Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Je vous souhaite la bienvenue à la troisième réunion du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires. Nous entendrons aujourd'hui le directeur parlementaire du budget.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 25 novembre 2021. Les membres peuvent y participer en personne ou au moyen de l'application Zoom.
En ce qui concerne la liste des intervenants, le greffier et moi‑même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre de parole unifié pour l'ensemble des députés, qu'ils participent à la réunion virtuellement ou en personne.
Je profite de l'occasion pour rappeler à tous les participants et observateurs qu'il n'est pas permis de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de leur écran.
Compte tenu de la pandémie, et à la lumière des recommandations des autorités sanitaires ainsi que de la directive fournie par le Bureau de régie interne le 19 octobre 2021, il est recommandé à tous ceux qui assistent à la réunion en personne de prendre les mesures suivantes afin d'assurer la santé et la sécurité de chacun.
Toute personne présentant des symptômes doit participer par Zoom et ne pas assister à la réunion en personne. Chacun doit maintenir une distance de deux mètres, que la personne soit assise ou debout. Chacun doit porter un masque non médical lorsqu'il circule dans la pièce. Il est vivement recommandé aux membres de porter leur masque en tout temps, même lorsqu'ils sont assis. Vous trouverez dans la pièce des masques non médicaux, qui permettent un meilleur son que les masques en tissu. Toute personne présente doit maintenir une bonne hygiène des mains en utilisant le désinfectant pour les mains à l'entrée de la salle.
Les salles de comité sont nettoyées avant et après chaque réunion. Pour assurer ce nettoyage, chacun est invité à nettoyer les surfaces telles que le bureau, la chaise et le microphone avec les lingettes désinfectantes fournies lorsqu'il arrive à son siège ou quitte son siège.
En tant que président, je veillerai à l'application de ces mesures pendant toute la durée de la réunion et je remercie d'avance les membres de leur coopération.
Avant de commencer, je souhaite informer les membres du Comité que les rapports sur les résultats ministériels pour la période se terminant le 21 mars 2021 ont été déposés à la Chambre un peu plus tôt cette semaine. Le OGGO a pour usage d'étudier ces rapports parallèlement à l'étude du Budget supplémentaire des dépenses (C).
Les membres du Comité souhaitent-ils étudier les rapports sur les résultats ministériels et le Budget supplémentaire des dépenses (C) 2021‑2022 et inviter les ministres à comparaître? Êtes-vous d'accord pour cela?
Je vous vois faire des signes d'approbation de la tête. À l'écran, je vois des pouces et des hochements de tête.
Merci, je déclare la motion adoptée.
Les députés remarqueront que le directeur parlementaire du budget est présent en personne dans la salle de comité. Il est cependant accompagné de deux de ses collègues, qui comparaissent virtuellement. M. Penney et M. Elmarzougui sont parmi nous.
J'invite maintenant M. Giroux à nous présenter sa déclaration préliminaire.
Monsieur le président, chers membres du Comité, je vous remercie de votre invitation à comparaître devant vous aujourd’hui.
Comme vous le savez peut-être, en vertu de la Loi sur le Parlement du Canada, j'ai pour mandat d'appuyer le Parlement en fournissant des analyses portant sur les politiques macroéconomiques et budgétaires dans le but d'améliorer la qualité des débats parlementaires et de promouvoir une plus grande transparence et une plus grande responsabilité en matière budgétaire.
Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour présenter les conclusions du rapport intitulé « Le projet de brise-glace polaire : analyse financière », un rapport lancé par mon bureau dans le contexte de notre effort continu pour fournir un aperçu indépendant de la Stratégie nationale de construction navale du gouvernement.
Je suis accompagné aujourd'hui, comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, des deux analystes qui ont rédigé ce rapport: Christopher Penney et Eskandar Elmarzougui.
Le projet de brise-glace polaire prévoit l'acquisition de deux nouveaux navires; l'un sera construit au chantier naval de Vancouver et l'autre, par Chantier Davie Canada, après l'approbation de l'inclusion de ce dernier à titre de partenaire dans le cadre de la Stratégie nationale de construction navale.
(1305)
[Traduction]
Le gouvernement n'a pas encore publié une mise à jour de l'estimation du coût du projet; la dernière estimation rendue publique remonte à 2013. Le coût d'approvisionnement d'un seul navire avait alors été estimé à 1,3 milliard de dollars.
Selon notre analyse indépendante, le coût total de l'acquisition des deux brise-glaces polaires est estimé à environ 7,25 milliards de dollars, soit: des coûts de gestion de projet de 346 millions de dollars; des coûts de conception de 820 millions de dollars; des coûts d'acquisition de 6,1 milliards de dollars.
En ce qui concerne le calendrier de construction, nous sommes d'avis que la construction du premier navire devrait commencer au cours de l'exercice 2023‑2024 et que le second sera mis en chantier au cours de l'exercice suivant. La livraison de ces navires est attendue pour 2029‑2030 et 2030‑2031, respectivement.
Nous estimons que si le début de la construction de ces deux navires est retardé d'un an, le coût total du projet augmentera de 235 millions de dollars, et s'il l'est de deux ans, il augmentera de 472 millions de dollars.
Mes collègues et moi serons heureux de répondre à toute question que vous pourriez avoir concernant ce rapport ou d'autres travaux du DPB.
Monsieur Giroux, bienvenue parmi nous. C'est toujours un plaisir de vous recevoir. Vous êtes assis si loin de la caméra que vous semblez être aux 99, rue Bank.
J'ai assisté à votre séance d'information sur les brise-glaces, de sorte que j'étais déjà au fait de ce que vous avez dit dans votre exposé.
J'aimerais parler un peu avec vous de votre rapport sur la mise à jour économique et budgétaire. Vous y parlez de la publication très tardive des comptes publics, du rapport financier et d'un déficit supérieur à tout déficit enregistré depuis la Confédération, tout cela mis ensemble.
En fin de compte, nous avons passé deux ans sans budget, et la dernière publication des comptes publics remonte à l'époque où le grunge était toujours populaire, en 1993.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de la transparence de ce gouvernement et de la confiance qu'il inspire, tant aux parlementaires qu'au public canadien, étant donné que ce rapport crucial a été publié si tard.
J'ai commenté à quelques reprises la publication tardive des comptes publics. J'ai indiqué que c'était très inhabituel. Cela n'a pas aidé les parlementaires à demander des comptes au gouvernement convenablement, à un moment où on leur demandait collectivement d'approuver des dépenses supplémentaires pour lutter contre la pandémie ou mettre en œuvre les priorités du gouvernement de manière accélérée.
Le gouvernement n'avait pas non plus publié les comptes publics faisant état des dépenses déficitaires et des recettes fiscales de l'exercice qui s'est terminé en mars 2021. Nous avons dû attendre près de neuf mois pour obtenir ces résultats. Nous savons que les comptes publics étaient prêts avant. Ils ont été signés par la vérificatrice générale le 9 septembre.
Il n'aurait pas été approprié, à mon avis, de publier les comptes publics pendant la campagne électorale, mais comme ils étaient prêts en septembre, leur publication a été repoussée jusqu'à la mi‑décembre, ce qui a nui à la capacité des parlementaires à examiner les dépenses du gouvernement.
Ils ont été signés par la vérificatrice générale et les deux autres signataires requis le 9 septembre. Je crois comprendre que les livres ont ensuite été rouverts, pour la toute première fois après avoir fait l'objet d'un audit, pour l'ajout de dépenses supplémentaires. J'ai demandé aux responsables des finances si les livres avaient déjà été rouverts dans l'histoire, et ils m'ont répondu qu'ils n'étaient pas au courant.
Savez-vous si, depuis la Confédération, un gouvernement a déjà rouvert les livres — les comptes publics vérifiés et signés — pour les modifier après coup?
Pas à ma connaissance. Je ne pourrais pas vous garantir que ce n'est jamais arrivé. J'ai peut-être l'air vieux, mais je ne suis pas vieux au point de me souvenir de tout ce qui a pu arriver depuis la Confédération. Selon mes souvenirs, c'était la première fois.
Vous étiez là au moment de la deuxième publication des comptes publics, n'est‑ce pas?
C'est la même chose avec les résultats ministériels. Ces rapports sont censés exposer en détail les résultats que le gouvernement a obtenus par rapport à ses objectifs pour toutes ses dépenses. Pourtant, j'ai en main des documents internes qui m'ont été divulgués, qui montrent qu'ils étaient prêts il y a trois ou quatre mois et que le gouvernement a simplement traîné avant de les publier.
Voyez-vous un avantage ou une raison pour laquelle le gouvernement cacherait cette information aux Canadiens ou aux parlementaires ?
Je vois surtout des inconvénients à retarder la publication des rapports sur les résultats ministériels. Ils étaient vraisemblablement prêts il y a plusieurs mois. Pour avoir travaillé au sein de la fonction publique pendant des décennies, je sais que les fonctionnaires s'efforcent de déposer ces documents à l'automne, alors il n'y a pas de raison évidente pour laquelle, à mon avis, ils auraient eu besoin de plus de temps cette fois‑ci.
Ils étaient probablement prêts à l'automne, et je ne vois pas quel avantage important il y avait à en retarder la publication. Je ne vois pas pourquoi ils devaient être déposés si tard cette fois‑ci, près de 10 mois après la fin de l'exercice auquel ils se rapportent, c'est inhabituellement tardif.
Je discutais avec l'une de mes collègues du Sénat qui a été vérificatrice générale provinciale, et elle laissait entendre que nous devrions adopter une loi exigeant que le gouvernement dépose ces rapports avant une certaine date. Je crois que vous en avez parlé dans votre rapport. Est‑ce une chose que vous recommanderiez ou appuieriez par souci de transparence et d'ouverture?
C'est assurément une mesure que j'appuierais concernant les comptes publics. À l'heure actuelle, la loi prévoit un échéancier, et ces comptes doivent être déposés au plus tard le 31 décembre. Je propose de devancer cette date au 30 septembre. La fonction publique a clairement montré qu'elle pouvait respecter cette échéance, même pendant la pandémie. Je pense qu'il ne serait pas du tout déraisonnable de demander la même chose pour les rapports sur les résultats ministériels. La fonction publique a démontré qu'elle pouvait les présenter à l'automne, vous pourriez donc certainement envisager, en tant que législateurs, d'imposer une échéance dans la loi pour ces rapports, afin d'exiger qu'ils soient déposés plus tôt que ce que nous observons cette année.
Cela augmenterait la transparence, il n'y aurait aucun inconvénient à cela, il n'y aurait pas d'effets négatifs à ce que le gouvernement publie ces informations dans un délai prescrit par la loi pour les parlementaires.
Personnellement, je n'y verrais aucun inconvénient, la fonction publique pourrait assurément les produire plus tôt. Il semble bien qu'elle ait réussi à le faire en cette année très difficile, comme elle le fait depuis des années, alors je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas faisable.
Je tiens d'abord à dire, après une absence de deux ans à ce comité, à quel point je suis ravi d'être de retour ici en personne et de vous voir tous. Je tiens à préciser que vous êtes tous encore plus beaux en personne qu'à l'écran. Je voulais simplement que ce soit consigné au compte rendu.
Merci, monsieur Giroux, pour votre rapport et pour votre témoignage d'aujourd'hui.
À combien estimez-vous les imprévus dans votre estimation des coûts, quelle est la part des imprévus dans votre estimation des coûts?
Notre estimation est la meilleure estimation possible et ne comprend pas de dépenses imprévues. Nous présentons toutefois une gamme de scénarios probables. Notre estimation de 7,25 milliards de dollars est celle du scénario le plus probable, selon les comparaisons que nous avons pu faire, compte tenu du poids, à la lumière de projets comparables sur lesquels nous pouvions avoir des données fiables, même s'ils ne visaient pas des navires parfaitement comparables.
Je vois qu'à la page 9, vous mentionnez l'incertitude inhérente à ce genre de projet. Diriez-vous que cette analyse a été exceptionnellement difficile à réaliser pour votre bureau?
Ce n'est certainement pas l'une des estimations les plus faciles que nous ayons eu à faire, mais ce n'est pas non plus l'estimation la plus difficile que nous ayons faite. Nous savons qu'il y a des navires qui n'ont pas la même fonction ni la même taille que ceux‑ci, mais nous avons des comparables dans d'autres pays, où il y a des navires similaires mais de taille différente ou des navires de taille à peu près similaire, mais construits dans un but différent, et en amalgamant ces deux facteurs, en tenant compte de l'expérience canadienne récente en matière d'acquisition de grands navires, nous avons assez confiance en notre estimation des coûts.
Il y a deux navires qui seront construits dans deux chantiers navals différents.
À votre avis, quels sont les avantages et les inconvénients en termes de coûts, par exemple, à inclure deux chantiers navals dans le projet? Quels en seraient les avantages pour l'économie également?
Sur le plan des coûts, il n'y a aucun avantage à ce que deux chantiers navals différents construisent ces navires. Si c'était le même chantier qui construisait les deux navires, il y aurait des économies d'échelle, ou une courbe d'apprentissage que le chantier acquerrait et qui rendrait la construction du deuxième navire moins coûteuse que si le contrat est accordé à deux chantiers différents.
En ce qui concerne les avantages économiques, en revanche, le fait que deux chantiers navals différents construisent ces navires répartit plus uniformément les avantages économiques entre deux régions différentes. Il y a donc un avantage inhérent à cela.
Cependant, d'un point de vue strictement financier, il n'y a pas de grands avantages à cela.
Je sais que vous vous concentrez sur l'analyse des coûts.
Est‑il juste de dire que cela contribue également à renforcer les capacités dans l'ensemble du pays? Est‑ce là l'avantage à construire deux navires dans deux chantiers navals distincts ?
L'établissement et le maintien de la capacité nationale sont l'un des grands avantages à construire ces navires au Canada. Cependant, mon rapport visait à estimer les coûts de la construction de ces navires et non à évaluer les avantages intangibles au maintien d'une capacité nationale de construction de ce type de navires. Il en va de même pour les gros achats de la Marine royale canadienne.
Le fait de pouvoir construire ces navires au pays plutôt qu'à l'étranger comporte des avantages inhérents sur le plan de la sécurité nationale, mais ils sont très difficiles à quantifier en dollars.
Y a‑t‑il des différences de coûts entre les deux chantiers navals, par exemple, en raison de la disponibilité de la main-d'œuvre dans les deux régions, des différents niveaux d'expertise et peut-être des matériaux?
Je sais que nous avons comparé notre productivité et d'autres coûts avec ceux des États-Unis, mais y a‑t‑il des différences tangibles inhérentes entre les deux chantiers navals? En avez-vous tenu compte dans votre analyse?
Aux fins de notre analyse, nous avons utilisé un modèle générique de chantier naval canadien, en supposant que s'il y avait des différences entre les deux chantiers, elles n'auraient pas d'incidence importante sur l'estimation totale des coûts. Il se peut qu'il y ait des différences de coûts entre les deux, mais compte tenu de l'expérience que nous avons en tant que nation, ainsi que des estimations de coûts et des données historiques que nous avons pu recueillir sur d'autres types d'achats, nous ne croyons pas que ces différences de coûts auront une grande incidence sur le coût global du projet.
J'ai une dernière question pour vous. Vous avez établi le coût de la main-d'œuvre à 51,62 $ l'heure dans votre calcul, si j'ai bien lu.
Pouvez-vous nous expliquer d'où vient ce chiffre? Avez-vous tenu compte de l'augmentation du coût de la main-d'œuvre attribuable aux pénuries de main-d'œuvre connues ou imprévues?
Le taux horaire de 51,62 $ provient de l'agrégat de données de Statistique Canada sur les autres types de matériel de transport, dans le Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (NAICS). C'était le meilleur chiffre que nous avions parmi les données américaines. C'est celui que nous avons utilisé pour faire ces calculs.
Je vous remercie infiniment, messieurs Giroux, Penney et Elmarzougui, d'être parmi nous aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Je vais revenir sur une question que M. Kusmierczyk vous a posée, parce que je la trouve extrêmement intéressante. Actuellement, au Québec, un chantier sert principalement au radoub. Or il pourrait grandement aider le Canada, étant donné qu'il représente 50 % de la force de construction navale au Canada. Je parle naturellement de la Davie.
Vous disiez tout à l'heure que le fait de faire construire les deux navires par le même chantier comporterait un avantage financier. Cela tombe bien, car la Davie a de la place, et son calendrier lui permettrait de les construire quasi simultanément.
Selon vous, si les deux navires étaient construits par le même chantier, quelles seraient les répercussions sur le coût du projet?
Je vous remercie de votre question, madame Vignola.
En effet, j'ai posé cette question assez tôt, au début du projet, lorsque nous avons commencé l'estimation. Nous avons estimé que les coûts diminueraient de 600 millions à 800 millions de dollars si le même chantier naval construisait les deux navires. Ces économies seraient attribuables à des coûts moindres de gestion du projet, évidemment, mais aussi à l'efficacité accrue qui est inhérente à la construction d'un deuxième navire. On apprend des erreurs commises lors de la construction du premier navire.
[Difficultés techniques] c'est sûr que la répartition de la construction des deux navires entre deux chantiers apporterait des retombées économiques plus intéressantes, puisque cela profiterait à deux régions.
Cela dit, sachant que l'une de ces deux régions bénéficie déjà de contrats de plusieurs dizaines de milliards de dollars, sur le plan de l'équité économique, est-ce que la construction d'un navire là-bas aurait un effet aussi important, ou est-ce que le fait que les fournisseurs des deux chantiers se trouvent un peu partout au Canada diminue les avantages économiques associés à la répartition du contrat par rapport à l'avantage de la réduction des coûts?
Nous n'avons pas considéré cet élément précis. C'est certain que la construction au pays présente des avantages sur le plan des retombées économiques canadiennes, mais nous n'avons pas considéré les retombées économiques régionales, étant donné que nous avons mis l'accent sur les coûts de construction plutôt que sur les retombées économiques ou sur les autres avantages comme, le maintien et le développement d'une capacité de construction navale intérieure.
Outre l'inflation, qu'est-ce qui explique qu'entre 2008 et 2013, l'estimation des coûts ait presque doublé, et qu'entre 2013 et 2021, l'estimation des coûts par navire ait pratiquement triplé?
On est passé de 720 millions de dollars à 1,3 milliard de dollars par navire, puis à 3,625 milliards de dollars par navire.
C'est une différence que nous expliquons d'abord par le fait qu'on est passé d'un à deux navires, ce qui a évidemment une incidence sur le coût. Cependant, nous ne savons pas comment le gouvernement en est arrivé à une estimation de 1,3 milliard de dollars.
C'est donc difficile pour moi d'expliquer la différence entre notre estimation des coûts et celle du gouvernement. La ministre des Pêches et des Océans va peut-être déposer bientôt une nouvelle estimation de coûts à jour, qui va peut-être nous éclairer à cet égard.
Selon les estimations et les données que nous avons été capables d'utiliser, nous sommes certains de notre estimation de coûts. Cependant, je ne peux malheureusement pas commenter l'à-propos de l'estimation gouvernementale de 2013, parce que je ne sais pas comment le gouvernement est arrivé à ce chiffre.
Oui. Au début du projet de recherche, nous avons demandé des données à Pêches et Océans Canada. Le ministère nous a donné un aperçu de ses méthodes et tout et tout, mais ce serait pour ses estimations internes actuelles et non pour l'estimation préalable de 1,3 milliard de dollars.
Nous avons certes procédé d'une manière différente. Nous avons employé une approche analogique en nous fondant sur d'anciens navires que nous avons jugés suffisamment comparables, si je puis dire. C'est un modèle qui consiste essentiellement à établir des projections à partir de données antérieures après les avoir rajustées et avoir pris en considération différents éléments comme l'inflation. Pour sa part, le ministère… Disons que je ne peux pas vraiment vous en parler, mais il s'agirait davantage d'une approche ascendante.
Je tiens à vous remercier, monsieur Giroux et monsieur Penney, de votre participation à notre séance d'aujourd'hui et de l'important travail que vous accomplissez.
Je vais poursuivre dans le sens des questions de Mme Vignola. Pourriez-vous nous dire quels sont les renseignements que le ministère des Pêches et des Océans a refusé de communiquer? Si tel est effectivement le cas, en quoi la production de votre rapport a‑t‑elle été affectée?
Je ne dirais pas que le ministère des Pêches et des Océans a refusé de communiquer des renseignements. Il a par contre été difficile pour nous de savoir exactement comment le ministère en était arrivé à un montant de 1,3 milliard de dollars lors de son estimation initiale de 2013. Ce n'était toutefois pas si important à nos yeux, car nous cherchions d'abord et avant tout à obtenir la meilleure estimation possible des coûts, compte tenu des paramètres que nous connaissions, pour la construction de deux brise-glaces polaires.
Je ne sais pas si mes deux collègues auraient souhaité obtenir d'autres informations du ministère, mais je crois qu'on nous a essentiellement fourni les données dont nous avions besoin pour l'estimation que nous voulions effectuer.
Pour la comparaison avec le navire de ravitaillement de la classe Lewis and Clark aux États-Unis, vous avez dû procéder à des rajustements additionnels pour tenir compte des différences quant à la productivité, au coût de la main-d'œuvre et au taux de change. Pouvez-vous nous en dire plus long sur les différences entre les deux pays pour ce qui est de la productivité et des coûts de main-d'œuvre?
Certainement. Une comparaison entre les chantiers maritimes canadiens et américains permet de constater que la productivité est plus faible au Canada. Cela s'explique du fait que nous construisons beaucoup moins de navires qu'aux États-Unis, un pays dont les chantiers navals sont actifs en continu.
La productivité plus faible se traduit également par des salaires horaires moyens moins élevés. Les coûts de main-d'œuvre sont donc inférieurs au Canada, mais lorsqu'on tient compte des écarts dans la productivité, des disparités salariales et du taux de change, on en arrive à un coût nettement plus élevé pour la construction de ces navires dans notre pays.
[Difficultés techniques] parler de l'effet multiplicateur et des répercussions économiques de portée plus générale. Nous pouvons consulter ces estimations des coûts, mais y a‑t‑il un effet multiplicateur qui se répercute dans l'ensemble de l'économie? Est‑ce que cet élément a été analysé?
Notre rapport ne visait pas l'analyse des retombées économiques et de l'effet multiplicateur. Nous nous sommes intéressés aux coûts à engager pour construire ces navires, ce qu'on appelle les coûts d'approvisionnement. Nous pourrions évaluer les retombées économiques, si c'est ce que souhaite le Comité, mais il nous faudrait davantage de données, par exemple quant aux composantes qui sont importées par rapport à celles qui sont disponibles au Canada.
Cela exigerait donc un travail plus approfondi. C'est la raison pour laquelle notre rapport porte uniquement sur les coûts de ce projet, plutôt que sur les coûts et les retombées économiques.
Ces chantiers maritimes se situent dans des marchés où le coût du logement grimpe en flèche, ce qui a d'énormes répercussions sur l'inflation. Est‑ce que ce phénomène a été pris en considération dans l'établissement des coûts du projet?
Oui. Nous avons tenu compte de la hausse de l'inflation et l'avons intégrée à notre estimation des coûts. Il y a une inflation qui est propre au secteur de la construction navale. Elle dépend également dans une large mesure de l'inflation qui sévit dans l'ensemble de l'économie. Nous avons revu nos prévisions concernant l'inflation pour prendre en considération les plus récents chiffres — au moment où nous avons produit le rapport, il y a plusieurs semaines déjà — indiquant une inflation plus forte que la cible de 2 % généralement établie par la Banque du Canada.
Pouvez-vous nous dire un mot de la façon dont nous pourrions augmenter la productivité dans les chantiers maritimes canadiens tout en appuyant nos travailleurs?
Si je connaissais la réponse à cette question, je serais probablement beaucoup plus riche, et je ne serais sans doute pas ici pour vous répondre.
L'une des premières solutions qui viennent à l'esprit pour accroître la productivité serait de construire un plus grand nombre de navires au Canada de telle sorte que nos chantiers maritimes gagnent en efficience. Il va de soi que si l'on construit seulement un navire de temps à autre, les connaissances acquises ne sont pas totalement perdues, mais doivent être rafraîchies à chaque occasion. En outre, les travailleurs d'expérience ne mettent pas nécessairement à jour et à niveau leurs compétences aussi souvent.
Ce serait donc le remède le plus évident pour accroître l'efficience et la productivité des chantiers maritimes. Je ne m'y connais toutefois pas assez en construction navale pour pouvoir vous proposer d'autres pistes de solution.
Il est assez fascinant de voir la progression de ce dossier. Il y a environ 10 ans, un contrat de brise-glace polaire, évalué à 1,3 milliard de dollars en 2013, avait été octroyé à Seaspan.
Aujourd'hui, vous évaluez que les deux brise-glace annoncés par le gouvernement l'automne dernier vont coûter 7 milliards de dollars, ce qui représente 3,5 milliards de dollars chacun, mais aucune estimation officielle n'a été fournie par le gouvernement. Dix ans plus tard, on annonce la construction de deux brise-glace polaires, construits dans deux chantiers, mais sans qu'un prix y soit attaché, et cela prend votre bureau pour faire l'étude.
Je vais vous lire quelques lignes du rapport des résultats ministériels de 2019-2020 de Services publics et Approvisionnement Canada:
Il y a un risque que SPAC ne dispose pas de ressources suffisantes en matière d’approvisionnement pour réaliser les priorités, les objectifs et les programmes en raison d’une pénurie d’agents d’approvisionnement possédant les connaissances appropriées, ce qui peut nécessiter plusieurs années d’expérience spécifique aux marchés publics fédéraux.
Dans le rapport, on confirme qu'il y a un problème d'expertise à l'interne. L'année dernière, quand je vous ai posé la question, vous m'avez répondu que cela pouvait expliquer en partie le problème. Le problème serait-il beaucoup plus fondamental? J'essaie de comprendre comment votre bureau peut produire une estimation de 7 milliards de dollars alors que le gouvernement n'est pas capable de dire quoi que ce soit quand il annonce la construction de navires.
Selon la tendance observée, chaque fois qu'on se penche sur des questions d'approvisionnement importantes, par exemple, les navires de combat, les navires d'approvisionnement et, maintenant, les brise-glace polaires, il y a une constante: les coûts sont toujours plus élevés lorsque c'est un bureau indépendant qui les estime plutôt que le gouvernement. Même quand c'est le gouvernement qui revoit ces estimations, elles sont souvent à la hausse.
Je ne crois pas que les intentions sont mauvaises, mais plutôt que nous avons affaire à un manque d'expertise. Pourtant, ce n'est pas de l'expertise unique au monde. J'aime bien MM. Penney et Elmarzougui et je les trouve très compétents. Toutefois, je pense que cette expertise pourrait être développée dans les ministères au sein du gouvernement afin que ce dernier puisse arriver à des estimations qui soient crédibles et acceptables pour l'ensemble des joueurs.
Il y a certainement lieu d'améliorer les processus d'estimation dans les ministères pour donner aux parlementaires des estimations exactes dans la mesure du possible. Cela dit, je comprends que c'est difficile d'estimer le coût total d'un projet qui se concrétisera dans sept, huit ou neuf ans.
Il est surtout fascinant qu'un gouvernement puisse faire l'annonce d'un projet dont il ne connait pas le prix ou n'en a aucune idée.
J'ai une question qui ne concerne pas les brise-glace, mais qui touche à ce que vous avez mentionné concernant les navires de combat de surface. Cette semaine, un rapport du gouvernement australien mentionne que les navires de type 26 qui sont en service sont une catastrophe, puisqu'ils sont trop lents pour les opérations militaires et consomment énormément de carburant.
L'an dernier vous aviez publié une étude sur le coût des différents types de navires qui pourraient être achetés par le Canada et l'on prévoyait la construction d'un navire de type 26. Aujourd'hui, on constate que les navires de ce type qui ont été construits et qui sont en service sont une catastrophe. Que fait-on de cela?
J'ai aussi lu cette manchette avec intérêt. Nous avons l'habitude de mettre à jour nos rapports et nos études lorsque de nouvelles données importantes sont disponibles. Cela permet d'actualiser nos données et de tenir compte des nouveaux renseignements.
L'expérience australienne sera certainement un facteur qui nous aidera à déterminer si nous faisons une mise à jour prochainement ou si nous attendons encore quelques mois. Cela fait partie des plans du Bureau de mettre à jour ses estimations lorsque des renseignements importants justifient une telle mise à jour.
Nous l'avons fait dans le cadre des programmes d'infrastructures, notamment. Nous allons sûrement le faire. Ce n'est qu'une question de temps. Est-ce que ce sera dans quelques mois ou dans quelques années? Je ne peux pas le préciser.
C'est un sujet qui est assez urgent, compte tenu des coûts que vous avez estimés, soit 77 milliards de dollars pour la flotte. Je crois que cette étude devrait être réalisée par notre comité de façon assez urgente.
Merci, monsieur Giroux, d'être des nôtres aujourd'hui. C'est un sujet qui m'intéresse au plus haut point en ma qualité de députée de St. John's-Est, avec bien sûr le port de Saint John's qui sert de base à la Garde côtière. Je peux vous assurer que je vois régulièrement ces deux navires que l'on souhaite remplacer. Je suis tout à fait consciente de leur importance pour le Canada et pour notre souveraineté, nos efforts de recherche scientifique et notre présence dans l'Arctique. Tout cela est plus crucial que jamais, si bien que j'ai grand-hâte d'en apprendre davantage à ce sujet.
La vérificatrice générale a émis une opinion non modifiée sur les états financiers pour le premier cycle de 22 ans. Convenez-vous avec moi que cela témoigne de la grande qualité des rapports financiers du gouvernement du Canada?
Ce n'est assurément pas à moi qu'il revient de contredire la vérificatrice générale. Si elle a émis une opinion sans réserve, je vais la croire sur parole, faute d'être moi-même comptable.
Notre gouvernement s'est engagé à assurer en toute transparence une gestion financière responsable. Les résultats financiers mensuels sont présentés dans la Revue financière, et les différents ministères produisent des rapports financiers trimestriels. Ne diriez-vous pas que ces rapports mensuels et trimestriels procurent aux parlementaires de précieuses mises à jour pour le suivi des dépenses entre les publications des comptes publics annuels?
La Revue financière est une source d'information importante pour les parlementaires, pour les Canadiens et pour moi-même, bien évidemment, comme c'est le cas pour les états financiers trimestriels et les rapports mensuels que nous transmet le receveur général.
L'observation que je faisais dans mon rapport il y a quelques semaines portait sur le fait qu'il y a bien souvent des modifications qui sont apportées après la fin de l'année — rajustements et redressements comptables —, ce qui fait qu'il est très difficile de s'en remettre uniquement à la Revue financière pour avoir un portrait exact de l'état des finances publiques. C'est la raison pour laquelle je recommandais, et je recommande toujours, que les comptes publics soient déposés plus tôt qu'à l'habitude au cours du présent exercice.
Vous avez indiqué qu'il était particulièrement difficile d'estimer les coûts pour les grands brise-glaces polaires étant donné le petit nombre de navires présentant des caractéristiques similaires. Quelles bases de comparaison avez-vous utilisées pour faire vos estimations?
Nous avons eu recours à une combinaison de navires comparables. Nous avons considéré des navires dont la taille était similaire, mais la mission est différente. Nous avons également pris en compte des navires ayant une mission semblable, mais d'une taille différente.
Il y a des navires ayant à peu près la même taille et la même mission que nous aurions pu utiliser comme base de comparaison, mais comme ils ont été construits en Russie, nous ne pensions pas pouvoir compter sur suffisamment de données valables pour effectuer une estimation raisonnable.
Nous avons donc utilisé des navires de taille similaire ayant une mission différente, et d'autres de taille différente ayant la même mission. Nous avons aussi considéré les coûts antérieurs pour les navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique et pour les navires de soutien interarmées. C'est en combinant tous ces facteurs que nous en sommes arrivés à une estimation des coûts pour les brise-glaces polaires. Si la chose vous intéresse, mes deux collègues pourraient vous fournir de plus amples détails sur la façon dont nous avons procédé pour intégrer à notre modèle ces différentes bases de comparaison.
Nous en sommes aussi persuadés que faire se peut, étant donné que les bases de comparaison sont plutôt rares pour ce programme. À la lumière des données qui nous ont été communiquées, nous sommes passablement convaincus de la justesse de notre estimation de 7,25 milliards de dollars, étant donné qu'il y a des inconnues et que plusieurs facteurs pourraient influer sur le coût final de ce projet à long terme. Dans l'état actuel des choses, je suis persuadé que notre estimation des coûts est juste.
Quelles seraient selon vous les variables qui ont pu rendre cette analyse exceptionnellement difficile? Pourriez-vous nous indiquer de façon plus précise quel a été le principal élément d'incertitude dans ce processus d'évaluation?
Le principal élément d'incertitude vient du fait qu'il existe de par le monde peu de navires de cette capacité qui auraient pu nous fournir des estimations de coûts fiables. C'était la plus grande inconnue.
Monsieur Giroux, votre rapport précise que la méthode utilisée, pour ce qui est du profil des dépenses, est la méthode de comptabilité de caisse, alors que le gouvernement utilise la méthode de comptabilité d'exercice.
Cette différence risque-t-elle d'avoir des répercussions sur le calcul du coût total du projet?
Cela n'aura pas de répercussions sur le calcul du coût total.
Par contre, il y aura des répercussions sur la façon dont ces dépenses vont être comptabilisées — il y aura donc des répercussions sur le plan budgétaire — et sur la façon par laquelle le ministère des Pêches et Océans va demander des fonds.
Celui-ci va devoir accéder aux fonds au moyen du budget principal des dépenses ou d'un budget supplémentaire des dépenses, selon la comptabilité de caisse. Les dépenses relatives à ce programme vont apparaître dans les comptes publics et dans le budget du gouvernement après la dépréciation des brise-glace.
Au fur et à mesure que les brise-glace sont utilisés, ils perdent de la valeur. C'est là que l'impact budgétaire va se faire sentir. C'est un peu comme si le gouvernement achetait un édifice qui a une durée de vie de 40 ou 50 ans. L'achat initial n'a pas d'impact budgétaire, mais la dépréciation au fil des ans en a un.
Je vais demander à M. Penney ou à M. Elmarzougui de vous expliquer ce qui est inclus dans les coûts de gestion de projet, car j'avoue que cette question me pose parfois des difficultés à moi aussi.
Il y aurait des coûts à engager par le gouvernement, et ce, en dehors de ce qui se fait dans les chantiers maritimes. Cela pourrait inclure notamment les salaires — pour les équivalents temps plein — et les avantages sociaux des employés pendant les 22 années du cycle de vie du projet, soit de 2009 jusqu'à 2030 ou 2031.
Merci encore une fois d'être avec nous aujourd'hui.
Il y a une de vos observations qui m'a particulièrement frappé, monsieur Giroux. Vous avez dit qu'il fallait construire davantage de navires pour réduire nos coûts et éviter les pertes d'efficience et de savoir.
Parlons de capacité. J'ai participé à la conférence de la Région économique du Nord-Ouest du Pacifique où l'on a indiqué que l'espace en cale sèche était pour ainsi dire utilisé au maximum de sa capacité au Canada alors que l'on devra procéder chaque année à des travaux de radoub d'une valeur de quelque 3 milliards de dollars. Le gouvernement n'a toujours pas mis en place de programme pour se doter de nouveaux espaces en cale sèche.
Je vis à Port Alberni, localité qui abrite le seul port en eau profonde de la côte ouest de l'île de Vancouver. Les autorités souhaitent construire une cale sèche, mais le gouvernement n'offre aucun programme pour le financement de projets semblables.
Si l'on souhaite influer sur les coûts en amont, pensez-vous que l'accroissement de nos capacités pour ce qui est des cales sèches et des chantiers maritimes pourrait contribuer d'une manière générale à réduire les coûts associés à la conception et à la construction de navires au Canada?
C'est une bonne question. Je crois que la ministre des Pêches et des Océans serait mieux à même de vous répondre à ce sujet. Elle peut en effet sans doute compter sur des centaines de fonctionnaires qui pourraient vous expliquer beaucoup mieux que moi les enjeux liés aux chantiers maritimes et à la capacité de cette industrie au Canada.
Du simple point de vue de l'établissement des coûts, je pense que des comparaisons vous permettraient de constater que d'autres pays ont été en mesure de se donner de plus grandes capacités pour ce qui est des cales sèches et de la construction maritime. J'estime que l'on pourrait se comparer à ce titre à la Scandinavie, et à la Norvège tout particulièrement.
Notre pays vient de supprimer un tarif de 25 % pour permettre la construction de traversiers au Canada. Nous avons ici même l'excellent exemple de BC Ferries. On effectue des radoubs alors que les traversiers sont construits à l'étranger.
Pensez-vous qu'un tarif semblable pourrait être bénéfique pour la construction navale au Canada si les fonds recueillis servaient directement au renforcement des capacités en la matière?
Je répète que je ne peux pas vraiment vous parler du dossier des cales sèches, mais il y a une chose qui est sûre quand on considère les coûts engagés dans les différents pays pour les importantes acquisitions de navires. Que ce soit pour la Garde côtière ou pour la Défense nationale, il y a un lien direct entre la capacité d'un pays de construire des navires à grande échelle et le coût unitaire de ces navires.
Ainsi, la France semble être très efficiente. On trouve un autre très bon exemple du côté des États-Unis. L'Italie semble aussi très bien se tirer d'affaire. Le Danemark avait des estimations de coûts assez faibles pour son équivalent des navires de combat de surface canadiens.
Il y a donc de toute évidence un lien avec la capacité nationale. Plus cette capacité est élevée, plus les coûts semblent diminuer. Je ne saurais toutefois vous dire si c'est directement lié à la capacité ou plutôt à la construction elle-même. C'est sans doute la façon dont on s'y prend pour construire les navires qui peut faire baisser les coûts.
Je suis très heureux d'être ici pour ma première séance en tant que membre de ce comité.
On estime que la Russie possède entre 40 et 53 brise-glaces. La Chine en a un certain nombre également. Je crois que le Canada en a sept, mais il est possible que je fasse erreur.
Selon vos recherches, de combien de brise-glaces avons-nous besoin?
C'est une très bonne question sur laquelle je ne me suis pas penché, parce que notre rapport visait seulement à estimer les coûts. Si nous devions déterminer de combien de brise-glaces nous avons besoin, ce serait beaucoup plus compliqué qu'une simple estimation des coûts.
Je dirais que c'est une question d'ordre stratégique à laquelle la ministre serait mieux en mesure de répondre étant donné qu'il y a une part de subjectivité. Comme vous l'avez indiqué, il y a des pays qui ont des flottes plus imposantes que la nôtre, mais cela se traduit également par des coûts plus élevés. Ce n'est pas à moi de vous dire le nombre de brise-glaces qui convient pour le Canada.
En janvier, vous avez rendu publique votre analyse de la mise à jour économique et financière. Je me demande si vous vous êtes intéressés à la croissance du PIB qui aurait dépassé les moyennes historiques en 2021 et en 2022. Dans votre analyse, avez-vous pu déterminer dans quelle mesure l'inflation a contribué à porter ces chiffres à 4,6 et 4,2 pour le PIB?
Nous avons pris en considération les différents éléments nous ayant obligés à revoir nos estimations. Je ne saurais vous dire de mémoire ce qu'il en est de l'inflation. Je me suis préparé à vous parler aujourd'hui de construction navale, si bien qu'il faudrait que je fasse certaines vérifications pour pouvoir vous entretenir de la mise à jour économique et financière.
Nous savons que l'inflation et d'autres éléments comme une réduction des dépenses ont eu pour effet combiné de créer une marge de manœuvre fiscale de 90 milliards de dollars sur une période de plusieurs années. Ce n'est donc pas uniquement attribuable à l'inflation, mais aussi à différents facteurs comme une croissance accélérée et des dépenses de programme plus faibles que prévu. Je n'oserais pas avancer un chiffre quant aux fluctuations causées par l'inflation uniquement.
J'ai une autre question dans la même veine, mais il se peut que vous n'ayez pas de réponse. Je suis curieux. J'ai lu divers rapports qui indiquent que si nous calculions l'inflation aujourd'hui avec la méthode utilisée en 1980, le taux d'inflation se situerait à un peu plus de 14 %. Avez-vous déjà vu cette méthode ou l'avez-vous utilisée dans vos tableaux afin de voir à quoi ressemble réellement le taux d'inflation, car tout le monde dit que le taux d'inflation cité n'est pas le vrai?
Ma réponse est non. Nous utilisons les mesures fournies par Statistique Canada, qui jouit d'une très bonne réputation à l'échelle internationale. Cela ne veut pas dire que les mesures sont parfaites, mais nous n'avons pas étudié la façon de calculer l'inflation et n'avons pas cherché à voir s'il faudrait l'améliorer. C'est une question pour le statisticien en chef.
Revenons aux brise-glaces. Nous voyons où est situé le prix aujourd'hui. Nous voyons le prix estimé en 2013. On a déjà posé des questions à ce sujet aujourd'hui.
Quel sera le prix en fin de compte? Nous savons qu'il faudra construire ces navires et payer la facture.
Serait‑il possible qu'au final, ces navires coûtent quatre ou cinq milliards de dollars chacun? Quelle est la probabilité de ce scénario?
Le scénario n'est pas impossible. Nous avons fourni diverses estimations possibles allant jusqu'à 9 milliards de dollars, et il est fort possible que chaque brise-glace polaire coûte 4,5 milliards de dollars. Or, nous croyons actuellement que notre estimation de 7,25 milliards de dollars est le scénario le plus probable. Il se peut cependant que le montant soit plus élevé.
L'expérience nous indique que les coûts ont tendance à monter plutôt que de descendre au fur et à mesure qu'un projet avance, mais nous sommes toujours persuadés que le montant de 7,25 milliards est l'estimation la plus probable. Il se peut que le montant soit plus élevé.
Monsieur Giroux, nous sommes heureux de vous accueillir au Comité.
J'aimerais d'abord revenir sur l'une des questions qu'a abordées Mme Vignola.
[Traduction]
À la page 5 de votre rapport, vous indiquez que l'ancien gouvernement conservateur avait estimé à 720 millions de dollars le prix d'un brise-glace polaire en 2008. Existe‑t‑il une estimation indépendante des coûts en 2008 qui a validé ce montant?
Je ne pense pas qu'il y ait eu une estimation indépendante à l'époque. Je n'occupais pas mon poste actuel, mais je ne me souviens pas d'une estimation indépendante. Cela ne veut pas dire qu'il n'y en a pas eu. Toutefois, je ne le crois pas.
Je poursuis. Nous avons également vu dans votre rapport qu'en 2013, le gouvernement précédent a estimé les coûts à 1,3 milliard de dollars. Savez-vous si une estimation indépendante des coûts a été effectuée en 2013 pour valider le montant?
Je ne crois pas que mes prédécesseurs aient effectué une estimation des coûts indépendante. Il se peut que j'aie tort, toutefois, parce qu'en 2013, j'avais d'autres fonctions. Mais je ne me souviens pas d'une telle estimation. Je le répète, cela ne veut pas dire qu'elle n'a pas été effectuée. Il se peut que ma mémoire défaillante soit en cause si une telle estimation a été faite et je ne m'en souviens pas.
Je suis sûr que votre mémoire n'est pas défaillante.
Je présume donc que les estimations n'existent pas, ce qui fait que nous ne savons pas si les coûts estimés étaient exacts ou non de 2008 à 2013.
Passons maintenant à la section 7 de votre rapport, où vous indiquez que les échéanciers présumés, les spécifications du projet et, dans une moindre mesure, les caractéristiques des navires pourraient évoluer, et que vos estimations reposent sur les spécifications fournies par le ministère des Pêches et des Océans en avril 2021.
Avez-vous comparé ces spécifications à celles qui ont été utilisées pour calculer les coûts estimés de 720 millions de dollars en 2008 ou de 1,3 milliard de dollars en 2013?
Nous n'avons pas examiné les estimations des coûts et nous n'avons pas tenté de recueillir des preuves, des renseignements ou de l'information sur la façon dont le gouvernement a calculé ses estimations originales en 2013 ou avant. Nous avons demandé des renseignements du ministère des Pêches et des Océans pour nous aider à calculer l'estimation que nous vous avons soumise il y a quelques semaines, mais nous n'avons pas essayé de voir comment le gouvernement a calculé son estimation originale de 1,3 milliard de dollars.
Je vous en remercie, parce que certaines personnes soutiennent qu'il y a eu une flambée des coûts. D'après votre témoignage, c'est‑à‑dire d'après ce que j'en comprends, nous ne comparons pas des pommes à des pommes lorsque nous nous penchons sur les estimations de 2008 ou de 2013. Dans les deux cas, nous ne savons pas si les estimations des coûts ont été validées de façon indépendante, et nous ne savons pas dans quelle mesure les spécifications utilisées pour calculer ces estimations sont différentes de celles que vous avez utilisées en 2021.
Serait‑ce une affirmation relativement raisonnable?
Mes collègues, MM. Penney et Elmarzougui, ont peut-être plus de renseignements sur les changements qui ont possiblement été apportés aux spécifications entre 2013 et maintenant.
Certaines choses ont évolué par rapport à la conception originale entre 2013 et maintenant. Je n'ai pas vu beaucoup de changement dans les principales caractéristiques du brise-glace polaire. Le poids lèse du navire a augmenté. C'est une chose que nous avons remarquée.
Comme M. Giroux a laissé entendre, nous n'avons pas tenté de réconcilier les estimations des coûts effectués en 2013 et maintenant.
J'aimerais parler des coûts accessoires auxquels vous faites référence dans votre rapport. En me fiant à la réponse que vous avez fournie à Mme Vignola, aurais‑je raison de dire, par opposition à certaines perceptions, que vous présumez que le gouvernement déboursera environ 7,25 milliards de dollars, mais qu'une bonne partie des coûts accessoires représente des coûts internes? C'est‑à‑dire qu'une partie des salaires existants versés aux fonctionnaires qui travaillent à la gestion et la conception du projet fait partie du montant total. Selon ce que j'ai compris dans votre rapport, le montant comprend aussi une partie des salaires versés pendant les années précédentes, car vous avez estimé le montant de 7,25 milliards de dollars sur une très longue période.
C'est exact. Certains des coûts liés à la gestion du projet, en fait, la vaste majorité de ces coûts sont engagés par les ministères qui participent à la gestion de leurs projets. J'ignore à quel point ces coûts accessoires représentent des coûts qui auraient été engagés de toute façon. Je le doute, bien franchement.
Ma méthode d'estimation est semblable à celle utilisée par d'autres institutions budgétaires du monde. Elle est semblable aux estimations budgétaires effectuées dans le cadre d'autres grands projets d'approvisionnement, tels que les navires de combat, les CF‑18, et ainsi de suite.
Je crois que ma question est davantage destinée à M. Penney.
Lorsque nous parlons de l'estimation de 7,25 milliards de dollars, je me demande si les coûts de conception sont établis à partir d'un seul ensemble d'honoraires pour les deux navires. J'entends de la part de l'industrie que Seaspan et peut-être un autre fournisseur travaillent avec des équipes de conception distinctes et conçoivent peut-être des modèles séparés.
J'ai entendu la même chose, mais au moment où nous avons travaillé sur l'estimation, nous avons présumé que les deux navires allaient être très semblables tout en étant construits dans des chantiers navals différents.
Pour estimer les coûts de conception, nous avons retenu d'autres navires à titre de référence et leurs coûts de conception, notamment les NPEA. Nous avons recalibré nos calculs en tenant compte de la capacité et du poids lèse, par exemple.
Les coûts de conception de 820 millions de dollars sont déjà très élevés, ce qui fait que je ne crois pas qu'ils pourraient augmenter tant que ça, même s'il y avait deux équipes différentes chargées de la conception.
Je vais poser une question sur les comptes publics.
Le DPB souhaite‑t‑il se prononcer sur le montant effarant de 11 milliards de dollars dépensés par le gouvernement sur des consultants externes alors que parallèlement, la fonction publique a coûté un montant encore plus effarant de 59 milliards de dollars l'année passée? La fonction publique représente maintenant 400 000 employés, et pourtant nous avons doublé ou triplé les montants versés aux consultants externes. Nous avons trouvé un consultant, bien sûr, c'était un des gros cabinets, qui a touché 1 million de dollars pour faire l'audit d'un festival de la fraise.
Avez-vous des observations sur de tels gains d'efficience?
Nous avons mis un outil en ligne à l'intention des parlementaires afin que vous puissiez examiner les dépenses liées au personnel de la fonction publique ventilées par ministère. On peut voir l'évolution au cours des dernières années des coûts liés au personnel et aux ETP.
Nous n'avons toutefois pas d'outil semblable pour les fournisseurs et les consultants, qui sont parfois confondus. Honnêtement, je ne me suis pas penché sur la question des honoraires des consultants dans les derniers comptes publics, mais je suis sûr qu'on y trouverait des merveilles.
N'est‑ce pas. J'ai lu les rapports d'audits de la vérificatrice générale et il s'avère que certains ministères, ainsi que les petits organismes qui en relèvent, dépensent aussi des centaines de milliers de dollars pour faire l'audit de leurs livres comptables alors que leur propre personnel fait la même chose. Est‑ce une pratique qui a du sens?
Il se peut qu'ils fassent l'audit des récipiendaires des subventions et des contributions. C'est peut-être la raison pour laquelle les marchés sont conclus, ou bien ce sont des fonctions internes d'audit et d'évaluation. Voilà des possibilités, mais je le dis sans certitude.
Revenons au Conseil du Trésor. Je me suis fait le critique virulent du Conseil du Trésor et du fait que bien souvent, il ne suit pas ses propres règles. Le président a reconnu que le Conseil n'a pas suivi les processus prévus dans le cas des 80 milliards de dollars accordés en subventions salariales.
Les résultats du ministère indiquent qu'il suit les règles trois fois sur quatre pour ce qui est des évaluations du risque financier. Compte tenu des dépenses supplémentaires qui se sont multipliées des centaines et des centaines de fois, est‑ce une pratique acceptable d'ignorer une proposition sur quatre?
Lorsque nous examinons des dépenses représentant des douzaines de milliards de dollars, suivre les règles 75 % du temps où faire l'audit d'une proportion réduite des dépenses, c'est faire augmenter le risque que des montants ne soient pas entièrement traçables. Il faudrait que j'étudie cette question de plus près, mais a priori, c'est inquiétant.
Un haut fonctionnaire a déclaré hier que la pratique est acceptable, du fait que les dépenses étaient tellement élevées qu'il était devenu impossible de tout scruter.
Je remercie MM. Penney et Giroux d'être des nôtres aujourd'hui. Je suis fasciné par ce dossier. Je viens de Richmond, une ville côtière de la Colombie-Britannique. Je travaillais comme agent des communications du gouvernement provincial lorsque j'ai appris que le contrat de construction navale avait été accordé à Seaspan. C'était il y a de nombreuses années, et je tiens vraiment à savoir comment le dossier avancera.
Monsieur Giroux, ma question porte sur la Garde côtière canadienne. En mai 2021, la Garde côtière a expliqué que, selon les estimations préliminaires, la construction des navires créerait quelque 300 emplois par navire aux chantiers navals et 2 500 emplois dans la chaîne d'approvisionnement maritime. Seaspan et Vancouver Shipyards ont indiqué que le nouveau programme de construction navale générerait du travail pour environ 1 400 employés dans leurs sociétés et créerait 1 400 emplois supplémentaires à l'échelle du pays.
Monsieur Giroux, quel est votre avis au sujet des estimations de la Garde côtière canadienne?
Je n'ai aucun avis, car nous avons examiné le coût d'achat de ces navires. Nous n'avons pas tenu compte des retombées économiques, de l'incidence économique et des avantages, ou encore du nombre d'emplois créés. C'est donc pour cette raison que je peux difficilement m'exprimer sur l'exactitude de ces chiffres, vu que notre rapport n'en a pas tenu compte.
À la page 10, vous évoquez une « analyse de sensibilité » pour évaluer les répercussions des retards. Comment les répercussions ont-elles été évaluées, et à quel point en êtes-vous confiant?
Il est facile de calculer le coût de ces retards. Le processus de production est retardé, ce qui fait augmenter les frais de gestion des projets. De plus, les coûts de production vont augmenter en raison de l'inflation. Nous calculons les coûts par année et nous faisons la conversion de toutes ces années vers notre année de base, l'année 2021.
Si on retarde le processus de production, il est certain que les frais de gestion des projets seront plus élevés. Les coûts de production seront un peu plus élevés parce qu'ils seront répartis sur plus d'années. L'inflation fera augmenter les coûts de production.
Le processus de production s'étale sur quatre à cinq ans. Ensuite, nous faisons la conversion et nous générons notre coût pour notre année de base. Pour une année supplémentaire, nous allons payer plus de frais de gestion. De plus, le fait de retarder la production coûtera un peu plus cher.
C'est ainsi que le calcul se fait. Nous avons calculé qu'un retard d'une année nous coûtait 200 millions de dollars de plus, et qu'un retard de deux années nous coûtait un peu plus de 400 millions de dollars de plus. C'est ainsi que nous avons fait le calcul.
Monsieur Giroux, la pandémie a créé des problèmes d'approvisionnement dans tous les secteurs. Les brise-glace polaires sont des navires de haute technologie. Si vous avez eu le plaisir d'essayer d'acheter une voiture électrique ou hybride, vous connaissez les problèmes actuels en matière d'approvisionnement en technologies.
Les bris dans les chaînes d'approvisionnement en technologies peuvent-ils avoir des répercussions sur les coûts et sur les délais de production et de construction du navire? Pour pallier cela, ne devrait-il pas y avoir des fabricants au Canada pour ce type de technologies, dont nous avons besoin?
Il est clair que les bris ou les interruptions dans la chaîne d'approvisionnement peuvent avoir des répercussions sur le calendrier de livraison de navires de cette ampleur et qu'ils peuvent aussi entraîner des hausses de coûts.
On voit déjà que les bris dans les chaînes d'approvisionnement ont eu certaines répercussions sur l'inflation. Cela nous a poussés à modifier nos hypothèses concernant l'inflation dans le cadre de ce projet. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons estimé les coûts potentiels d'un retard d'un an et de deux ans. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons un éventail d'estimations, une fourchette de coûts possibles, afin de tenir compte des interruptions possibles dans la chaîne d'approvisionnement.
Quant à savoir si c'est une raison pour inciter les fabricants ou les manufacturiers canadiens à fournir des matières et des matériaux qui pourraient contribuer à construire des navires, c'est plutôt une question politique. Veut-on payer des coûts plus élevés pour avoir une chaîne de production entièrement locale ou veut-on s'approvisionner un peu partout dans le monde auprès de fournisseurs pouvant offrir un meilleur prix? Ces questions relèvent plus de la politique industrielle et de la politique économique que de mon domaine d'expertise.
Tout à l'heure, vous disiez que, si le navire était construit par le même chantier, on économiserait de 600 millions à 800 millions de dollars pour les deux navires. C'est énorme.
En fin de compte, qu'est-ce qui pourrait expliquer le fait qu'on se prive de cette importante économie?
Il y a tout d'abord la simplification de la gestion du projet, parce que le gouvernement fait affaire avec un seul chantier naval, plutôt que de faire affaire avec deux partenaires que l'on doit surveiller.
Ensuite, l'aspect qui est probablement le plus important, ce sont les économies d'échelle engendrées. Il y a toujours une question d'apprentissage lorsqu'on fait quelque chose pour la première fois, et cela s'applique au premier navire qui est construit. Ces économies d'échelles sont réalisées par un chantier naval et peuvent permettre de construire le deuxième navire de façon plus efficace, et donc à moindre coût. Ce n'est pas le cas lorsque les deux chantiers construisent tous les deux un premier navire.
C'est une question intéressante, et je suis navré de ne pas en avoir parlé au début.
Nous n'en parlons pas de façon explicite, mais nous en avons tenu compte implicitement lorsque nous avons revu nos projections de l'inflation. Les pénuries de main-d'œuvre sont un facteur qui peut contribuer à une tendance inflationniste et nous avons revu nos projections à la hausse dans l'estimation des coûts.
Même si nous n'avons pas tenu compte des pénuries de main-d'œuvre proprement dites, les projections d'une inflation plus élevée en tiennent compte dans une certaine mesure.
Il est évident que nous aurons besoin de recruter et de former des travailleurs, de développer la capacité et d'élaborer une stratégie sur le marché de la main-d'œuvre pendant les prochaines années afin d'être sûrs de disposer de suffisamment de travailleurs pour construire ces navires.
Lorsque vous avez fait votre recherche, aviez-vous l'impression que le gouvernement cherche à accroître la capacité et fait ce travail important qui consiste à attirer et à recruter des travailleurs, afin que nous puissions construire les navires et mener le projet à bien sur le long terme?
Nous avons examiné les coûts, ainsi que les coûts potentiels, de la construction des deux brise-glaces polaires, mais nous n'avons pas tenu compte de la question élargie de la disponibilité d'une main-d'œuvre qualifiée afin de savoir si les politiques gouvernementales sont suffisantes actuellement pour combler les pénuries de main-d'œuvre que nous observons dans le pays. Ce sont des facteurs qui vont au‑delà du sujet de notre rapport, à savoir estimer les coûts des brise-glaces polaires.
Vu l'incidence de la COVID et la pénurie de main-d'œuvre, les coûts de la main-d'œuvre qui montent en flèche, ainsi que les coûts assumés par nos travailleurs au chapitre du logement, de la garde d'enfants et ainsi de suite, pensez-vous qu'il pourrait coûter beaucoup plus cher de construire ces navires à long terme?
Dans notre estimation des coûts, nous présumons que la politique monétaire de la Banque du Canada permettra à l'inflation de revenir à moyen terme à la cible de 2 % grâce à des augmentations successives des taux d'intérêt, mais si ce n'est pas le cas et que l'inflation n'est pas maîtrisée, le coût sera manifestement plus élevé.
Nous supposons que la politique monétaire de la Banque sera assez robuste pour ramener l'inflation à environ 2 %. À défaut de quoi, les coûts augmenteront.
Monsieur Giroux, depuis le début de la rencontre, les questions sont sensiblement les mêmes. Elles sont souvent en lien avec les coûts astronomiques. On dirait que, dans ce dossier et dans plusieurs autres dossiers, il y a un problème systémique sur le plan des retards concernant d'importants contrats, ce qui occasionne des coûts de dépassement.
Selon vous, y a-t-il un problème systémique, au sein du gouvernement du Canada, concernant les grands programmes d'achat?
Le mot systémique a une certaine connotation au Québec, je ne m'aventurerai donc pas sur cette voie.
Par contre, on voit une tendance claire qui se répète: chaque fois que l'on parle d'un projet d'acquisition d'envergure, les estimations initiales sont beaucoup plus basses que les révisions subséquentes.
Est-ce un problème récurrent? Ce l'est certainement.
Quelle en est la cause? Est-ce intentionnel ou est-ce dû à un manque de clairvoyance ou au fait que l'on n'arrive pas à prévoir les choses? S'agit-il d'une stratégie de négociation de la part de certains fonctionnaires, afin d'essayer d'obtenir des estimations de coût plus basses, en espérant que cela entraînera des soumissions plus basses? Je n'ai malheureusement pas les réponses à ces questions. Si je les avais, je me ferais un plaisir de les fournir au Comité.
Présentement, tout ce que l'on voit, c'est l'augmentation des coûts.
Ce qui me fascine, ce sont les coûts de la gestion. À un moment donné, j'aimerais que vous me fournissiez plus de détails à ce sujet. On parle de 346 millions de dollars pour la gestion, et ce montant peut aller jusqu'à 405 millions de dollars. Lorsque le projet est retardé, on augmente les coûts. J'ai déjà parlé du fait que c'est exponentiel. Vous et moi, nous avons parlé du fait que l'on parle aujourd'hui de milliards de dollars de la même façon qu'on parlait de millions de dollars il y a 10 ans. Aujourd'hui, un montant de 400 millions de dollars, c'est des pinottes.
Qu'est-ce qui explique les montants astronomiques destinés à la gestion?
Je suis aussi étonné que vous pour ce qui est des coûts de gestion et des coûts de design. Malheureusement, je ne suis pas un expert dans ce domaine.
Les nombreux rapports que j'ai soumis m'ont permis de réaliser que les coûts de design et les coûts de gestion sont basés sur des données historiques et sur des projets comparables, notamment en ce qui a trait aux navires de soutien et aux autres types de brise-glace. Cela est basé sur des précédents, mais cela me surprend chaque fois moi aussi.
La Stratégie nationale de construction navale du Canada visait la stabilité sur le plan de la production, de la construction navale. Nous parlons de brise-glace. Seaspan a obtenu un contrat, en 2011, mais on lui a retiré le contrat en 2019. Pendant huit ans, il ne s'est rien passé. À l'époque, on parlait d'un contrat de 700 millions ou de 1 milliard de dollars. Aujourd'hui, on annonce qu'on va de nouveau octroyer à nouveau ce contrat de 3,5 milliards de dollars à Seaspan et que l'on va aussi en octroyer un à la Davie. On n'a rien fait pendant huit ans, mais, tout à coup, on va être meilleurs, et cela va coûter trois fois plus cher.
Tout cela n'est-il pas incohérent? N’est-on pas pris dans un cercle vicieux en matière de production navale?
Le manque de décision et le fait que, au fil du temps, la construction n'a pas avancé de manière notable contribuent certainement à l'augmentation des coûts de gestion. En effet, les gens doivent continuer à jeter un œil là-dessus et à gérer le projet. Cela peut donc aussi contribuer à l'augmentation des coûts de design. Évidemment, au fil du temps, des améliorations doivent être apportées au design.
Au-delà de ces quelques observations, je n'ai malheureusement pas de réponse qui explique ces différences de coûts.
Au Canada, on doit souvent faire affaire avec plusieurs ministères. Par exemple, Pêches et Océans Canada veut des brise-glace, mais c'est Services publics et Approvisionnement Canada qui s'occupe de la gestion des contrats. Quelque chose se perd quelque part.
Je vais faire une comparaison avec le modèle australien. Prenons la défense, par exemple. L'Australie approvisionne la défense de façon à ce qu'il y ait une continuité, mais surtout qu'elle soit exempte de politique. En effet, il ne faut pas que les contrats changent en fonction des gouvernements qui se succèdent.
Selon vous, le Canada devrait-il faire de même? C'est un peu ce que l'on voulait faire au moyen de la stratégie navale. A-t-on besoin qu'il y ait une autre étape, plus sérieuse, afin de ne pas recommencer le processus chaque fois? Il ne faut pas oublier que, au bout du compte, ce sont les contribuables qui paient la facture.
C'est une question de gouvernance des grands projets d'approvisionnement.
Services publics et Approvisionnement Canada est responsable de ces grands projets. Malheureusement, je ne me suis pas penché sur cette question. Peut-être ma collègue la vérificatrice générale s'y est-elle déjà attardée et a-t-elle des commentaires à faire sur la façon d'améliorer la gouvernance des grands projets d'acquisition.
Les estimations de coûts que j'ai présentées aux parlementaires depuis mon entrée en poste indiquent clairement que l'on doit y apporter des améliorations.
Je vous souhaite de nouveau la bienvenue à notre comité, monsieur Giroux.
Au début de la réunion, mais aussi depuis à peu près une heure, il est devenu très évident que nous ne pouvons pas utiliser les 1,3 milliard de dollars comme base de comparaison, ne serait‑ce parce que nous avons très peu de données à cet égard. Par conséquent, le seul nombre que nous pourrions utiliser, selon la méthode dont vous vous êtes servis, c'est la somme de 7,25 milliards de dollars. Si vous la ramenez au même niveau, un navire coûterait 3,5 ou 3,6 milliards de dollars. À défaut d'avoir une comparaison, nous ne pouvons pas comparer les bases.
Je vais commencer par vous demander pourquoi vous avez choisi ces trois navires. Vous avez dit que l'un d'eux est américain et que les deux autres sont canadiens. Vous avez parlé de leur taille et de leur vocation.
Il n'y a pas beaucoup de navires comparables, tant pour ce qui est de la taille que de la mission, à ce que le gouvernement a besoin ou envisage d'acheter comme brise-glaces polaires de cette taille. Je pense que le seul pays qui a des navires qui répondent à ces deux critères est la Russie, et nous n'avons pas trouvé assez de données fiables pour nous en servir comme point de départ d'une estimation dans le contexte canadien.
À défaut d'avoir un navire parfaitement comparable, nous avons décidé d'opter pour une autre méthode d'estimation, qui est largement reconnue comme étant fiable et qui consiste à comparer deux navires de taille semblable même s'ils ne sont pas construits pour accomplir la même mission, et des navires ayant une mission semblable, mais de taille différente, c'est‑à‑dire des brise-glaces polaires plus petits.
En combinant ces deux estimations, nous arrivons à une estimation pour ce genre de navire et cette taille qui est assez fiable.
Dans l'estimation des coûts, nous nous sommes aussi penchés sur le contexte canadien en tenant compte des données sur les navires qui ont été construits ou qui sont en train de l'être, au Canada, afin de prendre en considération les coûts canadiens ainsi que les différences en matière de conception, d'acquisition et de productivité dans les chantiers navals canadiens.
On a beaucoup parlé de la gestion de projet, de la conception et des coûts connexes. De plus, nous devons reconnaître que les coûts d'acquisition, c'est‑à‑dire, je crois, les coûts de construction, sont de l'ordre de 6,1 milliards de dollars.
La ventilation de la gestion de projet et de la conception semble suffire, mais à la page 13 lorsque vous parlez de modélisation, vous semblez avoir essayé de ventiler les coûts de la construction, soit de l'acquisition, si je ne m'abuse. Vous parlez d'études initiales, d'analyses, de soutien technique, de pièces de rechange initiales ainsi que de tests, d'essais et d'évaluations de système.
Y a‑t‑il une ventilation au moyen de ces catégories de la somme de 6,1 milliards de dollars que nous pourrions examiner?
Dans notre modèle, les données historiques que nous avons utilisées regroupaient ces catégories de coûts, et nous nous en servions donc comme données de base pour faire la projection. Ces catégories sont toutes projetées simultanément dans la projection.
C'est une longue façon de vous dire que, oui, il est possible pour nous d'obtenir cette ventilation, mais un certain travail serait nécessaire de notre côté.
Je m'intéressais surtout aux pièces de rechange initiales. Je ne sais pas de quelle somme il s'agit, mais cela aurait été bien, car lorsqu'on établit les coûts, il est habituellement question des coûts d'acquisition et de la construction. Pour les pièces de rechange, je ne sais pas quels modèles d'établissement des coûts...
Je veux revenir rapidement en arrière. On dirait que la conception a commencé en 2016, et nous sommes maintenant en 2022. La conception a‑t‑elle changé ou a‑t‑elle été renforcée, et la spécification a‑t‑elle été améliorée depuis pour que vous soyez en mesure de rapidement consolider ces estimations et réduire l'écart?
Je sais que je n'ai pas beaucoup de temps. Je veux poser une autre question, et espérons que vous pourrez y répondre.
Nous avons examiné d'autres modèles d'établissement des coûts. Avez-vous songé à recourir à la sous-traitance? Je sais que la question peut sembler controversée, mais nous semblons regarder des économies potentielles de 680 millions de dollars. Je veux savoir à combien se chiffrent les économies et si vous avez eu recours à la sous-traitance.
Dans certains de ces grands projets, qu'ils soient publics ou privés — c'est public dans ce cas‑ci —, dans quelle proportion l'entreprise qui présente une soumission se charge‑t‑elle des tâches proprement dites et des montants d'argent, et dans quelle mesure ces tâches et les montants sont-ils confiés à d'autres entreprises? Parlons-nous d'une proportion de 100 % du travail qui sera accompli? De toute évidence, il s'agit des personnes qui sont au chantier naval pendant la construction, nous le savons, mais je parle de la période qui s'écoule de maintenant au moment où on commence à couper ou à fabriquer de l'acier.
Ce serait utile lorsque le MPO ou peu importe de qui il s'agit propose une autre évaluation des coûts afin que tout le monde y voir plus clair quant à la somme que chacun...
Ce serait une excellente question pour la ministre des Pêches et des Océans. Si elle ne peut pas répondre immédiatement, je suis certain que ses collaborateurs pourraient répondre par écrit au Comité.
De plus, quelle proportion des heures et des travaux facturables serait réalisée en sol canadien par des Canadiens? Est‑ce en grande partie donné en sous-traitance partout dans le monde, ou est‑ce fait par des Canadiens à Toronto, à Montréal, à Vancouver et à différents endroits entre ces villes?
Je pense que la majeure partie des travaux a lieu au pays, ce qui expliquerait la différence de coût. Je ne peux pas exclure qu'une partie importante — et cela reste à définir — puisse être faite en sous-traitance à l’étranger. D'abord, puisqu'il s'agit de Vancouver et de la Davie, la plupart des travaux seraient réalisés au pays. Encore une fois, certaines pièces seraient fabriquées au pays, mais il pourrait aussi y avoir des pièces importées.
Oui, je pense que c'était prévu pour plus tard. Je ne pense pas que nous avons des informations aussi détaillées sur les activités des deux chantiers navals et sur la quantité de travail qu'ils externaliseront ou confieront à des fournisseurs canadiens ou étrangers au lieu de les faire eux-mêmes. Je pense que nous le saurons plus tard.
Je repense à 2008, lorsque l'annonce a été faite. Je pense qu'il y avait deux volets: la souveraineté dans l'Arctique, et sortir du désastre économique et stimuler l'activité économique pour les 20 prochaines années. C'était les deux objectifs, je crois, mais je pense qu'il serait inacceptable qu'une portion déraisonnable des travaux soit effectuée à l'extérieur du Canada.
Entendre parler de ce projet et écouter votre témoignage aujourd'hui me fait penser à certains projets de réfection dans l’industrie nucléaire canadienne, notamment la remise en état des réacteurs CANDU, et chacun d'eux était plus efficace...
Je n'ai rien contre ces chantiers navals, mais quand deux entreprises sont essentiellement séparées par un continent, je dirais que cela entraîne des problèmes de rentabilité et de répétabilité, ainsi que des difficultés pour tirer des leçons des erreurs. Je sais que vous en avez parlé brièvement, mais ce sera certainement un énorme problème à l'avenir.
Avoir des chantiers navals qui ne construisent pas le même navire est sans contredit un facteur de hausse des coûts. Attribuer le contrat à deux chantiers navals différents augmente les coûts.
Outre les coûts, d'autres facteurs, notamment les retombées économiques régionales, entrent en compte dans le processus de décision, sur lequel je ne ferai aucun commentaire.
Avez-vous pu consulter les contrats ou les modalités pour connaître les pénalités pour dépassement de budget, retard de production ou autres conditions du genre?
Je ne me souviens pas s'il y avait des pénalités. Nous nous sommes concentrés sur les coûts, mais sans faire un examen minutieux du contrat. Je pourrais vous fournir une réponse à ce sujet plus tard.
Merci beaucoup, monsieur Giroux, de cette excellente discussion sur ce sujet.
À la page 8, vous formulez des hypothèses sur l'échéancier du projet. J'aimerais savoir sur quoi elles sont fondées et si vous avez eu des discussions, des échanges avec le MPO et SPAC, pour vous aider à formuler les hypothèses présentées dans le rapport au sujet de l'échéancier.
Nous nous sommes basés sur l'échéancier établi par le gouvernement dans ses annonces et ses déclarations, soit la mise à l'eau du premier navire d'ici 2030. Partant de cette annonce et de cet engagement, nous avons examiné, dans le contexte canadien, l'historique de la construction de navires de taille comparable et de taille différente, de navires destinés à des missions identiques, etc. Voilà comment nous avons estimé le début des travaux de construction en 2023‑2024. Nous avons aussi pris en compte la possibilité de retards, sachant que cela peut varier et que des changements sont possibles. Voilà pourquoi nous avons une analyse de sensibilité.
Quant à savoir si nous avons communiqué avec le MPO, la réponse est oui. Il s'agissait de nous assurer que nous n'étions pas dans l'erreur. Nous avons d'abord eu des discussions avec eux parce que nous avions besoin de certaines données ainsi que de réponses à certaines questions. Nous ne sommes pas des spécialistes de tous les domaines que nous examinons, mais notre but est de faire les meilleures évaluations possible.
Je m'excuse si la question a déjà été posée. Les taxes sont-elles incluses ou calculées pour ce projet? Si oui, à combien s'élève le montant estimé des taxes?
La question ne me surprend pas, mais je suis heureux que vous la posiez.
Nous avons inclus les taxes dans les estimations de coûts précédentes liées au MDN. Cela a suscité dans certains cercles des discussions parallèles quant à savoir s'il convenait d'inclure les taxes ou non, et si le MDN et le gouvernement sont assujettis aux taxes. Cela a donné lieu à une discussion secondaire qui n'était pas un élément central à l'objet du rapport, soit l'estimation des coûts.
Nous avons décidé d'exclure les taxes de cette estimation afin d'éviter une autre discussion sur la question de savoir si le gouvernement paie des taxes, s'il devrait en payer, s'il en reçoit, etc. On peut facilement s'enliser dans une conversation sans fin qui n'a rien à voir avec l'estimation des coûts.
Le Comité a abondamment discuté de construction navale et des brise-glaces. J'ai pour ainsi dire posé toutes les questions que j'avais sur ce projet. J'ai eu les réponses que je cherchais. Merci beaucoup de vos réponses et de vos observations.
J'aimerais poser quelques questions d'ordre général pour ceux qui suivent les travaux du Comité.
Le directeur parlementaire du budget pourrait examiner une multitude de questions et de sujets. Or, le temps et les ressources sont limités. Comment le directeur parlementaire du budget décide‑t‑il des questions à étudier? En quoi ce projet a‑t‑il attiré votre attention, pour ainsi dire?
C'est une question intéressante que l'on ne me pose pas souvent.
Il y a des choses que je suis tenu d'examiner, notamment les budgets, les prévisions budgétaires, etc. Je dois aussi répondre aux demandes formulées par les quatre comités nommés dans la loi habilitante du directeur parlementaire du budget. J'ai également tendance à accorder une grande importance aux demandes des autres comités. C'est habituellement en tête de liste.
Ensuite, je tiens compte de l'intérêt des parlementaires. C'est une combinaison: il y a l'intérêt des parlementaires et les choses qui viennent avec une grosse facture. Il y a beaucoup de montants en jeu; ce sont d'importantes sommes d'argent. Il y a donc deux critères: un montant élevé et l'intérêt des parlementaires de plusieurs partis.
Enfin, les demandes des divers parlementaires ou les mesures qui génèrent moins de recettes ont tendance à être plus bas dans la liste, malheureusement.
Monsieur Giroux, mon collègue M. Paul‑Hus a parlé tout à l'heure de problèmes systémiques en ce qui concerne les estimations des grands projets. Je ne discuterai pas les termes utilisés.
Une question m'est alors venue à l'esprit: dès l'annonce d'un grand projet ou à l'étape de sa préparation, le gouvernement serait-il plus avisé de faire appel à vos services en détaillant ce qu'est le projet et en vous demandant une étude de coût comparative? Cela ne serait-il pas une meilleure utilisation des taxes et impôts et une meilleure transparence?
Cela serait certainement possible pour ce qui est des coûts.
Quant aux détails du projet, ces données devraient nous être fournies, parce que je ne suis évidemment pas en mesure de déterminer l'ampleur ou la nature d'un projet. C'est une question qui ne relève pas de mes fonctions et dont je ne veux pas avoir à m'occuper non plus.
Si le gouvernement décidait de faire appel à nos services pour estimer le coût d'un projet dès le début, nous pourrions certainement le faire si nous avions en main des données solides et des données pertinentes.
Si l'on compare le travail fait en 2021 par rapport à celui fait en 2018 ou en 2017, il est légèrement différent parce que la qualité des données ne serait peut‑être pas tout à fait la même. C'est certainement un travail que nous pouvons faire, pourvu que nous ayons des données fiables et complètes dans la mesure du possible.
Est‑ce souhaitable? Cette question relève davantage des parlementaires que de moi. Bien entendu, si les parlementaires me demandent de faire ce genre de travail, je vais le considérer très sérieusement.
Je cherche toujours le meilleur moyen d'être efficace et de faire en sorte que nous ayons des prévisions budgétaires le plus précises possible.
C'est comme construire une maison, n'est-ce pas? Imaginez si je ne faisais pas de prévisions budgétaires et que j'estimais qu'elle me coûterait 100 000 $, mais que, finalement, elle me coûterait 500 000 $. Cela ferait mal!
Je vous remercie beaucoup, monsieur Giroux, de votre patience et de vos réponses. Vous avez bien éclairci tout ce dossier.
Je vous remercie tous les deux de l'important travail que vous faites. Il nous est très précieux.
Le renforcement de la capacité au Canada, la Stratégie nationale de construction navale et la mise en œuvre de cette stratégie sont des sujets qui me passionnent, mais je veux toujours m'assurer que nous sommes responsables sur les plans environnemental et social.
La question de l'heure dans ma circonscription est le démantèlement de navires, avec l'arrivée de bâtiments mis hors service, comme les traversiers de la Colombie-Britannique et des navires internationaux.
La question a été mise à l'avant-plan par un dirigeant local, M. Daniel Arbour, du district régional de la vallée de Comox, et par une ONG internationale, la NGO Shipbreaking Platform.
Nous comprenons que le démantèlement et le recyclage des navires sont nécessaires, mais il s'agit d'activités dangereuses qui comportent des risques élevés pour l'environnement et la main-d'œuvre. Nous devons établir une nouvelle norme internationale, comme la Convention internationale de Hong Kong sur le recyclage sécuritaire et écologique des navires, la Convention de Bâle et le Règlement de l’Union européenne relatif au recyclage des navires, qui démontrent les lacunes des politiques et de la réglementation du Canada en matière de démantèlement de navires. Il est essentiel d'investir des fonds publics dans des installations de démantèlement de navires qualifiées pour les aider à respecter les nouvelles normes et dispositions réglementaires.
Dans votre travail, avez-vous calculé les coûts de la mise hors service du Louis S. St‑Laurent et, aussi, des navires que nous construirons? Est‑ce compris dans les coûts pour veiller à ce qu'à la fin de leur vie utile, ces navires soient démolis selon des pratiques écologiques, durables, responsables et conformes aux normes internationales?
Nous avons examiné les coûts d'acquisition des deux navires supplémentaires, mais pas les coûts du prolongement de la vie utile du Louis S. St‑Laurent ni de sa mise hors service, car cela ne faisait pas partie de la portée de ce rapport. Nous n'avons pas non plus examiné les coûts d'exploitation et d'entretien des deux navires nouvellement acquis. Je suis conscient qu'il s'agirait de coûts importants, sur une durée de vie de 40 ans, mais nous avons seulement examiné les coûts d'acquisition de ces deux nouveaux brise-glaces polaires. Il n'y a rien au sujet du Louis S. St‑Laurent.
Selon vous, devrait‑on au moins inclure les coûts de mise hors service dans le coût total de ces navires pour éviter de les léguer aux générations futures? C'est ce qui arriverait si nous ne le faisions pas et que nous étions irresponsables.
Nous voulons développer [difficultés techniques] et construire plus de navires ici, au pays, mais c'est un aspect que l'on tend à négliger, à mon avis.
Je suis tout à fait de votre avis: ces navires doivent être mis hors service de manière responsable. Je pense que les coûts de mise hors service des deux nouveaux brise-glaces polaires devraient probablement être inclus dans les coûts d'exploitation et d'entretien pour la vie utile prévue de 40 ans, durée qui pourrait être prolongée grâce à une remise à neuf. Par conséquent, on parle ici de coûts futurs, dans 40 ans au minimum, peut-être 50 ans ou plus.
Cependant, il va sans dire que lorsqu'il décide d'acquérir de nouveaux navires, le gouvernement devrait prendre en considération que ces navires devront être mis hors service et démolis correctement pour s'assurer qu'ils ne représentent aucune menace pour l'environnement.
Concernant les commentaires de M. Johns, je pense qu'il faut être conscient qu'on parle du Canada, ici. Ces navires seront probablement en service pendant 120 ans, pas seulement 40.
J'ai lu le rapport que vous avez publié — cette semaine, je crois — au sujet du plan national de garde d'enfants. Pouvez-vous me présenter les grandes lignes à ce sujet?
On indique, à la page de résumé, qu'en fonction du financement annoncé par le gouvernement dans le budget, nous aurons 182 000 places « de moins que ce qui serait nécessaire pour répondre à la demande de places en garderie agréée en vertu de la politique ».
Pouvez-vous nous expliquer cela? Qu'est‑ce que cela signifie, exactement? Cela signifie‑t‑il simplement que le programme est sous-financé, que les projections de coûts du gouvernement ne sont pas assez élevées?
C'est seulement pour le fédéral. Qu'en est‑il de la contrepartie provinciale?
Nous avons regardé ce qui s'est passé dans certaines administrations du pays qui ont réduit les frais de garde d'enfants, notamment le Québec. Nous avons aussi regardé la demande en fonction des données démographiques relatives au groupe d'âge qui fréquente les garderies et à la croissance démographique anticipée pour les prochaines années. Nous avons également regardé les coûts actuels et la demande, la demande non satisfaite et la demande, et nous sommes arrivés à une estimation qui, selon le financement actuel...
La baisse des frais entraînera une hausse de la demande, comme cela s'est produit au Québec ces dernières années. Prenant en considération les montants annoncés et réservés ainsi que les ententes avec les provinces, nous estimons qu'avec ce financement, il manquera environ 182 000 places en équivalent temps plein en garderie, à ce niveau de prix.
Je voudrais revenir rapidement sur les comptes publics. Nous affichons une dette portant intérêt qui s'élève à 1,4 billion de dollars, et le gouvernement dit que le Canada a le plus faible ratio de la dette nette au PIB parmi les pays du G7, mais si l'on considère la dette brute, si l'on déduit l’actif du RPC et du RRQ déjà réservé pour les aînés que le gouvernement comptabilise... Lorsqu'on prend la dette brute, nous sommes au 4e rang du G7 et au 25e ou 29e rang parmi les pays de l'OCDE. Selon vous, devrions-nous utiliser les chiffres bruts, étant donné que l'argent du RPC et du RRQ est mis de côté pour les aînés?
C'est une bonne question qui fait l'objet de débats parmi de nombreux économistes et les gens qui surveillent les finances publiques.
La raison pour laquelle les actifs du RRQ et du RPC sont inclus, c'est que d'autres pays ont également des obligations envers leurs retraités dans le cadre de programmes très semblables au RPC et au RRQ, mais sans avoir capitalisé d'avance, du moins en partie, certaines de ces obligations.
[Inaudible] investissent l'argent dans des obligations provinciales et des obligations d'État, ce qui leur permet d'avoir des débits/crédits nets et d'avoir une position plus claire, comparativement à la nôtre, qui consiste à acheter des actifs naturels.
Certains pays inscrivent simplement dans leurs livres une reconnaissance de dette sans avoir réservé des fonds. Voilà pourquoi cela suscite un débat, car, d'une part, ces pays ne mettent pas vraiment d'argent de côté. D'autre part, au Canada, les actifs du RPC et du RRQ sont inclus pour réduire la dette nette, mais ces actifs ne sont pas vraiment contrôlés par le gouvernement, puisqu'ils sont réservés à des fins précises. Pour faire une réponse courte, je pense que nous devons tenir compte à la fois de la dette nette et de la dette brute pour avoir un portrait exact.
Je veux simplement remercier rapidement M. Penney et le Bureau du directeur parlementaire du budget de tout leur travail sur les brise-glaces.
Qu'est‑ce que le Comité devrait surveiller d'ici six mois? Quels signaux d'alarme devrions-nous surveiller? Les deux conceptions différentes ou les retards? Avez-vous des réflexions à ce sujet?
Je pense qu'il convient de surveiller si on prévoit que les délais seront respectés, à cette étape d'avancement du projet, car souvent, les retards peuvent entraîner des hausses de coûts.
J'aimerais lire quelque chose en guise de précision aux propos de M. McCauley au tour précédent. « Concernant le Rapport sur les résultats ministériels du Conseil du Trésor, on indique que les grands ministères ont dépassé les cibles quant au maintien d'un système de contrôles internes pour atténuer les risques pour les programmes, les opérations et la gestion des ressources, et que les présentations au Conseil du Trésor indiquent de manière transparente le risque financier pour aider le Cabinet dans la prise de décisions. Concernant les coûts de consultation, le sous-investissement passé a entraîné l'accumulation d'une importante dette technique alors que l'infrastructure informatique vieillit. Les systèmes logiciels vieillissants peuvent être coûteux à entretenir, risquent d'avoir des défaillances de performance et sont sujets à des interruptions de service. Grâce aux investissements récents dans les mises à niveau critiques et la modernisation de l'infrastructure de TI du Canada, nous avons fait des progrès constants. »
Pourriez-vous parler de l'importance d'investir dans la modernisation de la capacité en matière de TI et des dures leçons tirées des actions du gouvernement précédent, qui a utilisé les transformations numériques comme exercices de réduction des coûts qui ont pour effet d'imposer des coûts plus élevés aux contribuables, à terme, et qui ont nui à la fonction publique?
Je ne pense pas pouvoir rendre justice à votre question si j'essayais d'y répondre, puisque je ne suis pas expert en TI et informatique et que je n'ai pas examiné cet aspect récemment. Il me serait très difficile de déterminer si les investissements en TI sont adéquats ou suffisants sans être un expert ou sans avoir examiné la question.
Je sais, pour avoir travaillé des années à l'ARC — où le sous-commissaire a fait des merveilles pour maintenir les systèmes fonctionnels —, que ces systèmes sont d'une importance capitale. Je ne peux toutefois fournir, au‑delà de cette anecdote, une réponse réfléchie ou plus complète. Je suis désolé.
En conclusion, j'aimerais dire, venant moi-même de la côte Est, que je trouve ce projet extraordinairement important et que je suis consciente que par rapport à la question des coûts, il a été difficile de trouver un navire de capacité comparable à notre navire amiral actuel, le Louis S. St‑Laurent. Ensuite, c'est un véritable défi d'intégrer cela à la recherche scientifique multidisciplinaire passionnante liée au nouveau navire proposé afin de le doter d'une capacité de déglaçage lui permettant vraiment de naviguer jusqu'au pôle Nord. Cela dit, j'espère que ce projet commencera le plus tôt possible.
Je n'ai pas d'autres questions. Vous avez fait preuve d'une grande patience sur la question de l'analyse des coûts.
Je tiens également à remercier M. Giroux, M. Penney et M. Elmarzougui.
Je vous remercie d'être restés avec nous pour les deux heures et d'avoir répondu à toutes ces questions. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants.
J'aimerais également remercier les interprètes et les techniciens d'être venus aujourd'hui et de nous avoir aidés à assurer le bon déroulement de cette réunion virtuellement et en personne. Merci à toutes et tous.
Merci beaucoup, chers collègues. Nous avions promis de respecter l'horaire, et il reste cinq minutes.