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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs.
C'est bien de vous revoir une fois de plus face à un autre projet de loi très important concernant la sécurité et la protection publique des Canadiens. Il s'agit du projet de loi , qui modifierait la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et une autre loi.
Je suis heureux d'être accompagné aujourd'hui de représentants du Service correctionnel du Canada. Anne Kelly, la commissaire du Service, est à ma gauche. Fraser Macaulay est le sous-commissaire principal intérimaire, et Jennifer Wheatley est la commissaire adjointe, Secteur des services de santé.
À ma droite, Angela Connidis est la directrice générale, Direction générale de la prévention du crime, des affaires correctionnelles et de la justice pénale du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
[Français]
Dans tout ce que nous faisons dans le domaine correctionnel, notre priorité est toujours la sécurité du personnel, des détenus et du public. La meilleure façon de faire avancer cet objectif est de favoriser la réhabilitation de façon efficace et sécuritaire.
[Traduction]
La sécurité des établissements et du personnel est avant tout une condition préalable à l'ensemble du travail de réadaptation effectué au sein du système correctionnel fédéral. Pour des raisons de sécurité, certains détenus doivent parfois être séparés de la population générale régulière.
Actuellement, l'outil utilisé à cette fin est l'isolement préventif, qui consiste à garder une personne dans sa cellule jusqu'à 22 heures par jour, avec très peu de programmes de réadaptation, d'interventions ou de contacts humains réels.
Cependant, au cours de la dernière année, deux affaires judiciaires — l'une en Ontario, et l'autre en Colombie-Britannique — ont révélé de différentes manières et pour diverses raisons que l'isolement était inconstitutionnel, tel qu'il est actuellement pratiqué. Ces décisions font actuellement l'objet d'un appel, dont la première par le gouvernement, et la deuxième, par l'autre partie.
Dans l'état actuel des choses, ces décisions entreront en vigueur dans les prochains mois. En fait, avec l'une en décembre et l'autre en janvier, nous devons nous préparer à ces conséquences juridiques inévitables.
Le projet de loi propose d'éliminer complètement l'isolement et de créer des unités d'intervention structurée, ou UIS, comme solution de rechange. Ces unités seront séparées de la population générale régulière, de sorte que l'impératif de sécurité dans nos établissements sera respecté. Toutefois, les UIS seront conçues et dotées des ressources nécessaires pour que les personnes qui y sont placées reçoivent les interventions, les programmes et les traitements dont elles ont besoin.
Il y aura au minimum quatre heures par jour à l'extérieur de la cellule et au moins deux heures d'interaction significative avec d'autres personnes, notamment le personnel, des bénévoles, des aînés, des aumôniers, des visiteurs et des codétenus compatibles. L'accent sera également mis sur les soins de santé mentale, avec le recrutement de nouveaux professionnels de la santé mentale, qui seront affectés à l'UIS.
L'idée est de faire en sorte que les personnes puissent être séparées de la population générale régulière, lorsque cela est nécessaire pour des raisons de sécurité, mais seulement pour la période nécessaire et sans sacrifier l'accès aux programmes de réadaptation, aux soins de santé mentale et autres interventions contribuant à réduire le risque que présentent les délinquants, à la fois pendant leur incarcération et au moment de la mise en liberté.
Au cours du débat en deuxième lecture à la Chambre, divers députés ont soulevé un certain nombre de questions au sujet de cette partie du projet de loi, et je tenterai d'en aborder le plus grand nombre possible.
Pour commencer, la question de la sécurité du personnel a été évoquée à plusieurs reprises. Je soulignerai donc à nouveau que la sécurité du personnel correctionnel est une priorité absolue. Les employés, y compris les agents correctionnels, les agents de libération conditionnelle, le personnel des programmes, les fournisseurs de soins de santé et autres, effectuent un travail très important et difficile dans des circonstances exigeantes. Or, ce n'est que lorsqu'ils sont en sécurité que le Service correctionnel peut s'acquitter de son mandat, soit l'application des peines et la réadaptation des délinquants.
En vertu de ces dispositions législatives, le projet de loi , les établissements conserveront la capacité de séparer de la population générale régulière les délinquants qui posent un risque pour la sécurité, et dans les UIS, les détenus incompatibles ne seront jamais ensemble. Autrement dit, le nouveau système n'augmentera d'aucune manière le risque pour la sécurité du personnel correctionnel.
Au cours du débat, on a également posé des questions sur les raisons pour lesquelles le projet de loi n'incluait pas de mécanisme de surveillance externe et ne fixait pas de limite quant au nombre de jours qu'un délinquant pouvait passer dans une UIS.
Le fait est que ces mesures ont été proposées afin que l'on puisse prévenir le recours abusif à l'isolement préventif, ce système ayant fait l'objet de critiques pour ses effets néfastes sur la santé mentale des détenus.
Le point est le suivant: nous éliminons l'isolement préventif. Les arguments relatifs à l'isolement préventif ne sont donc plus pertinents. Comparativement au système précédent, les unités d'intervention structurée s'appuieront sur les soins de santé mentale, ainsi que sur d'autres interventions, programmes et contacts humains réels. Elles sont donc fondamentalement différentes de l'isolement.
Néanmoins, ce projet de loi intègre un robuste système d'examen. La loi précise clairement que le placement dans une UIS ne peut durer que le temps absolument nécessaire, et le directeur examinera un cas de placement dans une UIS dans un délai de cinq jours pour s'assurer que la nécessité persiste. Si une personne est toujours en isolement préventif au bout de 30 jours, le directeur procédera à un autre examen. La commissaire effectuera ses propres examens tous les 30 jours par la suite. De plus, et c'est un point important, un professionnel de la santé peut recommander le retrait de l'UIS à tout moment.
Cela dit, nous comprenons bien sûr l'importance du besoin de rendre des comptes. Notre objectif est de nous assurer que le nouveau système est mis en oeuvre comme prévu. À cette fin, une fois que les UIS seront opérationnelles, le Service correctionnel publiera des statistiques tous les trimestres afin que les Canadiens puissent voir exactement combien de personnes ont été détenues dans des UIS et pendant combien de temps. La commissaire avisera l'enquêteur correctionnel chaque fois qu'une personne atteint le délai de 30 jours et tous les 30 jours par la suite. Les partenaires communautaires, comme la Société John Howard, la Société Elizabeth Fry, la Société Saint-Léonard du Canada et d'autres, seront les bienvenus au sein de l'UIS afin de voir leur fonctionnement et de fournir des commentaires importants. Cette rétroaction et cette transparence constituent des éléments importants de la manière dont nous voulons que ce système fonctionne.
En dernier lieu, pour ce qui est du fonctionnement, nous savons que le nouveau système exigera de nouvelles ressources. Fournir des interventions, des programmes et des traitements à des délinquants à l'extérieur de la population générale régulière suppose beaucoup de travail. Nous le comprenons et nous fournirons les ressources nécessaires afin que cela se passe de manière efficace et sécuritaire.
La sécurité est ce qui importe. La législation accorde la priorité à la sécurité des employés correctionnels et des personnes sous leur garde. En fait, en améliorant les interventions et les traitements dispensés aux détenus présentant un risque particulier, le nouveau système des UIS contribuera à réduire ce risque et à rendre les établissements plus sûrs. En définitive, une fois la peine terminée, les délinquants sont plus susceptibles de réintégrer nos collectivités en toute sécurité s'ils ont bénéficié de programmes de réadaptation, d'intervention et de traitement efficaces.
Je n'ai abordé qu'un aspect du projet de loi, celui des UIS, qui est le plus important. Cette législation comprend plusieurs autres éléments, et je serais heureux de répondre aux questions à ce sujet.
Je tiens simplement à préciser qu'ils sont tous favorables au même objectif: gérer un système sûr et sécuritaire, un système dont le but ultime est la réussite de la réadaptation de manière à réduire le nombre de délinquants et de victimes et à créer des collectivités plus sûres.
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Merci, monsieur Picard.
Je pense que les deux noms en soi sont révélateurs. D'une part, vous avez l'isolement préventif axé, manifestement, d'après le titre, sur l'isolement et l'enjeu important de la sécurité.
D'autre part, avec une unité d'intervention structurée, l'accent sur la sécurité n'est pas perdu, mais on ajoute la notion d'intervention. Le fonctionnement du système actuel d'isolement préventif... Même si le système correctionnel fera de son mieux pour poursuivre les interventions, les programmes de traitement, les visites de l'extérieur, et ainsi de suite, la façon dont l'isolement préventif est structuré fait en sorte qu'il est très difficile d'accomplir autre chose que l'isolement.
Selon la nouvelle approche, des installations séparées, ou des unités au sein d'installations, permettront de séparer les personnes lorsque cela s'impose pour le maintien de la sûreté et de la sécurité, mais ces installations seront conçues et dotées de ressources physiques de manière à ce que les interventions se poursuivent.
Par définition, les personnes susceptibles de se trouver dans une unité d'intervention structurée sont probablement celles qui ont le plus besoin d'attention et de traitement ainsi que de ces interventions externes.
C'est un peu contre-productif de les placer dans un secteur isolé et de ne pas pouvoir continuer les interventions. Nous tentons de maintenir toutes les dimensions nécessaires de la sécurité tout en nous assurant que la structure, la conception et les ressources... Comme je l'ai mentionné, nous recruterons d'autres professionnels de la santé mentale, notamment. L'essentiel est de poursuivre le traitement, les interventions, l'attention et les programmes dont les délinquants ont besoin pour réduire le risque qu'ils présentent.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, merci de votre présence.
Je veux juste aborder cette question de l'examen indépendant. Vous vous souviendrez que, dans les années 1990, lorsque la juge Arbour avait commenté la situation, elle avait notamment évoqué le fait que le pouvoir était en partie soustrait aux tribunaux en raison de l'abus et du mauvais usage de l'isolement préventif.
Elle n'apprécierait probablement pas que je paraphrase, mais je ferai de mon mieux. Essentiellement, elle estimait que les tribunaux étaient, dans une certaine mesure, entravés, car la nature de la peine changeait en raison de la manière dont l'isolement cellulaire était appliqué à l'époque. D'après ce que nous avons vu avec ces décisions judiciaires, cela n'a sans doute pas changé. Elle a appelé à une surveillance judiciaire.
Dans le projet de loi , il est dit que la commissaire — et je le dis, bien entendu, avec tout le respect que je vous dois — et le directeur du pénitencier, essentiellement le directeur de l'établissement, procéderont à un examen, et c'est satisfaisant. Toutefois, mon problème est que, même la décision ontarienne, qui n'allait pas aussi loin que celle de la Colombie-Britannique, mentionne que la personne qui effectue l'examen ne devrait d'aucune manière être influencée, ni faire partie du cercle d'influence, ni rendre compte à celle qui a pris la décision.
Si la commissaire désigne un secteur et un détenu, et que le directeur est alors celui qui examine le cas — quel est le délai? — tous les cinq jours environ, cela ne contrevient-il pas à l'évaluation du juge concernant le cercle d'influence qui peut empêcher cet examen d'être réellement indépendant?