La première sous-gouverneure Wilkins et moi-même nous réjouissons, une fois de plus, de vous rencontrer pour parler du Rapport sur la politique monétaire de la Banque, rapport que nous avons publié la semaine dernière.
[Français]
Lors de notre dernier témoignage devant ce comité, il y a six mois, nous estimions que les choses évoluaient de façon très positive. L'économie canadienne allait très bien et, en gros, elle était de retour à bon port, c'est-à-dire que l'économie tournait près des limites de sa capacité et que l'inflation était près de notre cible. En même temps, nous suivions les risques liés aux mesures commerciales protectionnistes et aux niveaux élevés d'endettement des ménages.
Malheureusement, par la suite, il s'est produit deux événements négatifs. Ces événements ont obligé l'économie à prendre un détour, ce qui retarde son retour à bon port. Notre prévision part du principe que leur incidence sera temporaire. Une fois que l'économie se sera ajustée, la croissance va se redresser. Par conséquent, dans notre rapport, nous avons abaissé notre prévision de croissance pour cette année; nous estimons qu'elle sera de 1,2 % en 2019 et d'environ 2 % en 2020 et en 2021.
[Traduction]
Permettez-moi quelques précisions. Premièrement, l'économie mondiale a ralenti à la fin de l'année dernière. Plus exactement, si nous nous attendions à un certain ralentissement dans la foulée de l'effacement des mesures de stimulation adoptées par les États-Unis, ce ralentissement s'est avéré plus profond que l'annonçaient la plupart des prévisions, et il a persisté en 2019.
La guerre commerciale menée par les États-Unis est l'une des principales causes de ce ralentissement mondial. Elle a pour effet de retarder les décisions d'investissement des entreprises dans de nombreux pays. L'incertitude entourant les futures politiques commerciales a augmenté. Ici, au Canada, les doutes soulevés par la ratification de l'ACEUM se sont accrus, avec le risque que nos perspectives d'investissement soient plombées.
Il est certain qu'une escalade des conflits commerciaux porterait un coup à l'économie mondiale, mais celle-ci pourrait rebondir si l'on parvenait à progresser dans la résolution de ces conflits.
Il faut dire que les entreprises et les économies finiront par s'adapter au niveau d'incertitude accru entourant les échanges commerciaux, grâce à un rajustement de leurs plans d'investissement. Une fois les ajustements nécessaires apportés, la croissance économique pourra reprendre.
L'autre évolution importante constatée depuis octobre a été une nouvelle baisse marquée des cours du pétrole à la fin de 2018, qui a placé le secteur pétrolier canadien dans une situation très difficile. Récemment, les cours du pétrole ont repris du mieux, notamment pour ce qui est des prix accordés au pétrole de l'Ouest, mais les contraintes que les problèmes de transport exercent sur la croissance future demeurent un frein important et une source d'incertitudes. Tout cela a entraîné une nouvelle révision à la baisse des intentions d'investissement dans ce secteur.
Cette dégradation de la situation est sans doute en partie davantage structurelle que cyclique, car elle est le résultat des ajustements continus effectués par le secteur en fonction des cours mondiaux du pétrole, lesquels oscillent entre 50 $ et 60 $ le baril et n'ont plus rien à voir avec les cours nettement plus élevés d'il y a cinq ans. Ces ajustements se reflètent aussi dans les salaires et les autres coûts, de même que dans l'évolution du marché immobilier en Alberta.
Il est important de souligner que, si la baisse des investissements dans le secteur pétrolier entraîne une décroissance proportionnelle de l'économie nationale, une fois que les investissements atteindront le creux de la vague, le Canada renouera avec la croissance, même sans une relance des investissements dans le secteur pétrolier, parce que d'autres secteurs de croissance prendront le relais. C'est exactement la même dynamique que celle à laquelle nous avons assisté dans la foulée du choc pétrolier de 2014-2015.
En marge de la situation du commerce mondial et des cours du pétrole, nous avons continué de nous intéresser à la manière dont le marché canadien du logement s'ajuste à tout un ensemble de facteurs, comme les politiques provinciales et municipales en matière de logement, les nouvelles lignes directrices sur les prêts hypothécaires et les hausses antérieures de taux d'intérêt. La manière dont le marché de l'immobilier s'ajuste à ces facteurs est particulièrement importante compte tenu de l'endettement élevé des ménages.
Notre analyse a été compliquée par l'activité constatée sur certains marchés jusque-là linéaires, en particulier dans les régions du Grand Toronto et de Vancouver. Selon les études réalisées par le personnel de la Banque, il y a lieu d'établir une étroite corrélation entre les attentes des consommateurs et la forte hausse des prix de l'immobilier à la revente — au-dessus des niveaux fondamentaux en Ontario et en Colombie-Britannique —, hausse qui a été suivie d'un effondrement. Ce constat donne à penser que les mesures provinciales et municipales dans le domaine du logement ont eu un impact beaucoup plus fort sur l'activité de ce secteur que les changements apportés aux lignes directrices sur les prêts hypothécaires et les hausses antérieures des taux d'intérêt.
[Français]
Cette analyse est renforcée par le fait que l'activité est solide sur de nombreux autres marchés au pays. Ces marchés ont les mêmes règles hypothécaires et les mêmes taux d'intérêt. C'est ce qu'on voit dans une économie en croissance où la population augmente et le marché de l'emploi est vigoureux.
Par conséquent, à mesure que la situation se stabilise à Toronto et à Vancouver, le secteur canadien du logement devrait, globalement, croître de nouveau plus tard cette année.
[Traduction]
Enfin, je tiens à souligner que le gouvernement fédéral et plusieurs provinces ont fait des annonces à saveur budgétaire avant le dépôt de leurs budgets respectifs. Notre analyse indique que l'incidence combinée des plans de dépenses rajustés, annoncés jusqu'ici, pourrait nécessiter une révision à la baisse de nos perspectives de croissance d'environ 0,2 point de pourcentage en 2020.
En somme, l'économie canadienne est actuellement freinée par des vents contraires, mais il y a de bonnes raisons de croire qu'elle va reprendre du mieux au cours du deuxième semestre de cette année. Cela étant posé, le conseil d'administration de la Banque juge qu'un taux directeur expansionniste demeure justifié.
Nous continuerons d'évaluer le degré approprié de la détente monétaire à mesure que les nouvelles données seront disponibles. En particulier, nous suivons l'évolution des dépenses des ménages, des marchés pétroliers et des politiques commerciales mondiales afin de jauger la mesure dans laquelle les facteurs qui pèsent sur la croissance et les perspectives d'inflation se dissipent.
Au cas où vous l'ignoreriez, je dois mentionner que, depuis notre dernière rencontre, nous avons lancé le nouveau billet de 10 $ mettant en vedette Viola Desmond et le Musée canadien pour les droits de la personne à Winnipeg. Il a été désigné meilleur nouveau billet de banque au monde en 2018.
Sur ce, la première sous-gouverneure Wilkins et moi serons heureux de répondre à vos questions.
:
Comme vous l'avez dit, c'est une question qui revient constamment. Depuis l'année passée, on voit des développements encourageants.
Premièrement, il est évident que les nouvelles règles sur les hypothèques ont changé les choses de façon positive.
Deuxièmement, l'endettement a longtemps été à la hausse en raison de la hausse des prix des maisons, particulièrement à Vancouver et à Toronto. C'est ce qui contribuait le plus fortement à l'endettement. Or cette hausse s'est beaucoup atténuée récemment.
Troisièmement, le taux de croissance de la dette, en général, est moindre que le taux de croissance du revenu nominal.
J'espère que le sommet est déjà passé et que nous entamons une période d'ajustement pour les bilans des ménages. Cette période peut s'étendre sur plusieurs années, peut-être même de 10 à 20 ans. C'est un processus très graduel, naturellement. Cela dit, la situation est beaucoup plus favorable qu'il y a deux ans, c'est certain.
:
C'est à vous de prendre les décisions difficiles concernant la politique.
Dans les faits, il est un peu tôt pour évaluer les effets économiques, parce que tous les paramètres ne sont pas bien établis pour le moment. C'est ce que nous avons souligné dans notre rapport sur la politique monétaire. Nous en saurons davantage l'automne prochain.
Nous allons prendre en compte certains facteurs. Nous savons déjà que certains paramètres encadrant le programme pourront, en partie, nous indiquer à quel point l'effet sera répandu.
Par exemple, des limites ont été imposées quant au ratio entre la dette hypothécaire et le revenu. Il y a également des limites au montant du prêt qu'on peut obtenir. En outre, s'il ne s'agit pas d'une maison neuve, il est question de 5 %; dans le cas d'une maison neuve, c'est 10 %. Tous ces paramètres nous indiquent que l'accès à l'hypothèque sera probablement élargi, ce qui correspond à l'objectif du programme. L'automne prochain, lorsque nous aurons tous les paramètres, nous pourrons déterminer plus précisément à quel point l'objectif est atteint.
:
Oui, il est normal que les leaders du gouvernement fassent des prédictions optimistes et rejettent la faute sur des facteurs extérieurs dans des contrées lointaines lorsqu'elles ne se réalisent pas.
J'ai sous les yeux les observations que vous avez faites dans la mise à jour de la politique monétaire, monsieur le gouverneur, et vous avez attribué une partie de la dégradation à une question structurelle, à savoir les prix mondiaux du pétrole. Vous avez comparé les prix du pétrole à ce qu'ils étaient il y a cinq ans. Bien sûr, si vous comparez n'importe quel chiffre à un sommet, vous allez noter une baisse, mais il s'avère que les prix du pétrole ne sont pas bas à l'heure actuelle. Les prix du pétrole sont en fait très élevés par rapport aux normes historiques. Si vous les convertissez en dollars canadiens, ils se situent à un niveau à peu près moyen depuis environ 35 à 40 ans. À partir de 1980, nous avons connu une expansion incroyable du secteur pétrolier canadien dans le contexte de ces prix moyens, ajustés en fonction de l'inflation.
Ce que vous n'avez pas dit dans ces observations — ce qui m'a étonné, comme bien d'autres, j'en suis sûr —, c'est que cela n'a rien à voir avec les prix mondiaux du pétrole, qui sont élevés. Il s'agit plutôt de l'accès aux marchés. Je sais que le gouvernement aurait mal paru sur le plan politique si vous aviez dit que c'était l'accès aux marchés, et non pas les prix mondiaux du pétrole, qui était le problème. Étant donné que votre travail n'est pas d'aider le gouvernement, mais d'évaluer les faits, pourquoi avez-vous attribué cette dégradation aux prix mondiaux du pétrole plutôt qu'à l'accès aux marchés, qui est le vrai problème, ce dont tout le monde convient?
:
Je vous remercie encore une fois d'être parmi nous.
J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet. L'investissement direct étranger a atteint 51,3 milliards de dollars l'an dernier, soit un sommet en trois ans et le montant total annuel le plus élevé depuis 2015. Les entrées d'environ 16,5 milliards de dollars au cours des trois derniers mois sont les deuxièmes en importance depuis 2015.
L'an dernier, la plus grande partie de l'investissement direct étranger est allée aux secteurs autres que celui de l'énergie. Comme vous l'avez dit plus tôt au sujet du plafonnement ou de la stabilisation des investissements, particulièrement dans le secteur pétrolier, il semble y avoir un intérêt important pour les investissements à l'extérieur de ce secteur. Selon Statistique Canada, les entreprises canadiennes prévoient augmenter leurs investissements en immobilisations de 2,5 % en 2019.
Pouvez-vous nous expliquer un peu ce que cela signifie pour les secteurs en croissance de l'économie, comme les sources d'énergie de remplacement et l'économie verte, lorsqu'il est question de véhicules électriques et des possibilités que nous avons dans l'économie à faibles émissions de carbone à laquelle le Canada participe activement?
:
Les données que vous avez mentionnées sont exactes. En dépit de nombreuses préoccupations au sujet de la compétitivité du Canada et de sa capacité d'attirer des investissements, en 2018, il y a eu une augmentation d'environ 5 % des entrées d'IED, ce qui est très satisfaisant. Il est vrai que cette augmentation n'a pas touché le secteur de l'énergie, mais bien sûr, je pourrais dire la même chose au sujet des investissements au pays, qui ont aussi diminué dans ce secteur.
Les investissements que nous voyons se font davantage dans ce que nous appelons les secteurs de croissance. Cela ne veut pas dire que le secteur de l'énergie n'attirera pas d'investissements, parce qu'il le fait encore et continuera de le faire, mais ils sont inférieurs à ce qu'ils étaient auparavant. La croissance de ce secteur est peut-être limitée par des contraintes liées au transport, mais la marge de capacités inutilisées donne une image de croissance plus organique pour le secteur pétrolier, jusqu'à ce qu'il y ait un pipeline, par exemple, auquel cas nous pourrions voir une hausse marquée des activités.
Dans d'autres secteurs, je dirais que les investissements se concentrent dans la propriété intellectuelle ou les immobilisations à caractère plus incorporel. Si nous regardons dans l'ensemble, le secteur d'exportation le plus solide à l'heure actuelle, en matière de croissance, est celui des services des TI. Le marché du travail le plus solide et les plus fortes hausses de l'emploi sont dans les services des TI. Et ce n'est qu'un début. L'économie des TI semble connaître une croissance d'environ 7 ou 8 % par année, ce qui attire beaucoup d'investissements. En fait, une grande partie de l'investissement n'est même pas prise en compte. Si vous achetez simplement des services en nuage, vous n'avez pas à investir.
Il y a donc de grandes transformations qui se produisent et qui sont difficiles à interpréter, mais nous pensons que pour les investissements globalement, d'après les 100 entreprises que nous avons sondées dans le cadre de notre Enquête sur les perspectives des entreprises, tout le monde est prêt à investir. Nous espérons donc que les données pour le premier trimestre le montreront.
Lorsque je suis devenu gouverneur, je me suis engagé à visiter toutes les provinces et tous les territoires du Canada. Je peux maintenant dire que c'est fait. Ce fut une expérience formidable de parler à de vraies personnes, qui prennent de vraies décisions d'affaires quotidiennement, dans des contextes totalement différents.
Je pense que l'aspect positif, pour moi, c'est que cela colore les chiffres. L'économie, c'est surtout un tas de chiffres. Il est très utile et il a toujours été précieux pour nous de pouvoir tester des prévisions ou des jugements dans le cadre de vraies conversations. De nos jours, nous accordons beaucoup plus d'importance à nos enquêtes sur les perspectives des entreprises et aux tables rondes interactives que nous tenons lorsque nous visitons une région. Mme Wilkins et moi faisons cela chaque fois que nous sommes là-bas. Nous organisons un dîner ou un lunch ou quelque chose du genre avec, disons, 12 ou 15 gens d'affaires. Ces expériences nous ont beaucoup apporté.
Il y a deux côtés à la médaille. Nous avons l'occasion d'expliquer aux gens des choses dont ils n'entendent peut-être pas parler tous les jours, et nous avons ces discussions franches sur la façon dont nous pensons que l'économie fonctionne. Ils nous disent quand ils ne sont pas d'accord. C'est le genre de dialogue que nous avons.
:
Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je vous remercie de l'invitation à comparaître devant vous pour discuter de nos perspectives économiques et financières d'avril 2019, qui ont été publiées plus tôt aujourd'hui.
Comme vous le savez, le directeur parlementaire du budget fournit aux parlementaires des analyses économiques et financières indépendantes et non partisanes. Comme la Loi sur le Parlement du Canada l'indique, nous fournissons ces analyses afin de rehausser la qualité des débats parlementaires et de renforcer la transparence et la reddition de comptes en matière financière. Conformément au mandat du directeur parlementaire du budget, mon Bureau produit des perspectives économiques et financières indépendantes.
Comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, je suis accompagné aujourd'hui de Jason Jacques et de Chris Matier, qui m'aideront à répondre à vos questions. Ils ont beaucoup de connaissances et beaucoup d'expérience dans les affaires du Bureau.
[Traduction]
L'économie canadienne connaît un ralentissement temporaire. La croissance économique a fortement ralenti au quatrième trimestre de l'an dernier à la suite de la baisse des prix du pétrole canadien. Nous estimons que la croissance du PIB réel est demeurée modérée au premier trimestre, mais nous prévoyons une reprise d'ici la fin de l'année, à mesure que les facteurs temporaires se dissiperont.
À plus long terme, nous prévoyons que l'économie comptera moins sur les dépenses de consommation et l'immobilier et dépendra davantage des investissements et des exportations des entreprises. La croissance du PIB réel devrait passer de 1,6 % en 2019 à 1,9 % en 2020, puis s'établir à environ 1,6 % chaque année jusqu'en 2023.
À notre avis, les risques relatifs à nos perspectives économiques sont généralement équilibrés. En ce qui concerne les risques de ralentissement, nous croyons que le risque le plus important est la baisse de nos exportations occasionnée par la montée du protectionnisme des politiques commerciales mondiales. Pour ce qui est des risques à la hausse, le risque le plus important est l'augmentation des dépenses de consommation alimentée par l'endettement accru des ménages.
Depuis nos perspectives d'octobre 2018, nous estimons que les mesures stratégiques entreprises par le gouvernement coûteront en moyenne près de 10 milliards de dollars par année, de 2018-2019 à 2023-2024. Néanmoins, dans l'ensemble, nos nouvelles perspectives concernant les résultats nets du gouvernement n'ont guère changé depuis notre rapport d'octobre. Ceci reflète les révisions sensiblement égales apportées aux revenus et aux dépenses. Autrement dit, nous avons sous-estimé la marge de manœuvre fiscale dans nos perspectives d'octobre, en bonne partie en raison des revenus d’imposition plus élevés qu’escomptés.
Pour l'exercice 2018-2019, nous prévoyons un déficit budgétaire de 15,7 milliards de dollars, soit 0,7 % de l'économie canadienne. Nous prévoyons que le déficit atteindra 22,3 milliards de dollars en 2020-2021 en raison, en partie, de la perte de recettes découlant de l'instauration de dépenses en capital accélérées. Le déficit budgétaire devrait ensuite diminuer à 11,9 milliards de dollars (0,4 % du PIB) en 2023-2024. Ces prévisions supposent un statu quo en matière de politiques et programmes gouvernementaux.
Nous prévoyons que la dette fédérale diminuera à 30,5 % du PIB en 2020-2021, ce qui est inférieur de presque un point de pourcentage et demi au point de référence officiel de la dette du gouvernement. Nous prévoyons que le ratio de la dette fédérale au PIB diminuera à 28,9 % du PIB en 2023-2024.
Compte tenu des diverses hypothèses comprises dans notre perspective économique, et sans aucune autre mesure stratégique, il est très peu probable que le budget soit équilibré, ou excédentaire, à moyen terme.
Enfin, dans notre rapport d'aujourd'hui, nous soulignons certaines questions clés découlant du budget de 2019, entre autres l'harmonisation des estimations budgétaires, les dépenses de fonctionnement et les mesures non annoncées. Nous pouvons vous fournir plus de détails si vous le souhaitez.
[Français]
J'aimerais également attirer votre attention sur un autre rapport que nous avons publié ce matin, dans lequel nous établissons de façon indépendante le coût de 11 mesures du budget de 2019, afin de préparer le mandat de mon bureau d'estimer le coût des engagements électoraux.
La prochaine élection générale sera la première au Canada où les partis politiques pourront nous demander de préparer des estimations indépendantes des coûts de leurs propositions. Nous nous sommes dotés des ressources nécessaires pour gérer les demandes de façon équitable et sécuritaire, tout en préservant la confidentialité des clients. Nous sommes prêts à saisir cette occasion historique et à fournir les meilleures estimations de coûts possible. Nous encourageons tous les partis politiques à utiliser nos services afin de rehausser la qualité de l'information dont disposent les Canadiens.
Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions sur nos perspectives économiques et financières ou sur toute autre analyse du directeur parlementaire du Budget.
Merci beaucoup.
:
En ce qui concerne l'endettement des ménages, il est clair que l'un des principaux facteurs est le niveau relativement bas des taux d'intérêt, qui, bien sûr, encourage les gens à s'endetter davantage. Un autre facteur important qui contribue aux niveaux élevés d'endettement est le prix relativement élevé des logements. Lorsqu'un ménage se forme, ses membres veulent évidemment vivre quelque part, et ils ont le choix de louer ou d'être propriétaires. Être propriétaire signifie acheter une maison et contracter une dette hypothécaire, et lorsque les prix sont élevés et que les taux d'intérêt sont bas, cela mène à un niveau élevé d'endettement.
Ce n'est pas un problème en soi, mais c'est une préoccupation pour nous, les économistes, lorsque nous voyons que les ménages ont des niveaux d'endettement élevés. Il est évident que ce n'est pas viable dans un contexte de hausse des taux d'intérêt. Cela ne peut qu'entraîner des déséquilibres dans l'économie.
Quant à savoir si c'est une bonne chose de limiter la croissance du crédit et d'avoir des règles hypothécaires plus strictes, la question est très délicate. Il est évident qu'il faut faire quelque chose. Toutefois, les prix élevés des logements en limiteront l'accès pour certains.
De toute évidence, il faut faire quelque chose pour réduire les niveaux élevés d'endettement, mais cela a malheureusement pour effet d'empêcher certaines personnes d'accéder à la propriété, surtout dans les marchés de Vancouver et de Toronto, où les prix sont élevés, et maintenant, de plus en plus, à Montréal.
:
Nous avons examiné les trois principaux régimes — celui qui était en place jusqu'au 1
er avril 2006, celui qui existait entre 2006 et la fin mars de cette année, et celui qui est en place depuis le 1
er avril 2019.
Vous devrez me pardonner, car j'ai oublié les noms de chacun des régimes. Comme je l'ai dit à quelques reprises, ce sont des régimes très complexes. J'ai une formation en fiscalité et, pour être honnête, je trouve ces régimes plus compliqués que la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est une de mes lacunes. Je ne comprends pas très bien les programmes destinés aux vétérans.
Nous avons constaté que le régime d'avant 2006 était le plus généreux pour la grande majorité, sinon la totalité, des vétérans. Le régime en place depuis le 1er avril est un peu plus généreux que celui qui était en place entre 2006 et 2019, mais il exclut aussi certains vétérans. Il n'offre pas le même niveau de prestations à certains vétérans. Je pense qu'il s'agit de 5 % des vétérans et que ce sont ceux qui ont tendance à être les plus gravement handicapés.
Ce sont les principales conclusions du rapport, si je ne m'abuse. Je vois M. Jacques hocher la tête, ce qui veut dire que je n'ai pas fait d'erreur dans la description du rapport.
:
Vous soulevez deux éléments.
Le premier est le fait de mieux aligner le budget fédéral et le budget des dépenses, c'est-à-dire les crédits parlementaires sur lesquels vous, les parlementaires, êtes appelés à vous prononcer. Je crois qu'il y a là une bonne amélioration au chapitre de la transparence. Selon l'ancienne présentation, les mesures budgétaires étaient soumises à un vote en particulier; les parlementaires devaient les approuver. Cette année, nous sommes passés à une nouvelle façon de faire. Désormais, le Secrétariat du Conseil du Trésor et le gouvernement présentent certaines mesures budgétaires par ministère. Il est donc maintenant possible de faire l'appariement entre les mesures budgétaires et les crédits parlementaires sur lesquels vous êtes appelés à vous prononcer. Il s'agit d'une amélioration, selon moi.
Par contre, cela ne répond pas pleinement à certaines critiques qui ont été adressées au gouvernement, selon lesquelles les parlementaires sont appelés à se prononcer sur des crédits budgétaires avant que le Conseil du Trésor n'ait effectué son examen minutieux. Or il est possible que des changements soient apportés après que les parlementaires ont voté au sujet des crédits. Cette critique demeure valide, mais, selon moi, il n'y a pas beaucoup de façons d'y remédier, à moins de changer la structure même des crédits parlementaires.
Votre question aborde aussi la question des mesures non annoncées. Il y a également eu une amélioration à cet égard, comparativement à la transparence des budgets précédents. Cependant, il y a beaucoup de mesures non annoncées. En fait, nous en ignorons le nombre exact, mais les montants sont quand même assez importants. Cela dit, il est un peu étonnant qu'il s'agisse d'un montant négatif dans le budget de 2019.
En effet, il s'agit d'un montant négatif de 3,8 milliards de dollars sur un horizon de cinq ou six ans. Cela suggère deux possibilités, ou une combinaison des deux: des baisses de dépenses qui sont déjà provisionnées, ou des augmentations de taxes et de tarifs. En l'absence de détails, nous ne pouvons pas savoir s'il s'agit de réductions de dépenses, ou encore de provisions dont on n'a plus besoin et dont on libère l'espace budgétaire. Il règne beaucoup d'incertitude à ce sujet.
Le bon côté de la chose, c'est qu'auparavant cette incertitude n'aurait même pas été mentionnée. Aujourd'hui, on mentionne l'existence d'un gros montant correspondant à des dépenses ou des mesures non annoncées. On mentionne leurs incidences, mais sans préciser quelles sont ces mesures.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être présents parmi nous aujourd'hui.
Je voudrais parler d'un rapport que votre bureau a rédigé à la mi-avril sur les investissements dans les infrastructures des territoires. Le rapport critique les dépenses d'infrastructure dans le Nord. J'ai trouvé bizarre que, malgré de nombreuses annonces concernant les routes, les autoroutes, les aéroports et le logement, le rapport ait été publié comme il l'a été. Cela a soulevé beaucoup de questions.
Pouvez-vous confirmer que votre rapport portait uniquement sur le plan Investir dans le Canada et non sur l'ensemble des infrastructures?
Je soulève cette question parce que, si l'on exclut des mesures comme l'Initiative des corridors de commerce et de transport, les investissements dans le logement, les investissements dans la large bande, les mesures d'atténuation des catastrophes et tout le reste, on ne donne pas vraiment de vue d'ensemble des investissements dans les infrastructures.
:
Merci, monsieur le président, et merci d'être venu témoigner aujourd'hui.
Vos remarques soulèvent quelques questions, et j'aimerais obtenir une précision, si vous voulez bien m'accorder une seconde. On parlait de l'argent destiné aux anciens combattants.
J'ai trouvé votre tableau récapitulatif dans votre rapport. Merci beaucoup. J'aime les chiffres, j'apprécie leur clarté.
Pour mémoire, d'après l'ancien programme du gouvernement précédent, les clients actuels recevaient 22 milliards de dollars. Selon le système de pension à vie entré en vigueur en 2019, ces mêmes clients recevront 25 milliards de dollars, soit une augmentation de 3 milliards de dollars. Les nouveaux arrivants recevraient la même chose que dans le régime précédent.
Toujours pour mémoire, il y a une augmentation nette de 3 milliards de dollars. Je sais que vous avez eu du mal avec les 5 %, etc., et je me suis dit que ce serait utile.
Par ailleurs, dans vos perspectives financières et dans vos remarques d'aujourd'hui, vous dites que, selon les prévisions, la dette fédérale « diminuera à 30,5 % du PIB en 2020-2021, ce qui est inférieur de presque un point de pourcentage et demi au point de référence officiel de la dette du gouvernement. Nous prévoyons que le ratio de la dette fédérale au PIB diminuera à 28,9 % du PIB en 2023-2024 ».
Pourriez-vous expliquer aux gens qui nous regardent ou qui sont curieux de savoir ce qu'est un « point de référence de la dette »?
:
Je ne dirais pas que c'est préoccupant, mais je ne dirais pas non plus que c'est la norme.
Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt dans mes remarques d'ouverture, ces prévisions ne supposent pas de nouvelles mesures ni de changements majeurs dans les politiques publiques. Nous faisons ces projections en supposant qu'il y a un statu quo dans les politiques publiques. Nous regardons l'effet des changements économiques qui sont à long terme et qui sont un peu plus prévisibles, comme les changements démographiques. Nous faisons des prévisions sur les prix de l'énergie, sur l'environnement économique et macroéconomique mondial, ainsi que sur les politiques publiques en cours ou celles qui sont annoncées et dont la mise en œuvre est quasi certaine. Cela donne les chiffres que vous avez devant vous.
Cela dit, il est rare qu'un gouvernement n'apporte pas de changements aux programmes gouvernementaux. Est-ce plausible de penser que rien ne va changer et que les programmes du gouvernement vont suivre ce rythme? Je ne crois pas que c'est ce qui va se passer, parce que les gouvernements successifs vont apporter des modifications aux programmes gouvernementaux. Cependant, on pourrait s'attendre à ce que le niveau de dépenses gouvernementales en proportion du PIB soit stable dans le temps. Cela ne serait pas inhabituel.
Quoi qu'il en soit, un gouvernement peut vouloir être plus présent et intervenir davantage dans l'économie, ou encore jouer un plus petit rôle dans l'économie. Cela peut se faire par divers mécanismes, par exemple des dépenses directes ou des paiements de transfert plus élevés ou plus faibles aux individus.
Regarder les dépenses de programmes isolément donne probablement un portrait un peu faussé de la réalité de l'ensemble des dépenses gouvernementales.
:
D’accord, s’il n’y a pas d’autres questions, j’en ai une pour terminer.
Dans le résumé de votre rapport sur le plan des dépenses et le Budget principal des dépenses, vous mentionnez que les prestations aux aînés sont le principal transfert aux particuliers. Vous dites également que la bonification du Fonds de la taxe sur l’essence et du Transfert canadien en matière de santé explique les deux augmentations les plus importantes des principaux transferts aux autres ordres de gouvernement.
Avez-vous une idée de ce qu’il en est? Vous parlez de l’augmentation de 2,2 milliards de dollars du Fonds de la taxe sur l’essence, qui le double, et de l’augmentation de 1,8 milliard de dollars du Transfert canadien en matière de santé. À combien le total des dépenses dans ces deux catégories s'élève-t-il?
L’un des problèmes, même dans les documents budgétaires, c’est qu’on parle souvent de l’augmentation du pourcentage ou du montant, mais il faut faire des recherches ici et là pour trouver le résultat net. Je trouve que c’est un problème.
Je cherche le chiffre final. Je suppose que si le montant du Fonds de la taxe sur l’essence double maintenant, on parle de 4,4 milliards de dollars.
Qu’en est-il du Transfert canadien en matière de santé? C’est une question qu’on nous pose souvent.