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Mesdames et messieurs, et chers collègues, je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à cette séance no 30 du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude de Postes Canada.
Comme vous le savez sans doute, mesdames et messieurs, étant donné que vous suivez probablement le déroulement de nos travaux, le a entrepris un vaste processus de consultation. La première étape consistait à établir un groupe de travail chargé d'examiner la viabilité financière de Postes Canada. Le groupe en question a terminé son travail puis a soumis son rapport au ministre. Notre Comité a également eu l'occasion d'examiner ce rapport.
La deuxième étape du processus de consultation consiste en une consultation pancanadienne dans le cadre de laquelle les Canadiens et les organisations canadiennes sont invités à exprimer leur point de vue sur l'avenir de Postes Canada, d'où notre présence ici aujourd'hui. À l'issue de ce processus de consultation d'une durée de trois semaines, nous rédigerons un rapport que nous soumettrons au Parlement avant la fin de l'exercice.
Nous sommes ici aujourd'hui pour parler avec vous tous. Le processus est très simple, mais nous disposons de peu de temps. Par conséquent, nous demandons à ce que les déclarations ne dépassent pas cinq minutes. Ainsi, tous les membres du Comité auront la possibilité d'intervenir pendant la série de questions. Nous enchaînerons ensuite avec notre prochain groupe de témoins. Nous vous serions très reconnaissants de bien vouloir respecter nos contraintes de temps.
Cela dit, selon ma liste, c'est M. Hinds qui ouvre le bal.
Monsieur Hinds, je vous souhaite la bienvenue. Vous disposez de cinq minutes.
Je m'appelle John Hinds et je suis le président et chef de la direction de Journaux Canadiens. Nous représentons plus de 850 quotidiens et journaux communautaires partout au Canada.
Journaux Canadiens et Postes Canada entretiennent une relation unique. Nous sommes non seulement des clients, mais aussi des concurrents. Par conséquent, il y a deux recommandations que nous aimerions voir mises en oeuvre par le gouvernement, à la suite de son examen de Postes Canada, qui ne se résument pas à la question de la viabilité financière.
Tout d'abord, nous aimerions que l'on confie un nouveau mandat de service public à Postes Canada, particulièrement pour les collectivités rurales et éloignées.
Ensuite, en vue d'assurer un modèle d'entreprise durable, nous ne voudrions pas que Postes Canada ait carte blanche pour nuire aux entreprises privées. Une recommandation qui favoriserait la viabilité financière de Postes Canada au détriment d'autres considérations serait, à notre avis, inappropriée.
Journaux Canadiens et Postes Canada sont les deux principaux distributeurs de circulaires au Canada, et cette relation a causé bien des frictions au fil des années. Lors du dernier examen du mandat de Postes Canada, le gouvernement de l'époque avait obligé Postes Canada à confier la livraison des circulaires à ses propres employés seulement. Étant donné la baisse du volume du courrier, Postes Canada s'est concentrée sur la distribution des circulaires, ce qui crée encore plus de frictions.
Le problème, c'est que Postes Canada se sert de sa situation de monopole pour faire une concurrence déloyale aux entreprises privées. Postes Canada a l'exclusivité des boîtes aux lettres de toutes les habitations plurifamiliales au pays. Nous estimons donc que cette réalité lui donne un avantage concurrentiel injuste et non réglementé.
Le problème est accentué lorsque Postes Canada distribue également à ses clients les journaux qui contiennent les circulaires. Autrefois, presque tous les journaux communautaires étaient distribués par le bureau de poste. Au cours des dernières décennies, cependant, la situation a changé, car on a mis au point des systèmes de livraison plus rentables et plus rapides.
Dans les villes et les banlieues canadiennes, la majorité des journaux ne sont plus distribués par Postes Canada, mais au moins la moitié des journaux communautaires au Canada — plus de 400 — et ceux desservant les petites collectivités ont encore recours aux services du bureau de poste pour une partie ou la totalité de leur livraison. Ces journaux sont presque tous situés dans les régions rurales et éloignées du Canada, où il n'y a pas d'autre choix que Postes Canada.
Malheureusement, l'expérience avec Postes Canada n'est pas très positive. Les principales failles résident dans les principes du service et des prix.
Ces dernières années, par exemple, les tarifs postaux ont augmenté plus rapidement que toutes les autres dépenses d'entreprise. Dans bien des cas, ce montant représente une hausse de plus de 10 % par année.
Comme vous le savez, Postes Canada est un monopole qui n'est pas soumis à la surveillance d'un organisme de réglementation. Les tarifs sont établis par la société, et les clients n'ont d'autre choix que de payer les frais. Les journaux communautaires sont bien lus, peu importe qu'ils emploient un modèle à diffusion payée ou gratuite. Ces circonstances ont donné lieu à un traitement inéquitable qui nuit énormément à la capacité des petits journaux communautaires de joindre une vaste clientèle.
Postes Canada offre le service Poste-publications pour les périodiques, y compris les journaux, cependant, les journaux communautaires à diffusion gratuite destinés à tous les foyers ne peuvent accéder à ce service. Ils doivent plutôt utiliser le service Courrier de quartier, anciennement Médiaposte sans adresse, soit le même service postal utilisé par les entreprises pour distribuer les circulaires et le courrier publicitaire. Par conséquent, il a fallu établir des exemptions aux règles, et ces règles ne sont pas appliquées de façon uniforme.
Et ce n'est que la pointe de l'iceberg. Le déséquilibre qui existe entre Journaux Canadiens et Postes Canada suscite de nombreuses autres préoccupations, notamment la priorité accordée à la distribution des circulaires plutôt qu'aux journaux; le refus de distribuer un journal communautaire malgré une exemption au programme Choix des consommateurs; une distribution irrégulière, y compris tardive — jusqu'à trois ou quatre semaines dans bien des cas — ou aucune distribution du tout; et un manque d'uniformité dans l'application des règles, ce qui fait en sorte que les journaux dépendent souvent de la bonne volonté de l'employé local de Postes Canada.
De plus, un élément clé de la nouvelle initiative de transformation postale a été la décision d'éliminer le tri du courrier local en faveur d'une approche plus centralisée et régionale. Concrètement, cette stratégie a occasionné de nombreux problèmes qui ont empêché des citoyens de pouvoir lire leur journal local en temps opportun. À maintes reprises, nos membres nous ont signalé que le courrier était déposé à un endroit et que, même s'il était destiné à la ville voisine, il était envoyé à un gros centre de tri, situé à des centaines de kilomètres. C'est donc un détour inutile qui entraîne de longs retards, surtout en hiver.
Les journaux communautaires canadiens pourraient également vous donner de nombreux exemples pour décrire leur frustration par rapport à Postes Canada et à son refus de réfléchir aux réelles conséquences des changements qu'elle apporte au service, qui se font souvent sans aucune consultation. La reddition de comptes laisse à désirer. Comme on l'a vu, Postes Canada établit ses propres tarifs et ses propres normes, et ces normes ne tiennent aucunement compte du lecteur, qui souhaite lire ses nouvelles dans un délai raisonnable. Même là, il n'y a aucun moyen d'obliger la société à respecter ces normes.
Les lecteurs veulent recevoir leurs journaux en temps utile et, dans bien des cas, ce n'est pas ce qui se produit. Il va sans dire qu'un certain degré de surveillance indépendante est requis. En effet, nous estimons qu'il est nécessaire de créer une entité distincte pour réglementer la poste. Cette façon de faire s'est révélée très efficace au Royaume-Uni et aux États-Unis.
Comme vous pouvez le constater, Journaux Canadiens a de nombreux démêlés avec Postes Canada. La situation pourrait empirer si le mandat de service public et les intérêts des entreprises privées étaient sacrifiés au profit de la viabilité financière de la société. Nous avons bon espoir que vous en tiendrez compte dans le cadre de vos travaux.
Merci.
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Merci, monsieur le président, et membres distingués du Comité.
Je m'appelle Matthew Holmes, et je suis le président et chef de la direction de Magazines Canada. Comme vous pouvez l'imaginer, nous suivons de très près la situation de Postes Canada. Les magazines et les journaux, en plus des colis, font probablement partie des rares articles que les Canadiens ont hâte de recevoir par la poste.
Nous sommes l’association professionnelle nationale qui représente les principaux magazines d'intérêt général, culturels et d'affaires. Il y a actuellement sur le marché environ 2 000 magazines canadiens. C'est un secteur d'une valeur de 2 milliards de dollars qui crée directement des dizaines de milliers d'emplois de haute qualité dans l'économie du savoir, dans toutes les régions et sur toutes sortes de plateformes, imprimées et numériques.
Les derniers chiffres publiés montrent que plus de 70 % des Canadiens lisent des magazines, et c'est vrai pour tous les groupes d'âge, y compris les jeunes. Plus précisément, 92 % des lecteurs canadiens lisent ces magazines sous différentes formes — en format imprimé seulement ou une combinaison du papier et du numérique —, par conséquent, le lecteur canadien est encore très attaché à la version papier.
J'imagine que vous étiez nombreux à écouter hier soir le débat présidentiel. Le marché des magazines au Canada est assez semblable, en ce sens qu'il est presque impossible d'éviter le contenu américain. Pour cette raison, le marché canadien a développé une situation unique, et nous sommes devenus populaires dans le monde des magazines pour cela. Quatre-vingts pour cent de notre lectorat obtient des magazines canadiens dans le cadre d'un abonnement plutôt que sur les kiosques à journaux. Les abonnements sont un élément essentiel de notre secteur et, comme vous pouvez l'imaginer, ils dépendent d'un système de livraison postale viable.
Alors que la tient d'importantes consultations sur la culture et les moyens de mieux diffuser et mettre en valeur le contenu canadien, mes membres sont confrontés à des difficultés financières et logistiques lorsqu'il s'agit de joindre leur clientèle. Chose certaine, la consommation du contenu numérique est à la hausse, et les magazines du Canada rejoignent de plus en plus de Canadiens en format numérique; toutefois, la clientèle continue de lire des magazines imprimés.
À notre avis, dans le cadre de votre examen, il est essentiel de ne pas perdre de vue le mandat principal de Postes Canada qui est d'offrir un service public à tous les Canadiens, peu importe où ils vivent au Canada. C'est ce que démontre aussi la recherche sur l’opinion publique qu'a menée le groupe de travail indépendant. Et surtout, il importe de dire que dans toutes les régions, les Canadiens considèrent que le Canada aura toujours besoin d'un service postal détenu et exploité comme un service public.
Cela se reflète aussi dans les discussions avec des intervenants clés, y compris les jeunes des régions rurales, et cela ne se limite pas aux collectivités rurales. Je suis certain que le apprécie que les gens de Terre-Neuve, après que le National Post et The Globe and Mail aient cessé la distribution de leurs journaux dans cette province, puissent maintenant consulter les nouvelles nationales dans des magazines distribués par Postes Canada ou en ligne. Cet argument économique, combiné à notre géographie, peut rapidement faire de nous une nation de solitudes.
Pour cette raison, nous nous opposons à la stratégie axée sur les tarifs ou ce qu'on appelle souvent la « tarification en fonction de la distance ». Postes Canada l'a déjà expérimenté avec les clients de son service Postes-publications, et les magazines en particulier, et cela a eu un effet dévastateur sur nos membres. Nous trouvons que les tarifs sont punitifs et injustifiés.
De plus, comme l'indique le document de travail du groupe de travail, « à court terme, l’augmentation des tarifs fera croître les revenus, mais à long terme, une telle stratégie favorisera plutôt les solutions numériques ». C'est ce que nous constatons dans le secteur des magazines, qui abandonne les services de Postes Canada à un taux beaucoup plus rapide que toute attrition dans l'ensemble de l'industrie.
Le comble de cette malheureuse ironie, c'est que bon nombre des plus importants magazines canadiens sont durement touchés par la hausse des tarifs. Étrangement, ce sont les mêmes clients qui fournissent à Postes Canada les colis triés d'avance qui évitent pratiquement tous les processus opérationnels de Postes Canada — et par conséquent les dépenses opérationnelles — et sont placés presque directement dans les mains des facteurs.
Dans ces cas, les éditeurs canadiens de magazines ont déjà absorbé une part considérable des coûts du produit avant livraison, pourtant, il n'y a pas d'allègement tarifaire ni d'incitatif financier pour cette pratique. Au fond, les magazines sont pénalisés pour contribuer au bon déroulement des opérations et à l'amélioration de la productivité de Postes Canada. Pour cette raison, Magazines Canada a réuni un groupe national de fournisseurs d'autres services de livraison afin d'étudier et de trouver un moyen de ne plus recourir à ce service pour la majorité de nos besoins, même si nous souhaiterions qu'il en soit autrement.
Pour conclure, monsieur le président, sachez que le gouvernement du Canada a toujours maintenu des politiques relatives à la création et à la diffusion d'un contenu canadien et d'un contenu culturel aux Canadiens, un mandat qui est encore plus important aujourd’hui, à l'aube du 150e anniversaire du Canada. Le secteur des magazines aimerait voir des perspectives à long terme stables et des contrats d’établissement de prix en fonction desquels il pourra mener ses activités.
Merci.
Je rappelle brièvement que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante représente plus de 109 000 petites et moyennes entreprises dans tout le Canada, toutes détenues et exploitées par des entités indépendantes. Évidemment, ces entreprises s'intéressent grandement à l'avenir de Postes Canada, et nous félicitons le Comité pour ses travaux.
J'ai préparé un petit document de présentation sur des données que nous avons recueillies auprès de nos membres.
J'aimerais commencer en disant que 91 % des petites entreprises considèrent que Postes Canada est une société importante. Il s'agit d'un service important auquel elles ont accès au Canada, alors nous ne croyons pas que Postes Canada est à la fin de son mandat et qu'il n'y a pas d'avenir pour la société. En fait, nous pensons plutôt le contraire, étant donné que 40 % des petites et moyennes entreprises envoient au moins 50 lettres par mois, et 50 % en reçoivent environ le même nombre au cours de la même période. On parle ici de PME de partout au Canada.
Lorsqu'on analyse en détail les raisons pour lesquelles les petites entreprises utilisent les services de Postes Canada, les gens sont souvent étonnés d'apprendre que de nombreuses entreprises ont recours à la poste pour la livraison de paiements. Alors qu'un grand nombre de consommateurs sont passés au paiement en ligne, les entreprises doivent encore recourir très souvent aux services postaux pour envoyer des factures et recevoir des paiements sous forme de chèques. Lorsqu'on paie une facture qui s'élève à 10 000 $, il est très peu probable qu'on le fasse par carte de crédit. On va plutôt envoyer un chèque d'entreprise.
Chez les petites et moyennes entreprises, 50 % des achats et 42 % des ventes se traduisent par des chèques expédiés par la poste. Bien entendu, au cours du récent débat entourant la situation de grève et de lockout, même s'il n'y a pas eu nécessairement d'interruption, un grand nombre de petites entreprises ont opté pour des mesures de rechange, car elles craignaient que leurs paiements ne se rendent pas à destination.
Les petites et moyennes entreprises utilisent encore, et même de plus en plus, les services de Postes Canada pour l'envoi de colis. J'y reviendrai dans une minute.
Lorsque nous demandons à nos membres pourquoi ils emploient les services de Postes Canada, ils invoquent surtout l'accessibilité, la commodité et le coût. Ce sont les principales raisons pour lesquelles les PME choisissent Postes Canada.
Encore une fois, il est tout à fait vrai que l'utilisation des services de Postes Canada est à la baisse. Quarante-deux pour cent de nos membres ont dit avoir eu moins souvent recours aux services de Postes Canada au cours des trois dernières années. Cependant, les petites entreprises sont de plus en plus présentes sur le Web. Par conséquent, elles vont recourir aux services de livraison de Postes Canada pour acheminer leurs produits, surtout les produits à bas prix, vers les marchés. Si vous expédiez un produit évalué à des centaines de dollars, vous allez probablement vous tourner vers un service de messagerie privé, mais Postes Canada demeure une bonne option pour un article d'une valeur de 2 ou 3 $.
Nous sommes d'avis que Postes Canada remplit un mandat important, et nous recommandons principalement au Comité de veiller à ce que la société soit viable et à ce que les coûts soient surveillés très attentivement. Une grande partie du travail du groupe de travail sur l’examen de la Société canadienne des postes appuie ces mesures.
Nous avons également beaucoup consulté nos membres au sujet de certaines options qui s'offrent à Postes Canada pour réduire ses coûts. La plus populaire chez nos membres était le gel du salaire des employés de Postes Canada. D'ailleurs, je dirais que d'après les données de notre étude « Regard sur les salaires », les employés de Postes Canada gagnent beaucoup plus que leurs homologues du secteur privé. Les salaires et les avantages sociaux offerts par Postes Canada sont 40 % supérieurs à ceux offerts pour des postes semblables dans le secteur privé, si on tient compte des avantages sociaux et des pensions. Par conséquent, un gel des salaires figurait en tête de liste.
En outre, les petites entreprises étaient généralement favorables à l'emploi de boîtes postales communautaires. La distribution du courrier trois jours par semaine leur conviendrait aussi. Elles étaient également d'accord pour privatiser certains aspects de Postes Canada, notamment par la mise en place d'un plus grand nombre de comptoirs postaux franchisés.
Vous serez peut-être surpris de m'entendre dire ceci, mais les membres de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante n'appuyaient pas une privatisation complète de Postes Canada. Ce n'est pas une mesure qu'ils approuvaient de façon générale à ce moment-là.
Pour ce qui est d'élargir le mandat de la société afin qu'elle offre des services bancaires, je dirais qu'il y avait une opposition générale à cette proposition, en dépit du fait que de nombreuses petites entreprises souhaitent voir davantage de concurrence au sein du secteur bancaire canadien.
Encore une fois, voici nos principales recommandations.
Il est primordial de remédier au passif non capitalisé de son régime de pension si on veut surmonter les difficultés auxquelles la société est confrontée. De plus, il faudrait davantage aligner les salaires et les avantages sociaux sur ce qui est normalement offert dans le secteur privé. Il faudrait aussi revoir ou, du moins, limiter les hausses tarifaires, car cela nuit grandement aux petites entreprises. Nous vous demandons d'y porter une attention particulière. Enfin, il faudrait peut-être remettre en question la pertinence du monopole détenu par Postes Canada dans le domaine de la distribution de courrier au pays.
Merci beaucoup.
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Monsieur le président, c'est moi qui vais commencer. Je suis Kristi Kanitz, présidente de l'ANGUP. Je vais faire une brève introduction et je vais ensuite céder la parole à Patrick.
L'ANGUP est une organisation nationale à but non lucratif qui représente les intérêts du secteur de la livraison postale au Canada depuis plus de 30 ans. Nous représentons les expéditeurs de courrier, de même que les fournisseurs de services, de papier, d'enveloppes, de logiciels et d'équipement. Notre mission est de veiller à ce que les Canadiens et les entreprises canadiennes aient accès à un service postal fiable, abordable, efficace et durable. Nous travaillons étroitement avec Postes Canada à l'établissement de produits, de prix, de processus et de partenariats. Nous entretenons une relation cordiale et productive avec la société, et nous tenons des consultations sur ses produits et services.
Le secteur de la livraison postale au Canada est diversifié et essentiel à l'économie. Il représente environ 88 milliards de dollars par année, soit près de 5 % du PIB du Canada. Il représente entre 80 et 90 % des recettes de Postes Canada. Ce sont les entreprises qui génèrent ces revenus pour Postes Canada chaque année. L'industrie emploie directement et indirectement plus de 800 000 Canadiens.
Le courrier joue un rôle crucial dans le commerce du Canada, puisqu'il facilite la facturation, l'acquisition et la croissance de la clientèle ainsi que le traitement des commandes. Le secteur comprend des PME, de même que des grandes entreprises et des multinationales, que ce soit dans le domaine de la fabrication traditionnelle ou des solutions novatrices axées sur les données.
Patrick.
Tout d'abord, nous tenons à remercier le groupe de travail pour son excellent rapport. Nous sommes d'avis qu'il a permis d'établir une base de connaissances solide à partir de laquelle on pourra prendre des décisions éclairées quant à l'avenir de Postes Canada.
Premièrement, l'ANGUP appuie l'implantation continue de boîtes postales communautaires. Nous considérons qu'il s'agit d'un moyen efficace de distribuer le courrier, et rien n'indique qu'il nuit au secteur ou le rend moins compétitif. Nous estimons que Postes Canada doit être plus attentive aux besoins des Canadiens et des collectivités qui éprouvent des difficultés particulières avec les boîtes postales. De façon générale, nous sommes favorables au programme des boîtes postales communautaires que nous considérons comme une mesure importante pour contrôler les coûts.
Nous nous réjouissons de la recommandation du groupe de travail selon laquelle le moratoire sur la fermeture des bureaux de poste en régions rurales devrait être révisé. Il serait beaucoup plus logique que des régions telles que Brampton ou Richmond Hill ne soient plus visées par ce moratoire. Les temps ont changé.
Nous sommes également favorables à la mise en place de davantage de comptoirs postaux franchisés.
Nous aimerions discuter un peu des bureaux de poste en régions rurales. J'ai eu l'occasion de me rendre dans ma province natale, Terre-Neuve-et-Labrador, et dans les collectivités de l'île Bell, de Trinity et de Woody Point. J'y ai vu tous les bureaux de poste locaux, qui arboraient le drapeau canadien et le nom de la collectivité, ce qui était très beau à voir. Nous sommes d'avis que les expéditeurs de courrier ne devraient pas être le seul fournisseur à desservir ces endroits et à offrir ces services communautaires. Il devrait y avoir, comme dans d'autres programmes de Postes Canada — tels que le courrier parlementaire — une subvention versée à Postes Canada à cet égard. C'est l'une de nos principales recommandations.
L'ANGUP, l'Association nationale des grands usagers postaux, n'appuie pas la livraison du courrier un jour sur deux, car nous estimons qu'elle pourrait nuire à la compétitivité du secteur et nous rendre encore plus vulnérables aux percées du domaine du numérique.
Dans le rapport, on utilise le terme « courrier-poubelle » pour désigner le courrier publicitaire. Nous estimons qu'il s'agit d'un terme malencontreux, car on sous-entend une approche qui n'est pas écologique ou soucieuse de l'environnement. Les Canadiens aiment leur courrier publicitaire et l'utilisent. Autrement, les entreprises n'en enverraient pas. Sachez que l'industrie du courrier et du papier au Canada a un excellent bilan en matière d'environnement et de préservation des forêts.
Nous appuyons le réalignement de Postes Canada afin de garantir son autonomie sur le plan commercial. Nous sommes également favorables à l'établissement d'un organisme de réglementation. Nous recommanderions la création de comités de consultation et de surveillance qui travailleraient dans des domaines tels que les partenariats, les produits compétitifs, les stratégies de pénétration des marchés et la fixation des prix.
Enfin, en ce qui concerne les interruptions de travail, sachez que nous venons de passer un été terrible, en raison des pertes d'emploi et des licenciements causés par l'incertitude au sein de l'industrie. Nous encourageons le gouvernement à travailler avec les parties. Nous avons deux ans pour parvenir à une résolution afin de ne plus être confrontés à ce problème encore dans deux ans.
Merci beaucoup.
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Lors du dernier examen du mandat de Postes Canada, nous espérions que l'ombudsman serait... Nous avions demandé la mise en place d'un organisme de réglementation à l'époque. Nous avions consulté l'ombudsman, qui nous avait répondu que son mandat ne couvrait pas l'établissement des prix, ni le service. Alors, que couvre son mandat? L'ombudsman est un employé de Postes Canada. Du point de vue de nos membres, l'ombudsman ne sert franchement pas à grand-chose.
Nous avons besoin d'un organisme de réglementation indépendant qui établit les normes de service et les prix. Si on prend exemple sur ce qui se passe ailleurs dans le monde, c'est la tendance suivie et cela fonctionne bien. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, entre autres, c'est une façon de faire efficace, car cela donne aux gens le sentiment de pouvoir se faire entendre.
La difficulté en ce moment, notamment pour les petits expéditeurs — nous sommes de grands expéditeurs pour les petits bureaux de poste, mais en fait, nous n'avons pas un très grand volume —, c'est que nous avons l'impression de ne pas avoir de choix. On nous dit au mois de juillet que c'est ce qui va arriver en janvier, et on nous demande de formuler des commentaires, mais nos commentaires semblent ne jamais être entendus. Je pense que nous avons besoin d'un organisme de réglementation qui a du mordant.
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Oui, nous serions en faveur de cela également. Nous pensons qu'un organisme de réglementation devrait approuver les hausses de tarifs extraordinaires, mais pas nécessairement celles qui suivent le taux d'inflation. Cependant, pour les hausses hors du commun, comme c'est arrivé en 2014, je crois qu'il faut y voir.
Nous aimerions aussi avoir quelqu'un qui pourrait examiner avec nous la structure actuelle de facturation de frais supplémentaires à Postes Canada et qui offrirait un processus d'appel quand ce genre de choses se produisent.
Nous voudrions également qu'il supervise les relations de Postes Canada et de ses partenaires, et ils sont nombreux à faire partie de nos membres. Postes Canada fait de la promotion ciblée auprès de certains groupes sur le marché et agit de façon douteuse. Par exemple, si un de ses partenaires acquiert un nouveau client, Postes Canada envoie à ce client de l'information sur un nouveau produit qui fait concurrence à ce qu'offre le partenaire. C'est sans parler du fait que Postes Canada prend des décisions arbitraires. Il faut donc mettre en place un processus qui permet de porter les décisions en appel, de les diffuser et de les soumettre à des consultations.
Cela n'a pas nécessairement de lien avec l'organisme de réglementation; c'est plutôt un commentaire général. Nous croyons qu'il serait possible pour Postes Canada de travailler de plus près avec l'industrie, peut-être avec une certaine supervision, afin de mettre l'accent sur l'innovation au sein de l'industrie. Le bilan de Postes Canada n'est pas brillant de ce côté, mais il ne l'est pas beaucoup non plus du côté des consultations. Nous pensons que ce serait l'occasion pour Postes Canada d'accueillir l'aide d'un groupe extérieur pour améliorer sa structure de revenus.
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Merci, monsieur le président.
[Français]
Je vais commencer à poser mes questions.
Je suis un peu surpris de voir combien ténue est la différence entre la concurrence, le monopole, les avantages ou les interprétations liées à la concurrence entre le service aux entreprises et le service résidentiel.
Monsieur Hinds, vous avez parlé de dépliants et avez dit que tout le monde aimait en recevoir. C'est la première fois que j'entends cela. Évidemment, vous êtes en affaires. Toutefois, de mon côté, j'entends dire que les gens prennent toutes les publicités dans les boîtes communautaires et les jettent.
Je suis un ancien maire. On demande qu'il y ait une boîte de récupération à côté de la boîte communautaire pour y mettre la publicité plutôt que de la rapporter à la maison.
Vous demandez d'avoir plus d'accès, parce que Postes Canada a un avantage concurrentiel indu, selon vous, mais Postes Canada se dit en recherche de nouveaux revenus et en crise de confiance. Comment arrive-t-on à concilier les deux?
J'ai posé cette question à des résidants et à des usagers. Voulez-vous qu'on subventionne Postes Canada malgré ses déficits? Je vous pose la question à titre de représentant d'une entreprise. Voulez-vous que le gouvernement du Canada subventionne Postes Canada pour subventionner les entreprises?
:
Je vais répondre en anglais.
[Traduction]
Voilà à quoi se résume la situation, selon moi. Je crois que dans les régions urbaines du Canada, il y a de la concurrence et on doit l'encourager. Cela reste une subvention, quoi qu'il en soit. Si vous subventionnez Postes Canada en éliminant la concurrence, cela reste essentiellement du subventionnement.
Compte tenu de la réalité des régions rurales du Canada, il se peut qu'il faille offrir des subventions ou adopter des politiques pour soutenir les collectivités locales. Nous en avons parlé avec le gouvernement actuel.
Comme vous le savez, l'industrie des journaux vit tout un chambardement. Le gouvernement fédéral a mené cinq consultations avec nous afin de savoir comment continuer de livrer des nouvelles locales aux collectivités. Il devrait y avoir une solution qui met à profit une politique publique; du moins, nous l'espérons. Pour soutenir les collectivités locales, je devine que cela pourrait être la solution. Que ce soit par l'entremise de Postes Canada ou d'allégements fiscaux, ou encore par la réglementation de la publicité faite par des entreprises américaines comme Google et Facebook, je crois que le gouvernement devra intervenir d'une manière ou d'une autre, surtout quand il est question des régions rurales et éloignées du Canada.
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Les petites collectivités ne peuvent compter que sur Postes Canada. Pour le journal d'une petite collectivité, c'est la seule option. Tous les journaux du pays qui ont pu s'adresser à des transporteurs ou employer d'autres moyens l'ont fait. Pour vous montrer le changement survenu, il y a 25 ans, Postes Canada livrait le courrier dans les banlieues du Canada. Plus maintenant. Elle le fait pour les collectivités rurales éloignées, qui n'ont pas d'autre choix. Les distances et la structure des coûts l'interdisent. Nous avons essayé, les magazines aussi, un certain nombre de solutions.
Le défi, pour nous, est que la nouvelle devient de plus en plus un besoin à combler rapidement: on la veut immédiatement. Même dans les hebdomadaires, les lecteurs la réclament sur le champ, les annonceurs aussi. Dans notre secteur particulièrement, ils veulent qu'on respecte la date promise de livraison. La livraison promise pour le jeudi, avant les emplettes de fin de semaine, doit se faire ce jour-là.
Nous avons constaté que, particulièrement du fait de la transformation du service postal, le temps de livraison, habituellement de trois jours, prend maintenant de trois à cinq jours. Il peut même en prendre six, puisque trois à cinq jours sont seulement un objectif. Diriger une petite entreprise et un petit journal dans une petite ville où les annonceurs ont des besoins... Eux ont le choix des options: publicité en ligne et tous les autres moyens. Vous, vous n'avez pas le choix. C'est Postes Canada qui livre votre produit dans le délai dans lequel il est censé pouvoir le faire. En cas de pépin, quand le journal censé être livré le jeudi l'est le mardi suivant, l'annonceur exige remboursement. C'est ce qui arrive.
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Les augmentations de prix ont plutôt été importantes dans la plupart des petites entreprises. Pas au point de cesser de considérer Postes Canada comme au moins une option, mais sans accélérer l'adoption de... Dans certains cas, l'écart de prix entre un transporteur privé et Postes Canada n'est pas aussi important qu'il a déjà été. Postes Canada reste un fournisseur de services à coût modique, mais cet avantage, qu'elle possède encore, s'amenuise rapidement.
Les groupes les plus inquiets sont ceux qui se servent de Postes Canada pour expédier des articles à faible coût, des articles dont la valeur en soi n'est pas si grande, et je pense que les journaux et les magazines entreraient dans cette catégorie. Manifestement, la livraison de ce produit prend une telle importance qu'elle peut créer des pressions énormes. Cela accélère l'érosion de la clientèle de Postes Canada, ce qui, à mon avis, n'est utile à personne, mais cela exerce aussi de la pression sur les petites entreprises qui restent fidèles.
L'autre sujet d'inquiétude que j'éprouve toujours découle de la possibilité d'une interruption du service qui immobiliserait les paiements avec le courrier. Comme les opérations bancaires en ligne gagnent en popularité et que le nombre d'options électroniques pour les paiements d'entreprise à entreprise augmente, c'est une autre clientèle que perdra Postes Canada. Nous devons nous en inquiéter.
Les PME sont très sensibles aux prix.
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Non, mais j'allais le faire. Merci encore une fois de votre aide.
Madame, messieurs, c'est l'usage, au Comité, quand les membres ont des questions supplémentaires à poser, de demander à tous nos témoins de bien vouloir nous autoriser à leur faire parvenir ces questions directement à eux. Inversement, si vous, les témoins, possédez des renseignements supplémentaires que vous souhaitez communiquer aux membres du Comité, dans l'intérêt de notre étude, je vous en prie, faites-le en les communiquant directement à notre greffière.
Merci encore une fois d'être venus. Vos exposés ont été instructifs et extrêmement utiles.
Je demande au prochain groupe de témoins de s'approcher le plus rapidement possible pour nous éviter de prendre du retard. Je suspends les travaux.
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Merci, monsieur le président.
Merci de donner à l'Association des municipalités de l'Ontario l'occasion de comparaître devant le Comité et de contribuer à vos discussions sur Postes Canada. C'est une question qui intéresse beaucoup les Ontariens.
L'Association des municipalités de l'Ontario, l'AMO, est une organisation sans but lucratif qui représente la presque totalité des 444 municipalités de l'Ontario. Les municipalités possèdent beaucoup de responsabilités législatives, et elles sont aussi perçues comme étant la voix des intérêts généraux des collectivités.
L'Association accueille les efforts fédéraux visant à chercher des moyens d'améliorer le service postal au Canada. Des collectivités de toutes les tailles dépendent du service postal, que ce soit pour recevoir ou payer des factures, livrer des articles commandés en ligne, répondre à d'autres besoins des entreprises ou, encore, avoir des nouvelles d'êtres chers et garder le contact avec des organisations, des oeuvres de charité et d'autres. Nous sommes sensibles à la décision fédérale de retarder la fin de la livraison du courrier à domicile en entreprenant ce nouvel examen.
L'Association fait partie de la Fédération canadienne des municipalités. Avec nos membres, nous sommes consternés par la décision d'adopter la boîte postale communautaire comme modèle national du service postal. Après la publication du plan d'action en cinq points de Postes Canada, beaucoup de conseils municipaux membres de l'Association ont adopté des résolutions pour exprimer leur indignation devant l'abandon graduel de la livraison du courrier à domicile.
Postes Canada a mentionné ses difficultés financières, mais la fin du service créerait des problèmes financiers et autres aux citoyens et aux entreprises. Les sujets sans cesse soulevés ont été l'accessibilité — particulièrement pour les personnes âgées et handicapées — et la responsabilité du maintien et de l'entretien des boîtes postales communautaires, c'est-à-dire tout ce qui va de la pose d'un revêtement sur le sol à la répression du vandalisme et du vol dans les parages de ces boîtes postales en passant par l'éclairage, le déneigement et le nettoyage. Le vandalisme et le vol sont d'une importance absolue pour les municipalités: nous n'avons aucun intérêt à hériter d'une responsabilité fédérale de l'entretien de ces boîtes postales ou à en être rendus responsables directement ou non.
La Ville de Hamilton a décidé de réagir en soumettant la question à la Cour d'appel de l'Ontario. La ville défend son règlement sur l'installation d'équipement sur, dans ou sous la réserve de voirie municipale. Cela comprend les boîtes postales communautaires de Postes Canada. En attendant le jugement de la Cour d'appel, les municipalités ne se voient pas comme acteurs dans l'entretien de ces nouvelles infrastructures localisées sur leur propriété.
Votre examen intéresse beaucoup les citoyens des municipalités rurales de l'Ontario. Beaucoup ont été les premiers à constater la fin de la livraison du courrier à domicile. En milieu rural, les distances entre les maisons et les entreprises peuvent être importantes, et les moyens de transport personnel peuvent être limités. De plus, que dire de la neige? Il y a aussi généralement des régions où résident une plus grande proportion de personnes âgées alors que les jeunes vont s'établir dans les grandes villes.
Les préoccupations des collectivités rurales se retrouvent dans le Protocole du service postal canadien de 2009, qui maintient un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste ruraux et établit des normes de service pour la livraison du courrier et l'accessibilité des bureaux de poste. Il est capital que toute modification apportée aux services opérationnels de Postes Canada respecte ce protocole.
Des municipalités ont également soulevé la question des services bancaires postaux. La reprise de ces services peut remédier à certaines des difficultés qu'affrontent les collectivités rurales, éloignées et nordiques, qui disposent d'un accès limité aux établissements financiers. Certains croient que l'Internet y a pourvu. Cela peut paraître étonnant, mais l'Internet à haute vitesse n'est pas présent partout en Ontario. En fait, beaucoup de régions ne sont pas desservies par un service Internet fiable.
Beaucoup de questions ont été soulevées dans nos communautés et soumises à votre examen par les municipalités. Si des frais étaient imposés pour la livraison du courrier à domicile, nous recommandons vivement au gouvernement fédéral de respecter les autorités municipales décideuses pour éviter tout conflit avec l'aménagement local du territoire, ses pratiques ou ses politiques. L'Association a avalisé trois principes fondamentaux de la Fédération canadienne des municipalités, qui devraient être respectés par tout changement apporté au service de Postes Canada.
D'abord, si le gouvernement fédéral décide de poursuivre l'abandon graduel de la livraison à domicile, des consultations sérieuses s'imposent avec les municipalités. L'aménagement du territoire, la prestation des services et la gestion des emprises obéissent, dans chaque municipalité, à des règles particulières. Il n'y a pas de solution unique. Postes Canada doit consulter les municipalités pour que l'emplacement des boîtes postales communautaires réponde aux besoins collectifs.
Ensuite, nous préconisons la création de bons partenariats entre nos ordres de gouvernement. Comme je l'ai dit, les municipalités ne sont absolument pas désireuses d'hériter de la responsabilité de l'entretien des boîtes postales communautaires. Soit Postes Canada travaille avec elles pour mettre au point des marches à suivre acceptables pour l'entretien de ces infrastructures, soit Postes Canada doit les indemniser pour ce travail.
Enfin, toutes les décisions fédérales doivent être conformes aux plans municipaux d'urbanisme. Toute modification de la livraison du courrier à domicile doit se conformer aux stratégies et aux processus locaux visant à favoriser et à appuyer les collectivités soucieuses des personnes âgées et des personnes handicapées.
Nous croyons que, en suivant ces principes, le gouvernement fédéral et les municipalités seront le mieux en mesure de collaborer entre eux.
Merci, monsieur le président.
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Bonjour et merci, monsieur le président.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir invité.
[Traduction]
Je m'appelle Alex Mazer. Je suis un associé fondateur d'une entreprise appelée Common Wealth, dont le but est d'élargir l'accès aux régimes de retraite, en collaborant avec les syndicats, les gouvernements et certains des principaux régimes de retraite du Canada.
Pendant toute ma carrière, j'ai eu l'occasion de conseiller, sur la retraite, des ministres, des hauts fonctionnaires, des dirigeants syndicaux et des cadres de régimes de retraite. Aujourd'hui, je voudrais vous faire part de certaines de mes réflexions sur l'avenir des retraites à Postes Canada.
Comme vous le savez, les retraites ont été l'objet d'intenses négociations au cours des récentes négociations collectives et elles occupent une grande place dans le document de travail du groupe de travail. Je crois que l'avenir appartient aux régimes qui créeront de la valeur pour la direction, les syndicats et le gouvernement. Pour ce faire, il faudra des compromis et de la créativité, mais je crois que l'effort en vaut bien la peine.
Aujourd'hui, je tenterai de démontrer trois choses.
D'abord, le passage des régimes à prestations déterminées aux régimes à cotisations déterminées peut être plus coûteux que la réforme du régime en vigueur et il n'est probablement pas la meilleure option.
Ensuite, toute réforme du régime de Postes Canada doit se conformer aux principes sous-jacents aux meilleurs régimes de retraite généraux du Canada
Enfin, pour optimiser les résultats, le gouvernement devrait envisager de parrainer un processus multipartite appuyé par les bonnes compétences en la matière.
On propose souvent l'adoption d'un régime à cotisations déterminées comme remède aux problèmes de viabilité des régimes de retraite. La direction de Postes Canada vient d'adopter le régime à cotisations déterminées pour les nouveaux employés embauchés dans certains secteurs de son personnel. Elle a proposé une telle modification dans une négociation collective récente avec le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes.
Si, en soi, les régimes à cotisations déterminées diminuent les responsabilités financières des employeurs par rapport aux régimes à prestations déterminées, la situation est beaucoup plus complexe quand il existe déjà un régime à prestations déterminées, comme dans le cas qui nous occupe. Dans un article qu'il a publié en 2014 sur le passage, dans la fonction publique, des régimes à prestations déterminées aux régimes à cotisations déterminées, M. Robert Brown a examiné cette question. M. Brown est professeur émérite de science actuarielle à l'Université de Waterloo et il a déjà été président de l'Association actuarielle internationale.
Dans cet article, il concluait que: d'abord la transformation d'un régime en régime à cotisations déterminées rendait la gestion d'un passif non financé actuel plus risqué et plus difficile; ensuite, le passage au régime à cotisations déterminées augmente en fait le coût du versement d'une prestation de retraite comparable — de 77 %, selon les modélisations de M. Brown. Ces conclusions correspondent à celles du document de travail du groupe de travail, qui affirme que l'adoption d'un régime à cotisations déterminées répondrait avec une efficacité limitée aux difficultés financières de Postes Canada.
Si un régime à cotisations déterminées n'est pas la bonne option, cela ne signifie pas que des réformes au régime de retraite de Postes Canada ne soient pas souhaitables. Ces réformes devraient viser l'augmentation de la viabilité financière de la société tout en assurant une sécurité de retraite la plus grande possible. Les meilleurs régimes de retraite généraux du Canada fournissent un ensemble de principes de conception qui peuvent orienter ces réformes.
Ces principes incluent, d'abord, le financement et la gouvernance conjoints par le syndicat et la direction. En effet, cela améliore la surveillance et étale les risques. C'est la raison pour laquelle l'Ontario a exempté les régimes conjointement financés de l'obligation de capitaliser le déficit de solvabilité des régimes. Le gouvernement fédéral devrait envisager une exemption semblable pour Postes Canada, à condition que son régime de retraite soit financé et géré conjointement. La suppression de la principale cause du problème dont souffre le régime de retraite de Postes Canada reposerait donc sur ce principe.
Ensuite, le régime doit être indépendant de celui qui le finance. Les régimes de retraite les plus efficaces sont indépendants de leurs bailleurs de fonds. Les régimes de retraite ne sont pas la principale activité d'entreprise de Postes Canada. Pourtant, la société conserve la responsabilité complexe de le gérer. Le régime réformé de Postes Canada pourrait être géré par un organisme fiduciaire indépendant dont le seul mandat serait d'assurer aux membres une sécurité de retraite selon un bon rapport coûts/efficacité.
Ensuite encore, vient la gestion professionnelle à l'interne des investissements. En ayant à l'interne des professionnels qui gèrent les investissements, les régimes de retraite généraux du Canada qui ont le plus de succès compriment les coûts et créent des possibilités d'investissement qui aident à augmenter les rendements en fonction des risques. Avec près de 22 milliards d'actif, Postes Canada peut disposer de l'échelle nécessaire pour mettre en place son propre gestionnaire de régime de retraite à l'interne. L'organisation pourrait aussi envisager de faire gérer son actif par un autre gestionnaire public, comme Investissements PSP, qui gèrent les actifs de la plupart des régimes fédéraux de retraite généraux.
Enfin, il faut assurer une certaine souplesse à la conception du régime. Beaucoup de régimes de premier plan permettent des corrections dans le cas où les hypothèses ne sont pas vérifiées par les faits. Par exemple, beaucoup de régimes rendent l'indexation conditionnelle au rendement des investissements. De tels compromis ne seront pas faciles, mais ils sont susceptibles d'être nécessaires à la viabilité à long terme du régime.
Pour appliquer ces principes dans le contexte particulier de Postes Canada, le gouvernement devrait mettre sur pied un processus spécial dont le mandat serait de concilier la viabilité financière et la sécurité de la retraite. Il devrait faire appel à des représentants de la société et de ses syndicats, de même qu'à une palette de compétences interdisciplinaires recrutées chez les professionnels des régimes de retraite.
Voilà qui conclut mes observations. J'ai bien hâte de répondre aux questions du Comité.
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Je vous remercie de m'autoriser à vous adresser la parole. Je suis membre d'ACORN Canada, une organisation composée de 80 000 membres au Canada réunissant des personnes à faible et à moyen revenus.
Le document de travail Postes Canada à l'ère du numérique rate sa cible en ce qui concerne l'inclusion financière et la nécessité de services bancaires postaux comme solution de rechange aux prêts sur salaire.
Une étude récente effectuée auprès de 250 membres d'ACORN montre que 67 % d'entre eux ont recours aux prêts sur salaire. Le problème de l'inclusion financière au Canada, relativement au prêt sur salaire, n'est pas que les emprunteurs ne possèdent pas de comptes bancaires. En fait, les compagnies qui prêtent sur salaire exigent que l'emprunteur en possède un. Le problème est que les personnes à faible revenu et à revenu modéré n'ont pas accès aux prêts à court terme pour les personnes en situation de crise.
Un autre problème important est la nature prédatrice des formules de prêts sur salaire qui obligent les emprunteurs faisant des emprunts successifs à verser des intérêts élevés — 400 à 600 % au Canada — sur de courtes périodes de remboursement.
L'idée des services bancaires postaux comme solution de rechange aux produits de prêts sur salaire est de fournir aux emprunteurs une option à faible coût en temps de crise. Chez les clients des prêteurs sur salaire, la demande d'argent n'est pas élastique. Cela signifie qu'ils finiront par payer un prix élevé pour les prêts à court terme, d'où l'observation de l'Association des banquiers canadiens selon laquelle il n'est pas utile d'accorder des crédits supplémentaires aux clients qui ont déjà épuisé les autres lignes de crédit. Ce n'est pas logique. Il s'agit en fait de fournir une solution de rechange à des gens qui accèdent déjà à des produits dont les taux d'intérêt sont élevés.
Il est vrai que les caisses de crédit offrent de plus en plus de petits prêts à faible coût à leurs membres; cependant, leur rayon d'action est court. Voilà pourquoi des services bancaires postaux pourraient combler cette lacune, et on devrait les structurer selon ce modèle. En fait, il est faux que les banques offrent des prêts à court terme et à faible coût aux personnes à faible revenu qui empruntent sur leur salaire. L'étude récente d'ACORN montre que le refus des banques d'accorder la protection du découvert, une marge de crédit et une carte de crédit à leurs clients force souvent ces gens à emprunter sur salaire.
De plus Postes Canada à l'ère du numérique cite l'Association des banquiers canadiens selon qui beaucoup de clients des prêteurs sur salaire choisissent ce service en raison de l'anonymat relatif qu'il procure. D'abord, ces clients ont recours à ces prêts parce qu'ils ont besoin des premières nécessités: nourriture, logement locatif, réparation de voiture et autres. Ensuite, la raison pour laquelle le gouvernement citerait dans son examen un organisme qui tout en représentant les plus grandes sociétés, les banques, comprendrait les motifs de ceux qui empruntent sur salaire, mais pour laquelle il ne citerait aucun groupe de consommateurs est grotesque.
En ce qui concerne la rentabilité des prêts sur salaire, Vancity offre un produit à 20 %, avec un remboursement plus faible. C'est un modèle que nous proposerions pour les services bancaires postaux. Même en Alberta, des frais de 15 $ pour un emprunt de 100 $ sur salaire, en deux semaines représentent environ 390 %.
À noter que Money Mart, le premier prêteur sur salaire au Canada, appartient à Lone Star, propriété de John Grayken, dont les actifs sont de 64 milliards de dollars, d'après Forbes Magazine. Ce modèle d'entreprise oblige les emprunteurs à contracter des prêts multiples.
Des données de la Colombie-Britannique montrent que le nombre moyen de prêts sur salaire par emprunteur en 2014 était de 4,3 et que le nombre d'emprunteurs qui en contractaient au moins 15 avait augmenté d'un tiers. En Nouvelle-Écosse, en un an, 40 % des emprunts ont été contractés par des emprunteurs à répétition et 22,3 % des emprunteurs contractaient au moins huit emprunts.
Les gens ont cruellement besoin de solutions de rechange à taux d'intérêt modéré et à court terme, partout au pays, et nous croyons que les services bancaires postaux leur en offriront.
Bienvenue dans la circonscription de Don Valley-Est.
Madame Dollin, j'ai des questions pour vous.
Nous avons multiplié les consultations. Nous avons parlé à Postes Canada elle-même, comme société et, aussi, aux membres du groupe de travail, etc., et nous revenons de Montréal et de Blainville où nous avons entendu les municipalités.
Oui, nous comprenons que Postes Canada a adopté une démarche qui vient typiquement d'en haut, qu'elle n'a consulté personne et elle le sait. Quand on provoque le changement, il faut consulter les intéressés. Les maires nous ont dit, comme vous le savez, « pas dans ma cour », mais nous savons que la livraison du courrier diminue et que Postes Canada doit se réinventer. Pour ce processus, aucune solution n'est universelle, en raison de l'étendue du pays et aussi de la division entre les villes et la campagne.
Si Postes Canada devait recommencer les consultations, seriez-vous bien disposés à l'égard de différentes solutions...? Parce que nous avons besoin de solutions.
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Je vous remercie de la question.
Je pense que l'idée de nouvelles consultations est bonne. Je crois dans les processus par le bas plutôt que par le haut. Nous croyons dans la consultation des localités où les boîtes postales communautaires ont donné de bons résultats, pour nous orienter vers les pratiques exemplaires de gestion plutôt que vers celles qui ont échoué. Et il y a des leçons à tirer des échecs. Ce serait un début. Consulter les clients qui ont éprouvé le moins de problèmes et découvrir les causes.
Je proposerais aussi d'examiner le travail effectué par l'une de nos associations membres, la Rural Ontario Municipal Association, qui a consacré tout un livre à l'examen du problème au travers du prisme du Nord et de la ruralité. Je pense que c'est essentiel à la prise de décisions, particulièrement dans le nord de l'Ontario et dans l'Ontario rural, parce que, comme vous l'avez reconnu, il n'y a pas de solution unique, et ce qui marche dans votre circonscription, ici, ne marchera pas à Kenora, à Red Lake ni même dans l'est de l'Ontario rural.
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Il y a quelques questions ici. J'essaierai d'y répondre.
La première est sur les états financiers du régime. Une partie du débat, je pense, que le Comité a entendue, porte sur la nécessité, pour le régime, de faire des versements pour capitaliser son déficit de solvabilité, parce que le mode de financement des deux régimes diffère. C'est soit dans l'hypothèse que la société poursuivrait son activité, soit dans celle où elle liquiderait, ce qui correspond à la capitalisation du déficit.
En Ontario, qui, d'après moi, procède de la bonne façon, cela revient fondamentalement à dire qu'il faut financer la capitalisation si on n'adopte pas certaines modifications sur le plan de la gouvernance. Si on fait des modifications pour améliorer le régime...
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Parlons de régimes de retraite.
Je vous remercie de vos observations. Nous n'avons pas assez de temps pour écouter tout ce que vous avez à dire, mais je tiens à entendre quelques observations.
Vous avez parlé de régimes à prestations déterminées par rapport aux régimes à contributions déterminées. Nous en discutions en ligne hier. Nous avons vu que, avec Unifor et GM, tous bénéficiaient d'une clause de droits acquis pour le régime à prestations déterminées, mais tous les nouveaux contribuaient au régime à contributions déterminées. Vous avez fait des observations sur les prestations comparables. Ce régime n'est pas à prestations comparables, et je pense que ce qui aurait été proposé pour Postes Canada ne l'était pas non plus.
Si les prestations ne sont pas comparables, est-ce une solution pratique pour économiser, en grande partie comme General Motors ou Unifor l'ont fait. Je reconnais que tous voudraient économiser, mais la réalité est ce qu'elle est.
En tant que personne qui a dû défendre le caractère nuancé de l'orientation du Parti libéral au cours de la dernière élection, je voudrais préciser que c'est exactement ce que nous avons promis, monsieur Weir, soit que nous mettrions un frein au changement et que nous consulterions les Canadiens et essayerions de mieux gérer le changement. Vous auriez dû parler de l'orientation de votre parti, qui a été rejetée par les Canadiens. Je vais maintenant continuer.
Je dirais que nous parlons ici de gestion du changement, car le rapport du groupe de travail indique clairement que si l'on préconise une approche visant le maintien du statu quo pour Postes Canada, cela se traduira par une situation déficitaire de 700 millions de dollars par année dans environ 10 ans, et c'est ce que nous essayons d'éviter. Nous essayons de sauver Postes Canada. C'est important pour les Canadiens.
Ma première question s'adresse à vous, madame Dollin. Quelle a été l'expérience de vos membres avec la direction actuelle de Postes Canada pour la gestion du changement?
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Certainement, et je vous remercie, monsieur Brassard.
En tant qu'ancien conseiller municipal, vous comprendrez que, tout d'abord, personne n'en veut. Les gens disent toujours « pas dans ma cour » ou « pas à côté de chez moi ». Lorsqu'on planifie, lorsque les plans de lotissement sont prêts, et qu'on fait les choses à l'avance, lorsque les acheteurs potentiels de cette propriété déménagent, ils savent ce qui s'y trouvera; ce qui diffère des situations où c'est effectué après. Je crois que c'est possible dans le cadre de consultations. Je pense que les installer à des endroits où elles sont accessibles et où il y aura moins de vandalisme est un autre élément qui, à mon avis, n'est pas complètement pris en compte à l'heure actuelle.
De plus, il s'agit également de les rendre accessibles à tous. Dans ma collectivité, il y a des « superboîtes postales », et nous recevons constamment des appels de gens qui nous disent qu'il y a une flaque d'eau devant ou qu'il n'y a pas l'infrastructure qui permettrait aux gens d'y avoir accès. Même si ce n'est pas notre responsabilité, si nous leur disons d'appeler Postes Canada, les gens disent que nous ne faisons que renvoyer la balle à d'autres. On finit par devoir régler le problème parce que tout ce que les autres intervenants, les gouvernements provinciaux et fédéral, ont tendance à ne pas faire retombe entre les mains de la municipalité.
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Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de nous avoir présenté des exposés instructifs.
Je n'ai qu'un commentaire secondaire, madame Dollin. En tant que politicien — et je suis certain qu'une bonne partie d'entre nous savent exactement de quoi je parle —, vous avez tout à fait raison de dire que dans les petites villes, le bureau de poste est un espace dans lequel se concentrent toutes les activités. Lorsqu'un politicien fait campagne dans une petite ville, un bon vieux truc consiste à y entrer avec son véhicule sur lequel son nom est affiché et à se stationner directement devant le bureau de poste. Je sais que tous les jours, chaque membre de la collectivité s'y rendra. Les gens sauront que le politicien y est allé.
Quoi qu'il en soit, merci beaucoup.
Encore une fois, je vous propose ce que nous proposons à tous nos témoins. Si vous avez d'autres renseignements à fournir au Comité — et je crois que c'est votre cas, monsieur Mazer —, n'hésitez pas à communiquer avec notre greffière et à les lui donner. À l'inverse, si des membres du Comité ont d'autres questions à vous poser, j'espère que vous nous permettrez de communiquer directement avec vous.
Merci beaucoup. Nous allons suspendre la séance quelques minutes jusqu'à ce que notre prochain groupe de témoins soit prêt.
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Mesdames et messieurs, chers collègues, je crois que nous allons maintenant commencer, si possible. Nous accueillons beaucoup de gens.
Je suis sûr que tous nos témoins ont entendu des exposés de nos témoins précédents. Je ne crois donc pas qu'il soit nécessaire d'expliquer le processus.
Cependant, je dirai seulement que puisque nous avons un certain nombre d'invités — je crois que six personnes présenteront de brefs exposés —, je les incite à essayer de s'en tenir à cinq minutes au maximum. Il n'y aura alors qu'un tour comprenant des interventions de sept minutes, ce qui nous permettra de respecter notre horaire.
Cela dit, j'ai la liste des témoins, et nous allons commencer.
Nous entendrons tout d'abord M. Rae. Allez-y, s'il vous plaît. Vous disposez de cinq minutes.
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Mesdames et messieurs, bonjour.
Je m'appelle John Rae. Je comparais devant le Comité à titre de premier vice-président du Conseil des Canadiens avec déficiences. Il s'agit d'une coalition nationale qui défend les droits des personnes handicapées et qui oeuvre pour l'avènement d'un Canada accessible et inclusif. À ce titre, nous estimons que des services de livraison du courrier à domicile fiables font partie intégrante de ce qui fait du Canada un grand pays.
Plus précisément, nous appuyons le moratoire du gouvernement sur l'ajout de boîtes postales communautaires. Nous recommandons que le moratoire soit permanent, et qu'on revienne en quelque sorte sur les travaux précédents, si possible, de sorte qu'un plus grand nombre de Canadiens reçoivent leur courrier à domicile.
La transition vers l'utilisation de boîtes postales communautaires a un effet négatif disproportionné sur notre collectivité, et également sur les femmes victimes de violence conjugale, à mon avis. Pour certains d'entre nous, se rendre simplement à la boîte postale constitue un obstacle, un nouvel obstacle. En 2016, nous croyons qu'il est inacceptable que des organismes publics prennent des mesures créant de nouveaux obstacles nous empêchant de participer à la société canadienne, et c'est ce qui se passe.
Notre ancien président, M. Tony Dolan, qui vit dans une banlieue de Charlottetown, a déjà besoin de l'aide de son épouse pour obtenir son courrier. Je pense que c'est inacceptable.
Nous ne voulons pas d'autres boîtes postales communautaires. Nous croyons que Postes Canada est un service public et, à ce titre, qu'il doit le demeurer. Par conséquent, il faut renoncer à toute idée visant la privatisation. Dans les régions rurales, c'est particulièrement important, et c'est l'une des nombreuses raisons pour lesquelles nous appuyons l'idée d'offrir des services bancaires postaux.
Nous avons entendu de sombres prédictions sur l'avenir de notre service postal. Jusqu'ici, la situation financière de Postes Canada des dernières années ne confirme pas cette paranoïa. Il est vrai que l'utilisation du service postal a changé parce que de plus en plus de gens ont recours à Internet. Cela constitue un problème pour notre collectivité, qui comprend un grand nombre de gens pauvres n'ayant pas les moyens de s'acheter un ordinateur.
Si nous examinons ce qui s'est passé jusqu'à maintenant, Postes Canada a fait de l'excellent travail pour trouver de nouvelles sources de revenus. Le service bancaire postal est l'un des nouveaux éléments qui suscitent notre intérêt et qui devraient être examinés sérieusement, à notre avis. Nous croyons que le bureau de poste se trouve dans une position unique, compte tenu du nombre de points de vente qu'il y a déjà partout au pays, pour instaurer un tel système et l'administrer de façon efficace.
Comme l'ont mentionné d'autres témoins, cela aiderait à régler les problèmes liés aux sociétés de prêt sur salaire. Je pense qu'Al Capone aurait été fier que ces gens aient trouvé une façon de faire légalement ce que lui et ses petits amis usuriers ont été en mesure de faire dans les années 1930. Je crois qu'il serait fier d'eux. Ces organismes s'en prennent en particulier aux pauvres, et la pauvreté est tellement présente dans notre collectivité; c'est pourquoi je crois que c'est une avenue intéressante.
L'une des raisons pour lesquelles je pense que l'utilisation du courrier postal a diminué — une seule parmi tant d'autres —, c'est que les tarifs ont augmenté de façon excessive. Cela a eu de terribles conséquences pour les petites entreprises qui, après tout, nous dit-on, sont les principales sources de création d'emplois au pays, de même que pour les organismes communautaires qui utilisent le service postal pour envoyer des avis de convocation ou mener des campagnes par publipostage. J'espère que nous ne ferons plus face à de telles hausses excessives des tarifs.
Je termine en disant que nous voulons des services de livraison du courrier à domicile fiables et réguliers, cinq jours par semaine, partout au Canada.
Merci.
:
Je vous remercie beaucoup de m'accueillir.
Je m'appelle Benjamin Dachis. Je suis le directeur associé de la recherche à l'Institut C.D. Howe, un organisme indépendant et sans but lucratif dont l'objectif est d'améliorer le niveau de vie des Canadiens en favorisant des politiques publiques économiquement viables.
Je suis l'auteur de l'étude de l'Institut C.D. Howe intitulée How Ottawa Can Deliver a Reformed Canada Post. Je crois qu'il est temps que le Canada fasse une réforme de ses services postaux afin qu'il puisse rattraper le retard qu'il a pris par rapport à d'autres pays et que les Canadiens puissent profiter des services postaux les plus efficaces possible.
L'importance du problème lié à la concurrence de Postes Canada est énorme. Les coûts de main-d'oeuvre de cette société sont 41 % supérieurs à ceux d'entreprises comme UPS et DHL. C'est un gros problème. Selon Ernst & Young, les coûts liés à la main-d'oeuvre représentent environ 70 % des coûts totaux de Postes Canada. Les coûts liés à son régime d'avantages sociaux sont 60 % plus élevés que ceux de ses concurrents.
Au milieu de l'année actuelle, le déficit de solvabilité du régime de retraite de Postes Canada était d'environ 8 milliards de dollars. Il ne faut pas perdre de vue que le gouvernement lui a donné la permission spéciale de reporter la vaste majorité des paiements pour combler le déficit de son régime de retraite. La situation ne peut durer éternellement.
En ce qui concerne les pertes projetées, si l'on suppose que Postes Canada décidera de ne pas procéder à la conversion aux boîtes postales communautaires, elles sont de 100 millions de dollars en 2016 à plus de 700 millions de dollars en 2026. Il ne faut pas perdre de vue que ces pertes se situeront fort probablement au bas de la marge raisonnable, selon ce qui est indiqué dans le document de travail du groupe qui a fait l'examen sur Postes Canada.
Voilà pourquoi il est essentiel de changer en profondeur le modèle opérationnel de Postes Canada. C'est la solution à long terme. Elle est similaire à celle adoptée en Suède ou en Finlande, et qui consistait à éliminer complètement le monopole du gouvernement sur le ramassage et la livraison du courrier et à permettre à des concurrents du secteur privé de faire le travail.
La deuxième option consiste à éliminer le monopole gouvernemental de façon graduelle et à rationaliser Postes Canada de façon à ce que la Société puisse faire concurrence aux entreprises privées. Cela peut se faire par des contrats et par le franchisage.
Seulement environ 40 % des bureaux de poste sont gérés sous contrat, dans des pharmacies Pharmaprix, par exemple. Postes Canada n'est pas autorisée à fermer ou à franchiser près de 3 600 bureaux de poste en raison d'un moratoire sur la fermeture ou le franchisage des bureaux de poste en régions rurales qui a été adopté il y a 20 ans. Il est vraiment trompeur de parler d'un moratoire « qui vise le milieu rural », car il s'applique maintenant à des villes comme Brampton, Saskatoon, et Halifax. On parle ici de grandes villes canadiennes. Il ne faut pas oublier que le moratoire couvre maintenant 96 % de tous les endroits où Postes Canada mène ses activités.
À part la conversion aux boîtes postales communautaires, selon l'examen du groupe, augmenter le recours à des contrats est de loin la meilleure option pour réaliser des économies. La conversion en franchise des 800 bureaux de poste dont les volumes sont les plus élevés — soit moins d'un quart des bureaux protégés par le moratoire — se traduirait par des économies de 177 millions de dollars. Si Postes Canada convertissait ou franchisait tous ces bureaux, elle pourrait faire des économies de plus de 350 millions de dollars par année. Cela représente déjà la moitié de ce que la Société doit combler.
Postes Canada pourrait même aller plus loin et appliquer le modèle de franchisage au ramassage et à la livraison du courrier pour réaliser des économies encore plus importantes. Si l'offre de contrats pour le ramassage et la livraison du courrier entraînait des économies similaires, les économies de coûts seraient spectaculaires, sans qu'on ait nécessairement à réduire les normes de livraison.
De plus, cela inciterait grandement les employés contractuels à maximaliser leur productivité, en sachant qu'une faible productivité ou des demandes salariales excessives — ou la menace d'un arrêt de travail par un employé d'un entrepreneur ou un employé de Postes Canada — pourraient leur faire perdre leur contrat. Les employés contractuels et les employés de Postes Canada performeraient probablement mieux, les coûts seraient moins élevés — ou les deux.
Au moyen de l'attrition, Postes Canada pourrait augmenter graduellement la part des services et des contrats sans faire de mise à pied, puisqu'en vertu de la convention collective actuelle, il est interdit de mettre à pied la plupart des employés actuels. Selon l'examen, 25 % des employés de Postes Canada, soit 16 500 employés, pourront prendre leur retraite au cours des cinq prochaines années.
Peu importe la voie que choisira le gouvernement, et peu importe si cela inclut la privatisation complète de Postes Canada ou le choix minutieux de services privés, l'objectif, c'est d'avoir des services postaux concurrentiels et efficaces.
Je vous remercie encore une fois de l'invitation. Je suis impatient d'en dire davantage en répondant à vos questions.
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Merci beaucoup et bonjour à tous.
Je dois vous dire que je suis professeure au programme d'études sur le travail et la main-d'oeuvre et que j'ai dirigé un projet de recherche d'une durée de sept ans portant sur l'adaptation du travail et des milieux de travail canadiens en fonction des changements climatiques. Cette initiative s'inscrit dans une série de projets de recherche qui ont commencé en 2008 grâce au financement du Conseil de recherches en sciences humaines, et qui se poursuivront jusque dans les années 2020.
En prenant connaissance du document produit par le groupe de travail et de certains rapports de la SCP, j'ai été étonnée du manque de créativité stratégique dont on fait montre dans la recherche d'options pour l'avenir, ce qui m'a fait comprendre à quel point il était nécessaire d'élargir nos visées. J'utilise l'adjectif « nos » à dessein, car le rapport du groupe de travail témoigne vraiment de toute l'affection que portent les Canadiens à Postes Canada ainsi que de leur volonté de faire le nécessaire pour en assurer la survie.
Le groupe de travail avait pour mandat d'explorer la gamme des possibilités qui s'offrent à la SCP dans le contexte des nouveaux défis que pose l'ère numérique, notamment quant à la nécessité de générer davantage de revenus pour compenser la diminution du volume de lettres postées. Malheureusement, tant la SCP que le groupe de travail s'en tiennent à une définition trop étroite aussi bien des mesures à prendre que des perspectives de croissance et de diversification de la société d'État.
Le groupe de travail n'est pas allé bien loin dans sa recherche de solutions. Les options proposées se limitent aux mesures déjà mises à l'essai — sans succès — et aux avenues déjà empruntées, en mettant l'accent sur les réductions de services et d'emplois, avec quelques avancées vers de nouvelles sources de revenu. Mais ne pourrait-on pas en faire davantage?
Dans le cadre de nos propres recherches, nous avons examiné ce qui s'est fait ailleurs dans le monde. J'ai notamment pu discuter et collaborer avec le président de la commission américaine de réglementation des postes pour en apprendre davantage sur son travail. Et si nous posions la question autrement? Est-ce que la seule approche possible consiste à faire des compressions, à éliminer des emplois et à s'attaquer à la concurrence?
Si l'on s'interroge sur l'avenir des services postaux au Canada, deux questions peuvent se poser. Premièrement, comment Postes Canada peut-elle montrer la voie dans le contexte des transitions numériques et environnementales qui transforment actuellement l'économie et la société canadiennes, comme c'est le cas dans les autres pays développés? Deuxièmement, comment Postes Canada peut-elle contribuer au plan d'action crucial du gouvernement relativement aux changements climatiques? Bien que cet aspect ait été pour ainsi dire ignoré dans le rapport du groupe de travail, nous savons très bien qu'il sera au coeur de l'évolution à venir de Postes Canada.
Nous pouvons élargir la question. Comment Postes Canada peut-elle exercer un rôle de leadership en matière numérique et environnementale en cette période de transition? Nous ouvrons ainsi la voie à un rôle plus large pour Postes Canada en tant que chef de file pour ce qui est de l'innovation en environnement ainsi que de la formation de la prochaine génération des travailleurs des postes, car il y aura bel et bien une prochaine génération.
Dans plusieurs pays développés, les autorités postales offrent avec succès un éventail de services novateurs. Les syndicats représentant les travailleurs canadiens des postes ont proposé des stratégies de collaboration en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre produites par le travail de Postes Canada, car notre société d'État est effectivement l'une des grandes responsables de cette même pollution que nous devons freiner.
Je dois vous dire que lors des négociations de 2011, le principal syndicat a soumis à Postes Canada une proposition prévoyant deux mesures: premièrement, un audit environnemental des installations de taille moyenne en vue de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre; et, deuxièmement, un projet pilote sur l'écologisation du travail. Postes Canada n'a pas donné suite à ces propositions lors des négociations qui ont suivi. Il faut espérer qu'on y viendra.
Je veux aussi profiter de l'occasion pour vous citer quelques stratégies prometteuses pouvant contribuer à la transformation de Postes Canada en vue de la prochaine génération.
Premièrement, il faudrait procéder pour toutes les installations de Postes Canada à des audits environnementaux assortis de rapports produits en toute transparence.
Deuxièmement, il convient d'obliger Postes Canada à rénover tous les édifices postaux lui appartenant dans un souci de conservation d'énergie et de développement durable. Le gouvernement fédéral doit être disposé à financer ce genre d'investissements dans les infrastructures.
Troisièmement, Postes Canada devrait remplacer les 13 000 véhicules de sa flotte par des véhicules écologiques.
Quatrièmement, il ne faut pas sabrer dans les infrastructures, car les édifices, les services de livraison à domicile et les bureaux de poste locaux pour le ramassage des colis sont autant d'avantages concurrentiels pour Postes Canada dans un contexte de croissance exponentielle du marché des colis.
Cinquièmement, il conviendrait d'utiliser le réseau de livraison en place à d'autres fins. C'est bon pour les affaires et c'est également bon pour l'environnement.
Sixièmement, il faudrait, comme cela se fait ailleurs dans le monde, permettre aux travailleurs des postes d'acquérir des compétences en environnement pour devenir des spécialistes en surveillance de l'innocuité et en efficacité énergétique. On élargirait ainsi la gamme de services offerts par Postes Canada tout en mettant sur pied un bataillon d'experts environnementaux présents sur le terrain. Vous vous demandez peut-être qu'est-ce que Postes Canada viendrait faire dans cette galère, mais c'est exactement ce que font d'autres pays.
Je continue.
Septièmement, il serait rentable d'offrir une formation pour la surveillance de l'état de santé des aînés et des personnes handicapées dans les régions rurales.
Huitièmement, on pourrait confier à Postes Canada la responsabilité de la prestation de certains programmes sociaux du gouvernement, comme le fait La Poste en France.
Enfin, Postes Canada doit se donner un plan vert assorti d'échéances en temps réel.
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Je vous remercie de m'avoir invité.
Je m'appelle Gary Kirk et je suis propriétaire de la librairie A Good Read à Toronto. Il y a 20 ans, j'ai commencé, un peu pour m'amuser, à vendre des livres rares en ligne. Ce passe-temps est devenu sérieux à un point tel que j'ai pu, il y a neuf ans, ouvrir une véritable librairie où je compte maintenant quatre employés.
J'aime à croire que c'est la vision qu'entretient le gouvernement canadien quant à l'avenir du commerce électronique. Malheureusement, Postes Canada s'est révélé davantage un obstacle qu'un outil dans la croissance de mon entreprise, cette croissance étant principalement attribuable à l'utilisation des services postaux américains pour expédier mes livres à partir du sud de la frontière.
Le commerce électronique est là pour rester. En 2012, il comptait pour environ 5 % de l'ensemble du commerce de détail. En 2015, cette proportion dépassait légèrement les 9 %. Selon les prévisions, on devrait passer la barre des 20 % en 2019, et c'est notre système postal qui va déterminer la forme que cela prendra.
J'ai ici un graphique tiré d'un article publié par Global News en 2014. Je n'ai malheureusement pas assez de copies pour tout le monde, car mon imprimante m'a laissé tomber. Les barres de couleur rouge foncé représentent les entreprises de vente en ligne appartenant à des étrangers ou installées à l'étranger et leur part de marché dans le commerce électronique total. On s'en tient généralement aux 10 premiers dans ce genre de présentation, mais il a fallu se rendre ici jusqu'au 14e, sans quoi il n'y aurait pas eu d'entreprises canadiennes. Différents facteurs peuvent expliquer ce phénomène. Je vais essayer de vous les exposer aussi brièvement que possible.
Nous pouvons parler d'abord du modèle de fixation des tarifs utilisé par Postes Canada pour les colis. Nous pourrons traiter ensuite de l'avantage stratégique que Postes Canada confère aux vendeurs étrangers. Nous pourrions aussi considérer les distorsions du marché causées par les rabais extrêmement généreux accordés par Postes Canada à certains gros vendeurs.
Commençons par les tarifs. Si je veux expédier un livre relié à n'importe quel endroit aux États-Unis, je peux le faire pour moins de 3,50 $US. Au Canada, si je veux envoyer le même livre par la poste de l'autre côté de la rue, il m'en coûtera 12,90 $. C'est sans compter les rabais accordés aux vendeurs qui peuvent atteindre 20 %.
Ce sont des dépenses supplémentaires pour nous, mais le principal problème vient du fait que le tarif est établi pour chaque colis en fonction de ses dimensions, de son poids, et — le meilleur s'en vient — de l'achalandage au code postal d'origine et de l'achalandage au code postal de destination. Les tarifs peuvent ainsi varier de plus de 400 % pour des colis de même taille. Par exemple, un livre que je peux expédier de l'autre côté de la rue pour 10 $ me coûterait 35 $ pour un envoi à Canmore (Alberta). Je devrais payer plus cher pour expédier un livre de Toronto à Fergus (Ontario) que si je l'envoyais à Montréal, en raison de l'achalandage.
Ce n'est pas de cette manière que le commerce électronique fonctionne. Lorsque vous vendez un produit en ligne, vous devez fixer un tarif d'expédition ou vous en remettre à celui prévu par le site Web que vous utilisez. Vous n'avez toutefois aucun moyen de déterminer combien il vous en coûtera pour l'expédition à proprement parler, car il est impossible de savoir d'où viendra la commande. Vous pouvez toujours espérer que les clients seront majoritairement des résidants des grands centres, mais le fait est que bien des gens des petites localités plus isolées se tournent vers le commerce électronique pour obtenir les biens qu'ils ne peuvent pas trouver à proximité de chez eux.
La situation est d'autant plus irritante que je paierais un tarif unique fondé sur le poids si j'expédiais un livre au Canada à partir des États-Unis. Il en coûterait ainsi deux fois moins cher d'expédier un livre d'Hawaï jusqu'à Canmore que ce qu'il m'en coûte pour envoyer le même livre au même endroit. À mon sens, c'est tout à fait stupide, et je n'arrive pas à comprendre comment on peut justifier une telle chose.
Prenons l'exemple d'un CD que je voudrais envoyer ailleurs au Canada. Si l'employé du bureau de poste ne plie pas l'enveloppe pour s'assurer qu'elle ne contient que du papier, je pourrais m'en tirer pour environ 2 $ au tarif d'une simple lettre. Si l'employé décide de plier l'enveloppe et m'indique que je ne peux pas expédier quelque chose de rigide dans une telle enveloppe, le tarif passera à 8 $. Il en coûte à peine 4 $ pour expédier le même CD à partir de la Chine jusqu'à n'importe quel endroit au Canada. Nous créons ainsi une situation dans laquelle nos propres entreprises canadiennes sont fortement défavorisées. Il serait impossible pour quelqu'un de se lancer dans le commerce électronique en Alberta. Il devrait payer 40 % de plus pour expédier un livre à l'intérieur de son propre code postal, comparativement à ce que doit débourser un vendeur situé à Toronto.
J'aimerais vous dire en terminant que la situation n'est pas la même pour tous. Je suis bien placé pour le savoir, car je reçois quelques fois par mois d'Amazon.ca un message du genre: « Vos frais d'expédition sont trop élevés? Envoyez votre stock à notre entrepôt et nous nous occuperons de vos commandes. » Cela dit, tous les colis que j'ai reçus d'Amazon.ca m'ont été livrés par l'entremise de Postes Canada. En considérant les tarifs applicables, Amazon.ca exige, pour un colis que je pourrais expédier au coût de 9 $, des frais d'expédition de 3,75 $ pour les premiers 500 grammes - et 37 ¢ par la suite . Étant donné que ce tarif inclut une marge bénéficiaire, j'en déduis que l'entreprise profite d'un rabais d'au moins 80 %.
Dans le secteur du commerce électronique, les gens prennent leur décision d'achat en fonction du montant total obtenu en ajoutant les frais d'expédition au prix de l'article. Nous avons créé un véritable monopole: Amazon.com détient 23,6 % du marché du commerce électronique au Canada, suivi par Amazon.ca à 8,5 %.
Nous sommes une organisation sans but lucratif non partisane qui a pour mission de veiller à la sécurité financière et à la bonne santé des Canadiens qui prennent de l'âge. Je ne suis pas ici pour vous parler de la situation à Postes Canada, mais plutôt pour vous faire comprendre à quel point la livraison du courrier à domicile est un service essentiel au Canada.
Dans le cas des différents services offerts par nos gouvernements, comme la police, la lutte contre les incendies ou les autoroutes, nous n'exigeons pas la rentabilité. Nous reconnaissons qu'il s'agit là de coûts essentiels que doit assumer toute société, et je vous soumets que la livraison du courrier se situe, pour nos commettants, dans la même catégorie.
Le rapport produit en 2009 par Statistique Canada indiquait que seulement 21 % des citoyens de 75 ans et plus utilisaient l'Internet. La suppression progressive de la livraison du courrier traditionnelle pour la remplacer par des services en ligne pour tout le monde n'est donc pas une solution viable pour les personnes que nous représentons. Ce sont les chiffres d'il y a sept ans. Les services en ligne gagnent sans cesse en popularité, mais même à l'époque, seulement 45 % des gens de 65 à 75 ans utilisaient l'Internet.
Nos membres maîtrisent peut-être mieux l'Internet que d'autres, car ils sont 70 % à l'utiliser, mais la moitié s'en servent seulement pour Skype. Comme ils sont très nombreux à craindre des méfaits comme le vol d'identité, ils hésitent à utiliser l'Internet pour leurs transactions bancaires. Je dois avouer que certaines de ces craintes sont justifiées. Nous avons constaté des cas d'usurpation d'identité et d'atteinte à la sécurité des données.
En outre, il est physiquement trop difficile pour bon nombre de nos membres de se rendre à une boîte postale communautaire. Nous avons effectué un sondage auprès de nos membres et 18 % d'entre eux, soit près d'une personne sur cinq, ont indiqué que l'élimination de la livraison du courrier à domicile les placerait dans une situation difficile. Il faut penser aux conséquences d'une telle mesure pour nos aînés. Nous leur demandons de faire ce trajet pas nécessairement par une belle journée d'automne comme aujourd'hui, mais aussi parfois sur des surfaces enneigées et glacées où les risques de chute et de blessure sérieuse sont bien présents.
Les aînés incapables de se rendre jusqu'à la boîte postale pourraient devoir demander à quelqu'un d'autre de le faire pour eux — par exemple pour ramasser un chèque de pension ou d'autres versements gouvernementaux —, ce qui les expose à des abus. Nous savons que les abus semblables sont le lot d'une personne sur 10 parmi les plus de 65 ans. Nous mettons donc vraiment leur sécurité en péril, sans compter les risques de vandalisme associés à l'utilisation de boîtes postales communautaires. Ils peuvent devenir une cible facile pour certains.
Nous estimons certes que la livraison du courrier devrait être maintenue sous une forme ou une autre. Notre association est consciente de la conjoncture financière et ne se berce pas d'illusions. Nous sommes donc disposés à accepter certaines compressions dans les services, mais nous croyons que l'on devrait tout au moins maintenir la livraison du courrier une fois par semaine.
Il y a un autre point que je veux faire valoir. Non seulement les boîtes postales communautaires posent-elles un risque pour nos aînés en les exposant à des mauvais traitements physiques ou psychologiques, mais elles représentent aussi une importante source de pollution visuelle dans le voisinage. J'ai ici une photo que j'aimerais faire circuler. Je l'ai choisie parmi toute une sélection d'images trouvées sur Internet où l'on montre les déchets qui peuvent s'accumuler autour de ces boîtes communautaires. Ce n'est pas ce que nous souhaitons voir dans le quartier où nous vivons.
Nous exhortons donc le Comité à éliminer immédiatement les boîtes postales communautaires et à rétablir les services de livraison du courrier à domicile à raison d'au moins une fois par semaine.
Lorsque les libéraux ont promis au cours de la dernière campagne électorale fédérale qu'ils allaient arrêter les conservateurs et sauver Postes Canada, nous avions bon espoir que cela sonne le glas de la stratégie inconsidérée des conservateurs qui ont procédé à des compressions dans notre service postal public. On nous a alors promis que toutes les options seraient envisagées à l'exception de la privatisation.
Le groupe de travail mis sur pied plus tôt cette année pour examiner la situation à Postes Canada afin de cerner des options d'avenir pour la société d'État vient de rendre public son document de travail. Nous sommes préoccupés du fait que ce groupe de travail était composé d'anciens gens d'affaires et chefs d'entreprise. C'est un peu comme si on demandait au renard de construire le poulailler.
Nous sommes donc déçus, mais pas vraiment surpris de constater que le document de travail, plutôt que d'élargir les horizons de Postes Canada, préconise des mesures qui vont dans le sens des compressions conservatrices dans les services postaux et vont même encore plus loin. On souhaiterait notamment réduire la fréquence de livraison du courrier; permettre la fermeture de bureaux de poste dans des collectivités rurales et des petites villes en levant le moratoire visant de telles fermetures, délaissant ainsi davantage d'adresses de livraison du courrier à domicile au profit des boîtes postales communautaires; et imposer des frais aux gens, comme une taxe postale, pour la livraison du courrier à domicile.
Le document aborde bien quelques options en vue d'une expansion des services, mais s'attarde beaucoup moins à ces possibilités, mettant plutôt nettement l'accent sur les compressions. Parmi les options d'expansion envisagées, notons que la société pourrait devenir un fournisseur de services Internet; offrir des services de surveillance aux personnes âgées ou handicapées; offrir des emballages écologiques et un service de recyclage; créer un réseau de bornes de recharge pour les véhicules électriques; transformer les bureaux de poste en carrefours communautaires; offrir un service de distribution de marijuana; et offrir des services bancaires postaux dans une mesure très restreinte si les institutions financières sont intéressées.
Bon nombre de ces options plus positives axées sur le service à la population ont toutefois été escamotées ou rejetées. Certaines n'ont même pas fait l'objet d'une analyse et se retrouvent en annexe à la dernière page du document. D'autres possibilités soulevées, comme le rétablissement du programme Aliments-poste pour remplacer l'inefficace programme Nutrition Nord, n'ont été mentionnées nulle part.
Nous n'avons pas besoin de compressions dans les services postaux en milieu rural, et nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ces bons emplois, d'autant plus qu'ils sont si rares au sein de nos collectivités. Nous ne voulons pas entendre les libéraux dire que la privatisation n'est pas considérée pour les voir ensuite mettre en oeuvre une formule d'autoprivatisation des bureaux de poste en permettant à Postes Canada d'ouvrir un plus grand nombre de franchises et de fermer davantage de bureaux de la société.
De toute évidence, le groupe de travail a accepté les prétentions et les projections de la Société canadienne des postes concernant sa situation financière, notamment quant au déficit de solvabilité du fonds de pension. Le groupe cite même le rapport très critiqué produit par le Conference Board en 2013 où l'on prévoyait à tort d'importantes pertes d'emploi qui ne se sont jamais concrétisées au cours des années subséquentes. Nous voyons donc encore une fois la SCP lancer des projections et des chiffres extravagants sans avoir à les justifier. Dans l'état actuel des choses, il ne nous est plus possible de prêter foi aux allégations de la société concernant ses finances.
Le groupe de travail a aussi demandé à la firme de consultants Ernst & Young de mener un examen indépendant de la situation financière de la SCP. C'est un peu comme si on rapportait des ouï-dire. Les autres experts consultés par le groupe de travail n'ont pas été identifiés. On n'indique pas non plus dans le rapport la méthodologie utilisée pour le sondage, pas plus que la manière dont on est arrivé aux estimations d'économies présentées.
La section sur les services bancaires postaux illustre bien le préjugé favorable envers les entreprises en place. Il n'est nullement fait mention d'une étude menée par la société d'État pendant quatre ans sur de tels services. Le document soutient plutôt qu'une gamme complète de services bancaires postaux serait vouée à l'échec dans le contexte canadien parce que nous pouvons déjà compter sur le système financier le plus efficace et le plus inclusif qui soit. On fait ainsi totalement abstraction du fait que les Canadiens paient des frais bancaires parmi les plus élevés de la planète. Nous aurions grandement besoin d'une solution de rechange dans le secteur public.
Le groupe de travail indique toutefois qu'un modèle de partenariat avec les banques ou les caisses populaires pourrait être envisagé. On ajoute que des services bancaires pourraient être offerts par les bureaux de poste de la société dans certaines collectivités éloignées non desservies, conformément à la vision des carrefours communautaires préconisée par le groupe de travail, pour autant que des institutions financières soient prêtes à collaborer. Ce ne sont peut-être pas les services bancaires postaux que nous souhaiterions, mais c'est un point de départ.
Il ne faut pas oublier que rien n'est encore décidé, car nous amorçons à peine la deuxième étape du processus au cours de laquelle il convient de faire entériner par la population notre vision d'un meilleur service postal public. Il ne faut pas non plus perdre de vue que les compressions suggérées par le groupe de travail ne sont pas des recommandations, mais bien des options envisagées. Nous devons nous opposer vivement à toute recommandation formelle qui mettrait en péril les services postaux à la population en même temps que des emplois de qualité.
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Merci à tous de votre présence aujourd'hui.
Nous avons pu entendre des points de vue assez divergents. Certains y vont de sombres prédictions en soutenant notamment que la situation est catastrophique et que Postes Canada est appelée à disparaître, alors que d'autres nous proposent des idées novatrices. Nous sommes ici pour entendre tous les points de vue dans notre recherche de solutions.
Je pense qu'il nous faut être prudents en parlant de tentative de privatisation. Nous devons écouter les gens. Nous ne pouvons pas porter de jugements sur l'ancien mandat de la société d'État ou sur les visées du gouvernement précédent. Notre mandat à nous ne consiste pas à privatiser Postes Canada. Je voulais que cela soit bien clair.
À la lumière du rapport du groupe de travail et de ce que nous ont dit les Canadiens, nous pouvons comprendre que Postes Canada offre des services essentiels. Nous entendons ces remarques malveillantes concernant sa situation financière... Nous n'avons pas examiné les livres de la société d'État. Nous aimerions bien pouvoir le faire et nous allons parler aux personnes concernées, mais nous savons que Postes Canada doit aller de l'avant.
Cela étant dit, j'ai bien aimé votre exposé, madame Lipsig-Mummé. Vous avez déploré l'absence de réflexion stratégique. Dans mon ancienne profession de comptable, je procédais à des mises sous séquestre, et je devais m'assurer de réaliser un bénéfice. C'est ce qui importait dans le monde des finances où je travaillais, mais il ne faut pas négliger non plus l'aspect social, car il y a des personnes qui sont touchées.
J'aimerais que vous nous proposiez des idées novatrices. J'ai vu certaines présentations quant à la forme que pourraient prendre ces carrefours communautaires. Nous avons entendu parler des moratoires. Le maintien, la suppression ou encore la prise en compte du contexte rural; il n'existe pas de panacée. Nous ne pouvons pas comparer le Canada à la Suède ou à la Finlande, car ce serait comme comparer des pommes et des bleuets.
Madame Lipsig-Mummé, pourriez-vous nous donner un aperçu de ce que vous envisagez à titre de quatrième révolution pour l'avenir de Postes Canada?
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Oui, j'ai quelques commentaires. Après un été à faire du porte-à-porte pour expliquer la position du gouvernement libéral relativement à Postes Canada, ce qui m'a valu quelques échanges assez corsés — même avec des parents d'enfants faisant partie de mon équipe de soccer qui étaient des travailleurs des postes — j'aimerais d'abord clarifier quelque chose. Nous n'avons jamais promis de rétablir la livraison du courrier à domicile. Nous sommes en train de faire exactement ce que nous avons promis, à savoir mettre un frein aux initiatives de transformation à Postes Canada, consulter les Canadiens, dégager une orientation et agir en conséquence.
Pour ce faire, il nous faut répondre à deux questions particulièrement difficiles. Quelle orientation allons-nous prendre? Nous avons pu entendre un large éventail de points de vue, allant pour ainsi dire de la privatisation des services jusqu'à leur expansion à très grande échelle. Nous devons aussi nous demander comment nous assurer que Postes Canada est en mesure de mettre en oeuvre les recommandations que nous allons formuler. Postes Canada en est-elle capable? Lorsque l'on s'interroge sur le genre de société d'État que nous souhaitons avoir, on se questionne en fait sur le genre de Canada que nous voulons. J'aimerais d'ailleurs m'associer à quelques-uns des commentaires de M. Kirk.
Quant à l'apport du groupe de travail, il faut dire qu'il avait un mandat restreint. Il a procédé à une analyse des finances de Postes Canada, car il devait recommander des mesures visant son autonomie financière. Pour notre part, nous ne nous considérons pas liés uniquement par les recommandations ou les options mises de l'avant par le groupe de travail. Nous allons envisager toutes les possibilités, de la réduction des services jusqu'à leur vaste expansion. Nous devons considérer l'environnement, les services à large bande en milieu rural, l'accès aux marchés, l'accès à l'expertise et le rôle de Postes Canada en tant que visage du gouvernement dans les collectivités rurales.
J'aurais une question pour M. Dachis. Lorsque vous parlez d'une réduction des coûts de main-d'oeuvre, est-ce que vous préconisez le genre d'emplois dystopiques qui font rager M. Kirk, à savoir ceux occupés par des employés qui ont très peu de droits, de très faibles salaires et de mauvaises conditions de travail, de manière à maximiser les bénéfices pour notre système de distribution, ou celui-ci ne devrait-il pas permettre plutôt aux parents qui travaillent de pouvoir subvenir aux besoins de leur famille?