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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 015 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 19 avril 2016

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    À l'ordre, s'il vous plaît.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, et dans le cadre de notre étude du rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire, nous sommes heureux d'accueillir comme témoins ce matin le gouverneur de la Banque du Canada, M. Poloz, de même que la première sous-gouverneure, Mme Wilkins.
    À vous la parole. Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d'être ici, devant le comité.
    Bonjour, monsieur le président, et merci.
    Je salue aussi les membres du comité. La première sous-gouverneure Wilkins et moi-même sommes ravis d'être de retour pour présenter le Rapport sur la politique monétaire que la Banque du Canada a publié la semaine dernière.
    Je tiens à saluer tout particulièrement les nouveaux membres du comité. Je pense que presque tout le monde est nouveau ici. Je me réjouis à la perspective de vous rencontrer deux fois par an pour discuter de l'économie canadienne et de notre politique monétaire.
    Douze mois se sont écoulés depuis que Carolyn et moi avons participé à l'une de vos réunions. Les économies canadienne et mondiale ont vraiment connu une année très mouvementée. Permettez-moi de faire rapidement le point sur la situation.
    Comme vous le savez, l'économie canadienne fait face à un choc majeur des termes de l'échange, provoqué par une chute marquée des prix du pétrole et d'autres produits de base qui s'est amorcée à la fin de 2014.

[Français]

     Comme le Canada est un important producteur de ressources — surtout  de pétrole —, ce choc a été un énorme coup dur. II a déclenché un processus d'ajustement difficile qui a fortement perturbé beaucoup de Canadiens. Les investissements et la production dans le secteur des ressources se sont effondrés, la diminution du revenu national a provoqué une réduction des dépenses des ménages et le secteur des ressources a subi d'importantes pertes d'emploi. Ces facteurs négatifs l'ont emporté nettement sur les avantages découlant de la baisse des coûts de l'énergie pour les ménages et les entreprises.
    Du point de vue de la politique monétaire, le choc a fait peser une double menace sur notre économie l'an dernier. Tout d'abord, il représentait clairement un risque à la baisse lié à notre capacité d'atteindre la cible d'inflation. De plus, en réduisant le revenu national, il a aggravé la vulnérabilité liée aux déséquilibres dans le secteur des ménages, comme le montre le ratio élevé de la dette par rapport aux aux revenus. Pour faire face à ces deux menaces et faciliter les ajustements économiques nécessaires, nous avons abaissé le taux directeur à deux reprises l'an dernier, pour le porter à 0,5 %.

[Traduction]

    Nous avions bien conscience que cet abaissement pouvait accentuer légèrement la vulnérabilité liée aux déséquilibres dans le secteur des ménages, mais les baisses du taux directeur l'an dernier avaient principalement pour objectif d'amortir la chute des revenus et de l'emploi causée par le fléchissement des prix des ressources.
    Une autre conséquence naturelle du choc touchant les termes de l'échange a été la baisse du taux de change du dollar canadien. Notons que cette situation n'est pas propre au Canada. Un grand nombre de pays tributaires des ressources ont en effet enregistré une dépréciation semblable de leur monnaie.
    Tant les modifications du taux directeur que la dépréciation de la monnaie ont contribué à favoriser les ajustements économiques, qui ont évolué selon deux axes. Tandis que la faiblesse de l'activité s'est concentrée dans le secteur des ressources, l'économie hors ressources a continué de progresser à un rythme modéré. Dans ces conditions, les exportations hors ressources gagnent clairement en vigueur.
    À l'approche de la nouvelle année, l'anxiété était vraiment palpable chez de nombreux participants aux marchés financiers. Les perspectives de croissance de l'économie mondiale subissaient une autre révision à la baisse, et les prix des produits de base touchaient de nouveaux creux. À la Banque, de nouvelles données indiquaient que les entreprises du secteur canadien de l'énergie réduiraient leurs investissements encore plus qu'on le croyait précédemment. Dans ce contexte, nous avons dit qu'au début de nos délibérations entourant la décision relative au taux directeur en janvier, nous penchions pour un nouvel assouplissement monétaire, mais que nous devions attendre de connaître les détails du plan budgétaire du gouvernement.
    Depuis janvier, plusieurs évolutions négatives se sont produites.
    Premièrement, les perspectives de croissance de l'économie mondiale pour 2016 et 2017 ont encore une fois été revues à la baisse. Elles englobent l'économie américaine, où les nouveaux profils d'évolution de l'investissement et du logement se traduisent par une composition de la demande moins favorable aux exportations canadiennes.
    Deuxièmement, les intentions d'investissement dans le secteur canadien de l'énergie ont de nouveau fait l'objet d'une révision à la baisse. II est vrai que les prix du pétrole ont nettement remonté par rapport aux creux extrêmes qu'ils avaient touchés. Toutefois, les entreprises canadiennes nous ont signalé que même si les prix continuaient d'avoisiner leurs niveaux actuels, elles procéderaient à de nouvelles réductions importantes supérieures à celles que nous avions prévues en janvier. Par convention, lors de l'établissement de notre projection, nous tenons compte du prix moyen du pétrole affiché quelques semaines auparavant, ce qui nous permet de faire abstraction de la variabilité des marchés. C'est pourquoi nos hypothèses relatives aux prix du baril de pétrole dépassent seulement de deux à trois dollars celles de janvier.
(1105)
    Troisièmement, le dollar canadien a aussi remonté par rapport aux creux qu'il avait enregistrés. Dans sa projection actuelle, la Banque postule que le dollar canadien se situera à 76 ¢ américains, soit 4 ¢ de plus qu'en janvier. Même si de nombreux facteurs sont à l'oeuvre, dont les prix du pétrole, l'essentiel de la hausse semble attribuable à l'évolution des attentes à l'égard de la politique monétaire aux États-Unis et au Canada. Le niveau plus élevé postulé pour le dollar canadien dans notre projection se traduit par un abaissement du profil d'évolution des exportations hors ressources, tout comme l'affaiblissement de la demande émanant des États-Unis et d'ailleurs.
    Lorsque le Conseil de direction de la Banque a entamé ses délibérations entourant l'annonce du taux directeur ce mois-ci, nous avons constaté que ces trois évolutions auraient dû donner lieu à un profil de croissance prévu pour l'économie canadienne plus bas qu'en janvier. Ce constat peut sembler paradoxal compte tenu de la série d'indicateurs économiques mensuels qui ont démarré l'année en force. Cela dit, une partie de cette vigueur s'explique par un effet de rattrapage qui fait suite à la faiblesse temporaire dans certains domaines au quatrième trimestre; une autre partie est liée aux facteurs temporaires qui se dissiperont au deuxième trimestre.
    Le budget fédéral est un autre nouveau facteur que nous avons dû prendre en considération. Pour les besoins du Rapport sur la politique monétaire et de l'annonce du taux directeur, nous avons examiné minutieusement les projections du ministère des Finances sur l'effet multiplicateur du choc budgétaire. D'après notre analyse, ces projections sont raisonnables dans la mesure où elles s'inscrivent dans la fourchette des estimations que l'on retrouve dans la littérature économique et dans les travaux de recherches du personnel de la Banque. Une grande incertitude entoure évidemment les effets des mesures budgétaires sur la croissance à long terme, surtout parce qu'ils devront se répercuter sur le secteur des ménages. Dans notre rapport, nous avons rendu compte du risque que les ménages puissent être plus portés à faire des économies que le laisserait supposer l'expérience passée.

[Français]

     Compte tenu de tous ces changements, le profil de croissance projeté est généralement plus élevé qu'il ne l'était en janvier. Nous prévoyons maintenant une croissance réelle du PIB de 1,7 % cette année, de 2,3 % l'an prochain et de 2 % en 2018.
    Selon nos prévisions, les capacités excédentaires devraient se résorber un peu plus tôt qu'envisagé en janvier, soit au second semestre de 2017. Cela dit, le moment exact de cette résorption est encore plus incertain que d'habitude. Il est toujours difficile d'estimer la croissance potentielle d'une économie. Cette difficulté s'aggrave quand l'économie passe par un ajustement structurel majeur, comme c'est le cas actuellement au Canada. Nous savons que la chute des investissements dans le secteur des produits de base ralentira le taux d'augmentation de la production potentielle de l'économie. Nous avons abaissé notre estimation de la croissance de la production potentielle à court terme de 1,8 % à 1,5 %.
(1110)

[Traduction]

    Pour ce qui est du mandat principal de la Banque, l'inflation mesurée par l'IPC global se situe actuellement en deçà de la cible de 2 %. Les pressions à la hausse sur les prix des importations découlant de la dépréciation de la monnaie sont plus que compensées par l'effet des prix plus bas des produits énergétiques de consommation et les pressions à la baisse engendrées par les capacités excédentaires au sein de l'économie. Au fil de la diminution de ces facteurs, l'inflation mesurée par l'IPC global devrait rattraper l'inflation mesurée par l'indice de référence et rester de façon durable à la cible au cours du second semestre de l'année.
    En résumé, la situation actuelle est la suivante: les données économiques récentes ont été encourageantes dans l'ensemble, mais ont varié aussi passablement. II est toujours possible que l'économie mondiale déçoive encore, l'ajustement complexe face à la détérioration des termes de l'échange bridera la croissance au Canada pendant une bonne partie de notre période de prévision, et la réaction des ménages devant les mesures budgétaires du gouvernement fédéral exigera une surveillance étroite. Nous n'avons pas encore de preuve tangible de la hausse des investissements ni de la création soutenue d'entreprises, quelques-uns des ingrédients nécessaires au retour à la croissance naturelle et autosuffisante, assortie d'une inflation qui se maintient à la cible de façon durable.
    Monsieur le président, Carolyn et moi-même nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions
    Je vous remercie, monsieur le gouverneur, de cette présentation fort détaillée.
    Nous allons entreprendre la première série de questions. M. Sorbara, allez-y. Vous disposez de sept minutes.
    Monsieur le gouverneur, madame Wilkins, je vous souhaite la bienvenue.
    Ma première question porte sur l'efficacité des mesures de relance. Monsieur le gouverneur, je ne parlerai pas des multiplicateurs fiscaux, car je pense que vous avez déjà répondu à quelques questions à ce sujet et que vous l'avez abordé au cours des derniers jours.
    À l'heure actuelle, nous nous retrouverons avec une capacité excédentaire et les taux d'intérêt se situent dans la limite inférieure. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure un plan de relance budgétaire mis en oeuvre par le gouvernement est efficace?
     De façon générale, depuis que Keynes a publié son livre sur la Grande Dépression, pendant les années 1930, nous savons que les politiques monétaires et fiscales ont de grandes répercussions dans certaines circonstances bien précises. Ainsi, l'incidence de la politique monétaire est moindre lorsque les taux d'intérêt sont près de la limite inférieure, car les gens ont déjà emprunté de l'argent pour acheter une maison ou une automobile, les entreprises, elles, ont fait des emprunts pour investir, et ainsi de suite. Le fait de réduire un peu plus les taux d'intérêt n'a qu'une incidence minime.
    C'est dans un tel contexte, lorsque nous nous trouvons dans une telle situation, que la politique fiscale a de grandes répercussions; parmi toutes les mesures possibles, c'est celle qui aura la plus grande incidence. La raison est simple: lorsque nous avons des modèles économiques et que nous faisons des simulations en ce qui concerne les politiques fiscales, normalement, au départ, nous sommes en situation d'équilibre. Or, à l'heure actuelle, au Canada, nous sommes bien loin de l'équilibre. Nous avons une capacité excédentaire très importante.
    Dans ce contexte, aucun autre changement susceptible de contrebalancer partiellement les effets d'un changement fiscal n'est prévu, que ce soit du côté des taux d'intérêt ou des taux de change. C'est pour cette raison que les mesures fiscales ont plus de poids que la politique monétaire dans un tel contexte.
    Je vais passer à la deuxième question et parler brièvement de l'inflation. Si j'examine les pressions exercées sur les salaires au Canada, je crois qu'elles s'accélèrent et qu'elles sont d'environ 3 %. Corrigez-moi si j'ai tort. C'est un chiffre plutôt élevé. Je sais que les États-Unis surveillent ces données de très près. De nouvelles pressions sont exercées sur les salaires, mais d'une certaine façon, nous avons encore une importante capacité excédentaire.
    Ma préoccupation est la suivante. Est-il possible — c'est un aspect que vous avez abordé dans votre déclaration préliminaire — que l'inflation de base dépasse ce 2 % plus tôt que vous l'avez prévu?
(1115)
    Pour le moment, nous estimons que la probabilité qu'une telle chose se produise est très faible.
     Nous avons produit diverses estimations en ce qui concerne le niveau de capacité de l'économie. Nous prenons une estimation qui se situe dans la moyenne, mais il y a quand même beaucoup d'incertitude en ce qui concerne le nombre exact.
    La situation ici est fort différente de la situation aux États-Unis. Je dirais que ce pays a une longueur d'avance d'un an par rapport à nous pour ce qui est de ce processus de convergence. Bien entendu, les économistes surveillent tous ces signaux, comme vous l'avez mentionné. Dès qu'on s'approche de la pleine capacité, on peut constater que les règlements salariaux commencent à augmenter. C'est l'un des premiers signes indiquant que l'inflation s'apprête à reprendre. C'est à ce moment que sonnent les premiers signaux d'alarme associés à l'approche de gestion du risque, qui fait partie de la politique monétaire, et qu'il faut commencer à intervenir.
    Il faut garder à l'esprit que ce n'est pas une science aussi exacte que nous le laissons croire. Nous croyons que le potentiel sera plus élevé plus tard au cours de l'année et l'année prochaine en raison des investissements qui sont effectués dans les autres secteurs de l'économie, ce qui permet de repousser encore plus loin les limites possibles de l'économie.
    J'aimerais revenir à la croissance économique. Au cours du premier trimestre, la croissance a été exceptionnelle. Je crois que l'économie canadienne a enregistré une croissance de 2,8 %. Vos prévisions, ou plutôt, les prévisions de la Banque pour le deuxième trimestre sont de 1 %, tandis que pour l'année, elles sont de 2 %. Vous avez parlé de facteurs temporaires. Je crois que le terme était « non durables ».
    Je suis curieux de savoir ce qu'il en est de la diminution prévue au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre. J'ai l'impression que le fait de passer de 2,8 % à 1 % représente une importante diminution. Je me demande si les gens ont l'impression que les perspectives de la Banque sont à la baisse. Pourriez-vous nous faire part de vos observations à ce sujet?
    Je pense que certaines prévisions privées montrent un taux de croissance beaucoup plus élevé pour le Canada en 2016. Je me demande si, peut-être, la hausse du prix des produits de base, la vigueur de la transition et la vigueur du secteur hors ressources sont plus fortes que les estimations de la Banque. J'aimerais aussi que vous nous donniez votre opinion à ce sujet, s'il vous plaît.
    Même le pourcentage que vous avez mentionné, 2,8 %, ne demeure qu'une prévision. Il faudra du temps avant de savoir ce qu'il en est véritablement.
    Carolyn, voulez-vous nous donner un peu plus de détails?
    De toute évidence, depuis toujours, on constate des variations de la croissance d'un trimestre à l'autre. Pour être en mesure d'élaborer une bonne politique monétaire, il faut examiner les facteurs associés aux tendances sous-jacentes. L'un de ces facteurs semble influer sur les fluctuations qu'on observe d'un trimestre à l'autre. C'est ce que vous avez constaté.
    Plus précisément, dans ce cas précis, nous constatons diverses choses. Je n'ai pas l'intention de les expliquer toutes en détail, mais il y a eu des fluctuations du côté des stocks au quatrième et au premier trimestres, qui auront une incidence sur les tendances trimestrielles à compter du deuxième trimestre. Nous constatons aussi l'existence d'autres facteurs dans le secteur de l'automobile et le secteur de la production automobile. De toute évidence, il semble qu'ils ne sont pas viables.
    Je pense que les exportations constituent le troisième facteur. Elles ont connu un très bon départ cette année, et si on compare la situation réelle aux attentes, étant donné que nous avons fait des prévisions en ce qui concerne la demande étrangère, plus particulièrement la demande provenant des États-Unis, on se rend compte que les exportations sont probablement un peu plus fortes que ce à quoi nous nous attendions. Donc, nous avons adopté une approche prudente en faisant nos prévisions, et nous pensons qu'il y aura un retour à la normale au cours des prochains trimestres. Bien entendu, ces prévisions sont peut-être trop prudentes. Les données relatives à l'exportation ont révélé une certaine instabilité. Les dernières données dont nous avons pris connaissance n'étaient pas extraordinaires, mais je pense que ce qui importe, c'est le fait que nous essayons de trouver la meilleure tendance trimestrielle, en nous fondant sur les facteurs sous-jacents que nous constatons. Du côté des exportations, nous avons déterminé qu'il s'agit désormais d'un risque à la hausse, car nous avons été prudents lorsque nous avons fait nos prévisions.
    Merci.
    Madame Raitt, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le gouverneur, madame la première sous-gouverneure, je suis très heureuse de vous rencontrer et je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    Je vais me concentrer sur un aspect bien précis de votre analyse, car je souhaite déterminer si, oui ou non, les mesures proposées par le gouvernement dans le budget stimuleront la croissance au pays. Dans votre rapport, vous indiquez, à juste titre d'ailleurs, que le gouvernement a prévu des investissements d'environ 11 milliards de dollars dans l'infrastructure et d'environ 12 milliards de dollars dans les mesures destinées aux ménages, et vous y mentionnez qu'à votre avis, les effets de ces investissements se feront sentir en 2016. Cet aspect est l'un des fondements de votre analyse, car vous indiquez que ces investissements vont aider les gens et faire contrepoids aux facteurs négatifs qui affectent l'économie. Par contre, vous avez aussi fait deux mises en garde très importantes, dont l'une qui est liée aux ménages; vous indiquez ne pas savoir avec certitude si ceux-ci feront ou non des dépenses.
    Dans la section suivante, vous indiquez aussi que la dette des ménages a augmenté au Canada parce que le nombre d'hypothèques augmente en Ontario et en Colombie-Britannique. Bien entendu, nous constatons des effets négatifs sur les marchés immobiliers dans les provinces qui produisent du pétrole. En tenant compte de tous ces facteurs, j'aimerais que vous alliez un peu plus loin et que vous nous donniez plus de détails; par exemple, puisque nous savons que la dette des ménages est très élevée, pensez-vous que le fait de donner plus d'argent aux familles du pays motivera nécessairement celles-ci à faire des dépenses? Les gens ont tendance à économiser ou à rembourser leurs dettes, car ils se demandent si des emplois seront créés. J'aimerais ouvrir une parenthèse. C'est très difficile de voir que nos cousins, nos frères, nos soeurs et nos amis perdent leur emploi un peu partout au pays et de constater qu'il y a beaucoup de discussions entourant le secteur pétrolier. Vous avez mentionné qu'il s'agit d'un changement structuré au sein de notre économie. Ces gens le constatent, et ils sont très inquiets, car ils ne savent pas ce que l'avenir leur réserve.
    Donc, pouvez-vous me dire comment le conseil s'y est pris pour finalement décider que les gens dépenseront cet argent au lieu de l'économiser? Avant d'entendre votre réponse, je tiens à dire une dernière chose: l'allégement fiscal que le gouvernement a proposé représente, pour un particulier, 90 ¢ par jour. Je ne vois pas comment cette somme pourrait générer une forte croissance économique et contrebalancer les pertes observées au pays.
    Je vous laisse répondre à la question.
(1120)
    Vous avez mentionné beaucoup de facteurs, qui jouent tous un rôle important dans cette analyse. Je pense que nous avons été très clairs: l'analyse que nous avons présentée comporte certains éléments d'incertitude. Comme vous l'avez mentionné, c'est pour cette raison que nous avons décidé de mettre l'accent sur l'un des risques; nous avons déterminé que les gens pourraient être plus portés à faire des économies que le laisserait supposer l'expérience passée.
    Nous avons constaté une expérience similaire à celle-ci, il y a un an. Lorsque des changements ont été apportés à la Prestation universelle pour la garde d'enfants, nous avons commencé par faire une supposition — oui, il s'agissait véritablement d'une supposition. Nous avons supposé que les gens dépenseraient peut-être la moitié de la somme qu'ils recevraient et qu'ils économiseraient l'autre moitié. Nous n'étions pas très loin de la réalité. Donc, lorsque nous faisons des suppositions de ce type, nous ne présumons pas que tout le monde va dépenser tout l'argent reçu. C'est un multiplicateur qui est inférieur à 1, ce qui signifie qu'inévitablement, les gens économisent une partie de l'argent reçu. C'est un choix qui est différent d'un ménage à l'autre, et comme nous l'avons dit, la situation peut évoluer au fil du temps. Les gens ne dépensent pas l'argent tout de suite. Ils sont plus prudents au début qu'à long terme.
    Par conséquent, oui, il y a de l'incertitude, mais notre politique monétaire n'exige pas que nous fassions des prévisions exactes. Il est question ici des limites et des risques entourant nos prévisions; notre politique monétaire doit convenir à un éventail de résultats possibles.
    L'an dernier, monsieur le gouverneur, vous avez comparu devant le comité. À ce moment, vous avez parlé du marché immobilier et vous avez mentionné une statistique intéressante en ce qui concerne les inquiétudes associées au marché immobilier. Dans votre rapport, vous indiquez que les marchés étaient surévalués de 10 % à 30 %.
    Je sais que mon ancien collègue, James Rajotte, et vous avez discuté de cet aspect au comité. Je me demande si vous pensez qu'à l'heure actuelle au Canada, il y a bel et bien une bulle immobilière, car de toute évidence, la situation économique s'est détériorée depuis. La situation est grave dans les Prairies et en Alberta, par exemple, d'où vient mon collègue Ron. J'aimerais simplement que vous me disiez où se situe le marché immobilier aujourd'hui, un an après votre dernière comparution devant le comité.
    J'aimerais préciser certains faits avant de laisser la parole à Carolyn.
    Il y a un an, nous avons publié une recherche dont l'objectif était d'analyser les marchés immobiliers au Canada et dans le monde, notamment ceux qui avaient connu une période de surévaluation suivie d'un ajustement. Nous cherchions à comprendre les éléments fondamentaux de la question.
    À l'époque, un certain nombre d'études étaient arrivées à des conclusions assez variées sur la surévaluation du marché canadien. Étant donné que celui-ci varie considérablement d'une région à l'autre, on se demandait même s'il était juste de conclure à une telle chose.
    Selon nous, il est très risqué de se fier à ce genre de statistiques, parce que les expériences varient tellement au pays et que les modèles ne tiennent pas compte de certains éléments qui induisent d'importantes différences d'un marché à l'autre.
    Ceci étant dit, je vais laisser la parole à Carolyn, qui fera le point sur l'évolution et l'état actuel du marché de l'immobilier.
(1125)
    Nous continuons à surveiller de très près le marché de l'immobilier en raison de son incidence potentielle sur la stabilité financière. L'an dernier, le fait que nous soyons passés d'une économie axée sur l'énergie à une économie qui n'est pas fondée sur les produits primaires a eu les conséquences auxquelles on pouvait s'attendre. Vous avez souligné avec raison que le marché de l'immobilier a ralenti considérablement là où l'on dépend davantage de l'énergie, notamment en Alberta, mais aussi dans d'autres provinces. C'est ce à quoi il faut s'attendre lorsque les gens perdent leur emploi et déménagent dans une autre province ou retournent simplement là où ils travaillaient avant de déménager en Alberta. Il s'agit d'une situation courante et nous constatons un ralentissement dans cette région.
    On observe deux autres phénomènes ailleurs au pays. Dans les grandes villes comme Vancouver et la région du Grand Toronto, les marchés sont très solides et nous les surveillons de près. La force de ces marchés s'explique par la dynamique de l'offre et de la demande qui perdure depuis des années, la migration interprovinciale, la croissance de l'emploi et le fait que l'économie dans ces régions se porte relativement mieux que dans celles tributaires de l'énergie.
    Pour évaluer le marché dans un tel contexte, il faut vraiment prendre en considération la dynamique de l'offre et de la demande. Les contraintes de l'offre à Vancouver et à Toronto sont bien connues. Elles s'expliquent par la géographie, les permis et par le fait que ces villes sont des endroits attirants où vivre et travailler.
    Assurément, il s'agit de facteurs dont nous tenons compte du point de vue de la politique monétaire. Par contre, une politique monétaire est un outil qui manque de finesse pour les choses sur lesquelles nous axons actuellement nos efforts. Il existe peut-être d'autres outils.
    Comme vous le savez sans doute, certaines mesures gouvernementales ont été mises en oeuvre récemment et nous allons les suivre de près.
    Merci.
    Monsieur Caron.
    Monsieur le gouverneur, madame Wilkins, je vous souhaite la bienvenue.
    Durant la dernière législature, nous avons eu de nombreux échanges intéressants concernant les outils dont la banque devrait, ou non, disposer. À un moment donné, il a été question de l'assouplissement quantitatif.
    L'an dernier, vous vous êtes dit prêt à considérer la possibilité de taux d'intérêt négatifs, que certains pays sont en train de mettre à l'essai, dont la Suède, le Danemark ainsi que la zone euro. Un consensus semble se dégager à cet égard. J'aimerais entendre vos observations sur les résultats de ces expériences jusqu'à présent.
    D'après ce que je comprends, on s'entend pour dire qu'à court terme, cette solution pourrait répondre aux besoins qu'on cherche à combler, mais qu'à moyen terme, elle perd de son efficacité. On commence à se rendre compte que cela provoque une perte d'efficacité sur le plan de la relance économique et des taux d'intérêt lorsque l'on cherche à obtenir les investissements nécessaires.
    Pourriez-vous commenter ce qui s'est passé jusqu'à présent?
    Certainement.
    La panoplie d'outils dont vous parlez a été établie au beau milieu de la récession de 2008. L'automne dernier, nous avons entrepris une mise à jour de celle-ci à la lumière des expériences vécues depuis. Heureusement, la plupart de ces expériences n'ont pas eu lieu au Canada, mais dans d'autres pays plus durement frappés par la crise.
    Dans notre contexte institutionnel, nous sommes maintenant d'avis que nos marchés continueront de fonctionner plus ou moins normalement avec des taux d'intérêt aussi bas que -0,5 %, alors qu'auparavant, un taux de 0 % — ou 0,25 % pour être précis — était considéré comme le plancher absolu. Nous avons donc une marge de manoeuvre de 75 points de base pour faire face aux problèmes à court terme, comme vous l'évoquez. Il est vrai que des distorsions pourraient se manifester avec le temps et que l'efficacité de la mesure s'amoindrirait avec le temps.
    C'est dans ce contexte que nous songeons à l'assouplissement quantitatif, lequel a fait l'objet d'utilisations très intéressantes dans différentes économies, avec des résultats considérables sur leur rendement.
    Nous ne nous prononçons pas sur les outils auxquels nous aurions recours si la situation se présentait. Nous nous contentons d'affirmer que, selon nos prédictions, il ne sera pas nécessaire d'avoir recours aux outils. En effet, les perspectives sont assez positives, mais si l'économie devait subir un grave revers, nous disposons d'une panoplie d'outils qui nous aideront à en atténuer les répercussions. L'ordre selon lequel les outils seront employés, ou leur combinaison, dépendra des circonstances et de notre évaluation de la situation.
    Pour continuer sur le sujet de la panoplie d'outils, je me souviens d'observations que vous avez formulées durant la dernière législature, à savoir que la croissance économique plus faible constitue la nouvelle norme. Vous avez entrepris des pourparlers avec le ministère des Finances concernant le renouvellement de la cible de maîtrise de l’inflation, dont l'expiration est prévue à la fin novembre. Cette cible a toujours été de 2 %, plus ou moins 1 %, bien sûr, mais elle a été établie dans les années 1990. Il me semble qu'à l'époque, la norme était différente.
    Envisage-t-on de donner à la banque plus de souplesse en établissant la cible au moins pour les cinq prochaines années, peut-être à un niveau plus élevé, de sorte que vous auriez une plus grande marge de manoeuvre pour établir le taux d'intérêt nominal et ainsi influencer davantage les taux d'intérêt réels? J'ai vu des documents produits par la banque à ce sujet, mais il y a longtemps de cela.
    Ce dossier est en cours. Je n'aborderai pas les conclusions de ce travail, quoique certains documents aient déjà été publiés.
    Il y a trois questions à régler, selon nous, avant le renouvellement de cette entente.
    Premièrement, quel est l'indicateur le mieux indiqué pour mesurer l'inflation? Faut-il utiliser autre chose que l'indice des prix à la consommation, utilisé traditionnellement?
    Deuxièmement, et c'est la question que vous soulevez, quel est le niveau adéquat? Est-ce 2 % ou un autre pourcentage?
    Troisièmement, comment devrait-on intégrer les questions de stabilité financière dans ce cadre stratégique?
    La question du niveau est sans doute la plus importante, étant donné les événements vécus ces dernières années, où les banques centrales, y compris la Banque du Canada, se sont approchées de la limite inférieure. Si les taux d'intérêt avaient été supérieurs par un point de pourcentage au début de la crise, nous aurions eu plus de marge de manoeuvre. Il s'agit là d'une considération sérieuse. Bien entendu, les événements de ce genre sont rarement survenus au cours de l'histoire, mais puisqu'ils se sont produits, il faut en tenir compte.
    En revanche, maintenant que nous savons que les taux d'intérêt négatifs sont possibles, nous avons plus de latitude que nous le pensions. Ce sont ces deux côtés de la médaille que nous devons considérer. Quels sont les coûts et les bénéfices relatifs de cette souplesse accrue? Qu'est-ce que celle-ci nous permettra d'obtenir? La question est là, d'autant plus que nous disposons d'outils non conventionnels auxquels nous pourrons recourir en cas de besoin.
(1130)
    Bref, la question n'est toujours pas réglée. Nous en sommes à l'étape des discussions concrètes avec le ministère des Finances, que nous entamerons le mois prochain ou le suivant.
    Je sais que vous ne vous prononcez pas sur les politiques fiscales, ce que je respecte, mais il reste que le ministre des Finances suit nos travaux — du moins, nous l'espérons. Selon vous, le présent comité devrait-il étudier les répercussions que pourrait entraîner un changement de cible d'inflation, pour éventuellement donner son avis au ministère des Finances? Faut-il y avoir un vif débat sur cette question?
(1135)
    Nous serions heureux de recevoir d'autres commentaires sur le sujet. Nous avons reçu diverses études réalisées par des universitaires. Nous avons nous-mêmes beaucoup étudié la question. Je suis d'avis que le cadre ne devrait être changé que s'il existe des arguments extrêmement convaincants pour le justifier. Comme le cadre fonctionne bien depuis 25 ans, nous ne prenons pas la question à la légère. Bien sûr, nous sommes ouverts à tout point de vue dont le ministre des Finances voudra tenir compte.
    Merci à vous deux.
    Monsieur MacKinnon, vous avez sept minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, Mme Wilkins, je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des finances et je vous remercie de votre présentation très détaillée.
     Cette dernière mentionne des défis particuliers auxquels le Canada fait face dans le monde. Vous avez participé à des rencontres du Fonds monétaire international où l'on a discuté des tendances macroéconomiques. J'aimerais que vous nous disiez ce qui a découlé de ces rencontres.
    Également, à la lecture de votre mémoire, j'ai remarqué un certain soulagement — mais vous ne ferez sûrement pas de commentaires à ce sujet — en ce qui a trait aux efforts d'investissement du gouvernement du Canada dans l'économie. Dans un contexte général, que font d'autres pays en ce qui a trait à l'investissement public comme générateur d'activités économiques?
    Le Fonds monétaire international a récemment réduit légèrement sa prévision de croissance mondiale. L'accélération du développement de l'économie mondiale sera encore modeste. On observe une lenteur décourageante depuis quelques années et un manque général de performance.
    À l'échelle de la planète, l'attention s'est portée récemment sur la Chine, parce qu'elle est devenue un grand moteur mondial de croissance. Les facteurs de croissance de son économie ont changé. C'est une transition importante et essentielle. La situation précédente n'était pas soutenable.
    Par ailleurs, d'autres pays continuent d'avoir des difficultés. En Europe, par exemple, l'économie demeure faible, mais il y a des signes encourageants. On observe des progrès à cause des politiques monétaires et des investissements publics. Des programmes d'infrastructure sont mis en place. Même aux États-Unis, où la performance économique est solide en ce moment, la politique fiscale a été modifiée afin d'adopter des projets comme lehighway bill. C'est un projet d' infrastructures qui vient s'ajouter à d'autres.
    Ces exemples, provenant de certains pays, m'encouragent un peu. Depuis quelques mois, la situation s'améliore.
     Merci beaucoup.
    Ce que je comprends de cette intervention, c'est que l'heure est aux investissements dans le renouvellement des infrastructures stratégiques pour relancer notre économie. Notre comité se penche et se penchera davantage sur cet enjeu de croissance. Comme vous venez de le souligner, nous vivons à une époque de croissance anémique.
    Quels freins éventuels à la croissance observez-vous dans la structure ou dans la réglementation de l'économie canadienne? Y a-t-il des enjeux ou des éléments particuliers qui ressortent comme étant des freins à la croissance? À quoi pourrait-on s'attaquer pour libérer en quelque sorte l'économie canadienne de cette croissance anémique?
(1140)
    Effectivement, il y a des freins et ils sont répartis en deux catégories, à savoir les freins naturels et ceux qui ne le sont pas.
    Parmi les freins naturels, il y a la croissance démographique qui ralentit en ce moment, et cela va continuer. Les baby-boomers des années 1940 et 1950 vont prendre leur retraite. C'est un phénomène global. Cette situation n'existe pas qu'au Canada. Dans le monde, on a réévalué le taux de croissance potentiel à 3,25 %, alors qu'il se chiffrait à environ 4 % il y a cinq ans. C'est un ralentissement assez important. Au Canada, le taux de croissance potentiel est de 1,5 %. La question qui se pose est la suivante: que va-t-on faire pour accroître ce taux?
    Parmi les autres freins qui sont moins naturels, il y a les accords de libre-échange nationaux et internationaux de même que les possibilités de réglementation. Au G20, quand il est question des priorités gouvernementales, on parle de réformes structurelles. C'est la chose la plus importante. Les pays ont de longues listes de choses à faire pour accroître la croissance. Une croissance de 0,1 % ou de 0,2 % peut sembler ne pas être grand-chose, mais à long terme, c'est important.
    Madame Wilkins, voulez-vous ajouter quelque chose à cet égard?
    Vous avez très bien expliqué les choses, monsieur Poloz.
    J'ajouterais simplement que, au Canada, le profil démographique est très peu propice à la croissance, de sorte que la question de la productivité devient très importante. En même temps, ce qui est particulier à notre pays, c'est la transition qu'on vit présentement. On est dans une phase de destruction dans la mesure où une partie de l'économie énergétique va en diminuant. On essaie de transférer toutes ces ressources — la main-d'oeuvre et le capital — vers la partie de l'économie canadienne qui va s'accroître.
    Tout ce qui va faciliter la création d'entreprises, par exemple les mouvements de main-d'oeuvre et les éléments que le gouverneur a mentionnés, est particulièrement important à l'heure actuelle.

[Traduction]

    Merci. Nous avons pris pas mal de retard.
    Monsieur Albas, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je voudrais parler de la croissance économique et, plus particulièrement, du libre-échange.

[Traduction]

    Monsieur le gouverneur, la semaine dernière, vous avez fait part aux médias de vos préoccupations concernant les perspectives relatives au libre échange. Pourriez-vous nous livrer vos observations à ce sujet? Selon vous, quel sera l'impact sur la croissance économique du Canada si d'autres pays, et les Canadiens surtout, adoptent une vision négative du libre-échange?
    De tout temps, le Canada a beaucoup dépendu du commerce international et ce sera toujours le cas. Relativement parlant, nous sommes un petit pays et il nous est impossible de maintenir notre niveau de vie sans tirer profit des marchés étrangers d'une manière ou d'une autre. Nous devons traiter très sérieusement de tout ce qui risquerait de nous en empêcher.
    De mon point de vue, la meilleure défense, c'est l'attaque, c'est à dire chercher énergiquement à conclure des accords commerciaux avec tous les pays et avec tous ceux intéressés par des ententes multilatérales, ce qui n'est pas chose facile. Des efforts en ce sens, de même que la négociation d'accords bilatéraux, qui amplifient indirectement l'essor à cet égard, avantageraient énormément le Canada. Dans une entente entre un grand et un petit pays, plus le grand pays est grand, plus les bénéfices qu'en retire le petit pays sont importants.
(1145)
    Évidemment, lorsqu'il est question des modalités du Partenariat transpacifique... ma circonscription est située en Colombie-Britannique et le premier ministre de la province a exprimé un appui sans réserve envers le Partenariat transpacifique.
    J'ai également remarqué que, dans votre rapport, vous prévoyez que la Colombie-Britannique surpassera les autres provinces canadiennes sur le plan de la croissance de l'emploi et de l'économie.
    Croyez-vous qu'une approche aussi énergique...puisque nous avons pris part au Partenariat transpacifique, faut-il selon vous axer nos efforts sur de tels accords?
    Je le pense. Les commentaires de la fin de semaine dernière auxquels vous faites allusion allaient en ce sens. Si ces possibilités devaient être remises en question ou menacées par qui que ce soit, nous aurions le devoir, en tant que décideurs, d'expliquer les choses aux gens du mieux que nous pouvons afin qu'ils puissent bien comprendre ce qui est en jeu au lieu de se contenter de livrer un message qui peut parfois être politique ou partisan.
    Je crois que les économistes comprennent tellement bien le libre-échange qu'ils le traitent comme un concept presque trop simple. Évidemment, le libre-échange est une bonne chose, mais ceux qui doivent composer avec les ajustements ont l'impression que les économistes ne comprennent pas bien la situation sur le terrain.
    Nous savons que la vie des gens change quand on libéralise le commerce, parfois pour le mieux et parfois pour le pire, mais que le pays, globalement, en profite. C'est souvent ce dernier élément qui est souvent oublié dans les discussions. L'accroissement des recettes nous permet d'offrir des filets de sécurité et d'autres mesures du genre pour faciliter la transition, comme nous le faisons actuellement pour faciliter la transition du secteur énergétique aux autres secteurs de l'économie.

[Français]

     Il y a un autre sujet qui est selon moi important.

[Traduction]

Je veux parler du libre-échange entre les provinces, le commerce interne.
    Plusieurs rapports ont été publiés au cours des dernières années. Des groupes comme la Chambre de commerce du Canada réclament un accord plus complet depuis que le gouvernement Chrétien a signé l'accord sur le commerce intérieur en 1994.
    Étant donné que tant d'investissements étrangers directs fuient le Canada, serait-il possible pour les producteurs canadiens d'intensifier leur production et d'accroître leurs exportations vers d'autres provinces pour ainsi faire croître notre économie?
    Je ne me suis pas penché précisément sur le sujet que vous évoquez, mais je dois dire que les obstacles au commerce interprovincial nuisent à la croissance d'une façon ou d'une autre, comme quelqu'un d'autre l'a mentionné plus tôt. Comme il arrive toujours, on aide certaines personnes en nuisant à d'autres. Ce genre de changements amène toujours son lot d'inquiétudes.
    Je crois qu'il faut garder en tête le principe important suivant: si c'est bon pour l'économie en général, on peut s'arranger pour atténuer l'impact négatif sur les personnes touchées. C'est un concept important qu'on oublie souvent.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci à vous deux.
    Monsieur Grewal, allez-y.
    Merci, monsieur le gouverneur et madame la sous-gouverneure, pour votre témoignage.
    Je vais revenir brièvement sur le rapport. Au sujet de l'économie canadienne, on peut y lire que les prévisions pour l'activité économique pour 2016-2017 ont été revues à la hausse. La baisse de la croissance de la demande étrangère, l'appréciation du dollar canadien et la correction à la baisse de l'investissement des entreprises avaient eu un effet négatif sur les prévisions, mais ces effets négatifs ont été plus que compensés par les effets positifs des mesures fiscales annoncées dans le budget fédéral.
    Parlons du taux de change entre le dollar canadien et le dollar américain. Je ne vais pas vous demander quel serait le taux de change idéal, puisque c'est le marché qui le détermine. Pouvez-vous nous expliquer quelles sont les incidences positives et négatives sur l'économie canadienne de deux scénarios, soit un dollar canadien faible ou un dollar canadien dont la valeur dépasse celle du dollar américain?
    Nous considérons le dollar canadien comme une variable à équilibre général. Je sais que cela sonne un peu technique, mais ce que je veux dire, c'est que pratiquement tout ce qui se passe dans l'économie mondiale a un effet sur la valeur de la monnaie. Voilà pourquoi la situation n'est jamais aussi simple que ce que vous décrivez.
    Disons que le cours du pétrole chute et que la valeur du dollar canadien baisse. La valeur du dollar canadien n'a pas baissé par elle-même; il y a d'autres choses qui se passent en même temps. Nous savons que la baisse du prix du pétrole a un effet indéniablement négatif sur l'économie canadienne. La baisse de la valeur de notre dollar atténue l'impact, mais l'effet net sur notre économie est tout de même négatif.
    Habituellement, les gens qui se posent des questions de ce genre se demandent: « Si le taux de change baisse ou augmente tout seul, est-ce que c'est bon ou mauvais? »
    C'est toujours une lame à deux tranchants: c'est bon pour quelqu'un et mauvais pour quelqu'un d'autre. Il est préférable de ne pas voir les choses sous cet angle. Ces fluctuations permettent aux divers éléments de bouger et de se placer comme il se doit. Comme vous le dites, c'est le marché qui décide.
    Une faible valeur du dollar favorise les exportations, ce qui est positif pour les entreprises exportatrices. Pour celles qui doivent importer des marchandises, c'est moins favorable. Il en coûte également plus cher d'investir dans les biens d'équipement, comme importer de la machinerie, par exemple. La faible valeur du dollar peut inciter les entreprises à remettre ce genre d'investissement à plus tard, alors que, si elle le faisait tout de suite, ce serait bon pour la croissance économique et la demande pour leurs produits augmenterait, ce qui est évidemment désirable. C'est différent pour chaque entreprise.
    Évidemment, les ménages ressentent aussi les effets du taux de change, puisque le prix des importations, que ce soit le coût des vacances à l'étranger ou simplement le prix des fruits et des légumes, varie selon le taux de change.
    C'est une question extrêmement complexe. J'espère que vous m'excuserez de ne pas vous donner une réponse simple.
(1150)
    Merci pour votre réponse.
    Je vais revenir sur un commentaire fait par ma collègue Mme Raitt — je porte mon turban non partisan aujourd'hui en guise de signe de bonne foi à son égard — à propos du multiplicateur historique.
    Mme Raitt a dit que nombre des baisses d'impôt prévues dans le budget ne seront pas réinjectées dans l'économie en raison de la dette des ménages. Dans le budget, nous partons d'une hypothèse — toutes les prévisions financières partent d'une hypothèse, qu'il s'agisse d'une entreprise ou, dans le cas qui nous occupe, de l'économie du Canada.
    Historiquement, si le gouvernement accorde une baisse d'impôt, quelle proportion de cet argent est réinjectée dans l'économie?
    Comme le gouverneur l'a dit tout à l'heure, les multiplicateurs des baisses d'impôt sont un peu plus petits que ceux qui découlent des autres dépenses gouvernementales.
    On peut voir les choses d'une foule de façons. Tout ce que je peux vous donner, c'est un écart. Les analyses et les modèles de la Banque du Canada — il y en a une foule qu'on peut consulter — indiquent qu'historiquement cela varie entre 0,1 et 0,4 point de pourcentage pour la première année, et entre 0,1 et 0,6 point de pourcentage la deuxième année. C'est l'écart qu'on observe.
    Évidemment, ces écarts ne tiennent pas compte... Ils sont tirés des analyses et des modèles qui portent sur les baisses d'impôt et qui sont très généraux. Si les baisses d'impôt sont accordées précisément à une catégorie de ménages qui ont tendance à dépenser une plus grande partie de leur revenu — les ménages à revenu faible ou modeste —, on s'attend à ce que les multiplicateurs soient plus élevés.
    Je dois vous interrompre ici, monsieur Grewal.
    Monsieur Liepert, vous avez cinq minutes.
    J'ai trois brèves questions et, s'il reste un peu de temps, ma collègue en aurait une très courte elle aussi.
    Premièrement, merci à vous deux d'être ici.
    Le budget fait beaucoup mention du nombre d'emplois qui seraient créés. Ces chiffres ont été passablement contestés.
    J'aimerais savoir pourquoi votre rapport ne contient aucun chiffre sur l'emploi. Je voulais vous demander si vous avez fait une analyse. Dans la négative, pouvez-vous nous dire pourquoi? Si vous en avez fait une, pourquoi n'y a-t-il aucun chiffre sur l'emploi dans votre rapport?
    Ce qu'il faut se demander, c'est de quoi nous avons besoin pour notre politique monétaire. Le rapport sur la politique monétaire est notre principal outil. Nous prenons les chocs économiques, comme la chute du prix du pétrole ou les changements à la fiscalité, et nous en analysons les incidences sur la croissance économique. Cette croissance est ensuite combinée à nos prévisions sur le potentiel de croissance de l'économie afin de déterminer ce qui arrivera à l'inflation en raison de ces changements. Nous avons alors le portrait global pour ce qui est de la politique monétaire.
    Donc, pour nous, même si le nombre d'emplois créés est une donnée intéressante, ce n'est pas un facteur clé.
    Cela dit, le potentiel de croissance dont on a parlé est plus clairement lié au marché du travail, puisque la croissance vient des travailleurs et de leur productivité. Au fur et à mesure que les ajustements économiques entrent en vigueur, on arrive à une convergence d'une économie et d'un marché du travail qui fonctionnent tous les deux à pleine capacité, ce qui crée inévitablement des emplois.
(1155)
    Vous n'avez jamais hésité par le passé à parler des emplois créés par le secteur privé. Le plus récent budget parle d'emplois créés par le gouvernement. J'aimerais juste en savoir un peu plus.
    Nous aurions évidemment aimé mieux voir dans le budget des mesures incitatives pour aider le secteur privé à créer des emplois, car je crois que nous conviendrons tous que ce n'est pas la force du gouvernement. Je voudrais juste savoir si vous avez quoi que ce soit à ajouter à ce sujet. Quelles mesures le budget aurait-il pu contenir pour inciter davantage le secteur privé à créer des emplois?
    Ce n'est pas mon rôle de commenter les mesures contenues dans le budget. Comme je viens de l'expliquer, ce qui nous importe, c'est de comprendre les effets que le budget aura sur l'économie en termes de demande globale. Ce n'est donc qu'un élément dont nous devons tenir compte, en plus des exportations, de l'investissement et de tous les autres aspects de la question.
    Dire si telle ou telle mesure aurait pu donner des résultats différents à court ou à long terme, ce n'est vraiment pas notre rôle.
    Dans votre évaluation, avez-vous tenu compte d'une forme de taxe sur le carbone? Je sais qu'une taxe sur le carbone entrera en vigueur en Alberta en 2017, par exemple. Je pense qu'il y a plusieurs autres initiatives provinciales à ce chapitre. On s'attend aussi à ce que nos amis d'en face proposent quelque chose au court de leur mandat actuel.
    Dans vos prévisions pour les prochains exercices, avez-vous pris une taxe sur le carbone en considération?
    C'est un élément qui commence à prendre forme. Pour le moment, il entre en ligne de compte dans notre surveillance de l'inflation. Par exemple, s'il y avait une taxe supplémentaire sur l'essence liée à une taxe sur le carbone, cela aurait un effet sur l'indice des prix à la consommation. Ce serait un effet ponctuel: l'IPC grimperait le jour où la nouvelle taxe entrerait en vigueur, et donc le taux d'inflation serait plus élevé pour les 12 prochains mois, puis il redescendrait. Il en va ainsi pour n'importe quel changement fiscal. Nous en avons tenu compte dans notre raisonnement, mais ce n'est pas un facteur important dans le portrait global de l'inflation à ce moment-ci.
    Monsieur Ouellette, vous avez cinq minutes. Vous aurez un autre tour par la suite.
    Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui, monsieur le gouverneur.
    J'ai deux questions fondamentales à poser, et j'aimerais d'abord les situer dans leur contexte.
    Comme nous le savons tous, le mandat de la Banque du Canada et des autres banques centrales est de minimiser l'inflation. Bien que la Banque ait tenté d'intervenir dans l'économie canadienne pour stimuler l'emprunt et l'investissement en maintenant de faibles taux d'intérêt, elle peut aussi intervenir lorsque l'économie semble aller trop bien, c'est-à-dire quand le taux de chômage est très faible et que les salaires risquent de monter et de faire grimper l'inflation.
    Cela pourrait surprendre certains Canadiens, étant donné que la plupart des gens pensent que, si la Banque du Canada et le gouvernement interviennent dans le marché, c'est pour créer de meilleurs emplois et hausser les salaires, et non pour augmenter délibérément le taux de chômage et pour empêcher la bonification des salaires.
    L'économiste Arthur Okun, qui était membre du Conseil économique du président des États-Unis, a écrit en 1976 que « la croisade contre l'inflation exige que l'on sacrifie la croissance et l'emploi ».
    Joseph Stiglitz, récipiendaire du prix Nobel d'économie, a écrit:
Mettre l'accent sur l'inflation place les intérêts du porteur d'obligations à l'avant-scène. Imaginons à quel point la politique monétaire serait différente si la priorité était de maintenir la taux de chômage sous la barre des 5 % au lieu de maintenir le taux d'inflation à moins de 2 %.
    Pour sa part l'économiste de Cambridge Ha-Joon Chang a écrit:
Un faible taux d'inflation peut signifier que l'argent que les travailleurs ont déjà gagné est mieux protégé, mais les politiques nécessaires pour générer ces revenus peuvent limiter ce qu'ils pourront gagner à l'avenir. Pourquoi? Parce que les politiques monétaires et fiscales strictes qui doivent être appliquées pour réduire l'inflation, surtout à un très bas niveau, sont également susceptibles de ralentir l'activité économique, ce qui, en retour, réduit la demande de main-d'oeuvre, augmente le taux de chômage et fait baisser les salaires. Donc, pour les travailleurs, un contrôle strict de l'inflation est une arme à deux tranchants: leur revenu gagné est mieux protégé, mais leur revenu futur est réduit. Seuls les retraités et ceux (notamment le secteur financier) qui tirent leur revenu d'actifs financiers au rendement fixe voient un faible taux d'inflation comme une bénédiction. Comme ils sont à l'extérieur du marché du travail, les politiques macroéconomiques strictes qui réduisent l'inflation n'ont aucun effet sur leurs futures possibilités d'emplois et leurs futurs salaires, tout en protégeant l'argent qu'ils ont déjà accumulé.
    Il me semble que le mandat central de la Banque du Canada depuis les années 1970 a été de faire pencher la balance du côté des investisseurs, surtout des investisseurs établis, aux dépends de tous ceux qui font partie du marché du travail. L'adoption de cette politique a constitué un point tournant dans les pays tels que le Canada, le Royaume-Uni et les États-Unis; c'est à ce moment que, dans la majorité des cas, les revenus ont commencé à stagner et les revenus des PDG et des investisseurs ont commencé à grimper. On pourrait dire que ce changement a marqué la fin d'une époque de croissance inclusive après la Deuxième Guerre mondiale pendant laquelle tout le monde pouvait profiter des retombées de la croissance économique, et le début d'une nouvelle ère de concentration des bienfaits de la croissance économique dans les mains d'un petit nombre de personnes. Pendant des décennies, l'inflation n'était pas problématique, jusque dans les années 1970, lorsque la manipulation délibérée des marchés pétroliers par l'OPEP a fait grimper le taux d'inflation.
    Ma question est la suivante: est-ce que la politique anti-inflationniste de la Banque du Canada et son objectif de maintenir un faible taux d'inflation vous amènent à intervenir dans l'économie pour sacrifier des travailleurs et faire baisser les salaires afin de protéger les investisseurs, conformément à votre mandat?
(1200)
    La parole est à vous. Le député a fourni beaucoup d'information contextuelle. Allez-y.
    Merci.
    Le choix de cibles d'inflation comme régime de politique monétaire au Canada remonte maintenant à plus de 25 ans. Il découle d'une expérience horrible qui est survenue lorsque le taux d'inflation était élevé. Dans la documentation économique, il est reconnu sans équivoque que le bas taux d'inflation au cours des 20 dernières années a amélioré la performance économique de tous — et je dis bien tous — les participants à l'économie, qu'ils travaillent, soient à la retraite ou espèrent prendre leur retraite. Il n'y a pas d'ambiguïté à ce sujet.
    Bon nombre des points très subtils que vous avez soulevés sont ce que j'appellerais des points déséquilibrés ou partiellement équilibrés. Il est vrai que si quelque chose se produit, cela aura des retombées. Or, il faut tenir compte de l'ensemble de l'économie et déterminer si cette dernière a atteint un équilibre durable.
    Nous croyons fermement que l'économie ne se stabilise pas tant que l'inflation n'est pas stable et que le reste de l'économie ne s'ajuste pas à ce niveau. Cela définit ce que nous appelons une « coïncidence divine », dans le cadre de laquelle nous avons maximisé l'emploi...
    Alors, monsieur le gouverneur, comment votre...
    Robert, votre temps est écoulé. Vous aurez la chance de poser votre question plus tard.
    Monsieur Caron, vous avez trois minutes.
    Je veux revenir sur les répercussions des dépenses déficitaires sur l'infrastructure, ainsi que sur les baisses d'impôt qui ont été annoncées par le gouvernement. Vous avez affirmé qu'il y a des occasions — et c'est le cas ici — où nous devons observer ce qu'une politique financière plutôt qu'une politique monétaire peut faire. Par ailleurs, nous devrons voir les résultats de ce qui a été annoncé, surtout en ce qui a trait à la répartition de l'argent et à l'efficacité des investissements.
    Nous savons qu'un certain temps s'écoulera avant que nous puissions observer les retombées des investissements. Combien de temps allez-vous attendre pour voir les résultats que donneront ces décisions, pour évaluer leur succès initial, et pour déterminer définitivement si elles ont donné les résultats que nous espérions?
    L'élaboration de la politique monétaire dépend essentiellement des données. Je ne parle pas ici de secteurs de l'économie, mais de l'ensemble de l'économie. Nous savons que des mesures financières sont en train d'être prises. Certaines seront mises en place rapidement, tandis que d'autres prendront plus de temps, mais elles se concrétiseront toutes. Nous ne savons pas encore quelle forme elles prendront, toutefois.
    Nous allons observer l'économie et voir si elle répond à nos attentes. Tant que ce sera le cas, tout ira bien. Cependant, si, pour une raison quelconque, il y a une baisse de la croissance, nous devrons évidemment retarder l'atteinte de la cible d'inflation, puis réévaluer si la politique monétaire doit être ajustée. Si le contraire se produit, et que la croissance augmente pour une fois — ce qui serait surprenant et très agréable—, nous ferons évidemment le contraire.
    Cela veut dire que la politique monétaire joue un rôle actif dans l'économie tout entière, et pas seulement dans certains de ses secteurs, en fonction de la façon dont les données évoluent.
(1205)
    Je comprends, mais d'après ce que je peux voir, la banque restera en retrait pour l'instant afin de voir comment cela va se passer. Cependant, à un moment donné, vous examinerez la croissance et les répercussions que les mesures auront, et vous devrez déterminer si elles fonctionnent ou non.
    Je comprends le besoin d'attendre les données. Cependant, on pourrait soutenir que vous aurez à... Même si les données penchent d'un côté ou de l'autre de la balance, vous serez encore tentés d'attendre encore un peu plus longtemps afin de voir si les mesures auront des répercussions.
    Le délai pourrait être court ou long en fonction de votre évaluation. C'est pourquoi ma question sur la durée est importante. Combien de temps allez-vous donner à ces mesures avant que vous décidiez ou envisagiez d'intervenir au lieu de rester en retrait?
    Votre question laisse entendre que l'adoption d'une politique monétaire est quelque chose qui se fait très soigneusement, presque comme un exercice d'ingénierie, et je m'oppose à une telle interprétation. Il s'agit davantage d'une question de risques. À l'heure actuelle, nos prévisions incluent les intrants financiers et si, dans six mois, nous constatons que l'économie ne se porte pas aussi bien que nous le pensions, nous pourrions dire qu'il y a un risque de ralentissement. C'est quelque chose qui pourrait se produire, mais n'oubliez pas que ce ne sont que des risques.
    Nous devons prendre une décision toutes les six semaines en fonction de ce que nous avons sous les yeux, ainsi que de notre évaluation de la façon dont les choses se déroulent. Nous examinons bien d'autres éléments que les dépenses gouvernementales. Plus particulièrement, les exportations sont censées représenter les deux tiers de la croissance que nous prédisons. Elles sont donc notre principale préoccupation. Les dépenses d'investissement des entreprises seront notre deuxième priorité.
    Tous ces éléments doivent être analysés continuellement et collectivement. Il y aura donc des résultats financiers dans l'ensemble. Il est très difficile de les séparer du reste, si vous comprenez ce que je veux dire. Merci.
    Merci beaucoup. J'ai une question à poser.
    Vous avez dit plus tôt qu'une partie de l'économie, à savoir l'économie de l'énergie, est à la baisse. Vous avez également affirmé, dans le Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada publié le 13 avril, que les investissements dans le secteur de l'énergie devraient diminuer de 60 % par rapport aux niveaux de 2014. J'étais autrefois producteur dans le secteur des produits de base, et je peux dire qu'il y a des hauts et de bas, ainsi que des vagues de prospérité et de déclin. C'est ce qui se passe aussi dans le secteur de l'énergie, qui est en plus soumis à de fortes pressions internationales.
    Je me demande une chose cependant. C'est peut-être une question controversée, et il se peut que vous ne vouliez ou ne pouviez pas y répondre.
    Avez-vous examiné quelle serait la situation si l'oléoduc Énergie Est ou d'autres oléoducs étaient construits? Oui, la construction exigerait un investissement, mais est-ce que cela aurait une incidence sur l'économie pétrolière en facilitant l'accès au marché ou, dans le cas de l'oléoduc Énergie Est, en transportant du pétrole jusqu'aux raffineries de l'Est du Canada? Pouvez-vous me dire si vous étudiez ces scénarios, ou si vous connaissez quelqu'un qui le fait?
    Monsieur le président, je ne peux répondre à votre question. Cela exige une analyse complexe. C'est une question qu'il serait préférable de poser à des membres de l'industrie ou d'associations connexes. À l'heure actuelle, nous mettons l'accent sur la baisse des prix, et je pense que c'est le facteur le plus important dans ce dossier.
    La faiblesse des prix du pétrole oblige notre économie à se réadapter. L'économie de l'énergie n'occupera plus une part aussi importante de l'économie totale, alors que d'autres secteurs de l'économie croîtront plus rapidement pour combler ce vide. Nous prévoyons que ce processus prendra plusieurs années.
    Pour déterminer comment un projet de pipeline s'inscrit dans ce contexte, il faut une analyse très complexe que nous n'avons pas faite.
(1210)
    C'est correct. Je voulais juste poser la question. Si on ne le fait pas, on n'obtient pas de réponse.
    Monsieur Champagne, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le gouverneur et madame Wilkins, je vous remercie d'être ici parmi nous aujourd'hui.
    Les médias ont mentionné que vous avez dit que les mesures contenues dans le dernier budget auront un impact positif et notoire sur l'économie canadienne. Pouvez-vous, pour le bénéfice du comité, nous en dire un peu plus à ce sujet? À quelles mesures faisiez-vous allusion? Quelles seront ces mesures qui auront un impact positif sur l'économie canadienne, non seulement dans l'immédiat, mais à long terme sur la croissance économique du pays?
    Il y a deux aspects relatifs à cette question.
     Premièrement, à court terme, cela donne de l'élan à l'économie.
     Deuxièmement, si ces dépenses constituent un investissement, comme par exemple dans les infrastructures ou dans quelque chose de semblable, cela peut potentiellement favoriser une croissance tendancielle. Une augmentation de 0,1 % ou 0,2 % à long terme aurait un effet cumulatif très important. C'est très difficile à estimer, mais c'est certainement positif si cela permet une croissance, comme je l'ai mentionné plus tôt.

[Traduction]

    J'ai entendu que vous veniez de revenir de Washington. Est-il juste de dire que, lorsque vous participiez aux réunions du G7 ou du G20, un certain nombre d'économies examinaient ce que le Canada propose pour relancer la croissance?
    Nous savons que Mme Lagarde a dit que la croissance serait médiocre. Un certain nombre de pays étudient les mesures qu'ils pourraient prendre afin d'assurer la croissance de l'économie, pas seulement dans l'immédiat, mais à long terme.
    De quels autres genres de mesures les gens parlent? Je sais que le Canada a été mentionné comme un exemple à suivre. Nous l'avons vu dans le Wall Street Journal et dans le Financial Times.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les sentiments des gens assis autour de la table?
    Je ne vais pas donner de détails sur les autres pays. Toutefois, l'idée générale est qu'il y a trois sortes de politiques qui devraient être utilisées conjointement dans cette situation.
    La politique monétaire a un effet très stimulant à l'échelle internationale, et elle fonctionne presque à pleine capacité.
    La politique financière est moins mise à contribution, sauf aux quelques endroits que j'ai mentionnés avant.
    La troisième politique, qui est probablement la plus importante à ce stade, est celle consistant à apporter des changements structurels à l'économie afin de surmonter les obstacles à la croissance dont nous avons parlé plus tôt. Le Fonds monétaire international, ou FMI, et les gens autour de la table sont d'avis que ces trois politiques peuvent être utilisées conjointement.
    Une politique structurelle par elle-même pourrait avoir des effets positifs à long terme et peut-être des effets négatifs à court terme. En la liant à une politique financière pour amortir le coup et donner un nouveau souffle à l'économie, cela permettrait de contrebalancer les effets négatifs, tout en s'assurant que les effets à long terme sont positifs. La politique monétaire vise à bien préparer le système, ainsi qu'à soutenir le processus.
    L'emploi d'une seule de ces politiques n'est pas la voie à suivre. Il faut les utiliser conjointement. C'est là-dessus qu'ont porté nos discussions.
    Vous avez mentionné trois choses dont j'ai pris note en particulier. Vous avez parlé d'innovation, de productivité et d'exportations. Pouvez-vous parler un peu plus des conséquences d'investir dans la promotion de l'innovation et de la productivité, ainsi que dans des mesures qui sont utiles quand nous nous penchons sur les trois pans de notre économie? Je suis conscient de l'écart de production entre le Canada et les États-Unis. Quels sont les avantages économiques possibles lorsque vous investissez dans ces trois choses?
    Vous avez parlé d'innovation, et vous avez dit que les exportations étaient indispensables à l'économie et à la productivité du Canada. Pouvez-vous expliquer un peu plus votre point de vue?
    Tout investissement qui facilite la croissance des entreprises contribuera à la productivité, et chaque petit montant est utile et s'accumule. Puis, tout obstacle à la croissance que vous pouvez éliminer favorise le processus.
    Enfin, je pense que l'aspect le plus important de tous est de soutenir le processus de création des nouvelles entreprises, car historiquement, ce sont les jeunes entreprises qui connaissent la plus forte croissance de la productivité et qui contribuent ainsi à l'amélioration de nos statistiques en matière de productivité agricole. Le processus a été lent depuis la crise. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, le processus a commencé à s'accélérer. Nous accusons un peu de retard, mais je suis sûr que nous allons le rattraper. Cependant, ce qui est le plus important, c'est de favoriser la productivité.
    Les politiques qui favorisent les jeunes entreprises et leur permettent de croître plus rapidement — et l'éventail est vaste — sont, à mon avis, celles sur lesquelles nous devrions principalement mettre l'accent .
(1215)
    Merci.
    Madame Raitt, vous avez cinq minutes.
    Monsieur le gouverneur, votre rapport du 13 avril porte aussi sur le potentiel de croissance de l'économie, et vous l'avez fait passer de 1,8 % à 1,5 %, ce qui, à mon avis, est une réduction importante. J'aimerais que vous commentiez cela.
    Puis, quand vous dites plus tard dans le rapport que nous allons atteindre la pleine capacité dans la deuxième moitié de 2017, est-ce que cela veut dire que vous croyez que vous seriez en mesure d'augmenter les taux d'intérêt quand l'économie fonctionnera à plein régime?
    Ma première question est donc pourquoi faire passer le potentiel de croissance de 1,8 %  à 1,5 %, ce qui, en passant, est bien plus bas que notre rythme de croisière historique de 2 %, pour citer Barrie McKenna? Et qu'est-ce qui se produira en 2017? Cherchez-vous à revenir au taux d'inflation normal de 2 %?
    Je vais demander à Carolyn de parler de la révision du potentiel et de ce que cela signifie.
    Je dirai simplement qu'en termes généraux, « potentiel » est un concept très incertain, alors il ne s'agit pas d'un mur de briques quelque part là-bas. Il peut être influencé par de nombreux facteurs dont nous avons parlé au comité aujourd'hui. Bien des choses peuvent signifier un potentiel accru tandis que l'économie trouve son rythme de croisière, et cela reporte le moment où nous aurons épuisé nos ressources supplémentaires, telles que les 120 000 jeunes qui se sont retirés de la population active. Il ne s'agit pas d'une retraite précoce. Il s'agit d'un effet décourageant. Les ramener fera toute la différence.
    Carolyn, pourquoi ne pas expliquer quelques-uns des chiffres?
    Pour ce qui est de l'abaissement du potentiel et de la fourchette de potentiel, j'insiste pour dire que notre potentiel reflète avant tout notre diminution de l'investissement des entreprises, car l'investissement des entreprises qui y demeure représente ce que nous appelons un approfondissement du capital, ce qui signifie que la productivité de la main-d'oeuvre s'améliore.
    Cela dit, la diminution de l'investissement est principalement dans le secteur de l'énergie. Ainsi, comme je le disais tout à l'heure, nous traversons une période de destruction, où les éléments négatifs du secteur de l'énergie l'emportent sur les éléments positifs du reste de l'économie. Vous remarquerez que ces fourchettes demeurent basses un certain temps, puis recommencent à augmenter à mesure que progresse la transition. Vous constaterez que la croissance de la production potentielle, cette fourchette, augmente à compter de 2018 jusqu'en 2020, soit la fin de notre estimation.
    Je crois qu'un autre facteur ici est simplement la main-d'oeuvre. Plus la main-d'oeuvre compte de gens, plus cela ajoute au potentiel.
    Nous avons constaté que beaucoup de gens sont découragés et ne font plus partie de la population active. Au cours de la dernière année, nous avons vu beaucoup de gens dans la force de l'âge réintégrer la population active. Il est possible que d'autres feront de même, en particulier les jeunes qui ont quitté la population active après la crise et au cours des deux dernières années.
    Nous passons à M. Aboultaif pour le temps qu'il reste.
    J'ai une question brève. C'est une question très courante. À qui le gouvernement empruntera-t-il de l'argent? Pouvez-vous nous informer du mécanisme derrière les emprunts?
    À qui le gouvernement empruntera de l'argent? Le gouvernement emprunte de l'argent au marché. Les régimes de pension, les particuliers, les étrangers, donc pratiquement tout le monde peuvent investir dans les obligations d'État. Le Canada a une cote de crédit très forte et l'appétit pour la dette canadienne... et un niveau très faible d'endettement, alors c'est considéré comme un crédit très solide.
(1220)
    La baisse du prix des produits de base a essentiellement fait cesser les investissements dans les ressources dans l'ensemble du Canada, notamment en Alberta et à d'autres endroits. Cela a mené à une dévaluation du dollar canadien. On s'attendrait à ce que la faible valeur du dollar amène d'autres investissements. Or, il semble qu'il n'en est rien. C'est curieux et je ne crois pas que nous nous y en attendions.
    Quelles mesures pouvons-nous prendre? Il est généralement reconnu que dans un tel cas, il faut réduire l'impôt des entreprises pour attirer les investissements. C'est ce que le gouvernement avait proposé de faire, mais d'après le budget, cela ne se produira pas. À moins qu'un miracle se produise quelque part dans le monde et améliore l'économie canadienne. Encourageriez-vous la réduction de l'impôt des entreprises canadiennes?
    Je ne ferai pas d'observations au sujet d'une mesure fiscale précise. Je dirai simplement que ce à quoi nous nous attendons dans nos perspectives, comme il est indiqué dans le rapport sur la politique monétaire, c'est que l'investissement dans la partie de l'économie qui n'est pas liée à l'énergie et aux ressources est prêt pour une forte reprise. Nos enquêtes nous indiquent que les gens fonctionnent presque à plein rendement et qu'ils ont besoin de moderniser leur équipement. Le carnet de commandes se porte bien parce que les ventes à l'exportation augmentent. Par conséquent, tous les ingrédients sont réunis pour qu'au deuxième semestre de cette année s'amorce un regain d'investissement dans l'économie non liée aux ressources.
    Je ne doute pas que les investisseurs étrangers joueront également un rôle là-dedans, en particulier parce que, comme vous le mentionnez, la faiblesse du dollar rend ce genre d'investissement une proposition de valeur accrue pour un investisseur étranger comparativement à lorsque le dollar a une valeur supérieure. Pour nous, ce qui importe c'est que l'investissement se réalise, que l'équipement soit modernisé, que la productivité augmente, que notre capacité augmente, et que plus d'emplois soient créés. C'est la combinaison magique qui, selon nous, s'accélérera maintenant. Nous surveillerons cela de très près et l'investissement étranger fera partie de l'équation.
    Merci à vous deux. Nous avons dépassé largement la limite de temps.
    Messieurs Caron et Sorbara, nous allons diviser le temps qu'il reste entre vous deux.
    Allez-y, monsieur Caron.
    Merci.
    J'ai en effet une question rapide, mais la réponse sera peut-être un peu plus longue. Au sujet de l'inflation, de l'inflation ciblée et des négociations afférentes en cours actuellement, vous avez dit qu'il en faudrait beaucoup pour modifier la norme de 2 %. Mais vous avez fait allusion au fait que l'on se penche actuellement sur la définition de cet indice des prix à la consommation. À l'heure actuelle, l'indice des prix à la consommation utilisé par la Banque exclut les éléments les plus instables, ce qui a ses avantages et ses inconvénients. D'après ce que je peux voir, un gros inconvénient est que dans cette évaluation, vous évaluez essentiellement un coût de la vie qui ne correspond pas en réalité à l'expérience du Canadien moyen.
     Ma question est: quelles possibilités étudiez-vous outre le statu quo? Quelles sont les options que vous examinez? Aussi, pouvez-vous parler rapidement des avantages et des inconvénients de ces options?
    Pour commencer, l'indice des prix à la consommation est toujours la mesure centrale de l'inflation. Comme vous le dites, il englobe ce que tout le monde achète. Lorsque nous parlons d'options de rechange, nous parlons du guide de fonctionnement, lequel tente de séparer l'important du bruit.
    Carolyn, voulez-vous parler des candidats?
    D'accord. Il y a un certain nombre de candidats. À l'origine, nous avions choisi l'IPCX, parce que c'était une façon de mesurer un ensemble de valeurs fondamentales auxquelles nous accordons le plus d'importance, en excluant les éléments instables. Nous employons cette mesure comme guide de fonctionnement. Elle nous permet de dégager les éléments instables de l'IPC total et de fixer la politique monétaire en conséquence de sorte que nous ne modifions pas les taux d'intérêt pour quelque chose qui sera fini au moment où l'effet se fait ressentir.
     Nous avons constaté depuis un ou deux ans que l'utilité de l'IPCX s'est amoindrie pour différentes raisons, dont nous parlons dans des études qui ont été publiées. Nous examinons donc d'autres mesures. Certaines d'entre elles sont des mesures hautement statistiques qui utilisent des techniques économétriques complexes. Nous étudions également des mesures qui, au lieu de faire toujours abstraction des mêmes composantes, font abstraction de celles qui augmentent le plus et de celles qui augmentent le moins au cours d'une période donnée, en effectuant des tests statistiques pour voir lesquelles ont le meilleur rendement et nous serviront également. Cette étude se poursuit, mais notre site Web contient beaucoup de renseignements à cet égard, si vous voulez le consulter.
(1225)
    Merci.
    Monsieur Sorbara, pour la dernière question.
    Monsieur le gouverneur, vous avez parlé des trois outils, si on peut les appeler ainsi: la politique monétaire, la politique fiscale et le changement structurel. À l'égard de la politique fiscale, selon le rapport d'avril sur la politique monétaire, en tenant compte du budget et des mesures fiscales prévues dans le budget, vous estimez que la croissance sera d'environ 0,5 % en 2016, ce qui correspond à l'estimation du ministère des Finances, et de 0,6 % en 2017, ce qui est de 0,4 % inférieur à l'estimation du ministère des Finances, qui est de 1,0 %. Il y a donc un léger écart ici.
    Il y a quelques mois, dans un échange avec le secrétaire parlementaire, vous avez mentionné à quel point l'investissement dans les infrastructures est important pour favoriser la croissance économique à long terme et améliorer notre productivité.
    Au chapitre de la productivité, quelles mesures ou domaines amélioreraient selon vous l'économie canadienne pour compenser les changements structurels que vous mentionnez? Je sais que vous avez mentionné le commerce. Sans parler de mesures précises, pourriez-vous parler de l'efficacité de notre régime fiscal?
    D'accord. Je serai bref, monsieur le président, car nous pourrions en parler longtemps.
    Je vais commencer par les faits. Premièrement, les estimations que vous mentionnez sont l'effet du budget sur les perspectives, sur les taux de croissance, alors que l'effet décrit dans le budget et dans la note de bas de page no 8 du rapport sur la politique monétaire ou quelque part dans ces environs est l'effet sur le PIB, soit 0,5 % la première année et 1,0 % la deuxième année. Pour ce qui est du taux de croissance, il est d'environ 0,5 % puis d'un autre 0,5 %. Voilà qui concilie les chiffres dont vous avez parlé. Ce sont tous les mêmes. Il s'agit du niveau par opposition aux taux de croissance.
    Deuxièmement, j'ai déjà dit que les infrastructures favorisent la croissance. À mon avis, les infrastructures peuvent être un concept flou. Je suppose qu'il s'agit de n'importe quel genre d'investissement qui peut être lié à une future croissance économique potentielle. Par conséquent, les exemples varient grandement. Les plus évidents sont les transports, c'est-à-dire les ponts, les trains à grande vitesse, les chemins de fer ou les aéroports, mais il y a aussi les garderies, qui permettent aux parents de réintégrer la population active, ce qui nous donne plus de potentiel. Tous ces investissements peuvent ajouter à notre croissance potentielle et sont, par conséquent, positifs.
    Le troisième pilier, les réformes structurelles, ce sont les choses qui favorisent la mobilité de la main-d'oeuvre entre les provinces et qui sont en lien avec le commerce interprovincial. La mobilité de la main-d'oeuvre n'est pas parfaite. Elle n'a pas nécessairement contribué non plus. Des politiques pourraient accélérer cela alors que nous tentons de nous adapter aux changements.
    Bien entendu, de manière plus générale, comme nous en avons discuté plus tôt, le libre-échange interprovincial aiderait notre économie à s'adapter et à rouler beaucoup plus efficacement.
    Ce sont simplement quelques idées parmi tant d'autres, monsieur le président.
    Merci beaucoup. Nous allons devoir nous arrêter ici. Au nom du comité, monsieur le gouverneur, madame la sous-gouverneure, je vous remercie de votre exposé et de vos réponses à nos questions. À part cela, merci également de ce que vous faites, par rapport à la politique monétaire, pour la stabilité de l'économie canadienne. Merci encore.
    Nous allons suspendre la séance environ trois ou quatre minutes pour laisser le directeur parlementaire du budget s'installer.
(1225)

(1235)
    Nous reprenons nos travaux. Au cous de la séance, nous allons essentiellement procéder à deux études ou deux ordres de renvoi avec le directeur parlementaire du budget. Nous allons diviser les deux. Dans un premier temps, nous allons traiter du paragraphe 108(2) du Règlement, soit l'étude des perspectives économiques et financières. Dans un deuxième temps, nous allons passer au projet de loi C-2, loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, et allons écouter les observations du directeur parlementaire et du personnel à cet égard.
    Je crois comprendre, monsieur Fréchette, que votre déclaration préliminaire porte sur les deux. Je présente les personnes présentes: le directeur parlementaire du budget, Jean-Denis Fréchette; M. Askari, directeur parlementaire adjoint du budget; M. Matier, directeur principal, Analyse économique et financière et prévisions; M. Cameron, conseiller, Analyse économique, Analyse économique et financière; et M. Jacques, directeur, Analyse économique et financière.
    Monsieur Fréchette, la parole est à vous. Nous avons travaillé ensemble au comité de l'agriculture. Cela fait longtemps.
     Merci, monsieur le président. C'est la première fois que vous m'appelez M. Fréchette, alors j'en suis bien heureux.

[Français]

     Monsieur le président, messieurs les vice-présidents, madame et messieurs membres du comité, je vous remercie à nouveau de nous avoir invités à discuter avec vous de nos Perspectives économiques et financières d'avril 2016, qui ont été publiées aujourd'hui.
    Comme vous l'avez déjà mentionné, je suis accompagné de plusieurs membres de mon équipe. Ils seront d'ailleurs très heureux de répondre à vos questions.
(1240)

[Traduction]

    Depuis notre rapport de novembre 2015, les perspectives de l'économie mondiale ont continué de se détériorer et le prix des produits de base à moyen terme a été revu à la baisse. Malgré cette faiblesse des perspectives externes, nous nous attendons à ce que les mesures financières du budget de 2016, combinées à la politique d'accompagnement monétaire en place, aident à soutenir l'économie canadienne.
    Nous prévoyons que la croissance du PIB réel remontera à 1,8 % en 2016, puis passera à 2,5 % en 2017. La croissance économique devrait ensuite ralentir de 2018 à 2020, en raison de l'arrivée à échéance des mesures budgétaires et de la normalisation de la politique monétaire.
    Chaque année de 2016 à 2020, le PIB nominal, l'indicateur le plus large de l'assiette fiscale, devrait être presque de 20 milliards de dollars en deçà, en moyenne, des prévisions de notre rapport de novembre. Cependant, notre projection du PIB nominal est, en moyenne, de 40 milliards de dollars supérieure, chaque année de 2016 à 2020, à l'hypothèse de planification retenue par le gouvernement dans le budget de 2016. En 2016 et en 2017, l'écart atteint presque les 50 milliards de dollars.
    Dans nos perspectives budgétaires de novembre 2015, au début de la 42e législature, nous avions adopté une hypothèse de planification indépendante fondée sur le statu quo. Ces perspectives ont été mises à jour en fonction des mesures annoncées dans le budget de 2016 ou avant celui-ci.

[Français]

    Nous estimons qu'un léger excédent a été enregistré en 2015-2016 et nous nous attendons à un déficit budgétaire de 20,5 milliards de dollars en 2016-2017, qui sera principalement attribuable aux nouvelles mesures annoncées depuis la Mise à jour économique de l'automne.
    Le déficit devrait ensuite atteindre 24,2 milliards de dollars en 2017-2018 en raison du passage, sur une période de sept ans, au mécanisme d'équilibre du taux de cotisation à l'assurance-emploi et d'une augmentation des charges de programmes directes.
    Pendant le reste de la période de projection, le déficit devrait redescendre à 12,4 milliards de dollars étant donné que le gouvernement prévoit que les charges de programmes directes, particulièrement les dépenses de fonctionnement des ministères, resteront à un niveau fixe entre 2017-2018 et 2019-2020.
    Nous prévoyons, pour la période allant de 2016-2017 à 2020-2021, des déficits budgétaires totalisant en moyenne 4,5 milliards de dollars de moins que celui prévu dans le Budget de 2016. Cet écart moyen n'est pas loin de la somme de 6 milliards de dollars correspondant à l'impact financier du rajustement apporté par le gouvernement par rapport à la prévision du secteur privé pour le PIB nominal.

[Traduction]

    Dans le budget de 2016, le gouvernement énonce sa volonté de rétablir l'équilibre budgétaire et de réduire le ratio de la dette fédérale au PIB d'ici 2020-2021. Cependant, afin d'évaluer sur une période prolongée la viabilité des finances du gouvernement, nous projetons à long terme, bien au-delà de 2020-2021, la trajectoire de la dette fédérale relative au PIB. Notre projection révèle que, si la politique actuelle est maintenue, le ratio de la dette fédérale au PIB devrait diminuer continuellement au cours des prochaines décennies. La structure financière sous-jacente au budget de 2016 est donc viable à long terme.
    Nous serions ravis de répondre à vos questions concernant nos perspectives économiques et financières ou tout autre sujet pertinent, notamment le projet de loi C-2 ou, encore une fois, notre mandat actuel ou futur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Je crois que vous avez des gens différents pour répondre aux questions concernant le projet de loi C-2. Alors, membres du comités, je propose de nous en tenir à environ 35 ou 40 minutes pour des questions sur les perspectives économiques et financières.
    Monsieur MacKinnon, vous avez sept minutes.

[Français]

    Monsieur Fréchette, je vous remercie, ainsi que les membres de votre personnel, de votre présence parmi nous aujourd'hui et, surtout, de votre diligence et de votre soutien continu à l'endroit des députés. La qualité de votre travail est excellente. Les parlementaires et tous les Canadiens apprécient beaucoup vos efforts. Vous êtes devenu quelqu'un d'incontournable dans le cadre de nos analyses.
    Je vais tout de suite vous poser la question qui tue.
    Il y a une divergence entre votre analyse et celle de la Banque du Canada, laquelle se range du côté des prévisions du ministère des Finances en ce qui a trait aux multiplicateurs budgétaires et à l'impact qu'auront diverses mesures prises par notre gouvernement sur l'ensemble de l'économie canadienne. J'aimerais que vous laissiez libre cours à vos commentaires à ce sujet.
    Effectivement, il y a toujours des différences entre les multiplicateurs touchant les différents modèles. Nos multiplicateurs sont un peu moins élevés que ceux du ministère des Finances. Des personnes de la Banque du Canada ont dit avoir utilisé les multiplicateurs du ministère des Finances. Il y a donc des différences en ce qui concerne le niveau des multiplicateurs et l'impact sur l'économie.
(1245)
    Je voulais plutôt savoir comment vous expliquez l'écart entre votre évaluation des multiplicateurs et celle du ministère des Finances. Comment expliquez-vous cet écart par rapport à l'impact des mesures budgétaires?
    Nous utilisons différents modèles économiques. Chaque prévisionniste utilise des modèles économiques différents et les hypothèses sont différentes. Normalement, il y a une différence entre les différents multiplicateurs, selon le modèle utilisé. Il n'y a pas vraiment d'explication précise à fournir à cet égard. Ce sont des modèles différents.
    Dans tout modèle, il y a des variables. Dans votre analyse, y a-t-il des variables qui sous-estimeraient l'impact des mesures budgétaires ou y aurait-il, par contre, des variables dans d'autres modèles qui le surestimeraient? J'essaie de cerner là où il y a une divergence.
    Avant de céder la parole à M. Matier, qui va vous donner tous les détails à ce sujet, je dirais que l'utilisation de modèles ou de multiplicateurs est davantage une question de jugement que de détails. C'est la même chose en ce qui concerne nos prévisions, qui sont différentes de celles du ministère des Finances. Cela dit, il y a beaucoup plus de gens qui travaillent à ce ministère et leur modèle est beaucoup plus sophistiqué que le nôtre.
    Monsieur Matier va vous donner tous les détails à cet égard.

[Traduction]

     Monsieur Matier.
     Nous n'avons pas les résultats détaillés du ministère de Finances, mais nous soupçonnons qu'il y a des différences sur le plan des fuites dans l'économie. Autrement dit, lorsqu'il y a une augmentation de la demande globale qui peut être satisfaite de plusieurs manières par l'entremise d'importations accrues dans l'économie, d'une diminution des stocks en inventaire ou d'une production accrue. En outre, si l'on regarde la question dans l'optique des ménages, l'augmentation du revenu disponible au moyen, disons, d'une réduction des impôts, peut soit se traduire en épargnes accrues des ménages ou en consommation accrue des ménages. Les modèles divergent donc selon leur sensibilité à ces fuites.
    Par ailleurs, je crois qu'il serait utile de voir l'analyse plus détaillée de la Banque du Canada, que le gouverneur a mentionnée aujourd'hui. Bien qu'ils estiment que leurs estimations sont raisonnables, je crois que, au chapitre de l'incidence sur le PIB réel et des multiplicateurs, nos estimations sont assez proches de celles du ministère pour la première année. En tout cas, elles sont identiques. Pour la deuxième année, on parle d'une incidence de 0,8 % par opposition à 1 %. Il y a des différences au chapitre de l'emploi, et, encore là, la sensibilité à la réaction du marché du travail aux variations de la demande globale et de la production sera également touchée. C'est un débat fascinant pour un économiste. Je crois qu'il serait très utile de voir les résultats détaillés de la Banque du Canada, ainsi que leur analyse documentaire à ce sujet.
    Merci.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Là où il ne semble pas y avoir de divergence d'opinions, c'est sur le fait que les investissements à divers niveaux, notamment en matière d'infrastructures, vont contribuer à la croissance canadienne. Ils vont faire en sorte que l'économie canadienne va avoir un meilleur rendement que s'il n'y avait pas ces investissements. Pouvez-vous le confirmer?
    Je le confirme. C'est également mentionné dans notre rapport à la page 2, dans la version française, où il est écrit que cette hausse est principalement attribuable aux nouvelles mesures de 13,2 milliards de dollars.
     Vous parliez de projections, mais je pense que nous sommes relativement un peu plus optimistes que le ministère des Finances. Ce n'est peut-être pas le cas pour l'emploi, mais pour la croissance économique, c'est certainement le cas.
    Nous apprécions de vous l'entendre dire de vive voix, monsieur Fréchette.
    Il me reste peu de temps, mais j'aimerais revenir sur ce que j'appellerais la question de la prudence.
    Le gouvernement précédent n'a pas fait preuve de cette prudence dans la présentation de ses budgets contrairement à ce qu'avait fait, par exemple, M. Martin, au cours des années 1990 et des années 2000.
    Notre ministre des Finances veut revenir à faire preuve de prudence. Vous dites clairement qu'il a peut-être fait preuve d'un peu trop de prudence en matière de croissance. Il sous-évalue les possibilités économiques du pays. Je maintiens que le fait d'être prudent quand on fait des projections budgétaires est un excellent outil pour tout gestionnaire fiscal, comme l'est notre ministre des Finances.
    Pourriez-vous commenter le retour de la prudence dans les projections budgétaires par rapport au gouvernement précédent? Comment évaluez-vous cette question?
(1250)
    Je ne ferai pas de commentaire à propos du gouvernement précédent.
    Par ailleurs, je vais parler du rapport. Nous avons constaté que le fait de faire preuve de prudence est une bonne chose. Toutefois, une prudence excessive n'est pas souhaitable parce que cela crée des attentes ou une certaine perspective à long terme, ce qui pourrait être aussi néfaste que le fait de ne pas être prudent du tout.
    C'est essentiellement le message qu'on envoie. Il faut être prudent, mais un excès de prudence n'est pas préférable et c'est ce qu'on a dit. Nos calculs sont faits avec un niveau de prudence normal. Je parle de nos résultats relativement à la croissance et au déficit. Nos calculs diffèrent d'environ 6 milliards de dollars au cours des prochaines années par rapport à ceux du ministère. C'est attribuable essentiellement à cette prudence excessive.

[Traduction]

    Lisa Raitt.
    Bienvenue. Merci beaucoup d'être ici.
    Je suis désolée de faire cela, mais je remarque que je suis la seule femme à la table. J'espère que le prochain groupe de personnes qui vous accompagnent comptera une femme. Je vois des acquiescements, d'accord, je vais m'en contenter. La prochaine fois que vous venez au comité, vous savez ce que vous avez à faire. Vous devez les trouver et les faire venir.
    Vous les verrez dans la prochaine partie de la séance d'aujourd'hui.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    J'ai une question au sujet de vos perspectives économiques et financières, qui ont été publiées ce matin, et plus particulièrement au sujet de l'annexe F. J'aimerais avoir des précisions et des clarifications sur la comparaison entre vos perspectives financières et celles du budget.
    Nous avons devant nous une comparaison entre les perspectives financières du directeur parlementaire du budget et celles du budget de 2016, présentée sous forme d'écarts. Je m'intéresse plus particulièrement à trois éléments: l'impôt sur le revenu des particuliers, les prestations pour enfants et les frais de la dette publique.
    Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous divergez par rapport au budget à savoir combien d'impôts sur le revenu des particuliers le gouvernement collectera au cours des deux prochaines années? Je remarque que les recettes provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers augmentent considérablement, de 135 millions de dollars à 177 millions de dollars. Or, vos perspectives sont encore plus élevées. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi, s'il vous plaît?
    Je vais demander à Scott Cameron de répondre à votre question. Il a 40 secondes. Quelqu'un d'autre fournira plus de renseignements par la suite.
    Cela devrait simplement refléter, en gros, les assiettes différentes du PIB nominal et, au sein du PIB nominal, les différentes parts associées aux ménages par opposition aux entreprises. L'écart entre nos perspectives et celles du ministère des Finances est probablement attribuable à son rajustement en fonction des risques, qui s'étend proportionnellement aux recettes fiscales.
    Six milliards de dollars sont perdus quelque part dans ces catégories d'impôt. Nous ne savons pas exactement où, mais le ministère a indiqué par le passé que c'était réparti partout de manière proportionnelle, alors on peut s'attendre à une différence d'environ 1 milliard de dollars pour les cinq ans en raison du rajustement des prévisions que fait le ministère des Finances.
    Nos données sont une prévision économique non rajustée qui sous-tend la politique fiscale.
    Merci.
    On observe également un écart au niveau des prestations pour enfants. Les prestations pour enfants augmentent, si l'on observe les données jusqu'en 2020-2021, mais vos prévisions sont en fait inférieures à celles du budget.
(1255)
    Comme il s'agit d'un tout nouveau programme, nous n'avons pas encore de données historiques sur lesquelles nous fonder, et nous avons un sous-ensemble très limité de formulaires d'impôt et de données de l'ARC sur lesquels nous fonder, comparativement au ministère des Finances. J'attribuerais alors la plupart de ces différences simplement au fait que nous ne connaissons pas vraiment le nombre exact de ménages, la répartition du revenu, et quel sera le taux de bénéficiaires parmi les différentes tranches de revenu.
    Je crois que, essentiellement, nous nous éloignons très peu des perspectives du ministère des Finances. Je ne connais pas le pourcentage exact, mais c'est assez proche, je dirais. Compte tenu qu'il s'agit d'un programme de 22 milliards de dollars, je crois qu'un écart de 300 millions de dollars ou 400 millions de dollars est acceptable. Je dirais que nous disons pratiquement la même chose que le ministère des Finances.
    Pour ce qui est des frais de la dette publique, quel est l'hypothèse de taux d'intérêt que vous avez appliquée?
    À l'annexe A, à la page 19, nous présentons les perspectives pour le taux des bons du Trésor à trois mois et le taux des obligations du gouvernement à 10 ans. Nous avons une équation qui calcule la durée des obligations selon le taux réel que nous appliquons à la dette du gouvernement. Ensuite, nous examinons les emprunts sur le marché et comment l'équilibre réel entre ces obligations à court et à long terme se reporte sur le taux que le gouvernement finit par payer sur sa dette.
    La Bibliothèque du Parlement a eu la gentillesse de fournir un document préparatoire pour aujourd'hui qui indique qu'une augmentation soutenue d’un point de pourcentage dans tous les taux d’intérêt pousserait les frais de la dette publique fédérale à la hausse. Puisque nous avions le gouverneur de la Banque du Canada ici ce matin et qu'il a parlé d'un retour à la capacité économique en 2017, ce qui, on peut présumer, pourrait inclure une hausse du taux d'intérêt de la Banque du Canada, je me demande si cela a été pris en considération ici.
    Chris sera en mesure de vous dire exactement quel genre de fluctuation nous présumons pour les taux de la politique monétaire, mais, certainement, nous prévoyons une augmentation du taux d'intérêt réel de la dette du gouvernement tout au long de la période de projection visée.
    Notre hypothèse est que la Banque du Canada ne commencera pas à augmenter les taux d'intérêt avant la fin de 2017. Je crois que cela correspondrait à la prise en considération de la politique fiscale. La Banque du Canada utilise les estimations du ministère des Finances pour ce qui est des répercussions sur l'économie. Ces estimations sont fondées sur l'hypothèse que les taux d'intérêt ne changeront pas. Peut-être que, implicitement, c'est également l'hypothèse qui sous-tend le rapport sur la politique monétaire, mais nous n'en avons pas la certitude.
    Vous avez évalué les coûts de la modification de la politique relative à la Sécurité de la vieillesse. Combien cela nous en coûtera-t-il dans le futur?
    Nous aimons évaluer l'incidence globale de ces changements de politiques en examinant le portrait de leur viabilité globale. La trajectoire de la dette du gouvernement était viable avant la modification et continue de l'être après. Je crois que nous avons évalué le coût pour la première année complète du programme, soit 2028-2029, à 11,2 milliards de dollars, mais comme part du PIB, cela représente seulement environ 0,35 %.
    C'est l'année où le programme coûte le plus cher, car après cela, le profil démographique et les paramètres du programmes changent de sorte que les coûts diminuent très rapidement, passant d'environ 0,35 % à 0,2 %, puis à aussi peu que 0,18 %, je crois. Je n'ai pas les données devant moi, mais on constate une trajectoire qui va en descendant.
    Cela mène en partie au graphique qui se trouve vers la fin du rapport, où l'on voit que la dette diminue avec le temps. La façon dont le profil démographique et les coûts du programme changent est telle que les finances publiques s'assainissent rapidement une fois franchies les difficultés démographiques.
    Pour ce qui est des dépenses de programmes...
    Le temps est écoulé. Merci.
     Monsieur Caron.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici parmi nous, mais également d'accomplir ce travail qui est extrêmement utile.
    J'aimerais commencer par quelques remarques, notamment pour répondre aux propos de M. MacKinnon.
     Je qualifierais de « Paul Martin 2.0 » la façon actuelle d'approcher la politique d'élaboration budgétaire. C'est sur ce point que nous pouvons être d'accord. En effet, cela me rappelle de plus en plus les budgets qui étaient déposés par cet ex-ministre des Finances.
    On ne parle pas ici de prudence, mais de prévisions exagérément éloignées de ce qui peut être prévu. Paul Martin arrivait à des prévisions de déficit en gonflant les dépenses fiscales de façon exagérée. Je parle ici de l'ensemble des crédits d'impôt et des revenus que le gouvernement consent par l'entremise de mesures fiscales.
    Dans ce cas-ci, on procède d'une manière différente: on gonfle ou on diminue les estimations. Comme vous l'avez vous-même noté, on parle d'une différence de 40 milliards de dollars par année dans le cas du PIB nominal prévu. On atteint même presque 50 milliards de dollars par année en 2016-2017. On en revient donc à la même situation. On ne parle plus présentement de prudence. Il s'agit ici d'une opinion personnelle, mais je pense que nous sommes en présence d'une stratégie délibérée visant à modifier les attentes des gens. On annonce un déficit exagéré qui incite à la prudence, mais en définitive, le résultat à la fin de l'année est passablement meilleur que celui qui était annoncé au départ. Les gens sont alors soulagés. En outre, cela donne une bonne image et une bonne conscience au gouvernement.
    Lorsqu'on n'est pas assez prudents, c'est problématique, et lorsqu'on démontre trop de prudence, cela devient une stratégie politique délibérée. Comme je connais votre rôle, je ne vous demanderai pas de commenter ces questions. Par contre, étant donné que vous êtes tout de même en contact avec le ministère des Finances, j'aimerais savoir d'où provient cette estimation extrêmement conservatrice du PIB nominal.
    Par ailleurs, le fonds de prévoyance se chiffrait par le passé à 3 milliards de dollars. Ce montant a été diminué à 1 milliard de dollars pendant le règne des conservateurs. Or on le gonfle maintenant à 6 milliards de dollars. En vous basant sur vos conversations et sur les informations que vous recevez aux fins de votre analyse, pourriez-vous me dire d'où proviennent ces chiffres?
    J'ai eu l'occasion de poser des questions au ministre des Finances, M. Morneau, mais je n'ai jamais obtenu de réponse à ce sujet. Ces chiffres semblent venir des nuages.
(1300)
    Je vous remercie de la question.
    Dans notre cas, nous ne disons pas que c'est délibéré, mais que cela est excessif. Je comprends votre situation. Comme je l'ai dit auparavant, cela créé des attentes. Il est clair que, si on est excessif en parlant d'une croissance moins importante du PIB pour les cinq prochaines années, cela peut créer des attentes à la baisse. Donc, avec les résultats pouvant être obtenus, on peut augmenter les attentes.
    Pour ce qui est des informations dont nous disposons, nous avons publié il y a deux semaines, soit peu de temps après la publication du Budget, un tableau intéressant à ce sujet. En effet, on y montrait quelles étaient les projections du secteur privé sur une période de cinq ans en ce qui a trait au PIB nominal. Il y a eu toute une confusion à ce sujet. On parlait à la fois de surestimation et de sous-estimation. Pour notre part, nous disions que la première et la deuxième année de leurs projections avaient continuellement été sous-estimées au cours des années, soit pour 40 % du temps. C'est vraiment à prendre en considération.
    Je vais maintenant demander à M. Moskari de prendre le relais.
    Je vous remercie.
    Nous ne savons pas vraiment pourquoi le ministère des Finances a prévu un ajustement de 40 milliards de dollars. Cela dit, les gouvernements utilisent depuis 20 ans les prévisions du secteur privé pour donner aux prévisions financières un caractère plus indépendant.
    Par contre, quand il s'agit d'un ajustement très important, l'élément d'indépendance disparaît complètement. De plus, quand on change une variable importante, par exemple le PIB nominal, les autres variables provenant des prévisions du secteur privé ne cadrent plus avec le niveau du PIB. Bref, une telle prévision est problématique.
     Je vous remercie.
    Je vais probablement revenir là-dessus si j'ai l'occasion de poser des questions lors d'une ronde subséquente.
    Je voudrais parler de transparence. D'où viennent ces chiffres et ces paramètres utilisés par le ministère des Finances? On ne le sait pas. Cela soulève éventuellement une question sur la transparence et la responsabilité.
    Vous avez soulevé une autre question sur la transparence ou le manque de transparence. En fait, vous avez soulevé deux questions. On a partiellement répondu à l'une d'entre elles. J'aimerais savoir si vous êtes satisfait de la réponse que vous a donnée le ministère des Finances à la suite de la plainte que vous avez formulée au sujet de ne pas avoir tous les chiffres.
    L'autre question est la conséquence du fait qu'on ramène de cinq à deux ans la période de prévision des coûts du gouvernement et la conséquence que cela aura, non seulement sur l'élaboration des budgets, mais également sur votre travail de directeur parlementaire du budget.
(1305)
    Je vous remercie de la question sur la transparence. C'est une bonne question. J'aimerais prendre 30 secondes pour expliquer la situation qu'on a vécue relativement à la transparence au cours de cette période.
     Lorsqu'on a vu que le budget ne contenait que deux ans de planification et non pas les cinq ans comme c'est normalement le cas, nous avons été surpris. Nous ne savions pas que cela allait arriver.
     Le deuxième élément de surprise a été agréable parce que nous avons demandé les chiffres et que nous avons les avons obtenus pour cinq ans. La transparence devenait beaucoup plus réelle qu'auparavant.
     Le troisième élément de surprise a été de se faire dire, lorsque nous avons reçu ces chiffres quelques jours plus tard, que nous ne pouvions pas les utiliser. Nous sommes donc passés par un certain cycle, à savoir des surprises agréables, des moins agréables et, finalement, à la suite d'une demande officielle, l'obtention des données.
    Au départ, il y a peut-être eu un manque de transparence. Par la suite, le gouvernement s'est rendu compte qu'il manquait de transparence. Le fait que nous ayons obtenu les chiffres nous satisfait parce que cela nous permet d'informer le Parlement sur l'état de la planification pour cinq ans.
    Cela étant dit, un peu tout le monde doit peut-être apprendre quelque chose relativement à la transparence, qu'il s'agisse du gouvernement ou qu'il s'agisse de tous ceux qui font de la planification financière. Au cours des prochains mois, nous verrons dans les mises à jour et dans les autres documents si cet élément de surprise sera éliminé et si le directeur parlementaire du budget sera toujours heureux d'avoir les dits chiffres.
    M. Matier peut répondre immédiatement à votre question précédente, si vous le souhaitez.

[Traduction]

    J'ai parlé aux fonctionnaires du ministère des Finances, et je ne sais pas directement d'où viennent les 3 milliards de dollars. Ma supposition, c'est qu'il s'agit essentiellement d'un report de la réserve de 3 milliards de dollars pour éventualités employée par les gouvernements précédents, et cela a simplement été facilement reporté sur les 20 milliards de dollars ou 3 milliards de dollars de revenus fédéraux dans le rajustement des prévisions actuelles.
    Par rapport à la prudence des prévisions budgétaires, notre impression est que le rajustement des prévisions n'est pas vraiment employé à des fins de prudence. Du moins, je n'ai pas pu trouver de mention explicite à cet effet dans le budget. C'est plutôt une question de prendre en considération les risques de baisse. Si l'on se reporte à la mise à jour de l'automne 2015 et aux perspectives économiques canadiennes de février, c'est ainsi que c'est présenté, et c'est ce que l'on veut faire comme prévisionniste. C'est dans ce sens que nous jugeons que le rajustement des prévisions, en particulier pour la première et la deuxième années, est excessif, et que, du moins à première vue, il ne s'agit pas d'une mesure de prudence. C'est pour compenser les risques. Il faudrait un scénario très négatif de probabilité élevée pour justifier un tel rajustement à la baisse de 40 milliards de dollars.
    Nous passons à M. Sobara, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir brièvement à ce que M. Caron a dit à propos du fait qu'il pourrait s'agir de la version 2.0 de la politique budgétaire de Paul Martin. Si le Canada est sur le point d'entrer dans une deuxième ère budgétaire comme celle qui a été présidée par Paul Martin, et si nous assistons, au cours des prochaines années, à une forte croissance économique et à d'autres bons résultats comme le renforcement du Régime de pensions du Canada et la collaboration avec les provinces dans un certain nombre de dossiers, alors je pense que c'est une excellente nouvelle pour le Canada et pour ma circonscription, Vaughan—Woodbridge. C'est un résultat que j'accueillerais avec plaisir. Merci, monsieur Caron.
    En ce qui concerne la prudence, dans une ancienne vie, j'ai été analyste de titres obligataires, et mon travail consistait notamment à analyser les risques extrêmes et les possibilités de révision à la baisse. Si on pense à ce qui s'est passé au cours de l'année dernière ou des 18 à 24 derniers mois, avec l'évolution des prix des produits de base, l'économie de la Chine qui continue de passer d'une économie industrielle à une économie de consommation, et les difficultés causées par l'instabilité des marchés émergents, je crois que le budget de 2016 s'appuie sur une certaine prudence, notamment avec l'ajustement à la baisse des prévisions à l'égard du PIB nominal de 40 milliards de dollars. À mon avis, c'est un budget très prudent pour les contribuables. C'est une approche prudente pour l'économie et qui tient compte de l'ensemble des facteurs, mais aussi des problèmes d'instabilité actuels. Je tenais à le souligner, et je serais ravi d'entendre votre avis à ce sujet.
    Je tenais aussi, encore une fois, à demander à M. Cameron ce qu'il pense de l'ajustement de l'âge d'admissibilité à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti, qui est ramené de 67 à 65 ans. Pouvez-vous simplement rappeler ce que cela représente comme pourcentage du PIB, car je pense qu'il est important de le souligner?
(1310)
    Certainement. À cet égard, les prévisions ont commencé à 0,35 % du PIB en 2029, et à la fin de la période de prévision — je crois que nous nous sommes rendus jusqu'en 2065 —, ce taux chute à 0,15 % du PIB. Essentiellement, on prévoit que le taux sera réduit de moitié. Ce résultat s'appuie sur les paramètres du programme, qui tiennent compte de l'évolution démographique.
    Je pense que c'est un aspect qui mérite d'être souligné. Partout dans le monde, les économies développées doivent faire face à des difficultés démographiques, mais la décision d'ajuster l'âge d'admissibilité à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti pour le ramener de 67 à 65 ans, alors que le gouvernement précédent avait annoncé la hausse de l'âge d'admissibilité en Suisse sans consulter les Canadiens, ne nuit pas du tout à nos capacités financières ni à la marge de manoeuvre dont nous disposerons à l'avenir. Vous n'avez pas à commenter cela, mais je tenais également à souligner cet aspect.
    Monsieur le président, j'aimerais également offrir une minute de mon temps à M. Champagne.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie M. Fréchette et tous ses collègues de leur présence parmi nous.
    Vous savez que nous respectons beaucoup votre travail et que nous sommes heureux que vous soyez ici aujourd'hui. Je peux vous assurer que le travail que vous faites, à savoir d'informer les Canadiens et les parlementaires, est important pour nous. Je peux vous assurer, monsieur Fréchette, de notre entière collaboration maintenant et à l'avenir pour tout ce que vous faites.
    J'aimerais revenir sur la question de la prudence. Cette question est très importante. Avant vous, nous avons rencontré le gouverneur de la Banque du Canada qui nous parlait de la volatilité de l'économie mondiale. On sait que l'économie canadienne correspond à environ 2 % de l'économie mondiale. On a analysé les risques importants au sein de l'économie mondiale. On a parlé de la Chine et des États-Unis. On pourrait aussi parler du Brésil. Le Fonds monétaire international a récemment réduit ses prévisions de croissance économique pour le Canada.
    Comment avez-vous intégré les risques macroéconomiques de l'économie mondiale à vos projections? Il est important de regarder ce qui se passe dans le monde. L'ensemble des acteurs économiques mondiaux s'entendent pour dire qu'il y a beaucoup de volatilité. Mme Lagarde parlait d'une ère de croissance anémique. La prudence est donc de mise selon nous.
    Parlez-nous des mesures macroéconomiques que vous entrevoyez ou des risques de volatilité de l'économie mondiale dont vous avez tenu compte quand vous avez fait vos projections.
    Je vous remercie de votre soutien à l'endroit du directeur parlementaire du budget. D'ailleurs, nous sommes très heureux de voir que vous avez, dans votre plateforme électorale, parlé d'un mandat plus clair et plus fort. Nous apprécions cela.
    Je vais demander à M. Matier de vous parler de la prudence. Il est M. Prudence au sein du bureau du directeur parlementaire du budget. C'est un de ces dadas. Il va donc vous en parler en détail.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Dans nos prévisions, les principaux facteurs externes dont nous tenons compte sont l'économie des États-Unis, les prix des produits de base et le reste de l'économie mondiale, que nous étudions par l'entremise du Fonds monétaire international.
    Récemment, nous avons considérablement revu à la baisse notre prévision de la croissance réelle du PIB des États-Unis, qui est passée d'un taux de 2,6 % à des taux de 2,1 % et de 2,3 %. Nous avons aussi revu considérablement à la baisse les prévisions concernant les prix des produits de base afin de tenir compte du ralentissement mondial.
    Ce sont là les principaux facteurs macroéconomiques mondiaux qui touchent l'économie canadienne.
    Par ailleurs, nous avons une politique financière qui prévoit une hausse globale de la demande au sein de l'économie, et une politique monétaire qui maintient le taux d'intérêt actuel pour composer avec cette situation. C'est une approche compensatoire qui stimule l'économie.
    Pour ce qui est de la prudence, nous appuyons nos prévisions sur ce que nous appelons un risque équilibré, car nous croyons que les prévisions à la hausse et à la baisse sont plus ou moins équilibrées. C'est ce que doit faire tout prévisionniste qui souhaite faire des prévisions rigoureuses. Si on veut réduire au minimum la marge d'erreur, il faut tenir compte de l'ensemble des facteurs de risque.
    Une approche prévisionnelle prudente a ceci de différent qu'elle vise à assurer une probabilité élevée d'atteindre ou de surpasser un objectif.
    Ces deux concepts peuvent sembler identiques, et l'approche peut sembler prudente dans les deux cas, mais nous voyons cela comme deux approches prévisionnelles distinctes.
    En nous fondant sur le budget actuel, la mise à jour de l'automne et le document d'information de février, nous croyons que le gouvernement a voulu ajuster les prévisions pour équilibrer les risques en fonction des prévisions du secteur privé, et qu'il ne cherche pas tant à adopter une approche budgétaire prudente. Si le gouvernement a prévu cet ajustement pour accroître le niveau de prudence ou pour assurer une probabilité élevée d'atteindre son objectif, alors il peut faire preuve de transparence en disant qu'il prend une décision prudente. Selon mon interprétation, et en me fondant sur une recherche de mots clés dans le document budgétaire, je dirais que le mot « prudent » est présent, mais pas dans ce contexte.
(1315)
    Merci.
    Si vous dites que le ministre emploie le mot « prudent » plus souvent, cela ne fait aucun doute.
    Passons à M. Aboultaif.
    Merci beaucoup.
    Nous savons qu'il y a beaucoup d'incertitude avec ce qui s'est produit dans l'économie mondiale et la chute des prix des produits de base, qui a longtemps été le principal facteur responsable de la situation actuelle, et je sais quel genre de croissance nous avons vu dans le passé.
    Le budget fédéral nous propose d'emprunter 30 milliards de dollars. Les Canadiens s'interrogent sur ce montant élevé que nous allons emprunter dès la première année et au cours des prochaines années. On se demande toujours quels sont les effets prévus de ce nouveau plan de dépenses des libéraux sur l'économie.
    Il est important d'analyser les prévisions budgétaires en fonction vos observations. Comment peut-on concilier ces perspectives? Croyez-vous que les prévisions sont optimistes? Quelle est la réalité?
    Merci.
    Nos prévisions tiennent compte de l'effet des mesures financières que le gouvernement a proposées dans le budget et avant la présentation du budget. Nous avons prévu comme effet une croissance de 0,05 % la première année, en 2016, et d'environ 0,03 % la deuxième année, en 2017.
    C'est légèrement différent de ce que le gouvernement a proposé, mais comme nous l'avons dit plus tôt, lorsqu'il s'agit de calculer les effets, ce genre d'écarts minimes dépendent des hypothèses et des multiplicateurs associés aux modèles. Ces écarts peuvent être expliqués, et ils ne sont pas considérables.
    La prochaine question porte sur la création d'emplois. Il y a des prévisions à ce sujet. Je crois que vous avez remis en question les calculs du ministre des Finances sur la création d'emplois. Pouvez-vous expliquer comment il s'est trompé?
    Je crois que la même chose s'est produite aux États-Unis, en 2008-2009. Il y avait au moins une certaine méthode de calcul des dépenses ou un programme de relance pour la création d'emplois. Comment le ministre des Finances s'est-il trompé au Canada, car, à mon avis, les calculs sont erronés? Vous avez probablement la même opinion ou une opinion assez semblable.
(1320)
    Je ne dirais pas, monsieur, que le ministre s'est trompé. Nos prévisions sont légèrement différentes. Comme je l'ai dit, il faut voir ce genre de prévisions et de résultats comme un éventail de possibilités plutôt que des prévisions exactes.
    Lorsque le ministère des Finances prévoit la création de 100 000 emplois, il se fonde sur les modèles à sa disposition et sur ses hypothèses. Nous prévoyons environ 60 000 emplois. On peut voir cela comme un éventail de possibilités, et pas nécessairement comme des chiffres exacts.
    L'écart est énorme. En fait, n'importe qui peut choisir sa façon de mesurer et établir ses propres prévisions, mais sur le terrain, les Canadiens veulent des réponses claires. Ils s'attendent à ce qu'on leur dise de façon claire et étoffée quels seront les dépenses et les résultats.
    Hélas, on ne peut pas fournir de réponse précise à ce sujet. Par ailleurs, il sera très difficile de déterminer qui avait raison ou tort, car les choses évolueront au fil du temps. Au cours des deux prochaines années, nous ne pourrons pas savoir si les programmes auront permis de créer 100 000 ou 60 000 emplois. C'est impossible à déterminer.
    Très bien. Je dois maintenant vous interrompre.
    Je vais laisser M. Grewal et M. Liepert poser deux autres questions dans cette période de discussion. Nous passerons ensuite à l'étude du projet de loi C-2. Je vous prie de vous en tenir à trois minutes pour poser vos questions afin que nous respections notre échéancier pour l'étude du projet de loi C-2.
    Allez-y, monsieur Grewal.
    Merci, monsieur le président.
    J'irai droit au but. Dans le rapport que vous avez publié ce matin, vous prévoyez des déficits moins élevés que ne le prévoient le ministre et le gouvernement. Vous dites que cet écart correspond principalement à l'ajustement de 6 milliards de dollars des prévisions financières fournies par le gouvernement.
    Êtes-vous en train de dire que cet ajustement des prévisions financières n'est pas une bonne décision? Le gouvernement s'est engagé à faire preuve d'ouverture et de transparence envers les Canadiens. Nous allons tenir les Canadiens informés à mesure que les conditions économiques évolueront.
    L'ajustement de 6 milliards de dollars des prévisions financières, même s'il est plus important que celui des années précédentes, vise à... Il y a eu des fluctuations considérables dans les prix des produits de base à l'échelle mondiale, ce qui aura une incidence sur l'économie canadienne.
    Pourquoi prévoyez-vous un déficit moins élevé dans votre rapport, étant donné que les prix des produits de base sont encore très instables à l'échelle mondiale?
    Allez-y, Chris.
    Je vais répondre rapidement. Je pense qu'il est utile de prendre du recul. Depuis la fin de 2014, les cours du pétrole et des produits de base ont considérablement changé. Nous sommes maintenant à un stade où il est peu probable que nous assistions au même genre de révision à la baisse. Je ne pense pas que les cours du pétrole peuvent être négatifs. Les prix se situent actuellement aux alentours de 40 $.
    D'une certaine façon, ajuster à la baisse les prévisions à l'égard du PIB nominal de 40 milliards de dollars, c'est un peu comme si on s'attendait à ce que les cours du pétrole continuent de chuter à un niveau minimal. C'est une possibilité. Cela pourrait faire partie des risques extrêmes, mais, encore une fois, il est très peu probable que les risques extrêmes se concrétisent.
    Vous dites essentiellement que, étant donné que le prix du pétrole s'est stabilisé aux alentours de 35 $ à 40 $ le baril, l'ajustement de 6 milliards de dollars des prévisions financières du gouvernement est trop élevé.
    C'est essentiellement ce que je dis. N'oublions pas que, à la fin de 2014, le pétrole se vendait à 100 $ le baril, et le prix a maintenant chuté à 60 $ le baril. Pour 2016 ou 2017, je pense que la révision à l'égard du PIB nominal pourrait se situer aux alentours de 80 milliards de dollars. C'est un peu comme si on prévoyait un prix du baril à moins de 20 $, voire à 10 $.
    Je crois quand même que le fait de prévoir ce genre de marge de manoeuvre constitue une approche budgétaire prudente de la part du gouvernement. Dans une carrière précédente, j'ai été analyste. Nous tenions toujours compte de ce genre de détails, même les plus insignifiants. J'ai déjà travaillé pour une entreprise qui produisait des boissons. Nous appliquions ce genre d'analyse au prix de notre produit de base, qui était alors le prix des oranges, et nous tenions compte des fluctuations ainsi que du taux de change.
    Je crois quand même que c'est une très bonne politique financière, que l'ajustement de 6 milliards de dollars des prévisions financières est une façon d'être honnête envers les Canadiens. Nous ne pouvons pas contrôler certains facteurs comme les prix des produits de base, mais ne nous attardons pas là-dessus. Passons à autre chose.
    Vous dites également dans votre rapport: que le ratio de la dette par rapport au PIB sera moins élevé d'ici 2020-2021; que, selon vos prévisions, qui s'étendent sur plus de cinq ans, et compte tenu de la politique financière et de la structure financière actuelles, le gouvernement prend de bonnes décisions pour stimuler l'économie; et que nous faisons de bons investissements, compte tenu de la situation économique actuelle. Est-ce exact? Qu'en pensez-vous?
(1325)
    C'est ce que nous avons dit. Si rien ne change, et si aucune nouvelle mesure n'est mise en place, nous croyons que la viabilité des finances sera assurée à long terme, et c'est précisément ce que démontre le graphique de la figure 6. Le ratio de la dette par rapport au PIB finira par s'annuler, ce qui veut dire que la viabilité des finances publiques est assurée.
    Je souligne par ailleurs que nous allons publier, en juin ou juillet, notre rapport sur la viabilité des finances, qui couvrira en détail ce genre de mesures.
    Je vous remercie tous deux.
    Nous allons passer à M. Liepert, mais, lorsque entamerons la deuxième série de questions, nous pourrions encore avoir besoin de vous, monsieur Matier et monsieur Cameron.
    Je demanderais également à Mme Lao et Mme Malanik de s'asseoir à la table également afin qu'elles soient prêtes à témoigner lors de l'étude du projet de loi C-2.
    Allez-y, monsieur Liepert.
    J'aimerais seulement en savoir un peu plus sur le modèle que vous avez utilisé à l'égard des emplois, parce qu'on entend constamment dire que ce budget est un investissement dans les infrastructures. Or, pendant les deux premières années, si ma vue n'est pas encore défaillante, je vois que les investissements réels dans les infrastructures s'élèvent seulement à 10 à 12 milliards de dollars.
    Il y a cependant d'autres dépenses gouvernementales qui sont consacrées, par exemple, à CBC/Radio-Canada. Je présume que ces dépenses de plusieurs centaines de millions de dollars par année vont créer des emplois.
    Avez-vous établi des modèles pour déterminer où ces 50 000 ou ces 150 000 emplois seront créés. Dans quelle mesure ces dépenses liées aux infrastructures y contribueront-elles réellement, et combien d'emplois seront créés par les autres dépenses?
    Oui. Pour préparer nos prévisions concernant l'incidence sur l'emploi, nous avons suivi le modèle du ministère des Finances axé sur les secteurs ciblés, et nous avons ainsi un aperçu de l'incidence sur l'emploi dans l'ensemble des secteurs. Si on veut connaître l'incidence des mesures destinées aux ménages à faible ou modeste revenu, il y a une façon de la mesurer.
    Comme vous l'avez souligné, les autres dépenses gouvernementales auront également une incidence sur les chiffres liés à l'emploi. Je n'ai pas ces chiffres sous la main, mais nous pourrions fournir la répartition détaillée.
    J'aimerais avoir la répartition, parce que, si nous sommes sur le point de faire un déficit de 30 milliards de dollars, je pense qu'il est important que nous sachions, par exemple, combien d'électriciens sans emploi qui ne travaillent plus dans le secteur des sables bitumineux vont travailler dans la circonscription de M. Sorbara pour participer à la construction de nouveaux condos à Toronto.
    Nous avons la répartition selon le secteur ciblé, mais pas selon la zone ou la région géographique.
    Alors qu'entendez-vous par secteur ciblé?
    Je parle de secteurs comme le secteur manufacturier ou le secteur agricole. Nous avons un modèle macroanalytique qui couvre un très grand nombre de secteurs.
    Alors quelles données avez-vous?
    Nous avons des prévisions concernant l'incidence des mesures sur l'emploi dans l'ensemble de l'économie canadienne, et nous pouvons établir des liens entre les chiffres sur l'emploi et les mesures qui ont été proposées en suivant la mise en correspondance du ministère des Finances qui montre si l'augmentation des dépenses aura une incidence sur les structures non résidentielles ou résidentielles. C'est le genre de détails qui seraient à notre disposition.
    J'aimerais aussi avoir ces données.
    J'ai une autre question brève à poser avant de passer à autre chose.
    Dans votre modélisation, vous êtes-vous penchés sur... Il y a un vif débat au sujet de la nouvelle allocation canadienne pour enfants. On se demande dans quelle mesure elle est réellement avantageuse pour une famille moyenne — si je puis dire — compte tenu des avantages fiscaux que ce budget a fait disparaître.
    Avez-vous établi un modèle pour comparer ces deux prestations?
(1330)
    Nous sommes en train de préparer un rapport qui fournira une analyse de répartition de la nouvelle allocation canadienne pour enfants. Nous espérons qu'il sera prêt dans les prochaines semaines. Nous ne l'avons pas terminé, mais il sera publié prochainement.
    Ce rapport tiendra-t-il compte du crédit d'impôt pour la condition physique, du crédit d'impôt pour les activités artistiques et du fractionnement du revenu, ou seulement des deux types de prestation pour enfants?
    J'aimerais revenir à ce qu'a dit M. Askari. Nous sommes en train de répondre à deux demandes. La première consiste à établir une microanalyse de distribution qui tient compte des données avant et après la mise en place de l'allocation canadienne pour enfants. Pour répondre à votre question, nous effectuons une analyse plus détaillée des modifications au régime fiscal prévues dans le budget de 2016 qui s'appuiera à la fois sur un modèle préétabli et sur un modèle microanalytique qui cible plus particulièrement certains types de familles.
    Parfait.
    Merci beaucoup. Vous devrez attendre trois ou quatre semaines pour obtenir les résultats, monsieur Liepert.
    Nous passons à l'étude du projet de loi C-2. Je vois sur ma liste que M. Lefebvre prendra la parole en premier, ce sera ensuite le tour de Mme Raitt, puis de M. Caron. Je vous demanderais de vous en tenir à quatre minutes chacun pendant cette série de questions.
    Allez-y, monsieur Lefebvre.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais parler du compte d'épargne libre d'impôt, ou CELI, puisque le projet de loi C-2 propose d'en abaisser le plafond de cotisation en le ramenant de 11 000 $ à 5 000 $.
    Quel pourcentage des Canadiens des différentes catégories de revenu cotisent au maximum à leur CELI?
    En général, il n'y a environ que 18 % des détenteurs d'un CELI qui y ont cotisé au maximum.
    Dans quelle catégorie de revenu se trouvent-ils?
    Encore une fois, nous utilisons les mêmes données que celles que le ministère des Finances à citées au comité la semaine dernière, c'est-à-dire les données de 2013 de l'ARC.
    Selon la catégorie de revenu, on constate que, chez les personnes qui ont rempli un formulaire de déclaration T1 et qui ont déclaré un revenu total de 45 000 $ ou moins, le pourcentage de personnes qui ont cotisé au maximum à leur CELI se situe en moyenne autour de 15 %. Pour ce qui est des personnes ayant déclaré un revenu supérieur à 45 000 $ par année, ce pourcentage se situe autour de 19 % ou 20 %.
    Environ le cinquième des Canadiens qui avaient un CELI en 2013 et qui ont déclaré un revenu de plus de 45 000 $ par année ont cotisé au maximum à leur CELI.
    Pour ce qui est de ramener le plafond de cotisation de 11 000 $ à 5 000 $, quelle serait, globalement, l'incidence de cette mesure sur l'épargne des Canadiens?
    En un mot, je dirais que nous ne le savons pas. Il est difficile de le savoir en se fondant sur ce que les gens...
    Nous avons des données historiques qui donnent un portrait de la situation lorsque les gens pouvaient mettre 5 000 $ ou 5 500 $ de côté, mais nous n'avons pas accès à des données qui permettent de déterminer l'effet de la décision de doubler le plafond de cotisation pour le porter à 11 000 $ par année.
    Nous pouvons cependant citer les données que nous avons publiées l'année dernière à propos du programme du CELI. Ce que nous avons observé, en particulier pendant les premières années du programme, c'est que des gens ont transféré des richesses accumulées de leurs comptes qui n'étaient pas à l'abri de l'impôt à leur CELI.
    Comme nous l'avons souligné dans ce document, au fil du temps, on s'attendrait à ce que ces sources de richesses qui, auparavant, n'étaient pas à l'abri de l'impôt, s'épuisent tranquillement, et à ce que les montants des cotisations et le taux de contribution maximale commencent à diminuer.
    Selon les prévisions dont vous disposiez lorsque vous vous êtes penchés sur les CELI, si on avait maintenu le plafond de cotisation plus élevé, quelle part de ces richesses aurait été transférée dans les CELI, si on se fie à la moyenne actuellement observée?
    Je sais que vous avez fait des prévisions sur la quantité d'argent qui aurait été retirée de l'économie et qui aurait été mise à l'abri de l'impôt si on avait maintenu le plafond de 11 500 $ au fil des années. À quel point cela aurait-il été dommageable pour l'assiette fiscale canadienne?
    Selon les prévisions à long terme et, encore une fois, les données que nous avons publiées l'année dernière, cela aurait pratiquement la même incidence que le programme de REER actuel jusqu'en 2075. En général, cela correspondrait environ à 0,6 % ou 0,7 % du PIB.
(1335)
    Nous devrons en rester là.
    Allez-y, madame Raitt.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais aussi parler du CELI, si vous le permettez. Je vais faire de l'excellente publicité pour le Globe and Mail aujourd'hui, car il a publié dans les pages centrales un excellent article qui explique comment épargner de l'argent grâce au CELI en disant combien investir au début et en indiquant le rendement auquel on peut s'attendre. Je recommande au gouvernement de se pencher sur les coûts de renonciation que nous devrons maintenant assumer à cause de cette baisse du plafond de cotisation.
    Ma question est la suivante. En analysant le CELI, avez-vous fait une comparaison avec l'approche adoptée par le Royaume-Uni à l'égard du CELI?
    Non, nous n'avons pas fait de comparaison directe avec les comptes d'épargne individuels. C'est un aspect que nous avons couvert dans l'annexe du document que nous avons publié l'année dernière en prenant comme exemples le Royaume-Uni, les États-Unis et le Japon.
    Est-ce que l'un de ces pays a abaissé ou augmenté le plafond de cotisation du CELI? Ont-ils augmenté la limite? Êtes-vous au courant?
    Je ne suis pas au courant...
    C'est ce qu'ils ont fait. La réponse est oui. Je voulais juste le souligner.
    Vous me semblez crédible.
    Merci. Ils ne sont pas du même avis. C'est dommage.
    Mon autre question porte également sur le CELI. Dans le document que vous avez publié, vous dites que le CELI est très différent du REER dans la mesure où on peut se servir des bénéfices ou des revenus générés par le CELI de n'importe quelle façon sans payer d'impôt. Est-ce que vous parlez des différentes façons d'utiliser l'épargne au lieu de vous concentrer sur la retraite?
    Non, cela sortait du cadre du document. Nous nous sommes concentrés principalement, voire presque exclusivement, sur les effets ou les coûts financiers.
    Bien sûr.
    Enfin, vous dites que le CELI a été mis en place afin de permettre aux gens d'un certain groupe d'âge de mettre de l'épargne-retraite à l'abri de l'impôt. Savez-vous quel économiste, quelle entreprise a rédigé l'article et a recommandé de se servir de cet outil de cette manière? Il connaît la réponse.
    Non, je ne connais pas la réponse, mais je parie que vous la connaissez.
    Je la connais. C'est Morneau Shepell qui a dit que le CELI était un excellent outil pour mettre à l'abri... voilà pourquoi il a tout abandonné. Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président. J'ai fini.
    Vous avez fini. Vous n'avez pas d'autres réponses à nous donner?
    Eh bien, si vous me laissez une minute, je peux passer le reste de mon temps à réfuter les suppositions faites par les membres du parti ministériel. Quoi qu'il en soit, j'apprécie votre sens de l'humour.
    Avant de faire cela, nous allons donner la parole à M. Caron.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Le projet de loi C-2 m'intéresse particulièrement.
    J'aimerais vous remercier encore une fois, monsieur Fréchette, d'avoir travaillé à la réponse à ma question. En effet, vous avez comparé les dispositions du projet de loi C-2 sur la réduction de la deuxième tranche d'imposition,  qui touche en définitive tous les revenus supérieurs à 45 000 $ et celle qui se situe entre 45 000 $ et 90 000 $, par rapport à celle que nous avons proposé, c'est-à-dire une diminution de 1 % pour la première tranche d'imposition, ce qui toucherait 83 % des Canadiens.
    On dit que la réduction d'impôt est pour la classe moyenne, mais les personnes dont le revenu est inférieur à 45 000 $ ne touchent pas un sou de réductions d'impôt. En fin de compte, j'aimerais que vous me confirmiez, selon les chiffres des études que vous avez faites, que quelqu'un qui gagne 210 000 $ recevrait davantage de réductions d'impôt qu'un autre individu gagnant 62 000 $ par année.
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Je demanderais à une de mes collègues, Helen ou Carleigh, de répondre à cette question.

[Français]

    Oui. Cette personne recevrait une réduction d'impôt totale plus grande que quelqu'un qui gagne 62 000 $, et ce, malgré le fait qu'il y a une autre tranche d'imposition à partir de 200 000 $ qui est imposée à 33 %. 
    Selon mes calculs, quelqu'un qui a un revenu de 210 000 $ va avoir droit à une réduction d'impôt significative qui sera plus élevée que quelqu'un qui a un revenu de 62 000 $.

[Traduction]

    D'accord. Dans ce cas, la personne qui gagne plus de 210 000 $ bénéficiera de la baisse d'impôt pour la classe moyenne, selon un taux qui serait ramené de 22 % à 20,5 %. Une personne qui gagne plus de 200 000 $ paiera un impôt de 33 % sur le revenu excédentaire à partir de 200 000 $.
(1340)

[Français]

    Pouvez-vous nous confirmer que, en raison de ces changements, le revenu à partir duquel les gens qui se situent à ce niveau de revenus commenceront à payer plus d'impôt est de 217 000 $?
    Une voix: Oui.
    M. Guy Caron: C'est donc confirmé. Tous les gens dont les revenus se situent entre 200 000 $ et 217 000 $ vont y gagner à la suite de cette modification. Dans le cas de la solution que je vous ai demandé d'étudier, la réduction proposée de 1 % de la première tranche d'imposition aurait fait en sorte que les gens qui gagnent plus de 200 000 $ auraient payé plus d'impôt qu'à l'heure actuelle.

[Traduction]

    J'aimerais souligner, Guy, que, lorsque vous hochez la tête, cela ne se reflète pas dans le compte rendu. Je vous suggère de dire oui ou non.
    Allez-y, monsieur Askari.
    Je répondrais oui à votre première question. Ceux qui gagnent moins de 217 000 $ bénéficieront de... oui, absolument, et, essentiellement le taux de 33 % s'appliquera à l'excédent.

[Français]

     En définitive, environ le tiers des contribuables seront gagnants, mais les deux tiers ne toucheront rien du tout et ne profiteront pas du tout de la réduction d'impôt proposée. Est-ce la conclusion à laquelle vous arrivez également?
    Vous avez mentionné qu'environ 30 % des contribuables allaient en profiter.
    Il s'agit en effet de 31 % de la population.
    La mesure que nous proposons, soit une réduction de 15 % à 14 % de la première tranche, toucherait positivement 83 % des contribuables. Est-ce bien votre conclusion?
    C'est exactement ce que nous avons écrit dans notre rapport. Faire passer la première tranche de 15 % à 14 % est une mesure dont 83 % des contribuables profiteraient. Évidemment, en commençant plus bas, on rejoindrait certains contribuables et cela implique également que les autres tranches seraient touchées.
    En somme, le projet de loi C-2 vise à taxer davantage environ 1 % de la population pour redistribuer l'argent à environ 25 % de la population de façon significative,  disons à 31 % de celle-ci. Il n'y a donc pas nécessairement de changement pour 70 % de la population, malgré le fait qu'on dise que la mesure bénéficiera à l'ensemble de la classe moyenne.
    Si ma mémoire est bonne, dans notre rapport, le pourcentage de 83 % faisait référence à la première tranche. Dans notre rapport, on disait que si on commençait avec la deuxième tranche, tel que proposé par le projet de loi C-2, 43 % des contribuables seraient touchés. Encore une fois, les 43 % ne visent pas seulement les contribuables du deuxième niveau. Cela vise également le troisième et les autres.
    D'accord.

[Traduction]

    Merci à tous.
    Monsieur Ouellette, vous avez quatre minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    J'aimerais savoir quels seraient les effets d'une dette fédérale élevée ou peu élevée sur la croissance économique, et quels sont les facteurs que le gouvernement devrait prendre en compte pour déterminer le taux approprié du ratio de la dette fédérale par rapport au PIB.
    Il n'y a pas de taux optimal pour ce qui est du ratio de la dette par rapport au PIB. C'est difficile à déterminer, et cela dépend de la situation et des circonstances. Il y a des estimations. Certains disent que ce taux se situe autour de 80 % ou 60 %, mais le taux optimal n'a pas été déterminé. Ce n'est pas un aspect que nous abordons dans nos rapports. Nous cherchons habituellement à déterminer si le ratio de la dette par rapport au PIB est stable ou s'il diminue, ce qui détermine en quelque sorte si la structure financière est viable ou non.

[Français]

    Quels sont les impacts de la pauvreté extrême au Canada sur la croissance économique?

[Traduction]

    Les effets de la pauvreté sur la croissance économique ne font malheureusement pas partie des aspects que nous avons étudiés.
    Est-ce un aspect qui devrait être pris en compte?
    Je pense que, généralement, nous examinons la conjoncture économique pour faire les projections, mais nous n'effectuons aucune analyse en fonction de segments particuliers de la population ni de leur incidence globale sur la croissance de l'économie canadienne. De toute évidence, la pauvreté n'est pas sans conséquences puisque les gens ne peuvent pas dépenser, mais nous n'effectuons aucune analyse à ce sujet.
    Selon ce que je comprends, vos analyses sont unidirectionnelles ou unidimensionnelles, ou encore vous examinez toute la question de la croissance économique dans le budget?
(1345)
    Au bout du compte, ce qui nous intéresse vraiment, c'est ce qui touche le budget. Pour effectuer des projections financières et constater l'évolution de la situation budgétaire, il faut considérer le développement et les conditions macroéconomiques dans leur ensemble. C'est là-dessus que nous nous concentrons. Nous n'avons pas effectué de microanalyse détaillée des différents segments et des différentes tranches de revenus et de leur incidence sur la croissance économique. Ce serait intéressant, mais nous ne l'avons jamais fait.
    On peut imaginer, par exemple, qu'en investissant davantage dans l'éradication d'une bonne partie de l'extrême pauvreté qui existe au Canada, surtout parmi les enfants, la croissance économique procurerait éventuellement des avantages à long terme susceptibles d'entraîner une augmentation durable du potentiel économique du Canada et, finalement, de tous les Canadiens.
    Comme je l'ai dit, ce sont là autant de possibilités — investir dans l'éducation, investir dans la santé, investir dans les enfants — qui sont susceptibles d'engendrer des gains de productivité et une intensification de l'activité économique, mais il s'agit de principes généraux, oui.
    D'accord, merci beaucoup. J'aimerais simplement céder une petite partie de mon temps de parole au secrétaire parlementaire.
    Nous aurons le temps de lui redonner la parole.
    Je vais passer à M. Aboultaif, puis nous en viendrons à M. Champagne. Ainsi, vous aurez un peu plus de temps.
    Merci encore. La question, c'est de définir en quoi consiste la classe moyenne au Canada sur les plans de la structure de revenus et de l'économie canadienne dans son ensemble. Pouvez-vous nous donner le pourcentage de Canadiens que l'on considère comme faisant partie de la classe moyenne?
    La définition de la classe moyenne est d'ordre essentiellement politique plutôt que mathématique ou économique. Elle varie selon les tranches de revenu retenues, le niveau de richesse. Tout le monde ne se fait pas la même idée de la classe moyenne. Il n'existe pas vraiment de définition unique. Je veux dire, ce n'est pas un concept auquel nous nous arrêtons, décider en quoi consiste exactement la classe moyenne, à quel niveau de revenu elle correspond. La réponse peut varier selon les circonstances. Hélas, je n'ai aucun avis à vous donner sur la définition de la classe moyenne.
    Allez-y, monsieur Liepert.
    Lorsque vous réalisez une modélisation budgétaire, j'imagine que vous aimeriez pouvoir vous fonder sur une durée donnée après laquelle l'adhésion à un nouveau programme aura en quelque sorte été maximisée, pour ainsi dire. Le CELI est un programme relativement récent, sept ou huit ans, dans ces eaux-là. À votre avis, après combien de temps pourriez-vous réellement évaluer si la population connaît le programme et est en mesure d'y maximiser ses cotisations? Quelle durée approximative vous semblerait juste?
    C'est très difficile de définir une durée à ce sujet. Il n'en reste pas moins que pour n'importe quel programme comme le CELI, qui est essentiellement un programme d'épargne, au fur et à mesure que le plafond d'épargne augmente, les personnes qui ont le revenu le plus élevé, les plus riches, en profitent davantage. C'est un fait. Il est beaucoup plus difficile pour quelqu'un qui gagne 50 000 $ de trouver tous les ans 10 000 $ à épargner que pour quelqu'un qui gagne 200 000 $ par année. Alors oui, lorsqu'ils ouvrent un CELI, les gens y transfèrent leurs actifs, ce qu'ils ont déjà épargné, de manière à profiter de la défiscalisation des intérêts, mais, au fil du temps, cela devient de plus en plus difficile pour eux, et les avantages profitent seulement aux personnes qui touchent les revenus les plus élevés. Cependant, je ne peux malheureusement pas donner de durée précise après laquelle ce constat pourra être fait.
    Toujours en ce qui concerne la modélisation, j'aimerais connaître votre avis sur un point. L'une des critiques ou l'une des raisons invoquées pour annuler la décision de hausser le plafond de cotisation, c'est que les gens ne cotisent pas le maximum. Diriez-vous, compte tenu de la courte durée d'existence du programme, qu'il n'a pas fait l'objet d'une analyse juste?
    Selon ce que nous avons constaté, après 2013, 18 % des gens qui détenaient un CELI avaient maximisé leur cotisation. Nous n'avons cependant pas d'information relativement aux années subséquentes, alors c'est dur à dire. Comme je l'ai indiqué, en principe, au fil du temps, le pourcentage risque vraisemblablement de chuter, car de moins en moins de gens auront la capacité et les ressources financières nécessaires pour maximiser leur cotisation au CELI.
(1350)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Champagne, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Askari, permettez-moi de vous demander de rafraîchir ma mémoire. Je pense que seulement 6,7 % de Canadiens ont contribué pour le maximum cumulatif de 41 000 $ dans un CELI.
    Pourriez-vous me confirmer que c'est le cas?

[Traduction]

    Non, je crois que cette statistique, quoique techniquement juste, est fondée sur l'ensemble des Canadiens, y compris ceux qui n'ont jamais ouvert de CELI. Lorsque l'on s'en tient aux Canadiens qui ont ouvert un CELI, la statistique, selon l'Agence du revenu du Canada, était plus proche de 18 % en date de 2013.
    Cependant, les 6,7 % demeurent un point de référence valide. Vous n'êtes simplement pas d'accord avec la prémisse, mais il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une statistique valide, de notre point de vue. Vous pourriez alors convenir que nous avons décidé de faire les choses autrement afin d'englober davantage de gens.

[Français]

     Monsieur Fréchette, les mesures fiscales qu'on a annoncées concernant la réduction de l'impôt pour la classe moyenne touchent, si je ne m'abuse, environ neuf millions de Canadiens. Vos chiffres indiquent-ils le nombre de Canadiens qui profiteront de l'impact positif de la réduction d'impôt pour la classe moyenne?
    Nous n'avons pas fait ce calcul.
     Nous n'avons certainement pas déterminé non plus, comme nous l'avons mentionné auparavant, ce qu'était la classe moyenne. Comme nous ne définissons pas ce qu'est la classe moyenne dans nos rapports, nous n'avons pas établi ce chiffre.
    En ce qui a trait à l'impact macroéconomique des réductions d'impôt au Canada, avez-vous calculé l'impact que cette mesure peut avoir sur l'économie canadienne en stimulant la croissance économique au pays? Avez-vous fait des analyses à cet égard?
     Monsieur Matier, vous pourriez peut-être me parler de l'impact macroéconomique d'une mesure comme celle-ci au pays.
    Notre rapport prend en considération toutes les mesures fiscales qui ont été annoncées dans le budget. Ce que vous voyez dans notre rapport aujourd'hui est une mesure agrégée. Cela comprend cette partie de réduction du taux d'imposition, mais pas uniquement ce montant.

[Traduction]

    Je crois que vous avez dit qu'on estime que, au bout du compte, les mesures auront des incidences sensibles sur l'économie du Canada. Puisque vous avez commenté ce point — et je pense qu'il s'agissait d'une citation tirée de votre rapport —, pourriez-vous nous en dire davantage sur les mesures auxquelles vous faisiez allusion et qui auraient des incidences positives et sensibles sur l'économie canadienne?

[Français]

    Toutes les mesures qui ont été annoncées dans le budget sont incluses dans ce que vous venez de lire en me citant. D'ailleurs, au tableau 3 du sommaire de notre rapport, on retrouve toutes les mesures à cet égard. Elles y sont indiquées.
    En somme, toutes les mesures du budget auront donc un impact positif sur l'économie canadienne?
    Les sept mesures, ou les grands chapitres qui ont été annoncés pour les deux ans dont nous faisons état, sont exactement celles qui ont été prises en considération dans notre rapport.
    C'est parfait.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Champagne.
    J'ai une dernière question, monsieur Fréchette. Il m'apparaît indiscutable que la plupart d'entre nous estiment que le Bureau du directeur parlementaire du budget se doit d'être un allié pour les Canadiens et, à vrai dire, pour le ministère des Finances afin d'améliorer la transparence et la visibilité des chiffres au profit des Canadiens, et non un adversaire.
    Dans un rapport en date, je crois, du 6 avril dernier, vous exprimez diverses réserves relativement à la présentation du plan budgétaire du gouvernement fédéral. Y a-t-il eu des interventions à leur sujet? Dans la négative, lesquelles persistent, à vos yeux? Je sais qu'il existe toujours des divergences d'opinions à ce sujet.
    Le ministère des Finances est-il intervenu comme il se doit relativement aux réserves que vous avez exprimées?
(1355)
    Oui. Comme je l'ai dit un peu plus tôt, le problème, c'est que nous avons reçu les données sans pouvoir ensuite les utiliser. Après avoir communiqué avec le ministère, nous avons pu utiliser les données et les fournir au Parlement. Par conséquent, le problème est maintenant réglé.
    Nous maintenons nos liens et nous poursuivons nos discussions avec les ministères. Croyez-moi, nous entretenons d'excellentes relations avec certains ministères. Je pourrais en nommer quelques-uns. Ils se montrent très ouverts et transparents. Nous recevons les données que nous réclamons.
    Je profite de l'occasion pour parler de l'aspect confidentialité. Certains s'en sont pris au Bureau du directeur parlementaire du budget parce que nous refusions de communiquer des données confidentielles. C'est la vérité. C'est dans la loi, la Loi sur le Parlement du Canada, à l'article 79.4. Rien de ce que nous recevons à titre confidentiel des ministères ne peut être communiqué et rien ne l'est. Cependant, nous pouvons utiliser le tout pour faciliter nos calculs, et c'est ce que nous faisons.
    Merci de cette réponse.
    Je rappelle aux membres du comité que les partis qui entendent proposer des amendements au projet de loi C-2 doivent les soumettre à la greffière avant 16 heures aujourd'hui.
    Sur ce, je remercie le directeur parlementaire du budget et tous les témoins de leur présence et de l'excellent travail qu'ils accomplissent au nom des Canadiens.
    Merci beaucoup à tous.
    La séance est levée.
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