:
Je déclare la séance ouverte.
Aujourd'hui, conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous étudions l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, ce que nous faisons au moins une fois par année.
Nous recevons M. Mark Machin, président et chef de la direction, et M. Michel Leduc, directeur général principal, de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.
Je crois, Mark, que vous avez une déclaration liminaire. Allez-y, vous avez la parole.
Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d'être ici. J'espère que nous n'avons pas trop bouleversé votre horaire en vous demandant de témoigner un peu plus tôt.
Merci, et bonjour monsieur le président et membres du Comité.
[Français]
Je vous remercie de m'offrir la chance de discuter avec vous aujourd'hui et de répondre à vos questions.
J'ai l'honneur de représenter l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada. La façon dont nous travaillons pour nous assurer que le RPC demeure viable pour les générations futures est un sujet important pour ce comité.
[Traduction]
Je suis accompagné de Michel Leduc, directeur général principal et chef mondial, Affaires publiques et communications, pour l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.
Nous sommes heureux d’avoir l’occasion de discuter de l’OIRPC et de la façon dont nous investissons les fonds qui nous ont été confiés.
Nous croyons fermement en la valeur de la transparence et du dialogue ouvert, que nous considérons comme une facette de l’obligation publique de rendre des comptes, en particulier par l’entremise du Parlement. Je sais que vous avez un horaire très chargé, aussi ne suis-je pas certain que vous ayez eu la chance de lire notre mémoire et notre rapport annuel. Néanmoins, je serai heureux de répondre aux questions du Comité. Mes commentaires d’ouverture seront donc brefs.
J’aimerais tout d’abord partager avec vous quelques observations au sujet du climat d’investissement mondial et des tendances qui influent sur la façon dont nous exerçons nos activités. Je vous ferai ensuite part de nos résultats financiers récents et de certains aspects stratégiques que nous considérons pour les années à venir, y compris les préparatifs en vue de recevoir, de gérer et d’investir les actifs du RPC supplémentaire.
Commençons par le climat d’investissement. La concurrence en matière de placement demeure forte. En raison d’une surabondance du capital, il y a essentiellement plus de fonds à la recherche de possibilités de placement moins nombreuses. On le constate à l’échelle de diverses catégories d’actifs: la portée du marché boursier haussier, la demande croissante pour des actifs privés, les faibles taux de rendement des placements axés sur le revenu et les évaluations élevées des infrastructures ne sont que quelques exemples.
Dans ce type d’environnement, les avantages de l’OIRPC sont encore plus importants. Pensons notamment à notre horizon de placement particulièrement étendu, à notre taille, à la certitude ou à la prévisibilité de nos actifs, à notre effectif, à nos partenaires experts, à notre approche unique pour la gestion de notre portefeuille et, de plus en plus, à notre image de marque et à notre réputation sur l’un des marchés de placement où la concurrence est la plus féroce au monde.
Il est tout aussi important que nous demeurions patients et rigoureux. Nous devons rester hautement sélectifs dans le choix de nos placements. Les entreprises dans lesquelles nous investissons doivent être en mesure de maintenir leur valeur d'un cycle à l'autre et d’inscrire une croissance à long terme.
Elles doivent aussi pouvoir résister aux éléments perturbateurs, voire en bénéficier. Il ne faut pas en conclure que nous nous précipitons pour investir dans les dernières innovations. Nous évaluons plutôt soigneusement comment ces éléments perturbateurs risquent d’influer sur les actifs qui nous intéressent aujourd’hui pendant les décennies à venir. Voici un exemple: quelles seront les conséquences des véhicules autonomes pour les autoroutes à péage que nous détenons? Pour les terrains de stationnement? Voilà le genre de questions que nous continuons d’examiner.
Lorsque nous considérons diverses tendances, comme la concurrence accrue pour les actifs et de nouvelles forces perturbatrices, nous voyons au-delà de l’horizon immédiat. Nous ne tentons pas de surpasser le marché tous les ans. Nous voulons plutôt générer une plus-value au fil des décennies. Notre stratégie vise à produire des rendements stables, des rendements absolus à long terme, indépendamment des fluctuations ou des corrections importantes.
Je rappelle constamment à nos parties prenantes que nous nous attendons pleinement à ce que la caisse enregistre un recul d’au moins 12,5 % une année sur 10. Nous planifions en conséquence. Nous concevons notre stratégie et nos actions afin d’enregistrer un excellent rendement sur plusieurs générations de cotisants et de bénéficiaires.
Dans ce contexte, notre rendement, déduction faite de tous les coûts engagés, s’est établi à 11,6 % pour l’exercice 2018. Ce rendement est attribuable à la vigueur des marchés boursiers pendant les neuf premiers mois de l’exercice. Lorsque la volatilité du marché est revenue au quatrième trimestre, la diversification du portefeuille a été gage de résilience.
Le rendement du portefeuille de placement s’est élevé à 36,7 milliards de dollars, déduction faite de tous nos coûts. Une fois combinée aux entrées nettes provenant des cotisations du RPC, soit 2,7 milliards de dollars, la caisse du RPC a atteint 356,1 milliards de dollars au 31 mars. La dernière fois que je me suis adressé à vous, il y a environ 18 mois, la caisse s’établissait à 300 milliards de dollars. Le rendement sur 10 ans du portefeuille de placement s’est chiffré à 8 %, tandis que le rendement sur 5 ans s’est élevé à 12,1 %. Si l’on tient compte de l’inflation, ces chiffres étaient de 6,2 % et de 10,4 % respectivement, soit bien au-dessus du taux de rendement moyen de 3,9 % que suppose l’actuaire en chef dans son évaluation de la viabilité de la caisse pour la période de projection de 75 ans visée par son rapport.
Avant de conclure, j’aimerais aborder brièvement certains aspects stratégiques et opérationnels pour les exercices à venir.
Comme vous le savez, en janvier 2019, l’OIRPC recevra et investira pour la première fois les flux de trésorerie liés au RPC bonifié que les gouvernements fédéral et provinciaux ont établi conjointement. Nos préparatifs en vue de gérer les cotisations supplémentaires au RPC sont bien engagés et fermement sur la bonne voie; nos équipes travaillent avec diligence à la réception de ces nouveaux fonds. Pour l’avenir, nous structurerons la caisse de manière à respecter les différences de capitalisation entre le RPC de base et le RPC supplémentaire, tout en veillant à utiliser pleinement et avec efficience notre plateforme actuelle et nos ressources de placement mondiales.
À l’écoute de mes remarques, vous aurez compris que, compte tenu de notre horizon de placement, nous sommes continuellement tournés vers l’avenir. Parce que nous évaluons dans cette optique les diverses tendances dont je vous ai fait part, nous savons que nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers. L’industrie de la gestion des actifs évolue, et nous devons constamment nous adapter. Notre stratégie de placement s’assouplira, ce qui nous permettra de saisir les occasions et de demeurer résilients pour faire face à diverses forces dont les résultats demeurent incertains, qu’il s’agisse de l’évolution de la croissance mondiale, des perturbations technologiques, des enjeux géopolitiques ou des changements climatiques.
Pour établir notre compétitivité à l’échelle internationale, nous investirons de manière responsable dans de nouvelles capacités technologiques et d’analyse des données. Nous pourrons accroître notre expertise et nos compétences en matière de placement. Nous nous concentrerons sur l’amélioration de l'efficience opérationnelle et sur l’accroissement de la collaboration et du partage des connaissances entre nos diverses équipes de placement et fonctions d’entreprise.
Notre culture se démarquera encore plus sous le signe de l’innovation et de l’ambition, tout en étant résolument liée à notre mandat fondamental d’utilité publique.
Voilà qui conclut mes remarques officielles. Au nom de mes collègues, je remercie encore une fois le Comité permanent des finances de nous avoir invités aujourd’hui. Je serai heureux de prendre part à la discussion, et c’est avec plaisir que je répondrai à toutes vos questions.
Merci.
:
C'est une excellente question.
Comme vous l'avez dit, notre conseil d'administration compte maintenant 50 % de femmes, et nous avons une politique qui prévoit que l'écart ne devrait pas dépasser 60:40. Notre équipe de direction actuelle compte un peu plus de 30 % de femmes, et, à l'échelle de l'organisation, nous avons environ 44 % de femmes.
Pour ce qui est des autres cibles en matière de diversité, nous mettons l'accent sur cet aspect à l'échelon du conseil d'administration et à celui de la direction. Nous avons fixé des cibles et nous sommes une méritocratie. Nous devons être une méritocratie afin d'être concurrentiels à l'échelle internationale, mais nous croyons qu'il est utile d'avoir certaines cibles dans l'avenir, alors nous visons particulièrement à accroître la représentation des minorités visibles à l'échelon des cadres supérieurs de l'organisation.
Aujourd'hui, au Canada, les minorités visibles comptent pour environ 41 % de nos employés, mais ce pourcentage est plus faible à l'échelon des cadres supérieurs, et nous voulons augmenter ce pourcentage de manière importante. C'est la même chose avec la communauté LGBT: nous visons également à augmenter sa représentation. Nous avons aussi fixé une cible pour augmenter la représentation des femmes à l'échelon des cadres supérieurs.
:
Je vous remercie de votre question.
[Traduction]
Si j'ai bien compris, votre question compte deux volets. Il y a d'abord les domaines que nous examinons au chapitre des facteurs ESG. Il y en a quatre, et nous en ajoutons un cinquième cette année, alors vous avez raison de parler des changements climatiques, sur lesquels nous nous concentrons depuis environ 10 ans. Il y a également l'eau et la conservation de l'eau, les droits de la personne et la rémunération des cadres. Cette année, nous ajoutons également l'efficacité du conseil d'administration.
La deuxième partie de votre question concernait la fiscalité et si nous la respections partout dans le monde.
Nous respectons toutes les exigences fiscales dans les pays où nous investissons. Nous sommes déterminés à agir ainsi. Évidemment, au Canada, nous avons un statut d'exonération fiscale, et c'est le cas dans plusieurs autres pays dans le monde lorsque des ententes en matière d'exonération fiscale ont été conclues ou que le pays applique une exemption précise pour des organisations comme l'OIRPC. Ces ententes visent souvent les pensions gouvernementales dans nombre de pays partout dans le monde et elles protègent les pensions contre une double imposition.
Nous avons envers les bénéficiaires et les cotisants l'obligation fiduciaire de constituer un portefeuille diversifié qui engendre des coûts de transaction minimaux, y compris l'impôt sur le rendement des placements. À des fins de politique publique judicieuse, le revenu de placement gagné au nom des bénéficiaires par des caisses de retraite comme l'OIRPC est exonéré de l'impôt canadien pour s'assurer que les bénéficiaires du RPC ne soient pas imposés en double, ce qui se produirait si le revenu de placement était imposé lorsqu'il est gagné et une autre fois à titre de revenu dans les mains des bénéficiaires.
:
Monsieur Dusseault, permettez-moi d'intervenir.
[Traduction]
Pour ce qui est de certaines transactions que vous avez mentionnées, nous serions plus qu'heureux, par l'intermédiaire du bureau du greffier et du bureau du président, de vous transmettre plus de détails sur ces investissements.
Pour répondre de manière précise à votre question concernant le fait de représenter les Canadiens, il ne faut pas oublier que, comme nous sommes en concurrence partout dans le monde à l'égard de ces actifs, dans de nombreux cas — et nous vous fournirons les détails —, lorsque nous réalisons ces transactions, nombre des structures sont déjà en place. Si l'OIRPC n'utilisait pas ces structures, cela pourrait entraîner un coût du capital beaucoup plus élevé pour l'organisation, et, par conséquent, nous nuirions à l'intérêt supérieur du fonds du RPC.
Dans nombre de cas, lorsque nous investissons et que nous sommes en concurrence avec beaucoup d'autres investisseurs institutionnels, nous voulons nous assurer d'avoir exactement le même coût du capital que celui d'autres investisseurs; autrement, à mesure que nous investissons des capitaux à l'échelle internationale, nous agirions en partie avec les pieds et poings liés. Je crois que la plupart des Canadiens s'attendent à ce que nous structurions les choses de manière à ne nous mettre dans l'embarras et à ce que nous suivions minimalement toutes les lois et les règles.
:
Merci, monsieur le président.
Merci à vous deux d'être ici encore une fois.
Je veux revenir sur le financement durable. Évidemment, le Canada a récemment annoncé qu'il allait de l'avant avec le Groupe d'experts en financement durable. J'ai aussi remarqué que l'Ontario avait adhéré à la divulgation des investissements.
Pour ce qui est du RPC et de l'OIRPC précisément, je suis curieuse de savoir ce que vous faites à cet égard.
Je faisais partie du Waddeson Club de la Chatham House, et il se concentrait vraiment sur le financement durable. L'Europe a des années-lumières d'avance sur nous dans ce domaine, et ses offices d'investissement font de grands pas pour s'assurer que les investisseurs et, dans le cas présent, les Canadiens savent que leurs fonds sont investis dans du financement durable et qu'ils sont divulgués de cette manière.
Pourriez-vous nous dire ce que vous faites précisément pour aller de l'avant dans ce domaine?
:
Certainement. C'est une excellente question.
Je vais aborder certains aspects, et M. Leduc voudra peut-être ajouter quelque chose.
Pour ce qui est de ce que nous appelons l'« investissement durable », j'ai mentionné que nous avions quatre domaines, maintenant cinq, sur lesquels nous centrons nos efforts. Nous nous concentrons notamment sur les changements climatiques depuis 10 ans.
Plus récemment, notre chef de l'investissement durable était membre du groupe de travail du CSF sur les divulgations financières liées aux changements climatiques. L'été passé, on a terminé ce travail, et le gouverneur Carney l'a annoncé au G20. Nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre des recommandations du groupe de travail d'ici l'exercice 2021. Une des raisons, c'est que nous avons besoin d'une divulgation suffisante de la part de toutes les entreprises de notre portefeuille afin de mieux comprendre ce que nous avons et les risques que nous courons. Il faut que de plus en plus de ces entreprises adoptent ces mécanismes de divulgation.
En attendant, nous sommes déterminés à renforcer notre compréhension des risques que nous prenons en matière de changements climatiques, d'abord de manière ascendante, afin de concevoir une trousse d'outils. Nous en parlons en détail dans le rapport annuel. Nous concevons une trousse d'outils pour chaque équipe d'investissement afin qu'elle puisse comprendre le risque qu'elle prend lorsqu'elle réalise des investissements et agir en conséquence.
Nous effectuons également une évaluation descendante de tous les risques que nous prenons. Nous élaborons aussi un outil servant à mesurer l'empreinte carbone. À l'heure actuelle, il n'existe aucun outil parfait à cet égard dans le monde, mais nous travaillons en fonction des meilleures pratiques sur la planète afin d'élaborer notre propre outil exclusif. Nous sommes à concevoir notre propre modèle concernant la transition vers des énergies propres et la vitesse de cette transition, ce qui est essentiel pour comprendre les risques auxquels nous faisons face, et, au-delà de cela, et je soulignerais en outre que nous avons maintenant une équipe spécialement chargée d'investir dans les énergies renouvelables. Nous avons réalisé un certain nombre d'investissements dans les énergies renouvelables ici, au Canada, en Europe, en Inde et au Brésil l'an passé et nous continuerons à faire croître ces investissements. Nous nous attendons à ce que le portefeuille de 3 milliards de dollars que nous avons mentionné augmente.
Nous avons annoncé aujourd'hui que nous émettons une obligation verte. Je crois que nous sommes la première caisse de retraite au monde à le faire, et nous allons l'utiliser pour financer partiellement ces investissements.