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Oui, je vais le faire, monsieur le président.
Merci beaucoup et bonjour au Comité.
Je suis heureux d'être là au moment où vous commencez votre analyse du projet de loi , qui confirme l'engagement de notre gouvernement à contribuer à la protection des collectivités canadiennes contre la violence liée aux armes à feu, tout en assurant un traitement équitable et raisonnable des propriétaires et des entreprises d'armes à feu.
Je suis heureux d'être accompagné aujourd'hui par Randall Koops, qui est directeur général des Politiques en matière de police au ministère de la Sécurité publique. Le surintendant Paul Brown est le directeur général par intérim du Programme canadien des armes à feu, à la GRC. Paula Clarke est du ministère de la Justice.
[Français]
Nous n'avons aucune responsabilité plus importante que la protection des collectivités canadiennes, et tous les éléments de ce projet de loi sont liés directement à la sécurité publique. Ils vont mieux protéger les Canadiens de la violence armée, tout en traitant les propriétaires d'armes à feu de façon équitable et raisonnable.
[Traduction]
Même si, en général, les taux de criminalité au Canada diminuent — heureusement — depuis des décennies, le taux de violence liée aux armes à feu a augmenté au cours des dernières années. De 2013 à 2016, le nombre d'incidents criminels dans lesquels une arme à feu était en cause a augmenté de 30 %. Durant cette période, le nombre d'homicides par arme à feu a augmenté de deux tiers. Les actes de violence conjugale et fondée sur le sexe commis à l'aide d'une arme à feu ont augmenté d'un tiers. Les homicides liés à des gangs, dont la plupart sont commis à l'aide d'une arme à feu, ont augmenté de deux tiers. Les entrées par effraction dans le but de voler des armes à feu ont augmenté de 56 % de 2013 à 2016, et dans une proportion impressionnante de 865 % depuis l'an 2008.
Le problème est évident. En définitive, nous sommes aux prises avec un problème d'accroissement de la violence liée aux armes à feu, au Canada. Il ne s'agit pas d'un problème pour lequel nous pouvons blâmer d'autres pays, car les policiers de la Colombie-Britannique, de Toronto, de Calgary, de Regina, d'Ottawa et d'autres endroits confirment maintenant que la plupart des armes à feu utilisées pour commettre des crimes au Canada proviennent de sources intérieures. Au Canada atlantique, par exemple, plus de la moitié des crimes commis à l'aide d'une arme à feu ont lieu dans des régions rurales, et plus de 60 % de ces crimes commis dans ma propre province — la Saskatchewan — ont lieu en dehors des grandes villes.
Il s'agit d'un problème canadien qui touche l'ensemble du pays. Nous devons nous y attaquer de front par des moyens qui sont efficaces et ciblés sur les résultats en matière de sécurité publique, tout en veillant à ce que les propriétaires et les entreprises d'armes à feu soient traités équitablement et raisonnablement.
Le projet de loi permet d'atteindre ces objectifs.
Tout d'abord, il améliorera les vérifications des antécédents des personnes souhaitant se procurer une arme à feu. Comme je l'ai souligné lors de la deuxième lecture, cette mesure particulière a été proposée il y a près de 15 ans par un ancien ministre du Cabinet conservateur, James Moore. Elle semble faire l'objet d'un très vaste soutien.
Actuellement, quand une personne demande un permis, on doit obligatoirement vérifier si, durant les cinq années précédant immédiatement la demande, la personne a adopté un comportement violent ou reçu un traitement pour une maladie mentale associée à la violence. Le projet de loi retirera cette limite de cinq ans afin que l'ensemble des antécédents de la personne soit pris en compte. On pourra ainsi mieux s'assurer, tout simplement, que les gens ayant déjà commis des actes de violence n'obtiennent pas d'armes à feu.
Le projet de loi contribuera également à garantir que les gens qui se procurent des armes à feu détiennent vraiment le permis nécessaire pour en posséder une. Depuis 2012, tout ce qui est requis à cet égard au moment de la vente, c'est que le fournisseur n'ait « aucun motif de croire » que l'acheteur ne possède pas de permis. C'est une double négation. Souvent, les fournisseurs procèdent tout de même à une vérification, mais, en fait, ils ne sont pas tenus de le faire.
Cela peut poser problème, par exemple, dans le cas d'un client de longue date d'un petit magasin d'armes à feu qui a récemment commis un acte de violence et s'est fait révoquer son permis. Le propriétaire du magasin ne serait pas au courant de cet événement particulier, mais, s'il connaît le client en question depuis de nombreuses années, il pourrait tout simplement présumer que le permis est encore valide et tout de même lui vendre une arme à feu, de bonne foi, car il n'avait aucun motif de croire le contraire.
Le projet de loi exigera que le fournisseur effectue une vérification rapide en ligne ou par téléphone avant toute vente afin de s'assurer que le permis de l'acheteur est encore valide. Ce n'est que le gros bon sens. La description de ce processus ne contient aucune mention d'une arme à feu particulière.
Le projet de loi garantira également que la classification des armes à feu est fondée sur la sécurité du public, pas sur des considérations politiques. Le législateur continuera de contrôler les définitions qui créent les trois classes d'armes à feu. Le projet de loi abroge le pouvoir que s'était conféré le dernier gouvernement de passer outre à l'application de la loi par la GRC. Comme dans le cas de nombreux autres cadres législatifs et réglementaires, les règles seront établies par des représentants élus, puis les forces de l'ordre les feront appliquer.
Dans le cadre de ce changement, les deux cas où le gouvernement précédent avait fait fi de l'avis des experts des services de police seront annulés, mais nous permettrons aux gens qui ont acheté ces deux types d'armes à feu de bénéficier d'un droit acquis dans l'intérêt de l'équité, car ils ont agi de bonne foi à ce moment-là.
Le projet de loi rétablira également l'exigence d'obtenir une autorisation avant de transporter des armes à feu à autorisation restreinte et prohibées, sauf dans deux situations clés: le transport de l'arme à feu vers le domicile après achat, et le transport entre le domicile et un champ de tir. Cette mesure aidera les policiers qui rencontrent une personne transportant une arme prohibée ou à autorisation restreinte à déterminer si l'arme en question est transportée à une fin légitime. Encore une fois, pour obtenir l'autorisation, il suffit de passer un simple appel téléphonique ou de se connecter à un portail en ligne. Ce ne devrait pas être un lourd fardeau.
Enfin, le projet de loi rétablira la règle qui était en place de 1979 à 1995, qui exigeait que les entreprises d'armes à feu gardent la trace de leurs ventes. C'est obligatoire aux États-Unis depuis 1968. La plupart des fournisseurs canadiens le font aujourd'hui, même s'ils n'y sont pas tenus. La normalisation de cette bonne pratique commerciale aidera les policiers à retracer les armes à feu utilisées pour commettre des crimes, à dépister les stratagèmes d'achat par personne interposée et à repérer les réseaux de trafiquants.
Ce qui est crucial, c'est que les dossiers seront la propriété privée du détaillant. Ils ne seront pas accessibles au gouvernement, mais les policiers pourront en obtenir l'accès aux fins d'une enquête criminelle pour des motifs raisonnables et sous réserve d'une autorisation judiciaire, s'il y a lieu.
Le fait est que le projet de loi est une réaction directe et pratique au problème croissant que pose la violence liée aux armes à feu dans les collectivités canadiennes et qu'il traite les propriétaires et les entreprises d'armes à feu de façon raisonnable et équitable. C'est pourquoi l'Association canadienne des chefs de police l'a qualifié de « législation raisonnable sur les armes à feu, améliorant les outils à la disposition » des policiers « pour assurer la sécurité publique ».
Monsieur le président, je serai heureux de tenter de répondre aux questions du Comité.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, merci de vous être joint à nous aujourd'hui pour discuter de ce très important projet de loi.
Ma première question concerne le problème de la violence familiale, de la violence fondée sur le sexe et de la violence conjugale. Nous savons non seulement que les armes à feu sont utilisées dans ces cas, mais, fait plus important, qu'elles sont également utilisées comme moyen de menacer le partenaire, comme, dans la plupart des cas, pour garder une femme en otage, car elle sait que son partenaire a une arme à feu. J'ai moi-même une bonne amie dont l'ex-époux possédait légalement des armes à feu et les a utilisées pour la menacer de violence et la garder en otage.
Monsieur le ministre, je veux vous poser une question au sujet des vérifications des antécédents. Le contrôleur des armes à feu possède une liste très normative des éléments à repérer dans le cadre d'une vérification des antécédents. Quand j'ai parlé à certaines des organisations qui s'occupent des femmes qui fuient la violence, elles m'ont demandé s'il serait possible d'ajouter quelque chose qui ressemblerait à « tout autre risque associé à la violence », afin que la portée des vérifications des antécédents soit étendue légèrement au-delà de cette liste normative.
Je crois savoir qu'elles vous ont parlé à ce sujet. Quelles sont vos réflexions concernant l'ajout d'un libellé qui ressemblerait à cela?
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Monsieur le ministre, mesdames et messieurs, bonjour.
Monsieur le ministre, vous présentez aujourd'hui le projet de loi. Dans votre préambule, vous avez donné plusieurs statistiques sur la violence, sur les gangs et sur les violences de tout genre, en faisant référence aux données de 2013. Cependant, vous savez comme moi que, au Canada, au cours des 50 dernières années, l'année 2013 est celle qui avait un taux de criminalité exceptionnellement bas. Pourtant, vous vous basez sur les statistiques de l'année 2013 pour démontrer qu'il y a eu une augmentation de la violence. Toutefois, si on ne tient pas compte de l'année 2013, la moyenne n'a pas vraiment augmenté de façon significative. Ce n'est pas moi qui ai fait les calculs. En fait, c'est M. Gary Mauser, de l'Université Simon-Fraser, qui a témoigné à ce sujet. Vous vous servez de l'année 2013 pour motiver l'adoption de votre projet de loi.
J'aimerais savoir comment le projet de loi va permettre de régler un des principaux problèmes du Canada, soit les crimes violents commis par des gangs de rue. Le chef de police de Regina, votre ville natale, mentionne que les gangs de rue sont le principal problème. Ceux qui font partie de ces gangs n'ont pas acheté leurs armes sur le marché légal. Le projet de loi C-71 ne propose nulle part une façon de régler ce problème.
Selon vous, comment le projet de loi C-71 va-t-il permettre de régler le problème des gangs de rue?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence.
Je remercie mes collègues du Comité de m'accorder un peu de temps, à moi qui suis un député d'une région rurale, afin que je puisse prendre part à cette étude, qui est très importante pour mes électeurs.
Monsieur le ministre, je vous remercie également des nombreuses occasions de discuter de ce dossier qui se sont présentées pendant que vous étiez en train d'élaborer le projet de loi.
Durant la dernière campagne, une certaine crainte planait relativement à l'ancien registre des armes d'épaule. Je sais que le a rédigé le 20 mars le gazouillis suivant: « ce gouvernement ne mettra pas en place un autre registre des armes d'épaule. Ni maintenant, ni jamais. »
En quelques jours, j'ai commencé à voir des annonces ciblées provenant de l'opposition officielle qui disaient: « Arrêtons le nouveau registre des armes d'épaule de Trudeau ». À mes yeux, il s'agissait d'une tentative visant à semer la confusion à des fins partisanes. Je vais vous donner la possibilité de remettre les pendules à l'heure.
En ce qui concerne le mécanisme servant à retracer les armes à feu utilisées pour commettre des crimes, pouvez-vous nous confirmer, au public et à moi-même, qui suis député d'une région rurale, qu'avant que l'accès soit accordé à tout renseignement au sujet du propriétaire d'une arme à feu, qui serait la propriété privée d'un fournisseur, il vous faudrait des motifs raisonnables de croire qu'un crime a été commis ainsi que l'autorisation d'un tribunal au moyen d'un mandat?
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Merci, monsieur le président, et je vous remercie, monsieur le ministre, de votre présence aujourd'hui.
Même si je crois — comme, selon moi, tous les Canadiens — que les gangs et la violence liés aux armes à feu sont un problème auquel nous devons prêter attention et nous attaquer et que je salue les mesures prises en ce sens, je dois mentionner que, d'après mon interprétation du projet de loi, l'absence de toute disposition portant sur la violence liée aux armes à feu dans le contexte des gangs est gênante. Vous parlez du projet de loi comme s'il était axé sur les gangs et sur les armes à feu; pourtant, il ne contient absolument aucune mention des gangs, des armes à feu ou des organisations criminelles.
Je dois également vous avouer que je rigole en pensant aux statistiques que vous avez utilisées et à la façon dont vous les avez déformées, parce que, comme vous le savez, le fait de commettre une infraction dans le but de voler une arme à feu ne constituait pas une infraction criminelle distincte avant la période de 2008 à 2010, et il a fallu un certain temps pour instaurer ce principe dans tout le système. Vous laissez entendre qu'il y a eu une augmentation de 800 %, ce qui donne à penser qu'il devrait y avoir environ 1 200 cas, alors qu'en fait, les chiffres de Statistique Canada montrent que moins de 900 personnes ont été poursuivies au cours des sept ou huit dernières années où cette disposition a été appliquée. Je trouve qu'il est intéressant que l'on utilise les statistiques pour tenter d'appuyer des dispositions relatives au vol d'armes et de faire valoir que cette infraction est le problème qui se pose. Ce n'est pas le cas.
Nous savons que, dans le cas des groupes du crime organisé, surtout à Toronto, ce sont les achats par personne interposée. Un propriétaire d'armes à feu ou titulaire de permis de possession et d'acquisition plus ou moins légitime entre et achète une grande quantité d'armes à feu, puis les revend au crime organisé. Il s'agit d'une pratique. Voilà ce qui arrive, et nous savons que cela arrive tout le temps.
Toutefois, votre collègue a présenté le projet de loi , qui réduit tout type de sanctions pour les personnes ayant commis un vol ou une infraction à l'aide d'une arme à feu et ce genre de choses. J'ai vraiment de la difficulté, monsieur, à déterminer à quels égards et comment vous croyez que le projet de loi aura une incidence positive sur la violence liée aux armes à feu et aux gangs au pays. Il s'agit d'un projet de loi réglementaire qui ne fait rien que cibler les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois. Il n'accomplit absolument rien.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Goodale, je vous remercie d'être venu ici avec votre équipe.
On peu envisager cette loi sous bien des angles. Ma collègue, Mme Damoff, a exploré avec vous les éléments touchant le sexe. J'aimerais prendre le temps qu'il reste pour regarder avec vous deux autres aspects, dont un qui touche les jeunes, et particulièrement les jeunes à risque. J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur les aspects plus généraux de la loi et sur les initiatives que vous avez déjà mentionnées relativement aux gangs et à la violence, et peut-être aussi sur le Centre canadien d'engagement communautaire et de prévention de la violence et sur les effets de la loi sur les jeunes à risque.
Si le temps le permet, j'aimerais également connaître votre point de vue sur ce que nous ont révélé les intervenants autochtones, et particulièrement ceux qui utilisent les armes à feu pour la chasse, pour se nourrir et aussi pour gagner leur vie, par exemple en servant de guides, car bon nombre des activités dans le Nord dépendent des armes à feu, qui constituent une ressource économique.
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Vous touchez à des éléments importants, monsieur Spengemann.
Je crois que nos dispositions liées aux vérifications des antécédents aideront à régler les questions que vous avez soulevées. Le Centre canadien d'engagement communautaire n'est pas associé directement à cette initiative, mais il poursuit un objectif parallèle, qui consiste à s'assurer que les personnes qui risquent de prendre un mauvais chemin dans la vie puissent être cernées rapidement et que des mesures d'intervention soient prises pour les aider.
Nous avons tenu le Sommet sur la violence liée aux armes à feu et aux gangs à Ottawa, il y a quelques mois. Beaucoup de personnes y ont participé; il y avait environ 200 participants de tous les horizons, dont les personnes que l’on pourrait qualifier de pro-armes ou d’anti-armes et beaucoup de personnes dont l'opinion se situe entre les deux. Il y avait beaucoup de membres des forces de l’ordre, mais aussi des groupes représentant les jeunes et qui se préoccupent de la sécurité de leurs collectivités.
De nombreuses suggestions ont été faites quant à la façon de prévenir la participation aux activités de gangs, d’intervenir auprès des organisations criminelles afin d’aider les jeunes à échapper à ce mode de vie malsain et, pour ce qui est des policiers, de s’organiser et de collaborer en unités intégrées afin de stopper de manière plus efficace les activités des gangs. Afin de concrétiser ces excellentes idées, nous nous sommes engagés à investir jusqu’à 100 millions de dollars par année dans l’élaboration de plans d’intervention, de concert avec les provinces, les municipalités — de grandes villes comme Toronto, par exemple, et d’autres villes partout au pays —, des organisations d’application de la loi et des organismes communautaires non gouvernementaux, qui permettront d’éliminer le risque ou du moins de réduire considérablement dans les collectivités locales les comportements malsains et dangereux qui caractérisent les gangs, et particulièrement celles qui ont des armes à feu.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les témoins d'être ici. Ils sont ici depuis le début de la séance. Le ministre est déjà parti, mais, en réponse aux questions que j'ai posées précédemment, il a mentionné que l'objectif et l'intention du projet de loi sont d'habiliter le gouvernement, la police ou les organismes d'application de la loi à retracer le propriétaire original d'une arme à feu, ce à quoi j'ai essentiellement répliqué que cela supposait forcément qu'il allait y avoir un registre, puisque nous ne pouvons pas nous attendre à trouver la réponse dans une boule de cristal. L'information doit être conservée quelque part, vous voyez? Vous pouvez appeler cela un dépôt, ou un registre ou n'importe quoi d'autre, mais il doit y avoir un endroit où l'information sur les transactions est conservée.
Le ministre a été explicite quant à l'objectif du projet de loi, c'est-à-dire de nous permettre de faire le suivi des armes à feu. Cependant, monsieur O'Reilly, vous venez de dire au Comité qu'aucun renseignement sur une arme à feu ne sera conservé dans le cas des transactions de personne à personne — par exemple, si je vends mon arme à feu à M. Fraser ici présent —, et que seul le numéro de référence est conservé.
Dans ce cas...