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Merci, monsieur le président.
Bonjour, mesdames et messieurs. C’est un plaisir pour moi de prendre la parole devant vous aujourd’hui pour vous exprimer mon appui à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, qui constitue la partie 5 du projet de loi , et pour vous expliquer le contexte dans laquelle elle s’inscrit.
Ce texte législatif, pierre d’assise de l’approche du gouvernement fédéral en matière de changements climatiques, viendra compléter les mesures déjà prises par les provinces canadiennes. Il permettra aux provinces qui n’ont pas de système de tarification du carbone de bénéficier de la structure fédérale pour imposer un tarif sur le carbone et de toucher des revenus qui en découlent. Cette la politique fédérale, appliquée avec souplesse au niveau des provinces, fait entrer en ligne de compte la diversité des économies provinciales tout en permettant au gouvernement fédéral d’exercer un leadership dans le très important dossier des changements climatiques.
Le projet de loi garantit que les tarifs sur le carbone s’appliqueront à presque toutes les émissions provenant de l’énergie consommée au Canada, depuis les voitures circulant sur la 401 et la 417 jusqu’aux plus grands établissements industriels. Le projet de loi prévoit l’application du tarif fédéral dans les provinces n’ayant pas adopté une politique de tarification du carbone suffisamment rigoureuse.
En supposant que les politiques provinciales demeurent inchangées, la Colombie-Britannique, l’Alberta, l’Ontario, le Québec et, fort probablement, le Manitoba ne seraient sans doute pas touchés par le projet de loi. Ces provinces, qui comptent pour 90 % de la population canadienne et pour 83 % des émissions au Canada, pourraient être assujetties à cette loi si elles devaient affaiblir considérablement leurs politiques sur les changements climatiques.
Pourquoi fixer un tarif pour le carbone? En termes simples, la tarification du carbone tire parti des forces du marché pour amener la réduction des émissions au coût le plus bas possible. Elle ne dépend pas de décisions gouvernementales pour déterminer qui peut produire des émissions, ni quelle technologie doit être utilisée. Elle repose sur les décisions des particuliers quant aux choix qui leur conviennent le mieux.
Le plan de tarification du carbone proposé dans le projet de loi, tout comme les politiques actuelles de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de l’Ontario et du Québec, fixe le tarif sur les émissions de carbone de la plupart des sources, et non seulement des grandes installations industrielles. Plus le champ d’application du tarif sur le carbone est large, moins il sera élevé pour atteindre un objectif donné ou, dit autrement, plus les émissions seront réduites pour un tarif donné.
Bien entendu, comme nous le savons, les émissions de carbone au Canada ne sont pas un grand enjeu seulement pour l’industrie et ne sont certes pas uniquement une affaire de consommation de pétrole et de gaz.
Les tarifs sur le carbone fonctionnent-ils? C’est probablement une question qui sera souvent soulevée devant le Comité. La réponse est, tout simplement, oui. La taxe sur le carbone de la Colombie-Britannique, en vigueur depuis 2008, nous prouve clairement que les tarifs sur le carbone réduisent les émissions en deçà de ce qu’elles seraient autrement. Si vous voulez vous renseigner à ce sujet, les travaux de Nic Rivers à l’Université d’Ottawa, entre autres, l’ont démontré de façon concluante.
Cela ne veut pas dire qu’ils sont magiques. Ils n’entraîneront pas toujours une réduction des émissions en déca de leurs niveaux historiques, notamment lorsque la croissance macroéconomique est rapide, comme c’est le cas en Alberta depuis des années ou que le changement technologique est lent. Toutefois, permettez-moi de vous assurer, et de consigner au compte rendu, que la demande est en baisse, malgré les fréquentes affirmations du contraire.
Lorsque les émissions sont tarifées, nous en produisons moins.
Si vous considérez l’innovation et le changement technologique comme la solution au problème du changement climatique, la tarification du carbone est votre meilleur choix de politique. Lorsqu’on lui a demandé comment les gouvernements peuvent stimuler l’innovation et les technologies vertes, David Popp, de l’Université Syracuse, dans un rapport publié par l’Institut C.D. Howe, a formulé cinq règles. La première est, encore et toujours, la tarification du carbone parce que soutenir le développement technologique signifie non seulement investir dans les nouvelles technologies, mais aussi créer une demande pour les technologies propres dans l’ensemble de l’économie. Cela se produit naturellement avec la tarification du carbone. La tarification du carbone est aussi une solution de rechange utile à la pratique des gouvernements de choisir, à coups de règlements et de subventions, qui seront les gagnants.
Pourquoi alors ne pas simplement adopter une grande politique fédérale? Pourquoi ne pas avoir un plan fédéral s’appliquant à tous? Je pense que ce serait une mauvaise décision parce que nos économies provinciales sont très différentes — j’ai fait beaucoup de travail en Alberta, en Ontario et au Québec — car leurs profils d’émissions sont très différents, tout comme les moyens de réduire les émissions. J’ai quelques exemples. Dans certaines provinces, une grande partie de l’électricité est encore produite à partir de combustibles fossiles, alors que dans d’autres provinces, l’électricité est déjà à zéro carbone. En soi, cela offre des possibilités différentes.
Si vous prenez ma province, l’Alberta, environ le quart de notre PIB provient de secteurs qui sont décrits comme étant à forte intensité d’émissions et très exposés à la concurrence. Cela signifie qu’ils sont vulnérables à d’éventuelles pertes de sources d’émissions, et c’est pourquoi l’Alberta a conçu un programme pour les atténuer. Si vous tentiez d’appliquer en Ontario la politique qui a fonctionné en Alberta, vous constateriez qu’elle ne convient pas tellement.
Enfin, bien sûr, il y a l’utilisation des revenus. Vous pouvez voir que les choix faits diffèrent un peu partout au pays en fonction des objectifs provinciaux.
Par conséquent, je pense que le gouvernement fédéral a fait un choix judicieux, non seulement en donnant aux provinces les moyens de choisir leurs propres politiques, mais aussi en déterminant l’utilisation des revenus provenant de la tarification du carbone imposée par le gouvernement fédéral.
Encore une fois, je pense que c’est un domaine où les provinces auront des priorités différentes et des préférences différentes d’utilisation des revenus. Trevor Tombe a récemment présenté une proposition pour l’Ontario qui prévoit, sans modifier la répartition du revenu, un tarif sur le carbone afin d’accroitre de 80 % le crédit de taxe sur les ventes et de supprimer la prime d’assurance-santé.
De toute évidence, en Alberta et en Colombie-Britannique, nous avons choisi des politiques plus progressistes, qui, par le truchement du tarif sur le carbone, ont amélioré la situation de 40 à 50 % des ménages les plus pauvres.
Je pense que de tels choix sont mieux faits au niveau provincial qu’au niveau fédéral.
Pour conclure, j’exprimerais quelques préoccupations que j’ai au sujet de ce projet de loi. Je m’inquiète un peu du pouvoir discrétionnaire du gouverneur en conseil d’imposer des mesures aux provinces.
L’article 189 prévoit que le Cabinet peut tenir compte de tout facteur qu’il juge approprié, y compris la rigueur des mécanismes de tarification du carbone, pour déterminer si une province devrait être visée. J’aimerais voir une définition plus claire de la « rigueur »; commodément, la tarification du carbone apporte cette rigueur. Un critère procédant de cette norme empêcherait que le Cabinet juge approprié d’appliquer à une province un tarif sur le carbone beaucoup plus élevé que dans d’autres.
Je m’inquiète aussi un peu de l’article 188, qui détermine la répartition des revenus provenant de la tarification du carbone vers certaines provinces. Je pense que nous voulons nous assurer qu’il résultera clairement de ce projet de loi que les recettes perçues seront distribuées aux provinces indépendamment des autres décisions de transfert du gouvernement fédéral.
Dans l’ensemble, cependant, je suis heureux aujourd’hui d’exprimer ici mon appui à ce projet de loi.
[Français]
Merci de votre attention et de m'avoir consacré du temps. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président. J’ai siégé des deux côtés de la table, et aussi à ce bout-ci. Je suis donc enchanté d’être de retour.
Monsieur le président, je suis chef du Parti conservateur uni de l’Alberta. Nous venons de tenir notre assemblée générale fondatrice, qui a pris fin hier. Étant donné que 98 % de nos membres ont voté en faveur de l’abrogation de la taxe sur le carbone imposée par le gouvernement néo-démocrate sortant de l’Alberta, je m’oppose à la partie 5 du projet de loi et à sa proposition de taxe fédérale sur le carbone.
Le gouvernement néo-démocrate de l’Alberta a imposé sa taxe sur le carbone cinq mois après les dernières élections. Bizarrement, les candidats néo-démocrates ont oublié de faire mention de leur taxe sur le carbone pendant la campagne électorale. C’était le programme caché le plus important de l’histoire politique de notre province et la plus forte augmentation d’impôt de notre histoire. Ils l’ont augmenté de 50 % le 1er janvier de cette année. Ils s’engagent maintenant à l’augmenter de 67 %, et ils blâment le projet de loi , qui établit la taxe fédérale sur le carbone.
Je peux vous dire qu’il y a eu plus d’une douzaine de sondages d’opinion publique sur la taxe sur le carbone en Alberta au cours des deux dernières années, qui montrent invariablement que les deux tiers des Albertains s’opposent à cette taxe. Ils s’y opposent non pas parce qu’ils sont indifférents aux questions environnementales ou aux défis des changements climatiques et des émissions de gaz à effet de serre, mais parce qu’ils comprennent, avec leur bon sens, que pénaliser les consommateurs qui vivent une vie normale dans un froid climat nordique et une économie avancée n’est pas une politique environnementale responsable. Ils comprennent qu’en faisant payer plus cher aux personnes âgées pour chauffer leur maison lorsqu’il fait 30 degrés sous zéro, comme c’était le cas il y a quelques semaines en Alberta, ou en faisant payer aux gens davantage pour se rendre au travail, on se trouve à pénaliser des personnes qui ne font que vivre simplement leur vie. Cela n’a pas de sens.
Les théoriciens qui sont en faveur de la taxe sur le carbone admettront généralement qu’il s’agit d’une taxe pigouvienne, indiquant par cela que les comportements négatifs devraient être taxés, comme c’est le cas pour l’alcool et le tabac.
La plupart des Albertains ne pensent pas que le fait de chauffer leur maison, de se rendre au travail et d’exploiter une petite entreprise devrait être pénalisé.
J’ai récemment visité le Sundre Seniors Centre, merveilleux organisme qui permet aux aînés de demeurer actifs dans leur collectivité. Cela leur coûte seulement 18 000 $ par année. Il s’agit d’un organisme entièrement bénévole. Désormais, il doit consacrer 7 % de son budget annuel à une taxe sur le carbone, taxe qu’il n’a pas les moyens de payer et qui est sur le point d’augmenter de 67 %. Aucun remboursement ou réduction d’impôt compensatoire ne lui est accordé, si bien qu’il envisage de fermer son centre pour personnes âgées.
Cette taxe comporte un coût humain réel dont ses champions ne parlent pas. C’est pourquoi je suis heureux de vous annoncer que, si les Albertains élisent un gouvernement conservateur uni lors des élections provinciales de l’an prochain, notre première initiative législative sera de présenter à l’Assemblée législative une loi abrogeant la taxe sur le carbone. Nous abrogerons complètement la taxe sur le carbone du NPD.
Si le gouvernement fédéral cherche à contraindre aux Albertains au moyen des pouvoirs proposés dans ce projet de loi imposant une taxe fédérale sur le carbone, le gouvernement fédéral nous retrouvera devant les tribunaux. L’opposition officielle de l’Alberta a demandé à la Cour d’appel de la Saskatchewan de lui reconnaître le statut d’intervenant dans la contestation constitutionnelle du projet de loi par le gouvernement de la Saskatchewan. Si nous prenons le pouvoir, nous verrons à ce que l’Alberta fasse tout ce qu’il faut pour saisir les tribunaux de la même question.
Nous croyons qu’il s’agit d’un empiétement inconstitutionnel sur le pouvoir exclusif des provinces de prélever des impôts à des fins provinciales. Il s’agit aussi d’une application inégale d’un pouvoir fédéral aux différentes provinces, qui sont traitées différemment.
Je termine en soulignant que les partisans de la taxe sur le carbone savent que la taxe de 50 $ n’est qu’un début. Environnement Canada a dit que pour atteindre les cibles de l’Accord de Paris, il faudrait qu’elle soit portée à 300 $ la tonne. C’est la technique de l’accoutumance insidieuse. Tous les défenseurs de la taxe sur le carbone essaient simplement ici de faire en sorte que les gens s’habituent à payer plus pour chauffer leur maison et se rendre au travail, afin qu’ils puissent continuellement augmenter les revenus des politiciens et donner plus de contrôle au gouvernement. Un futur gouvernement conservateur de l’Alberta fera tout en son pouvoir pour lutter contre cette tendance.
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Merci beaucoup de m’avoir donné l’occasion de prendre la parole aujourd’hui.
Je représente la Commission de l’écofiscalité du Canada. Nous sommes un groupe d’économistes d’expérience de partout au pays, appuyé par un conseil consultatif multipartite composé de représentants de l’industrie, de la société civile et de tous les horizons politiques. Le mandat de la commission est de définir et de soutenir des politiques qui sont rationnelles tant pour l’environnement que pour l’économie. Autrement dit, il s’agit de déterminer les politiques qui permettent d’atteindre les objectifs environnementaux au moindre coût économique. Nos recherches et nos analyses indiquent clairement que la tarification du carbone est une telle politique.
Aujourd’hui, je me pencherai sur trois aspects clés de la tarification du carbone dans le contexte du projet de loi . En premier lieu, la tarification du carbone est un moyen efficace pour réduire les émissions de GES. Elle incite les entreprises et les ménages à opter pour des activités et des technologies à faible émission de carbone, elle crée une demande pour les technologies à faible émission de carbone et elle favorise l’innovation à faible émission de carbone. Nous savons que les prix influent sur les choix dans l’ensemble de l’économie, mais il y a aussi, comme M. Leach l’a mentionné, de nombreuses preuves empiriques qui montre que la tarification du carbone fonctionne.
En Colombie-Britannique, selon des chercheurs universitaires, les émissions de GES seraient de 5 à 15 % plus élevées si la Colombie-Britannique n’avait pas mis en oeuvre sa taxe sur le carbone. Plus précisément, par exemple, en l’absence de la taxe, les véhicules seraient 4 % moins efficaces par habitant, la demande d’essence serait de 7 à 17 % plus élevée.
L’analyse de modélisation effectuée en 2016 par la Commission de l’écofiscalité a montré qu’une hausse portant le tarif sur le carbone à 50 $ la tonne en 2021 et à 100 $ la tonne en 2027 pourrait réduire les émissions d’environ 170 mégatonnes en 2030 et de 80 mégatonnes en 2022.
En deuxième lieu, les économistes conviennent que la tarification du carbone est l’approche la moins coûteuse pour réduire les émissions de GES. Notre même analyse montre que le coût de la tarification du carbone, même si le tarif atteignait 100 $ la tonne d’ici 2027, n’influerait que légèrement sur la croissance économique. Comment les revenus recyclés influent-ils sur ces estimations? Au pire, la tarification du carbone réduirait les taux de croissance d’environ un dixième de point de pourcentage, mais si les revenus étaient utilisés pour réduire l’impôt sur le revenu, comme les provinces ont le pouvoir discrétionnaire de le faire dans le cadre pancanadien, les répercussions sur la croissance seraient négligeables. La croissance économique demeurerait positive et forte.
En parallèle avec ces coûts minimes, il faut tenir compte des avantages. La tarification du carbone peut réduire les émissions de GES et aider le Canada à atteindre sa cible de 2030. Cela contribuera également aux efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique et évitera ses conséquences coûteuses. Ces réductions auront également des avantages sur le plan de la réduction de la pollution atmosphérique locale et, par conséquent, de l’amélioration de la qualité de l’air et de la santé à l’échelle locale.
Le Canada s’est fixé des objectifs ambitieux de réduction des émissions en 2030. L’atteinte de ces objectifs entraînera des coûts, mais la tarification du carbone peut permettre de réduire ces émissions au moindre coût possible. D’autres politiques, y compris les subventions ou les règlements normatifs, coûteront plus cher. Les règlements qui exigent des résultats ou des technologies précis dans des secteurs particuliers sont moins souples et, par conséquent, entraînent des coûts plus élevés. La tarification du carbone ne suppose pas une idée préconçue des endroits, dans l’économie ou dans le pays, qui offrent des possibilités de réduction des émissions au moindre coût.
La souplesse de la tarification du carbone crée également de puissants incitatifs à l’innovation propre. Les subventions aux technologies propres obligent de choisir des technologies particulières. De plus, elles sont souvent versées à des entreprises ou à des particuliers qui, de toute façon, auraient adopté la technologie propre sans recevoir de subvention ou avec une subvention moindre, ce qui en augmente le coût.
En dernier lieu, une tarification du carbone bien conçue peut réduire les émissions tout en protégeant la compétitivité des entreprises canadiennes, même si certains de nos partenaires commerciaux ne tarifient pas le carbone. En particulier, l’analyse de la Commission de l’écofiscalité sur l’établissement des prix en fonction des extrants suggère que cette approche, telle qu’elle figure dans le projet de loi , peut apporter des mesures transitoires aux industries vulnérables. Elle incite l’industrie à réduire les émissions de GES en améliorant sa performance en matière d’émissions, non en réduisant la production ou les investissements au Canada. C’est l’approche que l’Alberta a adoptée dans le cadre du règlement sur les émetteurs de gaz spécifiques en 2007, et qui a été améliorée par la suite dans le cadre du règlement sur les incitatifs à la compétitivité en matière de carbone.
Les entreprises canadiennes, surtout celles des secteurs à forte intensité d’émissions et très exposés à la concurrence, ont clairement exprimé leur soutien à l’égard de l’établissement des prix en fonction de la production comme moyen d’encourager efficacement la réduction des émissions sans miner la compétitivité économique.
En conclusion, un plan climatique fondé sur la tarification du carbone est l’approche la moins coûteuse pour atteindre les cibles d’émissions de GES du Canada. Le projet de loi garantit que la tarification du carbone s’appliquera partout au Canada, répondra aux inquiétudes quant à la compétitivité, mais donnera aussi aux provinces la souplesse nécessaire pour concevoir leur propre tarification du carbone et leur apportera des revenus de recyclage.
Merci beaucoup.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Merci beaucoup de m'avoir invité à participer à votre réunion aujourd'hui.
[Traduction]
Je m'appelle Dale Marshall. Je suis directeur des programmes nationaux de l'organisme Environmental Defence. Cependant aujourd'hui, je représente Réseau action climat Canada dans mon rôle de vice-président du Conseil d'administration.
J'ai trois observations à présenter à l'appui de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Premièrement, le système pollueur-payeur est un excellent outil de lutte contre les changements climatiques. Deuxièmement, les Canadiens peuvent se permettre d'imposer des politiques climatiques plus ambitieuses et de portée plus vaste qui comprendraient la tarification du carbone. Troisièmement, les Canadiens ne peuvent pas se permettre de se croiser les bras devant ce risque monumental qui présage un problème extrêmement urgent.
Donc tout d'abord, un système pollueur-payeur sera un excellent moyen de réduire les émissions et d'inciter les entreprises et les particuliers à tendre vers des énergies propres et plus efficientes. De nombreux pays le font déjà depuis longtemps. Voilà pourquoi les 10 économies les plus prospères au monde tarifient le carbone d'une manière ou d'une autre. On traite souvent la Chine comme l'ennemie publique du climat. Cependant, ses États imposent un système de plafonnement et d'échange depuis de nombreuses années, et son gouvernement se prépare à établir ce système à l'échelle nationale.
Cependant, la conception est importante. Les concessions que ce projet de loi accorde à l’industrie dans le cadre de son système de prix fondé sur les extrants pourraient le rendre moins efficace. Dans le passé, certains systèmes de tarification du carbone n'ont pas été aussi efficaces qu'ils l'auraient pu parce qu'on avait fait des concessions peu nécessaires à l’industrie. Je suis inquiet de voir le Canada faire la même chose à l'heure actuelle. La tarification du carbone ne ternit la compétitivité que d'une petite part de l'économie du pays, et pourtant ce projet de loi accorde des concessions et des exemptions générales au secteur industriel, et je vous dirai très franchement que cela risque de provoquer l'effondrement de ce système.
Deuxièmement, l'économie canadienne supportera très bien la tarification du carbone partout au Canada. Quatre provinces l'ont déjà imposée. Le fait qu'il s'agisse des provinces dont l'économie croît le plus rapidement que les autres ne sous-entend pas que la tarification favorise la croissance économique, mais qu'il est possible de maintenir la force de l'économie tout en tarifiant le carbone.
Les pays scandinaves ont été les premiers à imposer un système de tarification du carbone, et leur économie s'est maintenue en tête de file de celle des pays industrialisés. Les modèles indiquent que nous ne constaterons qu'une différence minime entre l'inaction face aux changements climatiques et l'imposition de politiques climatiques ambitieuses et robustes. Notre organisme, Environmental Defence, et certains de nos partenaires ont publié les résultats de recherches menées récemment par d'éminents économistes canadiens. Ces résultats démontrent que quoi que nous décidions, que nous respections nos engagements de Paris en matière de changements climatiques ou que nous ne fassions rien, la croissance économique du Canada atteindra, d'ici à 2030, 38 % du PIB dans le premier cas et 39 %du PIB dans le second cas.
Troisièmement, il faut que les Canadiens utilisent tous les outils stratégiques dont ils disposent pour lutter contre les changements climatiques. La cible de 2030 que le Canada s'est fixée a été jugée très insuffisante pour éviter les niveaux dangereux de changement climatique, mais nous sommes loin d'atteindre cette cible. Par conséquent, les politiques proposées dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques sont cruciales et devraient être mises en oeuvre sans tarder avec la plus grande rigueur. Cela comprend la tarification du carbone dans tout le Canada. En écartant cette solution, nous ferons moins que le strict minimum pour lutter contre la menace monumentale qui nous fait face.
Au cours de la dernière décennie, peut-être même depuis une génération, le Canada comprend de mieux en mieux les dangers que présentent les changements climatiques, mais nous n’avons rien fait pour les éviter. J’espère que la prochaine décennie ne sera pas dominée par des gens qui privilégieront les pollueurs au détriment du bien public.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup de l'invitation.
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le président, c'est pour moi un plaisir d'être ici et de représenter Équiterre. Je ferai des commentaires principalement sur la section 5, soit sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre.
Équiterre est un organisme à but non lucratif ayant le statut d'organisme de bienfaisance. Nous comptons 22 000 membres et 110 000 sympathisants. Nous avons des bureaux à Québec, à Montréal et à Ottawa. Nous intervenons sur les questions liées à l'environnement et au climat depuis 25 ans.
Pour s'attaquer au tabagisme au Canada, notre gouvernement a augmenté le prix du tabac. Pour s'attaquer aux pluies acides qui détruisaient nos forêts, le président George Bush père a fixé un prix sur le dioxyde de soufre au moyen d'un système de plafonnement et d'échange. Si on veut diminuer les émissions de gaz à effet de serre, ou GES, il faut imposer un prix du carbone. Cela constitue d'ailleurs un engagement international pris par le Canada à Paris et une politique essentielle à l'atteinte de notre cible. C'est une approche simple et peu coûteuse qui a démontré son efficacité à de nombreuses reprises.
D'ailleurs, selon le récent rapport d'Environnement et Changement climatique Canada sur les résultats escomptés de la tarification du carbone, celle-ci pourrait réduire les émissions de GES de 80 à 90 millions de tonnes en 2022 au Canada si toutes les provinces et les territoires adoptent une tarification. Cela est énorme. C'est l'outil le plus important que nous avons à notre disposition. De plus, toujours selon ce rapport, l'impact sur la croissance du PIB au Canada — mon collègue l'a déjà dit — serait négligeable.
Étant donné que nous prévoyons toujours un écart de 64 mégatonnes de GES par rapport à notre cible de 2030, nous avons besoin des résultats escomptés découlant de la tarification du carbone. Le fait de fixer un prix sur le carbone est désormais la norme. Selon la Banque mondiale, plus de 67 pays, y compris la Chine et plusieurs autres partenaires commerciaux du Canada, ont déjà fixé un prix sur le carbone. Il est grand temps que le Canada suive la même voie sur le plan économique.
Certains s'inquiètent du potentiel désavantage compétitif que subirait l'industrie canadienne, mais le système fédéral prévoit des mesures précises pour atténuer les risques des industries exposées à ce type de concurrence. Les nouveaux fonds pour l'innovation propre ou le défi pour une économie sobre en carbone, par exemple, stimuleront la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans plusieurs secteurs économiques, ce qui assurera ainsi la compétitivité de nos industries.
Le système de plafonnement et d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre du Québec couvre près de 85 % de l'économie et s'est de nouveau élargi grâce à la liaison des marchés du Québec et de la Californie à celui de l'Ontario, le 1er janvier dernier. Le marché du carbone est, pour le Québec, l'outil économique le plus approprié pour garantir des réductions d'émissions de gaz à effet de serre en raison de ces plafonds dégressifs, mais également grâce aux revenus qu'il engendre. À ce jour, le marché du carbone a généré des revenus de plus de 2 milliards de dollars, lesquels sont entièrement consacrés à la mise en oeuvre du Plan d'action du Québec sur les changements climatiques.
Il y a, soit dit en passant, un consensus politique au Québec quant à la bourse du carbone aujourd'hui. Aucun parti majeur au Québec ne s'y oppose. Elle est donc là pour rester.
Les revenus issus des ventes aux enchères du marché du carbone sont versés au Fonds vert. Ce fonds finance des investissements dans l'économie de demain. Je vous donne un exemple: le fonds soutient la PME québécoise Lion, qui fabrique des autobus scolaires 100 % électriques, et plus récemment, leur exportation en Californie. Un jour, tous les autobus scolaires dans le monde seront électriques et le Québec se sera taillé une part de ce marché lucratif grâce au Fonds vert.
Notons toutefois que le fait de fixer un prix sur le carbone, quoique essentiel, est à lui seul insuffisant pour atteindre notre cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De ce fait, les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que le gouvernement fédéral doivent mettre en oeuvre des politiques complémentaires. Je vous donne un seul exemple: la réglementation des GES des véhicules passagers, ou la réglementation de l'efficacité énergétique des véhicules. Sans elle, les manufacturiers vont continuer à dépenser des milliards de dollars en publicité pour nous vendre de grosses voitures et surtout des camions légers, rendant les consommateurs prisonniers de la fluctuation des prix de l'essence, comme nous l'avons vu récemment.
Il est donc essentiel de réglementer l'efficacité énergétique des voitures et des camions légers. Il s'agit d'une mesure complémentaire à celle liée à la tarification du carbone. Le débat sur le carbone ne date pas d'hier. On en parle depuis très longtemps, c'est-à-dire au moins depuis les années 1990. Toutes sortes de consensus ont été établis. En 2008, le parti conservateur fédéral de l'époque a adopté un plan de changement climatique intitulé « Prendre le virage », lequel proposait de fixer un prix sur le carbone.
Évidemment, mes collègues ont déjà parlé des provinces qui, elles-mêmes, ont fixé un prix sur le carbone depuis. Nous avons donc des exemples probants à ce sujet.
Je vous souligne d'ailleurs que la cible du Canada quant à l'horizon 2030 est celle du précédent gouvernement.
Je vais conclure en disant que c'est important pour nous que le prix du carbone fasse partie d'un plan complet sur les changements climatiques du Canada et, pour cette raison, nous appuyons le projet de loi qui est devant vous.
Merci.
Monsieur le président et membres du comité des finances, je m'appelle Graham Saul. Je suis directeur général de Nature Canada.
Tout d’abord, je tiens à souligner que le budget de 2018 effectue un investissement fédéral historique dans la conservation de la nature. À Nature Canada, nous sommes enchantés de la promesse de dépenser, quoique prudemment, la somme de 1,3 milliard de dollars sur cinq ans pour renverser le déclin de la biodiversité au Canada et pour établir la gestion des aires protégées et le rétablissement des espèces en péril. Merci à tous ceux qui ont contribué à appuyer ces dispositions.
En ce qui concerne la Loi sur la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre, je pense qu’il vaut la peine de rappeler que c’est en mai 1992, il y a 26 ans, que le Canada a signé la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Il y a donc plus de 25 ans que le Canada a promis pour la première fois de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, et nous avons à peine commencé à tenir cette promesse.
Il y a environ 14 ans, l’ancien premier ministre libéral Paul Martin a annoncé pour la première fois son intention de mettre un prix sur la pollution par les gaz à effet de serre en créant un marché pour la réduction des émissions dans tous les secteurs de l’économie. Malheureusement, cela ne s’est jamais produit. Puis, en mai 2008, il y a presque exactement 10 ans aujourd’hui, le ministre fédéral conservateur de l’Environnement, John Baird, a qualifié l’échange de droits d’émission de carbone d’élément clé du nouveau plan gouvernemental Prendre le virage, qui visait à réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Plus tard cette année-là, aussi en 2008, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a remporté un mandat minoritaire à la suite d'une campagne qui promettait fermement d’élaborer et de mettre en oeuvre un système de plafonnement et d’échange pour les gaz à effet de serre et la pollution atmosphérique. De nouveau, cela ne s’est jamais produit. Puis, en 2015, les Canadiens ont appuyé un programme électoral libéral qui visait à mettre un prix sur la pollution par les gaz à effet de serre, et voilà où nous en sommes aujourd’hui.
Que s’est-il passé entretemps? La ville de Calgary a connu deux inondations centenaires en huit ans, dont la plus récente, en 2013, a entraîné des pertes financières et des dommages matériels de 6 milliards de dollars. En mai 2016, il y a deux ans, près de 90 000 personnes ont été évacuées pour échapper à des feux de forêt qui ont rasé la ville de Fort McMurray et qui ont réduit en cendres des milliers de maisons. Selon le Bureau d’assurance du Canada, les feux de forêt de Fort McMurray ont causé la catastrophe naturelle la plus coûteuse de l’histoire du Canada. À la mi-novembre 2016, on estimait que les réclamations s'élevaient à 3,77 milliards de dollars .
En ce même jour l’année dernière, j’ai vu les soldats appelés à intervenir lors des inondations dans ma ville, Ottawa-Gatineau. Ces inondations ont causé plus de 220 millions de dollars en dommages assurables. Quelques mois plus tard, j’ai passé quelques semaines en Colombie-Britannique, où s’est déroulée la pire saison des incendies de l’histoire de la province. Plus de 1 300 incendies ont brûlé plus de 1,2 million d’hectares, déplaçant du même coup 65 000 personnes de leur domicile. Cette catastrophe a coûté plus de 500 millions de dollars à la Colombie-Britannique. Cette saison des feux de forêt a causé l'état d’urgence le plus long de toute l’histoire de la Colombie-Britannique, soit 10 semaines au total.
Aujourd'hui, nous observons la situation tragique du Nouveau-Brunswick. Comme l'a affirmé le premier ministre Brian Gallant:
Nous assistons à des phénomènes météorologiques que nous n'avions jamais vus jusqu'à présent. Nous faisons très probablement face à l'inondation la plus massive et la plus destructrice que l'on n'ait jamais enregistrée au Nouveau-Brunswick...
On m'a demandé de vous dire ce que je pense de la partie 5 du projet de loi , qui édicte la Loi sur la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre et qui produit le règlement sur les frais de carburant. À mon avis, nous aurions dû adopter cette politique il y a au moins 10 ans. Nous devons utiliser tous les outils à notre disposition, y compris la tarification du carbone, pour que notre pays avance enfin dans la bonne direction. Nous devons cesser de tergiverser alors que des régions comme le Nouveau-Brunswick disparaissent sous les eaux. Nous devons cesser de tergiverser alors que des régions comme la Colombie-Britannique sont réduites en cendres.
Les Canadiens ont toujours voté pour les dirigeants qui promettaient d'agir contre les changements climatiques. Il est grand temps que nous cessions de jouer de petits jeux politiques face à ce qui devient rapidement une question de vie ou de mort pour les collectivités et pour les espèces de toutes les régions du Canada et du monde. Le Canada doit se placer en chef de file de l’économie du XXIe siècle, et la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre est le premier pas qui l'engagera sur cette voie.
Nous devons agir de manière à ce que le Canada se place en chef de file de l’économie du XXIe siècle, et la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre est le premier pas qui l'engagera sur cette voie.
Il est plus crucial que jamais de montrer à nos enfants et à nos petits-enfants que nous sommes prêts à investir pour régler les problèmes au lieu d'ignorer ces problèmes et de rejeter sur leurs épaules la responsabilité d'en nettoyer ensuite les dégâts.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
On aurait pu facilement répondre à près de la moitié des questions si le gouvernement cessait de dissimuler le coût réel de la taxe sur le carbone pour les Canadiens à faible revenu. J'entends partout parler d’abordabilité, et l’abordabilité de toute forme de taxation est une excellente question, mais surtout quand il s'agit de la taxe sur le carbone, parce qu’elle pénalise les personnes à faible revenu. C’est une taxe sur absolument tout. Je sais que M. Kenney et d’autres députés conservateurs de partout au pays disent qu'il s'agit d’une taxe sur les produits de première nécessité, et c'est bien cela.
Le gouvernement ne cesse de dire que les gens doivent faire de meilleurs choix. Il y a un aréna à Erin Woods, dans ma circonscription, et, quand la taxe sur le carbone a été instaurée à l’échelle provinciale, les familles qui utilisaient cet aréna ont été punies et ont dû payer des frais plus élevés, des coûts plus élevés, simplement pour offrir une journée de hockey aux enfants. C’est là le problème, et, si le gouvernement cessait de dissimuler les faits, nous pourrions avoir un débat complet et comprendre l’impact réel que cela aura sur tous les Canadiens, c’est-à-dire sur l’abordabilité des activités quotidiennes, le chauffage de la maison, mais aussi le simple fait d’aller jouer au hockey.
L’euphémisme qu’on utilise souvent, c’est qu’il y a une taxe sur tout, qu’il faut faire de meilleurs choix et que le gouvernement essaie de changer le comportement des gens. Il n’aime pas ce que veulent les gens, c'est-à-dire aller jouer au hockey, chauffer leur maison à la température qu'ils veulent. C’est ce qu'on me dit dans ma circonscription.
Monsieur Kenney, c'est à vous encore que s'adressent mes questions. Il est évident que vous n'êtes pas d'accord pour forcer les gens à agir, pour les forcer à faire ce que le gouvernement veut qu’ils fassent, et il est évident également que beaucoup d'Albertains vous ont raconté beaucoup de choses. Pourriez-vous en parler au Comité?
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Je pense qu’il y a là, en effet, une différence philosophique fondamentale. Que savons-nous vraiment? Nous savons que les pays qui en font le plus dans ce domaine — des pays comme l’Allemagne et la Norvège — s’en tirent parfaitement bien sur le plan économique. Le ciel ne leur est pas tombé sur la tête. Les faits attestent qu’on peut obtenir de très bons résultats économiques si on prend ce problème au sérieux.
Nous savons aussi que les provinces du Canada, comme le Québec et la Colombie-Britannique, qui essaient d’aller de l’avant se portent parfaitement bien sur le plan économique et prennent des mesures pour protéger les personnes les moins favorisées dans leur province, contrairement à ce qui se fait dans bien d’autres provinces.
Nous savons aussi, par contre, que nous avons un grave problème sur les bras. Si vous croyez vraiment à la science — et je pense que c’est là qu’entre en jeu la différence philosophique fondamentale —, vous devez conclure qu’il serait imprudent et irresponsable de continuer dans la même direction, que cela compromettrait irrémédiablement le bien-être de nos enfants et que cela causerait un préjudice probablement sans précédent à notre économie et aux générations futures, sans compter le fait que les gens les plus pauvres du monde, et les moins responsables du problème, sont ceux qui seront les premiers et les plus touchés si nous n’agissons pas.
La différence philosophique fondamentale dont je parle est la suivante: vous souciez-vous vraiment du problème? Vous souciez-vous vraiment de ce que la science nous dit ou des conséquences de l’inaction? Si c’est le cas, le secret n'en est pas un. Quand on examine la situation des pays qui font des progrès dans ce dossier, qu’ont-ils en commun? Ils essaient. Les pays qui se préoccupent de ce problème, qui prennent des mesures pour le régler et qui réussissent à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à promouvoir l’économie de l’énergie propre du XXIe siècle ont finalement en commun qu’ils essaient.
Donc, si tout le monde autour de cette table se soucie vraiment de ce problème, si nous ne souffrons pas d'une division philosophique sur cette question, alors tous les partis représentés ici ont la responsabilité de proposer un plan qui traduise leur volonté d'essayer de régler ce problème. Faute de plan, il est très difficile d’en arriver à la conclusion que nous partageons effectivement un même souci à ce sujet.
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Merci, monsieur le président.
Bienvenue à tous. La conversation de cet après-midi a été très instructive et animée.
J’ai deux ou trois choses à dire. J’entends constamment parler de l’économie. Je sais que, pour les résidants de ma circonscription, l’économie est la chose la plus importante, parce qu'ils tiennent à garantir un avenir prometteur à leurs enfants.
J’ai suivi l’économie pendant plus de 20 ans de ma vie— et, monsieur Leach, j’ai lu une bonne partie de votre documentation, ainsi que les documents de mon professeur, Mark Jaccard, de l’Université Simon Fraser — et je pense à la situation de l’économie canadienne, puisque 85 % des provinces appliquent maintenant un système de tarification du carbone ou un mécanisme quelconque. Nous nous en tirons très bien, et cela a été confirmé la semaine dernière. Le rapport d'A.T. Kearney est sorti, et le Canada est la deuxième destination favorite des investissements directs étrangers dans le monde.
M. Kenney et moi avons visité la belle province de l’Alberta. Je suis originaire de la côte Ouest. Nous avons visité le centre industriel de l’Alberta. Étant donné le nombre d’investissements engagés dans les entreprises de polypropylène et de propylène qu'IPL a annoncés et le nombre de possibilités qui s’offrent là-bas, nous savons qu’il y a une activité phénoménale dans cette région de l’Alberta.
J’ai parlé du secteur pétrolier et gazier. Je ne pose pas de questions; j’y reviendrai dans un instant.
La question que j'ai pour M. Leach est la suivante. Si on examine les données empiriques et la direction prise par le secteur d'activité... Prenons l’exemple de Daimler, en Allemagne, qui est en train de remplacer toute sa flotte de camions, ceux que vous voyez sur les routes de l’Alberta et de l’Ontario, par des camions électriques. Ils comprennent... M. Kenney a parlé de tourner autour du pot. J’aime bien l'idée de savoir où on en est et de s'assurer qu'on y est.
Monsieur Leach, l’innovation, oui, mais il nous faut un mécanisme de tarification du carbone pour nous attaquer à la racine du problème.
Je suis économiste de profession. Ce qui me tient à coeur, c’est que les Canadiens travaillent et réussissent.
Ce que je sais aujourd’hui, c’est que le taux de chômage est à son plus bas niveau depuis 40 ans. Nous avons créé près de 600 000 nouveaux emplois. Nous sommes en train d'instaurer l'allocation canadienne pour les travailleurs. Nous avons fait campagne en promettant de mettre un prix sur le carbone à l’échelle nationale, mais ce qui est merveilleux, c’est que chaque province peut décider d'utiliser ces revenus comme elle l'entend.
Je suis tout à fait en faveur d’une tarification du carbone sans incidence sur les recettes. La Colombie-Britannique l’a adoptée il y a très longtemps, et elle s’en est remarquablement bien sortie.
Je comprends la différence entre corrélation et causalité. Je comprends, mais, par ailleurs... Je voudrais bien savoir. Les émissions de la Colombie-Britannique, si on veut parler d'infléchir la courbe, ont été infléchies par l’introduction d’un prix sur le carbone.
Peut-être pourriez-vous en parler, s'il vous plaît.
J’aimerais faire une observation. De mon point de vue, nous avons eu une très bonne discussion. Le Canada sera exclu de la solution si nous ne nous attaquons pas au problème des changements climatiques, mais je dirais à tous ceux qui manifestent contre nos pipelines et la capacité d’acheminer nos ressources vers les marchés que ce n’est pas non plus une solution.
Pour que des provinces comme l’Alberta et d’autres se rallient à nous, je pense qu’elles doivent voir que les gens du milieu environnemental sont d’accord pour nous permettre de faire face aux changements climatiques. Nous devons aussi acheminer nos produits vers les marchés. Je me demande simplement parfois si, dans ce pays... Nous avons des ressources naturelles comme nul autre pays, et pourtant nous ne trouvons pas le moyen d’acheminer nos produits vers les marchés, et nous pouvons le faire en réduisant les gaz à effet de serre.
Jason, je sais, comme vous, combien les questions fédérales-provinciales sont difficiles, mais notre pays a plus de possibilités que tout autre au monde en matière de ressources naturelles, sans compter la taille de notre pays et tout le reste. Nous devons trouver une solution qui tienne compte à la fois des changements climatiques et de la capacité d’acheminer nos ressources vers les marchés et nous devons faire ce qui s’impose pour nos enfants et nos petits-enfants. Voilà où je veux en venir.
Merci à tous pour cette discussion très animée. Je terminerai en disant que nous devons trouver un moyen de réunir toutes les parties et de trouver une solution.
Sur ce, nous allons suspendre la séance pendant deux minutes pour accueillir le deuxième groupe de témoins.
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Merci beaucoup. Monsieur le président, honorables membres du Comité, je vous remercie tous d’avoir invité la Coalition du budget vert à prendre la parole devant vous aujourd’hui.
La Coalition du budget vert est active depuis 1999. Elle est vraiment unique parce qu'elle réunit l’expertise de 20 des principales organisations environnementales du Canada, dont de nombreux groupes que vous connaissez bien, comme Canards Illimités, Conservation de la nature Canada, la SNPC et Nature Canada, qui représentent collectivement plus de 600 000 Canadiens des régions urbaines et rurales d’un océan à l’autre.
La Coalition du budget vert a pour mission de présenter une analyse des questions les plus pressantes concernant la durabilité de l’environnement au Canada et de formuler une série de recommandations annuelles consolidées au gouvernement fédéral sur les possibilités budgétaires et financières stratégiques. Nous travaillons sur un large éventail de questions, dont les changements climatiques, l’énergie, la conservation de la nature, la santé des Premières Nations et les questions relatives à l’eau douce et aux eaux usées.
Aujourd’hui, j’aimerais aborder deux points. J’aimerais parler, bien sûr, de la tarification du carbone, mais aussi des progrès importants que traduit le budget de 2018. Je me fais vraiment l’écho des messages qui figuraient dans nos recommandations pour le budget de 2018, que nous vous avons fait parvenir l’an dernier et dont nous avons discuté avec les hauts représentants de vos partis respectifs.
J’aimerais d'abord exprimer la vive reconnaissance de la Coalition du budget vert pour l’investissement de 1,3 milliard de dollars sur cinq ans prévu dans le budget de 2018 pour créer et gérer des aires protégées et protéger des espèces en péril. Cet investissement fédéral sans précédent pourrait changer la donne dans la conservation de la nature au Canada et pourrait aider le Canada à passer du statut de traînard à celui de chef de file dans la conservation des terres et des aires marines.
Nous apprécions également les autres mesures de financement prévues dans le budget de 2018, en particulier le milliard de dollars pour les lois environnementales, le nouveau financement pour les systèmes d’eau potable et de traitement des eaux usées à l'intention des Premières Nations, la protection des espèces de baleines, la mise en œuvre et l’application du système fédéral de tarification du carbone, et la science et la recherche.
La façon dont cet investissement historique de 1,3 milliard de dollars sera réparti déterminera si le Canada respecte son engagement de protéger au moins 17 % de notre paysage et 10 % de nos océans d’ici 2020, afin de dépasser considérablement cet objectif à long terme et de rétablir les espèces en péril. Dans l'esprit de ses recommandations antérieures, la Coalition encourage le gouvernement à attribuer la majeure partie de ce financement à des partenariats en appuyant la participation des gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones, ainsi que d’autres partenaires, notamment pour les parcs provinciaux et les aires protégées autochtones, et à réserver le reste du financement à l’expansion et à la gestion plus efficace des réseaux fédéraux d’aires protégées.
La Coalition et ses membres souhaitent vivement poursuivre le dialogue constructif que nous avons eu avec vous, avec vos collègues et avec les représentants du gouvernement afin de maximiser l’impact de cet important investissement fédéral.
Deuxièmement, en ce qui concerne la tarification du carbone, j’aimerais réitérer l’appui solide et de longue date de la Coalition du budget vert à la mise en oeuvre d’un prix efficace pour les émissions de gaz à effet de serre. Les changements climatiques représentent un risque majeur pour les Canadiens, pour la nature qui leur est chère et dans la protection de laquelle les gouvernements qui se sont succédé au fil des ans ont investi massivement. La tarification du carbone est un élément important de tout plan de lutte contre les changements climatiques, car elle applique le principe du pollueur-payeur et incite les entreprises et les particuliers à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, à se tourner vers des sources d’énergie plus propres et à contribuer à l’élimination progressive des combustibles fossiles. Nous sommes en faveur, à la fois, d’une tarification du carbone, de mesures protégeant les Canadiens financièrement vulnérables, et de mesures ciblées, transparentes et temporaires tenant compte des impératifs de la compétitivité.
En plus d’autres mesures gouvernementales solides, la recherche montre qu’un prix du carbone qui continuerait d’augmenter chaque année jusqu’en 2030 est nécessaire pour que le Canada atteigne ses objectifs en matière d’émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. Plus tôt nous prendrons des mesures concrètes et efficaces pour lutter contre les changements climatiques, plus elles seront efficaces et moins elles coûteront cher aux Canadiens. Appuyer la mise en œuvre d’un prix efficace sur le carbone dès maintenant est une mesure importante que vous serez fiers d'avoir prise quand vous y repenserez dans quelques années.
Pour conclure, j’aimerais vous remercier tous d’avoir invité la Coalition du budget vert à comparaître devant vous aujourd’hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci de m’avoir invité de nouveau.
Les sondages qui montrent que la majorité des Canadiens ne sont pas au fait ou n’ont jamais entendu parler de la taxe sur le carbone sont révélateurs de l’écart qui sépare ces derniers des élites largement bureaucratiques et universitaires partisanes de cette taxe. Depuis presque trois ans, les gouvernements et certaines autorités pro-taxe, par exemple la Commission de l’écofiscalité, tiennent les rênes de ce débat et offrent un financement et un support médiatique bien au-delà de tout ce que pourraient espérer pour eux-mêmes les groupes de pression à la défense de l’industrie fossile. Toutefois, malgré cet énorme avantage, l’opinion publique n’a pas bien compris ce qui est en jeu ni ne s’est ralliée à la cause.
Le principal argument économique à l’appui d’une taxe sur le carbone tient au fait qu’elle peut améliorer le régime fiscal. Cependant, plusieurs conditions doivent être rigoureusement respectées, notamment la neutralité en matière de recettes, ce qui signifie que chaque dollar recueilli au titre de la taxe sur le carbone doit être contrebalancé par une baisse équivalente de l’impôt sur le revenu ou des charges sociales. Ces promesses ont vite été oubliées, ce qui a montré qu’il ne s’agit là en fait que d’une source supplémentaire de recettes fiscales propre à attiser l’antagonisme de ceux que l’économie préoccupe. Parallèlement, les réductions d’émissions promises ne sont plus à la hauteur puisque les droits ne seront pas suffisants pour modifier les habitudes, une source de désillusion pour les environnementalistes — sauf certains d’entre eux. La taxe sur le carbone n’a pas rapproché ces deux groupes opposés, à la défense de l’environnement dans un cas et de l’économie dans l’autre et donc, ne s’est pas mérité le permis social requis pour la construction de pipelines. Enfin, l’élection aux États-Unis d’un gouvernement désintéressé par l’adoption de sa propre taxe sur le carbone signifie que nos entreprises auront inévitablement à faire face à des coûts de l’énergie plus élevés qui vont détériorer leur position concurrentielle, sans possibilité de réduction des émissions continentales, un exercice coûteux et futile dans l’ensemble.
Pour un pays commerçant comme le Canada, relever les coûts de la production intérieure sans taxer les importations en fonction de leur contenu en carbone pénalisera les producteurs nationaux. En effet, les émissions pourront effectivement diminuer au Canada, mais, dans l’éventualité où la production se déplacera tout simplement vers les pays où les normes sont moins élevées, la taxe canadienne n’aura aucun effet sur les changements climatiques. Pendant ce temps, les exportateurs se retrouveront désavantagés vis-à-vis des producteurs américains.
Sur le plan pratique, les partisans de la taxe n’ont pas rendu public le niveau de taxe permettant au Canada de respecter ses engagements en matière de changements climatiques. Les arguments en faveur de la taxe sur le carbone se sont révélés fallacieux. Ses tenants ont rarement discuté publiquement du niveau suffisamment élevé qui serait requis pour atteindre les cibles plus faibles d’émission, si c’est le but qui est réellement visé. Le taux actuel de 50 $ la tonne représente-t-il un plafond à long terme? Et dans l’affirmative, ils admettent ensuite que ce sont les avancées technologiques et la mise en place de réglementations qui feront le plus décroître les émissions, car le plafond de 50 $ modifiera très peu les comportements, compte tenu de l’inélasticité de la demande. Ou, encore, prévoit-on relever le plafond à 200 $ la tonne, niveau le plus susceptible, selon les économistes honnêtes, d’entraîner des changements sociétaux assez importants pour influer de façon notoire sur les cibles de réduction? Or, exprimer les choses de cette manière pose le risque de s’aliéner l’appui du public, ce qui explique pourquoi on le fait rarement. Les Canadiens peuvent habituellement faire la part des choses quand on ne s’adresse pas à eux de manière franche et directe.
Les politiciens les plus favorables à la taxe sur le carbone sont identifiés aux gouvernements de gauche, par exemple ceux de l’Ontario et de l’Alberta. L’enjeu s’est donc politisé, ce qui a nui à l’attrait potentiel de la taxe auprès de la population en général, soucieuse des changements climatiques, mais hostile à une taxe sur le carbone. Les partisans de la taxe ne se sont pas aventurés hors de la chambre de résonnance des sympathisants de gauche pour chercher à obtenir un soutien plus généralisé. Ils ont déclaré victoire en traitant leurs opposants de fossiles, relents d’une époque dépassée. Au lieu de cultiver un appui généralisé, les partisans de la taxe sur le carbone sont restés à l’abri d’une Chambre d’écho avec leurs partisans de gauche et ont déclaré victoire tout en diabolisant les opposants comme des fossiles à l’ombre d’une autre époque.
Sans soutien politique de toutes tendances pour assurer sa viabilité à long terme, la taxe risque d’être éliminée avec l’élection de ses opposants. La TPS montre d’ailleurs à quel point il est facile de gagner des élections en promettant de réduire ou d’éliminer une taxe impopulaire, même si elle est universellement acclamée par les universitaires et les bureaucrates. L’incapacité à rallier toutes les tendances politiques, une avenue nécessaire pour légitimer la taxe sur le carbone et la protéger des résultats d’élections, diminue son efficacité, la qualité censée représenter précisément son avantage premier. L’empressement à imposer une taxe sur le carbone avant de gagner le soutien adéquat de la population diminue son efficacité, parce que même une fois mise en place, sa viabilité sera mise en doute par la population qui ne consentira donc pas aux efforts requis pour changer ses habitudes de vie afin améliorer l’efficience énergétique en plus de réduire sa consommation.
La taxe sur le carbone est aussi impopulaire parce que les politiciens, atteints de myopie et assoiffés de recettes fiscales, ont refusé de la contrebalancer en réduisant d’autres taxes. Plus important, elle impose des coûts immédiats à la grande majorité de Canadiens qui utilisent toujours leur voiture pour se rendre au travail et chauffent encore leur maison grâce à l’énergie fossile, alors que les bénéfices ne se feront sentir que dans plusieurs décennies. Enfin, les gouvernements fédéral et albertain doivent être tenus responsables pour avoir manqué à leur promesse de mettre en place une taxe pouvant se mériter un permis social pour la construction de pipelines, le projet Kinder Morgan en constituant le dernier exemple.
Les hypothèses scientifiques à la base de la taxe sur le carbone présentent deux défauts majeurs. Tout d’abord, elles partent de l’idée qu’ajuster les prix est la meilleure façon d’influer sur les habitudes à long terme. Cette position fait abstraction du fait que le miracle du capitalisme ne tient pas dans l’allocation efficace des ressources grâce au système de prix — même si c’est certainement une de ses caractéristiques —, mais plutôt dans sa capacité inégalée jusqu’à maintenant à favoriser continuellement l’innovation et les changements technologiques.
Pour ralentir les changements climatiques, il faudra des technologies transformantes et non pas de petits ajustements opérés sur les prix relatifs par les gouvernements. Le fait que nos connaissances sur le fonctionnement de l’économie soient limitées dans ce domaine, portant essentiellement sur la modélisation du système de prix et non pas sur l’innovation, explique en partie notre scepticisme à l’égard de l’économie et nos efforts à comprendre l’innovation plutôt que les domaines limités et moins importants que l’économie estime comprendre.
Enfin, après avoir prétendu qu’ils détiennent la preuve établissant que la taxe sur le carbone constitue la manière la plus efficace d’atteindre les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’atténuer les changements climatiques — au moyen de la taxe sur le carbone ou d’un autre mécanisme —, les partisans de la taxe sur le carbone ont supposé qu’il s’agit du meilleur moyen d’améliorer la condition humaine. Pourtant, Bjorn Lomborg, environnementaliste sceptique d’un style unique, a réuni un groupe d’experts pour se pencher sur la question de savoir comment distribuer les ressources limitées afin d’en tirer le meilleur parti possible. La lutte aux changements climatiques arrive au 17e rang parmi 30 initiatives, après l’alimentation des enfants d’âge préscolaire, les immunisations accrues, la lutte contre la malaria, la hausse des rendements agricoles et les systèmes de détection améliorés pour les désastres naturels, comme les tsunamis et les tremblements de terre. Les changements climatiques arrivent au bas de la liste parce que leurs coûts économiques sont considérables alors que leurs bénéfices, prévus pour des décennies plus tard, sont incertains.
Nous avons de nombreux besoins pressants qui peuvent être résolus plus efficacement que les changements climatiques à l’aide des technologies existantes.
Merci.
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J'aimerais remercier le Comité de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. Je m'appelle Isabelle Turcotte et je suis analyste principale à l'Institut Pembina. Nous sommes un groupe de réflexion national non partisan qui préconise des politiques efficaces et solides pour appuyer la transition du Canada vers l'énergie propre, ce que nous faisons depuis plus de 30 ans.
Je me limiterai aujourd'hui à la partie 5 du projet de loi. Historiquement, le Canada a malheureusement toujours manqué à ses promesses en matière de climat. Nous nous sommes retirés de Kyoto et nous sommes en voie de rater notre objectif de Copenhague. Nous avons fait une autre promesse à Paris et, en collaboration, plus d'un an après notre retour de Paris, nous avons élaboré un nouveau plan pour tenir cette promesse. La commissaire à l'environnement et au développement durable du Canada a qualifié ce plan de « probablement l'un des meilleurs plans que nous ayons vus jusqu'à maintenant ».
C'est une excellente nouvelle pour les Canadiens qui, selon un récent sondage, veulent des mesures crédibles pour lutter contre les changements climatiques. Effectivement, ce sondage a révélé que la moitié des Canadiens n'envisageraient de voter que pour un parti déterminé à lutter contre les changements climatiques. Quatre-vingt-onze pour cent des Canadiens croient que nous avons une responsabilité morale de le faire pour les générations futures.
Soyons clairs au sujet de nos options. Il y a trois options stratégiques pour réduire la pollution par le carbone. Premièrement, il s'agit de tarifer le carbone, ce qui se traduira par des réductions des émissions fondées sur le marché en raison d'un signal du prix. Deuxièmement, il faut réglementer des mesures précises qui entraînent des réductions des émissions, par exemple, le nouveau règlement fédéral sur le méthane. Troisièmement, il y a le soutien financier et les subventions pour l'innovation et la mise en place de la technologie de réduction des émissions. Par exemple, il y a le Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone, ce qui aidera les provinces à tirer parti des investissements dans la croissance propre. Le plan climatique du Canada combine les trois options.
Selon l'économiste et lauréat du prix Nobel Joseph Stiglitz, une tarification du carbone bien conçue est un élément essentiel de toute stratégie de réduction efficace des émissions.
Voici quatre raisons pour tarifer la pollution par le carbone.
Premièrement, c'est la voie la moins coûteuse. Comme l'a mentionné mon collègue de la Commission de l'écofiscalité, la tarification du carbone sous-entend non seulement des coûts inférieurs à ceux d'autres approches stratégiques, mais le coût pour le PIB est faible en termes absolus. Deuxièmement, elle permet à l'industrie de choisir sa propre voie. Troisièmement, elle offre stabilité et prévisibilité. La tarification du carbone donne ce signal constant afin de promouvoir les investissements dont nous avons besoin aujourd'hui pour créer cette économie compétitive à faibles émissions de carbone. Quatrièmement, elle assure la transparence et l'équité. La tarification du carbone se veut un reflet du principe du pollueur-payeur et contribue à répartir équitablement les coûts et les avantages, à éviter des fardeaux disproportionnés sur les groupes vulnérables pour le recyclage des recettes. Comme on l'a dit plus tôt, seulement de 10 à 12 % des recettes provenant de la tarification du carbone sont nécessaires pour répondre aux préoccupations d'équités pour les 40 % de ménages les plus pauvres.
La tarification du carbone est en train de devenir la norme partout dans le monde et, du point de vue de la compétitivité économique, le Canada ne peut pas être laissé-pour-compte. Heureusement, en 2017, la tarification de la pollution par le carbone est devenue une politique économique dominante au Canada. Des régimes de tarification sont maintenant en place dans les quatre plus grandes provinces. Le même sondage que j'ai mentionné tout à l'heure a révélé que 78 % des Canadiens sont en faveur de la tarification du carbone.
Voici ce que nous savons des répercussions de la tarification du carbone dans ces provinces. En 2017, le Québec, l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique ont été les quatre provinces les plus performantes au niveau du PIB. Les données réfutent carrément l'idée fausse selon laquelle la tarification du carbone nuit à la compétitivité et à la croissance économiques. En Colombie-Britannique, la taxe sur le carbone a généré un avantage net pour les contribuables et réduit les impôts sur l'emploi, l'investissement et la croissance économique. La taxe sur le carbone en Colombie-Britannique n'a pas touché de façon disproportionnée les ménages à faible revenu. En fait, c'est plutôt le contraire, c'était progressif.
Le gouvernement fédéral va maintenant de l'avant pour s'assurer que la tarification du carbone est appliquée partout au Canada, mesure que nous appuyons d'ailleurs. Selon le gouvernement fédéral, une tarification pancanadienne du carbone réduirait la pollution par le carbone de 80 à 90 millions de tonnes d'ici 2022. Notre propre analyse à Pembina, à l'aide de notre simulateur de politique énergétique, qui est le premier outil à accès libre du Canada, montre que des réductions encore plus importantes sont possibles. Pour mettre en perspective ces 80 à 90 millions de tonnes, le Canada doit réduire ses émissions d'environ 215 millions de tonnes d'ici 2030. Cela ne peut se faire sans la tarification du carbone.
Pendant que nous sommes dans cette salle, des diplomates canadiens terminent une autre journée de négociations dans le cadre des consultations intersessions à Bonn, représentant le Canada, collaborant de bonne foi à la mise en œuvre de l'Accord de Paris. La tarification du carbone est l'un des moyens les plus directs dont dispose le gouvernement du Canada pour aider ses propres diplomates à faire le travail très difficile, mais important, de convaincre le reste du monde que nous sommes capables de respecter nos engagements en matière de climat.
Merci.
:
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir invité.
Je suis ici aujourd'hui à deux titres. Je suis le président de l'Institut pour l'IntelliProspérité de l'Université d'Ottawa, qui est l'un des principaux groupes de réflexion et instituts de recherche sur l'environnement économique au monde. Nous comptons sur plus de 100 des meilleurs chercheurs au monde dans le domaine de l'innovation et de la croissance propre. Nous venons d'obtenir la plus importante subvention de recherche du CRSH, qui nous permettra de passer six ans à travailler avec cet organisme pour essayer de déterminer comment stimuler l'innovation et la croissance propre dans l'ensemble de l'économie.
Deuxièmement, notre conseil de direction compte 30 PDG de divers secteurs de l'économie canadienne, mines, forêts, pétrole et gaz, banques et d'autres, qui partagent cette ambition.
Aujourd'hui, j'aimerais aborder deux points essentiels. Premièrement, pourquoi la tarification du carbone est-elle importante pour l'économie canadienne? Deuxièmement, pourquoi est-ce la façon la plus rentable de réduire les émissions? S'il me reste une minute, j'aimerais ajouter quelques mots au sujet d'un incitatif fiscal.
Permettez-moi de passer à mon premier point.
La tarification du carbone est une bonne idée non seulement pour l'environnement, mais aussi pour l'économie du Canada. Ne me croyez pas sur parole. Voici ce que dit une lettre adressée récemment au et aux premiers ministres des provinces et territoires par un groupe de PDG éminents de partout au Canada:
Bâtir une économie performante et à faibles émissions de carbone représente à la fois une occasion de croissance unique et une responsabilité environnementale cruciale pour le Canada...
Les principaux acteurs économiques mondiaux travaillent ardemment à la mise sur pied d'économies plus propres et plus innovantes, animés par la volonté de faire face à la concurrence dans un environnement commercial en évolution et dont le potentiel de retombées positives sur la croissance de l'ensemble de l'économie canadienne [y compris les secteurs des ressources et de la fabrication]...
... avant toute chose, la tarification du carbone, afin de refléter les coûts environnementaux réels, est un outil clé pour réduire les émissions, stimuler l'innovation et favoriser l'efficacité énergétique...
... les fonds peuvent être utilisés pour se rapprocher de nos objectifs en matière de climat et de compétitivité...
[La tarification du carbone constitue un élément essentiel de] l'alliance de [...] politiques (mesures incitatives, infrastructures et investissements) [nécessaires]... pour encourager les innovations vertes, qui sont la clé des solutions aux défis environnementaux et du maintien de la compétitivité et de l'emploi canadiens dans un monde sobre en carbone.
Cela nous vient de radicaux environnementaux comme John Manley; des dirigeants d'associations des minières, des forêts et de l'aluminium; de Dominic Barton; de même que de PDG représentant plus de 300 milliards de dollars en revenus et un million d'emplois partout au Canada.
Dans mes documents, vous trouverez des citations de chacun d'entre eux qui expliquent pourquoi ils estiment que la tarification du carbone est essentielle à l'innovation et à la compétitivité propres du Canada. C'est la même raison pour laquelle plus de 150 entreprises ont adhéré à la Coalition pour le leadership en matière de tarification du carbone, notamment les cinq grandes banques et les trois grandes sociétés pétrolières du Canada. Voilà pourquoi 7 des 10 plus grandes économies du monde tarifient maintenant le carbone, dont la Chine, qui vient de créer le plus grand marché de tarification du carbone au monde, et 10 États américains, qui représentent 30 % du PIB.
La tarification du carbone n'est pas une idée de gauche ou de droite. Les trois premiers systèmes de tarification du carbone au Canada ont tous été mis en place par des gouvernements de centre-droit. En Colombie-Britannique, en Alberta et au Québec, des dirigeants conservateurs de partout dans le monde, depuis Arnold Schwarzenegger jusqu'à Preston Manning en passant par Angela Merkel, en ont fait la promotion. C'est tout simplement une bonne idée.
L'un des principaux avantages est de stimuler l'innovation propre, qui devient un facteur essentiel de la compétitivité mondiale des années qui viennent. Vous pouvez déjà le constater, à commencer par les énormes progrès technologiques dans le domaine de l'énergie propre et des véhicules électriques, qui font baisser les coûts et monter les marchés. Cette tendance va s'étendre à l'ensemble de l'économie pour transformer les secteurs des ressources, de l'agriculture et de la fabrication afin de créer des possibilités économiques mondiales estimées à plus de 23 000 milliards de dollars par la Banque mondiale, y compris les secteurs des ressources et de la fabrication d'ici 2030.
Nous venons de terminer l'étude la plus approfondie jamais réalisée au Canada sur la façon de stimuler l'innovation propre. Voici le remède à l'insomnie. Il s'agit de la version abrégée qui a été diffusée par un groupe de 28 PDG le mois dernier dans le cadre de GLOBE. Dans la version abrégée, il est dit que pour permettre au secteur privé de laisser libre cours à l'innovation propre, il faut un mélange de politiques intelligentes, d'incitatifs, d'infrastructures et d'investissements, mais que l'élément le plus important de tous est la tarification du carbone, parce qu'elle envoie un signal qui a des répercussions sur l'ensemble de l'économie.
Deuxièmement, la tarification du carbone est le moyen le plus rentable de réduire les émissions. Vous avez entendu plusieurs personnes en parler aujourd'hui, alors je n'en dirai pas plus, sinon que presque toutes les économies crédibles appuient cette idée, alors qu'il n'y a pas grand-chose sur quoi elles s'entendent, si je peux me permettre de le préciser. Il y a des tonnes de preuves et d'expériences à l'appui.
Il suffit de regarder ce qui se passe en Colombie-Britannique, dans notre propre cour. La province a instauré en 2008 une taxe sur le carbone qui a augmenté pendant cinq ans comme celle-ci. Depuis, la Colombie-Britannique a réduit ses émissions de GES de 7 % de plus par rapport au reste du Canada et son PIB a été le double de celui du reste du pays au cours de cette période.
Les données probantes n'appuient pas l'affirmation selon laquelle la tarification du carbone expliquait le meilleur rendement économique, mais cela n'a certainement pas nui à l'économie. C'est la même chose en Europe. Si vous regardez, sur une période de huit ans, depuis la mise en place de son système d'échange des quotas d'émissions — il s'agit d'une étude de l'OCDE qui vient de sortir comparant les entreprises visées par le prix de l'Europe à celles qui ne le sont pas —, celles qui sont visées par le système ont réduit leurs émissions de plus de 11 % et elles ont surpassé les autres entreprises sur le plan des revenus, de la croissance, de l'emploi, des investissements et de l'innovation.
Soit dit en passant, le système n'est pas parfait. Le Québec et l'Ontario ont fait mieux.
Cela s'explique en partie par le fait que les recettes tirées de la tarification peuvent être réinvesties dans l'économie. Elles peuvent être réinvesties dans des réductions d'impôt, comme l'a fait la Colombie-Britannique — les contribuables ont gagné plus de 1 milliard de dollars grâce au réinvestissement — ou elles peuvent être réinvesties dans des incitatifs à l'efficacité énergétique, des véhicules propres ou des entreprises pour qu'elles investissent dans des technologies propres, comme l'Ontario et l'Alberta ont fait. C'est l'une des raisons pour lesquelles les quatre provinces qui ont eu le meilleur rendement économique au pays l'an dernier étaient les quatre provinces qui appliquent une tarification du carbone.
Le dernier point, pour être bref, étant donné que nous sommes au Comité des finances, est que les PDG de notre groupe de direction sont très préoccupés par la compétitivité, et je suis sûr que vous l'êtes tous aussi, surtout à la suite des réductions d'impôt aux États-Unis. Lorsque nous avons publié notre rapport « Innovation propre » le mois dernier, l'une des recommandations formulées était — en plus d'aller de l'avant avec la tarification du carbone, qui est essentielle à l'innovation — de l'assortir d'incitatifs fiscaux, dont l'un est une déduction pour amortissement accéléré dans le cas de toutes les technologies propres. Aux États-Unis, on a accordé une déduction pour amortissement accéléré pour toutes les technologies, même les technologies sales. Le fait de faire la même chose seulement pour les technologies propres enverrait un signal qui réduirait les émissions, augmenterait les investissements au Canada dans les technologies de pointe et qui serait bon pour réduire les coûts pour les entreprises et la compétitivité. Je vous le recommande.
En conclusion, notre pays a toujours fait preuve de clairvoyance en matière de politiques d'avant-garde pour préparer le Canada à d'importants changements économiques. Nous l'avons fait il y a 30 ans quand nous nous sommes rendu compte que le monde se dirigeait vers une libéralisation des échanges. Même si notre pays a été bâti sur le protectionnisme économique pendant un siècle, le gouvernement conservateur de l'époque a devancé le changement mondial en concluant un accord de libre-échange. Soit dit en passant, il a également signé la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. C'est le même gouvernement qui a fait les deux.
Nous en sommes au même point maintenant. Le monde se dirige vers une économie à faibles émissions de carbone, un changement économique fondamental. Nous avons besoin du même genre de leadership politique clairvoyant de la part de nos gouvernements aujourd'hui. Les gens considéreront ce changement de la même façon non partisane que nous considérons l'Accord de libre-échange comme une décision judicieuse pour l'économie.
Merci.
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Merci à tous nos témoins d'être venus aujourd'hui.
Je pense que nous avons entendu de la part des deux derniers groupes de témoins qu'il y a un consensus écrasant — à l'exception d'un témoin, que nous ne nommerons pas — selon lequel les faits appuient la tarification du carbone. Nous pouvons ne pas être d'accord sur le type de prix que cela entraînera, sur le processus concernant ce prix, sur la question de savoir s'il devrait être sans incidence sur les recettes, mais les faits indiquent effectivement que la tarification du carbone mènera à une réduction des émissions de GES.
Quand nous consultons n'importe quel économiste ou environnementaliste, nous savons aussi que dans les faits, partout dans le monde, la terre se réchauffe. Au cours du prochain siècle, la température est censée augmenter de 3 à 5,3 degrés Celsius, soit la plus forte augmentation que nous n'ayons jamais connue dans l'histoire de la planète. C'est un défi. Comme Stewart l'a dit, le Canada doit être avant-gardiste. Il doit s'attaquer de front à ce défi.
Vous avez mentionné que, partout dans le monde, les économies qui ont adopté la tarification du carbone ont été plus fortes et ont connu une bonne croissance économique. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, même en dehors du contexte canadien, pour que nous puissions voir ce que d'autres pays ont fait, une tarification du carbone, et la croissance correspondante du PIB?
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Merci à tous nos témoins.
J'espère que le député Grewal peut compter sur l'appui de son propre père dans sa propre circonscription.
Mis à part la politique, je crois, monsieur Elgie, que vous avez souligné qu'aux États-Unis, on a créé l'équivalent d'une déduction pour amortissement qui peut être utilisée en un an pour n'importe quel type d'équipement, y compris, comme vous l'avez dit, une centrale au charbon. Je pense que cela illustre bien l'exemple voulant que si nous faisions quelque chose de semblable ici, seulement pour les technologies propres, beaucoup de gens diraient qu'un grand nombre de ces technologies propres sont beaucoup plus intermittentes qu'une centrale au charbon. Je ne plaide pas en faveur du charbon, mais je dis que c'est un défi au plan de la compétitivité, parce que le charbon peut être fabriqué à très faible coût, comparativement aux sources d'énergie intermittentes.
Je pense que cela soulève la question plus large de la compétitivité et je pense que nous devons aussi discuter des fuites de carbone.
Monsieur le président, j'aimerais poser une question à chacun des témoins. M. Elgie a parlé un peu dans son exposé, tout comme M. Cross... Quelle est votre définition des fuites de carbone et en ce qui concerne le projet de loi ? J'aimerais savoir ce que vous pensez de ces deux choses — votre définition des fuites de carbone.
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Étant le père de jumeaux de cinq ans, je suis un spécialiste des fuites de toutes sortes. Je vais parler du carbone.
Ce que vous ne voulez pas, c'est ce à quoi mes collègues ont fait allusion, c'est-à-dire que les entreprises traversent tout simplement la frontière et continuent d'émettre les mêmes émissions qu'elles auraient émises dans votre pays, tout en conservant tous les revenus et tous les emplois là-bas. C'est l'option où tout le monde perd.
Ce que vous voulez, cependant, c'est que vos entreprises restent ici et qu'elles soient encouragées à faire partie des chefs de file de la production à faibles émissions de carbone, parce qu'elles seront alors prêtes à soutenir la concurrence dans le monde de demain.
Vous voulez avoir les deux et c'est pourquoi vous voulez faciliter la transition économique. Ce serait la même chose que ce que nous avons fait dans le cas de la transition économique à l'égard de l'Accord de libre-échange ici pendant quelques années, lorsque vous êtes passés d'une économie fermée à une économie ouverte. Des choses comme la tarification fondée sur le rendement, des choses comme la déduction pour amortissement accéléré et des choses comme le recyclage des recettes aident les entreprises à faire la transition vers une compétitivité à faibles émissions de carbone sans avoir à déménager pour le faire.
Il ne devrait pas s'agir d'une solution à long terme. À long terme, c'est le marché libre qui déterminera cela, mais notre pays a soutenu les entreprises pendant les transitions économiques depuis 100 ans et nous devrions faire la même chose ici.
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Je veux comprendre ce que Mme Turcotte a dit précisément au Canada, parce que le projet de loi , essentiellement, enlève la capacité d'une province. Prenons l'exemple de la Saskatchewan, qui s'est bâtie sur la concurrence de ses voisins. Il y a aussi les territoires du Nord, comme celui de M. McLeod, où le coût de la vie et le coût pour faire des affaires sont beaucoup plus élevés, de sorte que l'imposition d'un cadre centralisé pourrait fondamentalement isoler le Canada sur le plan intergouvernemental, entre les provinces et les territoires. En réalité — les États-Unis étant à un rythme différent —, je pense que nous devons en discuter davantage maintenant.
Voici ce que le gouvernement provincial néo-démocrate de la Colombie-Britannique qualifie de fuite de carbone dans son budget de 2018:
[...] des industries qui font concurrence à l'industrie dans des pays où le prix du carbone est faible ou nul. Si [...] l'industrie perd des parts de marché au profit de concurrents plus polluants, ce que l'on appelle les fuites de carbone, cela aura des répercussions sur notre économie et ne réduira pas les émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Bien sûr, il s'agit d'une taxe sur le carbone déjà imposée en Colombie-Britannique. Je dois dire que ma dernière citation porte sur les émissions de gaz à effet de serre. Elle vient donc de la Colombie-Britannique, qui a déjà instauré une taxe sur le carbone.
Nous avons déjà un prix plus bas qui a été établi pour la première fois par l'ancien premier ministre Campbell et son gouvernement, où l'industrie du ciment a été durement touchée, a continué de recevoir des subventions et a lutté pour conserver sa part de marché.
Je crois que le NPD de la Colombie-Britannique est également très préoccupé par l'une de ses industries préférées, les pâtes et papiers, et vous savez que nous avons tous nos industries préférées. Je pense que l'augmentation du coût de la taxe sur le carbone, établie dans le projet de loi — depuis le 1er avril, les prix de l'essence ont augmenté en Colombie-Britannique du fait qu'ils fluctuent de 5 $ par année — ne fera qu'empirer.
Comme parlementaires, quelle obligation avons-nous de veiller à ce que, dans les secteurs où de nombreuses familles sont touchées et où les petites et moyennes entreprises seront touchées, nous soyons en mesure d'endiguer le problème des fuites de carbone? Je pose la question à n'importe qui.
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Le premier point, je pense, est qu'il s'agit d'un coût réel, et qu'une partie de la main invisible d'Adam Smith veut que les marchés libres fonctionnent lorsqu'ils imposent des coûts réels. Si nous avons trop de pollution dans le monde, c'est que les marchés privés ne saisissent pas naturellement ces coûts et que c'est au gouvernement qu'il revient d'imposer ce coût collectif, afin que les marchés fonctionnent plus efficacement, pour des raisons non seulement environnementales, mais encore d'efficacité économique.
J'ai constaté qu'aucun de ceux qui sont contre la tarification du carbone n'a proposé un moyen plus rentable de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ils disent qu'ils n'aiment pas le coût d'une taxe sur le carbone, mais je n'en ai jamais entendu un seul proposer un moyen plus rentable de réduire les émissions. C'est à se demander s'ils croient vraiment à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce débat serait intéressant.
Pour ce qui est de savoir dans quelle mesure le public le comprend, il y a probablement du vrai là-dedans. Il y a sans doute bien des choses que tout le monde ne comprend pas en gestion d'une économie. Lorsque le gouverneur de la Banque du Canada modifie le taux d'escompte, je ne suis pas certain que tout le monde, moi-même compris, comprend toutes ses raisons, mais c'est en partie pour cela que le gouvernement doit faire preuve de leadership.
Je pense que le citoyen moyen comprend que le monde change, lorsqu'il voit de plus en plus de véhicules à haut kilométrage et de voitures électriques sur les routes, qu'il sait, en ouvrant son interrupteur, que l'électricité provient de sources propres, et qu'il voit de plus en plus de bâtiments éconergétiques. Il voit que le monde se dirige vers une économie plus propre, plus innovatrice et sobre en carbone, et que les choses fonctionnent encore bien, que nous pouvons faire ce changement, et il comprend que nous devons accélérer le changement. Si nous élisons des gouvernements, c'est en partie pour les aider à voir comment s'y prendre.
Ne serait-il pas formidable que chacun comprenne tous les aspects économiques d'une tarification du carbone? Bien sûr. Et si nous avons des gouvernements, c'est pour aider à prendre ces décisions.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous nos témoins d'aujourd'hui.
Les changements climatiques sont une réalité dans ma circonscription. Je représente les Territoires du Nord-Ouest. Nous en voyons certainement les effets. Hier, le Mackenzie a débâclé, et la glace a été emportée. Bien de gens m'ont contacté et m'ont fait part de leurs inquiétudes au sujet de la minceur de la glace. La glace mesurait environ un pied et demi. Quand j'étais enfant, elle avait de cinq à sept pieds d'épaisseur. La débâcle du Mackenzie était spectaculaire. Il y avait un bruit d'enfer, et plein de glace qui remontait la berge. On ne voit plus cela. J'ai survolé la mer de Beaufort cet hiver, en janvier, et j'ai vu des segments où il n'y avait pas de glace. Elle était encore ouverte. C'est du jamais vu. Les habitants des collectivités ne sont pas capables d'aller chasser. Jadis ils pouvaient faire 40 milles sur l'océan. Aujourd'hui, ils en font à peine cinq.
Nous commençons vraiment à voir toutes sortes de répercussions. Beaucoup demandent: « Que pouvons-nous faire? » La tarification de la pollution est un domaine sur lequel nous pouvons nous concentrer, mais il faut plus. Si nous voulons avoir un impact, nous devons faire beaucoup de choses en même temps.
Quelqu'un a mentionné aujourd'hui que le changement passera par une bonne planification. Bien des gouvernements autochtones que je représente — il y en a sept dans ma circonscription — parlent d'aménagement du territoire. Chacun d'entre eux veut faire de l'aménagement du territoire, avec un plan de développement des possibilités économiques ainsi que, dans le même plan, des aires de conservation.
Ma question s'adresse à la Coalition du budget vert. Je sais que vous travaillez avec des organisations qui s'intéressent aux aires protégées, mais que vous faites également beaucoup de planification pour la protection de nos acquis. Pourriez-vous nous dire un mot de l'importance d'un bon plan, surtout d'un plan d'aménagement du territoire, qui nous permettrait de planifier la conservation, de planifier l'économie, de protéger nos lieux historiques, de tenir compte de ce que les gouvernements autochtones nous disent dans leurs aires sacrées, et de faire en sorte que tout le monde donne son accord plutôt que toujours s'opposer sur ces questions?