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Merci beaucoup. Bonjour.
Je tiens à remercier le Comité pour cette occasion de pouvoir vous parler aujourd'hui de cybersécurité et du secteur financier.
Je m'appelle Charles Docherty. Je suis avocat général adjoint de l'Association des banquiers canadiens, ou l’ABC. Se joint à moi mon collègue Andrew Ross, directeur, Paiements et Cybersécurité.
L'ABC est la voix de plus de 60 banques canadiennes et étrangères qui contribuent à l'essor et à la prospérité économiques du pays. L'ABC préconise l'adoption de politiques publiques favorisant le maintien d’un système bancaire solide et dynamique capable d'aider les Canadiens à atteindre leurs objectifs financiers.
Les banques au Canada sont des chefs de file de la cybersécurité. Elles ont massivement investi dans les mesures de protection du système financier et des renseignements personnels de leurs clients contre les cybermenaces. Malgré le nombre croissant de tentatives, les banques affichent un excellent bilan en matière de protection de leurs systèmes contre les cybermenaces. En effet, elles prennent au sérieux la confiance que les Canadiens leur accordent pour garder en sécurité leurs dépôts ainsi que leurs renseignements personnels et financiers.
Par ailleurs, les Canadiens s'attendent à plus de simplicité dans I'obtention de services financiers. Les banques ont innové en vue d'assurer à leurs clients des modes d’accès et d'utilisation plus rapides et plus pratiques lorsqu'il s'agit de services bancaires. Les consommateurs peuvent accéder aux services bancaires pratiquement n'importe quand et de n'importe où dans le monde grâce aux services en ligne et aux applications mobiles qui leur donnent un accès en temps réel à leurs renseignements financiers. Aujourd'hui, au Canada, 76 % des consommateurs utilisent principalement les services bancaires en ligne et sur leurs appareils mobiles, une hausse par rapport aux 52 % d’il y a tout juste quatre ans. Avec l’augmentation des opérations effectuées électroniquement, les réseaux et les systèmes deviennent de plus en plus interconnectés. Ainsi, les banques, le gouvernement et d'autres secteurs doivent collaborer pour veiller à ce que le cadre de la cybersécurité au Canada soit solide et capable de s'adapter à l'économie numérique.
L'ABC a participé activement aux consultations lancées par Sécurité publique Canada sur l'examen de la Stratégie nationale de cybersécurité. Notre secteur est un partenaire actif, motivé à faire cause commune avec le gouvernement fédéral pour atteindre les objectifs décrits dans la stratégie, l'objectif commun étant de faire évoluer la cyberrésilience au Canada.
Le secteur bancaire appuie vivement la démarche du gouvernement fédéral visant la mise sur pied du Centre canadien pour la cybersécurité, sous la gouverne du Centre de la sécurité des communications, à titre de point de contact unique où obtenir, auprès de spécialistes, des avis, des conseils et du soutien au sujet de questions opérationnelles de sécurité. Nous accueillons également la création de l'unité centralisée de lutte contre la cybercriminalité de la GRC.
Une des priorités clés du nouveau centre sera de veiller à ce que les secteurs clés au Canada soient cyberrésilients. Pour ce faire, le Centre devra encourager un environnement de collaboration et agir comme point de contact vers lequel les secteurs public et privé pourront se tourner pour obtenir conseils et directives en la matière.
La sécurité des infrastructures essentielles du Canada doit être assurée afin de protéger la sécurité et le bien-être économique des Canadiens. Le secteur bancaire compte sur d'autres secteurs qui représentent des infrastructures névralgiques, comme les télécommunications et l'énergie, pour offrir des services financiers aux Canadiens. Nous encourageons le gouvernement à utiliser et à promouvoir des normes de cybersécurité sectorielles communes qui s'appliqueraient aux entités formant ces secteurs névralgiques.
Nous sommes conscients que certaines infrastructures essentielles, comme l'énergie, relèvent de diverses autorités. Ainsi, nous recommandons au gouvernement fédéral de collaborer avec les provinces et les territoires à la définition d’un cadre de cybersécurité qui s'applique à l'ensemble des secteurs infrastructurels essentiels. Des normes de cybersécurité cohérentes et bien définies permettront une supervision plus rigoureuse et donneront l'assurance que les systèmes sont efficaces et bien protégés.
Une communication efficace des renseignements sur les cybermenaces et de l'expertise sur la protection est une composante essentielle de la cyberrésilience, qui devient de plus en plus importante dans l'économie canadienne axée sur le numérique et les données. Les avantages de la communication des renseignements sur les cybermenaces s’étendent à d'autres secteurs que les finances, au gouvernement et aux forces de l'ordre notamment, en leur permettant de minimiser l'impact des cyberattaques. Les banques appuient des initiatives — et y participent activement — comme l'Échange canadien des menaces cybernétiques, un organisme qui fait la promotion de l'échange d'information sur la cybersécurité et les pratiques exemplaires entre le gouvernement fédéral et les entreprises en vue d'améliorer la cyberrésilience à travers l’ensemble des secteurs.
Afin d'encourager la communication de renseignements et d’assurer l'efficacité de tels forums, nous recommandons au gouvernement d’envisager la voie législative, par exemple en modifiant la législation en matière de renseignements personnels et en ajoutant des dispositions refuge, ce qui ajoutera les protections adéquates lors de la communication d'information sur les cybermenaces.
La protection contre les menaces posées par les entreprises ou par d'autres pays nécessite une bonne défense coordonnée entre le gouvernement et le secteur privé. Le gouvernement peut donc jouer un rôle central dans la coordination entre les partenaires représentant des infrastructures essentielles et les autres intervenants, mettant à profit les efforts en cours pour limiter les cybermenaces. L'établissement de processus clairs et simplifiés entre les principaux acteurs augmentera la capacité du Canada à répondre efficacement aux cybermenaces et à s'en protéger.
Nous comprenons que le gouvernement compte introduire un nouveau cadre législatif qui traitera des répercussions et des obligations dans un monde de plus en plus interconnecté. Nous serons ravis de discuter de ce cadre avec le gouvernement.
Par ailleurs, l’ABC est d’avis que la sensibilisation à la cybersécurité auprès des Canadiens est essentielle. La sensibilisation de la population est, et doit être, la responsabilité à la fois du gouvernement et du secteur privé. Veiller à ce que les particuliers participent activement aux efforts de lutte contre les cybermenaces passe par des connaissances générales du sujet et par une prise de conscience individuelle de la responsabilité de chacun à ce sujet. Le secteur bancaire sera heureux de collaborer davantage avec le gouvernement sur les initiatives publiques de sensibilisation et de responsabilisation, comme l'ajout de la cybersécurité aux efforts fédéraux de promotion de la littératie financière.
Une main-d’oeuvre compétente en matière de cybersécurité capable de s’adapter à une économie axée sur le numérique et les données est également importante non seulement pour notre secteur, mais aussi pour tous les Canadiens. Chaque année, l’ABC travaille avec ses membres à l'organisation de l’un des plus grands sommets sur la cybersécurité au Canada réunissant les responsables des banques avec les principaux experts pour parler des plus récentes menaces et consolider ainsi les connaissances de nos professionnels de la cybersécurité.
La hausse des cybermenaces engendre une plus grande demande de talent en cybersécurité au Canada et ailleurs. La nouvelle stratégie canadienne en matière de cybersécurité reconnaît que les lacunes actuelles de talent dans ce domaine représentent à la fois un défi et une occasion pour notre pays. Afin de remédier à ce manque, nous encourageons le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et territoires, à promouvoir l'établissement de programmes de cybersécurité dans les écoles, les collèges et les universités, ainsi que des programmes d'éducation permanente dans l'objectif de permettre aux étudiants de développer leurs compétences en cybersécurité.
Pour conclure, j'aimerais rappeler que la cybersécurité est en haut des priorités des banques au Canada qui continuent à collaborer et à investir dans la protection des renseignements personnels et financiers de leurs clients. Aussi, les banques appuient le travail du gouvernement dans la protection des consommateurs tout en encourageant l’innovation et la concurrence. Toutefois, le secteur est conscient du fait que les menaces et les défis évoluent constamment. Nous désirons collaborer davantage avec le gouvernement et les autres secteurs pour que le Canada demeure un lieu stable, solide et sécuritaire où faire des affaires.
Merci beaucoup de votre temps. Je suis impatient de répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président et membres du Comité. C'est un grand plaisir d'être parmi vous aujourd'hui.
[Traduction]
Je m'appelle Trevin Stratton. Je suis économiste en chef à la Chambre de commerce du Canada. La Chambre de commerce est la porte-parole du milieu des affaires au Canada et représente un réseau de plus de 200 000 entreprises de toutes tailles, de tous les secteurs et de toutes les régions. Je suis accompagné de mon collègue de la chambre, Scott Smith, qui est directeur principal, Propriété intellectuelle et politique d'innovation.
Les transactions bancaires se font de plus en plus souvent de nouvelles façons, alors que 72 % des Canadiens les effectuent surtout en ligne ou à l'aide d'un appareil mobile. Des attaques perturbatrices ou destructrices contre le secteur financier pourraient donc avoir des répercussions importantes sur l'économie canadienne et menacer la stabilité financière. Cette situation pourrait survenir directement sous forme de pertes de revenu, ainsi qu'indirectement avec la détérioration de la confiance des consommateurs et des répercussions qui se feront sentir au-delà du secteur financier, sur lequel reposent d'autres secteurs de l'économie. Par exemple, les cyberattaques qui perturbent les services essentiels, qui minent la confiance envers certaines entreprises, ou le marché proprement dit, ou qui nuisent à l'intégrité des données pourraient avoir des conséquences systémiques sur l'ensemble de l'économie canadienne.
Les banques ont investi massivement dans des mesures ultramodernes de cybersécurité pour protéger le système financier et les renseignements personnels de leurs consommateurs contre les cyberattaques. En fait, les mesures et les procédures de cybersécurité font partie de l'approche globale des banques en matière de sécurité, ce qui comprend des équipes d'experts qui surveillent les transactions, qui préviennent et détectent les fraudes, et qui assurent la sécurité des comptes clients.
Les systèmes de sécurité sophistiqués qui sont en place protègent les renseignements personnels et financiers des clients. Les banques surveillent activement leurs réseaux et effectuent sans cesse une maintenance de routine pour faire en sorte que les menaces en ligne n'endommagent pas leurs serveurs et ne perturbent pas les services offerts aux clients.
Cependant, les questions de cybersécurité sont caractérisées par d'importantes asymétries de l'information, alors que de grandes institutions comme le gouvernement fédéral, la Banque du Canada et quelques entreprises du secteur privé, y compris des institutions financières, possèdent une quantité disproportionnée du renseignement et de la capacité. Pourtant, les PME sont aussi vulnérables. Il est important pour elles de mettre en place un écosystème de cybersécurité. Elles sont également confrontées à des asymétries croissantes sur le plan des ressources, de la technologie et des compétences pour se défendre contre des adversaires malveillants qui, avec des compétences et des ressources relativement rudimentaires, peuvent causer d'importants dommages financiers et nuire grandement à leur réputation.
Mon collègue, Scott Smith, va maintenant décrire les cybermenaces auxquelles font face les PME du Canada.
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Je crois que vous avez entendu au cours des derniers mois plusieurs témoins au sujet des cybermenaces en constante évolution, de certaines des attaques subies de façon générale, de la façon dont la situation change et du problème que cela pose. Aujourd'hui, je vais plutôt attirer votre attention sur la surface d'attaque croissante et sur la façon dont les perturbations économiques ayant une incidence sur la sécurité nationale viennent parfois d'endroits inattendus.
Le bien-être économique du Canada repose sur les petites entreprises. Même si 99,7 % des entreprises au Canada comptent moins de 500 employés, elles emploient plus de 70 % de la main-d’œuvre du secteur privé. Les PME représentent 50 % du PIB du Canada, 75 % du secteur des services et 44 % du secteur de la production de biens. Elles représentent également 39 % du secteur des finances, des assurances et des biens immobiliers.
On s'attend à ce que le taux de croissance continue annuel du secteur de la technologie financière soit de 55 % en 2020. Le Canada est un centre névralgique de la croissance du secteur de la technologie financière, surtout pour ce qui est des paiements mobiles, et la majorité des nouvelles entreprises sont des PME. Ensemble, elles constituent une très grande surface d'attaque, qui a d'ailleurs attiré l'attention des pirates informatiques.
Pour donner des exemples du lien entre les chaînes d'approvisionnement et les perturbations majeures, en 2018, cinq exploitants de gazoducs ont vu leurs activités être perturbées lorsqu'un fournisseur tiers de données électroniques et de services de communication a été victime d'un piratage au printemps. Le piratage d'un fournisseur tiers de plus de 100 entreprises manufacturières a été découvert en juillet 2018. Environ 157 gigaoctets de données que possédait Level One Robotics ont été exposés au moyen de la synchronisation à distance, qui est un protocole de transfert de fichiers couramment utilisé pour copier ou sauvegarder de grands ensembles de données sur d'autres serveurs.
En 2017, l'infection par le maliciel NotPetya a forcé le géant du transport Maersk à remplacer 4 000 serveurs, 45 000 ordinateurs personnels et 25 applications sur une période de 10 jours, ce qui a entraîné d'importantes perturbations.
Qu'est-ce qui explique le problème? Les criminels sont un peu comme les eaux de crue, qui empruntent la voie de la moindre résistance. Les PME font face à plusieurs difficultés en matière de sécurité: des ressources financières limitées, des ressources humaines limitées et une culture d'incrédulité, à savoir la fausse idée selon laquelle elles sont trop petites pour être victimes de piratage.
L'économie numérique s'est révélée être une bénédiction pour la croissance des petites entreprises, car elle leur a permis d'entrer dans les chaînes d'approvisionnement mondiales. Cependant, cette innovation et cette croissance s'accompagnent d'un risque si on ne donne pas suite aux préoccupations en matière de sécurité, surtout compte tenu de la sophistication des cybercriminels. Ils sont passés des perturbations attribuables aux virus, aux chevaux de Troie et des vers informatiques il y a 10 ans, dont on entendait couramment parler, à la production de certificats numériques de sécurité qui permettent de contourner le facteur humain.
L'objectif doit être la réduction de la surface d'attaque, en faisant des entreprises canadiennes des cibles moins intéressantes pour les criminelles. La solution est un changement de culture, grâce à l'éducation, à la sensibilisation et à l'établissement de normes de l'industrie, sans étouffer l'innovation. C'est un grand défi. Cela signifie qu'il faut investir dans les relations et les capacités relatives à l'application de la loi pénale à l'échelle internationale.
Je vais m'arrêter ici. C'est avec plaisir que je répondrai aux questions.
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Merci, monsieur le président.
Messieurs, merci d'être ici.
J'ai une question sur la relation entre les banques et les entreprises de cartes de crédit. Cette relation est plus compliquée que les gens ne le pensent.
Il y a cette croyance selon laquelle c'est la banque qui est responsable de plusieurs éléments d'une transaction par carte de crédit, mais, dans les faits, c'est l'entreprise de cartes de crédit qui l'est.
Le commissaire à la protection de la vie privée nous a fait part d'inquiétudes liées au fait que les serveurs des entreprises de cartes de crédit se trouvent souvent ailleurs, notamment aux États-Unis. Les protections légales auxquelles les clients ont droit en raison de leur citoyenneté n'y sont pas nécessairement les mêmes. Il y a aussi le fait qu'un acteur malveillant pourrait poser des risques additionnels, si jamais les relations entre deux pays se dégradaient. Dans cette optique, des serveurs sur lesquels nos données se trouvent, par exemple des serveurs américains, pourraient devenir une cible.
Les banques, qui font affaire avec ces entreprises, ont-elles un rôle à jouer dans cela? Le gouvernement canadien peut-il faire quelque chose pour protéger les données et les transactions des Canadiens?
Selon ce que je comprends, les entreprises de cartes de crédit sont indépendantes des banques. Néanmoins, les banques font affaire avec ces entreprises pour certains aspects importants de leurs activités.
Quand cette étude a été lancée, mon collègue Michel Picard voulait que nous portions notre attention sur… Quand nous avons parlé de cybersécurité, nous avons dit que nous voulions nous concentrer sur les incidences économiques que cela avait sur les Canadiens et sur les aspects financiers de cela, du point de vue de la cybersécurité. À ce jour, ce que nous avons entendu de la part de nombreux témoins, presque exclusivement, c'est de l'information technique au sujet de la façon dont cela se produit et au sujet des vulnérabilités de notre Internet et de notre infrastructure.
Je pense bien que du point de vue du consommateur canadien, du point de vue du public canadien, il faut que vos deux organisations aient une idée de la façon dont nous pouvons tirer le maximum de toute cette étude, si vous le voulez, ou de l'ensemble du concept de la cybersécurité, afin de réduire les risques de vol d'identité pour les consommateurs canadiens. Nous savons tous que le vol de données est le plus important élément du marché noir, du Web invisible. De toute évidence, il y a des gains financiers à faire.
Compte tenu de cela, d'après vous, qu'est-ce que le comité devrait recommander pour garantir que le public canadien est… Je sais que les Canadiens contribuent à leur propre vulnérabilité — nous comprenons cela —, mais du point de vue du gouvernement, comment pouvons-nous atténuer ce risque?
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Je remercie le Comité de m'offrir l'occasion de contribuer à ses importantes délibérations sur la cybersécurité dans le secteur financier comme un enjeu de sécurité économique nationale.
C'est avec plaisir que je réponds à votre invitation à formuler des observations sur les infrastructures essentielles, le routage Internet, le routage de données et les technologies de l'information.
Vous avez entendu un grand nombre d'observations pertinentes au cours des séances précédentes, notamment sur le fait que les infrastructures essentielles ne concernent pas que le secteur financier, mais aussi l'économie canadienne en général; que ces infrastructures évoluent rapidement, de manières risquées qui ne sont, de façon générale, pas transparentes ou bien comprises; et que les menaces à la sécurité de ces infrastructures comportent de multiples facettes, sont complexes et se multiplient.
En ce qui concerne ces risques, j'appuie particulièrement la recommandation que M. Leuprecht a formulée précédemment, à savoir:
que le Canada mette en oeuvre une stratégie de localisation de données souveraines, renforcée par des incitatifs législatifs et fiscaux, qui obligerait les données essentielles à être conservées uniquement sur le territoire canadien, qui établirait des normes et des attentes claires pour la résilience des infrastructures de communication canadiennes, qui surveillerait cette résilience et qui imposerait des pénalités aux entreprises d'infrastructures de communication essentielles qui ne respectent pas les normes ou ne prennent pas les mesures nécessaires pour éliminer leur vulnérabilité.
J'en dirai davantage sur cette recommandation qui concerne les réseaux 5G, mais je l'appliquerai à la réduction des menaces que posent les volumes excessifs de communications de données canadiennes, notamment les données financières qui passent par l'extérieur du pays même lorsqu'elles sont envoyées vers des destinations canadiennes. Ces flux de données ajoutent une kyrielle de risques superflus à la cybersécurité, des risques qui affaiblissent la sécurité économique du Canada de manière générale.
Pour être souverain sur les plans économique et politique, un pays doit exercer un contrôle efficace sur ses infrastructures Internet, veillant à ce que les éléments essentiels restent sur son territoire, sous son autorité juridique, et soient exploités dans l'intérêt public. À l'évidence, cela concerne l'emplacement des bases de données. Le lien avec les voies que les données empruntent entre les bases de données est moins évident, mais ce facteur est tout aussi important. Or, ce domaine primordial est bien moins bien compris; j'en traiterai donc dans mon exposé.
Je m'appelle Andrew Clement, professeur émérite à la faculté de l'information de l'Université de Toronto. Ayant étudié en informatique au début des années 1960, j'ai été témoin de changements remarquables, des bons et des mauvais, dans l'infrastructure numérique qui est maintenant essentielle à notre vie quotidienne. J'ai passé une bonne partie de ma vie universitaire à tenter de comprendre les conséquences sociétales et stratégiques de l'informatisation. J'ai cofondé une entité multidisciplinaire appelée ldentity, Privacy and Security lnstitute afin de m'attaquer de façon concrète et holistique aux questions les plus épineuses soulevées par la numérisation de la vie quotidienne. À l'heure actuelle, je suis membre du comité consultatif sur la stratégie numérique qui prodigue des conseils à Waterfront Toronto sur le projet de ville intelligente qu'il élabore avec Sidewalk Labs.
Dans le cadre de mes recherches, j'ai principalement cherché à cartographier les voies d'acheminement des données sur Internet afin de révéler les endroits par lesquels passent les données et les risques qui se posent en chemin. Mon équipe de recherche a mis au point un outil appelé IXmaps, une sorte d'instrument de cartographie des échanges Internet qui permet aux internautes de voir le chemin que leurs données suivent quand ils accèdent à des sites Web.
Au début de nos recherches, nous avons détecté un cheminement appelé routage boomerang, qui figure sur la première image. Il montre le chemin que parcourent les données entre mon bureau à l'Université de Toronto et le site Web du programme d'aide aux étudiants de l'Ontario, lequel est hébergé dans le complexe du gouvernement provincial, qui se trouve à quelques minutes de marche.
Ce chemin nous a étonnés, d'autant plus que la voie que les données empruntaient pour entrer aux États-Unis et en revenir passait par le même édifice de Toronto, soit le plus grand centre d'échange Internet du Canada, sis au 151, rue Front. Voilà qui était pour le moins contraire à la présomption d'efficacité optimale du routage Internet; cela nous a incités à pousser plus loin notre étude afin de voir à quel point le phénomène était répandu et de comprendre les raisons de ce comportement contre-intuitif. Nous avons baptisé cet aller-retour entre l'étranger et le Canada « routage boomerang », un phénomène qui s'avère fort commun. Nous estimons qu'au moins 25 % du trafic de données canadien passe par les États-Unis. Selon l'Autorité canadienne pour les enregistrements Internet, ou ACEI, ce chiffre serait bien plus élevé.
Plusieurs problèmes qui touchent le routage Internet concernent le Comité.
Plus long est le chemin, plus nombreux sont les risques de menaces physiques, même s'il s'agit de quelque chose d'aussi banal qu'une pelle rétrocaveuse qui coupe un câble à fibres optiques. La distance supplémentaire fait augmenter les coûts et la latence, minant par le fait même l'efficacité et les possibilités économiques.
Les données qui passent par les grands centres de communication sont interceptées en lots par la National Security Agency des États-Unis, ou NSA. Avant même les révélations de M. Snowden, nous savions que c'est à New York et à Chicago que s'effectuent principalement les activités de surveillance de cet organisme. Voilà qui pose un risque non seulement pour la protection de la vie privée des Canadiens, mais aussi pour les institutions financières et d'autres organisations importantes. Lors de votre dernière séance, M. Parsons vous a parlé d'un article du Globe and Mail révélant que la NSA surveillait les réseaux privés de la Banque Royale du Canada et de Rogers, pour n'en nommer que deux. Selon cet article, les activités de la NSA pourraient constituer les prémisses de démarches d'investigation s'inscrivant dans un effort global visant à « exploiter » des réseaux de communication interne organisationnels.
Le routage boomerang constitue une autre menace de nature plus générale à la souveraineté nationale. Si un pays dépend d'un autre pour ses cyberinfrastructures essentielles, comme c'est le cas pour le Canada à l'égard des États-Unis, il se rend vulnérable à bien des égards, et pas seulement en raison des organismes espions ou de l'évolution des relations politiques, comme celle que l'on observe actuellement. Le meilleur allié lui-même protégera-t-il les intérêts de ses amis si ses propres infrastructures sont menacées? Si les États-Unis sont la cible d'une cyberattaque, ne seraient-ils pas tentés de couper toute connexion externe, laissant ainsi le Canada en plan? Vous avez entendu dire précédemment que certains considèrent que le Canada constitue une cible plus facile que les États-Unis et pourrait ainsi servir de voie d'accès vers nos voisins du Sud. Les États-Unis pourraient-ils en arriver à voir le Canada comme une source de menace et à couper nos liens?
Jusqu'à présent, j'ai traité du risque que pose le passage du trafic canadien par les États-Unis. Or, un argument semblable s'applique encore plus aux communications du Canada avec des pays tiers. Nos données cartographiques donnent à penser qu'environ 80 % des communications canadiennes avec d'autres pays que les États-Unis passent physiquement par les États-Unis, une situation attribuable au manque relatif de câbles optiques transocéaniques sur les côtes canadiennes, illustré clairement dans les cartes dressées par TeleGeography, un service de cartographie qui fait figure d'autorité dans le domaine. J'espère que vous pouvez voir les diapositives.
Seulement trois câbles optiques transatlantiques arrivent sur la côte Est canadienne, alors que la capacité est de loin supérieure au sud de la frontière. La plus grande partie de notre trafic à destination de l'Europe passe par les États-Unis. Fait remarquable, il n'y a aucun câble optique transpacifique sur notre côte Ouest; tout le trafic vers l'Asie passe donc par les États-Unis. La meilleure manière d'évaluer la capacité des banques à résister à une débâcle financière consiste à les soumettre à une épreuve de tolérance. Que révélerait la mise à l'épreuve des cyberinfrastructures canadiennes? Si, pour une raison quelconque, notre connexion avec les États-Unis était coupée, même si c'était pour des motifs légitimes d'autodéfense, à quel point le réseau Internet du Canada s'avérerait-il résilient? Nous devrions le savoir, mais nous l'ignorons. Les preuves disponibles laissent penser qu'il serait très peu résilient.
Que devrions-nous faire à cet égard? De façon générale, la bonne manière de réagir stratégiquement consiste, comme M. Leuprecht l'a indiqué, à adopter une stratégie de « localisation des données souveraines » incluant le routage des données. Concrètement, il faudrait coordonner un ensemble de mesures techniques, réglementaires et législatives visant à renforcer la résilience.
Nous devrions d'abord exiger que toutes les données de nature essentielle et délicate du Canada soient entreposées, acheminées et traitées au Canada. Nous devrions ensuite soutenir l'établissement et l'utilisation de points d'échange direct de données entre les réseaux en évitant le routage aux États-Unis. L'ACEI montre la voie à cet égard. Nous devrions également accroître la capacité au chapitre de la fibre optique au Canada et entre le Canada et d'autres continents. En outre, nous devrions inclure des exigences de reddition de comptes dans les normes de cybersécurité des institutions financières et des fournisseurs de services de télécommunications en ce qui concerne les pratiques de routage. Enfin, nous devrions établir un observatoire des cyberinfrastructures canadiennes qui serait chargé de surveiller le rendement et la résilience de ces dernières, de répondre aux demandes de recherche et de publier des rapports.
Je vous remercie de votre attention. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
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Pour rester bref, je ne lirai pas mon exposé en entier, car je pense que vous en avez un exemplaire sur votre bureau.
Monsieur le président, distingués membres du Comité, mesdames et messieurs, bonjour. Je m'appelle David Masson et je suis directeur national du Canada chez Darktrace, une entreprise de cybersécurité.
Il s'agit du chef de file des entreprises d'intelligence artificielle dans le domaine de la cyberdéfense. Elle sert des milliers de clients dans le monde, et notre intelligence artificielle qui apprend d'elle-même peut défendre tout le parc numérique que les gens possèdent. Notre entreprise compte plus de 800 employés — en fait, il y en a maintenant 900 — et 40 bureaux à l'échelle internationale, dont 3 au Canada.
Avant de me joindre à Darktrace et d'établir l'entreprise au Canada en 2016, j'ai eu le privilège et l'honneur immenses, à titre d'immigrant au Canada, de servir mon pays au sein du ministère de la Sécurité publique pendant plusieurs années. J'ai auparavant travaillé dans le secteur du renseignement et de la sécurité nationale du Royaume-Uni, et ce, à partir de la guerre froide. À l'instar du témoin précédent, j'ai assisté à l'évolution de la cybersécurité au fil du temps, de l'époque précédant l'avènement d'Internet jusqu'à aujourd'hui, alors qu'Internet est omniprésent dans notre société.
Au cours de vos séances antérieures, je pense que vous avez énormément entendu parler de l'ampleur et de la taille de la cybermenace qui plane sur le pays; je vais donc m'attarder à trois points. Je veux d'abord vous faire part de certaines raisons pour lesquelles la cybersécurité constitue un défi apparemment insurmontable, puis je parlerai de menaces précises. Je terminerai en présentant des suggestions et des solutions aux problèmes évoqués.
Selon ce que nous observons à Darktrace, la plupart des organisations ne sont malheureusement pas aussi en sécurité qu'elles le croient. Comme vous l'avez fait remarquer plus tôt, monsieur, quand nous installons notre logiciel d'intelligence artificielle dans les réseaux d'une entreprise du palmarès Fortune 500, nous détectons dans 80 % des cas une cybermenace ou une vulnérabilité que l'entreprise ne connaissait tout simplement pas. Chez les autres entreprises, notamment celles de petite taille, le pourcentage d'entreprises compromises de quelconque manière bondit à 95 %. Il y a donc un problème presque tout le temps.
Ces statistiques font ressortir deux faits. Tout d'abord, il est évident qu'aucune organisation n'est parfaite ou à l'abri. Des organisations de toutes les tailles et de toutes les industries sont non seulement vulnérables aux cyberattaques, mais elles courent plus de risque qu'elles ne le pensent. Les attaques qui ont réussi à atteindre certaines des plus grandes entreprises du monde ces dernières années ont révélé que quelque chose ne fonctionne pas. Même les entreprises du palmarès Fortune 500, qui disposent des budgets, des ressources et de l'effectif pour contrer les cybermenaces, s'avèrent encore vulnérables.
Il y a donc lieu de se demander pourquoi un si grand nombre d'entreprises et d'organisations ignorent qu'elles sont la cible d'attaques ou qu'elles sont vulnérables. L'approche traditionnelle que les entreprises adoptaient par le passé pour assurer la cybersécurité ne fonctionne pas face aux menaces et aux environnements d'affaires de plus en plus complexes d'aujourd'hui.
Autrement dit, le problème ne vient pas que de la cybermenace, mais aussi de la complexité du domaine des affaires qui fait que les gens y perdent leur latin.
Par le passé, les entreprises cherchaient à protéger leurs réseaux contre l'extérieur, renforçant leur périmètre au moyen de pare-feux et de solutions de sécurité des points terminaux. Aujourd'hui, la migration vers le nuage et l'adoption rapide de l'Internet des objets rendent presque impossible la protection du périmètre. Une autre approche traditionnelle connue sous le nom de « règles et signatures », reposait sur le principe de la recherche de problèmes connus. Les attaquants sont toutefois en constante évolution, et cette technique ne réussit pas à détecter les attaques nouvelles et ciblées. Mais surtout, ces approches traditionnelles ne permettent pas aux entreprises de savoir ce qu'il se passe sur leurs réseaux, ce qui rend difficile, voire impossible, la détection des menaces qui s'y trouvent déjà.
Je vais maintenant traiter de deux types potentiels d'attaques qui ont des répercussions d'envergure.
Les attaques ciblant les infrastructures nationales essentielles augmentent de par le monde. Quand il est question d'infrastructures essentielles, on pense habituellement aux réseaux de distribution d'électricité et d'énergie, aux services publics, aux compagnies, aux barrages, aux transports, aux ports, aux aéroports et aux routes. Cependant, l'objet de votre étude, soit le secteur financier du Canada, notamment les grandes banques, fait également partie des infrastructures nationales du pays. Tout comme les routes assurent physiquement les liens au pays, ces organisations assurent les liens au sein de l'économie nationale. Une attaque réussie contre ces institutions de base pourrait perturber dramatiquement le rythme du commerce. La sécurité des institutions financières devrait faire l'objet d'une discussion d'une envergure et d'une gravité aussi importantes que celle portant sur la sécurité de nos réseaux électriques.
Les attaques visant à miner la confiance constituent un autre type d'attaques de plus en plus courant ces dernières années. Le gain financier n'en constitue pas l'objectif. Notre entreprise n'a pu découvrir quel pourrait être le gain financier de ces attaques. Elles visent plutôt à compromettre les données et leur intégrité. Imaginez un attaquant qui cherche à cibler une société pétrolière et gazière. Il pourrait simplement faire cesser les activités d'une installation de forage, mais il pourrait aussi recourir à une tactique plus insidieuse en ciblant les données sismiques permettant de trouver de nouveaux lieux de forage, faisant ainsi en sorte que la société creuserait au mauvais endroit.
Je veux aussi traiter brièvement de ce que nous, à Darktrace, pensons pouvoir attendre du futur des cyberattaques. Nous utilisons l'intelligence artificielle pour protéger les réseaux, mais cet outil s'immisce partout, apparemment dans toutes les industries, tombant également entre les mains d'acteurs malintentionnés. Même si le moment où des attaques perpétrées à l'aide de l'intelligence artificielle fait l'objet de débats, nous pensons qu'il pourrait s'en produire une cette année, alors que d'autres pensent que cela pourrait survenir en 2020 ou en 2025. Nous serons certainement confrontés à de telles attaques dans un proche avenir.
Darktrace a déjà détecté des attaques si sophistiquées qu'elles peuvent se fondre parmi les activités quotidiennes du réseau d'une entreprise et passer sous le radar de la majorité des outils de sécurité.
Jusqu'à maintenant, des attaques sophistiquées hautement ciblées ne pouvaient être perpétrées que par des États-nations ou des organisations criminelles très bien dotées en ressources. L'intelligence artificielle abaisse la barre pour ce type d'attaques, permettant à des acteurs moins qualifiés de les perpétrer. L'intelligence artificielle permet d'apprendre à propos de cet environnement cible, de reproduire les comportements normaux des machines et même de se faire passer par des personnes dignes de confiance dans ces organisations.
Les entreprises seront bientôt confrontées à des menaces sophistiquées sans précédent. Nous estimons qu'il est essentiel que les entreprises et le gouvernement — au Canada et dans le monde entier — réfléchissent aux répercussions que ces menaces auront et aux mesures qui doivent être prises pour s'assurer qu'elles peuvent se défendre contre les attaques pilotées par l'intelligence artificielle.
Puisque ce comité et l'industrie se penchent sur des réponses et des solutions, je veux formuler quelques recommandations.
En octobre 2018, (ISC)2 a annoncé que la pénurie de professionnels de la cybersécurité dans le monde avait atteint les trois millions. J'ai vu ce chiffre à répétition ce matin sur LinkedIn. Près de 500 000 de ces postes vacants sont en Amérique du Nord. Au Canada, je pense que c'est 8 000, mais je présume que c'est plus. On s'attend à ce que cette pénurie augmente. Les entreprises ont du mal à embaucher des professionnels. Les gens qu'elles embauchent ont dû mal à suivre le rythme.
Les menaces évoluent très rapidement à l'heure actuelle. Pendant le temps qu'un analyste fait une pause pour aller se chercher une tasse de café, un rançongiciel peut pénétrer un réseau et chiffrer des milliers de fichiers. En plus de ces attaques rapides, les analystes sont aux prises avec une quantité monstre d'alertes concernant des supposées menaces qu'ils doivent examiner, gérer et éliminer. Nous devons trouver un moyen d'alléger le fardeau des professionnels de la cybersécurité, d'élargir le bassin de candidats éventuels en augmentant la diversité dans les processus d'embauche, ainsi que d'outiller ces professionnels en leur fournissant les technologies et les outils nécessaires pour réussir.
Je vais sauter les deux prochains paragraphes.
La collaboration entre les secteurs privé et public sera également essentielle pour résoudre les défis auxquels nous sommes confrontés. Les témoins précédents en ont parlé notamment. Les gouvernements dans le monde entier colligent une mine de renseignements sur les attaques et les techniques d'attaque de leurs adversaires. Bien que certaines restrictions sur ce que les gouvernements peuvent communiquer soient compréhensibles et nécessaires, j'exhorterais le gouvernement canadien et la communauté du renseignement à communiquer les renseignements qu'ils peuvent aux entreprises. L'information est un atout. Si les entreprises comprennent les attaques auxquelles elles sont confrontées, elles pourront mieux se défendre contre ces attaques. L'économie canadienne est mieux protégée contre les répercussions de ces cyberattaques.
Par ailleurs, il est essentiel que les entreprises privées comme la mienne fassent part au gouvernement de leurs points de vue et des leçons qu'elles ont tirées. La capacité du secteur privé de réagir rapidement et de mettre à l'essai de nouvelles technologies crée en quelque sorte un terrain d'essai pour les nouvelles technologies et techniques en matière de cybersécurité. En discutant de ce qui fonctionne ou pas, le gouvernement peut déterminer ce dont les entreprises ont besoin pour recueillir et diffuser ces renseignements — peut-être par l'entremise de l'ECMC qui, je sais, a été mentionné à plusieurs reprises — et aider des industries entières à améliorer rapidement leurs pratiques en matière de sécurité.
Je veux conclure mes remarques en faisant un appel à l'innovation. Les attaquants trouvent constamment de nouveaux moyens d'infiltrer les réseaux, de s'en prendre aux entreprises et de faire des ravages. Il est crucial que nous fassions preuve d'innovation pour nous défendre également. Que ce soit en élaborant de nouvelles technologies, en adoptant des techniques de pointe ou en promulguant de nouveaux règlements, la créativité et la collaboration seront essentielles. Au final, ce n'est pas une question de soutenir le rythme des attaquants, mais d'avoir une longueur d'avance sur eux.
J'ai hâte d'entendre vos questions.
Merci.
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J'ai déjà été diplomate britannique. Je me rappelle qu'il y a 12 ou 14 ans, on m'a expliqué qu'une cyberattaque perpétrée par un État-nation ou un autre État était un acte de guerre. Toutefois, depuis ce temps, il semble que la zone soit devenue bien grise. L'autre semaine, j'ai participé à une conférence durant laquelle le sujet a été amené, et personne ne pouvait dire à quel moment on en est là. C'est peut-être parce que bien souvent, et pour des raisons évidentes, il est plus facile, en particulier pour les démocraties occidentales, de simplement ne pas tenir compte de cette question.
Les acteurs étatiques investissent massivement dans l'intelligence artificielle parce que tout le monde le fait. Les témoins qui ont comparu devant vous précédemment investissent beaucoup dans l'intelligence artificielle pour leurs systèmes bancaires. Cela n'a rien à voir avec la cybersécurité ou les cyberattaques. Ils utilisent l'intelligence artificielle simplement parce qu'elle permet de faire tellement plus de choses, tellement plus rapidement et tellement mieux.
Nous utilisons l'intelligence artificielle parce que nous disons que les êtres humains ne peuvent pas suivre l'ampleur de cette menace, de sorte que nous utilisons l'intelligence artificielle pour accomplir le gros du travail. Dire que l'intelligence artificielle remplacera les gens relève en quelque sorte du mythe. Ce n'est pas le cas. Il n'y a pas de [Inaudible]. Cela n'existe pas.
Ce qu'on voit en ce moment, c'est que l'intelligence artificielle est utilisée à des fins précises pour des outils précis dans des domaines précis. Nous nous en servons pour la cybersécurité, mais les méchants — et je suis heureux de dire « les méchants » parce que nous sommes coincés avec l'Internet des objets — l'utiliseront parce qu'elle leur facilitera les choses. Dans ma déclaration, j'ai signalé à quel point certaines des attaques qui ont été perpétrées par un État-nation, comme l'attaque contre Sony — beaucoup de ressources y ont été consacrées —, ou certaines des attaques en Ukraine, ont nécessité des gens, du temps, de l'argent et des efforts. Cependant, en utilisant l'intelligence artificielle, on a moins besoin d'argent, de temps et d'efforts, et, comme je l'ai dit, l'intelligence artificielle abaissera la barre pour ce type d'attaques.
Lorsqu'on pense à la première attaque perpétrée à l'aide de l'intelligence artificielle — notre entreprise croit qu'elle pourrait se produire cette année; nous voyons des signes de cela depuis longtemps, mais elle pourrait se produire plus tard —, bon nombre des techniques et des systèmes qui sont utilisés actuellement pour protéger les réseaux des cybermenaces deviendront désuets du jour au lendemain. Cela arrivera très rapidement.
Certains acteurs qui menacent l'État et d'autres utilisent l'intelligence artificielle sur le terrain de l'influence étrangère, dans les campagnes de désinformation. Il y a beaucoup d'éléments à cet égard. Vous avez peut-être remarqué que certaines des plateformes de média ont été vivement critiquées après l'horrible attentat survenu en Nouvelle-Zélande parce qu'elles n'ont pas réagi assez rapidement. Mais maintenant, si on utilise l'intelligence artificielle — nous pouvons le faire maintenant —, on peut inventer un mensonge à grande échelle et très rapidement. La mesure dans laquelle ce qui est communiqué est manifestement faux importe peu. Si l'on fait cela, ce type de volume engendre une qualité et les gens y croiront. Voilà pourquoi les acteurs malintentionnés commenceront à investir dans l'intelligence artificielle.