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Chers collègues, tous les membres du Comité ne sont pas encore arrivés, mais je crois qu'ils sont en chemin. Le quorum est atteint, je vais donc commencer.
Pendant la première heure, aujourd'hui, M. William Robson, président-directeur général de l'Institut C.D. Howe, nous présentera un exposé et répondra à nos questions sur les régimes de retraite du secteur public.
Monsieur Robson, je crois que vous connaissez le mode de fonctionnement des comités. Nous écouterons votre exposé, qui durera environ 10 minutes ou un peu moins, si je ne m'abuse. Puis, nous passerons directement aux questions des membres du Comité.
Voilà en guise de bref préambule, monsieur Robson, vous avez la parole.
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Je vous remercie de votre invitation à comparaître devant le Comité aujourd'hui. Je ne sais pas si mon exposé sera divertissant, mais j'espère qu'il sera instructif. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Même si vous le savez sans doute déjà, je souligne que les pensions du gouvernement fédéral constituent un élément majeur de la rémunération de ses employés, y compris celle des députés. Il est important d'avoir des mesures représentatives de la valeur de cette rémunération. C'est essentiel pour assurer une rémunération juste, payer convenablement les employés fédéraux pour le travail qu'ils font et en donner pour leur argent aux contribuables canadiens. Il est aussi important de mesurer de manière représentative ces promesses pour financer celles-ci adéquatement et répartir équitablement leur coût au fil des années.
Nous n'avons pas à nous reporter très loin pour voir à quel point il est important de bien faire les choses ou, à l'inverse, pour voir les problèmes encourus quand on ne s'en donne pas la peine. Au cours des dernières années, les États-Unis nous ont donné quelques exemples à ne pas suivre. Les députés savent sûrement que des municipalités en Californie ont fait faillite. Sans compter Detroit, qui est à deux pas de la frontière canadienne. Porto Rico a fait les manchettes récemment pour des raisons semblables. Toutes ces administrations ont eu beaucoup de mal à trouver les fonds pour payer les pensions de leurs employés; elles ont découvert que le coût de ces promesses est beaucoup plus élevé que prévu.
Dans ces affaires, les administrations avaient en commun le sous-financement de leurs régimes de pension. Ce sous-financement découlait principalement de l'emploi de taux d'actualisation beaucoup trop élevés pour actualiser les futurs paiements. En agissant ainsi, les administrations pouvaient réduire le passif du bilan et justifier des taux de contribution qui étaient bien trop faibles.
Cette façon de faire plaît aux gestionnaires parce que tout semble marcher comme sur des roulettes. Elle plaît aux représentants élus parce que les impôts et les emprunts peuvent rester bas. Elle plaît aux travailleurs, ou du moins à leurs représentants, parce que les régimes de pensions semblent sûrs et qu'il reste plus d'argent pour la rémunération immédiate.
Cette façon de faire plaît à tout le monde jusqu'au jour où la combine à la Ponzi — l'utilisation d'entrées d'argent plutôt que du rendement du capital investi pour faire les paiements — est exposée au grand jour. Le jour où il n'y a plus assez d'argent pour faire les paiements, cette façon de faire ne plaît plus à personne.
Posons alors la question évidente: une telle situation pourrait-elle survenir au Canada? Heureusement, bon nombre de régimes de pensions publics au Canada diffèrent de ceux qui ont entraîné des problèmes aux États-Unis. Les régimes de pension à risque partagé du secteur public ne sont pas tous également prospères, mais, dans la plupart des provinces, ils comportent deux caractéristiques fondamentales. Ces régimes ont un taux d'actualisation économiquement réaliste et représentatif pour prévoir les paiements à verser dans l'avenir. Ils offrent aussi de la souplesse sur le plan des contributions et des prestations afin de s'adapter si les rapports financiers indiquent qu'il vaudrait mieux le faire.
Malheureusement, les régimes de pension du gouvernement fédéral ne sont pas comme ceux-là. Ce sont des régimes à prestations déterminées pur et dur. Ils sont relativement généreux par rapport aux autres régimes de pensions du secteur public au Canada et, manifestement, aux régimes du secteur privé. Les taux d'actualisation dans les rapports financiers qui nous sont fournis sur ces régimes sont trop élevés. Le passif de leur bilan est trop faible. Leur coût permanent, qui est indiqué dans l'état des résultats d'exploitation du budget du gouvernement fédéral, est trop faible. Ces pensions, en bref, ont une plus grande valeur pour leurs bénéficiaires que ce que les états financiers du gouvernement fédéral indiquent et elles sont proportionnellement plus coûteuses pour les contribuables.
J'ajouterais, puisque vous êtes des députés fédéraux, que vos régimes de pensions posent un problème particulier. Ils ne sont absolument pas financés. Il serait pardonnable que vous ne le sachiez pas. Il faut lire les rapports de l'actuaire en chef sur le sujet très attentivement pour le découvrir. Les actifs dans ces régimes sont simplement des éléments de tenue de compte. Les contributions au régime n'achètent aucun actif. Les prestations versées sont financées par des recettes courantes et des emprunts. Le coût des paiements dans l'avenir sera plus élevé que ce que vous voyez dans les états financiers.
Ce n'est pas le cas des gros régimes des employés de la fonction publique, des Forces armées canadiennes et de la GRC. Ces régimes sont financés en partie. Les contributions depuis l'an 2000 ont acheté des actifs, mais les obligations d'avant 2000 dans ces régimes ne sont pas du tout financées. La valeur de toutes les obligations, celles d'avant et celles d'après 2000, est sous-estimée en raison de taux d'actualisation excessifs.
Pourquoi suis-je d'avis que les taux d'actualisation sont excessifs? Les promesses de payer ces pensions sont inconditionnelles. Elles sont pareilles à toute autre dette du gouvernement fédéral assortie d'une promesse inconditionnelle de payer. Elles sont indexées sur l'inflation; il existe donc un comparateur pour ce genre d'obligation. Elles s'apparentent à une obligation à rendement réel du gouvernement fédéral.
Si j'étais fonctionnaire et qu'une personne m'offrait d'acheter ma pension, j'utiliserais le taux d'actualisation qui est appliqué aux obligations à rendement réel du gouvernement fédéral pour en déterminer la valeur. Si j'étais un contribuable qui réfléchit au montant qu'il doit épargner, parce qu'un jour, il me faudra payer des impôts pour payer ces pensions, je ferais la même chose. Je m'arrêterais aux actifs qui correspondent au passif, et le rendement de 0,7 % serait le rendement réel applicable. Voilà le taux de capitalisation auquel je m'attendrais.
Le problème tient au fait que le passif au titre du régime de retraite du gouvernement fédéral est actualisé à un taux d'actualisation beaucoup plus élevé. Je pourrai en parler en répondant aux questions. Cette pratique était courante dans de nombreux régimes de retraite, mais elle l'est de moins en moins en raison de certains problèmes qui sont apparus avec les régimes de pensions.
Si nous prenons un taux d'actualisation économiquement représentatif et si nous considérons l'obligation de rendement réel comme étant le point de référence à utiliser pour calculer la valeur des pensions du gouvernement fédéral, nous voyons que l'obligation relative aux pensions et la dette nette du gouvernement fédéral ont été sous-estimées à la fin du dernier exercice par environ 100 milliards de dollars, soit 96 milliards de dollars.
Pour mettre les choses en perspective pour l'avenir, de récentes réformes ont augmenté la part des participants dans le financement de ces régimes — y compris les régimes des députés, si l'on pense au taux de contribution — pour que la contribution soit plus ou moins à parts égales. Il y a toutefois un problème avec cette formule. Elle repose sur un coût permanent qui est maintenu artificiellement bas en raison des taux d'actualisation élevés utilisés pour estimer la valeur de ces régimes.
Même si la contribution des employés est à parts égales, la véritable division économiquement représentative des coûts ne se fera pas en parts égales. Le contribuable devra tout de même en absorber la majeure partie. Quand je parle du « contribuable », je veux parler du futur contribuable plutôt que du contribuable actuel. Nous nous réservons des ennuis pour l'avenir.
Faire rapport de manière plus économiquement représentative sur ces régimes, sur la valeur des prestations et sur leur coût pour les contribuables serait à mon avis un pas en avant très positif, qui aiderait le gouvernement fédéral à réfléchir à ses obligations continues et à la façon de financer celles-ci.
Avant de conclure, j'ajouterais en passant que le Conseil sur la comptabilité dans le secteur public tient actuellement des consultations au sujet de questions clés qui concerne à la fois le moment où il faut tenir compte de changements dans la valeur des éléments d'actifs et de passif du régime et le taux d'actualisation utilisé. Des changements pourraient être apportés aux normes comptables du secteur public qui inciteraient ou obligeraient le gouvernement fédéral à aller dans ce sens. Que cela se produise ou non, le gouvernement fédéral gagnerait à examiner ces choses en fonction d'une base économiquement représentative. Je pense que s'il le faisait, les régimes de pensions des employés fédéraux seraient mieux financés, y compris ceux des députés. De plus, les contribuables seraient ainsi protégés de risques que peu d'entre eux savent qu'ils courent et de coûts qu'ils ne savent pas qu'ils assument actuellement.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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J'applaudis les gouvernements précédents au Canada d'avoir réglé certains des problèmes des régimes de pensions publics comme ils l'ont fait. Il y a eu les réformes des régimes de pensions du Canada et du Québec qui touchent la majeure partie de la population, mais, en 2000, il y a aussi eu des changements majeurs qui ont été apportés aux régimes du gouvernement fédéral.
Depuis, une partie des contributions au régime sont versées dans des actifs. En réalité, il y a maintenant deux comptes dans ces gros régimes. Si vous consultez les rapports actuariels, vous verrez qu'ils sont segmentés. Il y a les obligations d'avant 2000 et les régimes d'après 2000. Les régimes d'avant 2000 ont des éléments d'actif et de passif. C'est louable.
Le chemin parcouru par les grands régimes du secteur public des grandes provinces montre qu'il est possible d'aller encore beaucoup plus loin. Le Régime de retraite des enseignantes et enseignants de l'Ontario est l'un des mieux connus. Il fut l'un des premiers. Il y a de nombreux régimes à frais partagés au Québec, en Colombie-Britannique et en Alberta, et une approche différente dans certaines provinces des Maritimes.
Règle générale, ces régimes se caractérisent par l'adoption de taux d'actualisation très conservateurs par rapport aux normes des régimes du secteur public, surtout comparativement à la situation dont j'ai parlé aux États-Unis. Il y a là, en partie, une volonté d'être tout simplement conservateur. Si vous considérez que votre obligation relative aux pensions est de payer les pensions — si c'est là votre principal objectif —, vous percevrez différemment les types d'actifs que vous détiendrez. Vous privilégierez les obligations. Vous ne courez pas seulement après le rendement puisque vous devez avoir les fonds en main.
Voilà pourquoi certains grands régimes du secteur public optent pour des taux d'actualisation plus conservateurs. Ils sont beaucoup plus axés sur le coefficient de capitalisation, comme je l'ai dit, car l'objectif est de payer ces prestations à échéance.
Dans le cas du gouvernement fédéral, il y a eu un sentiment de... Je ne dirais pas que c'est parce qu'il contrôle la banque centrale, car c'est un peu controversé. Il s'agit plutôt d'un a priori qu'il y aura toujours des recettes fiscales et des ressources pour payer les pensions. Il semblait peut-être moins difficile de payer la pension promise à partir du régime.
Toujours est-il que le fédéral utilise encore des taux d'actualisation fondés sur l'expérience du passé, sur une hypothèse de rendement des actifs. Pour moi, c'est insensé. Si une partie du régime n'est pas capitalisé — et une part du régime ne l'est aucunement tandis que l'autre est sous-capitalisé —, il n'y a pas d'actif permettant de générer un rendement. Il faut vraiment réfléchir à la nature de l'obligation. C'est ainsi qu'il faut l'envisager.
Vous avez posé une question sur les différentes méthodes. Je soulignerai simplement à quel point le Canada a fait preuve d'innovation et a obtenu de bons résultats jusqu'ici avec ces grands régimes du secteur public. Ils sont reconnus sur la scène internationale. Le gouvernement fédéral gagnerait à reproduire une partie de ce qui se fait à l'échelle provinciale.
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Les députés sont tout pardonnés — advenant qu'il me revienne de pardonner quelque chose à qui que ce soit — de ne pas savoir que ces régimes ne sont pas capitalisés, car ils ont l'apparence d'un régime par capitalisation. Comme vous l'avez dit, vous versez des contributions, et si vous examinez les états financiers du régime, il semble y avoir un actif qui contrebalance le passif actuariel fondé sur l'espérance de vie des députés, le montant du remplacement du revenu et ainsi de suite.
Fait déconcertant, le régime des députés est encore à l'image des régimes de la fonction publique, de la GRC et des Forces armées canadiennes avant l'an 2000. Les contributions ne servent pas à acheter des actifs. Elles servent tout bonnement à alimenter le flux de trésorerie. Les pensions sont payées à partir du flux de trésorerie actuel du gouvernement.
C'est malheureux. De nos jours, les gens aiment bien dire, à juste titre, que le ton doit être donné par les dirigeants. Il est embarrassant que les députés fédéraux ne participent pas à un régime de pensions adéquatement capitalisé. Il s'agit aussi d'un bon exemple du problème qui se pose quand les états financiers présentent des données d'une manière incompréhensible pour les gens ordinaires — qui ne sont ni spécialistes ni actuaires — qui veulent savoir si leur pension est correctement capitalisée ou pour le contribuable qui examine les finances du gouvernement fédéral afin de savoir s'il devra payer la note pour quelque chose dont il n'avait pas connaissance.
Je vous donne une brève explication au cas où vous voudriez approfondir la question. L'actuaire en chef présente des rapports sur le régime de pensions des députés fédéraux. Il y a une ligne qui dit qu'il n'y a pas de caisse distincte pour ces régimes. Les comptes sont simplement des inscriptions de tenue de compte, et j'ai le regret de vous dire qu'il n'y a pas d'argent dans ceux-ci.
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Je ne dirais pas que c'est un secret connu de tous. La comptabilité concernant les régimes de retraite — je suis d'ailleurs ravi d'en parler à votre comité — n'a pas été un sujet extrêmement populaire par le passé, parce que l'évaluation de paiements qui ne seront versés que dans un avenir relativement lointain est franchement difficile. Voilà pourquoi c'est matière à débats.
Pour trouver un type d'analyse semblable, je vous inviterais à vous tourner du côté des États-Unis. Il y a des centres d'études et de recherches là-bas — dont certains centres universitaires — qui s'intéressent à ce problème au niveau infranational, surtout aux États-Unis. J'en ai déjà parlé, je ne m'y attarderai donc pas, mais les problèmes là-bas sont pires que ceux au Canada, car les taux d'actualisation sont très élevés et bon nombre de régimes sont extrêmement fragiles. Voilà pourquoi ces problèmes existent.
Ici, le débat tourne autour de l'évaluation du passif. Les personnes qui ont étudié les régimes des États-Unis et qui ont déclaré qu'il y avait un problème, parce que le pays minimise son passif, font valoir la même chose que nous. La valeur de la promesse, y compris celle que nous faisons aux députés pendant qu'ils travaillent, est inconditionnelle. Il n'y a aucune souplesse quant aux prestations si la capitalisation est moins bonne que prévu. En ce sens, ces régimes ne sont pas comme le Régime de retraite des enseignantes et enseignants de l'Ontario ou certains des régimes de pensions à risque partagé.
Nous tendons aussi à actualiser à des taux d'intérêt hypothétiques. Ces taux sont moins élevés au Canada qu'aux États-Unis, mais il faut véritablement s'interroger sur ce qui peut bien pousser à choisir tout bonnement un chiffre quand on a une obligation qui est clairement comparable à la promesse faite pour les autres obligations du gouvernement fédéral.
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Oui, c'est une ancienne pratique. Auparavant, c'était la norme non seulement dans le secteur public, mais aussi dans le secteur privé.
Ceux parmi vous qui ont été aux prises, en tant que législateurs ou à l'intérieur d'autres fonctions, avec des problèmes liés à des pensions savent qu'en raison de faillites retentissantes, au Canada et ailleurs, les organismes de réglementation des pensions ont commencé à voir d'un mauvais oeil l'utilisation de taux d'actualisation élevés. J'ai parlé tout à l'heure des avantages que présentent des taux d'actualisation élevés pour les deux parties autour de la table, pour la direction et le syndicat. À court terme, c'est attrayant. Le régime à l'air bien capitalisé. La direction, si vous êtes dans le secteur privé, peut verser des dividendes plus élevés ou une rémunération plus élevée. Les travailleurs peuvent avoir une rémunération plus élevée. Si vous êtes un gouvernement, vous affichez ce qui semble être un meilleur résultat. Toutefois, c'est un effet trompeur qui découle du choix d'un taux d'actualisation élevé.
Si le taux d'actualisation était abaissé pour s'approcher davantage du taux qui me semble être approprié, sur le plan de la valeur de la promesse à l'employé et des obligations qui attendent le contribuable — ce que nous aurions à faire, en tant qu'individu pour avoir le même genre de revenu — nous verrions que la valeur de ces promesses est plus grande que ce que nous avons affirmé.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais éviter autant que possible de m'égarer dans un dossier aussi complexe.
Je vais poser des questions fondamentales, auxquelles, me semble-t-il, les Canadiens et les travailleurs souhaitent obtenir des réponses.
Ce qui est primordial dans un régime de retraite à prestations déterminées, c'est l'obligation ou le contrat inconditionnel qui lie l'employeur à l'employé. Les participants apprécient énormément ces régimes. Je ne vais pas tenter ici de déterminer si ces régimes sont bons ou mauvais.
Étant donné ce que vous avez dit et le fait que le taux d'actualisation ne repose pas sur des cotisations suffisantes, est-il possible de faire en sorte que le rendement des régimes de retraite à prestations déterminées soit plus réaliste, ou pensez-vous que les régimes de ce genre sont appelés à disparaître? Ces régimes existent-ils uniquement au sein des gouvernements parce que ceux-ci ne peuvent pas faire faillite?
J'essaie simplement de comprendre votre point de vue à ce sujet.
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La question fondamentale qu'il faut se poser au sujet de ces régimes de retraite est la suivante: souhaitons-nous que les prestations représentent une garantie absolument inconditionnelle? Évidemment, dans certaines circonstances — par exemple, la fin du monde —, il ne serait pas possible de mettre en oeuvre un régime de retraite. Cependant, si l'on fait abstraction des circonstances extrêmes, je pense qu'il faut se demander quels actifs il convient de détenir pour garantir solennellement aux participants au régime qu'ils recevront les prestations auxquelles ils ont cotisé.
Dans les régimes du secteur public en général, où il existe une certaine marge de manoeuvre sur le plan des prestations, je pense que la gouvernance conjointe est utile. Les responsables de bon nombre de ces régimes, y compris certains des plus récents, comme OPTrust, qui vise les membres du Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario, ont dit clairement aux cotisants que leur responsabilité consiste à verser leurs prestations de retraite. L'objectif consiste en partie à détourner l'attention des participants des taux de rendement des actifs, car ce n'est pas ce qui compte le plus. Les régimes de retraite sont tous différents les uns des autres. Les employés peuvent être jeunes ou moins jeunes, ou encore présenter des caractéristiques différentes. Il faut veiller à ce que les actifs soient suffisants pour remplir les obligations du régime.
Dans le cas des régimes de retraite à prestations déterminées, qui ne présentent absolument aucune marge de manoeuvre, il faudrait détenir des actifs ayant un risque très faible, comme les obligations à rendement réel du gouvernement fédéral. Or, les actifs à faible risque présentent un faible taux de rendement. Il faut donc faire l'acquisition d'un nombre très élevé d'actifs de ce genre pour garantir les prestations des régimes de retraite. Il en résulte des taux de cotisation élevés, ce qui rebute les gens. Ils disent que ces régimes semblent très coûteux. Ils ne pensent pas en termes d'épargne.
Je pense que la clé, c'est l'épargne. Pour pouvoir bénéficier d'une pension garantie, il faut épargner beaucoup d'argent. Toute personne ferait la même chose dans sa vie privée. Les gens sont rebutés par ce qui leur semble être un coût. Le taux d'actualisation est élevé pour que le régime apparaisse plus abordable. Toutefois, les actifs détenus dans le cadre du régime ne sont pas suffisants pour payer les prestations.
Je n'ai rien contre les régimes de retraite généreux. Je pense qu'il faut atteindre un équilibre entre la rémunération différée et la rémunération actuelle. Toutefois, je souhaiterais que, en général, les Canadiens puissent épargner davantage. Pour ce faire, ils doivent cotiser davantage. Pour les inciter à cotiser davantage, il faut parfois leur montrer le coût du régime de retraite et le montant qu'ils devraient contribuer. Il peut être assez étonnant de constater l'importance des montants, mais c'est bel et bien le cas si le rendement est faible. Si l'on souhaite bénéficier d'un régime de retraite véritablement garanti — qui s'apparente à une certitude absolue —, c'est ce qu'il faut faire. Il faut cotiser davantage.
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Nous n'avons pas fait le même genre d'analyse parce que, dans le cas d'un régime à risque partagé, la nature des attentes est différente.
Comme vous le savez peut-être, dans le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario, l'indexation est conditionnelle. Un des avantages d'un régime géré conjointement — et il existe bien d'autres exemples, outre le régime ontarien dont on vient de parler —, c'est que, comme les deux parties se trouvent à la table de négociation, il est possible de régler toute question excédant la conception initiale du régime. Les deux parties peuvent discuter de manière efficace de la façon de gérer le régime afin que son coût soit raisonnable et que les cotisants aient accès à un bon revenu de remplacement.
Nous avons analysé le régime de retraite du gouvernement fédéral dans le contexte des prestations inconditionnelles qu'il prévoit. Si l'on jette un coup d'oeil aux autres types de dettes fédérales... Si l'on jette un coup d'oeil à certains litiges aux États-Unis, où on cherche à déterminer qui a priorité, c'est-à-dire le créancier obligataire ou le retraité...
À première vue, il est logique de dire que ces attentes sont semblables à n'importe quelle créance prioritaire du gouvernement. On devrait les percevoir dans ce contexte. Les risques rattachés à une pension du gouvernement fédéral ou à la possibilité d'y être admissible sont semblables à ceux qu'assume un détenteur d'obligations du gouvernement fédéral. Il est logique de les placer dans la même catégorie.
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Que ce soit dans le cas des régimes à risque partagé ou des régimes à prestations cibles — la terminologie diffère —, il existe une certaine souplesse non seulement dans le taux de cotisation, mais aussi dans la formule de calcul des prestations. Il s'agit d'un modèle très prisé dans le secteur public canadien en général. En fait, ce modèle est bien connu dans le monde entier, en partie en raison des investissements qu'il permet de faire et aussi parce qu'il est conçu très intelligemment.
Une des difficultés que présente le modèle à prestations déterminées pur, que ce soit dans la fonction publique ou ailleurs, c'est qu'on incite les cotisants à penser qu'ils sont couverts et qu'il s'agit d'un bon régime. Ils ne sont pas aussi attentifs qu'ils devraient l'être. Leurs représentants ne sont peut-être pas aussi attentifs qu'ils devraient l'être à la façon dont se présentent les actifs et les passifs lorsqu'on les place côte à côte.
Les régimes à gouvernance conjointe sont beaucoup plus axés sur leur état de financement. Le régime est-il entièrement financé? Les administrateurs du Régime de retraite des hôpitaux de l'Ontario sont très fiers du fait que leur régime est financé à un peu plus de 100 %. Ils en vantent les mérites. Lorsqu'ils parlent aux cotisants ou aux responsables des relations patronales-syndicales, ils insistent sur le fait que les prestations de retraite sont garanties.
Je pense qu'il s'agit d'un modèle attrayant. Je recommande au gouvernement fédéral de l'examiner. Il ferait augmenter les taux de cotisation parce qu'il viserait davantage à établir un équilibre entre les actifs et les passifs. Je pense toutefois que tout le monde en sortirait gagnant. J'ai parlé du ton qu'il faut donner au sommet. Je pense qu'il serait bien que le gouvernement fédéral, les députés et les fonctionnaires, qui établissent bon nombre des règles qui touchent le reste de la population, suivent certaines des règles auxquelles le reste de la population est aussi tenu de se conformer.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Je tiens à saluer le président-directeur général de l'Institut C.D. Howe, M. William Robson, et à lui rendre hommage.
C'est un plaisir et un honneur de vous rencontrer, monsieur Robson.
[Traduction]
J'aimerais aborder un point concernant la génération du millénaire. Vous dites que c'est fou ce qui se passe en ce moment.
Moi aussi, j'ai déjà été jeune. À cette époque,
[Français]
les taux d'intérêt étaient à 23 % et le chômage chez les jeunes, à 25 %,
[Traduction]
ce qui n'est pas tout à fait le cas à l'heure actuelle. Par conséquent, chaque génération a ses propres défis à relever.
[Français]
Monsieur Robson, j'aimerais aborder avec vous deux points que vous avez soulevés plus tôt, en commençant par les fonds de pension des députés.
Je suis député depuis trois ans, mais je dois avouer que cette question ne m'intéressait pas beaucoup en tant que nouvel élu. Disons que ce n'est pas le premier sujet qui a attiré mon attention en arrivant. Bref, je viens d'apprendre que le passif de notre régime de retraite n'est pas capitalisé.
Quelles recommandations avez-vous à nous faire à cet égard? Selon vous, que devrions-nous faire?
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Je m'excuse de ne pas vous répondre en français. Votre patience serait mise à rude épreuve.
Pour répondre à votre dernière question, je pense que les réformes de l'an 2000 touchant la fonction publique, la GRC et les Forces canadiennes représentent un bon modèle de transition.
Pour ce qui est de votre première question, j'ai dit qu'il fallait accorder un droit acquis aux personnes qui sont déjà inscrites dans le système. De façon réaliste, c'est ce qu'il faut faire. Toutefois, si on recommence à zéro, il faut réfléchir au coût des attentes, fixer un taux de cotisation qui permettra de financer ces attentes et faire l'acquisition d'actifs qui ne relèvent pas du gouvernement fédéral et qui, le moment venu, permettront de payer les prestations de retraite.
Voici une déclaration que j'attribue à Barbara Zvan, du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario: « Un régime va coûter ce qu'il doit coûter; le taux d'actualisation concerne les personnes qui vont le payer. »
Si l'on choisit un taux d'actualisation élevé en pensant que l'époque où les taux d'intérêt étaient élevés reviendra, mais que cela ne se produit pas et que les taux d'intérêt restent bas, les employés plus âgés ne paieront pas autant qu'ils le devraient, alors que les jeunes devront assumer le fardeau. Si l'on choisit un taux d'actualisation bas, il est susceptible d'être assumé plus équitablement si les taux d'intérêt ne remontent pas.
Il faudrait que le régime de retraite des députés s'autofinance, comme c'est le cas pour les autres principaux régimes de retraite du secteur public. Je ne connais pas l'équivalent en français, mais j'ai parlé tout à l'heure du « ton au sommet ». Il serait très constructif que les députés agissent ainsi. Dans leurs discussions avec leurs concitoyens qui trouvent difficile d'épargner en vue de leur retraite, compte tenu du faible rendement des investissements, les députés partageraient vraiment leurs soucis, et non simplement en paroles. Ils feraient ainsi preuve de solidarité avec leurs concitoyens.
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J'ai mentionné tout à l'heure que, en général, les taux de cotisation des régimes de retraite du secteur public atteignent plus de 20 %. La plupart des Canadiens qui cotisent à un REER ou à un régime de retraite à cotisations déterminées ne peuvent épargner que 18 % de leurs revenus. Il s'agit de limites assez basses. On s'inquiète des effets de la hausse de ces taux sur la répartition du revenu. Toutefois, les cotisants aux régimes de retraite du secteur public épargnent plus d'argent, et je ne vois pas pourquoi les Canadiens en général ne seraient pas autorisés à faire de même.
Il conviendrait d'envisager la possibilité de fixer une limite à vie. Par exemple, on pourrait permettre à une personne à faible revenu qui devient prospère plus tard dans la vie ou à un immigrant qui ne peut pas faire les cotisations maximales au REER d'épargner de l'argent à un taux supérieur à celui permis à l'heure actuelle.
Je recommanderais aussi d'examiner la situation dans laquelle se trouvent les personnes qui, une fois à la retraite, commencent à puiser dans leurs épargnes. Les règles régissant les FERR exigent que les gens encaissent leurs épargnes assez rapidement. Les participants à un régime de retraite à prestations déterminées n'ont pas à s'inquiéter de cela, car ils sont censés recevoir des prestations jusqu'à leur décès. Toutefois, étant donné les retraits obligatoires, une personne qui participe à un régime de retraite à cotisations déterminées ou qui détient un REER est susceptible d'épuiser toutes ses épargnes de son vivant, surtout s'il s'agit d'une femme, puisque les femmes ont une espérance de vie meilleure que celle des hommes.
J'examinerais le montant que les gens peuvent épargner avant de commencer à puiser dans leurs économies et les règles qui régissent les retraits une fois qu'ils sont à la retraite. Les cotisants à un régime de retraite à prestations déterminées, comme celui du gouvernement fédéral, n'ont pas à se soucier de ces choses-là. Il s'agit toutefois d'enjeux très importants pour un Canadien qui cotise à un REER ou qui participe à un régime de retraite à cotisations déterminées.
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Je n'ai jamais aimé avoir une opinion différente de celle de l'actuaire en chef dans un dossier. J'estime que l'actuaire en chef fait du très bon travail et je me fie très souvent à ses rapports dans le cadre de mes fonctions. Je tiens à témoigner de mon respect envers l'actuaire en chef et son bureau.
Notre divergence d'opinions porte sur le taux d'actualisation qu'il convient d'utiliser. Dans le secteur public, on utilise habituellement un taux d'actualisation élevé en raison du rendement passé de certains actifs. Or, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une bonne façon d'envisager l'avenir. Il est obligatoire de mettre en garde toute personne qui souhaite faire un investissement. Dans cette mise en garde, l'organisme de réglementation signale que le rendement passé d'un investissement n'est pas garant de ses résultats futurs. Le même principe s'applique généralement à l'épargne-retraite. Il est vrai que, par le passé, on a pu constater des rendements largement supérieurs à ceux d'aujourd'hui. Toutefois, les rendements sont faibles depuis maintenant un bon bout de temps. Il est risqué de tenter de deviner ce que seront les rendements futurs. Les gens qui y tiennent absolument peuvent acheter des obligations. La valeur de ces obligations augmentera ou diminuera, corroborant ou infirmant ainsi les prévisions de leur détenteur. Cet argent lui appartient; il peut donc en faire ce qu'il veut.
Dans le cas d'un régime de retraite comme celui-ci, il existe un autre point de référence très clair. Comme j'en ai déjà parlé, je ne vais pas insister là-dessus. Il s'agit d'une garantie inconditionnelle du gouvernement fédéral. C'est comme dans le cas de toute autre dette contractée par le gouvernement fédéral. Lorsque nous effectuons des évaluations, nous tenons compte du travail réalisé par l'actuaire en chef. Nous ne remettons pas du tout en question ses hypothèses concernant l'emploi, l'inflation ou le taux d'augmentation du salaire des fonctionnaires fédéraux. La seule question au sujet de laquelle nous divergeons d'opinions, c'est le taux d'actualisation. Nous utilisons l'analyse de sensibilité fournie par l'actuaire en chef pour tenter de faire des ajustements. Je pense que nos ajustements sont prudents, puisque nous allons jusqu'à tenir compte du taux des obligations à rendement réel. Si nous avions accès à l'éventail complet des données dont dispose l'actuaire en chef, nos chiffres seraient peut-être encore pires, mais nous adoptons une approche prudente. La différence porte sur le taux d'actualisation. Nous obtenons 96 milliards de dollars lorsque nous ajustons à la baisse le taux d'actualisation.
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D'abord, je vais seulement répondre à un aspect de la question précédente.
La situation de financement du régime de pensions des députés ne laisse pas de place à l'interprétation. Il est indéniable que le régime n'est pas financé. C'est dommage que les rapports donnent l'impression qu'il l'est. Toutes les obligations qui découlent des régimes font partie de la dette publique. Aucun actif n'est détenu en contrepartie des obligations comme c'est le cas avec l'Office d'investissement des régimes de pensions du secteur public, qui détient des actifs réels.
En ce qui concerne le coût maximal qui pourrait être exigé, notre rapport contient des estimations du coût afférent du service qui s'appliquerait actuellement si des taux d'escompte plus bas étaient utilisés. La somme de 96 milliards de dollars représente les actions. C'est le montant qui apparaît sur le bilan. Si vous examinez les obligations annuelles accumulées, vous constaterez qu'elles comportent deux éléments. Il y a le coût permanent de la rémunération des fonctionnaires pour le travail qu'ils effectuent et il y a aussi les changements de valeur du régime. Cela tend à être très erratique.
Pour répondre brièvement à votre question — je ne vous donnerai pas de nombre précis, mais nous pourrons y revenir —, le montant serait plus élevé. En théorie, le régime est actuellement capitalisé à parts égales. Cependant, cette conclusion est fondée sur un coût afférent du service qui est actuellement trop bas en raison du taux d'escompte trop élevé. Si un taux d'escompte plus réaliste était utilisé, l'accumulation soutenue des prestations serait plus élevée, ce qui est plus avantageux pour les cotisants et plus coûteux pour les contribuables. Le montant approprié des cotisations serait plus élevé que celui prévu par la formule 50-50 actuelle.
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Monsieur le président, j'ai l'impression d'être dans la Chambre des communes.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis heureux de témoigner pour la première fois devant un comité de la Chambre depuis que ma nomination à titre de directeur parlementaire du budget, merci, a été approuvée par résolution du Sénat et de la Chambre des communes. J'ai commencé à assumer mes fonctions le 4 septembre 2018.
[Français]
Je suis accompagné aujourd'hui de M. Jason Jacques, le directeur principal de l'Analyse budgétaire et des coûts.
Comme vous le savez, des modifications apportées l'an dernier à la Loi sur le Parlement du Canada ont fait que le directeur parlementaire du budget a été reconnu comme un agent du Parlement. Le décret en Conseil de septembre 2017 a concrétisé ce statut et confirmé l'expansion du mandat législatif, qui englobe dorénavant l'évaluation du cadre financier des programmes électoraux des partis politiques lors des élections générales. De plus, de nouvelles obligations d'analyse associées aux services à fournir aux sénateurs, aux députés et aux comités parlementaires ont été créées.
[Traduction]
Conformément au mandat législatif du directeur parlementaire du budget, qui vise à présenter une analyse impartiale et indépendante afin d'aider les parlementaires à remplir leur rôle constitutionnel consistant à demander des comptes au gouvernement, mon bureau continuera de préparer des rapports et des analyses concernant les budgets des dépenses du gouvernement et le budget ainsi que d'autres documents pertinents du gouvernement fédéral sur les finances et l'économie du Canada. Plus tard cet automne, mon bureau publiera un rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2018-2019 après qu'il ait été présenté au Parlement.
Cela conclut mes remarques puisque je crois comprendre que vous avez des questions pour moi et M. Jacques.
Merci, monsieur le président. Cela nous ferait plaisir de répondre à des questions.
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Je vais essayer d'être aussi bref que possible, parce que la gamme des préparations est assez vaste.
Pour commencer, mon prédécesseur a fait une demande aux Présidents du Sénat et de la Chambre des communes pour que le budget du Bureau soit augmenté afin de lui donner les ressources jugées nécessaires à l'époque pour faire face à l'expansion du mandat. Cette demande lui a été accordée. Par conséquent, le nombre d'analystes va augmenter substantiellement, l'effectif du Bureau passant à environ 42 personnes: les employés du soutien administratif, ceux du soutien général, les analystes et le personnel de direction, dont moi. Pour ce qui est des ressources, il y a donc eu une expansion.
En ce qui a trait aux préparations en tant que telles, nous sommes en train de développer plusieurs outils qui vont nous permettre de répondre de façon plus rapide et efficace aux demandes que nous recevrons. Par exemple, nous travaillons à un modèle qui va pouvoir rapidement estimer, dans la mesure du possible, l'augmentation de la taille des Forces armées canadiennes. Nous faisons donc déjà du travail préalable en fonction des questions que nous anticipons. Nous avons aussi développé des modèles pour estimer les coûts de certaines mesures fiscales relativement simples.
Nous sommes donc en train de préparer des morceaux qui, à notre connaissance, vont probablement faire partie de certaines plateformes électorales.
Félicitations pour votre nomination.
Je me sens très privilégiée d'être ici. Je ne siège pas normalement au Comité.
C'est agréable de pouvoir partager un de mes intérêts avec vous et j'aimerais que vous me fassiez part de vos commentaires généraux. Je ne vous demande pas de prendre un grand engagement.
Ma circonscription est très diversifiée. Le revenu médian est d'environ 39 000 $; nous avons donc des problèmes.
Je souhaite trouver un moyen d'inciter les habitants à ouvrir un dialogue avec le gouvernement fédéral. Je viens de Saskatoon, où les gens sont éloignés d'Ottawa et se sentent déconnectés.
J'ai été très intéressée par la première participation du Canada à l'Enquête sur le budget ouvert. Je pensais que c'était merveilleux. J'ai trouvé que l'Enquête fournissait des renseignements très utiles sur les trois domaines auxquels elle touchait: la transparence, la participation du public et la surveillance budgétaire — c'est-à-dire votre rôle.
J'ai constaté que le gouvernement a souvent de très bons résultats dans le domaine de la transparence, ce qui signifie que nous inondons les gens de rapports qui ne sont pas produits de façon à leur être utiles. J'ai déjà parlé de la participation du public, un domaine dans lequel nos résultats ne sont pas très bons. Aucun gouvernement n'a obtenu de bons résultats dans ce domaine.
Je me demande si vous vous êtes penché sur cette information ou si je pourrais vous encourager à le faire. Le rapport est beaucoup plus volumineux. Je n'ai que deux pages avec moi.
Ce qui m'intéresse le plus c'est la façon dont les citoyens participent au processus budgétaire. Je ne parle pas seulement de l'étape où ils donnent leur avis sur le budget, mais aussi de la capacité de pouvoir ensuite communiquer avec le gouvernement lorsqu'ils pensent qu'il a franchi des étapes importantes et ainsi de suite. On a suggéré de créer un guide budgétaire pour les citoyens, qui traduirait ce que fait le gouvernement en renseignements plus faciles à gérer que les citoyens peuvent utiliser.
J'ai maintenant l'air de donner un discours, mais je suis très enthousiaste à propos de cette suggestion. Je me demande s'il s'agit d'une mesure qui vous intéresserait ou que vous avez déjà envisagée.
Puisque vous venez d'assumer vos fonctions, vous êtes nouveau. Vos renseignements et vos points de vue au tout début de votre mandat sont importants parce que, une fois qu'une personne se lance dans quelque chose, elle peut commencer à ne plus les voir.
Pourriez-vous nous parler de votre rôle en relation au public et leur compréhension du budget? Je suis au courant de votre service aux parlementaires, mais j'aimerais que votre bureau et le budget mettent l'accent sur les citoyens et leur participation.
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C'est une question intéressante.
J'ai posé la même question au sujet du rôle du directeur parlementaire du budget à mon prédécesseur, Jean-Denis. Je lui ai demandé ce que les parlementaires pensaient de ses entrevues dans les médias. Est-ce que cela leur déplaisait? Il m'a répondu de façon spontanée que les parlementaires avaient tendance à être en faveur des entrevues parce qu'elles donnent de la crédibilité à une institution. Elles permettent aussi de démystifier les opérations gouvernementales, les budgets et l'état de l'économie.
Pour être franc, étant donné que je suis toujours au début de mon mandat, je n'ai pas beaucoup réfléchi au budget ouvert, à un guide budgétaire pour les citoyens et à la participation du public au processus budgétaire. J'aimerais en entendre davantage sur le sujet.
Selon mon expérience, le processus budgétaire est très opaque. Il n'est pas du tout transparent. Je le sais parce que j'ai travaillé de l'autre côté du processus budgétaire. Il s'agit d'une boîte noire que très peu de personnes comprennent. Par conséquent, toute idée qui permet de démystifier le processus et qui augmente la participation des parlementaires et du public mérite probablement d'être prise en considération.
C'est une autre question de savoir s'il serait mieux de ralentir le processus, de le faciliter pour les décideurs ou autre. Cependant, ces options méritent certainement d'être examinées.
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En ce qui concerne les moyens dont le Canada peut améliorer sa surveillance, je vous fais part des recommandations suivantes: fournir aux législateurs les propositions budgétaires des dirigeants au moins deux mois avant le début de l'année budgétaire et améliorer l'alignement des propositions budgétaires dans le Budget principal des dépenses; faire en sorte qu'un comité législatif examine l'exécution du budget au cours de l'exercice et publie un rapport contenant ses recommandations; et enfin, publier le rapport de vérification dans les six mois suivant la fin de l'année budgétaire afin de permettre aux législateurs d'examiner attentivement le résultat de l'année précédente avant de voter sur le nouveau budget.
Une des mesures qui a été discutée concernant l'inclusion des Canadiens et l'amélioration de leur participation était de mettre en place des projets pilotes visant à permettre aux membres du public de donner leur avis sur la surveillance de l'exécution du budget national. C'est une façon dont les gens pourraient participer.
Pour l'instant, je pense que des intervenants de différents organismes, groupes et ainsi de suite doivent venir et donner des présentations. Souvent, les citoyens n'ont pas... Vous fournissez les renseignements requis, mais vous ne savez pas ce qui en est fait par la suite. Pourquoi la priorité est-elle accordée à un enjeu, mais pas à un autre? Comment le gouvernement peut-il affirmer qu'une chose se produit, mais pas une autre?
Je serais prête à vous laisser le document de deux pages pour vous rappeler d'étudier la question. Je prévois me pencher en particulier sur le guide budgétaire pour les citoyens afin de déterminer comment un tel outil pourrait être mis en oeuvre au Canada.
Merci beaucoup.
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Une de mes principales préoccupations porte effectivement sur le type de demandes que je recevrai ainsi que le nombre et la nature de celles que je recevrai au sujet de l'établissement des coûts des programmes électoraux. Nous avons tenu des discussions préliminaires avec des représentants des partis politiques représentés à la Chambre. Tout indique qu'une bonne proportion d'eux auront besoin de nos services pour établir les coûts de leur programme électoral.
Cela dit, il reste à voir s'ils présenteront une douzaine de demandes ou 12 douzaines de demandes. Je crois toutefois que nous disposons des ressources nécessaires pour y répondre. Nous avons renforcé les ressources et la capacité et le processus est toujours en cours. De plus, nous élaborons des protocoles d'entente avec la fonction publique afin de pouvoir lui demander de l'aide dans la confidentialité. De cette façon, les fonctionnaires ne sauront pas l'identité des partis politiques requérants et ils nous aideront au cours de la proposition d'établissement des coûts des programmes électoraux. Il s'agit de ma priorité numéro un, c'est-à-dire de faire en sorte que nous sommes prêts pour cela.
Ma deuxième priorité consiste à répondre aux demandes des parlementaires d'ici les élections et à disposer des ressources nécessaires pour le faire. En fait, il devrait s'agir de ma priorité numéro un puisqu'elle s'applique dans l'immédiat. Ma priorité absolue consiste donc à répondre adéquatement aux demandes des députés, des sénateurs et des comités.
Ma troisième priorité consiste à faire en sorte que le Bureau du directeur parlementaire du budget soit viable à long terme. Après les élections de 2019 — qui auront lieu le 19 octobre si tout se déroule comme prévu —, ma priorité consistera à demeurer ou à devenir un bureau de responsabilité financière de calibre mondial.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Messieurs Giroux et Jacques, soyez les bienvenus à votre Chambre des communes.
Monsieur Giroux, je vous offre toutes nos félicitations. Vous êtes en poste depuis à peine trois mois. Vous avez été nommé par le gouvernement. C'est un mandat à la hauteur de votre expérience et de vos talents. Je vous souhaite bon succès pour les sept prochaines années.
Je profite de l'occasion pour remercier votre prédécesseur, M. Fréchette, avec qui nous avons eu le plaisir de travailler au cours des cinq dernières années — personnellement, au cours des trois dernières années. J'ai toujours apprécié son approche ouverte et positive de la gestion des fonds publics et la vision qu'il avait de sa fonction de directeur parlementaire du budget, qui, comme on le sait, n'est pas un travail facile. Je ne dirais pas que vous êtes nécessairement le chien de garde, mais le balancier précis. C'est vous qui donnez l'heure juste sur l'état des finances publiques, ce qui peut parfois choquer le gouvernement, quel qu'il soit, et réjouir l'opposition, quelle qu'elle soit.
Je veux revenir sur ce que Mme Mendès a abordé il y a quelques instants, soit la mise à jour économique du gouvernement et l'état des finances publiques à la veille des élections fédérales. J'aimerais vous entendre à ce sujet, puis je ferai quelques observations.
Vous vous êtes dit ouvert à cela. Est-ce quelque chose que vous demandez et que vous souhaitez? Étant donné qu'il y a des élections à date fixe, on peut savoir exactement quand votre rapport pourrait être déposé.
Si vous êtes d'accord sur cela, quelle serait votre position sur l'échéancier?
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C'est très gentil de votre part.
Nous avons parlé d'élections à date fixe. Il s'agit de l'une des recommandations du rapport du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires sur le budget des dépenses. Pourriez-vous nous expliquer — peut-être que M. Jacques pourrait nous l'expliquer aussi — comment vous croyez que cela fonctionnerait si le dépôt du budget se faisait à date fixe? Nous avons soulevé la question auparavant, et certains fonctionnaires ont indiqué que cette mesure ne ferait qu'augmenter leur charge de travail et qu'elle ne contribuerait pas vraiment à accélérer le processus.
Au cours des 100 dernières années, l'Australie n'a pas déposé son budget à date fixe pendant 99 ans, notamment lors de deux grandes guerres, mais j'ai constaté qu'elle a tout de même réussi à le déposer au cours de la même période année après année.
Expliquez-nous simplement comment vous croyez qu'une telle mesure pourrait fonctionner pour nous du point de vue de l'échéancier en travaillant avec le Conseil du Trésor, le ministère des Finances, etc.
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Oui, je suis la seule à prendre la parole.
Le jeune homme ne souhaite pas poser de questions.
Des voix: Oh, oh!
Mme Yasmin Ratansi: Je vous remercie d'être venu, monsieur Giroux. Je suis ravie de constater que votre expertise en tant qu'économiste et que votre connaissance du budget fédéral et du système de dépenses du gouvernement nous seront très utiles au Comité.
Vous avez apaisé les craintes de Mme Mendès au sujet des cotisations de retraite des députés.
Ce qui est intéressant, c'est qu'il existe tellement de méthodologies différentes. Il existe tellement de permutations et de combinaisons possibles que j'ai trouvé cela assez inquiétant que cet homme puisse nous comparer à Détroit et confondre la gouvernance assurée par le Canada dans les institutions financières à celle des États-Unis. Notre structure de gouvernance est très efficace. Nous n'avons pas autorisé de prêts hypothécaires à risque. Les banques canadiennes sont sur un différent... Peu importe, là n'est pas la question.
Vous avez parlé des problèmes liés à l'accès aux données. Lorsque le directeur parlementaire du budget précédent a tenté d'évaluer les recettes que le gouvernement a perdues à cause de l'évasion fiscale, et non des mécanismes fiscaux tout à fait légitimes, l'Agence du revenu du Canada lui a posé de nombreux problèmes. Je dois faire attention aux mots que j'utilise; à titre de comptable, je dois faire très attention à la terminologie que j'utilise.
Vous avez été dirigeant principal des données de l'Agence du revenu du Canada. Comment ferez-vous en sorte d'obtenir ces renseignements sans devoir recourir aux tribunaux? Comment garantirez-vous que les recettes que le gouvernement du Canada réclame légitimement soient engrangées par le Canada?
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Cette tâche appartient à l'Agence du revenu du Canada. Il y a des personnes très agressives et très efficaces à l'Agence. Certains Canadiens le constatent à leurs dépens.
Des voix: Oh, oh!
M. Yves Giroux: En ce qui a trait à la première partie de votre question, qui porte sur la façon avec laquelle je vais obtenir des renseignements de l'Agence, le secret est souvent de savoir comment poser les questions et quoi demander. Par sa nature même, l'Agence du revenu du Canada est une institution peu encline à courir des risques. La première de ses préoccupations, c'est la protection des renseignements fiscaux des Canadiens. Elle fait preuve d'une grande prudence face à tout ce qui pourrait être le moindrement considéré comme contrevenant à la loi sur la protection des renseignements personnels.
Il est même question de ce que l'on appelle dans le langage des économistes et des mordus de données la « divulgation par recoupement ». Par exemple, même si l'on retire le nom, l'adresse, le code postal et le numéro d'assurance sociale, il est possible que quelqu'un associe un dossier d'impôt à une personne en particulier en se fondant sur les caractéristiques du dossier. Les dossiers d'impôt contiennent beaucoup de renseignements.
L'Agence craint énormément la divulgation par recoupement. C'est pourquoi elle souhaite agréger le plus possible les données qu'elle envoie. Toutefois, il est possible de poser des questions et de demander des données de façon à éviter la divulgation par recoupement. Dans mes anciennes fonctions, j'ai travaillé avec le directeur parlementaire du budget précédent pour faire en sorte qu'il soit en mesure d'accéder aux renseignements dont il avait besoin en l'orientant vers ce qui était faisable dans les limites de la loi. La demande de renseignements était totalement légitime, mais le niveau de détails était probablement trop élevé pour rassurer l'Agence.
C'est en agrégeant les dossiers d'impôt que l'ancien directeur souhaitait obtenir qu'il a été possible de parvenir à une entente satisfaisante pour les deux parties.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Giroux, merci d'être venu.
J'ai tellement de questions. En fait, Mme Ratansi m'a inspiré une question. Je vais la mettre de côté parce que je tiens à savoir ce que vous pensez des soins de santé et de leurs coûts.
Le Québec vient tout juste de tenir des élections, et le nouveau gouvernement parle de privatiser certains services de santé. C'est ce qui s'est passé auparavant en Colombie-Britannique avec les chirurgies et en Ontario avec quelques chirurgies et tests de diagnostic. Cette tendance me dérange beaucoup à cause de l'érosion. Au fil des ans, il y a eu des compressions très évidentes dans les transferts en santé. S'il n'y avait pas eu ces compressions dans les transferts en santé, je me demande si les provinces se trouveraient dans une position plus soutenable.
Par exemple, le même genre de rumeur circulerait-elle au Québec? L'Ontario et la Colombie-Britannique auraient-ils pris les mêmes décisions?