 %, c'est trop élevé.
Madame Lowther, n'hésitez pas à nous donner votre avis.
:
Il y a bon nombre d'organisations.
Un bon exemple est Postes Canada. Il y a sept ou huit ans, on y a établi un programme national qui garantit que quiconque acquiert un handicap ne perdra pas son poste. Le Groupe Irving, dans les Maritimes, est une organisation du secteur privé qui fait un travail remarquable à cet égard, peu importe s'il s'agit d'un trouble lié à la santé mentale ou à la santé physique.
Cela fait que... En particulier dans les grandes organisations, un jour on pourrait avoir besoin d'accommoder quelqu'un qui a un problème de santé mentale, et le lendemain il pourrait s'agir d'un problème de santé physique — comme le cancer —, ce qui exigera que l'organisation relève le défi de gérer des employés ayant des invalidités épisodiques. Vous pourriez aider les organisations à élaborer une stratégie pour qu'elles puissent, graduellement, ouvrir la porte à l'embauche d'anciens combattants qui quittent le service militaire.
Je connais bien la nature des communications entre Anciens Combattants Canada et le ministère de la Défense nationale parce que j'ai eu le privilège de siéger pendant plus de six ans au comité consultatif d'Anciens Combattants, vers la fin des années 1990.
Il existe d'énormes possibilités que vous pourriez favoriser.
:
Je crois savoir que la disposition faisait partie de la convention collective précédente. Pour une raison quelconque, on ne l'a pas intégrée dans la convention actuelle.
Le syndicat avait envoyé un courriel de renseignements, disant qu'il allait mettre la question aux voix, ce qui était, à son avis, une mesure sans précédent. On ne soumet pas d'habitude de telles questions à un vote. Généralement, le syndicat prend position et représente l'agent négociateur lors des négociations.
Le syndicat a procédé à un vote pour décider si le libellé de la convention collective resterait tel quel — dans ce cas, la mesure ne ferait pas partie des services de la fonction publique fédérale —, ou si l'on essayerait de la reformuler et de la réintégrer dans la convention. C'est le vote qui a été annoncé. Je ne connais pas le nombre précis d'agents des services frontaliers au Canada, mais il y en a eu environ 1 150 qui ont voté non et 850 qui ont voté oui. Cela représente en tout moins de 50 % de tous les membres admissibles au vote.
J'en ai parlé à des agents et bon nombre se sont excusés auprès de moi. Ils ont dit qu'ils ne comprenaient pas comment cela avait pu se produire, et que cela leur semblait ridicule. Très bien. Il y en a d'autres qui ont dit qu'ils n'avaient même pas su qu'il y aurait un vote, et qui se demandaient quand cela s'était passé, comment on l'avait annoncé et comment les renseignements avaient été communiqués.
Il y a aussi eu des informations erronées. La politique sur les congés annuels du Conseil du Trésor est établie selon une échelle. Elle ne compte pas jour pour jour. Il existe différentes catégories de service: les forces régulières, la réserve, la réserve outremer, les membres déployés. Il existe toute une échelle; il faut donc soumettre ses documents. Si on est embauché dans le secteur public, on soumet ses documents militaires et le congé annuel est établi en fonction de certains calculs. Ce n'est pas jour pour jour.
Je ne pense pas que c'était bien expliqué. Malheureusement, la plus grande préoccupation de nombre d'agents était de perdre leur ancienneté — de ne plus pouvoir choisir leurs vacances ou leurs quarts de travail — au profit des employés qui arrivaient de l'armée, qui avaient choisi le service militaire. C'est ce genre de commentaires négatifs qui ont été rendus publics et qu'on entendait sur le plancher de la part des agents. C'est de là que vient l'animosité. On nous dit que, après tout, nous avons choisi le service militaire, et que ce n'est pas le secteur public, alors cela ne compte pas. On nous rappelle que nous n'avons jamais fait partie du syndicat, que nous n'avons jamais été couverts par la convention collective.
Je ne sais pas quels renseignements ont été communiqués. Je ne pense pas que s'ils avaient mieux été communiqués... Seulement une fraction des agents auraient été des anciens combattants. Pour les militaires, ce n'est pas la totalité du service qui est prise en compte. Donc, on parle d'une fraction d'une fraction.
:
C'est un commentaire intéressant. J'ai parlé à des fonctionnaires qui m'ont appris qu'il y a un service de guide-expert pour aider les anciens combattants à faire la transition vers la fonction publique. Quand j'ai demandé si les anciens combattants en avaient été informés et si on leur avait donné les formulaires à remplir, les fonctionnaires ont répondu que non, car cela impliquerait trop de paperasse. Je crois que cela résume parfaitement le fonctionnement de l'appareil gouvernemental.
Vous avez parlé des qualifications minimales requises. Vous êtes allé outre-mer et il me semble que — et je ne veux d'aucune façon offenser les gens qui nous écoutent — votre formation devrait compter davantage qu'un diplôme en histoire, un baccalauréat en sciences ou je ne sais trop, mais, apparemment, ce n'est pas le cas. C'est un obstacle pour vous et pour bon nombre d'anciens combattants qui postulent des emplois dans la fonction publique.
Y a-t-il d'autres conditions d'emploi qui bloquent l'accès des anciens combattants aux emplois dans la fonction publique? Est-ce que les responsables de l'embauche utilisent ces conditions pour choisir d'autres candidats plutôt que d'embaucher des anciens combattants?
Madame Lowther, voulez-vous intervenir également?
Selon moi, un grand changement s'impose en ce qui concerne les rôles du ministère de la Défense nationale et du ministère des Anciens Combattants. C'est de cela que je parlais plus tôt par rapport à toute la question du tri. Je souhaite vous donner un exemple qui se rapporte à un domaine très semblable, celui de l'indemnisation des accidents du travail au pays et dans le monde. Dans le cas d'un militaire qui acquiert une déficience quelconque, qu'elle soit mentale ou physique, on détermine généralement dans un délai de quatre semaines s'il y a une forte probabilité qu'il puisse retourner au travail. À partir de là, on élabore une stratégie d'intervention en vue d'un retour au travail, plutôt que de laisser le militaire languir au ministère de la Défense nationale, puis de le transférer finalement au ministère des Anciens Combattants.
Sans stratégie d'intervention précoce, toutes les difficultés commencent évidemment à s'accumuler, comme l'ont mentionné les autres témoins. On parle de facteurs psychosociaux, de dépression, d'anxiété et, finalement, de pauvreté, d'itinérance et de toxicomanie. Nous constatons que près de 30 % des Canadiens vivant dans la pauvreté sont des personnes handicapées et qu'une bonne partie d'entre eux sont des personnes ayant quitté les forces armées et n'ayant jamais réussi à réintégrer la société.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
À tout le moins, je vais essayer de continuer un peu en français, comme Mme Laverdière. Je risque de m'exprimer en anglais, après.
Monsieur Zimmermann, vous avez mentionné le comité consultatif auquel vous avez siégé à la fin des années 1990. J'aimerais savoir si, sur le plan de la transition de la vie militaire à la vie civile, particulièrement en emploi, des recommandations sont ressorties de ce comité consultatif, et ce qu'elles seraient, le cas échéant.
:
Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je crois que, effectivement, la créativité, c'est de regarder au-delà de la simple description de poste du fonctionnaire traditionnel qu'on a peut-être en tête. En effet, il s'agit d'aller voir plus loin.
Pendant qu'ils sont encore actifs, avant de devenir des anciens combattants, les militaires ont surtout besoin d'être rassurés par leur employeur — la Défense nationale — à savoir que, sur le plan de leur santé mentale et physique, ils sont aptes à entrer sur le marché du travail. C'est aussi l'un des problèmes. Si la personne est physiquement ou mentalement fragile à la fin de sa carrière militaire, avant de faire la transition vers un emploi civil, c'est sûr que les conditions ne seront pas tellement à son avantage. Est-ce que je me trompe?
Y a-t-il une période à la fin d'une carrière militaire où le militaire est accompagné pendant ce qu'on pourrait appeler une « convalescence » ou, à tout le moins, une période de remise en bon état de santé pour entrer dans la vie civile? Est-ce que cela se fait?
[Traduction]
Comprenez-vous ma question? À la fin de leur carrière militaire, les militaires ont-ils accès non seulement à de la formation, mais aussi à des services de santé mentale et physique afin d'être prêts à entrer dans la vie civile?
:
Ce que j'ai entendu, c'est qu'il s'agit d'une mesure pour plus tard. Ce n'est pas en place aujourd'hui. Le service de guide-expert sera offert dans plusieurs années. Il est à l'essai à Borden en ce moment.
Partout ailleurs, si vous êtes libéré des Forces armées canadiennes, c'est toujours le même processus de libération que dans mon cas, il y a trois ou quatre ans.
Le programme dont vous parlez paraît excellent, mais il n'est pas encore en vigueur. Par conséquent, à VETS Canada, nous voyons encore des hommes et des femmes aux prises avec des problèmes de santé mentale.
Je suis d'accord avec M. Zimmermann. Il y a un groupe de militaires auxquels nous devons prêter plus d'attention avant qu'ils ne soient libérés. On devrait retarder leur libération jusqu'à ce que tout soit en place: la convalescence et le soutien. Sinon, leur situation après la libération est désastreuse.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, bienvenue à votre Chambre des communes.
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier sincèrement pour ce que vous avez fait pour notre pays. Oui, vous travaillez au service de vos compatriotes. En ce sens, vous êtes parmi les meilleurs fonctionnaires, et je tiens à vous rendre hommage à tous.
Par votre entremise, je souhaite saluer les gens de ma circonscription.
[Français]
Dans ma circonscription, Louis-Saint-Laurent, je suis à quelques kilomètres à peine de la base militaire de Valcartier, qui est dûment représentée par mon collègue de . Évidemment, il y a des centaines, voire des milliers d'anciens combattants dans ma circonscription.
Il y a 10 ans, j'avais initié la démarche pour que la route qui conduit à la base militaire de Valcartier porte le nom de la route de la Bravoure, comme il y a en Ontario.
C'est à vous que nous pensons tous les jours, lorsque nous pouvons profiter des bienfaits de la liberté et de la démocratie. Je vous remercie du service que vous avez rendu et que vous continuez à rendre à notre pays.
[Traduction]
Monsieur Zimmermann, il y a quelques minutes, vous avez parlé du passage du champ de bataille à la tour à bureaux. Passer toute sa vie sur le terrain à se battre pour la démocratie et tout le reste, puis se retrouver avec un emploi dans une tour à bureaux au centre-ville d'Ottawa ou ailleurs, c'est un grand défi que les militaires doivent tous relever.
D'après votre expérience, quelle est votre opinion à ce sujet? Pensez-vous que nous offrons suffisamment d'aide aux militaires qui doivent faire la transition de la vie militaire à la vie civile?
:
D'après mon expérience, ceux qui ont des problèmes de santé physique ou mentale n'ont pas le soutien nécessaire.
J'aimerais vous en donner une petite idée. Si on regarde les systèmes d'indemnisation des travailleurs dans le monde qui abordent le même genre de problèmes — dans ce cas, on parle d'accidents du travail, même s'il en va de même pour les accidents non liés au travail pour lesquels la structure n'est pas la même —, on constate que toutes les stratégies d'intervention visent une période de trois mois.
Lorsqu'une personne handicapée est sans emploi depuis trois mois, nous savons que ses chances de retourner un jour au travail sont considérablement réduites. C'est juste quelque chose qui arrive. C'est une de nos caractéristiques en tant qu'êtres humains. On perd confiance en soi et on est déprimé.
D'un point de vue structurel, nous pourrions faire beaucoup plus à cet égard, mais nous avons pratiquement mis en place un système qui empêche les anciens combattants de réintégrer avec succès la vie civile.
Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons le même problème dans le monde de l'indemnisation des accidents du travail. Si une personne est sans emploi depuis un an, ses chances de retourner un jour au travail sont réduites à moins de 10 %.
:
Je pense que cela revient à ce que M. Semianiw a dit plus tôt, à savoir que le ministère de la Défense nationale doit avoir des structures en place pour offrir du soutien aux militaires afin qu'on s'occupe d'eux. Il s'agirait d'un programme semblable à du mentorat. J'aimerais en parler un peu plus.
C'est au Commonwealth d'Australie qu'on a le mieux réussi à ramener au travail des personnes qui touchaient des prestations de sécurité sociale depuis longtemps, et ce, en leur offrant les services de formateurs en milieu de travail, de la même façon que, dans le cas présent, on parle d'offrir un soutien aux militaires pour qu'ils ne soient pas laissés à eux-mêmes. C'est vraiment l'approche qu'il faut adopter.
Oui, il faudra probablement des ressources importantes pour commencer, mais au bout du compte, en tant que société et pour les personnes concernées, cela vaut amplement la peine sur le plan non seulement du coût financier, mais aussi de l'énorme coût humain et social qui est associé à un échec collectif.
À tous les témoins, je tiens à vous remercier d'être ici. Plus que cela, je tiens à vous remercier pour les services que vous avez rendus à votre pays.
Si vous avez d'autres renseignements que vous souhaitez communiquer au Comité pendant que nous poursuivons cette étude, je vous encourage à les faire parvenir au greffier afin de nous aider dans le cadre de l'étude. Il n'y a jamais assez de temps pour donner aux témoins l'occasion de faire entendre leur point de vue et de donner des exemples qui pourraient être utiles au Comité. Vous avez fait un travail merveilleux. Je vous en remercie.
Vous pouvez maintenant vous retirer.
Chers collègues, nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes en attendant que les prochains témoins s'approchent de la table.
:
Pour ceux qui ne me connaissent pas, je m'appelle Katherine Lamy. J'ai servi 21 ans et demi dans les Forces armées canadiennes. J'ai servi dans la Première réserve et dans la Force régulière. Cette période a été remplie de divers cours, postes, tâches et déploiements, notamment la tempête de verglas en 1998; l'opération Athena; la Roto 3 à Kaboul, en Afghanistan, en 2005; et la Roto 6 à Kandahar, en Afghanistan, de 2008 à 2009.
Au cours de mon service, j'ai subi plusieurs blessures, y compris dans une zone de service spécial.
Au cours de mon service, j'ai remarqué qu'il y avait un nombre élevé d'anciens combattants qui étaient mal préparés à passer de la vie militaire à la vie civile. Plus les militaires servent longtemps dans l'armée, plus ils sont institutionnalisés. J'entends par là que bon nombre d'entre eux s'habituent à ce que le système coordonne et gère une grande partie, sinon la plupart, de leurs activités quotidiennes normales. Voici une courte liste non exhaustive des activités les plus courantes: soins médicaux; ordonnances et paiement; aiguillage vers des spécialistes tels que des orthophonistes, des neurologues, entre autres; déplacements à des fins médicales; évaluation médicale; suivis; imagerie diagnostique; évaluations et soins dentaires; réadaptation pour les dépendances à l'alcool et aux drogues, y compris l'approbation et le paiement; rémunération gérée localement; trousse et équipement fournis; déplacements liés aux affectations et coordination du paiement; sécurité d'emploi — généralement, des choses comme un curriculum vitae et une entrevue ne sont pas nécessaires; problèmes financiers — souvent coordonnés et gérés avec la chaîne de commandement, le militaire et un conseiller financier; testament et procuration; et beaucoup plus.
La plupart du temps, tout cela est coordonné à l'arrière-plan sans que les militaires aient à trop s'en mêler. Cela se fait assez rondement. Par conséquent, les militaires deviennent dépendants du système et institutionnalisés pour ces activités. Lorsqu'ils quittent la vie militaire pour la vie civile, il n'y a personne et aucun processus en place pour les guider et les aider à faire la transition. Je le sais parce que je l'ai vécu. J'étais en réadaptation après une opération pour une blessure à la hanche qui nécessitait beaucoup de travail, et j'ai dû soulever et transporter tout mon matériel et mon équipement. D'un point de vue de clinicien — je suis infirmière praticienne —, je sais que cela n'aurait jamais dû se produire. En effet, j'ai aggravé l'état de ma hanche et j'ai dû avoir une autre chirurgie.
Par ailleurs, personne ne dit aux militaires d'épargner en vue de leur libération. En effet, il faut parfois plusieurs mois avant que la pension, l'allocation pour perte de revenus et le Régime d'assurance-revenu militaire entrent en vigueur et soient appliqués pour le versement des paiements à la suite d'une libération pour des raisons médicales. Cela peut être très stressant pour les militaires et leur famille, car bon nombre d'entre eux doivent payer l'hypothèque, le loyer, l'épicerie, l'assurance automobile, la pension alimentaire pour enfants et ainsi de suite, et il se peut qu'ils en soient incapables. Les banques et les créanciers ne sont pas aussi indulgents lorsque vous leur devez de l'argent, et même si vous leur dites que vous attendez que ces sources de paiement soient mises en place, ils font rarement preuve de compassion.
En tant qu'infirmière praticienne, j'ai traité des patients dans les systèmes de soins de santé militaire et civil. Après la transition, les anciens combattants libérés présentent souvent des niveaux de stress et d'anxiété plus élevés. Certains sont incapables de travailler dans les mois suivant leur libération alors que d'autres ne seront pas du tout en mesure de retourner au travail. Certains décident s'ils peuvent retourner aux études et s'ils pourront réussir à obtenir leur diplôme et à trouver le bon emploi pour eux. D'autres sont tout simplement trop blessés, psychologiquement et physiquement, alors le retour au travail n'est tout simplement pas une option. Par conséquent, la disparité de revenu et d'emploi devient extrêmement évidente durant les premiers mois suivant la fin de la transition militaire.
Une fois que les militaires ne sont plus dans l'armée, ils n'ont plus le coussin de sécurité d'un système qui s'occupe d'eux. Certains ont des problèmes de toxicomanie préexistants qui n'ont jamais été entièrement réglés ni traités correctement ou efficacement. Leur état peut contribuer à la perte de leur maison, de leur famille, de leurs enfants, de leur emploi, de leur voiture et bien plus encore. Cela devient une vraie tempête.
Ce que je vous demande aujourd'hui, c'est de mettre en place et de coordonner un mécanisme qui permettrait aux anciens combattants de ne pas être laissés à eux-mêmes lorsqu'ils quittent l'armée. J'ai été libérée pour des raisons médicales en février 2018. Même si j'étudiais pour devenir infirmière praticienne, j'ai, moi aussi, éprouvé des difficultés à cause de mes blessures. J'ai eu de la chance d'avoir le soutien de mes collègues et du personnel du programme de sciences infirmières de l'Université d'Ottawa. Malgré cela, personne de ma chaîne de commandement n'a communiqué avec moi pendant les six derniers mois de mon service militaire pour savoir si j'avais besoin d'un soutien quelconque.
Je travaille maintenant pour l'hôpital Queensway Carleton et pour Spartan Wellness. Chez Spartan Wellness, nous aidons et guidons les anciens combattants en ce qui concerne certains de leurs besoins médicaux. Ils ont besoin de ce genre de conseils et d'aide afin d'avoir les outils nécessaires pour quitter les Forces armées canadiennes. Autrement, il s'agit d'un manque de leadership à tous les niveaux.
:
Merci monsieur le président.
Je m'appelle Danielle Boutilier. Je viens du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, le territoire non cédé du peuple micmac, connu sous le nom d'Unama'ki.
[Français]
Je vais continuer en anglais, mais, si vous avez des questions en français, n'hésitez pas.
[Traduction]
Je me présente aujourd'hui à vous en tant que femme et aidante naturelle d'un ancien combattant blessé qui vient d'être libéré des forces armées. L'uniforme que je porte présentement est celui de la fonction publique. Je l'ai portée pendant près de 20 ans, mais ce sont d'autres motifs qui m'amènent à témoigner.
Je suis venue ici pour vous faire part de mes expériences en tant que femme d'un ancien combattant blessé, en tant que mère de quatre enfants et en tant que gestionnaire dans la fonction publique. En tant que femme d'un militaire blessé, j'aimerais vous faire part de certaines observations. Pour un ancien combattant, la réinsertion dans la vie civile est une tâche très ardue qui peut parfois s'avérer accablante s'il ne bénéficie pas du soutien de son entourage. Depuis que mon mari a quitté les forces armées, j'ai pu constater à quel point les anciens combattants sont laissés à eux-mêmes; on leur fournit un curriculum vitae monté à partir d'un gabarit Word, les formations qu'ils ont suivies sont impossibles à comprendre pour la plupart des employeurs, et ils ne reçoivent aucune formation qui les aiderait à poser leur candidature pour un emploi au sein de la fonction publique et à se mettre en valeur durant une entrevue.
Depuis la réinsertion de mon mari dans la vie civile et sa réadaptation professionnelle, rendues possibles grâce aux programmes offerts par les Unités interarmées de soutien du personnel, j'ai décidé d'aider les anciens combattants qui cherchent à réintégrer la vie civile. Je les oriente vers des emplois valorisants au sein de mon propre organisme et je les aide à se familiariser avec les outils dont ils auront besoin pour intégrer la fonction publique: rédaction de CV, cours et formations pertinents, entrevues simulées, aperçu de tous les organismes non gouvernementaux comme VETS Canada, dont a parlé Mme Lowther. Nous avons fait connaissance, car ma famille a eu à recourir aux services fournis par son organisme.
J'ai eu la chance de faire partie de la fonction publique pendant 20 ans et d'avoir participé à de nombreux processus de sélection, tant dans le rôle d'interviewée que d'intervieweuse. J'ai réalisé que, lors d'un processus d'entrevue, nous posons des questions aux candidats afin d'obtenir le plus de renseignements possible, et c'est ce qui détermine ensuite qui sera sélectionné pour un poste. Ainsi, plus un candidat fournit de renseignements, plus il augmente ses chances d'aborder tous les éléments requis. La manière de procéder est différente dans les forces armées. En effet, les militaires apprennent à laisser tomber le verbiage pour aller droit au but. Il s'agit d'une manière de faire éprouvée qui cadre avec leur rôle au sein des forces armées, mais qui leur nuit fortement lorsque vient le temps de rédiger un CV ou de passer une entrevue. Par exemple, lorsque je demande à des anciens combattants de me décrire une situation non sécuritaire en milieu de travail au Canada, ils me répondent qu'ils n'en voient aucune.
Je pense que, pendant leur période de transition vers la vie civile, les anciens combattants devraient recevoir une formation obligatoire axée sur ces deux habiletés importantes. Des formations facultatives sont offertes en ce sens — et je suis certaine qu'elles sont utilisées —, mais j'ai l'impression qu'il faudrait exiger de comparer le bilan quantitatif du nombre de militaires libérés par rapport au nombre de formations optionnelles qui ont été données ou reçues.
Le programme de réadaptation professionnelle est parmi les programmes offerts par les Unités interarmées de soutien du personnel qui a connu le plus de succès. Il offre aux anciens combattants l'occasion de « tester » un nouvel emploi, tout en permettant à la fonction publique de se doter d'employés qui possèdent toute une gamme de compétences. Les militaires qui suivent le programme de réadaptation professionnelle se heurtent à plusieurs obstacles, notamment le fait que leur numéro matricule ne soit pas reconnu comme un CIDP, ce qui les empêche de suivre des programmes de formation en ligne avec l'École de la fonction publique du Canada ou de servir d'une maCLÉ pour accéder à certains sites Web sécurisés du gouvernement.
Par exemple, un sergent de la salle des rapports qui possède 25 ans d'expérience ne peut pas s'inscrire au programme de réadaptation professionnelle de la fonction publique s'il ne possède pas de CIDP, nécessaire à l'obtention d'une maCLÉ, et ne peut donc pas occuper un poste de responsable de la comptabilisation du temps affecté au système de paie Phénix.
Pour aider les anciens combattants à véritablement s'intégrer au sein de la fonction publique, nous devons leur confier des responsabilités claires et leur présenter un portrait réel du rôle qu'ils seront amenés à jouer, au lieu de les laisser se débrouiller avec de vagues instructions. Comme l'a mentionné Andrew tout à l'heure, le Centre des pensions prend un certain temps à traiter les demandes de congé de transition à la retraite.
J'estime également que la Politique du Conseil du Trésor sur la réinstallation mérite d'être examinée. L'adoption de la politique sur l'embauche des anciens combattants a permis aux membres des Forces canadiennes de présenter une candidature à l'interne pour obtenir un poste au sein de la fonction publique, sans qu'ils puissent toutefois avoir accès à tous les bénéfices. Elle ne tient pas compte des limites de la réinstallation en ce qui concerne le personnel du ministère de la Défense nationale et de la Gendarmerie royale du Canada. Certaines restrictions s'appliquent à ces membres du personnel lorsqu'ils présentent une demande de réinstallation, comme le nombre d'années de service et le motif de la libération. Les membres libérés pour des raisons médicales ont droit au montant total prévu pour leur réinstallation, alors que les membres ayant cumulé moins de 20 années de service n'en reçoivent qu'une partie.
Si un membre trouve par lui-même un poste dans la fonction publique — comme l'a fait Andrew —, qu'il suit toutes les étapes du processus d'appel de candidatures et qu'il est finalement choisi, on peut lui refuser l'aide à la réinstallation simplement parce qu'il n'a que 10 ans de service et qu'il n'a pas été libéré pour raisons médicales. De son côté, une personne qui obtient le même poste après avoir présenté une candidature interne a droit au montant maximum pour la réinstallation, en vertu de la Politique du Conseil du trésor sur la réinstallation. Un membre du ministère de la Défense nationale ou de la GRC est considéré comme un nouvel employé et pourra s'attendre à recevoir jusqu'à 5 000 $ s'il présente ses pièces justificatives, alors que le candidat à l'interne est admissible au remboursement total. Cette situation représente un énorme obstacle pour bien des candidats, qui doivent partir s'installer ailleurs au pays lorsqu'une occasion d'emploi se présente, alors qu'ils avaient pu bénéficier d'une politique sur la réinstallation semblable lorsqu'ils sont revenus à leur adresse actuelle.
Je me sens privilégiée d'être la conjointe d'un militaire. Cela me permet d'adopter une autre perspective par rapport au processus d'embauche d'anciens combattants, et de voir tout leur progrès qu'ils ont accompli durant leur cheminement pour pouvoir jouer un rôle significatif au sein de la fonction publique. Je crois que l'École de la fonction publique du Canada aurait avantage à offrir une formation pour aider les gestionnaires à se familiariser avec l'embauche d'anciens combattants. Une telle formation permettrait également d'atténuer les réserves que peuvent susciter ces candidatures. Cet ancien combattant souffre-t-il du syndrome de stress post-traumatique? Devra-t-on mettre en place des mesures d'accommodement? Va-t-il réussir à s'intégrer dans mon équipe?
En outre, il serait très pertinent d'offrir aux gestionnaires potentiels une formation sur les rôles joués par les anciens combattants, et de les familiariser au Sommaire des dossiers du personnel du militaire, qui représente en quelque sorte une impressionnante liste de cours. Par ailleurs, cette formation de ce genre n'aurait pas besoin d'être montée de A à Z; le Conseil de liaison des Forces armées la donne déjà par rapport aux réservistes. La plupart des anciens combattants possèdent des compétences en matière de leadership et de communication ainsi qu'une force de caractère qui dépassent les attentes de n'importe quel gestionnaire. Notre objectif est d'aider à la fois les anciens combattants et les gestionnaires à comprendre tout ce que ces candidatures peuvent apporter à la fonction publique.
Je vous remercie de m'avoir écoutée.
:
Merci beaucoup. Je n'ai pas eu la chance de remercier les membres du groupe précédent pour les services qu'ils rendent à notre pays.
Je suis vraiment ravie que nous nous penchions sur le processus d'embauche des anciens combattants, car ce faisant, nous avons ouvert une véritable boîte de Pandore. À vrai dire, j'ignorais l'ampleur de la bureaucratie et des obstacles auxquels se heurtent les anciens combattants. Je croyais qu'en quittant les forces armées, que ce soit sur une base volontaire ou pour des raisons médicales, un militaire pouvait compter sur un quelconque groupe de soutien, et qu'il était accompagné durant le processus de réintégration à la vie civile. Je pensais aux services de guide-expert, dont ont parlé les gens de VETS Canada, qui concernent la sécurité financière, la santé, la préparation à la vie quotidienne, etc.
Vous avez été déployée à Kandahar et avez accompli beaucoup de choses. Vos nombreuses compétences et votre CV devraient réussir à convaincre les responsables dans la fonction publique que vous possédez des capacités de leadership et que vous êtes capable de vous adapter à n'importe quelle situation. S'il n'est pas encadré, comment un ancien combattant peut-il mettre à profit toutes ses compétences dans sa nouvelle vie civile? Vous avez parlé d'obstacles. Nous avons besoin d'entendre vos suggestions par rapport aux grands défis à relever et à la réalité de la situation. De quelle façon pouvons-nous améliorer le système?
Je crois qu'un intervenant a suggéré de fusionner le ministère des Anciens Combattants et le ministère de la Défense nationale afin d'alléger la bureaucratie. Qu'en pensez-vous?
:
J'ai servi dans la Première réserve pendant 10 ans. Beaucoup de membres de cette force vont également à l'école ou ont un emploi civil ou sont au foyer. J'ai toujours eu un pied dans l'armée et un pied dans la vie civile.
J'ai toujours pris au sérieux les études. On m'a élevée en m'inculquant l'importance de l'éducation et la nécessité de se garder toutes les portes ouvertes. Ainsi, je continuais à m'instruire. Au moment de quitter progressivement la vie militaire, je souffrais de plusieurs blessures. J'ai dû affronter le système militaire, car je savais que je devais être évaluée à la clinique TSO d'Ottawa, mais le Centre de soutien aux combattants de Petawawa ne voulait pas transférer mon dossier.
Ce fut une bataille. Mon médecin militaire, le Dr Davenport, a recommandé trois fois que je sois suivie à la clinique TSO, mais ma demande a été bloquée chaque fois par le Centre de soutien aux combattants de Petawawa. J'ai dû contacter Anciens Combattants Canada et passer par une gestionnaire de cas qui m'a mis en relation avec la clinique TSO d'Ottawa. Ils m'ont finalement fait entrer par la porte d'en arrière.
Nous devons simplifier le processus permettant aux gens d'être envoyés à une clinique TSO. Les anciens combattants blessés méritent davantage de respect, car laissez-moi vous dire qu'à Petawawa, on vous traite comme si vous étiez un faux malade paresseux. C'est épouvantable. J'ai été dans cette clinique à Petawawa en tant que patiente et comme employée, et j'ai constaté que les anciens combattants blessés n'ont droit à aucun respect.
:
Je peux vous faire un résumé rapide.
Mon mari a été blessé en 2009 et il est resté dans les forces armées jusqu'en 2014, l'année où nous avons été contraints de déménager inutilement à Petawawa, sous prétexte qu'un militaire doit retourner dans son unité. Je suis donc retournée à Petawawa avec mes quatre enfants, j'ai acheté une maison, et dès le premier week-end, mon mari m'a dit: « Je ne peux plus faire ce travail. » Nous avons ensuite dû déménager sur la côte Est à nos propres frais pour que je puisse continuer de travailler au sein de la fonction publique.
À partir de ce moment, mon mari a travaillé trois ans dans un musée quelque part dans une base de réserve pour qu'il atteigne le seuil des 12 ans pour obtenir la pleine pension, au lieu de la demi-pension à laquelle il aurait eu droit avec ses 10 ans ou moins de service. À partir de là, les services de réadaptation professionnelle l'ont orienté vers un emploi dans la fonction publique, mais il n'était pas en mesure de s'acquitter de ses tâches. Ses blessures dans le bas du corps l'empêchaient d'effectuer toute tâche physique. Il ne pouvait pas supporter les espaces publics, il n'a pas pu s'adapter à la fonction publique et il n'a reçu aucune formation. Nous avons été laissés à nous-mêmes, et c'est moi qui ai pris l'initiative de l'aider à se former.
Lorsque mon conjoint a fini par être libéré en décembre 2014, nous n'avons pas reçu un sou. C'est seulement grâce au groupe de Debbie, le groupe VETS, que nous avons été capables de survivre à la période des Fêtes, et ce, malgré quatre enfants à nourrir, notre hypothèque, nos comptes et tous nos paiements. C'était cela, notre transition. Nous avons attendu que l'argent rentre pendant trois mois et demi.
Ah oui, et puis le...
:
Pour répondre à votre question au sujet de la langue, voici un élément qui s'applique à de nombreux vétérans en transition avec lesquels j'ai travaillé, dans un cadre professionnel ou simplement parce que ce sont des amis. Le Régime d’assurance-revenu militaire, le RARM, rembourse certains frais, y compris pour la formation, mais les cours de français ne sont pas couverts. Par conséquent, si quelqu'un entreprend ce programme, il ne peut en suivre un autre, et le RARM ne paie que pour un programme. C'est un obstacle.
Pour ce qui de savoir comment on arrive à contourner le processus, il faut encore une fois revenir au modèle. Comme les candidats doivent remplir un formulaire modèle Word pour le Sommaire des dossiers du personnel militaire, ou SDPM, chaque curriculum vitae commence par « J'ai des compétences dans tel ou tel domaine », mais cela ne donne pas une idée de ce que le SDPM signifie réellement en termes de transfert de compétences. Il faut avoir des antécédents militaires pour comprendre cela. Il n'y a pas d'équivalence.
Lorsque je vous ai entendue parler de concierge plus tôt, j'ai été époustouflée parce que ça n'existe pas.
Des voix: Oh, oh!
Mme Danielle Boutilier: Ça n'existe pas. Borden est peut-être un projet pilote, mais les gens font cela maintenant.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les deux témoins de leurs présentations aujourd'hui.
[Traduction]
J'aime revenir à l'anglais, comme vous le savez, pour parler de la fonction publique.
Je pense que cela montre bien que le numéro matricule n'est pas considéré comme un CIDP. Il y a une sorte de division... J'estime que c'est un énorme problème qu'on ne reconnaisse pas comme faisant partie de la fonction publique le groupe de fonctionnaires le plus important dont les membres servent le Canada à l'étranger au péril de leur vie.
[Français]
Je pense qu'il y a des trucs qui se retrouvent souvent dans vos témoignages et ceux que nous avons entendus auparavant, notamment le besoin de former les gestionnaires en prévision de l'emploi. Il semble y avoir un obstacle très important. Il faudrait peut-être aussi établir des cibles. On me disait tantôt que le département de l'Énergie aux États-Unis a une cible de 20 %, ce qui est quand même impressionnant. Je pense que c'est un point essentiel.
D'un autre point de vue, je vais vous demander de rêver un peu. On parle d'un plan de transition qui serait appliqué avant que les gens quittent la vie militaire pour les aider à faire face au choc culturel, au fait de ne plus voir sa vie gérée au quotidien, d'avoir à apprendre comment répondre lors d'une entrevue, et cela, au-delà des besoins médicaux ou autres. Il s'agirait d'avoir un plan de transition qui serait mis en oeuvre avant la démobilisation.
J'aimerais que vous rêviez pour nous pour voir ce que cela pourrait comprendre.
:
Je suis entièrement d'accord avec Mme Boutilier.
Comme elle l'a dit, beaucoup de formation est nécessaire pour entrer dans les Forces armées canadiennes et entreprendre une carrière. Toutefois, aussitôt que la personne reçoit un message d'avis disant qu'elle est à haut risque en matière de santé et qu'elle sera libérée pour des raisons médicales, elle doit attendre. Le gouvernement nous dit que l'attente devrait être de huit semaines, mais ce n'est le cas, elle est plutôt de huit mois.
À ce moment, la personne reçoit ce qu'on appelle des documents à communiquer et elle peut demander de rester dans les forces indéfiniment, ou pendant trois ans, ou demander sa libération.
Aussitôt que la décision est prise,
[Traduction]
... on facilite la libération très rapidement.
[Français]
On dit souvent « loin des yeux, loin du coeur ». Aussitôt qu'on déclare que la personne sera libérée pour des raisons médicales, la chaîne de commandement s'en fout. Excusez-moi d'employer ce mot, mais les supérieurs s'en foutent. Durant mes six derniers mois dans les forces armées, personne de ma chaîne de commandement n'a communiqué avec moi pour me demander si j'avais besoin de soutien ou d'aide. Je souligne que j'appartenais à une unité médicale et que j'exerce une profession médicale.
Personnellement, je pense donc que, comme l'a dit Mme Boutilier, peu importe que le cours de transition soit de 13 semaines ou de 6 mois, on devrait offrir une période de deux ou trois ans, pas nécessairement quatre ans, pour faciliter la libération.
La personne concernée pourrait rencontrer quelqu'un pour savoir comment obtenir une hypothèque, comment demander une carte d'assurance médicale. Si la personne a des formulaires à remplir, par exemple pour obtenir un crédit d'impôt pour personnes handicapées, il lui faut de l'aide. Comme infirmière praticienne, je vois beaucoup de vétérans qui ont besoin d'aide pour remplir des formulaires et c'est légitime.
Il faut aussi qu'ils apprennent comment se présenter lors d'entrevues, comment rédiger un curriculum vitae, que ce soit pour un emploi à la fonction publique, dans un hôpital, chez Enbridge ou ailleurs.
Il devrait y avoir une période de deux ou trois ans pour faciliter la libération, si la personne le souhaite. Actuellement, il n'y a rien.
Pour ce qui est du bilinguisme, une personne francophone ou anglophone devrait pouvoir apprendre une deuxième langue et que ce soit gratuit.
:
Merci, monsieur le président.
D'entrée de jeu, je vous remercie d'avoir servi le Canada et de l'appui que vous avez donné aux militaires.
J'ai écouté les témoignages attentivement et, vraiment, trois périodes principales en ressortent.
Premièrement, il y a la période suivant la réception d'un avis de libération du service, qui peut parfois durer deux ans ou six mois. Les témoins ont indiqué qu'aucun plan de transition n'est en place. Néanmoins, ils ont fait des recommandations que les analystes seraient certainement en mesure de documenter. Après l'avis de libération, le militaire reçoit d'autres documents, mais encore là, rien n'est prévu. Par ailleurs, Mme Boutilier a dit que son mari avait obtenu un emploi, mais que, comme il ne pouvait pas s'acquitter de ses tâches, il a dû faire marche arrière et chercher une solution de rechange.
La seconde période correspond à la transition à un emploi et au genre de soutien qui devrait être donné à ce moment-là. Une fois qu'il est libéré et qu'il cherche à faire une transition vers un nouvel emploi, de quel genre de soutien le militaire a-t-il besoin? Il faut mettre en place un plan de transition à l'emploi. Il s'agit davantage d'un plan de soutien que d'un plan de transition.
Pouvez-vous faire quelques recommandations pour ces deux périodes, comme je les appelle?
:
Lorsque Adam a été blessé en Afghanistan en 2009, il était l'un des premiers des provinces de l'Atlantique à rentrer au pays blessé. Après nous, on a affecté à ces dossiers un officier de liaison avec les familles, et publié des petits aide-mémoires.
Nous avons reçu divers types d'appuis pour aider Adam à réintégrer son unité. Si on offrait exactement le même genre de soutien et qu'on chargeait un officier de liaison de guider les militaires libérés vers une nouvelle carrière... Ne serait-ce que pour vérifier si tout va bien. Il faut éviter que des représentants de compagnies d'assurance, comme Manulife ou le Régime d’assurance-revenu militaire, exercent des pressions, notamment en demandant au militaire combien d'heures il travaille. La surveillance exercée par les assureurs doit cesser. Le militaire doit rencontrer un gestionnaire de carrière ou un officier de liaison avec les familles — des professionnels dont les services sont disponibles — pour se faire expliquer le processus et pour qu'on voie si tout se passe bien. Si les choses ne se passent pas bien, il faut alors songer à la transition et aider le militaire à remplir les documents relatifs aux indemnités d'invalidité.
J'ai pu aider Adam uniquement parce que je suis instruite. J'évolue dans ce domaine. Je suis habituée aux documents. Je suis officier de logistique. Adam n'aurait pas pu se débrouiller tout seul. Lorsque j'ai mentionné qu'il devait faire une demande de pension d'invalidité, c'était comme si je l'avais frappé. Il lui a fallu six mois, une bouteille de pilules, un 40 onces d'alcool et une tentative de suicide, avant qu'il s'en remette. Bref, le gouvernement a de toute évidence failli à la tâche.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames, soyez les bienvenues à votre Chambre des communes.
Votre français est plus qu'excellent. Tout à l'heure, vous avez dénoncé à juste titre que les militaires n'ont pas accès à des cours de formation dans la deuxième langue, que ce soit l'anglais ou le français. Cela ne s'applique pas à vous, parce que vous maîtrisez parfaitement les deux langues. Je vous en félicite et vous en remercie. Malheureusement, vous allez manquer l'invitation que je voulais vous faire de venir à Valcartier, qui n'est pas très loin de ma circonscription, où 99,9 % des gens ont le français pour langue maternelle, bien entendu.
Les propos que vous avez échangés avec ma collègue Mme Laverdière sont très intéressants. S'il y a quelque chose que nous devons retenir de votre témoignage, c'est cela. Il faut préparer les militaires six mois, un an ou deux ans avant leur sortie des forces armées en leur donnant des formations. Vous avez déjà dégagé quelques pistes, par exemple, comment gérer un budget personnel, une hypothèque, un compte ou comment faire des chèques, comment trouver un médecin de famille et une vie de quartier, en somme, revenir à la vie civile.
D'aucuns pourraient dire que ces choses devraient être enseignées à l'école secondaire, mais c'est autre chose. Nous sommes au fédéral et ce qui se passe dans les écoles ne nous regarde pas. La tentation est forte parfois, mais nous ne jouerons pas au gérant d'estrade à cet égard.
Vous avez dit tout à l'heure quelque chose qui m'a intrigué. Quand on atteint le grade de major, on peut avoir accès à un cours de français intensif ou d'anglais intensif. Les officiers, eux, ont-ils accès à une formation avant de quitter la vie militaire?
:
La situation était la même pour un soldat ou un caporal. Il n'y avait pas vraiment de processus. On mettait beaucoup de pression sur les militaires à qui on donnait une liste de vérification et on insistait pour qu'elle soit complétée à une date précise. Personne ne nous aidait.
J'ai eu une intervention chirurgicale à la hanche et je prends encore des médicaments, des opioïdes. Il fallait que je monte moi-même mon équipement du sous-sol au rez-de-chaussée de ma maison, que je le mette dans mon auto et que je le sorte de mon auto rendue au lieu d'approvisionnement.
[Traduction]
Rien n'est vraiment en place. Une grande part de responsabilité incombe au militaire concerné. Comprenez-moi bien. Il va sans dire que le militaire doit assumer sa part de responsabilité. Cependant, certains sont tellement affectés physiquement ou psychologiquement, qu'ils en sont incapables.
Personnellement, j'ai dû subir une chirurgie à la hanche. On m'a prescrit des médicaments sur ordonnance, ce qui était tout à fait approprié. Cependant, nous savons tous qu'il faut être extrêmement prudent particulièrement avec les opioïdes. J'étais essentiellement médicamentée et simplement mise de côté. Heureusement, comme mon médecin de famille ne m'avait jamais enlevée de sa liste de patients, lorsque je suis allée la consulter 15 ans plus tard, elle s'est exclamée « Qu'est-ce qu'ils ont fait? ». Elle tente maintenant de remettre les morceaux en place et, heureusement, je suis nettement mieux sur les plans physique et psychologique que lorsque j'ai été libérée.
Je tiens également à souligner qu'une libération pour raisons médicales porte toujours un coup à l'ego de la personne visée. Dans les forces armées, les gens sont entraînés à ne jamais montrer de faiblesse. Il faut continuer en dépit de la douleur. Lorsqu'un militaire est libéré pour raisons médicales, il est traité différemment tant par ses pairs que par la chaîne de commandement. Dans mon cas, comme dans celui de bien d'autres, c'était tout simplement loin des yeux, loin du coeur. Les autorités militaires à tous les niveaux ont failli à cet égard.
:
Normalement, le rang est très élevé.
[Traduction]
Ce sont généralement des adjudants qui sont en charge et des caporaux qui font le travail. Lorsqu'on s'adresse à un adjudant, on répond à toutes les questions par « oui mon adjudant » ou « non mon adjudant ». Si un militaire a un problème d'hypothèque ou de finances familiales, il n'en fait même pas mention à l'adjudant.
Une approche mixte serait idéale parce qu'il est souhaitable de traiter avec une personne qui connaît les forces armées. Dans le cas des blessures liées au stress opérationnel où la réadaptation dans le cadre du SSBSO se fait avec des collègues, le personnel est formé pour soutenir les pairs.
La même approche fonctionnerait. Cependant, il faut également des civils, parce que les militaires sont beaucoup plus à l'aise s'il n'y a pas de hiérarchie à respecter.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous les deux de votre présence et de continuer à servir le Canada.
Nous examinons plus précisément l'embauche de vétérans dans la fonction publique, mais je pense que les témoignages d'aujourd'hui ont clairement fait ressortir que la transition à la vie civile constitue le problème de fond pour les gens qui quittent le secteur militaire. L'emploi ne constitue qu'un aspect de la transition.
Dans ma circonscription, Newmarket—Aurora, je me suis récemment lié d'amitié avec un vétéran de l'Afghanistan. Il a fréquenté la même école secondaire que moi, mais bien des années plus tard.
Il a été libéré parce qu'il souffrait de troubles de stress post-traumatique. Il a fallu 18 mois avant que le syndrome ne soit diagnostiqué. Comme bien des gens dans une telle situation, il s'est tourné vers l'automédication. Il a eu des difficultés. Sa vie s'est pratiquement écroulée. Il va sans dire que la situation était stressante pour son épouse et sa famille. Il est allé chercher de l'aide de son propre chef et il a mis sur pied une organisation qui s'appelle Cadence Health and Wellness, située à Newmarket.
C'est grâce à cette organisation que je l'ai connu. J'étais présent lors de l'inauguration et nous avons immédiatement sympathisé. Comme nous avions fréquenté la même école secondaire, nous avions un lien dès le départ. Cependant, il a fallu un certain temps pour que notre amitié croisse et pour qu'il s'ouvre à moi. Depuis, nous avons des conversations enrichissantes. Cet homme a une vision formidable de ce que son organisation peut faire pour les vétérans — maintenant, il accueille également les premiers intervenants — en leur offrant l'aide dont ils ont besoin, notamment par le soutien entre pairs et la formation, et en les aidant à réintégrer la vie civile. C'est vraiment un visionnaire. Il a une vision ambitieuse de l'avenir de son organisation, et je sais que ce rêve deviendra réalité. Cet homme est engagé et dynamique.
Cette amitié a été révélatrice pour moi, car je ne connaissais pas vraiment de près les gens des forces armées; je n'avais rencontré que quelques militaires ici et là à l'occasion. Comme je suis près de Borden, qui se trouve dans ma circonscription, je connais un peu cette base. J'avais l'habitude de jouer au rugby et au soccer contre les gars de certaines troupes de passage de l'étranger. Je connais donc la base Borden.
Les défis sont inimaginables. Je crois que la santé psychologique sera l'un des facteurs les plus déterminants pour savoir si quelqu'un peut réussir la transition à la vie civile. Il faut reconnaître que les problèmes psychologiques sont aussi réels et aussi courants que les autres problèmes de santé. En tant que société, il faut trouver une façon de s'attaquer à ces problèmes avant de pouvoir aider les vétérans à faire la transition et à se trouver un emploi.
Il va sans dire qu'un bon emploi, un but et une mission dans la vie sont des facteurs clés pour la santé mentale. Cependant, si on ne diagnostique pas les problèmes et si on ne les traite pas, l'emploi devient un élément secondaire. Bien des vétérans ne sont même pas en mesure d'occuper un emploi. Ils sont dans une situation de vie où il n'est probablement même pas sain pour eux d'occuper un emploi.
J'apprécie votre témoignage. Je n'avais pas l'intention de faire une critique si sévère. Quoi qu'il en soit, ce que vous faites — et ce que fait mon ami à Newmarket — rend un service extraordinaire au Canada. Je tiens à vous en remercier.
Je vous laisse faire les observations que vous estimez pertinentes avant que le président...
Je ne peux donner que mon point de vue, mais j'en suis ravie et je vous remercie beaucoup de m'avoir permis de témoigner et de parler ouvertement de mon expérience personnelle. J'ai été soldat et officier. Je serai très franche. À la télévision, on voit souvent les députés qui se querellent, comme dans les grandes familles. Souvent, nous avons l'impression d'être considérés comme quantité négligeable et que personne n'entend notre détresse. Personne ne comprend vraiment notre situation.
Je souligne humblement que bon nombre d'entre vous discutez avec des hauts gradés, notamment des colonels et des généraux, mais que bien souvent ces derniers sont tellement déconnectés de la réalité des troupes sur le terrain qu'ils ne savent pas ou ne comprennent pas vraiment la situation. Un colonel ou un général gagne un très bon salaire et n'a pas à se préoccuper de payer l'hypothèque comme un simple soldat ou un caporal.
Je ne peux pas parler de ce qu'a vécu Danielle, mais moi, j'ai dû attendre quatre mois avant de recevoir un chèque. Il faut puiser dans ses économies qui proviennent d'une indemnité d'invalidité. Parfois, des gens de la famille prêtent de l'argent et, parfois, on ne fait pas remplacer les freins de sa voiture même s'il le faudrait.
:
Je vous remercie encore de vos explications.
Revenons à l'embauchage d'anciens combattants dans la fonction publique. À votre avis, l'idéal, ce serait quoi?
Il semblerait qu'il existe un service de conciergerie où, à l'inscription, le statut prioritaire est reconnu d'office. Quelqu'un se charge de vous guider. Selon moi, ce service devrait être proposé six mois avant qu'un soldat quitte le service militaire, malgré l'excès de paperasse en cause. C'est comme se faire dire: « Voici ce qui est offert; préparez-vous en conséquence. »
D'après votre expérience, quel serait l'idéal pour obtenir un poste non pas de chercheuse, mais de fonctionnaire ordinaire comme il y en a une multitude à pourvoir à Ottawa?
:
Nous devons nous en tenir là pour l'instant.
Chers collègues, à titre d'information, la sonnerie retentira à compter de 17 h 30, mais avons largement assez de temps pour une autre intervention de cinq minutes.
Pour des raisons hors de sa volonté, M. Blaikie est arrivé un peu en retard. S'il y a consentement unanime, nous pourrions prolonger la séance lorsque la sonnerie retentira afin de lui permettre de faire une dernière intervention, de trois minutes.
Merci beaucoup.
Madame Yip, vous disposez de cinq minutes. Je vous en prie.
J'adore votre idée: avoir un fonctionnaire sur chaque base pour accompagner les militaires tout au long du processus. Il faut considérer cette recommandation très sérieusement, car elle est logique. Il n'y a pas des centaines de milliers de bases au Canada. J'ignore combien il y en a; disons 100, et encore. Si l'objectif consiste effectivement à faciliter la transition de la vie militaire à la vie civile, ce serait logique. Si c'est précisément ainsi que nous entendons aider les vétérans à réussir leur transition, c'est avec joie que nous devrions nous empresser de débloquer des fonds.
C'est logique. C'est le meilleur moyen de faire le lien entre les connaissances des fonctionnaires et celles des militaires afin de voir où elles concordent.
J'ignore s'il faudrait synthétiser tout cela strictement au moyen d'une liste à points ou de quelque chose du genre, ou s'il s'agit simplement d'une idée générale que nous pourrions tenter de mettre au clair, peut-être avec des analystes, mais je trouve que c'est une idée fantastique. C'est sans doute l'une des meilleures recommandations pour aider les militaires à faire la transition à la vie civile, sans oublier les personnes qui ont une blessure physique ou morale liée au service et qui ont aussi besoin de beaucoup d'aide pour faire la transition. Il ne s'agit pas simplement de rédiger un CV ou de remplir une demande: il faut aussi être assez bien portant pour quitter les forces. Il s'agit d'un autre défi de taille.
C'était une observation plus qu'une question en tant que telle, mais j'adore l'idée de nommer un fonctionnaire sur chaque base pour aider les militaires à faire la transition à la vie civile.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également les témoins, autant des services qu'ils ont rendus au pays que de leur présence parmi nous. Je vous sais gré de nous avoir fourni vos conseils sans détour, en toute franchise, sur la façon d'améliorer les choses au départ de la vie militaire.
Ma question se rapporte au SDPM.
Sauriez-vous me dire, selon ce que vous savez de la fonction publique, s'il existe une liste comparative des cours ou des qualités? Serait-il possible aux anciens combattants qui quittent les Forces armées canadiennes et qui aimeraient postuler un emploi au sein de la fonction publique — j'imagine que ce n'est pas tout le monde qui veut se recycler comme fonctionnaire — de prendre ce document et de... Y a-t-il une espèce de liste d'équivalences pour la fonction publique que l'on pourrait utiliser au moment de soumettre une demande d'emploi au lieu d'obliger tous les gestionnaires responsables de l'embauche à comprendre le jargon militaire? Serait-il possible d'avoir un document qui répondrait aux besoins des gestionnaires responsables de l'embauche qui ignorent ces choses-là, un document qui pourrait servir pour de nombreuses demandes?
:
Je tiens à remercier les témoins chaleureusement. Nous étions très heureux de vous accueillir, et vos témoignages ont été extrêmement informatifs et utiles.
Comme je l'ai mentionné à notre premier groupe de témoins, si vous avez des renseignements supplémentaires qui pourraient, selon vous, nous être utiles pour notre étude, par exemple des recommandations que vous avez déjà mentionnées, n'hésitez pas à les faire parvenir à notre greffier. Cela nous aidera à rédiger notre rapport final.
Encore une fois, je vous remercie non seulement d'avoir comparu aujourd'hui, mais aussi d'avoir servi notre pays.
Mesdames et messieurs, la séance est levée.