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Bonjour, monsieur le président, et merci.
Je salue aussi les membres du comité. La première sous-gouverneure Wilkins et moi-même sommes ravis d'être de retour pour présenter le Rapport sur la politique monétaire que la Banque du Canada a publié la semaine dernière.
Je tiens à saluer tout particulièrement les nouveaux membres du comité. Je pense que presque tout le monde est nouveau ici. Je me réjouis à la perspective de vous rencontrer deux fois par an pour discuter de l'économie canadienne et de notre politique monétaire.
Douze mois se sont écoulés depuis que Carolyn et moi avons participé à l'une de vos réunions. Les économies canadienne et mondiale ont vraiment connu une année très mouvementée. Permettez-moi de faire rapidement le point sur la situation.
Comme vous le savez, l'économie canadienne fait face à un choc majeur des termes de l'échange, provoqué par une chute marquée des prix du pétrole et d'autres produits de base qui s'est amorcée à la fin de 2014.
[Français]
Comme le Canada est un important producteur de ressources — surtout de pétrole —, ce choc a été un énorme coup dur. II a déclenché un processus d'ajustement difficile qui a fortement perturbé beaucoup de Canadiens. Les investissements et la production dans le secteur des ressources se sont effondrés, la diminution du revenu national a provoqué une réduction des dépenses des ménages et le secteur des ressources a subi d'importantes pertes d'emploi. Ces facteurs négatifs l'ont emporté nettement sur les avantages découlant de la baisse des coûts de l'énergie pour les ménages et les entreprises.
Du point de vue de la politique monétaire, le choc a fait peser une double menace sur notre économie l'an dernier. Tout d'abord, il représentait clairement un risque à la baisse lié à notre capacité d'atteindre la cible d'inflation. De plus, en réduisant le revenu national, il a aggravé la vulnérabilité liée aux déséquilibres dans le secteur des ménages, comme le montre le ratio élevé de la dette par rapport aux aux revenus. Pour faire face à ces deux menaces et faciliter les ajustements économiques nécessaires, nous avons abaissé le taux directeur à deux reprises l'an dernier, pour le porter à 0,5 %.
[Traduction]
Nous avions bien conscience que cet abaissement pouvait accentuer légèrement la vulnérabilité liée aux déséquilibres dans le secteur des ménages, mais les baisses du taux directeur l'an dernier avaient principalement pour objectif d'amortir la chute des revenus et de l'emploi causée par le fléchissement des prix des ressources.
Une autre conséquence naturelle du choc touchant les termes de l'échange a été la baisse du taux de change du dollar canadien. Notons que cette situation n'est pas propre au Canada. Un grand nombre de pays tributaires des ressources ont en effet enregistré une dépréciation semblable de leur monnaie.
Tant les modifications du taux directeur que la dépréciation de la monnaie ont contribué à favoriser les ajustements économiques, qui ont évolué selon deux axes. Tandis que la faiblesse de l'activité s'est concentrée dans le secteur des ressources, l'économie hors ressources a continué de progresser à un rythme modéré. Dans ces conditions, les exportations hors ressources gagnent clairement en vigueur.
À l'approche de la nouvelle année, l'anxiété était vraiment palpable chez de nombreux participants aux marchés financiers. Les perspectives de croissance de l'économie mondiale subissaient une autre révision à la baisse, et les prix des produits de base touchaient de nouveaux creux. À la Banque, de nouvelles données indiquaient que les entreprises du secteur canadien de l'énergie réduiraient leurs investissements encore plus qu'on le croyait précédemment. Dans ce contexte, nous avons dit qu'au début de nos délibérations entourant la décision relative au taux directeur en janvier, nous penchions pour un nouvel assouplissement monétaire, mais que nous devions attendre de connaître les détails du plan budgétaire du gouvernement.
Depuis janvier, plusieurs évolutions négatives se sont produites.
Premièrement, les perspectives de croissance de l'économie mondiale pour 2016 et 2017 ont encore une fois été revues à la baisse. Elles englobent l'économie américaine, où les nouveaux profils d'évolution de l'investissement et du logement se traduisent par une composition de la demande moins favorable aux exportations canadiennes.
Deuxièmement, les intentions d'investissement dans le secteur canadien de l'énergie ont de nouveau fait l'objet d'une révision à la baisse. II est vrai que les prix du pétrole ont nettement remonté par rapport aux creux extrêmes qu'ils avaient touchés. Toutefois, les entreprises canadiennes nous ont signalé que même si les prix continuaient d'avoisiner leurs niveaux actuels, elles procéderaient à de nouvelles réductions importantes supérieures à celles que nous avions prévues en janvier. Par convention, lors de l'établissement de notre projection, nous tenons compte du prix moyen du pétrole affiché quelques semaines auparavant, ce qui nous permet de faire abstraction de la variabilité des marchés. C'est pourquoi nos hypothèses relatives aux prix du baril de pétrole dépassent seulement de deux à trois dollars celles de janvier.
Troisièmement, le dollar canadien a aussi remonté par rapport aux creux qu'il avait enregistrés. Dans sa projection actuelle, la Banque postule que le dollar canadien se situera à 76 ¢ américains, soit 4 ¢ de plus qu'en janvier. Même si de nombreux facteurs sont à l'oeuvre, dont les prix du pétrole, l'essentiel de la hausse semble attribuable à l'évolution des attentes à l'égard de la politique monétaire aux États-Unis et au Canada. Le niveau plus élevé postulé pour le dollar canadien dans notre projection se traduit par un abaissement du profil d'évolution des exportations hors ressources, tout comme l'affaiblissement de la demande émanant des États-Unis et d'ailleurs.
Lorsque le Conseil de direction de la Banque a entamé ses délibérations entourant l'annonce du taux directeur ce mois-ci, nous avons constaté que ces trois évolutions auraient dû donner lieu à un profil de croissance prévu pour l'économie canadienne plus bas qu'en janvier. Ce constat peut sembler paradoxal compte tenu de la série d'indicateurs économiques mensuels qui ont démarré l'année en force. Cela dit, une partie de cette vigueur s'explique par un effet de rattrapage qui fait suite à la faiblesse temporaire dans certains domaines au quatrième trimestre; une autre partie est liée aux facteurs temporaires qui se dissiperont au deuxième trimestre.
Le budget fédéral est un autre nouveau facteur que nous avons dû prendre en considération. Pour les besoins du Rapport sur la politique monétaire et de l'annonce du taux directeur, nous avons examiné minutieusement les projections du ministère des Finances sur l'effet multiplicateur du choc budgétaire. D'après notre analyse, ces projections sont raisonnables dans la mesure où elles s'inscrivent dans la fourchette des estimations que l'on retrouve dans la littérature économique et dans les travaux de recherches du personnel de la Banque. Une grande incertitude entoure évidemment les effets des mesures budgétaires sur la croissance à long terme, surtout parce qu'ils devront se répercuter sur le secteur des ménages. Dans notre rapport, nous avons rendu compte du risque que les ménages puissent être plus portés à faire des économies que le laisserait supposer l'expérience passée.
[Français]
Compte tenu de tous ces changements, le profil de croissance projeté est généralement plus élevé qu'il ne l'était en janvier. Nous prévoyons maintenant une croissance réelle du PIB de 1,7 % cette année, de 2,3 % l'an prochain et de 2 % en 2018.
Selon nos prévisions, les capacités excédentaires devraient se résorber un peu plus tôt qu'envisagé en janvier, soit au second semestre de 2017. Cela dit, le moment exact de cette résorption est encore plus incertain que d'habitude. Il est toujours difficile d'estimer la croissance potentielle d'une économie. Cette difficulté s'aggrave quand l'économie passe par un ajustement structurel majeur, comme c'est le cas actuellement au Canada. Nous savons que la chute des investissements dans le secteur des produits de base ralentira le taux d'augmentation de la production potentielle de l'économie. Nous avons abaissé notre estimation de la croissance de la production potentielle à court terme de 1,8 % à 1,5 %.
[Traduction]
Pour ce qui est du mandat principal de la Banque, l'inflation mesurée par l'IPC global se situe actuellement en deçà de la cible de 2 %. Les pressions à la hausse sur les prix des importations découlant de la dépréciation de la monnaie sont plus que compensées par l'effet des prix plus bas des produits énergétiques de consommation et les pressions à la baisse engendrées par les capacités excédentaires au sein de l'économie. Au fil de la diminution de ces facteurs, l'inflation mesurée par l'IPC global devrait rattraper l'inflation mesurée par l'indice de référence et rester de façon durable à la cible au cours du second semestre de l'année.
En résumé, la situation actuelle est la suivante: les données économiques récentes ont été encourageantes dans l'ensemble, mais ont varié aussi passablement. II est toujours possible que l'économie mondiale déçoive encore, l'ajustement complexe face à la détérioration des termes de l'échange bridera la croissance au Canada pendant une bonne partie de notre période de prévision, et la réaction des ménages devant les mesures budgétaires du gouvernement fédéral exigera une surveillance étroite. Nous n'avons pas encore de preuve tangible de la hausse des investissements ni de la création soutenue d'entreprises, quelques-uns des ingrédients nécessaires au retour à la croissance naturelle et autosuffisante, assortie d'une inflation qui se maintient à la cible de façon durable.
Monsieur le président, Carolyn et moi-même nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions
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De toute évidence, depuis toujours, on constate des variations de la croissance d'un trimestre à l'autre. Pour être en mesure d'élaborer une bonne politique monétaire, il faut examiner les facteurs associés aux tendances sous-jacentes. L'un de ces facteurs semble influer sur les fluctuations qu'on observe d'un trimestre à l'autre. C'est ce que vous avez constaté.
Plus précisément, dans ce cas précis, nous constatons diverses choses. Je n'ai pas l'intention de les expliquer toutes en détail, mais il y a eu des fluctuations du côté des stocks au quatrième et au premier trimestres, qui auront une incidence sur les tendances trimestrielles à compter du deuxième trimestre. Nous constatons aussi l'existence d'autres facteurs dans le secteur de l'automobile et le secteur de la production automobile. De toute évidence, il semble qu'ils ne sont pas viables.
Je pense que les exportations constituent le troisième facteur. Elles ont connu un très bon départ cette année, et si on compare la situation réelle aux attentes, étant donné que nous avons fait des prévisions en ce qui concerne la demande étrangère, plus particulièrement la demande provenant des États-Unis, on se rend compte que les exportations sont probablement un peu plus fortes que ce à quoi nous nous attendions. Donc, nous avons adopté une approche prudente en faisant nos prévisions, et nous pensons qu'il y aura un retour à la normale au cours des prochains trimestres. Bien entendu, ces prévisions sont peut-être trop prudentes. Les données relatives à l'exportation ont révélé une certaine instabilité. Les dernières données dont nous avons pris connaissance n'étaient pas extraordinaires, mais je pense que ce qui importe, c'est le fait que nous essayons de trouver la meilleure tendance trimestrielle, en nous fondant sur les facteurs sous-jacents que nous constatons. Du côté des exportations, nous avons déterminé qu'il s'agit désormais d'un risque à la hausse, car nous avons été prudents lorsque nous avons fait nos prévisions.
Monsieur le gouverneur, madame la première sous-gouverneure, je suis très heureuse de vous rencontrer et je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Je vais me concentrer sur un aspect bien précis de votre analyse, car je souhaite déterminer si, oui ou non, les mesures proposées par le gouvernement dans le budget stimuleront la croissance au pays. Dans votre rapport, vous indiquez, à juste titre d'ailleurs, que le gouvernement a prévu des investissements d'environ 11 milliards de dollars dans l'infrastructure et d'environ 12 milliards de dollars dans les mesures destinées aux ménages, et vous y mentionnez qu'à votre avis, les effets de ces investissements se feront sentir en 2016. Cet aspect est l'un des fondements de votre analyse, car vous indiquez que ces investissements vont aider les gens et faire contrepoids aux facteurs négatifs qui affectent l'économie. Par contre, vous avez aussi fait deux mises en garde très importantes, dont l'une qui est liée aux ménages; vous indiquez ne pas savoir avec certitude si ceux-ci feront ou non des dépenses.
Dans la section suivante, vous indiquez aussi que la dette des ménages a augmenté au Canada parce que le nombre d'hypothèques augmente en Ontario et en Colombie-Britannique. Bien entendu, nous constatons des effets négatifs sur les marchés immobiliers dans les provinces qui produisent du pétrole. En tenant compte de tous ces facteurs, j'aimerais que vous alliez un peu plus loin et que vous nous donniez plus de détails; par exemple, puisque nous savons que la dette des ménages est très élevée, pensez-vous que le fait de donner plus d'argent aux familles du pays motivera nécessairement celles-ci à faire des dépenses? Les gens ont tendance à économiser ou à rembourser leurs dettes, car ils se demandent si des emplois seront créés. J'aimerais ouvrir une parenthèse. C'est très difficile de voir que nos cousins, nos frères, nos soeurs et nos amis perdent leur emploi un peu partout au pays et de constater qu'il y a beaucoup de discussions entourant le secteur pétrolier. Vous avez mentionné qu'il s'agit d'un changement structuré au sein de notre économie. Ces gens le constatent, et ils sont très inquiets, car ils ne savent pas ce que l'avenir leur réserve.
Donc, pouvez-vous me dire comment le conseil s'y est pris pour finalement décider que les gens dépenseront cet argent au lieu de l'économiser? Avant d'entendre votre réponse, je tiens à dire une dernière chose: l'allégement fiscal que le gouvernement a proposé représente, pour un particulier, 90 ¢ par jour. Je ne vois pas comment cette somme pourrait générer une forte croissance économique et contrebalancer les pertes observées au pays.
Je vous laisse répondre à la question.
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J'aimerais préciser certains faits avant de laisser la parole à Carolyn.
Il y a un an, nous avons publié une recherche dont l'objectif était d'analyser les marchés immobiliers au Canada et dans le monde, notamment ceux qui avaient connu une période de surévaluation suivie d'un ajustement. Nous cherchions à comprendre les éléments fondamentaux de la question.
À l'époque, un certain nombre d'études étaient arrivées à des conclusions assez variées sur la surévaluation du marché canadien. Étant donné que celui-ci varie considérablement d'une région à l'autre, on se demandait même s'il était juste de conclure à une telle chose.
Selon nous, il est très risqué de se fier à ce genre de statistiques, parce que les expériences varient tellement au pays et que les modèles ne tiennent pas compte de certains éléments qui induisent d'importantes différences d'un marché à l'autre.
Ceci étant dit, je vais laisser la parole à Carolyn, qui fera le point sur l'évolution et l'état actuel du marché de l'immobilier.
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Nous continuons à surveiller de très près le marché de l'immobilier en raison de son incidence potentielle sur la stabilité financière. L'an dernier, le fait que nous soyons passés d'une économie axée sur l'énergie à une économie qui n'est pas fondée sur les produits primaires a eu les conséquences auxquelles on pouvait s'attendre. Vous avez souligné avec raison que le marché de l'immobilier a ralenti considérablement là où l'on dépend davantage de l'énergie, notamment en Alberta, mais aussi dans d'autres provinces. C'est ce à quoi il faut s'attendre lorsque les gens perdent leur emploi et déménagent dans une autre province ou retournent simplement là où ils travaillaient avant de déménager en Alberta. Il s'agit d'une situation courante et nous constatons un ralentissement dans cette région.
On observe deux autres phénomènes ailleurs au pays. Dans les grandes villes comme Vancouver et la région du Grand Toronto, les marchés sont très solides et nous les surveillons de près. La force de ces marchés s'explique par la dynamique de l'offre et de la demande qui perdure depuis des années, la migration interprovinciale, la croissance de l'emploi et le fait que l'économie dans ces régions se porte relativement mieux que dans celles tributaires de l'énergie.
Pour évaluer le marché dans un tel contexte, il faut vraiment prendre en considération la dynamique de l'offre et de la demande. Les contraintes de l'offre à Vancouver et à Toronto sont bien connues. Elles s'expliquent par la géographie, les permis et par le fait que ces villes sont des endroits attirants où vivre et travailler.
Assurément, il s'agit de facteurs dont nous tenons compte du point de vue de la politique monétaire. Par contre, une politique monétaire est un outil qui manque de finesse pour les choses sur lesquelles nous axons actuellement nos efforts. Il existe peut-être d'autres outils.
Comme vous le savez sans doute, certaines mesures gouvernementales ont été mises en oeuvre récemment et nous allons les suivre de près.
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Monsieur le gouverneur, madame Wilkins, je vous souhaite la bienvenue.
Durant la dernière législature, nous avons eu de nombreux échanges intéressants concernant les outils dont la banque devrait, ou non, disposer. À un moment donné, il a été question de l'assouplissement quantitatif.
L'an dernier, vous vous êtes dit prêt à considérer la possibilité de taux d'intérêt négatifs, que certains pays sont en train de mettre à l'essai, dont la Suède, le Danemark ainsi que la zone euro. Un consensus semble se dégager à cet égard. J'aimerais entendre vos observations sur les résultats de ces expériences jusqu'à présent.
D'après ce que je comprends, on s'entend pour dire qu'à court terme, cette solution pourrait répondre aux besoins qu'on cherche à combler, mais qu'à moyen terme, elle perd de son efficacité. On commence à se rendre compte que cela provoque une perte d'efficacité sur le plan de la relance économique et des taux d'intérêt lorsque l'on cherche à obtenir les investissements nécessaires.
Pourriez-vous commenter ce qui s'est passé jusqu'à présent?
La panoplie d'outils dont vous parlez a été établie au beau milieu de la récession de 2008. L'automne dernier, nous avons entrepris une mise à jour de celle-ci à la lumière des expériences vécues depuis. Heureusement, la plupart de ces expériences n'ont pas eu lieu au Canada, mais dans d'autres pays plus durement frappés par la crise.
Dans notre contexte institutionnel, nous sommes maintenant d'avis que nos marchés continueront de fonctionner plus ou moins normalement avec des taux d'intérêt aussi bas que -0,5 %, alors qu'auparavant, un taux de 0 % — ou 0,25 % pour être précis — était considéré comme le plancher absolu. Nous avons donc une marge de manoeuvre de 75 points de base pour faire face aux problèmes à court terme, comme vous l'évoquez. Il est vrai que des distorsions pourraient se manifester avec le temps et que l'efficacité de la mesure s'amoindrirait avec le temps.
C'est dans ce contexte que nous songeons à l'assouplissement quantitatif, lequel a fait l'objet d'utilisations très intéressantes dans différentes économies, avec des résultats considérables sur leur rendement.
Nous ne nous prononçons pas sur les outils auxquels nous aurions recours si la situation se présentait. Nous nous contentons d'affirmer que, selon nos prédictions, il ne sera pas nécessaire d'avoir recours aux outils. En effet, les perspectives sont assez positives, mais si l'économie devait subir un grave revers, nous disposons d'une panoplie d'outils qui nous aideront à en atténuer les répercussions. L'ordre selon lequel les outils seront employés, ou leur combinaison, dépendra des circonstances et de notre évaluation de la situation.
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Ce dossier est en cours. Je n'aborderai pas les conclusions de ce travail, quoique certains documents aient déjà été publiés.
Il y a trois questions à régler, selon nous, avant le renouvellement de cette entente.
Premièrement, quel est l'indicateur le mieux indiqué pour mesurer l'inflation? Faut-il utiliser autre chose que l'indice des prix à la consommation, utilisé traditionnellement?
Deuxièmement, et c'est la question que vous soulevez, quel est le niveau adéquat? Est-ce 2 % ou un autre pourcentage?
Troisièmement, comment devrait-on intégrer les questions de stabilité financière dans ce cadre stratégique?
La question du niveau est sans doute la plus importante, étant donné les événements vécus ces dernières années, où les banques centrales, y compris la Banque du Canada, se sont approchées de la limite inférieure. Si les taux d'intérêt avaient été supérieurs par un point de pourcentage au début de la crise, nous aurions eu plus de marge de manoeuvre. Il s'agit là d'une considération sérieuse. Bien entendu, les événements de ce genre sont rarement survenus au cours de l'histoire, mais puisqu'ils se sont produits, il faut en tenir compte.
En revanche, maintenant que nous savons que les taux d'intérêt négatifs sont possibles, nous avons plus de latitude que nous le pensions. Ce sont ces deux côtés de la médaille que nous devons considérer. Quels sont les coûts et les bénéfices relatifs de cette souplesse accrue? Qu'est-ce que celle-ci nous permettra d'obtenir? La question est là, d'autant plus que nous disposons d'outils non conventionnels auxquels nous pourrons recourir en cas de besoin.
Bref, la question n'est toujours pas réglée. Nous en sommes à l'étape des discussions concrètes avec le ministère des Finances, que nous entamerons le mois prochain ou le suivant.
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Le Fonds monétaire international a récemment réduit légèrement sa prévision de croissance mondiale. L'accélération du développement de l'économie mondiale sera encore modeste. On observe une lenteur décourageante depuis quelques années et un manque général de performance.
À l'échelle de la planète, l'attention s'est portée récemment sur la Chine, parce qu'elle est devenue un grand moteur mondial de croissance. Les facteurs de croissance de son économie ont changé. C'est une transition importante et essentielle. La situation précédente n'était pas soutenable.
Par ailleurs, d'autres pays continuent d'avoir des difficultés. En Europe, par exemple, l'économie demeure faible, mais il y a des signes encourageants. On observe des progrès à cause des politiques monétaires et des investissements publics. Des programmes d'infrastructure sont mis en place. Même aux États-Unis, où la performance économique est solide en ce moment, la politique fiscale a été modifiée afin d'adopter des projets comme lehighway bill. C'est un projet d' infrastructures qui vient s'ajouter à d'autres.
Ces exemples, provenant de certains pays, m'encouragent un peu. Depuis quelques mois, la situation s'améliore.
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Effectivement, il y a des freins et ils sont répartis en deux catégories, à savoir les freins naturels et ceux qui ne le sont pas.
Parmi les freins naturels, il y a la croissance démographique qui ralentit en ce moment, et cela va continuer. Les baby-boomers des années 1940 et 1950 vont prendre leur retraite. C'est un phénomène global. Cette situation n'existe pas qu'au Canada. Dans le monde, on a réévalué le taux de croissance potentiel à 3,25 %, alors qu'il se chiffrait à environ 4 % il y a cinq ans. C'est un ralentissement assez important. Au Canada, le taux de croissance potentiel est de 1,5 %. La question qui se pose est la suivante: que va-t-on faire pour accroître ce taux?
Parmi les autres freins qui sont moins naturels, il y a les accords de libre-échange nationaux et internationaux de même que les possibilités de réglementation. Au G20, quand il est question des priorités gouvernementales, on parle de réformes structurelles. C'est la chose la plus importante. Les pays ont de longues listes de choses à faire pour accroître la croissance. Une croissance de 0,1 % ou de 0,2 % peut sembler ne pas être grand-chose, mais à long terme, c'est important.
Madame Wilkins, voulez-vous ajouter quelque chose à cet égard?
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Nous considérons le dollar canadien comme une variable à équilibre général. Je sais que cela sonne un peu technique, mais ce que je veux dire, c'est que pratiquement tout ce qui se passe dans l'économie mondiale a un effet sur la valeur de la monnaie. Voilà pourquoi la situation n'est jamais aussi simple que ce que vous décrivez.
Disons que le cours du pétrole chute et que la valeur du dollar canadien baisse. La valeur du dollar canadien n'a pas baissé par elle-même; il y a d'autres choses qui se passent en même temps. Nous savons que la baisse du prix du pétrole a un effet indéniablement négatif sur l'économie canadienne. La baisse de la valeur de notre dollar atténue l'impact, mais l'effet net sur notre économie est tout de même négatif.
Habituellement, les gens qui se posent des questions de ce genre se demandent: « Si le taux de change baisse ou augmente tout seul, est-ce que c'est bon ou mauvais? »
C'est toujours une lame à deux tranchants: c'est bon pour quelqu'un et mauvais pour quelqu'un d'autre. Il est préférable de ne pas voir les choses sous cet angle. Ces fluctuations permettent aux divers éléments de bouger et de se placer comme il se doit. Comme vous le dites, c'est le marché qui décide.
Une faible valeur du dollar favorise les exportations, ce qui est positif pour les entreprises exportatrices. Pour celles qui doivent importer des marchandises, c'est moins favorable. Il en coûte également plus cher d'investir dans les biens d'équipement, comme importer de la machinerie, par exemple. La faible valeur du dollar peut inciter les entreprises à remettre ce genre d'investissement à plus tard, alors que, si elle le faisait tout de suite, ce serait bon pour la croissance économique et la demande pour leurs produits augmenterait, ce qui est évidemment désirable. C'est différent pour chaque entreprise.
Évidemment, les ménages ressentent aussi les effets du taux de change, puisque le prix des importations, que ce soit le coût des vacances à l'étranger ou simplement le prix des fruits et des légumes, varie selon le taux de change.
C'est une question extrêmement complexe. J'espère que vous m'excuserez de ne pas vous donner une réponse simple.
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Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui, monsieur le gouverneur.
J'ai deux questions fondamentales à poser, et j'aimerais d'abord les situer dans leur contexte.
Comme nous le savons tous, le mandat de la Banque du Canada et des autres banques centrales est de minimiser l'inflation. Bien que la Banque ait tenté d'intervenir dans l'économie canadienne pour stimuler l'emprunt et l'investissement en maintenant de faibles taux d'intérêt, elle peut aussi intervenir lorsque l'économie semble aller trop bien, c'est-à-dire quand le taux de chômage est très faible et que les salaires risquent de monter et de faire grimper l'inflation.
Cela pourrait surprendre certains Canadiens, étant donné que la plupart des gens pensent que, si la Banque du Canada et le gouvernement interviennent dans le marché, c'est pour créer de meilleurs emplois et hausser les salaires, et non pour augmenter délibérément le taux de chômage et pour empêcher la bonification des salaires.
L'économiste Arthur Okun, qui était membre du Conseil économique du président des États-Unis, a écrit en 1976 que « la croisade contre l'inflation exige que l'on sacrifie la croissance et l'emploi ».
Joseph Stiglitz, récipiendaire du prix Nobel d'économie, a écrit:
Mettre l'accent sur l'inflation place les intérêts du porteur d'obligations à l'avant-scène. Imaginons à quel point la politique monétaire serait différente si la priorité était de maintenir la taux de chômage sous la barre des 5 % au lieu de maintenir le taux d'inflation à moins de 2 %.
Pour sa part l'économiste de Cambridge Ha-Joon Chang a écrit:
Un faible taux d'inflation peut signifier que l'argent que les travailleurs ont déjà gagné est mieux protégé, mais les politiques nécessaires pour générer ces revenus peuvent limiter ce qu'ils pourront gagner à l'avenir. Pourquoi? Parce que les politiques monétaires et fiscales strictes qui doivent être appliquées pour réduire l'inflation, surtout à un très bas niveau, sont également susceptibles de ralentir l'activité économique, ce qui, en retour, réduit la demande de main-d'oeuvre, augmente le taux de chômage et fait baisser les salaires. Donc, pour les travailleurs, un contrôle strict de l'inflation est une arme à deux tranchants: leur revenu gagné est mieux protégé, mais leur revenu futur est réduit. Seuls les retraités et ceux (notamment le secteur financier) qui tirent leur revenu d'actifs financiers au rendement fixe voient un faible taux d'inflation comme une bénédiction. Comme ils sont à l'extérieur du marché du travail, les politiques macroéconomiques strictes qui réduisent l'inflation n'ont aucun effet sur leurs futures possibilités d'emplois et leurs futurs salaires, tout en protégeant l'argent qu'ils ont déjà accumulé.
Il me semble que le mandat central de la Banque du Canada depuis les années 1970 a été de faire pencher la balance du côté des investisseurs, surtout des investisseurs établis, aux dépends de tous ceux qui font partie du marché du travail. L'adoption de cette politique a constitué un point tournant dans les pays tels que le Canada, le Royaume-Uni et les États-Unis; c'est à ce moment que, dans la majorité des cas, les revenus ont commencé à stagner et les revenus des PDG et des investisseurs ont commencé à grimper. On pourrait dire que ce changement a marqué la fin d'une époque de croissance inclusive après la Deuxième Guerre mondiale pendant laquelle tout le monde pouvait profiter des retombées de la croissance économique, et le début d'une nouvelle ère de concentration des bienfaits de la croissance économique dans les mains d'un petit nombre de personnes. Pendant des décennies, l'inflation n'était pas problématique, jusque dans les années 1970, lorsque la manipulation délibérée des marchés pétroliers par l'OPEP a fait grimper le taux d'inflation.
Ma question est la suivante: est-ce que la politique anti-inflationniste de la Banque du Canada et son objectif de maintenir un faible taux d'inflation vous amènent à intervenir dans l'économie pour sacrifier des travailleurs et faire baisser les salaires afin de protéger les investisseurs, conformément à votre mandat?
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Merci beaucoup. J'ai une question à poser.
Vous avez dit plus tôt qu'une partie de l'économie, à savoir l'économie de l'énergie, est à la baisse. Vous avez également affirmé, dans le Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada publié le 13 avril, que les investissements dans le secteur de l'énergie devraient diminuer de 60 % par rapport aux niveaux de 2014. J'étais autrefois producteur dans le secteur des produits de base, et je peux dire qu'il y a des hauts et de bas, ainsi que des vagues de prospérité et de déclin. C'est ce qui se passe aussi dans le secteur de l'énergie, qui est en plus soumis à de fortes pressions internationales.
Je me demande une chose cependant. C'est peut-être une question controversée, et il se peut que vous ne vouliez ou ne pouviez pas y répondre.
Avez-vous examiné quelle serait la situation si l'oléoduc Énergie Est ou d'autres oléoducs étaient construits? Oui, la construction exigerait un investissement, mais est-ce que cela aurait une incidence sur l'économie pétrolière en facilitant l'accès au marché ou, dans le cas de l'oléoduc Énergie Est, en transportant du pétrole jusqu'aux raffineries de l'Est du Canada? Pouvez-vous me dire si vous étudiez ces scénarios, ou si vous connaissez quelqu'un qui le fait?
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Je ne vais pas donner de détails sur les autres pays. Toutefois, l'idée générale est qu'il y a trois sortes de politiques qui devraient être utilisées conjointement dans cette situation.
La politique monétaire a un effet très stimulant à l'échelle internationale, et elle fonctionne presque à pleine capacité.
La politique financière est moins mise à contribution, sauf aux quelques endroits que j'ai mentionnés avant.
La troisième politique, qui est probablement la plus importante à ce stade, est celle consistant à apporter des changements structurels à l'économie afin de surmonter les obstacles à la croissance dont nous avons parlé plus tôt. Le Fonds monétaire international, ou FMI, et les gens autour de la table sont d'avis que ces trois politiques peuvent être utilisées conjointement.
Une politique structurelle par elle-même pourrait avoir des effets positifs à long terme et peut-être des effets négatifs à court terme. En la liant à une politique financière pour amortir le coup et donner un nouveau souffle à l'économie, cela permettrait de contrebalancer les effets négatifs, tout en s'assurant que les effets à long terme sont positifs. La politique monétaire vise à bien préparer le système, ainsi qu'à soutenir le processus.
L'emploi d'une seule de ces politiques n'est pas la voie à suivre. Il faut les utiliser conjointement. C'est là-dessus qu'ont porté nos discussions.
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Pour ce qui est de l'abaissement du potentiel et de la fourchette de potentiel, j'insiste pour dire que notre potentiel reflète avant tout notre diminution de l'investissement des entreprises, car l'investissement des entreprises qui y demeure représente ce que nous appelons un approfondissement du capital, ce qui signifie que la productivité de la main-d'oeuvre s'améliore.
Cela dit, la diminution de l'investissement est principalement dans le secteur de l'énergie. Ainsi, comme je le disais tout à l'heure, nous traversons une période de destruction, où les éléments négatifs du secteur de l'énergie l'emportent sur les éléments positifs du reste de l'économie. Vous remarquerez que ces fourchettes demeurent basses un certain temps, puis recommencent à augmenter à mesure que progresse la transition. Vous constaterez que la croissance de la production potentielle, cette fourchette, augmente à compter de 2018 jusqu'en 2020, soit la fin de notre estimation.
Je crois qu'un autre facteur ici est simplement la main-d'oeuvre. Plus la main-d'oeuvre compte de gens, plus cela ajoute au potentiel.
Nous avons constaté que beaucoup de gens sont découragés et ne font plus partie de la population active. Au cours de la dernière année, nous avons vu beaucoup de gens dans la force de l'âge réintégrer la population active. Il est possible que d'autres feront de même, en particulier les jeunes qui ont quitté la population active après la crise et au cours des deux dernières années.
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D'accord. Je serai bref, monsieur le président, car nous pourrions en parler longtemps.
Je vais commencer par les faits. Premièrement, les estimations que vous mentionnez sont l'effet du budget sur les perspectives, sur les taux de croissance, alors que l'effet décrit dans le budget et dans la note de bas de page no 8 du rapport sur la politique monétaire ou quelque part dans ces environs est l'effet sur le PIB, soit 0,5 % la première année et 1,0 % la deuxième année. Pour ce qui est du taux de croissance, il est d'environ 0,5 % puis d'un autre 0,5 %. Voilà qui concilie les chiffres dont vous avez parlé. Ce sont tous les mêmes. Il s'agit du niveau par opposition aux taux de croissance.
Deuxièmement, j'ai déjà dit que les infrastructures favorisent la croissance. À mon avis, les infrastructures peuvent être un concept flou. Je suppose qu'il s'agit de n'importe quel genre d'investissement qui peut être lié à une future croissance économique potentielle. Par conséquent, les exemples varient grandement. Les plus évidents sont les transports, c'est-à-dire les ponts, les trains à grande vitesse, les chemins de fer ou les aéroports, mais il y a aussi les garderies, qui permettent aux parents de réintégrer la population active, ce qui nous donne plus de potentiel. Tous ces investissements peuvent ajouter à notre croissance potentielle et sont, par conséquent, positifs.
Le troisième pilier, les réformes structurelles, ce sont les choses qui favorisent la mobilité de la main-d'oeuvre entre les provinces et qui sont en lien avec le commerce interprovincial. La mobilité de la main-d'oeuvre n'est pas parfaite. Elle n'a pas nécessairement contribué non plus. Des politiques pourraient accélérer cela alors que nous tentons de nous adapter aux changements.
Bien entendu, de manière plus générale, comme nous en avons discuté plus tôt, le libre-échange interprovincial aiderait notre économie à s'adapter et à rouler beaucoup plus efficacement.
Ce sont simplement quelques idées parmi tant d'autres, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président. C'est la première fois que vous m'appelez M. Fréchette, alors j'en suis bien heureux.
[Français]
Monsieur le président, messieurs les vice-présidents, madame et messieurs membres du comité, je vous remercie à nouveau de nous avoir invités à discuter avec vous de nos Perspectives économiques et financières d'avril 2016, qui ont été publiées aujourd'hui.
Comme vous l'avez déjà mentionné, je suis accompagné de plusieurs membres de mon équipe. Ils seront d'ailleurs très heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
Depuis notre rapport de novembre 2015, les perspectives de l'économie mondiale ont continué de se détériorer et le prix des produits de base à moyen terme a été revu à la baisse. Malgré cette faiblesse des perspectives externes, nous nous attendons à ce que les mesures financières du budget de 2016, combinées à la politique d'accompagnement monétaire en place, aident à soutenir l'économie canadienne.
Nous prévoyons que la croissance du PIB réel remontera à 1,8 % en 2016, puis passera à 2,5 % en 2017. La croissance économique devrait ensuite ralentir de 2018 à 2020, en raison de l'arrivée à échéance des mesures budgétaires et de la normalisation de la politique monétaire.
Chaque année de 2016 à 2020, le PIB nominal, l'indicateur le plus large de l'assiette fiscale, devrait être presque de 20 milliards de dollars en deçà, en moyenne, des prévisions de notre rapport de novembre. Cependant, notre projection du PIB nominal est, en moyenne, de 40 milliards de dollars supérieure, chaque année de 2016 à 2020, à l'hypothèse de planification retenue par le gouvernement dans le budget de 2016. En 2016 et en 2017, l'écart atteint presque les 50 milliards de dollars.
Dans nos perspectives budgétaires de novembre 2015, au début de la 42e législature, nous avions adopté une hypothèse de planification indépendante fondée sur le statu quo. Ces perspectives ont été mises à jour en fonction des mesures annoncées dans le budget de 2016 ou avant celui-ci.
[Français]
Nous estimons qu'un léger excédent a été enregistré en 2015-2016 et nous nous attendons à un déficit budgétaire de 20,5 milliards de dollars en 2016-2017, qui sera principalement attribuable aux nouvelles mesures annoncées depuis la Mise à jour économique de l'automne.
Le déficit devrait ensuite atteindre 24,2 milliards de dollars en 2017-2018 en raison du passage, sur une période de sept ans, au mécanisme d'équilibre du taux de cotisation à l'assurance-emploi et d'une augmentation des charges de programmes directes.
Pendant le reste de la période de projection, le déficit devrait redescendre à 12,4 milliards de dollars étant donné que le gouvernement prévoit que les charges de programmes directes, particulièrement les dépenses de fonctionnement des ministères, resteront à un niveau fixe entre 2017-2018 et 2019-2020.
Nous prévoyons, pour la période allant de 2016-2017 à 2020-2021, des déficits budgétaires totalisant en moyenne 4,5 milliards de dollars de moins que celui prévu dans le Budget de 2016. Cet écart moyen n'est pas loin de la somme de 6 milliards de dollars correspondant à l'impact financier du rajustement apporté par le gouvernement par rapport à la prévision du secteur privé pour le PIB nominal.
[Traduction]
Dans le budget de 2016, le gouvernement énonce sa volonté de rétablir l'équilibre budgétaire et de réduire le ratio de la dette fédérale au PIB d'ici 2020-2021. Cependant, afin d'évaluer sur une période prolongée la viabilité des finances du gouvernement, nous projetons à long terme, bien au-delà de 2020-2021, la trajectoire de la dette fédérale relative au PIB. Notre projection révèle que, si la politique actuelle est maintenue, le ratio de la dette fédérale au PIB devrait diminuer continuellement au cours des prochaines décennies. La structure financière sous-jacente au budget de 2016 est donc viable à long terme.
Nous serions ravis de répondre à vos questions concernant nos perspectives économiques et financières ou tout autre sujet pertinent, notamment le projet de loi ou, encore une fois, notre mandat actuel ou futur.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être ici parmi nous, mais également d'accomplir ce travail qui est extrêmement utile.
J'aimerais commencer par quelques remarques, notamment pour répondre aux propos de M. MacKinnon.
Je qualifierais de « Paul Martin 2.0 » la façon actuelle d'approcher la politique d'élaboration budgétaire. C'est sur ce point que nous pouvons être d'accord. En effet, cela me rappelle de plus en plus les budgets qui étaient déposés par cet ex-ministre des Finances.
On ne parle pas ici de prudence, mais de prévisions exagérément éloignées de ce qui peut être prévu. Paul Martin arrivait à des prévisions de déficit en gonflant les dépenses fiscales de façon exagérée. Je parle ici de l'ensemble des crédits d'impôt et des revenus que le gouvernement consent par l'entremise de mesures fiscales.
Dans ce cas-ci, on procède d'une manière différente: on gonfle ou on diminue les estimations. Comme vous l'avez vous-même noté, on parle d'une différence de 40 milliards de dollars par année dans le cas du PIB nominal prévu. On atteint même presque 50 milliards de dollars par année en 2016-2017. On en revient donc à la même situation. On ne parle plus présentement de prudence. Il s'agit ici d'une opinion personnelle, mais je pense que nous sommes en présence d'une stratégie délibérée visant à modifier les attentes des gens. On annonce un déficit exagéré qui incite à la prudence, mais en définitive, le résultat à la fin de l'année est passablement meilleur que celui qui était annoncé au départ. Les gens sont alors soulagés. En outre, cela donne une bonne image et une bonne conscience au gouvernement.
Lorsqu'on n'est pas assez prudents, c'est problématique, et lorsqu'on démontre trop de prudence, cela devient une stratégie politique délibérée. Comme je connais votre rôle, je ne vous demanderai pas de commenter ces questions. Par contre, étant donné que vous êtes tout de même en contact avec le ministère des Finances, j'aimerais savoir d'où provient cette estimation extrêmement conservatrice du PIB nominal.
Par ailleurs, le fonds de prévoyance se chiffrait par le passé à 3 milliards de dollars. Ce montant a été diminué à 1 milliard de dollars pendant le règne des conservateurs. Or on le gonfle maintenant à 6 milliards de dollars. En vous basant sur vos conversations et sur les informations que vous recevez aux fins de votre analyse, pourriez-vous me dire d'où proviennent ces chiffres?
J'ai eu l'occasion de poser des questions au , M. Morneau, mais je n'ai jamais obtenu de réponse à ce sujet. Ces chiffres semblent venir des nuages.
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Je vous remercie de la question.
Dans notre cas, nous ne disons pas que c'est délibéré, mais que cela est excessif. Je comprends votre situation. Comme je l'ai dit auparavant, cela créé des attentes. Il est clair que, si on est excessif en parlant d'une croissance moins importante du PIB pour les cinq prochaines années, cela peut créer des attentes à la baisse. Donc, avec les résultats pouvant être obtenus, on peut augmenter les attentes.
Pour ce qui est des informations dont nous disposons, nous avons publié il y a deux semaines, soit peu de temps après la publication du Budget, un tableau intéressant à ce sujet. En effet, on y montrait quelles étaient les projections du secteur privé sur une période de cinq ans en ce qui a trait au PIB nominal. Il y a eu toute une confusion à ce sujet. On parlait à la fois de surestimation et de sous-estimation. Pour notre part, nous disions que la première et la deuxième année de leurs projections avaient continuellement été sous-estimées au cours des années, soit pour 40 % du temps. C'est vraiment à prendre en considération.
Je vais maintenant demander à M. Moskari de prendre le relais.
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Je vous remercie de la question sur la transparence. C'est une bonne question. J'aimerais prendre 30 secondes pour expliquer la situation qu'on a vécue relativement à la transparence au cours de cette période.
Lorsqu'on a vu que le budget ne contenait que deux ans de planification et non pas les cinq ans comme c'est normalement le cas, nous avons été surpris. Nous ne savions pas que cela allait arriver.
Le deuxième élément de surprise a été agréable parce que nous avons demandé les chiffres et que nous avons les avons obtenus pour cinq ans. La transparence devenait beaucoup plus réelle qu'auparavant.
Le troisième élément de surprise a été de se faire dire, lorsque nous avons reçu ces chiffres quelques jours plus tard, que nous ne pouvions pas les utiliser. Nous sommes donc passés par un certain cycle, à savoir des surprises agréables, des moins agréables et, finalement, à la suite d'une demande officielle, l'obtention des données.
Au départ, il y a peut-être eu un manque de transparence. Par la suite, le gouvernement s'est rendu compte qu'il manquait de transparence. Le fait que nous ayons obtenu les chiffres nous satisfait parce que cela nous permet d'informer le Parlement sur l'état de la planification pour cinq ans.
Cela étant dit, un peu tout le monde doit peut-être apprendre quelque chose relativement à la transparence, qu'il s'agisse du gouvernement ou qu'il s'agisse de tous ceux qui font de la planification financière. Au cours des prochains mois, nous verrons dans les mises à jour et dans les autres documents si cet élément de surprise sera éliminé et si le directeur parlementaire du budget sera toujours heureux d'avoir les dits chiffres.
M. Matier peut répondre immédiatement à votre question précédente, si vous le souhaitez.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir brièvement à ce que M. Caron a dit à propos du fait qu'il pourrait s'agir de la version 2.0 de la politique budgétaire de Paul Martin. Si le Canada est sur le point d'entrer dans une deuxième ère budgétaire comme celle qui a été présidée par Paul Martin, et si nous assistons, au cours des prochaines années, à une forte croissance économique et à d'autres bons résultats comme le renforcement du Régime de pensions du Canada et la collaboration avec les provinces dans un certain nombre de dossiers, alors je pense que c'est une excellente nouvelle pour le Canada et pour ma circonscription, Vaughan—Woodbridge. C'est un résultat que j'accueillerais avec plaisir. Merci, monsieur Caron.
En ce qui concerne la prudence, dans une ancienne vie, j'ai été analyste de titres obligataires, et mon travail consistait notamment à analyser les risques extrêmes et les possibilités de révision à la baisse. Si on pense à ce qui s'est passé au cours de l'année dernière ou des 18 à 24 derniers mois, avec l'évolution des prix des produits de base, l'économie de la Chine qui continue de passer d'une économie industrielle à une économie de consommation, et les difficultés causées par l'instabilité des marchés émergents, je crois que le budget de 2016 s'appuie sur une certaine prudence, notamment avec l'ajustement à la baisse des prévisions à l'égard du PIB nominal de 40 milliards de dollars. À mon avis, c'est un budget très prudent pour les contribuables. C'est une approche prudente pour l'économie et qui tient compte de l'ensemble des facteurs, mais aussi des problèmes d'instabilité actuels. Je tenais à le souligner, et je serais ravi d'entendre votre avis à ce sujet.
Je tenais aussi, encore une fois, à demander à M. Cameron ce qu'il pense de l'ajustement de l'âge d'admissibilité à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti, qui est ramené de 67 à 65 ans. Pouvez-vous simplement rappeler ce que cela représente comme pourcentage du PIB, car je pense qu'il est important de le souligner?
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Merci, monsieur le président.
Je remercie M. Fréchette et tous ses collègues de leur présence parmi nous.
Vous savez que nous respectons beaucoup votre travail et que nous sommes heureux que vous soyez ici aujourd'hui. Je peux vous assurer que le travail que vous faites, à savoir d'informer les Canadiens et les parlementaires, est important pour nous. Je peux vous assurer, monsieur Fréchette, de notre entière collaboration maintenant et à l'avenir pour tout ce que vous faites.
J'aimerais revenir sur la question de la prudence. Cette question est très importante. Avant vous, nous avons rencontré le gouverneur de la Banque du Canada qui nous parlait de la volatilité de l'économie mondiale. On sait que l'économie canadienne correspond à environ 2 % de l'économie mondiale. On a analysé les risques importants au sein de l'économie mondiale. On a parlé de la Chine et des États-Unis. On pourrait aussi parler du Brésil. Le Fonds monétaire international a récemment réduit ses prévisions de croissance économique pour le Canada.
Comment avez-vous intégré les risques macroéconomiques de l'économie mondiale à vos projections? Il est important de regarder ce qui se passe dans le monde. L'ensemble des acteurs économiques mondiaux s'entendent pour dire qu'il y a beaucoup de volatilité. Mme Lagarde parlait d'une ère de croissance anémique. La prudence est donc de mise selon nous.
Parlez-nous des mesures macroéconomiques que vous entrevoyez ou des risques de volatilité de l'économie mondiale dont vous avez tenu compte quand vous avez fait vos projections.
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Dans nos prévisions, les principaux facteurs externes dont nous tenons compte sont l'économie des États-Unis, les prix des produits de base et le reste de l'économie mondiale, que nous étudions par l'entremise du Fonds monétaire international.
Récemment, nous avons considérablement revu à la baisse notre prévision de la croissance réelle du PIB des États-Unis, qui est passée d'un taux de 2,6 % à des taux de 2,1 % et de 2,3 %. Nous avons aussi revu considérablement à la baisse les prévisions concernant les prix des produits de base afin de tenir compte du ralentissement mondial.
Ce sont là les principaux facteurs macroéconomiques mondiaux qui touchent l'économie canadienne.
Par ailleurs, nous avons une politique financière qui prévoit une hausse globale de la demande au sein de l'économie, et une politique monétaire qui maintient le taux d'intérêt actuel pour composer avec cette situation. C'est une approche compensatoire qui stimule l'économie.
Pour ce qui est de la prudence, nous appuyons nos prévisions sur ce que nous appelons un risque équilibré, car nous croyons que les prévisions à la hausse et à la baisse sont plus ou moins équilibrées. C'est ce que doit faire tout prévisionniste qui souhaite faire des prévisions rigoureuses. Si on veut réduire au minimum la marge d'erreur, il faut tenir compte de l'ensemble des facteurs de risque.
Une approche prévisionnelle prudente a ceci de différent qu'elle vise à assurer une probabilité élevée d'atteindre ou de surpasser un objectif.
Ces deux concepts peuvent sembler identiques, et l'approche peut sembler prudente dans les deux cas, mais nous voyons cela comme deux approches prévisionnelles distinctes.
En nous fondant sur le budget actuel, la mise à jour de l'automne et le document d'information de février, nous croyons que le gouvernement a voulu ajuster les prévisions pour équilibrer les risques en fonction des prévisions du secteur privé, et qu'il ne cherche pas tant à adopter une approche budgétaire prudente. Si le gouvernement a prévu cet ajustement pour accroître le niveau de prudence ou pour assurer une probabilité élevée d'atteindre son objectif, alors il peut faire preuve de transparence en disant qu'il prend une décision prudente. Selon mon interprétation, et en me fondant sur une recherche de mots clés dans le document budgétaire, je dirais que le mot « prudent » est présent, mais pas dans ce contexte.
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En un mot, je dirais que nous ne le savons pas. Il est difficile de le savoir en se fondant sur ce que les gens...
Nous avons des données historiques qui donnent un portrait de la situation lorsque les gens pouvaient mettre 5 000 $ ou 5 500 $ de côté, mais nous n'avons pas accès à des données qui permettent de déterminer l'effet de la décision de doubler le plafond de cotisation pour le porter à 11 000 $ par année.
Nous pouvons cependant citer les données que nous avons publiées l'année dernière à propos du programme du CELI. Ce que nous avons observé, en particulier pendant les premières années du programme, c'est que des gens ont transféré des richesses accumulées de leurs comptes qui n'étaient pas à l'abri de l'impôt à leur CELI.
Comme nous l'avons souligné dans ce document, au fil du temps, on s'attendrait à ce que ces sources de richesses qui, auparavant, n'étaient pas à l'abri de l'impôt, s'épuisent tranquillement, et à ce que les montants des cotisations et le taux de contribution maximale commencent à diminuer.