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OGGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


NUMÉRO 045 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 décembre 2022

[Enregistrement électronique]

(1600)

[Traduction]

    Bienvenue à tous. Nous allons commencer.
    Il s'agit de la 45e réunion du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes, également connu comme le puissant comité OGGO.
    Nous avons une réunion écourtée aujourd'hui. Nous allons tenir deux séances de 45 minutes. La première se déroulera avec nos témoins, MM. Ossowski et Manji. M. Manji comparaît virtuellement.
    Monsieur le greffier, pouvez-vous me confirmer que M. Manji et tous ceux qui participent virtuellement à la séance ont vérifié le son?
    Oui, monsieur le président.
    Merveilleux.
    Nous allons commencer par deux allocutions préliminaires de cinq minutes.
    Monsieur Ossowski, pourriez-vous lancer le bal pour nous, s'il vous plaît? Nous n'avons pas beaucoup de temps, alors je vais vous arrêter à cinq minutes pile.
    Je vous remercie.
    Bonjour. Je m'appelle John Ossowski et jusqu'au 24 juin 2022, j'étais président de l'Agence des services frontaliers du Canada.
    Comme je me présente devant vous aujourd'hui...

[Français]

     Excusez-moi, monsieur le président, mais il n'y a pas d'interprétation.

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur Ossowski. Pourriez-vous essayer de nouveau?
    Bonjour. Je m'appelle John Ossowski et jusqu'au 24 juin 2022, j'étais président de l'Agence des services frontaliers du Canada.
    Comme je me présente devant vous aujourd'hui en tant que simple citoyen, je rappelle aux membres du Comité que je n'ai plus accès aux renseignements ministériels sur les contrats ou les finances de l'application ArriveCAN. Je remarque d'ailleurs que vous avez déjà rencontré des responsables du ministère qui ont fourni cette information.
    Je pense qu'il est important que le Comité se souvienne de l'environnement opérationnel d'avril 2020, lorsque nous avons reçu un appel de nos collègues de l'Agence de la santé publique du Canada pour produire une application leur permettant de recueillir des renseignements sur les voyages et la santé. Rappelons qu'à la fin du mois d'avril 2020, 100 000 personnes dans le monde étaient déjà décédées des suites de la COVID‑19 et que les infections au Canada touchaient environ 30 000 personnes. C'était une période de grande incertitude et le besoin était urgent.
    Malgré les restrictions à l'entrée en vigueur à ce moment‑là, environ 70 000 voyageurs exemptés sont arrivés par avion en avril 2020, comparativement à près de 3,2 millions en avril 2019. Jusqu'à ce moment‑là, les voyageurs devaient répondre verbalement aux agents de l'ASFC pour démontrer qu'ils se conformaient à la myriade de règles établies par divers décrets. Cette situation, combinée à la nécessité de la distanciation sociale, a transformé les aéroports en endroits chaotiques. Des documents étaient distribués aux voyageurs pour saisir les renseignements relatifs à la recherche des contacts et aux plans de quarantaine. Il s'agissait de données essentielles pour les responsables de la santé publique, tant à l'échelle fédérale qu'à l'échelle provinciale, qui cherchaient désespérément à savoir qui entrait au pays et où chaque personne allait.
    Au début, l'ASFC recueillait d'énormes volumes de documents et le gouvernement devait relever le défi de convertir les renseignements en données électroniques utilisables et communicables, un processus qui prenait plus de sept jours. Il était essentiel, pour ralentir la propagation du virus, que les représentants fédéraux et provinciaux de la santé aient accès à ces données en temps opportun. Je me rappelle par ailleurs que le temps de passage moyen par voyageur pouvait atteindre sept minutes. Vous vous souvenez peut-être aussi qu'au cours des premiers mois de la pandémie, on craignait que le virus survive sur le papier pendant de longues périodes.
    Ainsi, il était clair pour tout le monde que nous avions besoin de toute urgence d'une solution numérique évolutive qui aiderait les voyageurs ainsi que les autorités sanitaires.
    Heureusement, l'ASFC disposait de cette expérience initiale en matière d'applications mobiles dans un contexte frontalier. Nous envisagions en effet depuis un certain temps déjà des approches similaires avec nos collègues du Groupe des cinq sur la frontière afin d'accélérer le traitement des voyageurs à la frontière. L'ASFC avait néanmoins besoin d'un soutien extérieur pour faire progresser l'application rapidement. Ainsi, les mesures sanitaires ont été continuellement ajustées, et ce fut également le cas de l'application, pour laquelle plus de 70 versions ont été produites et déployées pour les systèmes d'exploitation iOS d'Apple et Android ainsi que les plateformes Web. Beaucoup d'entre elles représentaient des changements fondamentaux qui nécessitaient un recodage important.
    Comme l'Agence de la santé publique du Canada était propriétaire d'ArriveCAN, nous avons suivi ses directives en ce qui concerne les exigences et l'ASFC a transmis toutes les données recueillies pour qu'elles soient communiquées aux provinces, qui avaient désespérément besoin de cette information. Au fil du temps, l'ASFC a intégré de nouveaux éléments, notamment l'intelligence artificielle ainsi que la capacité de valider en temps réel les codes QR provinciaux, pour aider à valider les certificats prouvant la vaccination des ressortissants étrangers, mais également pour faciliter la tâche des citoyens canadiens. Concernant ces derniers, notre confiance envers leurs certificats était élevée.
    Comme l'application était liée aux passeports, aux certificats de vaccination provinciaux et aux systèmes de l'ASFC en temps réel, de nombreux voyageurs n'ont jamais eu à répondre à des questions sur ArriveCAN ou sur leur état de santé. Ce que les agents des services frontaliers ont plutôt vu, pour les quelque 30 millions de demandes soumises par 60 millions de voyageurs, c'est un crochet vert affiché à l'écran les informant que toutes les exigences sanitaires à la frontière avaient été respectées parce que l'application avait fourni et validé l'information à l'avance. Les agents ont ainsi pu se concentrer sur la centaine de textes législatifs et réglementaires qu'ils administrent au nom d'autres ministères.
    Par la suite, la même approche a été appliquée du côté commercial. Nous avons intégré une fonction permettant aux personnes qui traversent fréquemment la frontière de sauvegarder leur profil. De cette façon, ces dernières n'avaient pas à répondre à nouveau à l'ensemble des questions à chaque passage. Chaque version de l'application a nécessité l'examen minutieux de centaines de scénarios, de tests de régression, d'accessibilité, de sécurité, d'approbations par les boutiques d'applications, de liens avec les nombreux systèmes ministériels.
    Comme je l'ai mentionné précédemment, nous avons étudié, avec nos collègues du Groupe des cinq sur la frontière, des technologies comme ArriveCAN pour mieux gérer les risques et améliorer le débit dans les aéroports. C'est quelque chose que l'industrie aérienne réclamait depuis un certain temps déjà. D'ailleurs, même si l'application est facultative, elle est utilisée tous les jours pour remplir la déclaration préalable, ce qui permet encore aujourd'hui d'accélérer le traitement des passagers à l'aéroport.
    Le budget de 2021 prévoyait un financement destiné à l'ASFC pour la modernisation des programmes pour les voyageurs. J'encourage d'ailleurs les membres du Comité à visionner une courte vidéo à ce sujet sur le site Web de l'ASFC. J'ai donné le lien au greffier du Comité.
    En terminant, j'aimerais dire que je suis incroyablement fier de la façon dont l'Agence a répondu à l'appel à l'aide des collègues de l'Agence de la santé publique du Canada. Je suis également fier de la façon dont l'Agence a aidé les provinces et les territoires, ainsi que l'industrie aérienne. Finalement, je me réjouis que des technologies comme celle‑ci soient utilisées pour continuer d'améliorer l'expérience des voyageurs tout en assurant la sécurité de nos frontières.
    Monsieur le président, je serai ravi de répondre aux questions des membres du Comité.
    Je vous remercie.
    Monsieur Manji, vous disposez de cinq minutes pour faire une allocution préliminaire.
(1605)
    Bonjour et merci de me recevoir ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Zain Manji et je suis l'un des cofondateurs de Lazer Technologies.
    Lazer Technologies est un studio d'ingénierie et de conception qui aide de jeunes entreprises connaissant une croissance rapide ainsi que de grandes organisations bien établies à concevoir et à lancer d'incroyables expériences et produits numériques. Parmi les entreprises que nous avons aidées, mentionnons Shopify, la RBC Banque Royale, Météomédia, Canadian Tire et Loyalty One. Nous avons travaillé à des projets dans divers secteurs, notamment les soins de santé, le commerce électronique, les finances, la cryptographie et le jeu.
    Lorsque nous travaillons avec des entreprises, nous nous concentrons surtout sur les volets ingénierie et conception, ce qui englobe, entre autres, la découverte des produits, l'établissement des spécifications IU/EU, le maquettage conceptuel, des conceptions haute-fidélité, la conception de l'architecture, la planification de feuilles de route, l'étape de l'exécution, par exemple, l'infrastructure d'arrière-plan, l'ingénierie préliminaire et le processus de développement et d'exploitation et des stratégies de mise en marché.
    En plus d'aider ces grandes entreprises, nous concevons nos propres produits. Nous avons notamment mis au point un robot conversationnel qui permettait de texter un code postal à un numéro de téléphone, qui renvoyait les trois à cinq endroits les plus proches où obtenir le vaccin contre la COVID‑19. Grâce à ce produit, nous avons aidé plus de 150 000 Canadiens à trouver des centres de vaccination partout au Canada.
    Je travaille dans le milieu de la technologie depuis plus de 10 ans en tant qu'ingénieur en logiciels et chef de produit. Avant de cofonder Lazer, j'ai travaillé chez Google, Yelp et Instagram. Je suis titulaire d'un baccalauréat en sciences informatiques et en économie de l'Université de Toronto.
    À mon avis, si j'ai été invité ici aujourd'hui, c'est parce que nous avons recréé en deux jours l'application ArriveCAN après avoir lu dans le Globe and Mail que sa mise au point avait coûté environ 54 millions de dollars. Nous voulions en effet montrer avec quelle rapidité la partie frontale d'une application de ce genre peut être créée et avec quelle efficacité les capitaux peuvent être utilisés si les bonnes personnes participent au processus.
    Nous croyions que nous pouvions ainsi lancer une discussion sur les moyens d'améliorer la façon dont le Canada crée de nouvelles technologies. Comme nous faisons partie intégrante du milieu technologique du Canada, nous souhaitions aussi montrer qu'il s'y trouve des talents exceptionnels enthousiastes à l'idée d'aider leur pays au besoin.
    Nous avons notamment pu le constater il y a deux ans, lorsque des ingénieurs de Spotify ont créé gratuitement une application de recherche de contacts, puis, il y a un an, lorsque nous avons mis au point gratuitement l'application qui a aidé à trouver des centres de vaccination contre la COVID‑19.
    Je suis heureux que le gouvernement accorde une plus grande priorité au numérique. J'espère que nous pouvons accroître la transparence et l'efficacité des projets numériques du Canada. J'espère aussi que nous pouvons travailler en vue d'avoir la structure, les équipes, les ressources, les outils et les cadres nécessaires pour mettre au point les meilleures technologies pour les Canadiens.
    En définitive, nous aimerions que le Canada devienne le pays le plus compétent sur le plan technologique en plus de devenir un exemple à suivre en matière de conception de technologies efficaces.
    Merci.
    Merci infiniment d'avoir été plutôt concis.
    Monsieur Barrett, nous allons commencer avec vous pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être ici.
    Monsieur Ossowski, je vais vous poser quelques questions aussi rapidement que possible. Je vais surtout parler de votre rôle lorsque vous travailliez pour l'ASFC.
    Avez-vous eu des contacts avec Kristian Firth de GC Strategies dans ce rôle?
    Non.
    Savez-vous qui, dans votre structure hiérarchique, aurait traité avec M. Firth, s'il y a eu des interactions?
    Je n'en saurais rien.
    D'accord.
    Avez-vous ou avez-vous eu une relation de travail avec Marc Brouillard?
    Est‑il au Secrétariat du Conseil du Trésor?
    Je crois qu'il est le dirigeant principal de l'information.
    Je connais M. Brouillard depuis des années, oui.
    Avez-vous eu des contacts par rapport à ce projet d'ArriveCAN en particulier?
    Non.
    Avez-vous eu des conversations à propos de GC Strategies?
    Non.
    D'après vous, quand avez-vous informé le ministre pour la première fois au sujet d'ArriveCAN?
    Il faudrait que je retourne en arrière. Je suis sûr que le ministère a un registre à ce sujet, mais c'était au début d'avril, après que l'Agence de la santé publique nous a appelés pour nous demander de développer l'application. Cet appel est venu assez rapidement, étant donné les masses de documents.
    Nous aurions donné certains avis. Nous avions l'idée de créer ce que j'appellerai une « application simple et rapide » pour commencer à saisir ce type de renseignements de base. Nous leur aurions conseillé d'adopter cette approche.
    Je répète que toutes ces exigences opérationnelles émanaient de l'Agence de la santé publique. Nous étions essentiellement l'entrepreneur général pour ce projet.
(1610)
    Avez-vous discuté de marchés de services avec le ministre pendant ces séances d'information?
    Non, jamais.
    À votre connaissance, à quelle fréquence auriez-vous informé le ministre sur ArriveCAN?
    Je pense que c'était plutôt sommaire, du genre: « Nous avons une solution à ce problème », et nous l'avons lancée. Si ma mémoire est bonne, nous avons fait un lancement discret environ une semaine avant le lancement à l'échelle nationale.
    Le processus aurait été très itératif à l'époque, nous nous réunissions régulièrement et nous discutions de nombreux autres problèmes concernant la frontière.
    La communication de l'information aurait-elle été plus fréquente entre vous ou l'un de vos subordonnés directs et le personnel du cabinet du ministre, surtout en ce qui concerne ArriveCAN?
    Si la réponse est oui, ma prochaine question sera de savoir si l'une de ces discussions aurait porté sur des marchés de services.
    Je n'en sais rien.
    Il est certain que mes spécialistes de l'informatique et le personnel de la Direction des voyageurs auraient collaboré avec nos collègues de l'Agence de la santé publique pour déterminer les mesures qu'il était possible de mettre en place.
    D'accord.
    Connaissez-vous GC Strategies?
    Pas du tout.
    Vous dites « pas du tout ». Vous n'en avez aucune connaissance dans votre rôle à l'ASFC ou dans votre emploi après votre départ de la fonction publique?
    Je n'en ai aucune.
    L'ASFC a‑t‑elle travaillé avec SPAC pour rédiger le marché de services relatif à ArriveCAN?
    Je crois comprendre, et je pense que vous avez entendu ce témoignage parce que je l'ai moi-même écouté, que des marchés de services étaient déjà en place, au titre desquels ils ont accordé des autorisations de tâches initiales, puis ils sont passés par un processus de demande de propositions plus officiel, ou un processus de sélection, par la suite.
    Je ne connais pas le déroulement en détail, parce que, bien honnêtement, je n'avais pas à m'en soucier.
    Lorsque vous avez parlé de livrer quelque chose rapidement pour le ministre, cette « application simple et rapide », était-elle élaborée à l'interne ou par des entrepreneurs externes?
    Je pense que nous avions probablement quelques entrepreneurs externes à l'époque, mais je pense qu'il vaudrait mieux poser ces questions au ministère.
    Il vaudrait mieux poser ces questions au... Je suis désolé.
    Il vaudrait mieux les poser au ministère.
    D'accord.
    À quelle fréquence communiquiez-vous avec SPAC à propos d'ArriveCAN?
    Je n'ai jamais communiqué avec SPAC à propos d'ArriveCAN.
    À l'ASFC, qui aurait été responsable de la gestion de ce projet?
    Je le répète, les exigences opérationnelles ont été établies par l'Agence de la santé publique, et toute forme de travail en sous-traitance qui était fait — parce qu'au départ, nous avions...
    Je peux vous décrire un peu le processus, si vous voulez.
    Allez‑y.
    Dans les phases initiales, en tant que responsable opérationnelle, l'Agence de la santé publique allait supporter les coûts du projet. Comme elle ne disposait pas des ressources nécessaires, nous avons apporté une contribution non financière à son développement initial, puis elle a cherché à obtenir des ressources au moyen du processus parlementaire habituel.
    Elle l'a payée, puis nous étions essentiellement, comme je l'ai dit, l'entrepreneur général pour l'application.
    Je veux être sûr de bien comprendre: en fournissant ce soutien, c'est la capacité interne de l'Agence des services frontaliers du Canada qui a fait ce travail pour l'ASPC, qui ne disposait pas de la capacité. Est‑ce exact?
    Il s'agit de l'Agence de la santé publique.
    Je suis désolé...?
    C'est l'Agence de la santé publique.
    Oui, mais ma question est la suivante: est‑ce que l'ASFC...? Vous avez dit que l'ASFC...
    Oui, nous avons créé la première version et je pense que vous avez entendu un témoignage selon lequel elle a coûté environ 80 000 $. Je ne peux pas vous dire si tout a été fait à l'interne ou si des entrepreneurs ont apporté leur contribution.
    D'accord. C'était ma question.
    Je pense qu'il me reste environ 10 secondes.
    Il vous reste 18 secondes.
    D'accord. Nous verrons si nous avons une autre occasion de poser deux ou trois autres questions.
    Merci infiniment pour vos réponses brèves.
    Très bien.
    Merci, monsieur Barrett.
    Monsieur Housefather, je crois que c'est votre tour. Vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence parmi nous, messieurs Ossowski et Manji.
    Monsieur Manji, je vais commencer par vous.
    Je pense que le marathon de codage, ou le travail que vous avez effectué — je viens moi aussi du milieu de la technologie — a vraiment été mal interprété et mal décrit.
    Permettez-moi de vous demander ceci: avez-vous déjà affirmé que le coût total d'ArriveCAN — pas seulement les coûts de développement, mais la totalité des coûts — aurait pu se limiter à 250 000 $?
    Avez-vous déjà dit cela?
    Non. Ce n'était pas moi, ou nous.
    Vous avez entendu des députés et des membres de ce comité intervenir à la Chambre et faire cette affirmation. Je suis heureux que vous ayez fait la lumière sur ce point.
    Bien sûr, vous comprenez aussi que les coûts de développement ne représentent pas tous les coûts différents associés à une application. Nous ne parlons pas...
(1615)
    Oui. Il y a les coûts de développement, puis il y a le service client et tout un lot d'autres coûts connexes.
    En ce qui concerne l'application elle-même, nous avons parlé de cette application, et nous en avons beaucoup entendu parler à ce comité. Il y avait une version originale, puis elle a fait l'objet d'environ 70 mises à jour différentes.
     Lorsque vous avez réalisé le marathon de codage de la partie frontale de l'application, êtes-vous passé par 70 versions différentes, d'une mise à jour à l'autre, ou avez-vous simplement pris la 71e version — en supposant qu'il y en ait eu 71 — puis reproduit le système frontal?
    Oui, nous avons pris la dernière version et nous avons reproduit complètement le système frontal.
    Ce n'est pas du tout la même chose que de prendre une version originale, puis de passer par 70 mises à jour différentes. C'est exact?
    C'est exact.
    Vous n'avez pas non plus fait d'essais de régression avec chacune des 71 versions différentes. Est‑ce exact?
    Non, parce que nous n'avons fait qu'une version.
    Et si je comprends bien, vous n'avez pas non plus reproduit l'infrastructure dorsale. C'est exact?
    Nous n'avons pas touché à l'infrastructure dorsale.
    C'est probablement la partie la plus compliquée de ce type d'application. C'est exact?
    C'est difficile à dire, mais oui. Cela dépend.
    Dans ce cas, chacune des différentes versions devait fonctionner avec différents systèmes, qu'il s'agisse d'iOS ou d'Android, et devait être liée à tous ces différents systèmes de vaccination des gouvernements provinciaux et des États étrangers. Vous n'avez rien fait de tout cela. C'est bien cela? Vous ne vous occupiez pas de la sécurité ni de quoi que ce soit d'autre.
    Nous n'avons pas fait de versions, mais je ne connais pas non plus la définition de ces plus de 70 versions.
    C'est exact, mais vous n'avez jamais prétendu la connaître, et vous n'avez jamais prétendu l'avoir fait.
    Oui, c'est exact. Nous avons simplement créé une application, la partie frontale de l'application, en deux jours en imitant la dernière version de l'application.
    De même, vous n'avez pas fait de recherches sur les dispositions législatives en matière de protection de la vie privée ou sur d'autres aspects juridiques de la sécurité ou de la protection de la vie privée, n'est‑ce pas?
    Nous n'avons pas fait...
    C'est en rapport avec une application comme celle‑ci qui doit être conforme à la législation canadienne.
    Oui, nous n'avons pas fait de recherche.
    Vous n'avez pas tout traduit, ou l'avez-vous fait?
    Non, nous n'avons pas fait d'internationalisation.
    D'accord. Je vous remercie.
    Et vous n'avez pas fait de test d'utilisation pour voir si ce que vous avez fait était utilisable.
    Non.
    Donc, je pense que nous pouvons tous les deux convenir que ce que vous avez fait était utile. Cela montre que des développeurs canadiens sont là pour aider le gouvernement. Peut-être que les choses pourraient toujours être faites à moindre coût et mieux, mais votre objectif n'a jamais été de montrer que c'était une chose terrible qui aurait pu être faite pour une somme minuscule par rapport aux millions de dollars qui ont été dépensés.
    Non, cela n'a jamais été notre objectif. Notre objectif principal était de montrer qu'il y a des talents au Canada qui peuvent construire des applications comme celle‑ci, mais qu'à l'avenir, l'application pourrait être construite de manière plus rentable ou plus rapide.
    Merci.
    Puis‑je vous demander aussi si un député ou son personnel a contacté votre entreprise avant que vous ne participiez au marathon de codage?
    Non.
    D'accord. Vous l'avez fait sur la base de votre propre désir d'essayer de prouver un point.
    Oui.
    C'est parfait. Merci beaucoup.
    Monsieur le président, me reste‑t‑il du temps?
    Il vous reste deux minutes complètes, environ.
    Très bien, c'est excellent.
    Merci infiniment, monsieur Manji.
    Monsieur Ossowski, puis‑je me tourner vers vous?
    Merci beaucoup d'être venu. Vous savez, vous n'êtes plus dans la fonction publique, et c'est très gentil de votre part de venir au Comité sans disposer des ressources dont vous auriez disposé si vous étiez encore là pour parcourir des documents afin de nous aider.
    Pouvez-vous simplement préciser quelque chose? Je pense que vous avez répondu à M. Barrett sur ce point. Aucun politicien ne vous a jamais ordonné de conclure un marché avec une entreprise donnée pour ArriveCAN. Est‑ce exact?
    Tout à fait.
    Et vous n'êtes pas au courant — et vous l'auriez été — que des fonds ont été versés à des entreprises qui n'ont pas travaillé sur ArriveCAN. Est‑ce exact? Ce n'est pas ainsi que le système fonctionne.
    Non, absolument pas.
    Vous conviendrez que les personnes qui ont travaillé sur l'application au sein de votre ministère, de l'ASPC et de SPAC et tous les autres sont tous des fonctionnaires professionnels qui font toujours de leur mieux pour offrir les meilleurs produits aux Canadiens, même si nous faisons parfois des erreurs. Est‑ce exact?
    Tout à fait.
    La DPI de Sécurité publique a comparu devant nous et a déclaré que l'application, selon elle, a été créée de manière relativement rentable et qu'elle était très complexe, mais qu'en définitive, elle a comblé la plupart des besoins qu'elle devait combler. Êtes-vous essentiellement d'accord avec elle?
    Eh bien, j'irais même jusqu'à dire que si vous divisiez la somme consacrée au développement des 70 versions différentes que nous avons faites sur trois plateformes différentes, cela représente environ 125 000 $ par version, ce qui est très peu coûteux, à mon avis.
    Nous avons beaucoup appris au fur et à mesure. C'était du nouveau pour nous, pour être honnête. Nous avons commencé avec quelque chose de simple et rapide, puis c'est devenu très sophistiqué en fait de capacité à valider les tests PCR avant l'arrivée...
(1620)
    J'ai bien peur que nous devions nous arrêter là.
    Merci.
    Madame Vignola, vous avez la parole pour six minutes. Allez‑y, je vous en prie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mes premières questions s'adresseront à vous, monsieur Ossowski. Je vous remercie de comparaître ici, à titre personnel, aujourd'hui.
    Au mois de novembre dernier, des représentants fédéraux ont dit au Comité qu'un contrat relatif à l'accessibilité de l'application ArriveCAN avait été octroyé en vertu d'une exception relative à la sécurité nationale.
    Pourquoi un ministère utiliserait-il une exception relative à la sécurité nationale pour octroyer un contrat lié à l'accessibilité?

[Traduction]

    Je pense que les fonctionnaires du ministère, comme je le vois sur votre site Web, ont répondu à cette question.
     Tout simplement, pendant la COVID, Services publics et Approvisionnement Canada a dit qu'à l'étape de la demande de propositions, vous pouviez être dispensé des exigences en matière de sécurité nationale, mais qu'avant de commencer tout travail ou d'obtenir toute autorisation de tâche, les habilitations devaient être en place.

[Français]

     Est-il usuel de demander une exception relative à la sécurité nationale, que ce soit en temps de pandémie ou non, pour une question d'accessibilité?

[Traduction]

    Ce n'est pas pour des raisons d'accessibilité. Je pense que c'était vraiment à cause de la COVID et la disponibilité du personnel pour s'occuper de la partie du processus consacré à l'habilitation.

[Français]

    Merci.
    À votre connaissance, de quelle façon le ministère détermine-t-il la cote de sécurité d'un sous-traitant? Un sous-traitant doit-il automatiquement avoir une cote de sécurité? Si oui, comment est-elle déterminée?

[Traduction]

    Je pense que vous êtes mieux placée pour poser cette question à Services publics et Approvisionnement Canada. C'est le ministère qui est chargé du programme d'habilitation de sécurité pour les entrepreneurs.

[Français]

    D'accord.
    Une somme de 4 millions de dollars a été consacrée à l'hébergement de l'application pour une période d'environ 18 mois.
    Selon votre expérience, est-ce un coût normal, bas ou élevé?

[Traduction]

     Je n'ai aucun point de référence pour déterminer ce qui est raisonnable. Je pense que nous avons eu un rapport qualité-prix incroyable, compte tenu du contexte dans lequel nous opérions et du besoin auquel elle répondait. À mon avis, je pense que c'était un rapport qualité-prix exceptionnel, mais je n'ai pas de point de référence, car nous n'avions jamais rien fait de tel.

[Français]

    Êtes-vous en mesure de comparer les coûts de développement d'applications d'avant la pandémie et ceux qui ont eu cours pendant la pandémie?

[Traduction]

    Avant la pandémie — et je l'ai dit dans mon allocution d'ouverture à l'égard de mes collègues du Groupe des cinq pour la frontière, soit le Canada, les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni —, nous cherchions tous à savoir comment mieux gérer les risques, compte tenu de l'environnement dans lequel le nombre de voyageurs et de marchandises augmentait et la rapidité augmentait. Nous avons tous cherché, et c'est un concept très fondamental, à repousser la frontière, à obtenir le plus de données possible à l'avance afin de réduire le temps d'interaction des agents avec les voyageurs. En définitive, cela aiderait les agents à prendre de meilleures décisions à savoir qui doit entrer dans le pays ou ce qui doit y entrer. C'est dans cette optique que nous avons envisagé la question.
     Lorsque la pandémie a frappé, je disposais d'une équipe informatique très compétente, qui a perçu ce besoin par suite de l'appel de l'Agence de la santé publique. Nous avons mis en place ce système, comme je l'ai dit, de façon très rapide et grossière au début, mais l'application est finalement devenue un programme très sophistiqué qui a réduit le temps d'interaction des voyageurs avec les agents et a fourni en temps réel des renseignements incroyablement opportuns aux agents pour les aider à prendre de meilleures décisions et à fournir des données aux autorités sanitaires provinciales. Ces autorités voulaient savoir d'où venaient ces personnes, si elles avaient une option de quarantaine et si elles allaient être gérées de façon appropriée.
(1625)

[Français]

    Nous avons reçu des documents liés à ArriveCAN, mais ils datent de 2017, c'est-à-dire de trois ans avant la pandémie.
    Qu'est-ce qui explique que, trois ans avant la pandémie, on ait donné des contrats en lien avec ce qui va devenir éventuellement ArriveCAN?

[Traduction]

    Monsieur le président, je pense que c'est une question pour le ministère.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Manji, je vais vous poser aussi la question concernant les coûts d'hébergement de l'application.
    Selon votre propre expérience, une somme de 4 millions de dollars représente-t-elle un coût bas, normal ou élevé pour l'hébergement des données d'une application comme ArriveCAN sur 18 mois?

[Traduction]

    C'est à l'extrémité moyenne à élevée du spectre.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Merci, madame Vignola.
    Je cède maintenant la parole à M. Johns pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Il y avait des points en suspens lors de la dernière réunion que j'aimerais régler, si vous le permettez, monsieur le président.
     Je demande à nos témoins de m'excuser. Je dois déposer une motion que j'ai présentée, et que je veux expliquer au Comité pourquoi je la dépose.
    Vous savez que le gouvernement se procure encore des fournitures pour le système de soins de santé et je crois qu'il est prudent de nous demander comment nous pouvons soutenir une industrie nationale résiliente comme source de fournitures essentielles, notamment d'équipement de protection individuelle. Nous venons tout juste d'adopter le Budget supplémentaire des dépenses (B) qui prévoyait environ 136 millions de dollars de dépenses proposées pour des fournitures destinées au système de soins de santé...
    Je suis désolé, mais lorsque vous aurez terminé, pourriez-vous lire le texte de votre motion, s'il vous plaît?
    Je le ferai, bien sûr.
    Au début de la pandémie, notre pays ne disposait pas d'une quantité suffisante d'équipement de protection individuelle et nous avons eu du mal à nous en procurer à une époque où la demande mondiale était élevée. Le gouvernement a encouragé les industries canadiennes à contribuer à combler la demande de ces produits et de nombreuses petites et moyennes entreprises ont commencé à produire des EPI.
    Ces entreprises ont investi pour aménager leurs installations, créer des produits innovants comme des masques et des respirateurs plus respirants et durables, et employer des Canadiens. Malheureusement, un grand nombre de ces entreprises ont depuis fermé leurs portes ou risquent de le faire parce que le gouvernement a attribué des marchés à des multinationales au lieu de soutenir cette industrie nationale émergente.
     Je vais vous donner un exemple. Dave Brimacombe, qui possède la distillerie Wayward à Courtenay dans ma circonscription, est un vétéran à la retraite qui travaille très fort. Il a fait don de 75 000 $ de désinfectant pour les mains aux travailleurs de la santé locaux et aux premiers intervenants. Il a fait ce don. Plus tard, un sous-traitant de Loblaws a retenu ses services pour fournir ce produit. Puis, le Canada a commencé à faire venir un approvisionnement étranger de désinfectant pour les mains, ce qui a inondé le marché et fait baisser les prix. Puis, le fournisseur de Loblaws a soudainement annulé le contrat après lui avoir demandé d'augmenter la production. Dave a fini par supporter tout seul les 400 000 $ après être venu au secours des Canadiens.
     Je pense qu'il est dans notre intérêt national de veiller à ce que nous ayons une industrie des EPI résiliente au Canada. Nous savons que les nouveaux variants de la COVID‑19 demeurent une menace et nous devons nous préparer aux futures pandémies. Si le Canada ne prépare pas sa propre industrie des EPI, il y a un risque qu'elle disparaisse. Nous devons nous assurer d'être prêts pour la sécurité nationale.
     Je crois qu'il serait bon d'utiliser le temps dont notre comité dispose pour entendre des fabricants nationaux d'EPI parler de l'état de l'industrie et des obstacles auxquels ils ont été confrontés dans le processus d'approvisionnement fédéral. Je crois que ce comité pourrait faire un travail précieux et opportun en formulant des recommandations sur la façon dont les pratiques d'approvisionnement peuvent mieux soutenir cette importante industrie nationale.
     Je vais lire la motion:
Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur le rôle joué par les activités d’approvisionnement du gouvernement fédéral pour favoriser la résilience de l’industrie nationale de l’équipement de protection individuelle; que le Comité tienne au moins trois réunions pour entendre des témoins; que le Comité demande à entendre le témoignage de la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, de tout fonctionnaire concerné et de représentants de l’industrie; que le Comité fasse rapport de ses recommandations à la Chambre et que, conformément à l’article 109 du Règlement, il demande au gouvernement de déposer une réponse détaillée au rapport.
    Merci.
    Cette motion est sujette à débat. Est‑ce que quelqu'un souhaite faire des commentaires, ou y a‑t‑il un appui général pour cette motion?
(1630)
    Soit nous avons un consensus, soit vous mettez la motion aux voix, monsieur le président.
    Si nous avons un consensus, nous considérerons que la motion est adoptée.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Monsieur Johns, il vous reste une minute et 20 secondes.
    Merci beaucoup, mesdames et messieurs. Je vous en suis vraiment reconnaissant, chers collègues.
     Monsieur Ossowski, je tiens d'abord à vous remercier pour les services que vous avez rendus au Canada. Je pense qu'on n'accorde pas suffisamment aux fonctionnaires le mérite qui leur est dû, notamment dans le cadre de la COVID et du nombre d'heures que vous avez consacrées à la protection des Canadiens.
     Vous avez entendu parler de GC Strategies et de la commission et du fait que ces gens gagnaient de 1,3 à 2,7 millions de dollars. Comme fonctionnaire, vous êtes loin d'avoir gagné autant. Ce sont des entrepreneurs qui ne sont même pas spécialisés en technologie.
     Pouvez-vous nous décrire vos impressions, comment vous voyez, sentez et comprenez l'indignation des Canadiens lorsqu'ils apprennent que des sous-traitants réalisent ce genre de volume d'affaires avec ces marges grotesques?
    Je ne peux pas vraiment me prononcer sur les marges. Je peux simplement dire qu'il est vraiment important pour nous d'avoir ces relations avec l'industrie parce qu'elle a une capacité qui lui est propre d'intervenir très rapidement et de nous aider à résoudre des problèmes de manière agile. Pour cette raison, nous payons une prime, mais je n'ai vraiment aucune idée de ce qui est un montant approprié ou non.
    Nous avons entendu le président national du Syndicat des douanes et de l'immigration qui a déclaré que les travailleurs de première ligne n'ont même pas été consultés au sujet de l'application. Ils doivent composer avec l'application jour après jour.
     Pouvez-vous nous parler de...? Leur frustration est justifiée.
    Je dirais simplement que, bien sûr, tout au début...
    Je vous rappelle encore une fois que c'était l'application de l'Agence de la santé publique. Elle en était responsable. Le syndicat ne travaille pas pour elle, il travaille pour nous.
     Dans une situation normale, le syndicat aurait été consulté. J'ai rencontré régulièrement M. Weber tout au long de son mandat, ainsi que son prédécesseur, M. Fortin. Nous avons systématiquement parlé de l'application. Nous avons reçu une rétroaction des agents et nous avons apporté des améliorations au fil du temps, mais ce n'était pas une situation normale.
    D'accord.
    Votre temps de parole est essentiellement écoulé, monsieur Johns.
    Nous allons maintenant entendre M. Barrett pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    L'application aurait-elle pu être produite pour moins?
    Moins que quoi? La première version de l'application, ou...?
    La version que nous avons aujourd'hui aurait-elle pu nous coûter moins cher?
     Je pense que si l'on considère la complexité des systèmes dorsaux, les essais de régression, le travail qui a été fait, les centres d'appels, les coûts qui vous ont tous été communiqués par le ministère et qui ont été produits en preuve, il aurait peut-être été possible d'en tirer un peu plus, bien sûr, et je pense qu'il y a des leçons à retenir. Si nous devions revenir en arrière, je suis sûr qu'il y a des choses que le ministère serait heureux d'apprendre pour l'avenir, mais comme je l'ai dit, ces technologies sont essentielles pour notre avenir.
     S'il y a des leçons à tirer de votre étude, le ministère serait plus qu'heureux de les recevoir. Je pense que la présidente O'Gorman a dit la même chose.
    Auriez-vous fait quelque chose différemment?
    C'est difficile à dire, car j'étais là à l'époque. Je dirais...
    Vous avez maintenant le bénéfice du recul.
     Avec le recul, je dirais que nous allions très vite. Avec les décrets, à mesure que ces exigences étaient établies, nous devions réimaginer presque en temps réel l'application et la façon dont nous allions la recoder. Je compatis vraiment avec mon équipe qui a dû consacrer des heures incroyablement longues pour mener à bien ce projet. Je sais que même dans son blogue M. Manji a parlé de cela et du fait qu'il faudrait compter des semaines pour être approuvé par l'App Store. Il nous a fallu quelques jours, peut-être une semaine tout au plus, pour que l'App Store approuve notre version de l'application. Nous avons été très efficaces à cet égard, mais c'était incroyablement stressant pour l'équipe.
    Savez-vous si des politiques du Conseil du Trésor n'ont pas été respectées pendant ce...
    Absolument pas.
    ... programme?
    Merci.
    Quel était le rôle de votre ministre à l'égard de la gestion du contrat?
    Zéro.
    En ce qui concerne la diligence raisonnable, avez-vous demandé si les exigences d'autres organismes, par exemple, l'Agence de la santé publique du Canada, étaient nécessaires?
    Nous les avons rencontrés régulièrement pour parler des exigences et de ce qui était vraiment faisable à la frontière. Comme je l'ai dit, nous administrons 100 autres textes législatifs et réglementaires à la frontière, et nous avons acquis sur le terrain une compréhension du fonctionnement du débit dans les aéroports et les points d'entrée et de la façon de faire des choses comme des tests aléatoires obligatoires ou des tests PCR ou autres. La synergie que nous avons eue en discutant de ces choses était une conversation quotidienne avec l'Agence de la santé publique.
(1635)
    Pouvez-vous nous dire quelle enveloppe financière a été utilisée pour payer l'entrepreneur GC Strategies?
    Je vous renvoie au ministère pour obtenir cette information.
    Le ministre vous a-t-il délégué le pouvoir d'approuver l'un ou l'autre des marchés dans le cadre de ce projet?
    Je n'étais pas tenu d'approuver quoi que ce soit à l'égard de ces marchés.
    D'accord. Qui les aurait approuvés?
    Normalement, les achats sont délégués au moins au niveau des vice-présidents ou des directeurs généraux, mais le DPF et son équipe participent aux achats.
    D'accord. Ce serait un vice-président ou un directeur général de l'ASFC.
    Oui.
    Avez-vous consulté à un moment ou à un autre le Conseil du Trésor au sujet de ce programme?
    Le Conseil du Trésor participait à ces appels tout le temps, de façon intermittente. Il savait que nous adoptions cette approche pour remplacer le papier dans les premiers temps, et il était aussi au courant de l'échéancier des décrets, car ceux‑ci auraient été approuvés par les ministres du Conseil du Trésor, et le Conseil du Trésor était donc au courant des problèmes d'échéancier liés à l'application.
    Avez-vous participé aux consultations à propos des marchés eux-mêmes?
    Je n'y ai pas participé.
    D'accord.
    SPAC aurait approuvé les marchés.
    Oui, normalement. Oui.
    D'accord. À quel niveau cela aurait...?
    Je n'en ai aucune idée.
    Avez-vous fait face à de la résistance de la part d'un membre de la fonction publique lorsque vous mettiez en oeuvre ArriveCAN?
    Est‑ce que j'en ai entendu de la part de fonctionnaires? Non.
    En avez-vous entendu de la part de membres de l'ASFC?
    Je pense que M. Johns a évoqué le fait que le syndicat souhaitait davantage de consultations, mais comme je l'ai dit, ce n'était tout simplement pas possible dans les premiers temps.
    Pendant les 15 secondes qu'il me reste, monsieur Manji, cette application aurait-elle pu être réalisée à moindre coût et plus rapidement?
    Je le crois, oui.
    Le temps est écoulé.
    Nous cédons la parole à M. Jowhari pour cinq minutes.
    Monsieur Johns, malheureusement, je vous ai induit en erreur. Après M. Jowhari, nous en aurons terminé avec ce groupe de témoins.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Ossowski, pour votre travail et celui de votre équipe.
    Je vais poser une série de questions rapides. J'essaie d'obtenir des précisions sur deux ou trois points.
    Je crois savoir que le coût de développement de l'application a été d'environ 8,8 millions de dollars. La première version a été réalisée en quelques mois, et le coût était d'environ 80 000 $. Il y a eu 80 décrets et 70 séries de mises à jour de cette application en 18 mois. Ces chiffres sont-ils exacts, monsieur?
     Pardon...?
    Ces chiffres sont-ils exacts?
    Oui, dans l'ensemble. Oui.
    Parlons de la rapidité avec laquelle cette application a été développée. Nous allons aborder les complexités dans une minute.
     Si je prends 18 mois — de 21 jours ouvrables ou de 30 jours ouvrables — divisés par les 70 versions qui ont été développées, à 30 jours, ça donne environ sept jours de développement par version, et à 21 jours, cinq jours ouvrables et demi de développement.
     Dans votre réponse à l'un de mes collègues, vous avez dit que chaque version, avec la complexité et les tests complets, prenait environ une semaine. Ai‑je raison de dire cela, monsieur?
    C'était par à-coups, mais en moyenne, on peut dire que oui.
    Nous avons développé 70 versions très complexes, totalement intégrées, et nous nous sommes assurés qu'elles répondaient aux exigences du gouvernement du Canada ou de Santé Canada pour assurer la sécurité des gens. Chaque version a pris sept jours. Pensez-vous que nous aurions pu, dans n'importe quelles circonstances, produire cette application plus rapidement qu'en sept jours ou plus rapidement qu'en cinq jours et demi?
     Je suis dans l'industrie depuis 21 ans, et j'aimerais contester le commentaire selon lequel cette application aurait pu être conçue beaucoup plus rapidement qu'en cinq jours ouvrables ou sept jours civils, monsieur.
     Je suis tout à fait d'accord avec vous, et je pense qu'il faut tenir compte des tests de cybervulnérabilité que nous avons effectués, des tests de régression que nous avons effectués, de l'arrière-plan, des centres d'appels et des séances d'information à l'intention des agents de première ligne pour qu'ils sachent quels changements ont été apportés aux divers décrets. C'était littéralement une opération de 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et ça l'est encore.
(1640)
    Vous venez de mentionner cinq ou six activités différentes qui se sont déroulées 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour chacune de ces itérations. Le développement n'a dû durer qu'un jour ou un jour et demi. Le reste a été consacré aux tests, à la vérification et à tout le reste. Je veux m'assurer que cela figure au compte rendu.
    Combien de personnes sont passées par cette application — combien de Canadiens et combien de voyageurs?
    Je crois savoir que plus de 60 millions de voyageurs sont passés par l'application ArriveCAN.
    Je vous en remercie.
    Sur 8,8 millions de dollars et plus de 60 millions de Canadiens ou 60 millions d'utilisations de l'application, cela revient à combien par transaction?
     Il faudrait que je le calcule. J'ai fait le calcul tout à l'heure; avec un coût total de production jusqu'à présent de 41 millions de dollars pour 60 millions de transactions, je crois que ça donne environ 68 cents par voyageur.
    Merci.
     Si l'on prend le coût total de 41 millions de dollars — qui est à ce jour, pas 54 millions de dollars — et que l'on ne tient compte que des coûts de développement d'environ 10 millions de dollars, on arrive à moins de 60 cents par jour.
     Disons que, pour 20 cents par transaction, nous avons fait en sorte, pendant la pandémie, au fur et à mesure des changements, de sauver un grand nombre de vies. Sans ces mesures, les vaccins et les autres mesures, nous aurions pu mettre plus de Canadiens en danger.
     Je vous remercie de cela.
     J'aimerais maintenant parler de l'évolution du perfectionnement de l'application au cours de ces 18 mois. Pouvez-vous nous donner une idée du point de départ et du point d'arrivée, d'après ces 70 exigences? Quel a été le degré de perfectionnement?
    Je pense que c'est une excellente question.
     Comme je l'ai mentionné, au début, il s'agissait simplement de la recherche de contacts et de la capacité de transmettre aux provinces des renseignements élémentaires sur les voyageurs. Par la suite, nous avons ajouté la possibilité d'inclure les tests avant l'arrivée — PCR, tests rapides ou tout ce que c'était à l'époque. Nous les avons intégrés, puis, finalement, les certificats de vaccination.
     Chaque pays a procédé à sa façon. Pour certains pays, le système s'articulait sur une reconnaissance optique de caractères très élémentaire. Les données étaient téléchargées et nous pouvions saisir l'information nous disant, par exemple, qu'il s'agissait d'un vaccin Moderna. Nous disposions ainsi de quelques données de base. D'autres étaient beaucoup plus perfectionnés.
     Comme je l'ai dit plus tôt, grâce au code QR que nous avions avec les autorités sanitaires provinciales au Canada, nous avions un très haut degré de confiance dans cette information, et de nombreux Canadiens traversaient la frontière sans qu'on leur demande...
    Je crains de devoir vous interrompre à nouveau, monsieur Ossowski. Nous n'avons plus de temps.
     Nous allons suspendre la séance très brièvement pendant que nous changeons de témoins.
     Monsieur Ossowski et monsieur Manji, merci d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
(1640)

(1640)
    Nous reprenons nos travaux pour la deuxième heure.
     Nous allons commencer par les déclarations liminaires. Encore une fois, nous n'avons pas beaucoup de temps, alors je vous demande de vous en tenir à cinq minutes.
     Nous allons commencer par vous, monsieur Croll.
    J'aimerais commencer par remercier le Comité de m'avoir invité pour discuter de l'application ArriveCAN.
    La création d’ArriveCAN a coûté bien trop cher. Les Canadiens devraient être en colère, non pas à cause du coût, mais à cause de ce que notre incapacité à fournir rapidement une bonne technologie signifie pour l’avenir de notre société.
     À l’Action de grâce, quelques entreprises technologiques ont copié l’interface frontale d’ArriveCAN pour montrer que sa conception avait coûté trop cher. Leur coup de publicité n’a pas démontré grand-chose relativement au coût de l’application, car il ne suffit pas de copier quelques écrans pour gérer une frontière.
    L’application ArriveCAN a d’abord dû être inventée, puis déployée, hébergée et sauvegardée. Comme nous l'avons entendu, à eux seuls, les frais d’hébergement pour la faire fonctionner pendant un an et demi ont coûté plus de 4 millions de dollars. De plus, l’application devait être continuellement mise à jour pendant cette période. Elle devait aussi être connectée aux bases de données des passeports, de la santé et des voyages. Des milliers de personnes de partout au Canada ont dû être formées. Tout cela s’est produit au beau milieu d’une crise mondiale de santé publique.
     Les équipes d’ArriveCAN ont été confrontées à tellement d’obstacles bureaucratiques, de règles désuètes et de systèmes obsolètes — in both languages — qu’il est tout à fait incroyable que l’application ait vu le jour, encore plus en à peine un mois. Et peu de gens font la comparaison avec le coût d’autres solutions — les processus manuels en personne pendant une pandémie ou la fermeture complète de la frontière —, mais c'était tout de même beaucoup trop cher.
     Si ArriveCAN a coûté si cher, c’est parce que nous n’avons pas un gouvernement numérique. Certaines des critiques envers ArriveCAN sont sans doute une protestation à peine voilée contre la vaccination obligatoire et les mesures de santé publique. Toutefois, la plupart sont justifiées, car notre secteur public tarde à fournir une technologie fiable et accessible à temps et dans les limites du budget.
     Chaque année, les Nations unies publient une évaluation des gouvernements numériques de ses 193 pays membres. En 2010, le Canada occupait le 3e rang mondial. Cette année, il occupe le 32e rang. Nous devrions être en colère, car notre gouvernement est incapable de fournir une technologie de l’information de pointe rapidement et à moindre coût.
    Les Canadiens passent déjà près de huit heures par jour en ligne. Nous utilisons couramment les applications, nous vivons sur le Web, nous sommes connectés dans nos salles de cours et dans nos voitures. Nous nous endormons et nous réveillons avec nos téléphones. Nous sommes toujours connectés: nous avons un écran dans chaque poche, et ce, 15 ans seulement après le lancement de l'iPhone. Nous sommes en train de devenir rapidement, du moins en partie, une espèce numérique. Durant le prochain siècle, nous repenserons de fond en comble tout ce qui concerne notre gouvernement, de la façon dont les citoyens interagissent avec les services publics à celle dont nous choisissons nos dirigeants. Dans 100 ans, notre gouvernement sera aussi méconnaissable pour nous que la démocratie moderne l’est pour la monarchie. Nous changeons, mais notre gouvernement ne s’adapte pas au même rythme que nous.
    De l’extérieur, le gouvernement apparaît comme l’instance qui construit les routes, teste les cultures, dote en personnel les bureaux de service, protège les côtes et préside les comités, mais, ce qu’il fait, c’est avant tout gérer de l’information. Le gouvernement a introduit l’ordinateur central, le réseau Internet et les satellites. Le gouvernement est la technologie de l’information.
     En tant que président de la plus grande conférence mondiale sur les gouvernements numériques et la modernisation du secteur public, j’ai eu la chance de discuter avec des responsables des technologies de l’information de douzaines de pays, dont plusieurs sont mieux classés que nous dans l’évaluation des gouvernements numériques des Nations unies. Dans ces pays, les gens se vantent des incroyables applications qu’ils créent pour leurs concitoyens. L’innovation et l’expérimentation sont saluées. Les nouveaux diplômés veulent travailler dans la technologie gouvernementale. Mais, au Canada, nous traînons de la patte
     La solution n’est pas de sous-traiter davantage. Il y a suffisamment de place pour que le secteur public et le secteur privé travaillent ensemble sur les éléments utilitaires de la technologie, comme l’infonuagique, la large bande ou les logiciels standard. Par contre, je ne veux pas que mon gouvernement soit une coquille vide de décideurs et de fonctionnaires, totalement dépendant du secteur privé pour ses activités. Nous ne pouvons pas passer les rênes de la transformation de notre société aux autres. Le gouvernement doit coder.
    Pour résoudre ce problème, il faudra apporter des changements concrets et importants en matière de rémunération, de culture et de formation, et, oui, remplacer ceux qui ne peuvent pas, ou qui ne veulent pas, s’adapter. Un grand nombre de ces changements sont peu attrayants sur le plan politique, mais ils sont aussi nécessaires.
     La dure vérité est que nous vivons dans une société numérique, et que nous méritons un gouvernement numérique. ArriveCAN est un canari dans la mine de charbon numérique, qui nous avertit que nous ne sommes pas prêts ou disposés à nous adapter à cette nouvelle réalité, ou que nous en sommes incapables.
     Monsieur le président, mes commentaires ne visent pas à vous expliquer de façon exhaustive les raisons pour lesquelles ArriveCAN a coûté si cher, mais plutôt de définir le cadre de cette conversation dans un contexte plus large.
(1645)
     Vous m’avez invité parce que j’ai de l’expérience avec les jeunes entreprises technologiques et que je suis le fondateur d’une conférence sur les gouvernements numériques.
    C’est avec plaisir que je répondrai maintenant aux questions des membres du Comité.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci, monsieur Croll.
     Monsieur Hutton, bon retour parmi nous. Vous avez cinq minutes.
    Mais avant, je tiens à signaler à ceux qui n'ont pas encore été parmi nous que M. Hutton est un grand ami du Comité OGGO et qu'il a joué un rôle important dans la rédaction de ce qui était, à mon avis, un rapport novateur sur la protection des dénonciateurs.
     C'est un plaisir de vous revoir parmi nous, monsieur Hutton.
     Je m’appelle David Hutton et je suis agrégé supérieur au Centre pour la libre expression de l’Université métropolitaine de Toronto. Je me suis proposé comme témoin, car j’estime que mon expérience particulière pourrait me permettre d’offrir un point de vue utile.
     En tant que jeune ingénieur, j’ai dirigé l’assurance de la qualité de systèmes informatiques complexes de grande envergure, en surveillant le processus de mise au point, en effectuant des essais indépendants et en approuvant la version définitive. Par la suite, à titre d’expert-conseil en gestion, j’ai dirigé mon propre cabinet d’experts-conseils pendant 20 ans, en réalisant des audits approfondis des systèmes de gestion de plus de 100 organisations dans le monde entier. En outre, depuis les 17 dernières années, j’aide les dénonciateurs d’intérêt public et je plaide en faveur d’une meilleure protection de ces derniers. En général, il s’agit d’employés honnêtes qui dénoncent des actes répréhensibles et qui sont punis pour cette raison.
     Ces trois carrières apparemment très différentes ont quelque chose en commun, soit la recherche de la vérité et de l’intégrité, afin que les organisations puissent composer avec les faits et la réalité, ce qui les rend plus efficaces et sert également l’intérêt public.
     Je pense que la question fondamentale à laquelle est confronté le Comité est de savoir ce qui s’est passé en ce qui concerne ArriveCAN, sur un spectre allant d’un résultat raisonnable et d’une optimisation des ressources, compte tenu de l’évolution rapide de la situation d’urgence, en passant par des entrepreneurs profitant de la situation, de façon opportuniste, mais peut-être tout à fait légale, jusqu’à la corruption ou la collusion, lorsqu’il y a eu violation des lois ou codes de conduite.
    Tout cela est difficile à déterminer! Surtout si des malfaiteurs s’y livrent et mettent tout en œuvre pour cacher leurs méfaits. Toutefois, d’après mon expérience et mes recherches, si nous disposions d’une protection des dénonciateurs qui ne serait‑ce qu’à moitié décente dans ce pays, le Comité aurait très probablement bientôt des réponses.
    Permettez-moi de vous expliquer.
     Compte tenu du coût de ce projet, il a sans doute impliqué des centaines de personnes — des fonctionnaires et des entrepreneurs —, et si des actes répréhensibles ont été commis, certains d’entre eux le savent certainement. Cependant, ils n’ont aucun moyen sûr de fournir ces renseignements au Comité ou au public, car il n’existe aucune protection contre les représailles qui pourraient compromettre leur carrière pour avoir osé dénoncer les faits.
     C’est parce que le Canada a littéralement la pire loi de protection des dénonciateurs au monde. Elle est censée protéger environ 400 000 fonctionnaires, mais en 15 ans d’existence, au coût de plus de 100 millions de dollars, pas un seul dénonciateur n’a été protégé.
     Ce système n'a pas non plus réussi à détecter le désastre imminent des salaires de Phoenix, alors que des centaines de personnes étaient au courant des problèmes. Permettez-moi de partager quelques informations pertinentes sur Phoenix à titre d'exemple instructif.
     Vu mon bagage professionnel, vous comprendrez que j’avais été absolument fasciné par ce projet. Comment était‑il possible qu’un logiciel aussi mauvais puisse être conçu et mis en place, sans avoir été testé et sans aucune solution de rechange, pour remplir le rôle critique de distribuer des milliards de dollars, ayant ainsi un impact direct sur la vie de centaines de milliers d’employés?
     J’ai lu les rapports détaillés offerts par de nombreuses sources, et je me suis retrouvé avec davantage de questions que de réponses. J’ai donc décidé de mener ma propre enquête, avec l’aide du Centre pour la libre expression.
    Nous avons établi des canaux de communication sécurisés et demandé aux initiés de partager leurs expériences en toute confidentialité. Quelques-uns ont répondu et j’ai maintenant mes conclusions, que j’espère publier en temps opportun, bien que j’aie besoin de plus de sources pour corroborer ce que j’ai appris. C’est difficile, car les gens sont terrifiés à l’idée de dire quoi que ce soit, même ceux qui sont à la retraite et même si des années se sont écoulées depuis.
    Mon histoire illustre deux choses. Premièrement, les dénonciateurs sont de loin la meilleure source d’information pour mettre au jour tout acte répréhensible pouvant exister dans une organisation — des décennies de recherche le confirment —, et deuxièmement, sans protection, très peu de personnes oseront fournir les renseignements indispensables. Et c’est la situation dans laquelle se trouve le Comité aujourd’hui.
     Il s’agit d’un problème de longue date qui touche directement le travail de votre comité et de tous les organismes de surveillance. La solution évidente consiste à mettre en oeuvre une protection fédérale adéquate des dénonciateurs, comme l’a recommandé à l’unanimité le Comité en 2017.
     Votre comité est particulièrement bien placé pour contribuer à une solution, en raison de ses antécédents et de son mandat. Si vous réussissez, cela permettra de préciser le véritable état de nombreux projets comme Phénix et ArriveCAN.
     Merci.
(1650)
    Merci, monsieur Hutton.
     Nous avons Mme Kusie, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à nos deux témoins d'être ici aujourd'hui.
     Monsieur Hutton, comme vous le savez, en 2017, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a publié un rapport contenant des recommandations sur la protection des dénonciateurs. Appuyez-vous ces recommandations?
(1655)
    Absolument.
    Je l'espère. Excellent.
     Pensez-vous que si ces recommandations du rapport avaient été mises en œuvre, les fonctionnaires auraient été plus à l'aise pour se manifester dans les cas de méfaits?
    C'est sans aucun doute le cas.
    Excellent.
     Croyez-vous que si les recommandations du rapport 2017 du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires avaient été mises en place avant la pandémie, les fonctionnaires auraient été plus enclins à faire part de leurs préoccupations concernant l'application ArriveCAN?
    S'il y avait des méfaits, bien sûr qu'ils l'auraient fait, oui.
    Excellent.
     Pourquoi pensez-vous que le gouvernement actuel a ignoré les recommandations du rapport de 2017 au cours des cinq dernières années?
    Eh bien, c'est une bonne question. En fait, je ne vois pas cela comme une question partisane. Je pense que les gouvernements successifs se sont comportés d'une manière très semblable. Ce que j'en retiens, c'est que les gouvernements au pouvoir trouvent très pratique qu'il n'y ait pas cette possibilité de divulgation, alors que les gens de l'opposition aimeraient l'avoir. Bien sûr, le public aimerait l'avoir.
    Certainement. Je suppose que, du côté des conservateurs, nous avons introduit la responsabilité 1.0, et le rapport de 2017 a été publié sous l'égide du gouvernement Trudeau. Je n'accepte pas tout à fait votre point de vue, mais je comprends.
     Pensez-vous que le gouvernement libéral va continuer à retarder la réforme des mesures de protection des dénonciateurs?
    J'espère que non, mais je ne peux pas prévoir l'avenir.
     Je suis sûre que vous savez qu'un député du Bloc québécois a présenté le projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C‑290, visant à mettre en place davantage de protections pour les dénonciateurs, et je ne peux que supposer l'absence d'action de la part des libéraux, puisque ce rapport existait depuis cinq ans.
     Pensez-vous que le gouvernement devrait appuyer ce projet de loi?
    Je pense qu'il devrait le soumettre au Comité, en débattre et s'assurer qu'il est à la hauteur. Je pense que c'est un très bon début.
    Cela devrait se faire dans les plus brefs délais.
    Absolument, oui.
     Excellent.
    Pensez-vous que si ce projet de loi était mis en œuvre, les fonctionnaires seraient plus enclins à dénoncer les méfaits dans le cadre de grands projets comme l'application ArriveCAN?
    Oui, je le pense.
     Excellent.
     Je suis sûre que vous savez aussi que le gouvernement a récemment décidé de mettre sur pied un groupe de travail chargé d'examiner la réforme des mesures de protection des dénonciateurs. Pensez-vous que ce groupe de travail est nécessaire, ou pensez-vous que le cadre est déjà disponible, étant donné le rapport de 2017 qui a été publié?
    Je pourrais répondre en disant que j'ai écrit un article publié dans le Hill Times aujourd'hui qui donne une longue réponse à cette question, et que les gens devraient peut-être le lire.
     Cependant, non, je ne crois pas que c'était nécessaire. Je crois qu'il y a lieu d'abord de mettre en place les recommandations qui ont déjà été présentées, puis il y aura de nombreuses possibilités d'amélioration.
    Certainement.
     Pensez-vous que 12 à 18 mois est une bonne échéance pour que ce groupe de travail fasse son évaluation, d'autant plus que maintenant nous avons non seulement le rapport de 2017 du Comité OGGO — le puissant rapport OGGO —, mais aussi le récent projet de loi d'initiative parlementaire?
     Je ne vois pas l'utilité du groupe de travail tant que ces autres étapes n'ont pas été franchies. Une fois que vous aurez établi une base à partir de ce qui a déjà été recommandé, il sera temps de tenir d'autres débats, car nous serons encore loin des pratiques exemplaires préconisées à l'échelle internationale.
    Peut‑on dire, alors, que le gouvernement libéral actuel pourrait mettre en œuvre quelque chose à ce moment‑là, que ce groupe de travail n'est peut-être pas nécessaire, et qu'il retarde peut-être même la mise en œuvre de l'information existante dans un cadre qui existe déjà?
    Je pense que ce que fait ce groupe de travail n'a pas vraiment d'importance, dans la mesure où cela n'empêche pas la mise en oeuvre urgente de ce qui a déjà été recommandé.
    Eh bien, 18 mois, c'est tout un obstacle. Je pense que c'est déjà retardé.
    Pensez-vous qu'il y aurait recoupement entre une partie du travail du groupe chargé de l'examen de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs de méfaits et le processus parlementaire lié au projet de loi C‑290?
    Je suis désolé. Pouvez-vous répéter cela, s'il vous plaît?
    Pensez-vous que lorsque le groupe de travail commencera ses travaux, il arrivera plusieurs des conclusions qui sont déjà non seulement dans le rapport de 2017, mais aussi dans le projet de loi C‑290 tel que présenté par le député de Mirabel?
    Je ne sais pas à quoi aboutira le groupe de travail, parce qu'il part d'un seuil assez bas sur le plan des connaissances et de l'expérience, je crois. Il a un énorme travail de rattrapage, le travail que ce comité a fait. Il lui faudrait des mois pour accomplir le travail qui a déjà été fait.
    Quel rôle pensez-vous que le Conseil du Trésor devrait jouer pour faire en sorte que les fonctionnaires qui sont témoins de méfaits collectifs, comme dans le cas de l'application ArriveCAN, se manifestent et soient disposés à les signaler?
    La loi doit être réformée. Le Conseil du Trésor doit commencer à exercer une surveillance adéquate des processus ministériels, ce qui est sa responsabilité. Oui, ce sont les principaux éléments.
    Pensez-vous que le fait de ne pas avoir...
    Je crains que notre temps soit écoulé, madame Kusie.
    Merci beaucoup.
(1700)
    Oh, je m'excuse. Je me suis arrêté une minute trop tôt.
    Ce n'est pas grave. Je vous remercie beaucoup. C'est très gentil.
     Monsieur Hutton, pensez-vous que l'absence d'une protection adéquate des dénonciateurs pour les fonctionnaires nuit à la capacité des parlementaires d'obtenir des réponses sur la mauvaise gestion de projets gouvernementaux comme l'application ArriveCAN?
    Oui, c'est certainement le cas.
    Sans une protection adéquate des dénonciateurs, pensez-vous que les parlementaires et les Canadiens obtiendront une réponse complète sur ce qui s'est passé avec l'application ArriveCAN?
    Comme je viens de le dire dans mes remarques, je pense que c'est le fond du problème — que sans cette voie de divulgation sûre, vous n'allez pas entendre les personnes qui pourraient avoir des renseignements indésirables.
    Croyez-vous qu'il y a plus de méfaits en raison de l'absence de protection des dénonciateurs?
    Certainement. Si vous regardez les autres voies que les gens peuvent utiliser... J'ai dirigé une petite organisation caritative pendant un certain temps. Nous offrions un service d'assistance téléphonique gratuit. Je recevais plus de 100 demandes par an. C'est plus que l'agence officielle qui est censée protéger les gens.
    Merci.
     Merci, monsieur Hutton.
     Je m'excuse encore une fois, madame Kusie. Mon cerveau était bloqué sur des temps de cinq minutes.
    Monsieur Kusmierczyk, allez‑y pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, monsieur Hutton et monsieur Croll, pour le temps que vous nous avez consacré cet après-midi.
     Monsieur Croll, j'aime vraiment la façon que vous proposez pour pousser notre gouvernement davantage dans l'ère numérique et l'amener à être un chef de file en matière de gouvernement numérique.
    Avant de parler de cela, j'ai vraiment aimé l'article que vous avez publié il y a quelques semaines, intitulé « ArriveCAN hot takes miss the point ». Je l'ai trouvé révélateur. Une certaine partie de l'article parlait de ce qu'il faut pour créer une application au gouvernement. Je pense que beaucoup de gens chez eux ne comprennent pas la différence entre une application créée par une entreprise du secteur privé pour le secteur privé et les responsabilités qui incombent à un gouvernement lorsqu'il crée une application. Il y a des obligations et des choses dont une application gouvernementale doit s'assurer du bon fonctionnement et des références croisées. Les applications ne sont pas les mêmes. Il y a une application pour le secteur privé et une autre pour le gouvernement.
     Pouvez-vous parler de la différence sur le plan des obligations et des responsabilités qu'une application gouvernementale doit respecter?
    Absolument.
    Il faut d'abord concevoir l'application.
     En 2020, il n'y avait pas d'application frontalière COVID à copier, il a donc fallu inventer ArriveCAN. Le processus de conception en lui-même est difficile, car les parties prenantes sont nombreuses. Il faut comprendre comment elles vont utiliser l'application et s'assurer d'avoir répondu à leurs besoins.
     Il y a la gouvernance. Il faut respecter les droits des utilisateurs. Ironiquement, bon nombre des critiques les plus virulents à l'égard d'ArriveCAN sont également des critiques virulents à l'égard de l'ingérence du gouvernement et des atteintes à la vie privée. Ils devraient être heureux que nous consacrions autant de temps à la protection de leurs droits, notamment en ce qui concerne les données médicales, les données de passeport et les données de voyage, qui sont parmi les données les plus précieuses qui soient.
     Il faut former les gens à l'utilisation des logiciels. Ce n'est pas de la magie. Tout le monde ici a dû apprendre à utiliser Teams en six semaines. L'apprentissage d'ArriveCAN a dû se faire auprès de milliers d'employés en temps réel, pendant une pandémie mondiale. Il a fallu les former à chaque nouvelle version de ce logiciel.
    Les entreprises privées ne sont pas nécessairement tenues de le faire. Elles n'essaient pas non plus d'utiliser ces applications dans des conditions dégradées. Par définition, chaque utilisateur d'ArriveCAN allait utiliser l'application, puis activer le mode avion. Ce n'est pas pour rien qu'on l'appelle « mode avion », donc votre application va naturellement se déconnecter. Les tests et les cas limites sont très difficiles, et jusqu'à présent, c'est vrai pour les entreprises publiques et privées, mais lorsqu'il s'agit du gouvernement, la gouvernance est beaucoup plus importante, en partie à cause des exigences d'accessibilité. Si vous appelez TribalScale ou Lazer et que vous dites que vous voulez une application et que, par ailleurs, vous aimeriez qu'elle soit accessible, ils vont ajouter un poste de dépense. Voulez-vous qu'elle fonctionne avec des lecteurs d'écran? Cela va vous coûter plus cher. Voulez-vous qu'elle fonctionne avec d'autres téléphones et toutes ces différentes plateformes d'accessibilité?
     Le gouvernement n'a pas le luxe de cibler le milieu lucratif. Les applications gouvernementales visent tout le monde. L'étendue de la création, des essais et de la couverture est donc beaucoup plus large.
     Il y a aussi les problèmes d'interopérabilité entre les différentes administrations. Il y a même la langue. Je ne parle pas seulement de la traduction; si un pronom mal placé met quelqu'un en colère, un député se fera gronder et un fonctionnaire deviendra le bouc émissaire. Chaque mot doit être passé au crible, alors qu'il suffirait de le corriger dans la version subséquente.
     Le gouvernement est soumis à ce genre d'examen. La perfection est peut-être l'ennemi de l'assez bien, mais le gouvernement n'a pas le luxe de pouvoir se contenter de l'assez bien.
     Évidemment, nous avons beaucoup parlé de l'approvisionnement, c'est‑à‑dire de l'externalisation, des majorations, etc. Ce sont des problèmes légitimes. La leçon à en tirer n'est pas que le gouvernement devrait externaliser plus efficacement, mais qu'il devrait savoir comment créer des applications. Nous devrions être responsables de notre propre avenir. Il suffit de regarder simplement les majorations que nous payons en n'ayant pas un secteur public robuste et intelligent sur le plan technologique pour expliquer une partie importante de ces coûts.
     Enfin, je pense qu'il y a les déploiements et les sauvegardes. Lorsque l'on crée une application logicielle, il faut créer le terrain sur lequel bâtir la version subséquente. Il faut construire un système qui peut être reproduit. Vous avez besoin d'un plan de sauvegarde. Si cela ne fonctionne plus, des milliers de personnes en transit ne pourront pas arriver dans le pays. Une entreprise privée qui fournit une application n'a pas à faire face à 10 000 personnes qui font la queue à l'aéroport de Dorval et qui se demandent comment entrer dans le pays.
     Je pense qu'il est malhonnête de tenter de comparer les deux.
(1705)
    Je comprends tout à fait. La tâche est beaucoup plus complexe.
    Si on compare, par exemple, le développement d'une application gouvernementale comme ArriveCAN à l'épreuve du décathlon aux Jeux olympiques, pour laquelle il faut exceller dans plusieurs sports, à quoi pourrait‑on comparer un marathon de programmation d'une fin de semaine comme celui que préconisent nos collègues conservateurs?
    J'ai entendu un membre du Comité parler de méfaits collectifs en faisant référence à l'application ArriveCAN.
    À titre de citoyen qui a étudié très attentivement la question, je trouve que c'est un peu exagéré de parler de méfaits collectifs. Je crois d'ailleurs que les dirigeants de Lazer et de TribalScale ont dit très clairement et très ouvertement qu'ils étaient d'accord avec mon analyse quand je l'ai publiée. Je pense qu'on peut dire que c'est une chose de copier des plans et de cloner une application, mais que c'en est une autre de gérer une frontière.
    J'aurais une dernière question pour vous.
    Vous nous avez expliqué que la conception d'une application gouvernementale est complexe. Pourtant, le gouvernement a réussi à le faire en 1 mois avec un taux d'efficacité de 98 %. Il y a eu seulement 2 % de problèmes techniques.
    Comment qualifieriez-vous cette réalisation?
    Je peux parler de…
    Vous pourrez donner votre réponse au prochain tour ou nous la transmettre par écrit. Les six minutes sont écoulées. Merci à l'avance.
    Madame Vignola, vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je vous remercie d'être là tous les deux.
    Monsieur Hutton, dans votre allocution, vous avez indiqué que le cabinet d'experts-conseils que vous dirigiez avait réalisé des audits approfondis...

[Traduction]

    Je suis désolé, mais j'entends seulement le français.
    Pouvez-vous répéter? Je suis désolé.

[Français]

     Dans votre allocution, vous avez indiqué que le cabinet d'experts-conseils que vous dirigiez avait réalisé des audits approfondis des systèmes de gestion de plus de 100 organisations de partout au monde.
    À votre connaissance, le Canada a-t-il un processus d'audits indépendants approfondis pour les systèmes de gestion semblables aux audits que vous faisiez?

[Traduction]

    Vous me demandez de vous parler de mon expérience dans l'audit de ces sociétés ou de ces organismes?

[Français]

    Je vous demande si le Canada a un processus similaire.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    D'accord. Quels sont les avantages de ces audits?

[Traduction]

    C'est peut-être hors sujet, mais je peux dire brièvement que les audits portaient sur le fonctionnement des systèmes de gestion des organismes à l'intérieur d'un système, comme le ferait un ingénieur…

[Français]

    Mes collègues peuvent-ils éteindre leurs micros? Je vais faire de même, car nous ne nous entendons pas à cause de nos micros, je suis désolée.

[Traduction]

    J'analysais la gestion d'un organisme de manière très systématique, en tenant compte par exemple du mode de direction, des interactions de la direction avec les consommateurs. Cette analyse donne aux organismes un portrait très précis de ce qui cloche dans son système de gestion. Pour un organisme, comprendre ce qui peut s'améliorer dans sa gestion vaut son pesant d'or. C'est le genre de travail que je faisais.
    Est‑ce que j'ai répondu à votre question?

[Français]

    Oui, merci.
    À mon humble avis, on devrait faire des audits de ce genre plus souvent au Canada et appliquer les recommandations des comités, notamment, mais bon!
    Dans votre allocution, vous avez parlé d'ArriveCAN et de la crainte qu'ont des entrepreneurs et des fonctionnaires de divulguer de l'information.
    Y a-t-il des indices qui vous permettent de croire qu'actuellement, des fonctionnaires ou des entrepreneurs auraient de l'information, mais ne voudraient ou ne pourraient pas la donner de peur de perdre un emploi ou d'éventuels contrats?
(1710)

[Traduction]

    Non, je n'ai pas ce genre d'informations. Je n'ai pas accès à ce qui se passe en interne. J'ai accès à ces informations seulement si quelqu'un nous approche pour faire une dénonciation.
    Il existe d'autres moyens. Les fonctionnaires doivent passer par le Commissariat à l'intégrité du secteur public. Cela dit, il serait très surprenant qu'ils optent pour ce moyen s'ils connaissent les résultats de la loi.

[Français]

    Dans le cas du système Phénix, vous avez établi des canaux de communication sécurisés pour avoir des informations.
    La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles prévoit-elle de tels canaux sécurisés? Sinon, devrait-elle prévoir des canaux de ce type?

[Traduction]

    Nous avons établi un canal sécurisé pour que les gens puissent nous joindre et nous communiquer de l'information. C'était la première étape. Il fallait gagner leur confiance et les convaincre que nous n'utiliserions pas cette information de manière préjudiciable.
    Le problème avec le Commissariat à l'intégrité du secteur public n'est pas de lui transmettre des informations de manière sûre, mais ce qu'il en fait. Dans la grande majorité des cas, les allégations sont ignorées et ne font même pas l'objet d'une enquête. Une fois parvenues au Commissariat, elles restent secrètes pour toujours. Il est impossible de les obtenir par la voie d'une demande d'accès à l'information non seulement pour les 10, 15 ou 25 années suivantes, mais à jamais. Le dénonciateur n'a aucun recours en cas de représailles.
    Comme je l'ai dit, aucun des quelque 500 dénonciateurs qui ont déposé des plaintes de représailles en 17 ans n'a été indemnisé.

[Français]

    Supposons qu'un fonctionnaire ou un entrepreneur a respecté la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles et suivi chacune des étapes prévues dans cette loi à propos d'informations sur ArriveCAN. Ni vous, ni moi ni qui que ce soit du public ne le saurait, à moins que le divulgateur n'en parle dans les médias.
    Est-ce bien cela?

[Traduction]

    En règle générale, le fonctionnaire qui veut dénoncer quelque chose doit s'adresser au commissariat à l'intégrité, ce qui enclenche un très long processus. Il faut parfois jusqu'à un an avant qu'il y ait une évaluation et que la décision soit prise d'enquêter ou non. Les enquêtes prennent souvent plus d'un an, et elles mènent souvent à la conclusion qu'il n'y a pas eu d'acte répréhensible. À ce stade, un rapport est soumis au Parlement.
    C'est un processus de plusieurs années qui le plus souvent n'aboutit à rien. En 17 ans, seulement 18 dénonciations sur 1 500 ont donné lieu à une conclusion d'acte répréhensible.
    Le processus est très lent et porte rarement ses fruits, même si les actes répréhensibles dénoncés sont la plupart assez mineurs comparativement à d'autres dont nous avons été témoins dans la fonction publique.

[Français]

     À votre connaissance, combien de ces 1 500 plaintes concernaient les technologies de l'information?

[Traduction]

    Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Je suis désolé.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Johns, c'est à vous.
    Avant de vous céder la parole, je vous informe que j'ai reçu un avis comme quoi la sonnerie retentira à 17 h 27. Nous devrions avoir assez de temps pour passer au travers d'une bonne partie de nos questions. Toutefois, quand nous entendrons la sonnerie, je vais demander votre consentement unanime pour permettre au Bloc et au Nouveau Parti démocratique de terminer leurs tours de deux minutes et demie, si mes calculs sont bons.
    Pouvons-nous donner notre consentement unanime dès maintenant, monsieur le président?
    Oui.
    Parfait. Merci.
    Monsieur Johns.
    Monsieur Hutton, si un fonctionnaire fédéral avait dénoncé le processus d'approvisionnement ou de développement de l’application ArriveCAN, quelle est la probabilité que le public ou les parlementaires aient été mis au courant?
    Il n'existe aucune obligation d'informer le public ou les parlementaires. La seule personne qui est mise au courant sur‑le‑champ est le chef du ministère. Le dénonciateur n'est pas identifié, mais c'est la personne à qui la dénonciation est adressée.
    Si le commissariat à l'intégrité décide de mener une enquête, ce qui n'est pas dans son habitude, il doit en informer le chef du ministère. Tout se déroule sous le sceau du secret jusqu'à la conclusion du processus et, à ce moment, un rapport est transmis au Parlement. Comme je l'ai dit, il faut parfois des années.
(1715)
    Je vais vous lire une brève citation.
    Dans un article d'opinion paru dans le journal Ottawa Citizen le 19 octobre sous le titre « Canada's whistleblowing system protects wrongdoers, not whistleblowers », vous avez donné vos commentaires sur la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Vous avez écrit ceci:
    
Quand Pierre Poilievre, qui était alors ministre, a présenté la loi en 2006, il a répété maintes et maintes fois qu'elle offrirait une protection à toute épreuve. C'est effectivement le cas, mais la protection bénéficie davantage aux malfaiteurs qu'aux dénonciateurs ou au public.
    
Le temps est venu pour nos leaders de remplir leurs promesses et d'être à la hauteur des attentes des Canadiens en instaurant un système qui protégera véritablement le public.
    Pouvez-vous nous dire ce qu'il en coûte aux contribuables, aux travailleurs, de ne pas remédier à ce grave problème?
    C'est incalculable!
    Je vous rappelle que 2,4 milliards de dollars ont été engloutis dans le système Phénix jusqu'ici, et qu'il ne fonctionne toujours pas. La situation était connue de centaines de personnes, ou de presque tout le monde qui a pris part au projet. On entendait à tout bout de champ que tout allait bien avec Phénix. C'était ironique, bien entendu, et très courant. Je crois… En fait, j'ai la preuve que même si le commissariat à l'intégrité a reçu des mises en garde crédibles concernant la gestion du projet, il n'y a pas eu d'enquête.
    On parle de 2,4 milliards de dollars.
    Actuellement, il se dépense à peu près 1 milliard de dollars par jour ouvrable dans la fonction publique. Je ne sais pas à combien se chiffre le gaspillage ou le vol, mais c'est probablement une somme considérable. Quiconque travaille comme examinateur de fraude vous dira qu'il y a de la corruption partout. Aucun organisme n'y échappe. Ce qui compte, c'est à quelle vitesse la fraude est détectée. Nous n'avons pas de système pour faire cette détection.
    On ne s'y attendrait pas au sein du gouvernement d'un pays comme le Canada. Je suis assez certain que les gens ordinaires ne s'attendent pas à ce genre de corruption ou de défaillance.
    Pouvez-vous nous parler d'ArriveCAN, de Phénix, et plus précisément dans quelle mesure ces coûts hors de contrôle auraient pu être évités si nous avions un système de dénonciation efficace?
    Comme je l'ai dit, je n'ai pas d'informations internes concernant ArriveCAN et mon intention n'est pas de suggérer au Comité les conclusions qu'il devrait tirer sur le projet. Ce que je veux souligner, c'est que même s'il y a eu des actes répréhensibles associés à ce projet, les mécanismes en place ne permettront pas au Comité de faire la lumière là‑dessus.
    Je n'essaie pas de faire une comparaison directe entre le système Phénix et l'application ArriveCAN. Ce que je dis, c'est que les leçons tirées de la saga Phénix s'appliquent à tous les projets de TI et à tous les chantiers du gouvernement.
    Dans le budget de 2022, le gouvernement prévoit 2,4 milliards de dollars sur 5 ans en soutien à l'examen par le Secrétariat du Conseil du Trésor de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Selon vous, pendant que ce nouvel examen sera en cours, la Chambre des communes devrait-elle s'abstenir d'apporter des modifications à la Loi pour mieux protéger les dénonciateurs et la population canadienne?
    Non, pas du tout. Je crois qu'il y a urgence de mettre en œuvre les recommandations du Comité, et peut-être aussi d'examiner le nouveau projet de loi d'initiative parlementaire.
    Le Comité pourrait étudier d'autres améliorations qui permettraient de combler l'énorme écart entre notre régime législatif en matière de protection des divulgateurs et celui des pays européens, entre autres. Même si les recommandations du Comité sont excellentes, il restera encore beaucoup de place à l'amélioration.
    Le projet de loi C‑290 a été soumis au débat le 2 novembre. Pensez-vous que c'est une coïncidence si le 30 octobre, donc trois jours avant, le gouvernement a annoncé un examen de la Loi et accordé trois jours ouvrables pour la soumission de candidatures afin de combler deux sièges au comité consultatif mis sur pied dans le cadre de l'examen? Tout cela après cinq ans, et il n'avait pas le choix. Pensez-vous que c'est un processus de consultation en règle des syndicats du secteur public et de la population canadienne?
    Effectivement, cela semble étrange, surtout quand on connaît la tendance à reporter aux calendes grecques ce qui compte vraiment et à agir précipitamment… Comme je l'ai dit, tout cela me donne l'impression d'une manœuvre dilatoire.
    Vous avez parlé du bilan du gouvernement relativement à la mise en application… Je reviens à l'article où il est question de 18 cas avérés d'actes répréhensibles en 15 ans d'application. On parle du Commissariat à l'intégrité du secteur public, qui a reçu 1 500 plaintes d'actes répréhensibles. Aucun dénonciateur n'a bénéficié de la protection du tribunal créé spécialement à cette fin. Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet?
(1720)
    La Loi est conçue…
    Si vous pouvez répondre en 10 secondes, monsieur Hutton.
    La Loi est conçue pour empêcher les dénonciateurs d'avoir des recours parce que… C'est un terme technique. Les problèmes sont nombreux, mais l'inversion du fardeau de la preuve est impossible devant le tribunal. L'employé doit faire la preuve qu'il a fait l'objet de représailles, ce qui est impossible. Le fardeau de la preuve doit être déplacé sur l'employeur. C'est lui qui devrait faire la preuve qu'aucunes représailles n'ont été exercées.
    Merci, monsieur Hutton.
    Merci, monsieur Johns.
    Mme Block maintenant. Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les deux de votre présence et de votre témoignage, et tout simplement de nous faire bénéficier d'un bagage exceptionnel de connaissances et d'expériences.
    Je voudrais revenir à certaines observations de Mme Kusie et à ce que M. Croll a dit à ce propos. Si forcer 10 000 Canadiens à une quarantaine de deux semaines sous peine d'amende ou d'emprisonnement n'est pas un méfait collectif, alors qu'est‑ce qu'un méfait collectif selon vous?
    Tout d'abord, je ne suis pas un fonctionnaire de la santé publique et je ne suis pas un éthicien. Je crois que la citation concernait les témoins de méfaits collectifs associés à l'application ArriveCAN. Je ne sais pas s'il existe un lien entre l'application ArriveCAN et des mises en quarantaine ou d'autres mesures de santé publique, mais je pense qu'il serait préjudiciable de dire que c'est à cause de la mauvaise gestion du gouvernement que l'application ArriveCAN… Je ne parle pas des effets pour les citoyens qui étaient en voyage.
    Très peu de gens prennent la peine de comparer les coûts dont nous parlons aujourd'hui à ce qu'auraient coûté la fermeture de la frontière, le fait de laisser le virus faire des ravages dans la population ou les interactions en personne à une période où nous avions très peu de données scientifiques sur la situation. Cela dit, je ne peux pas me prononcer sur l'objet de votre question.
    Vous êtes au courant des rapports concernant la mise en quarantaine inutile de 10 000 personnes. Avez-vous entendu parler de ces nouveaux rapports?
    Oui, je suis l'actualité, mais je ne crois pas que c'est mon rôle de décréter si un coût en matière de santé publique est acceptable ou non pour la population. C'est une question qui relève plutôt des éthiciens et des philosophes.
    Je crois que vous avez mis en doute la définition d'un méfait collectif. Selon vous, est‑ce que l'échec d'une application peut être considéré comme un méfait collectif?
    Je ne crois pas être compétent pour me prononcer sur autre chose que le coût du développement du logiciel et son efficacité. Je n'ai aucune information concernant l'exploitation de l'application qui a été livrée par les gens qui l'utilisent, ni de la technologie utilisée pour numériser et vérifier les documents.
    Merci.
    Je peux parler seulement des aspects qui touchent le développement du logiciel.
    D'accord. Je vais donc vous interroger sur un autre sujet.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de l'évaluation des gouvernements numériques par les Nations unies et du fait qu'en 12 ans, nous sommes passés du 3e au 32e rang. De toute évidence, nous faisons fausse route pour ce qui est de la transition vers un gouvernement numérique.
    Je suis d'accord avec vous, surtout après avoir entendu les témoignages précédents sur le processus d'approvisionnement de l'application ArriveCAN et le choix de trois fournisseurs parce qu'il a été établi qu'ils pourraient faire le travail. J'ai été surprise d'apprendre qu'une entreprise comme GC Strategies, qui sous-traite tout le travail lié à une application, a empoché une commission de 15 à 30 %, mais qu'il est impossible d'avoir de l'information concernant les sous-traitants. C'est quelque chose qui m'inquiète énormément, parce que les gouvernements doivent être transparents et rendre des comptes quand ils dépensent l'argent des Canadiens.
    J'ajouterais que c'est sûrement un facteur qui fait augmenter le prix des contrats du gouvernement. Non seulement nous n'avons pas accès à l'information sur ces entrepreneurs, mais nous savons maintenant que les coûts sont plus élevés.
    Pensez-vous que le gouvernement pourrait créer une capacité efficace en interne ou, à tout le moins, qu'il devrait faire affaire avec des entreprises de TI qui peuvent faire le travail elles-mêmes pour économiser l'argent des contribuables?
(1725)
    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Je dois vous demander une réponse courte.
    Oui. Nous payons un surplus parce qu'il y a une crise sanitaire et que les développeurs de technologies sont en forte demande. Les développeurs de technologies peuvent gagner beaucoup plus dans le secteur privé que dans le secteur public.
    Je vous renverrais à ce qu'Amanda Clarke, Sean Boots et Catherine Luelo ont dit à ce sujet. Le Canada paie des surplus, et nous hypothéquons notre capacité à décider de notre avenir en nous fiant à des intermédiaires qui sous-traitent le travail et font grimper les prix.
    Très bien.
    Monsieur Bains, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être avec nous. Je vais commencer avec M. Croll.
    Mon collègue a fait référence à un article que vous avez publié. Vous avez fait valoir que ces ateliers de développement d'applications travaillent dans des conditions idéalisées. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce propos?
    C'était la fin de semaine de l'Action de grâces. Ils sont tous restés durant la fin de semaine pour relever le défi. Je ne crois pas que les gens étaient dans la même situation en mars ou avril 2020.
    Cet atelier a déjà accès dans les deux cas à un logiciel de gestion des versions, à des comptes existants d'hébergement dans le nuage, à des outils d'environnement de développement intégré, à des outils comme Slack, et que sais‑je. Tout est en place pour faire le travail. Les participants ont probablement accès à Figma pour la conception d'une interface utilisateur.
    Avec ce genre d'architecture pipeline, il n'est pas nécessaire de créer une nouvelle application à partir de rien. Quand il faut coordonner des dizaines de sous-traitants dans diverses entreprises, souvent par l'entremise de tiers intermédiaires, les frais généraux de gestion et de soutien du processus comparativement à ceux du Service numérique canadien et d'autres organismes au Canada… Juste faire fonctionner ce système gonfle la note.
    Vous venez de mentionner le Service numérique canadien. Dans ce même article, vous soutenez que le gouvernement devrait avoir son propre atelier de développement d'applications. Vous venez de parler du Service numérique canadien. En quoi l'atelier de développement d'applications que vous proposez se distingue‑t‑il du Service numérique canadien?
    Le Service numérique canadien est ce qui se rapproche le plus actuellement de ce genre d'atelier.
    Je pourrais illustrer cela par le jeu de blocs Lego. Avec des blocs Lego, on peut construire une maison relativement rapidement en assemblant différentes pièces. Notre gouvernement a déjà des applications comme GC Notification, un outil très simple de transmission de notifications. Les participants au rassemblement FWD50 de cette année ont développé un système de notification en une heure.
    Nous avons une autre application pour les formulaires. Pour remplir un formulaire, il suffit d'utiliser l'outil que nous avons conçu. L'accès et la traduction sont automatiques, et il est très facile à utiliser. Il est conforme à toutes les lois. Nous avons un autre outil pour la traduction. Il s'agit de concevoir les blocs qui deviennent la base à partir de laquelle d'autres outils technologiques peuvent être créés rapidement.
    Nous avons accueilli une conférencière ukrainienne dont le travail est d'assurer la liaison avec l'Union européenne pour le gouvernement numérique. L'Ukraine a gravi plusieurs échelons dans le classement des gouvernements numériques, malgré la guerre. L'Ukraine a mis en place un outil technologique qui permet aux citoyens de s'identifier en regardant leur téléphone. Le Canada n'a pas d'identité numérique unique. Comme vous vous en doutez, la connexion au système est la première étape pour pouvoir l'utiliser. En Ukraine, cet outil a été rapidement converti pour permettre les signalements de crimes de guerre ou d'attaques.
    Il suffit d'avoir des blocs pour construire quelque chose de nouveau. Malheureusement, nous n'investissons pas dans la conception de blocs de construction uniformes et réutilisables. Dans le modèle de Westminster, chaque ministère met au point ses propres outils qui seront applicables dans son petit royaume. Il serait plus efficace de définir des éléments communs, comme une notification ou un formulaire, qui seront utilisés partout et par tout le monde. C'est ce qui est le plus utile et qui permet ensuite de faire des expériences et de construire autre chose. Si ces expériences ne fonctionnent pas, on recommence au lieu de s'exposer à la critique.
    Taïwan a un portail gouvernemental numérique en parallèle. Sur chaque page du site Web de Taïwan, il suffit de remplacer « GOV » par « G0V » pour voir la version bêta du site Web actuel. Tout le monde peut faire des expériences et, si le résultat est concluant, il sera offert au grand public. C'est très différent de notre approche.
    J'ai peut-être le temps pour une dernière question.
    Nous avons reçu un organisateur du marathon de programmation. Pensez-vous qu'à l'avenir, ces marathons permettront d'ajouter de la valeur — et ne seront pas seulement des coups de publicité et des vitrines pour les développeurs de logiciels — et d'aider le gouvernement à développer des applications? Les participants à ces marathons ont-ils contribué à améliorer des produits développés par le gouvernement?
(1730)
    Les activités de prototypage rapide comme les marathons de programmation sont formidables, mais il n'en sort jamais des produits finis. C'est souvent trompeur. Il serait difficile de livrer un produit fini en une semaine.
    J'aimerais beaucoup que des groupes du gouvernement participent à des marathons de programmation quand il n'y a pas de crise. Le pays doit déterminer les produits à développer et se mettre à l'ouvrage en dehors des périodes de crise. Il faut prévoir des fonds pour investir dans ce genre de projets et s'assurer que les produits sont prêts quand nous en avons besoin.
    Dans le secteur privé, les marathons de programmation sont la preuve qu'il est tout à fait possible pour des ateliers de petite taille et agiles de damer le pion à de grands organismes mieux nantis qui excellent à répondre aux demandes de propositions. Le gouvernement doit diversifier ses fournisseurs de technologies, idéalement en évitant l'intervention de tiers…
    Je dois vous interrompre, monsieur Bains.
    Madame Vignola, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Croll, ce que vous dites est très intéressant.
    Je pense que ma question est simple. Au cours des dernières années, des centaines de millions de dollars ont été investis par le gouvernement canadien dans des mises à jour technologiques et autres. Malgré cela, le pays occupe maintenant la 32e place de 193, alors qu'il était au troisième rang.
    Qu'est-ce qui explique un tel recul malgré les investissements? Comment cette situation a-t-elle pu influer, s'il y a eu influence, sur le coût et le déploiement d'ArriveCAN?
     Je vais faire mon possible pour répondre en français.
    Je dirais d'abord que c'est à cause de l'avancement d'autres pays par rapport au Canada. Beaucoup d'autres pays ont progressé, comme l'Angleterre et l'Ukraine, par exemple. Les notes que j'ai fournies contiennent beaucoup d'informations à ce sujet. Il y a aussi des résultats de recherche assez étonnants.
    Par ailleurs, il y a des problèmes au Canada liés aux compétences provinciales. En effet, comme la plupart des identifications se font à partir du régime d'assurance maladie ou des permis de conduire, il est difficile d'avoir un système d'identification fédéral unique. C'est étonnant.
    On fait confiance à Google, à Twitter, à Facebook ou à LinkedIn pour ouvrir des sessions, mais ce n'est pas possible avec notre pays. En fait, le gouvernement est le seul qui nous doit quelque chose et qui a un processus juridique. Je ne peux pas parler à Mark Zuckerberg et lui dire qu'il m'a donné de l'information de connexion et qu'il ne devait pas le faire.
    Nous devons vraiment en arriver à la conclusion que le monde est à l'ère numérique et que notre pays est à l'ère numérique. Nos services doivent d'abord être numériques. Cela ne veut pas dire qu'on va laisser derrière les personnes qui n'adhèrent pas à l'environnement numérique, mais les systèmes numériques sont plus efficaces. On peut faire plus de recherches sur une plateforme numérique. Les informations de connexion sont là, et c'est plus facile d'aller voir ce qui s'est passé au cours d'une session plutôt qu'au cours d'une conversation entre deux humains.
    Je crois qu'il y a beaucoup de raisons d'investir là-dedans, mais certains employés du gouvernement ne veulent pas que leur service soit forcé de suivre l'évolution de la technologie et des dépenses liées à une application commune.
    Il est temps que le Canada accélère le processus et reprenne sa place.

[Traduction]

    J'ai bien peur d'avoir à vous interrompre, monsieur Croll.
    Monsieur Johns, vous avez deux minutes et demie. Nous allons conclure ensuite.
    Merci.
    Ma mère était fonctionnaire. J'ai été un témoin privilégié de ses sacrifices et de son incroyable volonté de servir ses compatriotes. C'était franchement impressionnant.
    Le 12 juin 2022, à l'occasion de la Semaine nationale de la fonction publique, le premier ministre a déclaré que « le gouvernement agit pour que la fonction publique soit plus inclusive ». Quand je réfléchis à tout ce que nous entendons, je n'ai pas l'impression que c'est un milieu de travail sûr et inclusif. Il semble plutôt que les gens ont peur et ne savent pas à qui en parler.
    Monsieur Hutton, comment décririez-vous un milieu de travail où, si on se fie aux résultats, les gens ne savent pas vers qui se tourner? Pour plus de la moitié des fonctionnaires en arrêt de travail, la santé mentale est en cause. Pensez-vous que ce facteur contribue à la situation?
    Je crois qu'il y a de multiples facteurs en cause.
    La recherche montre que dans certains organismes, le climat d'ouverture et la compétence des gestionnaires font en sorte qu'il n'y a pas de dénonciations. En cas d'acte répréhensible, le témoin en parle au patron, qui prend les mesures nécessaires sans qu'il y ait de répercussions. Il n'est jamais question de dénonciation.
    Dans un environnement très hiérarchisé, où les employés ont peur de rapporter une mauvaise nouvelle aux échelons supérieurs et où il y a de sérieux problèmes de harcèlement, il faut des mécanismes de dénonciation. Ces mécanismes ne règlent pas les problèmes, mais ils peuvent éviter certains préjudices. La dénonciation peut servir d'alerte précoce et assurer que les problèmes restent sous contrôle.
    Absolument rien ne pourrait justifier que le système Phénix ait survécu à une première année d'exploitation. Pourtant, la saga a duré des années et il a finalement été mis en place. C'est ahurissant.
    Pour ce qui est du climat général dans la fonction publique, j'ai des opinions, mais je n'ai pas une expérience directe. Je vais donc…
(1735)
    J'ajouterais qu'il faut aussi tenir compte du coût humain et du coût des pertes économiques de ces désastres. Le gouvernement fait aussi face à des réclamations en matière de santé mentale. C'est important. Quand l'insécurité du milieu de travail mène à des problèmes de santé mentale et à un arrêt de travail, une aide est nécessaire. C'est un autre échec du gouvernement.
    Je vous remercie énormément pour votre précieuse contribution.
    Si vous me le permettez, j'aimerais mentionner que les dénonciateurs souffrent souvent d'un trouble de stress post-traumatique à cause des représailles subies et de l'ensemble du processus. C'est un enjeu important de santé mentale.
    Merci, monsieur Johns.
    Monsieur Croll et monsieur Hutton, merci d'être venus à notre rencontre. Je vous en suis reconnaissant, comme toujours.
    À moins que quelqu'un veuille ajouter quelque chose, nous allons nous dépêcher d'aller voter.
    La séance est levée.
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