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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui. Je m'appelle Jacob Beaton. Mon nom ancestral est Dzapl Gyiyaawn Sgyiik.
J'appartiens au clan de l'Aigle et à la lignée Tsimshian, Haida et Heiltsuk, dans la côte nord-ouest.
Merci beaucoup de m'avoir invité à témoigner.
Dans le cadre du travail que j'exécute pour les Premières Nations depuis le début de ma carrière il y a environ 20 ans, j'ai collaboré avec des dizaines de nations différentes à titre de propriétaire d'entreprise et d'entrepreneur des Premières Nations. Je détiens et j'exploite en ce moment une entreprise dirigée par des Autochtones qui a été couverte de prix. Je reviendrai plus tard au terme « dirigé par un Autochtone ».
Je suis lauréat du prix Young Aboriginal Entrepreneur et du prix Land Award en Colombie-Britannique. J'ai été nommé héros de l'alimentation pour le Canada par les Nations unies, et plus récemment, j'ai reçu la Médaille du couronnement du Roi Charles III. Actuellement, je remplis le rôle de conseiller spécial au bureau du vérificateur général de la Colombie-Britannique.
Je suis très heureux d'avoir été invité à témoigner et à répondre à vos questions. Je dois mon succès en affaires à ma capacité à cerner les problèmes, certes, mais surtout à trouver des solutions. Justement, nous discutons de problèmes et de solutions aujourd'hui. L'essence de l'entrepreneuriat est la capacité de déceler les problèmes et de trouver des solutions efficaces et durables.
Commençons avec les problèmes que nous essayons de résoudre.
Tout d'abord, vous êtes certainement au courant de l'oppression économique systémique qu'ont subie les Premières Nations et les peuples autochtones au Canada tout au long de leur histoire. Par exemple, en Colombie-Britannique, il y a un livre fascinant intitulé Indians at Work, que je me suis procuré gratuitement...
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Ce n'est pas un problème. Je ne suis pas surpris, car j'avais été averti. Merci.
Oui. Il y a des défis. Dans la côte ouest, par exemple, les Premières Nations étaient très actives dans certains secteurs de l'économie avant d'être systématiquement écartées. Cette éviction ne s'explique pas seulement par la Loi sur les Indiens, mais aussi par la collusion entre l'Église, le gouvernement provincial de même que certaines entreprises et certains individus.
Un exemple dans mon secteur est la politique sur les laissez-passer et les permis inscrite dans la Loi sur les Indiens. Cette politique — abrogée seulement depuis 2014 — interdisait aux membres des Premières Nations d'acheter tout ce qui était lié à la production alimentaire de même que de vendre des denrées alimentaires, d'en échanger et d'en donner. Les fantômes et les politiques de la Loi sur les Indiens hantent encore aujourd'hui les institutions au pays comme en témoignent les manifestations fréquentes de racisme institutionnalisé.
Je vous cite mon ami George, membre d'une Première Nation du territoire où je me trouve: « L'approvisionnement auprès des Autochtones est une forme de réconciliation économique, une occasion de guérir nos blessures causées par des lois patriarcales et racistes, qui auraient dû être modifiées depuis longtemps. »
Beaucoup de travail a été fait sur le sujet. Il y a eu assez d'études. Je tenais à le dire. Le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, dont les travaux s'étaient amorcés en 1991, est très exhaustif, tout comme celui de la Comission de vérité et réconciliation. Ces documents renferment d'excellentes recommandations. Nul besoin de les ressasser.
Comment allons-nous? Eh bien, nous pourrions aller mieux. Les indicateurs socioéconomiques stagnent ou reculent. Le rapport de Corporations Canada indique que moins de 1 % — 0,07 % pour être exact — des sociétés cotées en bourse au Canada comptent des Autochtones dans leur conseil d'administration. Moins de 1 % des cadres supérieurs — en fait 0,5 % — des sociétés cotées en bourse au Canada sont métis, membres des Premières Nations ou inuits.
L'espérance de vie moyenne des membres des Premières Nations en Colombie-Britannique a dégringolé de plus de six ans entre 2017 et 2021. Le taux de chômage des Premières Nations oscille en règle générale autour de 10 % ou 15 % depuis une vingtaine d'années. Ces chiffres sont deux fois plus élevés dans les réserves.
Pour savoir comment vont les Premières Nations, il suffit de consulter les données. Le bilan n'est pas très positif. La stratégie d'approvisionnement ne fonctionne pas, et je vais vous expliquer en partie pourquoi.
Tout d'abord — je l'ai entendu en écoutant les délibérations passées du Comité —, il est facile pour certains de se prétendre faussement autochtone, et pour d'autres, de clouer au pilori les fauxtochtones. Ce ne sont pas les stratagèmes d'un groupe d'imposteurs qui sont la cause principale du problème. Ce sont plutôt les politiques et les systèmes actuels qui encouragent la corruption et la fraude. Je peux vous donner des exemples.
Prenons l'approvisionnement fondé sur le principe de propriété autochtone. Les entreprises non autochtones vont souvent aller chercher un partenaire financier autochtone seulement pour que leur soumission soit retenue. Un autre stratagème est de combiner les structures de société en nom collectif et de société en commandite. Les entreprises détenues à 99 % par des Autochtones donnent 99 % des pouvoirs liés aux opérations à des partenaires commandités non autochtones. La part du profit normalement offerte aux nations ou aux partenaires autochtones est de 5 % — c'est un secret de Polichinelle. Tout cela entraîne souvent une augmentation du coût des travaux comme si le 5 % était un tarif ou une taxe supplémentaire sur les contrats et les travaux.
Étant donné l'absence de processus essentiels de vérification, de contrôle ou de sanctions, les promesses faites au stade de la soumission qui ne sont pas honorées par la suite sont devenues monnaie courante. Ce manquement n'entraîne aucune conséquence. Prenons l'exigence du taux minimal d'emplois octroyés à des Autochtones. Selon ce que j'ai vu au cours de ma carrière, ce sont les nations déjà à bout de ressources qui écopent des sanctions. Dans mon cas, une seule vérification a été menée sur mon patrimoine autochtone et celui de mon entreprise, et elle l'a été par un organisme des Premières Nations.
Le processus d'approvisionnement favorise les gouvernements reconnus des Premières Nations et exclut les entrepreneurs locaux comme moi. Les nombreuses Premières Nations dont les capacités sont limitées dépendent lourdement des professionnels et des fournisseurs non autochtones. Les conflits d'intérêts sont la norme parce que ces partenaires non autochtones qui acquièrent une participation majoritaire placent leurs intérêts avant les valeurs et les priorités des partenaires autochtones.
Je viens de vous faire état des problèmes. Parlons des solutions à présent.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de m'avoir invité.
Je m'appelle Lorne Pelletier. Je suis conseiller économique principal de M. David Chartrand, président de la Fédération des Métis du Manitoba. Je vous parle de Winnipeg, au cœur du territoire de notre nation.
Je suis accompagné de mon collègue, Marc LeClair, président et chef de la direction de notre entreprise affiliée, Métis N4 Construction.
Comme le sait le Comité, les Métis de la rivière Rouge sont un groupe autochtone dont les droits sont reconnus au titre de l'article 35 de la Loi constitutionnelle. Notre peuple était et continue d'être un partenaire du Canada dans la Confédération.
Nous sommes reconnus pour la rigueur de notre éthique de travail et la force de notre entrepreneuriat depuis l'époque de la chasse au bison. La Fédération des Métis du Manitoba est le gouvernement national de notre peuple. Cela est établi dans notre constitution et dans nos processus démocratiques. La fédération est reconnue dans l'Entente de reconnaissance et de mise en œuvre de l'autonomie gouvernementale des Métis du Manitoba, que le Canada a signée en juillet 2021.
J'aimerais commencer ma déclaration liminaire en saluant la mise en place en 2021 par le gouvernement du Canada de la cible obligatoire de 5 % de participation autochtone aux marchés fédéraux. Cette politique constitue un pas authentique et tangible vers la réconciliation avec les Autochtones qui pourrait faire progresser de façon importante la participation économique des Métis de la rivière Rouge.
Même si la politique est valable, sa gestion et son application comportent des lacunes et des obstacles. Plusieurs en ont fait état, et le Comité est au courant. Les entreprises des Métis de la rivière Rouge qui veulent participer au processus d'approvisionnement fédéral auprès des Autochtones se butent encore à ces obstacles. Je tiens à mentionner au Comité que la Fédération des Métis du Manitoba veut et peut faire partie de la solution. Le Comité ne le sait peut-être pas, mais la fédération a établi le registre des entreprises des Métis de la rivière Rouge et un répertoire en ligne de ces entreprises, qui est tenu par notre entreprise affiliée, la Louis Riel Capital Corporation.
Notre répertoire compte en ce moment 770 entreprises. Pour s'y inscrire, les entreprises passent par un processus de vérification de participation majoritaire réalisé par la Louis Riel Capital Corporation, qui est l'institution financière autochtone de la fédération. À titre d'information, la Louis Riel Capital Corporation vient de souligner ses 32 ans de services offerts aux entreprises des Métis de la rivière Rouge. Dans ce processus de vérification, la citoyenneté du ou des propriétaires d'une entreprise des Métis de la rivière Rouge est validée au moyen du registre de citoyenneté de la fédération, qui est tenu par notre bureau du registre central. La vérification de participation majoritaire et la validation de la citoyenneté sont effectuées pour toutes les entreprises inscrites au répertoire des entreprises des Métis de la rivière Rouge.
Le problème, c'est que notre répertoire n'est pas considéré comme une source valide permettant de certifier le statut d'entreprise autochtone dans le cadre des processus du gouvernement du Canada. Par conséquent, les contrats établis entre le Canada et un de ses principaux fournisseurs qui entend embaucher en sous-traitance une entreprise des Métis de la rivière Rouge ne sont pas comptabilisés dans l'exigence de 5 % des ministères fédéraux. Cela a pour effet d'écarter des processus d'approvisionnement les entreprises des Métis de la rivière Rouge. Elles n'ont en outre pas la possibilité de s'inscrire au Répertoire des entreprises autochtones fédéral et ne sont pas encouragées à le faire.
Le Comité sait que le processus d'inscription au Répertoire des entreprises autochtones peut être laborieux. Puisque ces entreprises sont déjà inscrites au répertoire de notre gouvernement, la non-reconnaissance de celui‑ci touche au droit à l'autonomie gouvernementale et à l'autodétermination et à notre capacité à reconnaître et à promouvoir les entreprises des Métis de la rivière Rouge.
Je demande au Comité de considérer sérieusement la possibilité de reconnaître le répertoire des entreprises des Métis de la rivière Rouge comme moyen de validation légitime dans le cadre de l'approvisionnement auprès des Autochtones.
Merci encore de m'avoir invité.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de leurs témoignages très intéressants et éclairants.
J'aimerais commencer par la Manitoba Métis Federation.
Nous voyons, je pense, beaucoup de gens qui prétendent être Autochtones ou Métis, plus particulièrement. Bien sûr, il y a le cas récent de l'ancien ministre , et je pense qu'il y en a beaucoup d'autres. Il semble que, lorsque des gens revendiquent faussement une identité autochtone, il s'agit très souvent de l'identité métisse.
Ce qui suit peut sembler évident, mais je pense que c'est important. Pouvez-vous nous expliquer clairement ce que cela signifie d'être Métis? Autrement dit, comment définit‑on correctement l'identité métisse? Comment peut‑on vérifier l'identité métisse revendiquée par une personne? Pourquoi pensez-vous que nous assistons à une prolifération de fausses revendications concernant l'identité métisse?
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Je vous remercie de la question.
En 1870, 10 000 des 12 000 habitants de la région de la rivière Rouge étaient Métis. Il y avait 2 500 Métis de plus dans la vallée de la Qu'Appelle vers Edmonton. Le Canada était censé conclure une entente avec nous pour 1,4 million d'acres de terres, pour lesquelles il y avait des certificats.
De plus, à l'extérieur du Manitoba, il y a eu la Loi sur les terres fédérales, qui a fourni des certificats aux Métis. Ils ont été livrés à peu près en même temps que les traités numérotés étaient conclus, de sorte que pour figurer dans notre registre, il faut fournir ces certificats ou les registres paroissiaux. Qui est Métis de la rivière Rouge et qui ne l'est pas est très clair. Nous avons vu tout ce qui se passe en Ontario, au Québec et dans l'Est du Canada; ces gens ne sont pas des Métis de la rivière Rouge.
Nous avons nos propres registres avec des systèmes de vérification en place, et c'est ce dont M. Lorne parlait. Ce n'est pas seulement pour nos gens, mais aussi pour nos entreprises. Qui nous sommes et qui n'est pas Métis est très clair. C'est une question importante.
Je voulais également poser une question au sujet de la liste des entreprises.
Il y a différents ayants droit qui tiennent leurs propres listes. Parallèlement, le gouvernement a dit qu'il allait avoir sa propre liste. Il y a des gens qui ne figurent pas sur la liste du gouvernement et qui sont en fait propriétaires d'entreprises autochtones, et il y a des gens qui figurent sur cette liste et qui ne sont pas propriétaires d'entreprises autochtones.
Il me semble que c'est l'une de ces choses qu'on qualifie de compliquées alors que c'est assez simple. Au lieu de créer sa propre liste, le gouvernement ne peut‑il pas simplement mettre en place un mécanisme qui permettra aux responsables de l'approvisionnement de consulter les listes qu'il accepte?
Les nations légitimes ont leurs propres listes, et nous pourrions les utiliser. Des organisations qui représentent de manière crédible les peuples autochtones produisent également des listes. Plutôt que de refaire ce travail ou de n'avoir qu'une seule liste, le gouvernement pourrait simplement regarder qui figure sur les autres listes pour déterminer quelles entreprises sont autochtones. Cela ne serait‑il pas beaucoup plus simple?
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Oui, ce serait beaucoup plus simple.
J'étais ici lorsque Ron Irwin a présenté cette stratégie d'approvisionnement. Pendant de nombreuses années, elle n'a pas été très efficace. Plus tard, lorsque le gouvernement a établi des cibles et des échéanciers, elle a commencé à donner des résultats. Le problème, c'est que la base de données des entreprises a été contaminée dès le départ. Le fait que le ait dit que 1 100 entreprises ont été retirées de la base de données en dit long sur celle‑ci.
Aux États-Unis, on a créé des conseils sectoriels. C'est Nixon qui a mis en place l'alinéa 8a), les exigences en matière d'affaires et d'approvisionnement pour les minorités, et qui a créé 49 conseils d'affaires différents qui font la vérification des entreprises. Nous avons fait appel au Canadian Aboriginal and Minority Supplier Council. Nous avons participé à sa mise sur pied, et il effectue des vérifications auprès des entreprises minoritaires et autochtones. Il y a moyen de s'autoréglementer, et M. Pelletier a une perspective importante à ce sujet.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
Je pourrais peut-être adresser ma question à l'un ou l'autre des invités qui aimeraient répondre, à tour de rôle.
En ce qui concerne la cible minimale de 5 % pour les entreprises autochtones, elle a été établie en grande partie en réponse aux appels des chefs d'entreprise des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Pouvez-vous nous dire à quel point elle est importante et comment elle a été accueillie par les nations principales et les autres dirigeants autochtones avec lesquels vous travaillez? Quel message le gouvernement fédéral envoie‑t‑il ainsi aux communautés autochtones?
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C'est extrêmement important.
La pire chose qui pourrait arriver, monsieur Bains, c'est que le gouvernement dise que cela ne fonctionne pas et qu'il abandonne le projet. C'est ce qui s'est toujours passé pour nous. Les institutions non autochtones font des erreurs avec les programmes et les projets des Premières Nations et des Autochtones et disent ensuite: « Vous voyez? Cela ne fonctionne pas. Nous allons laisser tomber. » Ce n'est pas la bonne voie à suivre.
La bonne voie consiste à faire de petits pas en avant pour commencer, puis de grands pas afin de passer à une véritable « réconcili-action » pour permettre à un plus grand nombre d'Autochtones de participer à l'économie de ce pays et pour que...
Savez-vous ce qui permet de remédier à l'insécurité alimentaire endémique chez les Premières Nations? Ce sont les emplois. Les emplois contribuent grandement à nourrir les enfants, dont 50 % en Colombie-Britannique sont en situation d'insécurité alimentaire.
Nous ne voulons pas reculer. Nous voulons avancer et nous voulons travailler ensemble. Je pense que c'est un sentiment assez universel.
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Je vous remercie pour votre question, monsieur Bains.
À mon avis, il faut plus de précision. Je crois qu'un autre membre du Comité a demandé qui prenait les décisions au sujet des listes, qui les autorisait et qui validait les entreprises qui s'y trouvaient. Je crois que c'est le nerf de la guerre. Il s'agit de la transition des listes en soi vers les autorisations relatives aux détenteurs de ces listes.
Je crois que c'est là que nous entrons en jeu. La Fédération des Métis du Manitoba est une nation autonome qui possède un répertoire d'entreprises bien établi, vérifié et validé. Nous voulons que le gouvernement reconnaisse que nous sommes un gouvernement autochtone bien établi et qu'il reconnaisse notre importance à titre de détenteur de la liste.
Je crois que c'est la prochaine étape qu'il faut franchir. Il faut veiller — et cela revient au point d'un autre membre du Comité — à ce que l'agent d'approvisionnement du ministère fédéral qui évalue le contrat et les entreprises avec lesquelles passer un marché ait accès à ce qui a été préalablement établi dans une liste d'entreprises reconnue.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur LeClair, monsieur Pelletier, le 16 novembre dernier, on soulignait le 139e anniversaire d'un bien triste événement, soit celui lié à la pendaison de M. Riel. Je voulais vous offrir, à vous et à la communauté des Métis, tout mon soutien. Au Québec, un ancien premier ministre a déjà dit: « On a jappé fort contre cette pendaison. Il s'est fait traiter de chien. » Je suis de tout cœur avec vous quant à cet événement. Cela remonte à 139 ans, mais c'est toujours frais dans nos mémoires.
Ma première question s'adresse à M. Beaton, mais vous pourrez ajouter des commentaires, parce que je suis convaincue que vous aurez également des choses à dire.
Monsieur Beaton, vous avez dit qu'il était parfois nécessaire, pour des entreprises autochtones, de s'allier avec des entreprises non autochtones pour des considérations essentiellement financières. Nous avons aussi entendu d'autres personnes le dire. C'est une question de liquidités, et cette situation est notamment attribuable à la Loi sur les Indiens. Les entreprises qui exercent leurs activités sur les réserves ont beaucoup de difficulté à obtenir du financement des banques traditionnelles.
Comment peut-on s'assurer que l'entreprise autochtone a réellement un rôle à jouer dans le contrat obtenu dans le cadre d'une alliance avec une entreprise non autochtone, et ce, tant sur le plan des tâches à accomplir que sur celui du partage des revenus? Comment s'assure-t-on que ce soit juste et vrai?
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Je vous remercie pour votre question. C'est une excellente question, et vous y avez en quelque sorte répondu en soulignant les problèmes d'accès au capital. Une enquête réalisée par l'entremise de notre réseau d'associations à but non lucratif a permis de constater que l'accès au capital — autrement dit, la possibilité de s'adresser à une banque et d'obtenir un prêt — était le principal problème, suivi de près par l'accès aux terres et le recours à des personnes formées.
Depuis que je suis tout petit, on nous a promis que les partenariats avec les parties non autochtones seraient temporaires et qu'on allait former la prochaine génération de Premières Nations ou d'Autochtones pour prendre leur place. Ce que j'ai constaté au cours de ma vie, c'est que c'était une promesse en l'air qui ne s'est pas concrétisée.
Les problèmes que vous avez décrits pourraient être résolus au moyen d'une politique. Les parties de la Loi sur les Indiens qui sont très restrictives ne sont souvent plus appliquées, et les institutions, y compris le gouvernement, peuvent prendre des décisions très progressistes grâce à des changements de politiques qui ouvrent la porte à l'accès au capital, par exemple. J'en ai été témoin. Je me suis battu avec les banques et j'ai été témoin de changements de politique majeurs qui ont ouvert ces portes.
Je suis un Indien inscrit. Je vis hors réserve, et il est encore très difficile pour moi d'obtenir du financement parce que cet article de la Loi sur les Indiens est constamment invoqué à titre d'excuse pour ne pas me donner accès au financement, même si mes actifs sont tous en dehors de la réserve.
Enfin, il faut que les initiatives dirigées par les Autochtones deviennent la norme, afin que les Autochtones prennent les décisions au quotidien. C'est la définition de l'approche dirigée par les Autochtones. Si nous continuons de donner à des intérêts non autochtones dominants tout l'espace nécessaire pour prendre les décisions, alors les peuples autochtones ne disposent pas de l'espace et des occasions nécessaires pour avancer et pour occuper ces emplois et ces postes dans le cadre de ces initiatives, contrats et occasions.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis heureux d'être de retour au Comité.
Je remercie les témoins de nous éclairer sur la question à l'étude.
Je suis très heureux que nous recevions M. Beaton, du Nord-Ouest de la Colombie-Britannique, parce qu'il a une grande expérience en tant qu'entrepreneur autochtone et qu'il a beaucoup réfléchi à la façon dont nous pouvons veiller à ce que les entreprises autochtones aient accès à plus d'occasions d'affaires, de même qu'à la façon dont nous pouvons nous attaquer aux injustices en matière d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones qui durent depuis longtemps, comme il l'a fait valoir dans sa déclaration préliminaire.
Je sais, monsieur Beaton, que vous avez manqué de temps pour parler des solutions que vous envisagez. Je voulais vous donner l'occasion de nous parler de vos propositions pour combler les lacunes que vous avez désignées. Vous pourriez peut-être vous centrer sur les questions pragmatiques relatives à la définition d'une entreprise autochtone et sur l'approche « pour les Autochtones et par les Autochtones » qui, à mon avis, est essentielle en vue de régler les problèmes que nous connaissons avec le système d'approvisionnement auprès des Autochtones.
J'aimerais vous donner les quelques minutes qu'il reste pour que vous nous en disiez plus sur le sujet et que vous nous aidiez à comprendre les prochaines étapes.
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Bien sûr. Je vous remercie de la question, monsieur Bachrach. Merci de me donner un peu plus de temps pour en parler.
Comme je l'ai dit, nous, les Autochtones, devrions être les seuls juges et arbitres de qui est autochtone et qui ne l'est pas. C'est ce qu'ont dit également mes amis métis ici présents, et ils ont aussi une solution à proposer.
Nous avons une solution. Nous savons qui est autochtone et qui ne l'est pas. Nous savons qui est membre des Premières Nations et qui ne l'est pas. C'est assez simple.
Comme les intervenants métis précédents l'ont dit, ce n'est pas compliqué. L'autochtonité n'est pas une chose compliquée. Pour chaque membre des Premières Nations qui sait d'où il vient et que la nation reconnaît, c'est clair: la personne est membre des Premières Nations ou autochtone. Voilà tout. Qui sont vos ancêtres, et sont-ils au courant de votre existence?
L'autre chose dont je veux parler et qui est vraiment essentielle, c'est que la propriété autochtone est évidemment importante, mais que ce n'est qu'un élément de l'identité autochtone d'une entreprise ou d'une entité, et c'est un très petit élément, car il y a en fait cinq éléments essentiels qui déterminent si elle est dirigée par des Autochtones.
La définition simple de « dirigé par des Autochtones », c'est que si ce sont des Autochtones qui prennent les décisions à tous les niveaux de l'organisation, ce sont des décisions autochtones. Elles vont être conformes aux valeurs et aux perspectives autochtones. Elles vont profiter à la communauté. Elles vont créer des emplois locaux. Elles vont créer des emplois pour d'autres Autochtones et des possibilités d'avancement, mais la norme des décisions dirigées par des Autochtones n'est appliquée nulle part au gouvernement fédéral, à ce que je vois.
La solution consiste essentiellement à adopter la norme des décisions dirigées par des Autochtones, plutôt que celle de la propriété autochtone. Ensuite, c'est nous qui devons établir cette norme, et même effectuer les vérifications: nos organisations, nos organisations authentiques dirigées par des Autochtones. Ensuite, nous verrons les choses changer, parce que ce devrait être le seul critère. La raison pour laquelle nous sommes ici à parler de l'approvisionnement auprès des entreprises autochtones, c'est qu'il y a des injustices historiques qui ont complètement marginalisé les Autochtones dans l'économie de ce pays, les mettant à l'écart, et nous essayons d'y remédier.
Il faut régler ce problème. Nous sommes tous dans le même bateau. Le Canada a besoin de travailleurs. Nous avons besoin d'entreprises fortes. Nous en avons dans notre population autochtone; nous sommes disponibles et prêts. Tout le monde y gagnera. Tout le monde. Pourquoi n'avons-nous pas cette conversation? Pourquoi ne parlons-nous pas de ces changements en profondeur, qui vont créer des emplois?
La dernière chose que je dirais, monsieur Bachrach, c'est qu'il a été prouvé que les peuples autochtones gèrent 82 % de la biodiversité restante dans le monde. Voilà l'effet de la norme des décisions « dirigées par des Autochtones » sur moins de 1 % des ressources mondiales.
La même chose se produit sur le plan économique lorsque des Autochtones sont aux commandes. Nous créons des emplois locaux. Nous profitons à l'économie locale, et il y a un effet multiplicateur énorme. Tout le monde y gagne, mais c'est nous qui devons être au volant. Nous devons être le moteur des décisions, et nous verrons alors les cadrans commencer à bouger.
Je vous remercie de m'avoir écouté à ce sujet.
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Merci beaucoup, monsieur Beaton.
Je voudrais vous poser une autre question. Il nous reste une minute.
En ce qui concerne la norme des décisions dirigées par des Autochtones, on nous dit que c'est une chose à laquelle le gouvernement aspire. Par exemple, il y a un engagement à l'égard d'une stratégie de logement « pour les Autochtones, par les Autochtones » assortie de ressources financières importantes, mais ces ressources n'ont toujours pas été octroyées, plusieurs années après l'engagement initial.
Où pensez-vous que le gouvernement déraille lorsqu'il s'agit d'habiliter les organisations autochtones et de permettre la gouvernance autochtone dans les décisions relatives à l'élaboration des programmes et à la distribution des ressources? Où les choses se gâtent-elles?
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Cela ne fonctionne pas si l'on ne cède pas les rênes à une organisation autochtone authentique et efficace dès le début.
Dans les processus auxquels j'ai participé, j'ai vu des annonces budgétaires fédérales de 30 ou 50 millions de dollars, disons, pour un secteur de l'économie autochtone, et le temps que tout cela se concrétise, le montant n'était plus que de 1 million de dollars pour les organisations autochtones authentiques. Ce que je vois, c'est qu'il y a toujours plus d'études.
C'est pourquoi j'ai dit dans ma déclaration préliminaire qu'il n'est pas nécessaire de faire d'autres études. Nous n'avons pas besoin de plus de données. Les données sont là. Il faut simplement nous mettre au travail, et nous devons être au volant. Nous avons besoin qu'on nous laisse enfin régler nos propres problèmes.
Merci.
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Eh bien, je pense que M. Chartrand, notre président, en a parlé dans une entrevue à la CBC l'autre jour. Nous savons qui sont les vrais Métis, les Métis de la rivière Rouge, et je ne pense pas qu'il n’ait jamais revendiqué en faire partie.
Le problème, ici, c'est l'auto-identification, qui est généralisée dans la fonction publique fédérale. Il suffit de dire qu'on s'identifie comme Autochtone, et le tour est joué. Nous n'avons jamais été d'accord avec cette façon de faire, non seulement pour l'approvisionnement, mais aussi pour l'emploi.
Il incombe vraiment au gouvernement, et au Comité, en fait... Je suis heureux que vous vous penchiez sur ces questions, parce qu'il faut vraiment exercer une certaine surveillance quand on met en place ce genre de politique, puis faire le suivi de la politique aussi. Je pense que la question de l'auto-identification doit vraiment être revue de près.
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Il n'est pas surprenant du tout, quand on utilise la méthode de l'auto-identification, qu'il y ait un certain nombre de personnes assez peu scrupuleuses qui s'auto-identifient faussement, selon ce qu'elles jugent dans leur intérêt à ce moment‑là. C'est assez évident.
Mais parlons d'application des règles. M. Beaton a fait des commentaires intéressants et importants, à mon avis, sur l'application des règles. Il a souligné le fait qu'il y a certes quelques cas médiatisés de personnes qui font carrément de fausses déclarations d'identité autochtone — comme , par exemple —, mais qu'il y a probablement beaucoup plus de déclarations trompeuses de structure autochtone. Ce n'est pas une personne non autochtone qui prétend être autochtone; il s'agit plutôt d'une structure conçue pour incorporer en partie une entreprise autochtone, mais d'une manière qui préserve tous les avantages pour la partie non autochtone du partenariat.
De plus, M. Beaton a parlé de l'absence de vérifications, en ce sens qu'une entité peut prétendre bénéficier à des Autochtones ou partager ses avantages ou le travail d'une certaine façon, mais ces affirmations ne sont pas vérifiées, les règles ne sont pas appliquées.
Je me demande si les deux témoins pourraient nous parler du fait qu'on ne fait pas appliquer les règles. Pourquoi ne les fait‑on pas respecter, qui devrait en assurer le respect et comment pouvons-nous améliorer l'application des règles, concrètement?
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Oui. Merci. Je serai heureux d'y répondre.
Encore une fois, pour revenir à ce que je disais plus tôt sur qui autorise ou valide ces listes et comment ces listes sont mises à la disposition des décideurs fédéraux en matière d'approvisionnement, il doit y avoir un régime bien établi pour déterminer qui peut être inscrit à la liste et comment on vérifie et valide l'identité des personnes figurant sur les listes.
Parallèlement à ce régime, il y a tout le cadre nécessaire de l'autre côté, dont vous parlez, à savoir comment chacun des différents groupes ou le gouvernement du Canada va assurer le respect des règles, que ce soit au moyen d'une vérification après la passation des marchés ou par l'application de conditions ou de critères adéquats, dorénavant, par les administrateurs de la liste, encore une fois.
De façon plus générale, je pense qu'en ce qui concerne certaines activités frauduleuses, nous voyons déjà des poursuites judiciaires se profiler à l'horizon, des conséquences juridiques, pour revenir à ce que disait M. LeClair au sujet de l'auto-identification...
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Merci beaucoup de cette question, madame Atwin.
Le processus a évolué. Nous y avons apporté de plus en plus de rigueur et d'intégrité au cours des dernières années. De toute évidence, il y aura une mise à jour du registre, à un moment ou un autre, étant donné qu'il peut y avoir un changement de propriété dans le cours naturel d'une transaction commerciale. Il peut aussi y avoir des changements sur le plan de la citoyenneté. Nous surveillons tout cela en continu.
Je dirais que ce qui est vraiment intéressant et vraiment excitant au sujet de cette liste, c'est que nous l'utilisons pour guider notre propre politique et notre programme de participation équitable des Métis de la rivière Rouge. Nous l'avons utilisée dans le cadre des principaux contrats que nous avons attribués. La Fédération des Métis du Manitoba a conclu d'importants contrats avec des entreprises non métisses capables de les réaliser. Ensuite, il y a un processus grâce auquel elles peuvent utiliser notre registre pour soutenir les fournisseurs, les sous-traitants, etc.
Je dirai simplement que dans le cadre d'un projet d'amélioration de l'efficacité énergétique de 11,5 millions de dollars réalisé récemment, notre entrepreneur général était un Métis de la rivière Rouge et 17 des 22 sous-traitants étaient également des Métis. Sur le site, 28 % des travailleurs étaient des Métis de la rivière Rouge. C'est considérable.
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Oui, tout à fait. Je vous remercie de m'offrir cette tribune.
Nous sommes dirigés par des Autochtones, ce qui signifie que notre conseil d'administration, notre personnel de direction, notre personnel intermédiaire et notre personnel de premier échelon sont majoritairement autochtones, à tous les niveaux.
Notre première année, nous avons surtout offert de la formation professionnelle, principalement dans les métiers. Je ne suis pas un éducateur de formation — je suis un entrepreneur —, mais je voyais tous ces chantiers de construction, tous ces projets réalisés à des endroits où il y avait plein de membres des Premières Nations au chômage. Pourquoi personne n'y travaillait‑il? J'ai été entrepreneur général pendant un certain temps, et j'ai prouvé que c'était possible, tout comme mon collègue ici présent.
Quoi qu'il en soit, je voulais simplement dire que notre première année, nous avons engagé plus d'Autochtones dans les métiers que tous les établissements non autochtones financés par le gouvernement réunis dans notre province, et ce n'était que notre première année. Nous avons connu une croissance chaque année depuis.
D'ailleurs, personne ne m'a demandé si j'étais inscrit au répertoire et si j'avais déjà tenté de soumissionner. Ce qui est drôle, c'est que je l'ai déjà été, mais vous savez quoi? Ma carte de statut est expirée, et c'est un énorme problème. Le fait de ne pas avoir de pièce d'identité dans des communautés rurales, éloignées et autochtones constitue un très gros problème. C'est pourquoi je n'y suis pas inscrit.
J'ai le statut d'Autochtone. Je suis sans contredit autochtone. Je suis membre des Premières Nations. Vous trouverez des dizaines de milliers de personnes qui attesteront de mon identité autochtone, de mes ancêtres ici, et pourtant, je ne suis pas inscrit au répertoire parce que j'ai une carte de statut expirée, ce qui est absolument ridicule.
Quoi qu'il en soit, oui, nous connaissons un énorme succès. Si quelqu'un veut voir ce que nous faisons, notre site Web est teacreek.ca, comme le thé que vous buvez.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Beaton, comme vous le savez, j'ai eu l'occasion de prendre le train de Prince George à Smithers il y a quelques semaines. J'ai fait le voyage avec un jeune homme du nom de Justice Moore, qui m'a raconté comment sa vie a été transformée grâce au travail que vous faites à Tea Creek.
Je veux vous donner mon dernier temps de parole pour que vous nous parliez de ce que vous faites au sein de votre entreprise, Tea Creek, que vous nous parliez de vos réussites, de la formation que vous offrez à des Autochtones locaux, afin de leur permettre d'acquérir les compétences dont ils ont besoin pour réussir et s'épanouir.
Vous avez deux minutes et demie. Parlez-nous de l'histoire de Tea Creek et des transformations auxquelles elle donne lieu.
Eh bien, j'ai décidé de mettre toute mon expérience en affaires pour essayer de transformer... Ma vision pour Tea Creek, c'est d'avoir des économies autochtones saines et résilientes partout au pays et ailleurs, fondées sur de la nourriture locale abondante, ce qui représente notre histoire. Notre passé, c'est notre avenir; voilà comment je résume ce qu'est Tea Creek. C'est ma vision.
Concernant les détails pratiques, il faut donner des formations d'appoint à nos gens pour qu'ils occupent ces places dans notre économie, à tous les échelons. Il y a un excellent documentaire sur Tea Creek à CBC. On peut le trouver sur CBC Gem. Cherchez Tea Creek et vous le trouverez, si vous voulez vraiment trouver des solutions qui fonctionnent et connaître ce que nous faisons ici.
Je tiens simplement à tous vous remercier encore de nous avoir invités, de m'avoir invité et de votre écoute. J'ai bien hâte de voir des changements positifs. J'espère que le gouvernement fédéral veut que des entreprises autochtones prennent racine et deviennent la nouvelle norme qui ouvre la voie à plus de débouchées et de ressources qui font réellement la différence sur le terrain.
Merci beaucoup.
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Je serai le plus bref possible.
Merci au Comité de m'avoir réinvité à vous parler.
Je souligne que j'étais censé participer à une autre réunion à Toronto aujourd'hui avec le conseil consultatif autochtone de la Banque de Montréal, et on m'a donné congé pour que je vienne ici, parce que c'est un sujet important pour toutes les communautés au Canada.
Je m'appelle Denis Carignan et suis président de PLATO Testing. Nous sommes une entreprise de services de TI qui compte environ 400 employés un peu partout au Canada.
Je dois me rappeler pourquoi je suis ici et que je présente un exposé aujourd'hui, parce que j'ai déjà témoigné une fois ici, et j'ai pensé à ma mère. Elle s'appelle Leona Cyr, Leona Carignan. Elle est allée au pensionnat autochtone Lebret pendant 12 ans, en compagnie de tous ses frères et soeurs. La chose qu'elle m'a enseignée, c'est qu'elle reconnaissait le passé, mais qu'elle regardait toujours vers l'avenir et vivait au moment présent.
Au cours de ma vie, cela m'a enseigné que je devais vérifier mes intentions avant de livrer un exposé. Je me suis demandé pourquoi j'étais ici aujourd'hui. C'est vraiment pour que je vous présente mon expérience comme homme d'affaires qui dirige une entreprise de services de TI au Canada depuis neuf ans. J'espère que nos expériences et quelques‑uns de nos apprentissages appuieront le travail de ce Comité, parce que votre travail et celui du gouvernement sont importants pour nous.
Le gouvernement du Canada est le principal acheteur de biens et services au Canada, donc la façon dont il gère l'approvisionnement est très important. C'est très important comme outil de politique pour favoriser de bons résultats pour tous les Canadiens.
En tant qu'homme d'affaires, je reconnais aussi que je ne peux pas changer la politique. Collectivement, avec le travail que fait le Parlement, vous avez le pouvoir d'influencer les choses et d'apporter des changements. Nous sommes ici, car la politique précédente mise en place il y a presque 30 ans ne fonctionne pas selon les normes actuelles.
J'ai entendu certains témoignages ce matin. J'étais très reconnaissant d'entendre Lorne Pelletier, un de mes anciens collègues, parler avec beaucoup de sérieux et de sagesse. J'ai vu bien des points en commun entre l'exposé de ce matin et ce que nous avons aussi à dire.
Mon domaine, c'est la technologie. Nous travaillons dans le secteur des technologies. Nous devons affronter une concurrence mondiale. Nous collaborons avec des entreprises et des organisations gouvernementales partout au Canada. Ensemble, nous cherchons à travailler pour créer des carrières pour les Canadiens autochtones dans ce secteur.
Ceci dit, et compte tenu des données démographiques dans notre industrie, de 0,5 % à 1,5 % de la main‑d'oeuvre en technologie au Canada est autochtone, pourtant il y a d'excellentes occasions d'y faire carrière.
Quand je regarde mon travail précédent comme fonctionnaire, je vois qu'un de nos défis, c'est la diversification de l'économie des communautés locales. Ce qu'il y a de bien avec la technologie, c'est que le travail est portable, donc si nous investissons du temps et de l'énergie, et que nous aidons les gens à acquérir des compétences, alors nous pourrons amener du travail dans les diverses régions du Canada. Cela pourrait en fait aider à diversifier le travail.
Je vous ai transmis un document. Il n'a sans doute pas encore été traduit. C'est un aperçu de qui nous sommes comme entreprise et de certaines conséquences que nous subissons.
Sur une page, il y a une étude de cas sur notre travail à Sault Ste. Marie, en Ontario. Nous avons reçu du financement du gouvernement du Canada par l'entremise de FedNor, du gouvernement de l'Ontario et de la Ville de Sault Ste. Marie, pour un total d'un peu plus de 3 millions de dollars. Ces fonds ont été versés sur cinq ans. Avec ces organisations, les sociétés d'État et des entreprises privées de Sault Ste. Marie, nous avons été en mesure de mettre sur pied un centre du travail là‑bas. Jusqu'ici, nous avons généré plus de 11 millions de dollars en salaires et avantages sociaux pour notre équipe autochtone dans cette collectivité et 400 mois d'emploi. Même comme entrepreneur ou pour quiconque, cela ressemble à un assez bon rendement sur investissement pour tous.
Quand j'y pense, on ne dirait pas forcément que Sault Ste. Marie est un carrefour technologique ou d'emplois en technologie, mais avec de bons investissements en temps et en efforts et les bons incitatifs, nous pouvons en faire autant dans presque toutes les collectivités au Canada où l'infrastructure est adaptée et adéquate.
J'espère vous faire des recommandations. Je sais qu'il ne me reste que quelques secondes.
Tout d'abord, il faut prendre des mesures incitatives pour renforcer les capacités ou bâtir un bassin de talents au Canada; c'est très important. Je pense que c'est possible de le faire dans le cadre d'un programme d'approvisionnement renouvelé.
De plus, il faut vraiment développer une expertise en affaires. Nous sommes une entreprise qui a presque 30 ans. Toutefois, afin d'entrer en concurrence pour réaliser un projet d'approvisionnement gouvernemental, nous devons être prendre de l'expansion et renforcer nos capacités. La seule façon pour nous de prendre de l'expansion, c'est d'avoir la possibilité de diriger des projets, au lieu d'être un simple sous‑traitant.
Je vais m'arrêter ici. Merci encore de m'avoir invité.
Je m'appelle Crystal Semaganis et suis cheffe de la Ghost Warrior Society, un collectif communautaire. Si je porte cette chemise, c'est qu'elle représente les Inuits, les Premières Nations et les Métis. C'est exactement qui nous représentons.
J'en suis venu à témoigner au Comité en raison de mon engagement à éradiquer l'usurpation d'identité des Premières Nations, des Métis et des Inuits. Concernant l'approvisionnement autochtone en particulier, nous cherchons à déconstruire des siècles d'ingérence coloniale quant à qui nous sommes comme peuple. Certains mécanismes et certains cadres comportent des défauts — que ce soit la Loi sur les Indiens, les systèmes d'approvisionnement ou les programmes censés combler les lacunes actuelles pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits. Nous voulons sortir du bourbier des exploitations historiques, qui handicapent mon peuple à la base.
On a beaucoup parlé des données. Il y a un déficit de données sur les conséquences de l'usurpation de l'identité des Premières Nations, des Métis et des Inuits pour notre peuple dans notre quotidien. On nous vole des débouchés, nous empêche de consolider nos ressources et nos capacités, ne permet pas un engagement véritable et nous empêche d'occuper notre place véritable dans les économies sociales et autres de la société canadienne. Nous sommes une nation tout à fait capable, intelligente, pleine de ressources, profitable et belle. Nous sommes les premiers peuples. Nous sommes les intendants de nos ressources et de la Terre mère. Nous sommes ici pour vous demander de travailler avec nous quand nous vous disons qu'une entreprise ne nous représente pas.
Je suis ici pour vous parler de CPAIN: les entreprises qui prétendent être des nations autochtones. Nous recueillons des données parmi nos gens sur l'incidence que cela a sur nous. Parmi les 10 principales entreprises autochtones qui ont participé à l'approvisionnement ces dernières années, le montant lié au vol d'identité autochtone s'élève à 2 610 800 000 $. Cet argent aurait suffi à réduire l'insécurité alimentaire dans le Nord. Cela aurait permis d'avoir de l'eau potable pour toutes les Premières Nations, les Métis et les Inuits qui n'en ont pas présentement. On aurait pu résoudre les problèmes de la protection de l'enfance partout au pays.
Quand on voit ce genre de montant, on regarde ce qui se passe, étudie les données et les présente. Les effets sur notre peuple sont réels. On nous a dit que ces mécanismes coloniaux serviraient à nous diriger, sans nous écouter quand nous affirmions que ces gens ne sont pas autochtones. C'est une exploitation de milliards de dollars. On nous vole notre vraie place en société. Nous sommes parfaitement capables d'être vos partenaires égaux pour gérer les ressources naturelles et la Terre mère.
Nous sommes ici pour dire que c'est assez. La Ghost Warrior Society est là pour rester. Nous poursuivrons notre travail et nos relations pour saisir les occasions de sensibiliser les gens à la vraie violence coloniale qu'est l'usurpation de l'identité des Premières Nations, des Métis et des Inuits.
Merci.
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Merci beaucoup.
Kwe.
Good day. Bonjour.
Je m'appelle Dave Sergerie. Je suis anishinabe de la Premièere Nation Timiskaming. Je travaille à l'Assemblée des Premières Nations Québec‑Labrador depuis 23 ans, et je suis présentement coordonnateur de projets stratégiques à la Commission de développement économique de l'APNQL, en soutien à 43 communautés des Premières Nations au Québec. Merci de m'avoir invité ici aujourd'hui.
Dans les prochaines minutes, je vais brièvement vous parler de certains problèmes dans l'approvisionnement autochtone. Si vous voulez parler d'autres sujets, vous trouverez mes coordonnées sur notre site Web.
Les entreprises autochtones sont surtout des petites et moyennes entreprises, donc une grande partie d'entre elles sont surtout actives dans les marchés locaux. Elles ne veulent pas s'ouvrir au monde extérieur et sont incapables de chercher des contrats ou de participer à des appels d'offres. S'il vous plaît, n'oubliez pas mon exposé quand nous tâcherons de réduire les contraintes et de trouver des solutions spécifiques à l'approvisionnement autochtone.
Tout d'abord, examinons rapidement les raisons qui expliquent cette tendance d'avoir de petites entreprises.
La vision du monde qu'ont les Autochtones est bien ancrée dans le présent. Ils ne se projettent pas beaucoup dans l'avenir, et c'est vrai aussi pour les entrepreneurs. Ils veulent subvenir aux besoins de leur famille, créer des emplois de qualité et fournir les services essentiels aux résidents locaux. De plus, les entrepreneurs des Premières Nations font face à des réalités et à des obstacles socioéconomiques qui, souvent, les empêchent de travailler 60 ou 70 heures par semaine loin de leur famille. Toute l'ambition du monde ne peut pas éliminer les conditions pénibles auxquelles sont confrontés bon nombre de résidents et d'entrepreneurs dans les communautés.
En matière de contraintes et de solutions, je vais d'abord parler du niveau de capacité.
Ce ne sont pas toutes les entreprises autochtones qui peuvent réaliser des contrats de valeur élevée. Le manque de ressources humaines et financières complique les choses même pour les entrepreneurs expérimentés et compétents qui cherchent à satisfaire aux lourdes contraintes réglementaires dans certains secteurs d'activité, comme la construction. Qui plus est, parce que les entreprises des Premières Nations sont petites et font l'objet de défis supplémentaires, leurs offres ont tendance à être plus élevées que celles des entreprises non autochtones, les empêchant ainsi de décrocher des contrats.
À ce propos, nous recommandons d'avoir plus de flexibilité dans les critères d'attribution des contrats pour que les entreprises autochtones et les entreprises non autochtones soient davantage sur un pied d'égalité. Toutefois, comme solution plus générale, nous recommandons que les acheteurs au gouvernement augmentent de beaucoup l'utilisation des contrats de faible valeur. Comme vous le savez, le plafond se situe à 25 000 $ pour les biens et à 40 000 $ pour les services. Parce que l'on peut attribuer ces contrats sans passer par un appel d'offres, cette stratégie a beaucoup de potentiel dans le contexte de l'approvisionnement des entreprises autochtones.
En obtenant des contrats de 25 000 $, les entreprises pourront croître, embaucher du personnel et développer leur expertise. Par ailleurs, ce type de contrat de faible valeur leur permet de se familiariser avec le processus d'octroi de contrats au gouvernement. Quand les entreprises autochtones vont commencer à voir des avantages tangibles, leur confiance dans le processus et le gouvernement augmentera naturellement. Ce sera un exemple positif pour leurs pairs.
La mise en oeuvre de cette solution comporte ses propres difficultés. Par exemple, les contrats de faible valeur peuvent paraître moins attrayants pour le gouvernement, car ils exigent beaucoup plus de travail en général que les contrats de grande valeur. Ils ont aussi une incidence plus faible sur l'atteinte de la cible de 5 %. Par conséquent, il se peut qu'ils ne soient pas suffisamment valorisés et promus dans la stratégie d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones.
Concernant l'attrait des contrats, je veux avant tout parler du poids de l'Histoire. Évidemment, bien des initiatives gouvernementales ne se sont jamais matérialisées pour les Autochtones. Une certaine méfiance s'est installée à l'égard des gouvernements en général.
Les entrepreneurs connaissent aussi très peu le processus d'approvisionnement. C'est un processus complexe, selon beaucoup d'entre eux, qui fait en sorte qu'il est difficile de se qualifier. Les entrepreneurs autochtones ont besoin de soutien pour pouvoir naviguer plus facilement dans le processus d'approvisionnement. Restaurer leur confiance dans le processus et leur montrer des exemples concrets de contrats accordés à des entreprises autochtones pourraient en convaincre certaines que le temps investi en vaut la chandelle.
Je veux passer à nos deux autres témoins qui ont, je crois, parlé de la même façon des autres obstacles auxquels les entreprises autochtones se heurtent.
Je réfléchis à ces obstacles. Le gouvernement dit qu'il veut un approvisionnement auprès des entreprises autochtones. Cependant, s'il fait en sorte que les occasions d'approvisionnement pour les nouvelles entreprises, les petites entreprises, les entreprises des régions rurales et les entreprises dirigées par des gens qui n'ont pas de relations politiques sont difficiles à saisir, nous allons avoir dans les faits peu d'entreprises qui en profitent, même si le gouvernement essaie de manipuler les chiffres de différentes façons.
Êtes-vous d'accord, en général? Quelles mesures pouvons-nous prendre afin que l'approvisionnement soit plus accessible pour les nouvelles entreprises, les petites entreprises, les entreprises à l'extérieur de la capitale nationale et les entreprises dirigées par des personnes sans relations politiques, dans le but de vraiment démocratiser le processus ici?
M. Carignan peut répondre en premier. Nous passerons ensuite au témoin en ligne.
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Merci, monsieur Genuis.
Eh bien, le défi dans notre secteur tient en partie, comme je l'ai mentionné, au fait qu'il n'y a tout simplement pas beaucoup de professionnels autochtones au pays dans le domaine des technologies de l'information. Un certain nombre d'entreprises figurent sur la liste des entreprises de services professionnels en technologies de l'information, mais je ne connais pas le nombre d'employés qui sont des techniciens et qui exercent ces emplois.
Quelle est la meilleure façon de procéder? Il s'agit, évidemment, d'attirer plus d'entreprises dans ce domaine. La question est de savoir comment faire en sorte qu'un plus grand nombre d'entreprises soient dotées de gens qui ont les compétences nécessaires en la matière.
L'une des difficultés, c'est qu'il faut du temps pour acquérir ces compétences. En tant qu'entreprise, nous avons examiné la situation et nous avons songé à embaucher tous les diplômés autochtones en informatique que nous pouvions trouver, mais nous nous sommes rendu compte qu'il n'y en avait tout simplement pas assez. Nous avons alors décidé de créer notre propre cohorte. Nous avons élaboré un programme de formation, et nous avons passé les neuf dernières années à investir dans les gens pour essayer de bâtir cette main-d'œuvre et de la faire croître.
Pour ce qui est de la façon dont ce processus peut favoriser une telle approche, les règles peuvent être structurées de manière à ce que des incitatifs soient intégrés pour encourager les entreprises — qu'elles soient autochtones ou non autochtones — à investir dans les gens. C'est une question de renforcement des capacités. Je ne parle pas seulement de formation, mais aussi d'emplois et de carrières.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
Je suis vraiment impressionné, en fait, parce qu'il y a beaucoup de travail à faire en collaboration pour réussir dans n'importe quel partenariat ou projet commercial, surtout avec le gouvernement.
Le gouvernement a choisi d'accroître la prospérité partout au Canada, de soutenir les collectivités rurales et éloignées, de faire respecter la vérité et la réconciliation et d'assurer l'indépendance des peuples autochtones à l'avenir. Beaucoup a été accompli à cet égard.
Je sais que l'opposition fait tout un plat d'une situation qui se serait produite en raison des difficultés initiales liées à ces processus, mais tout cela est essentiel pour que nous puissions aller de l'avant afin d'améliorer le succès dans nos collectivités partout au Canada. Par le passé, même lorsque la liste était établie, il y avait très peu d'approvisionnement — peut-être seulement 1 % — auprès des entreprises autochtones. Beaucoup de progrès ont donc été réalisés depuis, et il faut en faire davantage.
Monsieur Carignan, vous avez parlé du renforcement des capacités et du sens des affaires. C'est de cela qu'il s'agit. Il faut fournir suffisamment de ressources pour permettre l'acquisition de ces compétences, offrir une telle formation et favoriser l'avancement.
Je me suis entretenu avec les gens de l'Administration financière des Premières Nations. Ils font un travail extraordinaire de façon indépendante. Ils trouvent des capitaux. Ils sont sur le marché. Ils font des choses extraordinaires pour fournir les ressources nécessaires aux communautés et aux entreprises autochtones afin qu'elles réussissent et s'associent à certains de ces grands projets, en particulier des projets visant à assurer la souveraineté, non seulement pour les peuples autochtones, mais aussi pour le Canada, surtout dans le Grand Nord, et les ressources minérales qui se trouvent sur vos terres. Il faut prendre des précautions pour protéger toute cette indépendance.
Je pense à ce dont nous discutons aujourd'hui. Je ne veux pas parler de l'identité autochtone. C'est aux nations de déterminer qui en fait partie et qui n'en fait pas partie. Des listes ont été établies, et elles sont utilisées séparément.
Voici ce que je veux comprendre: comment pouvons-nous procéder de manière à vous permettre de mieux réussir? On mentionne, quelque part dans la documentation, le Conseil canadien pour les entreprises autochtones. Vous y êtes inscrit. Dites-moi quelle est la différence dans ce processus de certification, puis expliquez au Comité comment vous vous y prenez dans le secteur privé, en dehors des marchés publics. C'est aussi une occasion pour les peuples autochtones d'aller de l'avant partout au Canada et en Amérique du Nord — et même ailleurs dans le monde.
Pouvez-vous répondre à ces deux questions, s'il vous plaît?
En ce qui a trait aux mesures que nous avons prises, l'appel à l'action 92 nous a vraiment aidés. Nous avons constaté que beaucoup d'entreprises au Canada voulaient contribuer aux efforts.
Je me souviens d'avoir parlé à une ancienne dirigeante principale de l'information de l'une des grandes sociétés pétrolières de Calgary. Elle a laissé entendre que tous ses collègues avaient quelque chose à faire, parce que cette entreprise aimait rendre service aux communautés. Ils pouvaient ainsi recourir à la sous-traitance, notamment pour le transport par camion et différents services de sécurité, mais elle, en tant que dirigeante principale de l'information, n'était pas en mesure de le faire dans le domaine des technologies de l'information. Lorsque nous nous sommes présentés et que nous avons parlé de notre modèle de formation, avec notre objectif d'attirer des gens dans la profession, de les former et de leur permettre de se développer, elle a dit que c'était la première occasion qu'elle avait de faire quelque chose qu'elle voulait faire, c'est‑à‑dire aider l'entreprise à remplir ses propres engagements envers les communautés autochtones.
Nous avons constaté que c'était le cas dans tout le Canada auprès d'autres sociétés privées.
Je suis désolée, monsieur Sergerie, que vous rencontriez ces problèmes.
Monsieur Carignan, nous en avons déjà parlé, mais j'aimerais revenir sur le sujet.
Comment peut-on s'assurer qu'une entreprise autochtone qui est associée, dans le cadre d'un contrat, à une entreprise non autochtone soit utilisée à la hauteur de ses capacités et qu'elle reçoive vraiment les revenus qui lui sont dus? Autrement dit, qu'elle ne soit pas utilisée comme paravent?
Le gouvernement nous dit qu'il s'en assure, mais cela se fait ultérieurement. Comment pourrions-nous améliorer cet aspect?
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La question est un peu compliquée, considérant mon niveau de français. Je vais donc continuer en anglais.
[Traduction]
Le problème, lorsque nous remportons un contrat de la part du gouvernement ou d'un autre partenaire, est que nous sommes assez spécialisés. Si nous gagnons, nous le ferons dans le cadre d'un appel d'offres avec un autre partenaire. Ce partenaire sera l'entrepreneur principal du contrat, le contrat sera donc à son nom, et nous serons le sous-traitant.
Une partie du défi réside dans le fait que, bien souvent, nous n'avons aucune visibilité sur les termes réels du contrat. Dans le cadre d'un projet de grande envergure, il arrive que le champ d'application soit modifié. Parfois, il y a un changement dans les caractéristiques ou dans la législation, et il peut y avoir des fonds supplémentaires qui sont versés et des opportunités potentielles pour nous, en tant qu'entreprise, de mettre des gens sur des projets. Nous pouvons ou non en être informés, en fonction de notre relation avec le client.
Ce qui serait bien pour nous, en tant que petite entreprise, c'est que, dans le cadre d'un appel d'offres ou d'une initiative spécifique d'une autre manière, nous soyons autorisés à être le maître d'œuvre, de sorte que nous puissions réellement voir l'ensemble de la portée du projet. Nous pourrions ensuite sous-traiter avec notre partenaire. Il serait peut-être plus grand que nous, mais nous pourrions évaluer si nous sommes capables de remplir le rôle nous-mêmes et de nous développer en tant qu'entreprise ou si nous devons compter sur eux et sur leur expertise.
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Je veux être certaine d'avoir bien compris.
Prenons l'exemple d'un contrat qui est réservé aux Premières Nations. Il y a une association entre une entreprise non autochtone et une entreprise autochtone. Pour différentes raisons, c'est l'entreprise non autochtone qui est le contractant. Cependant, l'entreprise autochtone, qui devrait être le contractant, puisque le contrat est réservé aux entreprises autochtones, se révèle être un sous-contractant. La plupart du temps, cette dernière ne sait pas ce qui se passe quant aux dispositions du contrat. S'il y a un changement et qu'il faut embaucher plus de personnes, l'entreprise autochtone n'est même pas au courant. Parfois, il n'y a même pas plus de personnes qui travaillent.
En quoi est-ce efficace pour les communautés qu'elles ne soient pas mises au premier plan?
Je ne comprends pas comment cela peut répondre aux objectifs de la politique.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous nos témoins d'être avec nous, aujourd'hui, pour discuter de cette question fort importante pour nous, au NPD. Nous estimons qu'il est important d'être sérieux et responsables dans le cadre d'une approche de réconciliation, d'une relation de nation à nation. C'est vraiment une priorité pour nous.
En tant qu'allochtone, j'ai la chance de faire partie d'un caucus où il y a des représentants des Premières Nations. Il y a Mme Leah Gazan, de Winnipeg, ainsi que M. Blake Desjarlais, un Métis d'Edmonton, sans oublier Mme Lori Idlout, qui est une Inuite et qui représente le Nunavut. Il s'agit donc d'un sujet qui fait partie de nos discussions et de nos propositions.
Je veux aussi souligner le travail que mon ancien collègue M. Roméo Saganash a accompli pour faire accepter le fait que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones fasse partie de la législation fédérale. Il y a encore beaucoup de travail à faire, mais nous nous sommes engagés sur cette voie.
Madame Semaganis, j'ai beaucoup aimé votre témoignage. Vous êtes devenue assez passionnée, assez émotive même, quand vous avez parlé de la question de l'eau potable et de l'accès à l'eau.
Pourriez-vous nous expliquer où on en est exactement à ce sujet? Qu'est-ce qui se fait et qu'est-ce qui n'est pas fait?
Quelle est la réalité sur le terrain des communautés qui n'ont, malheureusement, pas accès à quelque chose d'aussi élémentaire que l'eau?
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En tant que militante, les enjeux liés à l'eau potable sont fondamentaux à mes yeux. J'ai commencé à m'intéresser à cette question lorsque j'ai travaillé avec la nation Wet’suwet’en, et que j'ai suivi leur situation en 2019. J'étais également présente sur la Colline du Parlement lorsque le convoi des gilets jaunes a fait son entrée le 19 février 2019.
J'ai fait des calculs en Alberta sur les processus de fracturation et la quantité d'eau nécessaire, puis j'ai comparé ces données avec celles des communautés autochtones qui n'ont pas accès à l'eau potable. Les chiffres sont tout simplement astronomiques.
Le gouvernement fédéral estime que 200 000 tonnes seront suffisantes, mais pour être réaliste, on parle de plus de 300 000 tonnes au sein de différentes communautés telles que Grassy Narrows, où l'on trouve du mercure et des contaminants dans l'eau. Les défis auxquels nos communautés sont confrontées ne concernent que ces besoins humains fondamentaux... S'il s'agissait de villes comme North Bay ou Toronto, un état d'urgence nationale serait automatiquement déclaré, mais comme nous sommes relégués sur les terres les plus indésirables du Canada, qualifiées de réserves, nous ne représentons visiblement pas une priorité aux yeux du gouvernement.
Lorsque nous avons ce type d'exploitation, nous détournons des ressources indispensables au renforcement des capacités... Nous ne vivons pas sur des terres en fief simple. Nous nous heurtons à des obstacles économiques supplémentaires lorsque nous essayons d'obtenir des prêts hypothécaires et de renforcer nos capacités.
La nation métisse de l'Ontario dispose d'un financement important pour l'enseignement postsecondaire. Je n'ai pas de diplôme universitaire parce que je n'ai jamais eu accès au financement de l'enseignement postsecondaire au sein de la Pemière Nation à laquelle j'appartiens. Il s'agit en fait d'un problème courant dans nos communautés. Nous devons financer et promouvoir ce vivier de talents, et augmenter le financement de l'enseignement postsecondaire pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits.
Vous devez allouer des fonds pour étudier l'impact de la fraude à l'identité des Premières Nations, des Métis et des Inuits sur notre peuple, car une fois que vous aurez pris conscience de ces chiffres, le public sera beaucoup plus favorable à la dissuasion, aux changements juridiques et aux lois et à la mise en place de mesures législatives visant à endiguer la fraude. Il s'agit d'une mauvaise affectation des ressources qui entraîne des conséquences graves et traumatisantes, et nous devons absolument y mettre fin.
Je vous remercie d'avoir pris le temps, au sein de cette commission, de parler de ce que cela signifie pour quelqu'un qui n'a pas accès à ces régimes coloniaux et à ce privilège des colons que la vérité et la réconciliation visent à combler. Nous ne pouvons pas nous permettre d'être capricieux et sélectifs par rapport à tous ces appels à l'action. Non. Il faut les évaluer dans leur ensemble, et s'engager à les respecter tous. Nous devons fixer un échéancier clair, mettre en place un cadre, bâtir de nouveaux partenariats, et mettre fin une fois pour toutes à la fraude à l'identité des Premières Nations, des Métis et des Inuits. Il s'agit d'un enjeu urgent.
Je vous remercie.